1 Ces surnoms leur sont donnés par Dumont Pigalle, un des patriotes exilé à Paris, GS, II, p 647. Nous verrons tout au long de cet ouvrage ce qu’il en est de l’ironie et de la dérision batave, notamment chez les journalistes.
2 P Geyl, La Révolution batave, 1783-1798, Paris, 1971, p 190-196. S. Schama, op cit., p 178-190.
3 Sur la perception des Français de l’époque, cf. mon article « Les Français en Batavie. Des relations diplomatiques machiavéliques », in A. Jourdan et J. Leerssen, Remous révolutionnaires. République batave, armée française, Amsterdam, 1996, p 91-117. Mémoires du général Lejeune, Édition du Grenadier, 2001, p 15.
4 Ces deux provinces devaient participer aux quotas annuels mais n’étaient pas représentées à La Haye. Le Brabant, en tant que pays de la Généralité, comme le Limbourg et la Flandre néerlandaise, n’avaient pas d’États provinciaux et dépendaient directement des États généraux. On comprendra qu’elles aient été moins hostiles à l’unification. P Brood, P Nieuwland et L. Zoodsma, Homines Novi. De eerste volksvertegenwoordigers van 1795, Amsterdam, 1993, p 315. Voir aussi Th. Poell, The Democratic Paradox, thèse de doctorat d’Utrecht, s.l., 2007, p 77-78.
5 La société De Uitkijk avait promis 800 000 florins aux radicaux et à ceux qui les aideraient. Eyckenbroek aurait ainsi reçu 200 000 florins à remettre pour une part à Barras. Le reste serait remis en marchandises (draps et eaux de vie) qui provenaient des fabriques de Vreede et de Eyckenbroek. GS, II, p 594-619 (Mémoire de Van Langen).
6 GS, II, p 581-582. Eberstein écrit ainsi aux radicaux que l’article 3, celui sur le veto et le suivant ont été beaucoup critiqués à Paris. Mais Delacroix lui-même prend pour bases les « excellents principes du manifeste des 43 » et en élimine ce qu’il appelle « la lie ultra-révolutionnaire », L. de Gou, De Staatsregeling van 1798. Bronnen voor de totstandkoming, La Haye, 1990, 2 vol. Sera abrégé De Gou, 1798, I, p 611.
7 Delacroix en parle à Talleyrand sous le nom d’« espèce de symbole ». De Gou, 1798, II, p 380. Sur les manœuvres de Ducange, Voir notre article, « Le rôle des agents français dans la constitution batave de 1798 », AHRF, I, 2008, p 99-119.
8 Voir le dernier chapitre sur les manigances du gouvernement de La Haye et de ses agents pour faire accepter la Constitution.
9 Cf. la lettre de Lestevenon à Valckenaer, de Gou, 1798, II, p 412. Voir aussi Th. Poell, op cit., p 96, qui compte 75 députés maintenus.
10 De Gou, 1798, I, 621-622. De fait, ce que prônent les sociétés populaires radicales, c’est la spoliation des régents de 1787. Voir le dernier chapitre. Sur la Frise où dominent les radicaux et où règnerait la « terreur » – qui ne fera du reste que deux victimes orangistes, coupables de rébellion et de violences, J. Kuiper, op cit., p 299-429.
11 Dans l’ensemble, le peuple néerlandais qui fréquentait les sociétés populaires était pour la Constitution., mais ne se retrouvait évidemment pas dans l’article 18 de la Déclaration qui restreignait le pouvoir des sociétés populaires. L’opposition réelle se trouvait du côté des réformés, des corporations et des anciennes élites - dont une grande part s’était vue privée du droit de suffrage.
12 Robert Collot d’Escury, receveur général des ressources maritimes, était le gendre de Bicker, régent influent et ci-devant patriote réfugié en France. Or, Bicker venait d’être emprisonné par les radicaux de janvier 1798. J. Rosendaal, op cit., p 24-25 et p 75-76.
13 J. Fritschy, De patriotten en de financiën van de Bataafse Republiek, La Haye, 1988, p 211-217. La France menaçait de mettre fin à l’indépendance batave si l’alliée ne payait pas les 100 millions exigés. Or, la Hollande ne pouvait trouver les sommes nécessaires ailleurs que chez les financiers, banquiers, négociants, qui n’étaient pas forcément patriotes et surtout pas du parti radical de Vreede. Véritable dilemme, d’autant plus que c’était là la politique financière du pays depuis la révolte du xvie siècle ! En 1793-94, le stadhouder lui non plus n’avait su trouver des fonds, car il menait une politique néfaste aux régents et aux marchands. On comprend mieux alors l’obsession de Gogel à propos d’une fiscalité nationale efficace. Voir J.-C. Riley, International Government Finance and the Amsterdam Capital Market, 1740-1815, Cambridge, 1980.
14 Voir le mémoire de Van Langen, GS., II, p 594-619. Van Langen avoue qu’ils ont emprunté un million à l’ancienne compagnie des Indes orientales, elle aussi endettée et épuisée par ailleurs – ce qui n’a pu qu’aliéner du gouvernement radical Wiselius, qui en était un des administrateurs.
