Chapitre 1. Principes d’existence
p. 111-142
Texte intégral
1Si l’on tâche de comprendre de quelle substance est fait le peuple breton du texte, quels sont les fondements de son existence telle que la décrit La Villemarqué dans le Barzaz-Breiz, il apparaît clairement que les trois grands principes sur lesquels il repose sont le sentiment poétique, le sentiment national et le sentiment religieux. Si on lui retirait sa poésie, son patriotisme et la religion catholique, il serait vide de sa substance, son image s’effondrerait d’un seul coup. De façon plus précise encore, il semble que ce soient les sentiments national et religieux qui tiennent l’édifice et que le sentiment poétique soit la mise en chansons de ces deux sentiments. L’intérêt est donc de connaître l’usage de ces deux sentiments comme références dans le texte. À quoi sert à l’auteur l’expression de ces deux sentiments et leur mise en rapport avec le peuple breton ? Comment décline-t-il ces sentiments dans le texte ? Qu’en dit-il ou ne dit-il pas ? Quels sont les thèmes qui s’y rattachent ? De quelle façon La Villemarqué utilise-t-il le sentiment national et le sentiment religieux pour faire ex-ister le peuple breton, c’est-à-dire, pour le faire sortir de, pour le faire sortir par ses mots du chaos des idées et l’arracher au vide de consistance et au manque d’intérêt qu’on lui manifeste encore à l’époque, pour lui construire une image et lui donner sens ?
Double sacerdoce
2Dans le Barzaz-Breiz, sentiment religieux et sentiment national forment un robuste piédestal sur lequel La Villemarqué hisse le peuple breton. Thèmes omniprésents, ils ressortent de la confection d’un réseau élaboré à partir d’un saupoudrage de mots, de descriptions de sentiments et d’actes, à partir d’un balisage du texte par des scènes émouvantes et souvent dramatiques, et bien sûr à partir d’un choix de chants illustrant presque exclusivement ces deux sentiments. Mais si ce réseau donne sa couleur propre au texte de La Villemarqué, les deux thèmes en présence ne sont en rien des thèmes originaux à l’époque de l’élaboration du Barzaz-Breiz. La première moitié du xixe siècle connaît en effet à la fois un renouveau du sentiment religieux et un éveil des nationalités dans le monde entier.
3Friedrich Schlegel professe : « Vous vous étonnez de l’époque, de la force de géant qui fermente, et savez-vous à quelle naissance vous allez assister ? À la résurrection de la religion1. » L’Europe entière voit alors poindre un retour en force des valeurs religieuses. Napoléon, en signant le Concordat en 1801, inaugure le renouveau catholique en France. Chateaubriand, par la publication l’année suivante du Génie du christianisme, concourt à cette tentative de pacification2 et porte par ailleurs un coup au voltairianisme3. En écrivant que « la religion chrétienne est la plus poétique, la plus humaine, la plus favorable à la liberté, aux arts et aux lettres4 », il ouvre à nouveau le champ d’action de la religion que le siècle précédent avait réduite aux superstitions et à l’ignorance. Les nombreux Allemands qui viennent à Paris au tournant du siècle — comme par exemple Friedrich Schlegel qui dispense un cours sur la littérature et la philosophie de l’art en 1802 ou Alexander von Humboldt qui propose ses travaux sur l’Amérique en 1805 — contribuent à renouveler les idées historiques, philosophiques et religieuses5. Les troubles sociaux qui ponctuent, en France, le premier tiers du xixe siècle s’accompagnent parfois d’anti-cléricalisme ; toutefois une ère nouvelle s’ouvre dans le domaine religieux, on entre dans une période où l’on aborde à nouveau les questions de la croyance, de son rôle philosophique et social6, mais aussi dans une ère de réconciliation de l’Église et de la liberté. Des noms émergent comme ceux de Lamennais, Lacordaire et Montalembert, les « trois pèlerins de Dieu et de la liberté7 ». Réconcilier l’autel et le trône n’est pas le projet de la jeune génération, elle veut plutôt réconcilier foi et modernité8.
4Ce contexte a eu une très forte influence sur La Villemarqué. Son père entretenait une amitié avec Chateaubriand9, Théodore Hersart également10. Il existerait même des liens de parenté entre les deux familles par la branche de la famille du Val du Guildo11 et La Villemarqué se considérait comme « son petit-neveu à la mode de Bretagne12 ». Par ailleurs, après la Révolution, en 1798-1799, la famille du jeune La Villemarqué faisait dire la messe dans le salon de son manoir du Plessix par des prêtres cachés13 ; La Villemarqué est formé chez les jésuites de Sainte- Anne d’Auray, puis au petit séminaire de Guérande14. Lorsqu’il se rend à Paris pour faire ses études de droit après l’obtention de son baccalauréat en 1833, il est alors logé à la pension Bailly dès 1834. À l’époque y sont organisées des réunions auxquelles prend part Frédéric Ozanam — autre grand nom du renouveau catholique en France — qui met lui aussi sur pied des conférences dans le cadre de la Société de Saint-Vincent-de-Paul, et qui a lui-même logé à la pension Bailly. La Villemarqué prend d’ailleurs part à ces conférences15. De plus, les premiers articles que publie La Villemarqué paraissent dans l’Écho de la Jeune France dont l’aspiration est de
replacer dans le pays la religion et la morale, ces deux premières bases sociales ; retremper la littérature à la source du beau et du vrai ; nettoyer la France de cet amas de saletés dont les plumes cyniques l’inondent ; reproduire toutes les pensées chrétiennes, sociales, de haute littérature ; ramener l’art aux sources d’inspirations morales et religieuses ; faire reprendre au christianisme cette admirable épopée qu’il semblait avoir fermée sur les noms de Bossuet, de Racine et de Fénelon ; créer un centre au mouvement moral et intellectuel de la plus jeune génération non pour la conduire, mais pour l’exprimer [...]16.
5La Villemarqué ayant été en contact permanent avec la pratique religieuse familiale, avec les ouvrages des acteurs du renouveau catholique français, si ce n’est en contact direct avec eux, il n’est en rien étonnant que le sentiment religieux occupe une place de choix dans le Barzaz-Breiz. De la même façon, l’importance qu’il attache au sentiment national trouve divers éléments d’explication. Le premier vient du mouvement général de soulèvement des petits peuples face aux grands États. L’éveil des nationalités explose en 1848 avec le printemps des peuples, mais depuis le début du siècle, des mouvements d’indépendance voient le jour à plusieurs endroits du monde. Ce contexte général d’émancipation des peuples que les journaux contribuent à relayer soulève un certain nombre de questions sur ce qu’est un peuple, une nation, un État et constitue un terreau qui facilitera l’éclosion de sentiments semblables dans certaines régions de France, comme en Bretagne.
6Par un basculement de l’idée du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes au principe des nationalités, basculement que la France opère elle-même d’ailleurs, l’Europe entière entend l’encouragement lancé par la France à se libérer des souverains, à retrouver ainsi sa véritable humanité que les rois retiennent captive17. Du peuple comme entité constituée par un contrat social et qui exprime sa libre volonté de choisir ses institutions pour lutter contre une domination sociale, intérieure, on passe, par l’entrée dans le politique des critères des frontières naturelles et de l’histoire18, à un peuple comme fait, comme donnée première existant selon diverses caractéristiques (ethnique, linguistique, culturelle, spirituelle.) et qui récuse la domination politique étrangère, extérieure, qu’il subit19.
