Introduction
p. 265-266
Texte intégral
1Comment la tragédie peut-elle cultiver simultanément grandeur héroïque et art de plaire ? Comment mêler dans le poème tragique la fureur héroïque et le comportement réglé de l’honnête homme ? Quand idéal galant et idéal tragique sont difficilement conciliables, la tragédie est en proie à un véritable dilemme. Lui faut-il suivre la voie héroïque ou plutôt la voie de l’honnêteté galante ? Aucun de ces chemins n’est satisfaisant, car, si tout héros doit être honnête homme, l’honnête homme n’est pas nécessairement un héros, comme l’écrit Saint-Evremond, de même qu’il n’est pas nécessairement un homme de bien, comme l’écrit La Bruyère : « On connaît assez qu’un homme de bien est honnête homme ; mais il est plaisant d’imaginer que tout honnête homme n’est pas homme de bien1 ». Écartelée entre deux voies diamétralement opposées, la tragédie cherche à ménager les contraires. L’entreprise, très délicate, semble rarement réussir, et la peinture des héros amoureux apparaît souvent défectueuse, que ce soit au nom d’un idéal ou de l’autre.
2Deux solutions s’offrent alors au poète pour surmonter cet écueil. La première consiste à pallier le problème en recherchant un pathétique qui se situerait hors de l’amour, c’est-à-dire à consolider le pathétique des amants, vacillant du fait de la mauvaise peinture des caractères, par d’autres sources de pathétique. La seconde solution, plus radicale, suppose de bannir les héros qui soupirent pour leur amante, en d’autres termes d’abandonner l’épisode amoureux.
Notes de bas de page
1 La Bruyère, Les Caractères, XII, 55.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Comparer l’étranger
Enjeux du comparatisme en littérature
Émilienne Baneth-Nouailhetas et Claire Joubert (dir.)
2007
Lignes et lignages dans la littérature arthurienne
Christine Ferlampin-Acher et Denis Hüe (dir.)
2007