15 Dagverhaal du 30 mars 1798, p 343-344 et décret du 31, Decretenregister, p 2-4. NNJB, 1798, I, p 229-233. Gogel lui aussi aurait souhaité intervenir et interdire les investissements à l’étranger et la fuite de capitaux, mais se refusait à ce que l’on terrifie les régents et leur descendance. GS, II, p 785.
16 GS, II, p 762 (lettre à Delacroix, non datée). À la même date, Gogel est en lutte contre Amsterdam, qui se refuse à ce que deux rapports soient établis sur les finances de la ville : un par la municipalité ; l’autre par la banque de prêt. La municipalité est vexée par ce qu’elle voit comme une défiance de la part du ministre et comme une enfreinte à sa souveraineté.
17 AE, 599, lettres du 14 au 18 prairial an VI.
18 Talleyrand lui écrivait énigmatiquement : « le sort de la Hollande est entre vos mains ». AE, 599. Lettre du 23 prairial an VI.
19 Une part de vérité seulement, car Blauw est particulièrement monté contre le Directoire parisien et contre Delacroix. Pour l’autre, ce sont donc les rivalités intérieures et les problèmes avec le port de Flessingue qui ont joué. GS, II, p 633-693. Blauw par la suite semblerait avoir tenté de sauver les radicaux, mais à force d’intrigues, il s’aliène le Directoire français et le gouvernement du 12 juin. AE, 598, lettre de Daendels à Rouget et lettre de Pichon à Talleyrand du 3 messidor an VI.
20 La République batave sait trouver de l’argent quand l’enjeu en vaut la peine. Ainsi régents, marchands, négociants et financiers d’Amsterdam et de Rotterdam proposent une grosse somme à Schimmelpenninck, pour qu’il demeure ambassadeur à Paris et défendent leurs intérêts. De Wit, op cit., p 174-177. Amsterdam lui offre 55 000 florins ; Rotterdam, 19 000 ; l’État lui en concède 15 000 et 18 000, de même qu’une rémunération de 25 florins par jour. En ce mois de septembre 1798, Schimmelpenninck dispose donc de la coquette somme de 107 000 florins, auxquels s’ajoute un salaire annuel de 45 250. Notons bien qu’un ouvrier en gagne à peine 300. GS, II, 475-486.
21 Dans sa justification, Fijnje conteste l’illégalisme du gouvernement radical, mais oublie que le décret du 4 mai a été proclamé après l’acceptation de la constitution et que les pétitions contre le décret n’avaient pas eu d’effet immédiat ; que les adresses d’adhésion étaient faites sur commande, etc. Pour le mémoire de Fijnje retrouvé dans les archives du diplomate et patriote italien Galdi, mes remerciements à Antonio De Francesco.
22 Voir le dernier chapitre sur ces conspirations, réelles mais de peu d’ampleur.
23 NNJB, 1798, II, p 534-538. Sur la constitution, De Gou, 1798, II, p 105-162. Article 29 : « Nul ne peut être accusé ou arrêté qu’en vertu de la loi, dans les cas et selon le mode déterminé par la loi. Nul ne peut être jugé sans avoir été au préalable légalement cité et mis à portée d’employer pour sa défense tous les moyens autorisés par la loi… » et article 30 : « Toute rigueur envers les détenus autre que celle déterminé par la loi ainsi que tout retard arbitraire de leur mise en jugement ou de l’exécution de la sentence prononcé contre eux, sont criminels. »
24 Voir le dernier chapitre sur le radicalisme populaire à Amsterdam.
25 Jaarboek der Bataafsche Republiek, Amsterdam, 1798, XIII, p 97-103. En dépit de ce qu’affirme Fijnje sur le peu de mesures qui auraient été rapportées après le 12 juin, le Jaarboek à lui seul en mentionne trois, dont le décret du 31 mars ; celui du 12 avril (répression contre les députés contestataires) et du 5 juin (acte d’admission dans les corporations).
26 GS, III, 515-520 ; 525 ; 528. Gogel suggère d’employer les radicaux Fijnje, Ockerse, Duirvelt et Croné. Wiselius se plaint que les modérés soient surtout préoccupés par des bagatelles et en appelle aux ultra-révolutionnaires. Bref, les « gens comme il faut » ne seraient pas de vrais patriotes. Quant à Schimmelpenninck, il verrait bien le retour des radicaux de talent. Il dit même partager les principes du 22 janvier. Il est donc difficile de voir en lui un modéré, d’autant qu’il est un fervent adepte du gouvernement américain. Pour une vision plus nuancée de Schimmelpenninck, N.C.F. van Sas, De metamorfose van Nederland, op cit., p 293-302 et S. Klein, « Republikanisme en patriottisme. Rutger Jan Schimmelpenninck en de klassieke wortels van het republikeinse denken (1784-1785) », TvG, 106, 1993, p 179-207.