7Les colons nord-américains donnent l’exemple en voulant s’émanciper de l’Angleterre à la fin du xviiie siècle. La Villemarqué ne manque d’ailleurs pas de l’évoquer dans le Barzaz-Breiz tout en insistant sur la compassion des Bretons :
On sait quel enthousiasme excita en France la guerre d’Amérique ; il ne fut pas moins vif en Bretagne. Le sort de trois millions d’hommes que l’Angleterre, leur patrie adoptive, traitait comme des esclaves, toucha les populations bretonnes. Toutes les classes de la société voulurent prendre part à l’expédition destinée à la délivrance des Américains ; à aucune époque on ne vit la Bretagne mettre sur pied un plus grand nombre d’auxiliaires et de volontaires20.
8Puis ce mouvement d’émancipation gagne l’Amérique du sud : Haïti, premier pays indépendant du sud en 180421, le Venezuela et la Colombie entre 1817 et 1822, le Mexique en 1821, le Pérou en 1824, se libèrent de la domination espagnole22, et le Brésil de la domination portugaise en 182223. Le Canada se libère de la tutelle britannique, de la « pernicieuse domination de la mère-patrie24 », comme le formule Hume. En Europe, les Balkans connaissent aussi l’éveil des nationalités : les chrétiens de Serbie, de 1804 jusqu’en 1830, puis de Grèce — héritière de l’Antiquité, ce qui suscite un enthousiasme immense25 — de 1821 à 1830, ne veulent plus subir le joug des Turcs de l’empire ottoman26. L’Irlande s’oppose à l’Angleterre depuis 181227 ; un conflit éclate dans le royaume des Pays-Bas entre les Belges et les Hollandais vers la fin des années 182028 ; les Polonais portent leurs regards vers Paris et la Révolution, et se soulèvent contre la puissance russe en 183029 ; Abd-el-Kader résiste jusqu’en 1847 aux troupes françaises entrées dans Alger en 183030 ; les États allemands cherchent une unité dans les années 183031 ; les Provinces Unies de l’Italie sont proclamées en 1831 après une libération du joug autrichien32. Et tout cela n’est que le début d’une longue liste.
9À ce bouillonnement mondial du mouvement des nationalités se combine la mise en mots de ce type de conflits dans les œuvres de l’historien Augustin Thierry et tout particulièrement dans l’Histoire de la conquête de l’Angleterre par les Normands publiée en 1825. Il apporte à l’histoire de la France et de l’Angleterre un éclairage nouveau : l’histoire n’est pas faite de luttes de seigneurs, mais a des causes plus profondes comme celles des luttes entre nations ou civilisations différentes33. Sa théorie de la lutte sociale comme conséquence de la lutte des nationalités — théorie reprise par d’autres historiens dont son frère Amédée Thierry34, le « chantre des Gaulois » — ainsi que les luttes nationales des romans de Walter Scott ont profondément pénétré les esprits de l’époque et passionné les débats sur les événements contemporains mettant en duel un peuple opprimé et un peuple oppresseur. L’esprit libéral et l’idée chrétienne selon laquelle il faut aider les asservis ont participé de l’enthousiasme en faveur des petits peuples opprimés par les grandes puissances conquérantes.
10De plus, ce contexte général a pris une résonance particulière dans l’esprit de certains jeunes érudits bretons, dont fait partie La Villemarqué, qui s’intéressaient par ailleurs aux travaux d’historiens bretons, eux-mêmes nourris des idées des celtomanes et du mythe de l’ancienneté, de la légititmité et de l’unité de la Bretagne35. La celtomanie, ou plus exactement gallomanie comme le précise Bernard Tanguy, a grandement pris son essor au xviiie siècle36 : les travaux de Simon Pelloutier sur l’Histoire des Celtes, par exemple, contribuent à donner du celtisme et du druidisme une vision renouvelée, non pas celle de barbares sanguinaires, mais celle d’un peuple ayant une « vision hautement religieuse de l’homme37 ». Mais c’est à partir de la Révolution française que le celtisme prend son envol en entrant dans l’histoire de France38 puis en nourrissant l’imaginaire qui entourait l’expansionnisme napoléonien du mythe de l’empire celtique des origines39. De cet engouement naît l’Académie Celtique en 180540. Les éloges du druidisme contenus dans le Voyage dans le Finistère de Cambry41, membre fondateur de l’Académie, et les travaux linguistiques de Jean-François-Marie Le Gonidec, également membre fondateur de l’institution, enrichissent les recherches en cours. Mais dès 1813-1814, l’Académie Celtique, victime de ses propres excès, est remplacée par la Société Royale des Antiquaires de France. La langue bretonne et la Bretagne, perçues comme des traces de l’Ur-France42 et qui étaient donc mises à l’honneur jusque-là, entrent en purgatoire43. Cependant, le thème du celtisme ne s’efface pas totalement, il est simplement délocalisé et réduit à la matière de Bretagne. Créée en 1823, la revue nantaise nommée Le Lycée Armoricain reprend le flambeau de l’Académie Celtique et donne une impulsion décisive à une nouvelle génération d’érudits44 qui va construire une histoire nationale bretonne, totalisante et spécifique mettant en valeur les doubles liens à l’histoire continentale et à l’histoire insulaire45. Le Barzaz-Breiz éclôt donc dans un contexte très sensibilisé au passé de la Bretagne et à sa spécificité46.
11La Villemarqué fait exister le peuple breton dans son texte en le rendant fortement présent et perceptible au lecteur d’une manière toute particulière. C’est dans un tableau à la fois mythique et mystique qu’il lui donne place au travers de ces deux sentiments.
12Pourquoi mythique ? Parce qu’il présente ce sentiment religieux comme antérieur à la constitution de l’Église et le sentiment national comme antérieur à la constitution politique de la nation établie comme forme de gouvernement. Organisation étatique et institution religieuse n’ont pas donné naissance à ces sentiments, ceux- ci existaient bien avant. La « semence morale47 » qu’on a déposée dans l’âme du peuple est composée du sentiment religieux, du sens du merveilleux et du sentiment patriotique48, sentiments que l’on trouve chez tous les bardes d’avant l’ère chrétienne, puisque « au caractère religieux, les bardes joignaient un caractère national et civil49 » et qu’ils « partageaient avec les druides la puissance sacerdotale50 ».
13Par contre, leur point de départ n’est en rien précisé, il reste dans le vague d’une certaine profondeur des temps. Certainement au début des temps héroïques51, dans le temps primordial an-historique de la mise en place de la matrice. Cette ouverture de l’horizon temporel sur des périodes anté-chrétiennes et anté-monarchiques n’est donc pas un simple congé pris vis-à-vis des institutions, elle constitue surtout une mythification de ces sentiments. Ils se trouvent happés hors du temps et prennent ainsi une dimension sacrée. De la sorte, lorsque le Breton « poursuit d’effroyables imprécations religieuses et nationales contre l’étranger, ennemi de son culte et oppresseur de son pays », et se montre violent, l’auteur renvoie au même mythe primordial les vices et les vertus des Bretons en s’exclamant : « Chose étrange ! ils [ses vices] ont un mobile semblable, ils sont sacrés comme elles [ses vertus]52. » La Villemarqué donne ainsi une forme, un repère, une explication à ces sentiments : c’est le point de révélation pour le peuple breton. Mais la révélation n’est ni celle de Moïse, ni celle du Christ, elle est primitive et l’on retrouve dans cette pensée l’une des idées importantes qui ont animé les acteurs de la renaissance catholique du xixe siècle, notamment ceux nourris des travaux sur l’Orient53.
