1 Recherche financée par l’institut turc de la recherche nationale (TÜBİTAK). Autres chercheurs impliqués : Ali Ergur, Jean-François Pérouse, Ilknur Kurşunluğil, Hakan Yücel.
2 Nous utilisons indifféremment la notion de territoire et de « quartier » (entre guillemets). En effet, il faut avoir à l’esprit que les délimitations des zones étudiées n’ont pas (ou plus) de réalité administrative. La désignation de ces espaces est d’abord vernaculaire. Elle n’est donc pas neutre d’un point de vue identitaire et/ou symbolique.
3 15 ans est l’âge où se termine la scolarité obligatoire. 25 ans correspond à l’âge où la très grande majorité des jeunes Turcs ont terminé leurs études.
4 La prise de contact avec les jeunes s’est faite partiellement par le biais des centres culturels, des centres sociaux, des maires de quartiers, des communautés religieuses. Et d’autres ont simplement été croisés dans la rue.
5 Cité par Marc Breviglieri (2007), qui ajoute, pour sa part : « À la dialectique du monde proximal habité et de l’espace probatoire du domaine public correspond une expérience forte de la mobilité située entre les deux pôles [de registres émotionnels que sont la crainte de l’arrachement et l’engouement de l’affranchissement]. Mobilité relative à la prise de distance d’un monde habité déjà là (plus ou moins appréciable) et mobilité relative à la force d’attraction d’un monde public qui s’offre comme horizon (plus ou moins réalisable). […] L’adolescence est bien un “âge” où la mobilité, associée à des oscillations remarquables de l’état affectif, est une problématique cruciale et s’affirme comme un point de repère identitaire essentiel. » (P. 25-26.)
6 .Comme de nombreux toponymes portant le suffixe köy (village) le rappellent.
7 Les propos recueillis en animation de groupe confirment cette faible étendue des horizons spatiaux. Pour illustrer l’étroitesse de l’horizon de certains jeunes, mentionnons le cas d’une femme de 24 ans vivant à İstasyon Mahallesi. D’après ses propos, venant confirmer sa carte mentale, Istanbul se résume à son « quartier », lui-même ramené aux « blocs » où elle habite, à un parc, à un arrêt de bus et à un chantier de centre commercial.
8 L’auteur invite les collectivités locales à en tenir compte pour mieux répondre à leurs attentes : il « semble utile de favoriser le mouvement [de ces jeunes les plus sédentaires] afin de les amener à s’approprier les espaces de la ville et à ne pas rester enfermés dans leurs lieux résidentiels » (p. 12) car « à l’évidence, les jeunes se déplacent plus souvent et plus loin » (p. 8) que les moins jeunes dans la mesure où on leur en donne les moyens.
9 Richard Hoggart (1990), notamment, montre que l’une des caractéristiques de la vie en milieu populaire est la fermeture du groupe domestique sur son intimité.
10 Par exemple, la voiture mais également le scooter n’ont qu’une place anecdotique dans les rues des « quartiers » étudiés.
11 Quand on est jeune, il convient souvent de se déplacer « là où il risque de se passer quelque chose » (Chantelat et al., 1998). C’est ce que Richard Sennett (1992) qualifie d’expérience de l’incertitude.
12 C’est à Jean-François Pérouse qu’on le doit.
13 C’est une attitude qui a fort bien été décrite ailleurs (dans le contexte migratoire notamment) et qui semble caractériser les populations dont la légitimité n’est pas assise. « De la même façon qu’ils se reconnaissent souvent d’un quartier avant d’être d’une ville, il semble que les jeunes aient besoin d’être d’une rue avant d’être d’un quartier », écrit Bernard Vrignon (1998).
14 Selon la définition qu’en font Pascal Chantelat, Michel Fodimbi et Jean Camy (1998), se diriger vers des « hauts-lieux » est l’occasion d’un déplacement extraordinaire, d’une aventure (au sens de Simmel), de l’expérience de l’altérité et de l’incertitude des mondes (Sennett, 1992). On passe d’un temps ordinaire à un temps extraordinaire, d’un temps routinier à un temps où l’histoire peut commencer parce qu’on se situe là où il peut se passer quelque chose.
15 « Les mots de la ville participent à un jeu d’étiquetage qui, en fixant, en ancrant au moins pour un temps – mais rarement de manière éphémère – un ensemble de significations d’ordre spatial et/ou social, classent des lieux ou des groupes. Ils les tiennent à distance […] ou ils les excluent, métaphoriquement ou littéralement. » (Depaule, 2006.)
16 L’identification opérée dans le discours officiellement tenu sur la Régénération Urbaine (Kentsel Dönüşüm) entre immeubles collectifs et « modernité urbaine » n’est, semble-t-il, pas intégrée par les jeunes.
17 Constat fait par Jean-François Pérouse.
18 « Plus de cent Londoniens vinrent grossir la petite communauté de Winston Parva. […] [Leurs difficultés d’intégration] étaient le corollaire normal d’un processus au cours duquel deux groupes naguère indépendants étaient devenus interdépendants. […] Les “villageois” serrèrent donc les rangs contre les nouveaux, les exclurent de tout poste de pouvoir social dans la vie politique locale, dans les associations de bénévoles comme dans toutes les associations où ils avaient une influence prépondérante. » (P. 109-113.)