27 G.S., III, p 571-577 ; p 597.
28 Que ce soit Gogel, Goldberg, Wiselius ou Schimmelpenninck, Besier, LaPierre, Pijman et Spoors, voire Valckenaer.
29 En 1799, les premiers pourparlers ont lieu en vue de la neutralité. La Hollande aurait souhaité se soustraire à l’alliance offensive et défensive que stipulait le traité de La Haye. La Prusse avait accepté d’être intermédiaire, à condition que soit réintégré dans ses fonctions le prince d’Orange. Il eût fallu que Paris soit d’accord, ce qui évidemment était impensable.
30 Le 2 décembre 1799, Schimmelpenninck écrivait « qu’Orange aille chercher ailleurs son gagne-pain ». GS, III, p 581. De Gou, 1801, p XIV-XVIII et p 513-514 (Lettre de Talleyrand, 6 février 1801).
31 NA, 59. Lettre de Brantsen du 30 septembre 1801. De Wit, op cit., p 216-230. Notons que les orangistes sont et se veulent tout autant patriotes que les « patriotes ».
32 De Gou, 1805-1806, p IX-XIX et p 37-49 (Constitution de 1805).
33 Cf. notre article, « Staats-en natievorming in de tijd van Lodewijk Napoleon. Nederland als “objet de désir” », De Negentiende Eeuw, numéro spécial sur Le Royaume de Hollande, 1806-1810, 30, 2006, p 132-146.
34 A.-J. Czous-Tornare, Quand Napoléon Bonaparte recréa la Suisse, Société des Études robespierristes, n° 7, 2005.
35 Voir la correspondance secrète du ministre de la Justice (C. van Maanen) et de Louis. NA, Archives Cornelis van Maanen, 32. Van Maanen fait parvenir au roi des bulletins quasi-quotidiens sur les rumeurs ; les publications ou les mauvais discours ; etc. Un exemple éloquent du comportement mimétique de Louis, comme on le verra dans d’autres secteurs.
36 J. Joor, De Adelaar en het lam, op cit., p 283-316 et p 463.
37 Limburg-Brouwer, op cit., p 175-180.
38 W. Frijhoff, “Popular Culture and revolution in the Netherlands. A political and social issue”, VB. Volkskundig Bulletin, I, 17, 1991, p 1-14.
39 E. de Waresquiel, L’Histoire à rebrousse-poi. Les élites, la restauration, la révolution, Fayard, 2005.
40 Le grand libéral du xixe siècle, responsable de la Constitution de 1848, J. Thorbecke en convient sans problème et a consacré plusieurs articles à ses précurseurs. Historische schetsen, Den Haag, 1872.
41 Durant les Cent-Jours, Napoléon lui vole définitivement la vedette, en se donnant pour l’homme de la nation. De là date également le stéréotype des Bourbons « rentrés dans les fourgons de l’étranger ». Cf. Waresquiel, op cit., p 159-171.
42 Notons bien qu’en ce qui concerne la République batave, nos sources sont inédites et fondées soit sur des sources primaires publiées, soit sur des documents d’archives – NA (Nationaal Archief Den Haag) et GAA (Gemeente Archief Amsterdam). Il en va de même pour plusieurs points de la Révolution française, puisque la confrontation des trois révolutions incite à renouveler les questionnements : sur les droits ; la constitution ; la justice ; l’éducation.
43 Célérité qui pourrait bien être due justement à l’émulation qu’engendrent les modèles étrangers. Sur les déclarations des droits aux Pays-Bas, W.J. Goslinga, De rechten van de mensch en burger. Een overzicht der Nederlandsche geschriften en verklaringen, La Haye, 1936. F.H. van den Burg et H. Boels, Tweehonderd jaar Rechten van de Mens in Nederland, Leyde, 1994. N. van Sas, “Mensenrechten in 1795”, Kleio, 37, 9-10, p 10-14.
44 Sur treize États, seuls six ont fait rapidement précéder leur constitution d’une déclaration des droits. Cinq avaient achevé la tâche en 1776 ; le Massachusetts en 1780. Les autres Etats suivront, excepté le Rhode Island et le Connecticut.
45 Sur ces textes, voir S. Rials, op cit. Rials reproduit les diverses déclarations proclamées avant 1789, excepté évidemment celles de Hollande, qui lui sont inconnues. On en trouvera des extraits en français sur mon site à l’Université d’Amsterdam (section Documents) : http ://home.medewerker. uva.nl/a.r.m.jourdan
46 Pour un aperçu nuancé de cette notion, l’article de K. Haakonssen, “From natural law to the rights of man : a European perspective on American debates”, in A Culture of Rights. The Bill of Rights in philosophy, politics and law – 1791-1991, (éd. M.J. Lacey et K. Haakonssen), Cambridge, 1991, p 19-61.
47 Sur Locke, G. Wood, La création de la République américaine, p 333-335. Rousseau, Du Contrat social, GF Flammarion, 1966, p 50-52. Pour de plus amples détails sur Wolff et Pufendorf, et notamment sur les Suisses Vattel, Burlamaqui et Barbeyrac, A. Renaut, Lumières et Romantisme, p 53-92, entre autres p 67. Contre la précédence des droits naturels, cf. les philosophes écossais, de même que Fichte et Kant, qui la récusent. Pour eux, l’homme de nature n’existe pas ; c’est une fiction. Il n’y a d’homme qu’en société.