14L’affirmation de la source païenne des sentiments religieux et national que pose La Villemarqué renforce par ailleurs son idée de continuité et de conservation dans le temps des éléments de la révélation primitive. Pour l’auteur, il ne semble y avoir aucune contradiction entre le fait de présenter la religion chrétienne comme un élément constitutif de la nationalité bretonne et le fait de revendiquer une histoire pré-chrétienne. Bien au contraire, cela lui permet de montrer que la religion chrétienne est venue se loger dans une cavité qui existait déjà, qu’elle l’a régénérée, qu’elle l’a remplie d’une substance nouvelle, mais que l’élément religieux existait avant, qu’il fait partie de ce dont a été doté le peuple breton. De la sorte, point n’est besoin des textes sacrés — la Bible et les Évangiles ne sont d’ailleurs mentionnés qu’une fois en 1839, deux en 1845 et trois fois en 1867 –, tout tient dans l’existence d’une « certaine racine antique qui était bonne54 » et qu’a bonifiée le christianisme. Loin de présenter une religion druidique barbare et cruelle, La Villemarqué souligne au contraire l’existence en son sein d’un principe d’immortalité de l’âme55 et d’une vie meilleure après la mort56. Et l’auteur trouve même dans ses traces modernes une source d’humanité touchante, exaltante et nécessaire :
N’y a-t-il pas un vif aiguillon pour la sensibilité, pour la reconnaissance, pour l’amitié, pour le dévouement, pour la pitié, pour tous les sentiments les plus tendres du cœur, dans l’accomplissement même superstitieux des devoirs envers les parents et les amis qui ne sont plus ? N’est-ce pas du reste un bonheur que de les pleurer ? N’est-ce pas s’oublier soi-même que de les oublier ? Ah ! ce serait faire un bien cruel et bien triste usage de la raison que de l’employer à détruire ces douces croyances qui entretiennent l’amour de Dieu, le culte des bienfaiteurs de la patrie, et le souvenir de ceux qui ont dévoué leur vie au salut ou au bien-être de l’humanité57.
15Les traces du sentiment religieux primitif qui subsistent ne sont en rien condamnées par l’auteur, au contraire, il s’en laisse charmer :
Toujours cette pensée consolante d’immortalité ! L’imagination du Breton la revêt sans doute, avec trop de complaisance, de mille formes merveilleuses que la religion et la raison proscrivent comme superstitieuses ; qu’importe, si elle le rend meilleur en le rendant heureux58 ?
16Il semble que, pour La Villemarqué, l’élément païen — cette part de la nature dans la religion59 — apporte une certaine force poétique, l’élément superstitieux est beau parce qu’il dépend de la matrice, de cette loi naturelle qui lui assure un développement immaculé.
17Il est d’ailleurs remarquable que ce soit bien à la religion chrétienne dans sa forme primitive que s’attache La Villemarqué et non pas spécialement au catholicisme60. La fréquence comparée de l’emploi des termes « chrétien » et « catholique » souligne nettement leur importance respective aux yeux de l’auteur et sa préférence pour le premier61. Le christianisme primitif que La Villemarqué confère aux Bretons garantit une certaine force qui prend son importance en un siècle de déchristianisation progressive de certaines couches de la société :
Pour trouver la société chrétienne telle qu’elle était jadis, une réunion d’hommes à natures primitives, à organisation puissante, à imagination dévorante ; pour trouver un prêtre que la foule comprenne, qu’elle aime, et qui soit de force à lutter corps à corps avec elle, à la vaincre, à la terrasser, il n’est pas nécessaire de remonter le cours du temps et d’aller jusqu’au moyen âge [sic], on n’a qu’à venir en Bretagne62.
18L’autre dimension du tableau, que le côté mythique nourrit d’ailleurs, est la teinte mystique que lui apporte l’auteur. Le mystère qui enveloppe ces deux sentiments s’accompagne d’un ensemble d’éléments permettant à La Villemarqué de les définir comme deux religions à part entière et par ailleurs inséparables. Il en fait un véritable mode de vie, ponctué de rituels et nourri de la même conception du sacré, une vie dans laquelle les deux religions, celle du ciel et celle du sol, enveloppent la vie entière du Breton. Le peuple breton semble avoir des saints pour ses deux religions puisque « les saints dont il accueille les yeux fermés tous les miracles sont les héros à la fois de sa religion et de sa patrie63 ». Le Breton du Barzaz-Breiz connaît deux sacerdoces car « toujours sa foi nationale s’unit à sa foi religieuse64 », il conjugue « amour de l’autel et du foyer65 », foyer qu’il faut certainement comprendre comme sa patrie dans ce cas précis qui concerne les chouans. L’auteur rappelle avec force que « c’est une sorte de royauté sainte que le sacerdoce en Bretagne66 », mais il n’insiste pas moins sur le sentiment national du Breton, son « amour ardent pour le sol natal67 », son « amour pour le lieu natal68 », « son amour pour la patrie69 », « l’amour du pays70 », amour reflétant « le plus ardent patriotisme71 », et rappelle que les « nouveaux poëtes ont toujours le cœur qui bat pour le pays ; ils ont toujours la main qui lance la flèche de la mélodie nationale72 ». Dans cette citation, la métaphore qui fait fusionner la chanson avec une arme révèle par ailleurs que l’auteur considère sans doute les chants comme la nouvelle arme des Bretons, comme le symbole du maintien de leur force au travers de la chanson, lors du passage de la révélation primitive, violente, à la deuxième révélation plus douce qu’est le christianisme.
19La sincérité du sentiment religieux du Breton est mise à plusieurs reprises en lumière par l’auteur qui trouve que « sa foi est crédule, à coup sûr, mais elle est sincère, elle est inébranlable [...]73 ». Sa piété prend même parfois les teintes de la vénération : « on dirait que les descendants des anciens Celtes ont conservé aux prêtres catholiques la vénération que leurs pères avaient pour leurs druides74 ». Et ce sentiment d’amour sincère, de fidélité et de dévouement se retrouve exprimé aussi bien envers Dieu qu’envers la patrie75. Le Breton apparaît ainsi « dévoué à son Dieu et à sa patrie76 », il fait toujours preuve de « dévouement à la cause de son pays77 », de « dévouement à la patrie78 ». De plus, La Villemarqué tient à louer des hommes comme Pontcallec resté « fidèle à la cause nationale79 », la famille de Carné et de manière générale « toutes les familles de race bretonne qui n’ont pas abandonné leur pays80 », sans oublier bien sûr les chanteurs populaires dont « jamais la cause [...] n’a été distincte de celle de leur pays81 ».
20Par ailleurs, l’idée de devoir à accomplir qui est fortement liée à celle de religion est mise en avant à plusieurs reprises aussi bien concernant le sentiment religieux que le sentiment national : lorsqu’une personne décède, « aucun membre de la famille, ni la veuve, ni les frères, ni les sœurs, ni même le plus petit enfant, ne doit manquer à ce suprême et solennel adieu ; c’est un devoir sacré82 ». Si on accuse le Breton de « pousser le patriotisme jusqu’à la fureur », il répond aux juges de la cour martiale : « J’ai fait mon devoir, faites votre métier83. » C’est en fait « un double devoir envers ses dieux et son pays84 » que ressent le peuple breton encore païen du Barzaz-Breiz. Ce devoir peut d’ailleurs aller jusqu’au sacrifice, jusqu’au don de soi pour la religion ou pour la patrie. « On ne meurt jamais trop tôt quand on meurt en faisant son devoir85 ! » devient presque un slogan, ou du moins un concept-clé de l’héroïsme breton dans le texte. La Villemarqué fait de tout Breton un homme tellement attaché à « ses chères libertés nationales » qu’il est prêt à « les défendre jusqu’à la mort86 ». De la sorte, Gwenc’hlan « fut pris par un chef étranger, qui lui fit crever les yeux et le jeta au fond d’un cachot, où il mourut, victime de son dévouement à la cause de son pays87 », Arthur est « mort en défendant sa patrie88 », Lez-Breiz aussi89, Pontcallec « porte sur l’échafaud sa tête rayonnante, et meurt pour son pays et pour la liberté, “comme savent mourir les martyrs et les saints”90 ».
21La Villemarqué fait de l’acte patriotique un acte religieux au plus haut point en multipliant les exemples de sacrifices patriotiques. Il nourrit l’héroïsme d’une dimension religieuse touchante, il en fait un acte, voire une pratique religieuse, il érige un culte de la nation lié à un culte de l’histoire qui poursuit son œuvre dans le temps. Dans cette galerie de portraits, tous les héros qui meurent au nom de la religion du Ciel ou du sol sont sanctifiés par l’auteur, ce qui est somme toute assez classique dans le processus de construction du mythe de la nation. Diffuser une série de héros parangons des vertus nationales — dans le Barzaz-Breiz, personnages fédérateurs incarnant le sentiment religieux et national — fait partie de ce qu’Anne- Marie Thiesse appelle la check-list identitaire91.
22L’auteur confectionne un peuple breton dont l’existence tient en des valeurs hautement religieuses, en ce mystère de la rencontre entre son amour pour le Ciel et son amour pour le sol natal. Le peuple breton est une sorte d’arc électrique qui jaillit entre le pôle du sentiment religieux et le pôle du sentiment national rendus actifs dès sa naissance dans la matrice. La Villemarqué donne à l’existence du peuple breton une dimension spirituelle qui le rend non seulement présentable, mais aussi attachant et mystérieux. Il devient à la fois familier et stupéfiant. C’est qu’en fait l’auteur, en fusionnant le national et le religieux, fusionne deux principes et deux époques. Il en sort un produit de synthèse : le héros Breton, qui est soit le peuple breton comme personnage anonyme, soit les divers individus qui constituent la galerie de portraits et ponctuent le texte. Ce héros, qui vient d’un type poétisé par La Villemarqué, offre la familiarité de l’humain et la stupeur du mythe, provoque une intimisation de la genèse et invite à la célébration de l’origine communautaire92.
Centre de gravité
23La Villemarqué fait exister le peuple breton en mots, il lui fabrique une existence et met en valeur l’irrationalité des liens qu’entretient le peuple breton avec le sentiment religieux et le sentiment national. Pourtant, le sacré dont l’auteur entoure tout ce qui est en rapport avec lui intrigue car, toute sacrée, religieuse et irrationnelle que soit la façon dont l’auteur considère l’existence du peuple, celle- ci ne semble pas être le fruit d’une transcendance. À aucun moment il n’est question d’une quelconque force supérieure située au-delà de la réalité ou d’un dieu créateur de cette existence qui inciterait l’auteur à la considérer de fait comme sacrée. Cette existence ne semble pas non plus dépendre de l’intervention d’un tiers. Rien d’extérieur ne paraît dicter cette existence. Ni la raison ni la Providence ne fournissent d’explication tangible à la dimension sacrée qui caractérise l’existence du peuple du Barzaz-Breiz.
24Il semble qu’il faille se tourner vers l’intérieur même du peuple pour comprendre l’admiration qu’exprime l’auteur pour le peuple breton. L’existence du peuple breton est une auto-donation, indépendante de l’extérieur, un ensemble de données immanentes, de déterminations internes. Le peuple breton est inhérent à lui-même, il dépend d’une structure initiale. Il n’est pas création, il est constitution. L’ensemble des faisceaux qui se regroupent autour du sentiment religieux et du sentiment national qui sont les piliers de l’existence du peuple partent tous du même centre, de ce siège de données fondamentales qu’est la matrice, de ces lois internes naturelles desquelles dépendent les modalités de ce qui est et de ce qui doit être.
25De ce caractère interne et immanent découle le fait que l’existence du peuple breton dépend d’un certain nombre de déterminations. Elle est une définition. Elle forme un tout fermé sur lui-même qui se distingue des Autres. Le critère de la distinction et de la différence est l’un des argumentaires principaux de La Villemarqué. Cette distinction n’apparaît pas dans le temps : l’existence du peuple breton est au contraire immuable et éternelle. L’auteur insiste particulièrement sur une nature conservatrice qui déjoue les aléas du temps-dégradation. L’existence de chaque membre du peuple n’est que transitoire et périssable, mais chacun, par son existence, crée un peuple impérissable renvoyant à des références éternistes et statiques. C’est qu’au-delà de son existence, chacun est et a un certain nombre de données essentielles qui déterminent la nature du peuple et qui assurent une continuité. La distinction n’apparaît donc pas dans le temps, mais dans l’espace. La conception du monde de La Villemarqué repose en grande partie sur le couple indigène/étranger93.
26À ce couple est lié un ensemble dense de concepts et de termes qui quadrillent le texte et donnent à sa lecture une orientation particulière. L’auteur s’attache grandement aux commentaires historiques qui constituent souvent le sujet de sa prise de parole, mais à y regarder de plus près, il est remarquable que les termes de géographie y occupent une place non négligeable. La géographie devient presque la modalité de compréhension de l’histoire, comme le préconise Augustin Thierry en analysant les guerres comme des luttes de peuples, et comme le met en application son frère Amédée Thierry dans son Histoire des Gaulois94. De la sorte, les 35 « Bretagne », 40 « Armorique », 39 « France », 12 « Angleterre » s’enrichissent des 178 noms et adjectifs « B/breton », 33 « F/français » et 8 « A/anglais » par exemple. En plus des noms de pays ou de peuple, l’auteur utilise aussi les concepts de frontières et de territoire : le « territoire des Franks95 », le « pays des Francs96 », le « territoire de leurs voisins97 », la « terre étrangère98 » et, par opposition, le « territoire breton99 », le « pays natal100 », la « terre natale101 », la « terre de Bretagne102 ».
27Sur ces notions de géographie se greffe un certain nombre d’idées qui illustrent également le couple indigène/étranger, mais qui se rapportent d’une façon plus générale à la nationalité et à la nature des différentes nations. Langue, vêtements, instruments de musique, coutumes, chanson, etc. : La Villemarqué tente de faire le tour de ce qu’englobe le « génie national breton ». La langue bretonne, « langue nationale103 », voire « vieille langue nationale104 », se distingue de la langue française, et les emprunts linguistiques à cette dernière sont dans un premier temps qualifiés de « gallicismes105 » en 1839 et deviennent en 1845 des « expressions étrangères106 », et La Villemarqué déplore « la mémoire ingrate du peuple francisé de la haute Bretagne107 »108. Il met aussi par exemple en avant le fait que les poésies des différentes nations, même si elles ont des points communs dus à leur caractère populaire, ne présentent pas les mêmes caractéristiques :
La muse méridionale est ardente, passionnée, impétueuse et lyrique ; la muse servienne s’élève parfois à la hauteur de la poésie épique ; les muses scandinave et danoise sont tragiques et guerrières ; le génie de la muse de la Germanie, est, selon Wolf, celui de la tragédie bourgeoise, la plus touchante et la plus pathétique ; le génie de la ballade écossaise, la mélancolie la plus douce. Quant à la muse bretonne, elle nous paraît unir la sensibilité exquise et recueillie de la poésie germanique, à la tristesse douce et tempérée de la poésie écossaise109.
28Rousseau, dans la Nouvelle Héloïse, fournit la méthode d’étude des « génies nationaux ». Il donne la parole à Saint-Preux pour un exposé à Julie :
Si je voulois étudier un peuple, c’est dans les provinces reculées où les habitans ont encore leurs inclinations naturelles que j’irois les observer. Je parcourrois lentement et avec soin plusieurs de ces provinces, les plus éloignées les unes des autres ; toutes les différences que j’observerois entre elles me donneroient le génie particulier de chacune ; tout ce qu’elles auroient de commun, et que n’auroient pas les autres peuples, formeroit le génie national, et ce qui se trouveroit par tout, appartiendroit en général à l’homme110.