48 G. Wood, La Création de la République américaine., p 324-25 ; p 320-322 ; p 341. En Caroline du Sud et dans le New Jersey, les droits sont mentionnés à l’intérieur de la constitution. D.S.Lutz, “The Theory of Consent in the Early State Constitutions”, in Publius/Spring, Washington, 1979, p 11-42. S. Wilentz en compte sept, op cit., p 28.
49 M. Gauchet, La Révolution des droits de l’homme, Paris, 1989, p IX et p 36-59.
50 M. Gauchet, « Droits de l’homme », in Dictionnaire critique de la Révolution française, (éd. F. Furet et M. Ozouf), Champs Flammarion, 1992, p 125.
51 C’est le cas de Goslinga et de Van den Burg, op cit. Mais aucun des deux n’analyse en détail les déclarations en question. On trouvera le texte original traduit en français sur mon site mentionné plus haut.
52 Droit qu’avaient en principe les citoyens néerlandais depuis 1579 et qui avait été revendiqué dans les projets constitutionnels ou déclaratoires des années 1780. Voir N. van Sas, “Mensenrechten in 1795”, op cit., p 12.
53 En réalité, l’ordre des articles n’est pas tout à fait logique : ni dans la déclaration de 1791, ni dans celle de la Hollande. Les articles marient ainsi droits naturels et distinctions sociales ; ou bien éloignent des articles portant sur des principes proches ou semblables. Ainsi dans le texte hollandais, les libertés sont évoquées à deux reprises : au début du texte (articles III, IV et V) et au milieu (articles IX et X) ; et les protections individuelles se trouvent aux articles IV, XVI et XVII. Quant au texte français de 1791, on sait qu’il aurait dû être revu et corrigé et qu’en 1789, il n’était pas considéré comme achevé. De là aussi les ambiguïtés.
54 En Hollande, la souveraineté réside dans le peuple tout entier – et non dans la nation, comme en 1791. Mais cette conviction n’est pas due à la constitution de 1793. On a vu que dès les années 1780, les patriotes privilégient le « gouvernement populaire par représentation ». Notons qu’en 1791, il n’était pas prévu que le peuple français modifie sa constitution. Par contre, l’article XXVIII de la déclaration de 1793 accordait ce droit, mais la procédure était bien plus complexe que dans le projet Condorcet et par suite, illusoire.
55 Notons qu’en Hollande, le terme « nation » est beaucoup moins fréquent que celui de peuple ou celui de patrie. Il s’imposera certes mais ne détrônera jamais les deux autres concepts.
56 En 1791, la Constituante avait placé ce droit dans le titre I de la Constitution. États-Unis et Provinces-Unies avaient une culture de la pétition que n’avait pas la France ou du moins pas à ce point.
57 B. Barret-Kriegel, Les Droits de l’homme et le droit naturel, PUF, 1989, p 24. Sans doute, Paulus et ses collègues ont-ils voulu éviter de confondre morale et droit. Problème que ne théorisent pas les législateurs bataves mais qui le pressentent. Sur ce problème fort bien vu par Kant et Fichte, qui défendent l’autonomie du droit par rapport à la morale, A. Renaut, Lumières et romantisme, III, p 178 et p 206.
58 Voir par exemple le texte de John Adams, où il décrit le fonctionnement des assemblées de villes où ont été discutés les divers articles de la Constitution du Massachusetts. Goffinon, op cit., I, p 153 et p 332. Mais tous les États n’ont pas fait ratifier la constitution par le peuple.
59 Sur le problème de la représentation – problème accentué par la précellence de la nation sur le peuple, qui fait que les représentants se donnent pour la voix de la nation, voir B. Manin, Principes du gouvernement représentatif, Champs Flammarion, 1995.
60 En France, Sieyès, Mirabeau et Rabaut Saint-Étienne évoquaient déjà l’idée d’un contrat ou d’une convention. Mais ils ne sont pas parvenus à imposer cette idée. S. Rials, op cit., p 137 (Sieyès) et p 679 (Rabaut Saint-Étienne). La Constituante a préféré le terme moins contraignant de déclaration.
61 De fait, et comme les autres pays, les États-Unis ne peuvent s’empêcher de mentionner dans leurs Bills les droits en société et les principes d’organisation constitutionnelle : justice, gouvernement, séparation des pouvoirs, etc. Il est très difficile, semble-t-il, aux législateurs de faire la part entre ce qui tient du domaine du droit naturel et ce qui tient au droit positif, mais aussi entre ce qui est réglementaire, constitutionnel et ce qui est déclaratoire.
62 L’exemple provient du texte de Virginie, mais ceux des autres États sont identiques, sauf dans le Massachusetts où contre l’avis de John Adams, il fut décrété – comme il le sera en France : « Tous les hommes sont nés libres et égaux. »
63 Rappelons que la constitution de 1791 insiste peu sur l’égalité, absente de l’article 2, qui énumère les droits naturels. De retour dans la déclaration de 1793, elle est posée sur le même plan que les autres droits naturels et non comme l’origine des droits.
64 Français et Américains parlent de gouvernement représentatif ; de république ; ou d’autogouvernement. Ils évitent au début de parler de démocratie, synonyme à leurs yeux d’ouchlocratie. En Hollande, depuis la période patriote s’est imposée la notion de « volksregeering », soit gouvernement du peuple. Sieyès lui-même conçoit dans ses notes de 1787-1788 une « démocratie représentative par deux degrés », ce qui pourrait être la première occurrence en France (AN 284AP3).
65 Homines Novi. De eerste volksvertegenwoordigers van 1795, article de H. Boels, “Homines Novi”, p 3-27.
66 L. de Gou, Het Ontwerp van constitutie-1796, p X-XIX. Les sources imprimées par de Gou seront abrégées : De Gou, 1796 ; 1797 ; 1798 ; 1801.
67 Sur ces discussions, de Gou, 1797, I, p 124-129 et p 133-134. Ploos van Amstel intervient à la page 127 et Gevers à la page 134. Notons que l’autodidacte Jacob van Manen ne doit pas être confondu avec Cornelis van Maanen, procureur général, influent en matière de justice surtout.
68 De Gou, 1796, p 15-16. Sur J. van Manen, P van de Berg, “Vaderlandsliefde, vrijheid en mensenrechten aan het eind van de achttiende eeuw : Jacob van Manen Adrz. En de Staatsregeling van 1798”, in O. Moorman van Kappen, De Staatsregeling voor het Bataafse volk van 1798, Nimègue, 2001, p 35-71. Sur l’attitude des Français vis-à-vis du pacte social, M. Gauchet, op cit., p 218-219.
69 De Gou, 1796, p 15. Sur le sujet abordé sous un autre angle, P van de Berg, « Nationalisme, soevereiniteit en representatie : de politieke opvattingen van Jacob van Manen Adrz.”, Theoretische Geschiedenis, n° 3, 1999, p 380-396.
70 Sur ce problème trop souvent négligé par les historiens de la Révolution, Ph. Raynaud, « La déclaration des droits de l’homme », Political Culture of the French Revolution, Pergamon Press, 1988. Notons que dès le 20 mai 1796, Van Manen conçoit malgré tout un tiers-pouvoir qui contrôlerait la constitutionnalité des lois. Il réitère le 22 juin suivant. De Gou, 1796, p 104-105 et p 435-446.
71 C’était l’argument des fédéralistes américains. Un Bill of Rights fédéral leur paraissait inutile puisque les États avaient déjà proclamé les droits naturels de l’homme. Qui plus est, en 1787, les citoyens ne vivaient plus dans un « état de nature » comme en 1776. Enfin, comme le notait Madison, la déclaration n’était en fait que des « Parchment barriers ». J. N. Rakove, « Parchment Barriers and the politics of rights », in M.J. Lacey et K. Haakonssen, op cit., p 98-143.
72 Pour ces discussions, De Gou, 1796, p 101-104 ; p 110 et p 157.
73 De Gou, 1796, p 13 (sur le contrat inédit). Teding van Berkhout, un modéré, souhaiterait que soient introduits les devoirs 4 à 7 de la déclaration française de l’an III, mais pour le reste il invite à conserver la déclaration hollandaise de 1795 (De Gou, 1797, I, p 128).
74 On retrouve ce droit dans la déclaration montagnarde de 1793 à l’article VI.
75 De Gou, 1797, I, p 125 (Van Hooff).
76 Sur la discussion du projet Floh, De Gou, 1797, I, p 255-293 ; p 282 (Van Hooff) et p 267-270 (Vreede et Van Hoorn).
77 Sur l’équivalence droit/devoir, l’article cité de K. Haakonssen.
78 Dans le projet de Hahn, il n’y avait aucun article répressif. Dans celui de Floh, les citoyens ne se soumettant pas aux lois sont punissables et rebelles.
79 Dans la déclaration Française de 1791, c’est l’Assemblée qui reconnaît et déclare et non le peuple. En 1793, le peuple français expose… et proclame.
80 De Gou, 1797, I, p 693-695.
81 Sur les discussions, De Gou, 1797, I, p 720-726 ; p 730-732.
82 Notons qu’aux États-Unis, Jefferson avait d’abord prévu de mentionner la « propriété » et que le terme de « bonheur » ne s’est imposé qu’après-coup T. Jefferson, Écrits politiques, (éd. J.-P Feldman), Les Belles Lettres, 2006, p 17. De Gou, 1797, I, p 720-732 ; et p 271-272. Chez le pasteur Bacot se décèle une influence indéniablement écossaise.
83 La triade est inédite, puisqu’en France, la fraternité est alors absente du crédo national. On retrouve l’occurrence dans les lettres signées « Salut et Fraternité ». Voir M. Ozouf, « Fraternité », Dictionnaire critique de la Révolution, Flammarion, 1992.