29La méthode, calquée sur celle des sciences naturelles puisque Saint-Preux souhaite comparer les peuples « comme on décrit l’olivier sur un saule ou le palmier sur un sapin111 », est donc déjà connue, et depuis quelques années s’est glissé à côté de l’expression « génie national », que La Villemarqué emploie sous une forme ou sous une autre (« génie celtique112 », « génie national113 », « génie gaulois et breton114 »...), le terme de « nationalité » dont il n’hésite pas non plus à faire usage dès 1839 (« nationalité Bretonne115 », « nationalité galloise116 », « nationalité politique117 »). Ce terme n’en est plus tout à fait à son début de carrière en France. Importé d’Allemagne, il est employé pour la première fois en France par Mme de Staël dans De l’Allemagne en 1810. En 1825, un ouvrage de F. C. Jahn est traduit de l’allemand sous le titre Recherches sur la nationalité, l’esprit des peuples allemands et les institutions qui seraient en harmonie avec leurs mœurs et leur caractère. Après cette nouvelle apparition du mot, c’est au tour de Quinet de s’interroger sur sa signification lorsqu’il décide de traduire Herder. Michelet se met aussi à l’utiliser et l’Académie française l’inscrit dans son Dictionnaire en 1835118.
30Le déploiement d’éléments religieux et nationaux est si important dans le Barzaz-Breiz qu’il donne l’impression, non seulement que ces sentiments remplissent tous les interstices de la vie du peuple breton, mais davantage encore, qu’un vernis recouvre le peuple breton et que ce vernis permet de passer de l’observation au générique, du perçu au conçu. L’auteur opère une généralisation des sentiments dans le texte, et notamment du sentiment national. Une grande partie des adjectifs « populaire » de l’édition de 1839 est changée en « national » dès 1845 : les « poëtes populaires119 » de 1839 se changent en « poëtes nationaux120 », le biniou devient le « biniou national121 », les gens du peuple portant les « drapeaux de leurs paroisses122 » portent finalement les « bannières nationales123 », les « vieux arbres124 » de 1839 se révèlent être de « grands chênes125 » en 1845. De plus, ceci met en évidence la quasi-équivalence entre le populaire et le national dans la conception de La Villemarqué. De la sorte, tout élément de la vie locale prend les couleurs du national. D’une manière générale, le nombre d’occurrences des termes liés au « national126 », ajouté au nombre d’occurrences de « populaire127 » qui en devient pour ainsi dire synonyme dans le Barzaz-Breiz, plonge le lecteur dans un texte qui ne tiendrait plus debout sans cette composante, et offre l’image d’un peuple qui n’existe que par elles et surtout d’un peuple qui devient un concept, un terme générique, une rubrique dont les déterminants sont essentiellement les sentiments religieux et national.
31En plus des transformations de « populaire » en « national », l’auteur transforme petit à petit d’une édition à l’autre certaines occurrences du terme « druidique » en « celtique », créant ainsi un univers celtique, de couleur plus nationalitaire et plus généralisante128. Un troisième glissement vient corroborer l’idée que La Villemarqué donne au local des valeurs génériques, c’est-à-dire de genre : le passage, entre l’édition de 1845 et celle de 1867, du domaine du cœur à celui de la race : « quelques-uns des sentiments les plus énergiques de nos cœurs129 » est modifié en « quelques-uns des sentiments les plus énergiques de leur race130 ». Le fait que le populaire devienne national, que le druidique passe au celtique et que les questions de sentiments se transforment en questions de race invite à penser que l’auteur élabore au fil des éditions une vision du peuple de plus en plus irrationnelle, de moins en moins appuyée sur le perçu et de plus en plus sur le conçu, ce qui permet de passer outre les nuances de l’observation et d’affirmer beaucoup plus nettement la distinction entre ce qui relève de la chose en question et ce qui n’en relève pas, entre l’indigène et l’étranger.
32En outre, un autre critère se combine aux précédents : la nécessité. Il semble que ces deux sentiments, le religieux et le national, aient un rapport nécessaire au peuple. Ceci apparaît par exemple dans ce que l’auteur appelle le mal du pays et qu’il illustre d’ailleurs par un chant131. Un Breton coupé de la Bretagne dépérit : « l’infortuné meurt de chagrin loin de son pays natal132 ». C’est en fait que l’individu qui n’a plus de lien à son sol perd l’un de ses deux liens fondamentaux, et La Villemarqué de citer MM. Benoiston de Châteauneuf et Villermé133 : « loin de leur patrie les Bretons n’existent qu’à moitié134 ». C’est que l’arc électrique ne peut se produire et ces personnes ne peuvent exister pleinement, voire peuvent ne pas exister du tout car « souvent ils meurent du regret de ne plus la [leur patrie] voir135 ». C’est ce qui est arrivé à « un jeune paysan des montagnes d’Arès, embarqué comme matelot, à bord d’un bâtiment de guerre ». Il « fut atteint du mal du pays, et l’on fut contraint de le laisser à quelques lieues de Bordeaux, où il mourut de chagrin et de misère, sur la paille, dans une étable136 »137.
33L’auteur affectionne particulièrement ce thème et fournit aussi l’exemple d’une « jeune fille de nos campagnes », emmenée en France et qui « en serait morte de chagrin138 ». La chanson relate le chagrin mortel de la jeune fille achetée par un seigneur qui veut l’emmener pour être mariée de force. Mais La Villemarqué n’insiste pas tant sur cette union forcée que sur ce qui est pour lui le véritable malheur de cette fille : quitter son pays et aller en France139. Car aller en France équivaut à aller en enfer, semble-t-il :
Aussi pleurait-elle la pauvre Tina, en entendant sonner, pour la dernière fois, les cloches de son village, et en leur faisant ses adieux. Mais où va-t-elle ? que veulent dire ces petites barques pleines de morts et ce Lac de l’Angoisse et ces Vallées du Sang ? en quel pays l’emporte son coursier noir ? en France. Tels sont les traits sous lesquels le poëte représente ce pays. Ces traits sont ceux que les anciens Bretons prêtaient à leur enfer. C’est la terre étrangère, ce tombeau du cœur et des joies de la patrie140.
34En plus du thème cher aux romantiques141 du mal du pays, le rapport nécessaire entre le peuple breton et les deux sentiments qui l’animent apparaît dans l’une des caractéristiques de la galerie de portraits que fabrique La Villemarqué. L’auteur fait figurer dans cette guirlande de héros un grand nombre de héros masculins, mais il y place aussi des héroïnes. Ces sentiments ne sont donc pas des données culturelles, distribuées de façon différente chez les hommes et les femmes. Au contraire, tous les individus du peuple, hommes comme femmes, possèdent nécessairement ces attributs et les expriment. ce sont des données naturelles, elles sont dans la nature bretonne, par nécessité, et les hommes et les femmes sont essentiellement égaux au regard de cette nature. L’admiration de l’auteur pour ces actions de femmes ressort du champ lexical de l’héroïsme et des qualificatifs qui entourent le discours de l’auteur :
Jean de Montfort, troisième du nom, reconnu par les états pour légitime duc de Bretagne, assiégé dans la ville de Nantes, fut pris par le frère du roi de France, et conduit prisonnier à Paris. Mais la captivité du duc ne devait pas abattre pour longtemps le courage de son parti : une femme, qu’on a justement surnommée la Clorinde du moyen âge [sic], le releva. Prenant entre ses bras son fils encore enfant, et se présentant avec lui au milieu de ses barons consternés : « Montfort est pris, leur dit Jeanne de Flandre, mais rien n’est perdu, ce n’est qu’un homme ; voici mon fils, qui sera, s’il plaît à Dieu, son restorier, et vous fera du bien assez. » Puis elle s’enferma dans Hennebont que Charles de Blois attaqua vainement ; elle fit lever le siège aux Français, et rétablit les affaires de son mari.