84 Madison était conscient du problème statutaire des déclarations. Aussi aurait-il souhaité introduire dans la constitution fédérale un veto national absolu sur toutes les lois des États et un conseil de révision ayant un veto limité sur les lois nationales et un rôle dans le contrôle des lois des États. Ce fut en vain. En revanche, à partir du moment où il accepte l’idée d’une déclaration fédérale, incluse dans la Constitution, il comprend que les tribunaux pourront protéger les droits. J.N. Rakove, op cit., p 134-135 et p 141. Pour la France et la nécessité d’un tiers pouvoir, La Révolution des pouvoirs de M. Gauchet.
85 L’idée de Van Manen d’un tiers pouvoir n’est donc pas reprise. Sur le droit d’insurrection, De Gou, 1797, I, p 133-134. En réalité, seules les élections permettent au peuple de sanctionner les mauvais représentants. Notons que la déclaration française de 1793 décrète le droit à l’insurrection, mais l’article 10 stipule que tout citoyen, appelé ou saisi par l’autorité de la loi doit obéir à l’instant, sinon il se rendra coupable de résistance. Du coup, on peut légitimement se demander si le gouvernement tolérera l’insurrection. Ambigu également l’article 9 qui dit que la loi doit protéger les citoyens contre ceux qui gouvernent, mais qui fait la loi si ce n’est ceux qui gouvernent ?
86 Dans un premier document, Daunou a mentionné ses observations sur le projet de constitution ; dans un second corrigé par Merlin de Douai, on retrouve un projet de constitution précédée d’une déclaration. De Gou, 1798, I, p 441-442.
87 Daunou écrit lui-même qu’il n’a pas voulu modifier profondément la déclaration batave de 1797, d’autant moins qu’elle aurait été « prise dans celle qui précède la constitution française » (De Gou, 1798, I, p 431). On vient de voir qu’il n’en est rien. Un article est réellement français (devoir du bon citoyen), mais les ressemblances entre les projets voilent du moins les différences. M. Gauchet le constate également dans « Les droits de l’homme », op cit., p 132-137.
88 De Gou, 1798, I, p 496-500 et en français, p 510-513. Sur la réaction de Talleyrand, Ibid., p 516-522.
89 De Gou, 1798, I, p 580-581 et p 587. Signalons la ressemblance avec le projet Condorcet, dont la Constitution de 1793 a emprunté quelques idées et en a rejeté d’autres, notamment la réunion fréquente des assemblées primaires et la censure populaire. Mathiez avait remarqué la régression à l’œuvre dans la constitution de juin 1793 et la dictature d’assemblée qu’elle impliquait. Il l’imputait aux dangers courus alors par la France et par suite aux circonstances. A. Mathiez, Girondins et Montagnards, Firmin Didot, 1930, p 93-105.
90 Voir la définition claire et précise de A. Renaut, Lumières et romantisme, III, p 166-170.
91 De Gou, 1797, I, p 265 et p 731. Notons que les protagonistes ne se voient pas comme des proto-libéraux. Voir Rials sur la France et les États-Unis, op cit., p 369-373. Manin, op cit., sur le paradoxe de la représentation et F. Furet et R. Halévi, La Monarchie républicaine. La Constitution de 1791, Fayard, p 242-246 (sur quelques paradoxes de la déclaration).
92 Sur cent vingt-six députés, dans la première assemblée nationale, il y a quinze pasteurs ou curés et dans la seconde, dix-sept. D’autres (respectivement trois et un) sont théologiens. Cf. notre comptage à partir de A. Elias et P Schölvinck, volksrepresentanten en wetgevers. De politieke elites in de Bataafs-Franse tijd, Amsterdam, 1991.
93 De Gou, 1797, III, p 6. L’article XIX reprend l’idée déjà bien connue « ne pas faire à autrui ce que l’on ne voudrait pas qu’on nous fasse » ; l’article XX est donc un adaptation de l’article IV des devoirs de la Constitution de l’an III. Sur les devoirs chez les protestants, K. Haakonssen, op cit., p 23-24.
94 De Gou, 1798, I, p 175-178 (Konijnenburg) et 1798, II, p 315-334 (Ockerse). Sur la dénomination républicains libéraux, cf. J. Isaac, « Republicanism vs. Liberalism. A reconsideration », History of Political Thought, 9, 1988, p 349-377 et l’article cité de Kloppenberg.
95 Ici aussi, je renvoie à mon site pour le texte en français. De Gou, 1798, I, p 626-631et II, p 20-25 ; p 105-162.
96 Cf. A. Jourdan, « Le rôle des agents français dans la constitution batave de 1798 », AHRF, I, 2008.
97 De Gou, 1798, I, p 626-631 et p 433 ; p 440. Pour l’article, voir 1798, II, p 109. Contrairement à ses collègues, Valckenaer continuait à prôner des mesures répressives contre les ennemis de la révolution, point sur lequel il s’accordait en revanche avec Delacroix, lui aussi très répressif. Daunou avouait ne rien savoir de précis sur les orangistes et les émigrés, mais contrairement aux radicaux bataves, il ne voulait pas s’aliéner les fédéralistes hollandais et les considérait comme des républicains susceptibles de se rallier un jour à l’unité et à l’indivisibilité. C’est dire qu’il comprenait peu la situation batave et qu’il ne percevait pas l’extrême différence entre un fédéraliste français et un fédéraliste hollandais. Voir chapitre suivant.