L’incroyable audace dont cette femme extraordinaire donna des preuves au siège d’Hennebont, en allant elle-même mettre le feu au camp ennemi, l’a fait surnommer par le peuple Jeanne-la-Flamme142.
35Les trois critères que je viens de mettre en avant, à savoir premièrement, celui d’intériorité et de constitution fondamentale, celui de distinction de genre et celui de nécessité, constituent en fait les trois volets de la définition d’une essence143. Ce qui rend symbolique et sacrée l’existence du peuple breton aux yeux de l’auteur, c’est qu’elle renvoie nécessairement à un en deçà de tous les concepts issus de l’existence temporelle et qu’elle est conséquente d’une loi interne naturelle. C’est qu’elle est l’achèvement d’une essence, d’un « avoir intériorisé », d’une « autodonation144 », la « trace d’un agir fondamental145 ». De plus, l’essence bretonne qu’élabore l’auteur est à la fois déclinée dans chaque membre du peuple et une dans l’intellect. Ainsi est-il possible de distinguer la matrice (ou essence-fonction) du peuple (ou essence-réalisation146). La Villemarqué appelle la matrice la semence morale déposée dans le peuple dès sa naissance, c’est une puissance germinale, un schéma dynamique, « une sorte d’espace jeu préalable147 ». On touche là à l’intime et au secret du peuple. Et ce que révèle l’auteur au lecteur en dépeignant le peuple, c’est cette essence secrète achevée dans toutes ses déterminations, la réalisation, voire l’épanouissement de cette essence dans un organisme. Cet organisme peut être le peuple breton, mais aussi chaque membre du peuple, puisqu’il est une monade contenant à la fois le tout et le reflétant. La réflexivité de l’essence bretonne dans la multiplicité contribue à faire de l’essence ou de la nature bretonne une sorte de pôle d’attraction qui sauve le peuple breton de la dispersion148.
36Par ailleurs, la dimension sacrée qu’offre La Villemarqué au peuple breton gagne en intensité par l’écho que lui apporte le thème de la liberté. La Villemarqué n’a de cesse de proclamer la liberté du peuple breton et d’illustrer ses luttes pour la conserver149. Il est par exemple question de la « liberté nationale150 », de la « liberté bretonne151 », de « la liberté pauvre et fière152 ». Mais qu’est-ce que cette liberté que l’auteur admire ? Comment un membre d’une communauté peut-il être libre lorsqu’il n’est que l’expression d’une matrice, d’une loi écrite d’avance ? Il semble que la liberté soit selon lui la possibilité pour une existence de se déployer selon son essence. Le peuple breton est libre s’il peut s’épanouir dans la plénitude de ses données matricielles, à savoir pour les deux principales, le sentiment religieux et le sentiment national. La liberté du peuple breton, c’est d’évoluer, de se développer et de s’exprimer dans les cadres protégés de sa nature, de sa matrice. La Villemarqué fait preuve d’un certain libéralisme, thème à la mode depuis la Révolution et qui ne cesse de s’appliquer à tous les domaines de la vie. Mais ce libéralisme est tout métaphysique et philosophique et n’est en rien incompatible avec le conservatisme et la sujétion politique. Chez La Villemarqué, la dimension métaphysique de la liberté se combine à la vision organiciste du peuple qui ignore l’individu, et à la place de la vision libérale révolutionnaire d’individus libres formant une nation, il développe l’idée que tout Breton est un membre d’un peuple libre.
Auto-préservation
37La Villemarqué s’attache à donner du peuple breton l’image d’un tout intact et fermé sur lui-même, d’un corps dont l’existence sacrée tient en ce qu’elle est la manifestation d’une essence, d’une nature immanente dont les deux principaux fondements, le principe national et le principe religieux, lui assurent une homogénéité et une identité. L’insistance avec laquelle La Villemarqué donne à voir la façon dont se protège ce corps pour garder son équilibre et son intégrité est remarquable. La vision organique mène l’auteur à poursuivre la métaphore biologique en manifestant son soutien, son admiration, voire sa jubilation face à ce peuple qui se défend contre toute intrusion étrangère, comme un corps sain qui se protège de corps étrangers qui le rendraient malade. Tout comme un organisme sécrète des anti-corps, si le peuple breton « engendre encore des fils, c’est pour tuer les oppresseurs153 », affirme La Villemarqué en reprenant les termes d’un chant. À la moindre provocation, la réponse ne se fait pas attendre, le peuple breton réagit naturellement, pour ainsi dire de façon réflexe.
38Cette réaction d’autodéfense, d’autoprotection, se manifeste par un rejet instinctif et brutal de l’Autre. « On ne l’écoute pas, on l’insulte, on veut le tuer ; alors sa fierté naturelle se révolte154 », atteste La Villemarqué. La rapidité et l’unanimité de la réaction sont mises en avant : « Du jour où la révolution abattit les croix et traita la Bretagne en pays conquis, il y eut cent mille hommes sous les armes155. » L’instinct de survie du peuple breton et son sens inné d’autoprotection paraissent très forts : « Toujours un mobile unique le dirige : le plus ardent patriotisme156. » Le contact du corps breton et du corps étranger est parfois tel qu’il réveille les morts, qu’il provoque un sursaut des ancêtres :
les ombres de ses ancêtres en frémissent d’indignation, leurs ossements gardés dans les reliquaires du pays retrouvent, pour un instant, la vie par miracle ; ils s’avancent, comme une armée, au devant du ministre des iniquités étrangères, et dans leur sublime fureur ils mettent en pièce l’ennemi de leur petit-fils157.
39La Villemarqué donne l’impression de faire de ces réactions des sortes de réactions chimiques dont le peuple n’est pas maître, tout comme le pensait aussi Bernardin de Saint-Pierre pour qui le patriotisme contenu dans certains chants fait « bouillir le sang dans les veines158 ». La même image est fournie par l’auteur du Barzaz-Breiz qui constate que certains chants « réveillent tous les souvenirs patriotiques des Bretons, depuis douze siècles159 », qu’ils offrent « souvent je ne sais quoi de mystérieux et de sacré160 » et La Villemarqué en donne les explications sous la forme du témoignage d’un paysan auquel il prête les paroles suivantes :
c’est que plusieurs d’entre elles [les chansons] ont une vertu, voyez-vous ; le sang bout, la main tremble, et les fusils frémissent d’eux-mêmes, rien qu’à les entendre ; plusieurs contiennent des mots et des noms qui ont la propriété de mettre l’écume de la rage à la bouche des ennemis des chrétiens, et de faire éclater leurs veines ; quand nous les chantions en marchant contre les Bleus, nous voyions qu’ils les faisaient frin- guer, comme de jeunes chevaux qui ont bu du vin de feu mêlé à de la poudre à canon ; quand nous les dansions la nuit autour du bivac [sic], dans quelque cour de manoir incendié par les républicains, nous entendions, vous ne le croiriez pas ? nous entendions nos fusils, nos bâtons et nos fourches de fer, rangés en faisceaux derrière nous, s’agiter d’eux-mêmes et murmurer comme s’ils eussent été impatientés de rester au repos161.
40Ce tableau n’est d’ailleurs pas sans rappeler celui qui précède le « bardit » inséré dans les Martyrs de Chateaubriand :
La terre paraît embrasée du feu des casques et des lances, les instruments guerriers sonnent l’air antique de Jules César partant pour les Gaules. La rage s’empare de tous les cœurs, les yeux roulent du sang, la main frémit sur l’épée. Les chevaux se cabrent, creusent l’arène, secouent leur crinière, frappent de leur bouche écumante leur poitrine enflammée, ou lèvent vers le ciel leurs naseaux brûlants, pour respirer les sons belliqueux162.
41Qui sont donc ces Autres, ces étrangers capables de réveiller les morts et contre lesquels se révoltent les Bretons ? Il n’est pas difficile de les cerner, les pages du Barzaz-Breiz fourmillent des noms des deux principaux Autres que La Villemarqué veut à tout prix distinguer du corps breton : les Français163 et les Anglais164. L’auteur atteste, au sujet du chanteur de la chanson intitulée « Alain-le-Renard », que l’« on ne peut douter, d’après le sujet de la pièce, que ces noms [les hommes du Nord, à savoir selon la Villemarqué les Gaulois, Francs et Saxons] ne soient pour lui synonymes d’ennemis en général165 ».
42Toutes les tentatives d’intrusion dans son corps sont perçues comme autant de « terribles et sanglantes épreuves imposées à son patriotisme166 ». Cette intrusion semble métaphoriquement contre-nature et les deux corps biologiquement incompatibles puisque, dans un chant que l’auteur cite, la Bretagne est incarnée par une génisse et son ennemi par un loup et « jamais, non jamais, la génisse ne s’alliera au loup167 ». Plus que des provocations de la part des étrangers, La Villemarqué voit dans les intrusions étrangères des viols. Les étrangers ne cessent de « violer la loi du pays168 », ils « violent ses coutumes nationales169 », ce sont les « violateurs de ses lois170 », ils ne se soucient guère de la « violation à la foi jurée171 » ou de la « violation du pacte d’union172 ». L’étranger viole l’intégrité corporelle du peuple breton. L’emploi du terme « violer » révèle la conception de l’auteur basée sur une peur de l’intrusion, de l’envahissement du corps sacré et de la dislocation du peuple-organisme.
43La brutalité et la froideur des étrangers sont sans cesse rappelées : ils agissent « brutalement173 », La Villemarqué compare leurs agissements à ceux d’un « pied brutal174 » et s’appuie sur l’image de la « veuve brutalisée par l’impitoyable acquéreur175 ». Le caractère monstrueux de ces étrangers, déjà bien établi par l’image de violateur-violeur brutal, est renforcé par les champs lexicaux de l’envahissement, de la corruption et de la destruction : La Villemarqué dénonce par exemple la « corruption étrangère176 », les « envahissements de la France177 », les « ravages commis en Bretagne par les étrangers178 » ; le « pays est envahi, leur territoire ravagé179 » ; l’auteur reprend les termes de M. d’Argentré pour dire que les étrangers « ne laissaient de piller, massacrer et ravager le plat païs180 », puis raconte que « des aventuriers étrangers [...] ravageaient le pays de Bretagne181 », et que même depuis l’union de la Bretagne à la France, « ses terribles alliés [...] ravagent la Bretagne182 ». À la destruction s’ajoute l’oppression. Le terme de « joug » complète le champ lexical établi par « opprimer », « oppression » et « oppresseur ». Le Breton accuse les « traîtres qui préfèrent le joug doré de l’ennemi183 », il « poursuit d’imprécations l’étranger, oppresseur de son culte184 », cherche à « secouer le joug de la France185 », le « joug des conquérants186 », le « joug de l’étranger187 ».
44Qualifiant les Français et les Anglais d’étrangers oppresseurs, l’auteur du Barzaz-Breiz ne peut que prêter aux Bretons des sentiments de haine et de mépris à leur égard. Ces sentiments, il leur fait prendre leur source dans les temps les plus reculés, à l’époque de la semence primordiale. La semence a germé, ce qui explique pourquoi le Breton entretient « une haine pour l’oppression étrangère188 », que tel ou tel événement « réveille au fond de sa mémoire tenace les imprécations païennes qu’il vomissait jadis contre les étrangers189 », qu’il est toujours animé « par la vieille haine réciproque des Anglais et des Bretons190 ». L’auteur constate que « l’ennemi, soit Français, soit Anglais, était également odieux au peuple breton191 » et que « les ravages commis en Bretagne par ceux qu’on y regardait toujours comme des étrangers, inspirent au poëte populaire la même haine [aversion192] pour eux qu’à ses prédécesseurs193 ». Par conséquent, il n’est pas étonnant que « la haine du nom français éclate dans ce chant [Jeanne de Montfort]194 » — il éclate même « horriblement » dans l’édition de 1867195 –, que l’on trouve trace dans les chansons d’un « sentiment d’antipathie pour le loup, comme il appelle la France196 », France qui se transforme dans cette même phrase en « ennemi Français197 » dans l’édition de 1867, ou encore que, dans un autre chant, le Français soit affublé du surnom « Lorgnez/lèpre198 ».
45En outre, ce sentiment de haine se transforme parfois en véritable jubilation de la part du Breton qui, par exemple, « rit de tout son cœur en voyant l’herbe verte rougie du sang des oppresseurs de sa nation ; il se couche parmi les cadavres comme un lion rassasié au milieu d’un troupeau de moutons égorgés ; il se délasse en les regardant199 », et voyant les ennemis et leurs tentes consumés par les flammes qu’il a allumées, il s’écrie avec une joie féroce : « Nous aurons une belle récolte. Les anciens disaient vrai : “Il n’est rien tel que des os d’ennemis broyés pour faire pousser le blé”200. » Il semble même que de la jubilation des Bretons à la délectation de l’auteur il n’y a qu’un pas. D’une part La Villemarqué n’écarte pas, bien au contraire, les scènes morbides de son texte, d’autre part il n’oublie pas de rappeler que ces scènes sont sanglantes201, et enfin il dévoile son penchant pour ce genre de spectacle dans une note du chant intitulé « Lez-Breiz ». Ce chant contient les vers suivants :
Hideux spectacle ! Avec sa peau noire et ses dents blanches, elle [la tête du Maure] effrayait ceux qui passaient ;
Ceux qui passaient et qui regardaient sa bouche ouverte qui bâillait.
/Euzuz zell ! du he zremm, gwenn he zent ; Ken a sponte neb a oa enn hent.
Neb a oa enn hent hag a zelle ; Ouz he vek digor a vadaille202.
46Ces vers ne semblent pas convenir à l’image que se fait l’auteur des Bretons, il pense que la chanson a été modifiée et il rétablit donc les sentiments premiers, c’est-à-dire le chant dans sa vérité originelle : une note de bas de page indique que « la vue de la tête coupée de leur ennemi devait moins effrayer que réjouir les Bretons, il est donc probable que l’original portait hetuz [agréable] au lieu d’euzuz, et laouenne [réjouissait] au lieu de a sponte203 ».
47La caution qui légitime l’incessante démonstration de force illustrée au fil du texte n’est que l’arrière-plan de l’autoprotection dont fait preuve le peuple breton dans le Barzaz-Breiz. Le Barzaz-Breiz est une fabrique, légitimée et exaltée, de faits de guerre en tout genre. « Combats », « batailles », « guerres », « luttes », « révoltes » forment l’un des motifs les plus redondants du texte et il est sans cesse mis en valeur par un champ lexical très large de la guerre auquel appartient une très grande série de termes204 qui forment un vaste réseau thématique s’élevant à 141 occurrences en 1839, puis à trois fois plus dans les éditions suivantes, avec 405 occurrences en 1845 et 407 en 1867205.
48La Villemarqué met en scène quelques héros qu’il emmitoufle de ce champ lexical comme par exemple Lez-Breiz, « soldat toujours armé pour la défense de sa patrie, toujours prêt à se battre206 », et que les chansons font « combattre et vaincre [...] mille rivaux terribles que lui oppose toujours le roi de France207 » au point que « le roi et sa cour, témoins du combat, demeurent consternés, désespérant de pouvoir jamais soumettre un si redoutable ennemi208 ». Mais, pour insister sur le fait que la lutte est entièrement instinctive et qu’elle naît en chaque membre du peuple de façon identique et naturelle, l’auteur met en avant l’image des paysans qui se transforment en soldats pour préserver leur liberté, image que l’on retrouve aussi chez Walter Scott concernant les Highlanders209 :
quand enfin, après plusieurs siècles, elle [leur liberté] leur échappe au milieu d’une tempête qui ébranle l’Europe entière, quand leur pays est envahi, leur territoire ravagé, et leurs prêtres bannis ou condamnés à mort, leur voix s’éveillant tout à coup avec les sons du tocsin, salue l’étendard paroissial qui flotte aux sommets des clochers, enflamme les bandes guerrières de paysans changés en soldats, et retrouve pour les chanter son antique inspiration210.