98 Ainsi par Goslinga (ouvrage cité). Pourtant Goslinga note les différences entre les deux textes. Pieter Geyl disait de même parce qu’il avait retrouvé dans les archives les textes français rassemblés – ce qui ne veut pas dire qu’ils aient été fidèlement copiés, comme on vient de le voir – mais simplement qu’ils étaient connus.
99 De Gou, 1798, II, p 25 (Ondorp ; Quesnel, Voogd, De Sonnaville).
100 Voilà qui est fort étrange. Dans ses propres projets, Ockerse, qui était le rédacteur principal du nouveau texte, n’avait pourtant pas prévu de supprimer les allusions à l’égalité et à la liberté. Pourquoi avoir choisi « le but de l’association sociale est la sûreté et la protection du corps, de la vie, de l’honneur et des biens » ? L’article de 1798 y ajoute – autre point curieux – la culture de l’esprit et des mœurs, ce qui démontre qu’ici aussi l’influence écossaise se faisait sentir. Notons encore que dans la Constitution française de l’an III, le but de l’association ou de l’union n’est plus mentionné.
101 De Gou, 1798, II, p 100-104. Ces listes ne sont pas des candidatures publiques ; ce sont les citoyens actifs qui les rédigent et non des candidats qui se présentent.
102 Quinze mille citoyens pouvaient demander la révision. En 1797, il en fallait vingt-cinq mille. De Gou, II, pp.100-104. En France, Condorcet avait prévu qu’une assemblée primaire puisse à elle seule mettre en branle le procès de révision. La Constitution de 1793 est plus restrictive et rendait le processus illusoire, car la moitié des départements plus un devaient se prononcer pour. Cf. M. Gauchet, op cit., p 234-235.
103 L. Jaume (ed.), Les Déclarations des droits de l’homme, 1789 ; 1793 ; 1848 ; 1946, GF Flammarion, 1989, p 315-317. Sur la précédence de l’égalité perceptible jusqu’en mars 1798, voir Locke, Traité du gouvernement civil, GF Flammarion, 1992, p 206.
104 J. Livesey, Making Democracy in the French Revolution, p 48-60.
105 Les Écossais du reste avaient bien souvent suivi un enseignement en Hollande. Ferguson par exemple y a étudié et y a séjourné à plusieurs reprises. Cette influence a jusqu’ici été peu notée. R. Emerson, “The contexts of the Scottish Enlightenment” in The Cambridge Companion to the Scottish Enlightenment, Cambridge, 2003, p 17.
106 Cf. A. Jourdan, « Les tableaux de la Révolution française en Hollande » in La Révolution française par la gravure, (éd. Cl. Hould), Vizille/Paris, 2002, p 88. Konijnenburg, auteur des textes historiques et pourtant radical ou démocrate incrimine cette constitution : « une chimère qui promet les bienfaits les plus souhaitables et une société où règnerait le bonheur le plus parfait » une utopie, donc.
107 De Gou, 1798, II, p 317.
108 Il se pourrait que cette régression soit due à Delacroix, qui ne badinait pas sur les précautions à prendre pour protéger la république. Il eût ainsi désiré que la constitution soit imposée au peuple batave, afin d’éviter des élections tumultueuses et des résultats peut-être négatifs.
109 De Gou, 1801, p 643-663.
110 Voir aussi T. Poell, op cit., p 102-120.
111 De Gou, 1801, p 649.
112 De Gou, 1801, p 561-562 (Van Hooff) et p 530-536 (Schimmelpenninck).
113 Inversement aux États-Unis, où, entre 1787 et 1789 on en était venu à une idée proche de Daunou – les droits comme guide du constituant – Madison comprend peu à peu la portée éducative du Bill de 1791 (J.N. Rakove, op cit., p 137-140). Sur Daunou, BNF Mss n.a.f. 21891.
114 Louis lui-même tenait particulièrement à trois principes : 1. la sûreté de n’être pas arrêté sans raison ; 2. la certitude de n’être imposé qu’en vertu de la loi ; et la liberté de conscience et de religion. M. van der Burg, op cit., p 65.
115 Ibid., p 46-74. Malgré la référence à l’Angleterre au sujet de cette nouvelle constitution, la liberté de la presse et d’opinion n’est plus de saison. On pourrait voir ici la victoire des droits passifs sur les droits actifs. La personne, la propriété, la religion sont protégées mais en contrepartie, le peuple n’a plus le droit de parole – en d’autres termes, il a perdu l’exercice de la souveraineté. Sur cette notion de droit passif/actif, cf. P Marshall, « Two Types of Rights », Canadian Journal of Political Science, 25, n° 4, 1992, p 661-676.
116 À ce sujet, A. Jourdan, « Le premier Empire : un nouveau pacte social ? », Cités, 20, PUF, 2004, p 51-64 et idem, “The First Empire in the context of the Age of Revolutions. A Contest between two national representations”, conférence à paraître, Madrid, 2008. Après Waterloo, en 1815, le corps législatif réclame à nouveau des « garanties politiques », dans les mêmes termes qu’en 1804.
117 Seuls points positifs, la loi sur l’enseignement primaire qui ouvre la voie à la réforme plutôt démocratique de 1806, de même que la renaissance des élections locales qui se maintiendront jusqu’en 1805. R. de Bruin, op cit., p 294.
118 Ainsi, l’article 4 de 1801 stipule encore que la loi établit des dispositions pour assurer à chaque citoyen une subsistance honnête. Cet article disparaîtra dans les constitutions suivantes.
119 Dès octobre 1801, il était question que Guillaume V permette à ses partisans d’accepter des emplois et de se rallier à la république. GS, III, p 340 et p 1091-1092. Les orangistes Brantsen et Hultman brûlaient ainsi de revenir aux affaires. NA 1.10.12.59 (plusieurs lettres de 1801).
120 R. de Bruin, Burgers op het kussen, p 201-202, p 294.
121 Avec Jefferson régresse le caractère élitiste du gouvernement fédéraliste. Jefferson va prendre des mesures pour encourager l’accès à la propriété des petits fermiers ; pour réduire la fiscalité ; élargir le suffrage. Il stimule la souveraineté populaire et abolit les lois d’exception de 1798. Voir aussi Wilentz, op cit., p 99-140.
122 G. Chinard, The letters of Lafayette and Jefferson, Baltimore, 1929.
123 Le suffrage quasi universel au premier degré se perpétue sous l’Empire, mais il est limité à de rares élections. J. Bourguet-Rouveyre, « La citoyenneté à l’épreuve du conformisme et de l’uniformité sous le Consulat et l’Empire », in M. Biard, Terminée la Révolution…, Calais, 2002, p 89-100.
124 On s’imagine que le terme de libéral est postérieur à la Révolution. Or, dans ses notes de 1787-1788, Sieyès rédige des « considérations libérales » (AN 284AP3). Louis Bonaparte parlera également de ses lois libérales, tout comme Napoléon en 1807, à l’adresse de son frère Jérôme.
125 Ces vertus de tempérance, de modération et d’industrie surtout peuvent en vérité être considérées tant comme républicaines que comme libérales.
126 J.N. Rakove, op cit., p 141.
127 Sur l’Amérique, J.-M. Smith, Freedom’s Fetters. The Alien and Sedition Laws and American Civil Liberties, Cornell University Press, 1956. Sur la Hollande, voir l’introduction à ce chapitre.
128 À ce sujet, l’approche de R. Bellamy et D. Castiglione, “Constitutionalism and Democracy. Political Theory and the American Constitution”, British Journal of Politics, 27, 1997, p 595-618. Les auteurs voient dans l’aménagement de la Constitution fédérale un meilleur rempart pour les droits : structure fédérale ; diverses formes de représentation selon le mode de suffrage ; entrelacement des pouvoirs du Président, du Congrès et du Sénat ; et séparation des pouvoirs. R. Dahl n’applaudirait pas à cette interprétation, lui, qui dénonce dans cet aménagement un frein à la démocratie. How Democratic is the American Constitution ? Yale, 2003. Et de fait, la discussion se poursuit.
129 W.F. Murphy, “Constitutions, Constitutionalism and Democracy”, in D. Greenberg et al., Constitutionalism and Democracy, Oxford, 1993, p 3-25. J. Elster et R. Slagstad, Constitutionalism and Democracy, Cambridge, 1988.
130 Sur le glissement opéré par le Directoire français, voir J. Livesey, Making Democracy (où malgré le titre, l’auteur montre combien le Directoire devient républicain dans le sens moderne et combien ses législateurs éminents ont été influencés par les philosophes écossais). Pour ce qui concerne plus particulièrement la Hollande, mon article : “The Batavian Republic : typical French, typical Dutch or typical Atlantic ?”, Dutch Crossing, II, 2007, p 271-288.
131 Récemment, et à la suite d’H. Arendt, S. Agamben le rappelait à propos des réfugiés étrangers, auxquels on dénie du reste les simples droits de l’homme, Moyens sans fin. Notes sur la politique, Rivages, 1995. Pour une autre interprétation plus littéraire et plus psychologique, L. Hunt, Inventing human rights, New York, 2007. Nous n’avons pu prendre en compte cet ouvrage, car notre chapitre était déjà terminé quand il est paru.
132 C’est là une idée déjà énoncée par B. Constant, « De l’esprit de conquête et de l’usurpation », chapitre XIII in Œuvres complètes (éd. M. Gauchet), Folio, 1997, p 164-171. Constant s’en prend à l’ambition de la Révolution qui a voulu tout uniformiser et ce faisant, a affaibli le patriotisme qu’elle aurait tant souhaité stimuler. À cela pourrait s’ajouter l’individualisme suscité par l’abolition des corps et des ordres, sans oublier la sécularisation : cet individualisme se heurte à l’entreprise de « nationalisation » de l’État et vice versa, mais lui aussi affaiblit le patriotisme.