49Car les gens de la terre, et tout particulièrement ceux de Plouyé, sont « de la race des hardis paysans dont les fourches de fer et les bâtons noueux repoussèrent, au onzième siècle, la tyrannie normande211 ». Ainsi, liberté et virilité se soutiennent réciproquement.
50Toutefois il est assez surprenant que La Villemarqué approuve et soutienne cette expression de haine et de violence qui ne correspondent que peu à ce que dicte la morale chrétienne que défend par ailleurs l’auteur. Comment légitime-t-il cela ? Par le fait que ces sentiments et ces actes ne relèvent pas de la conscience mais de l’instinct : les Bretons sont inspirés « par une haine aveugle que la raison ne peut blâmer ni absoudre212 ». C’est leur cœur qui parle : « un sentiment de nationalité lui parlait au cœur213 ». De plus, « dans ses amours comme dans ses haines, le paysan breton est toujours mû par un sentiment remarquable de justice et d’impartialité214 ». Il n’est rien d’autre que loyal et « rien ne put corrompre sa loyauté215 ». C’est pourquoi les Bretons « traitaient de félons les hommes du pays dévoués au roi216 » et « sans freins dans ses amours comme dans ses haines, alors même qu’il maudit les étrangers qui l’attaquent, il bénit ceux d’entre eux qui se sont faits Bretons pour le défendre217 ». Le sentiment de haine et la violence dont fait preuve le peuple breton ne sont que les révélateurs d’un sentiment juste, d’un sentiment qui est le pur produit de leur essence matricielle. Au-delà de la morale, La Villemarqué accorde sa totale bienveillance et même son admiration à tout ce qui provient de cette nature.
51De plus, il est bien plus aisé de légitimer des actes de violence depuis que Schiller a écrit les Brigands et que Scott a présenté à l’Europe son Robin Hood. Derrière tout hors-la-loi peut se cacher un combattant de la liberté218. En effet, l’adjuvant lexical indispensable pour comprendre la légitimité que confère La Villemarqué à toutes ces luttes et à ce mépris tient dans le champ lexical de la légitime défense et de la victimisation : « défense », « résistance », « délivrance », « insurrection », « rébellion », « indépendance », « liberté », « ténacité », « opiniâtreté », « vengeance », « servitude », « victimes » et « martyrs » par exemple219. La Villemarqué brosse le tableau d’un nationalisme défensif et réactionnaire. Il veut faire comprendre au lecteur que cela est une question de survie, que ces guerres sont nécessaires car elles sauvent l’existence même du peuple breton.
52Se placer du côté du plus faible ou de l’oublié par charité chrétienne, c’est ce que fait La Villemarqué, tout comme l’historien Augustin Thierry ou encore son frère Amédée qui explique à propos de l’élaboration de son ouvrage sur les Gaulois qu’« un autre sentiment encore, un sentiment de justice et presque de pitié, a déterminé et soutenu [l’auteur] dans cette longue tâche220 ». De la même manière, La Villemarqué a l’impression de rendre justice au peuple breton car :
Partout une espèce d’anathème a été lancé contre cette race malheureuse que sa fortune seule a trahie. Partout frappée d’ostracisme, elle a été longtemps bannie du domaine de la science ; et même aujourd’hui, qu’elle n’a plus à gémir sous la tyrannie du glaive, le despotisme intellectuel ne l’a pas encore partout délivrée de son joug221.
53Ainsi, la restitution des faits de guerre est agrémentée d’un certain nombre d’adverbes ou d’adjectifs qui renforcent ce parti pris. Par exemple, l’auteur atteste à propos du chef Budik qu’« il combattit les Francs et défendit vaillamment contre eux la liberté de sa patrie222 ». Il évoque par ailleurs l’autorité française que le peuple « repoussait toujours223 », les « espérances de la patrie, espérances souvent déçues, jamais abandonnées224 », les « douze siècles de résistance opiniâtre225 » du peuple breton, à nouveau son « esprit de résistance opiniâtre226 » que l’auteur qualifie poétiquement — et encore sous une métaphore végétale — de « doux fruit sur une tige amère227 ».
54Le sentiment d’enthousiasme de La Villemarqué pour les actions des Bretons se manifeste au fil des pages par l’utilisation que fait l’auteur du matériel banal de la distribution dichotomique qui installe l’ennemi du côté de la félonie, de la traîtrise, de l’injure, de l’insolence et de la méchanceté, et fait du courage, de l’héroïsme, de la bravoure et de la légitime défense les attributs des Bretons. Dans ce schéma binaire, la vengeance est justifiée car elle est toujours une réponse à une injure228 ou à une insolence229. L’auteur touche le lecteur en signalant le cas de Gwenc’hlan « victime de son dévouement à la cause de son pays230 », d’un autre « victime de l’étranger français231 » ou « victime de l’étranger anglais232 ». Les Bretons deviennent ainsi des martyrs et leurs chants prennent alors une dimension sacrée : « le fer de la guillotine en coupant la gorge des chanteurs pour étouffer la voix qui célébrait la résistance perpétuelle de la Bretagne à l’oppression, achevait de rendre leurs chants sacrés pour leur compatriotes233 ». Leurs chants, mais aussi leur terre, « cette terre sacrée qu’ils foulaient, ces tombes des aïeux morts le fer à la main234 ».
55Et puis finalement, point n’est besoin de justification. Les choses sont ainsi, naturellement et cela suffit amplement à l’argumentaire de l’auteur. L’auteur répète à quatre reprises que les Bretons ont « horreur de la servitude235 », cela semble faire partie de leur nature et ne se discute pas. Par ailleurs, il assène qu’ils sont les « défenseurs naturels, sinon constants, de leur religion, de leur pays et de leur liberté236 », qu’ils obéissent à la « nécessité de défendre leur indépendance237 » et que la conséquence normale de tout cela est la « résistance perpétuelle de la Bretagne à l’oppression238 ».
56Le fil conducteur des divers champs lexicaux en rapport avec la guerre, la haine et la résistance est le thème de la puissance et de la force. Une énergie extraordinaire se déploie dans presque toutes les pages du Barzaz-Breiz, énergie physique ou émotionnelle. Mais force parmi la force, ce sont les montagnards qui tiennent le haut du pavé. La révolte la plus ferme et les sentiments les plus ardents se trouvent concentrés dans les montagnes bretonnes. C’est ce qui explique qu’en dehors du secteur géographique des environs de Quimperlé — région d’origine de La Villemarqué — les montagnes Noires et les montagnes d’Arrée occupent une place très importante dans les régions de collectage privilégiées par l’auteur.
57C’est sans doute Jean-Jacques Rousseau qui a le plus contribué à faire du thème de la montagne un thème central du romantisme européen, et tout particulièrement par son roman de la Nouvelle Héloïse, dont le succès fut sans précédent pour un roman. Il est publié en 1761 à Amsterdam sous le titre Julie ou la Nouvelle Héloïse, Lettres de deux amants, habitants d’une petite ville aux pieds des Alpes, recueillies et publiées par J.-J. Rousseau et lance le thème de l’appel de la montagne. Au sujet de la montagne, Rousseau précise que « les méditations y prennent je ne sais quel caractère grand et sublime, proportionné aux objets qui nous frappent », qu’« à mesure qu’on approche des régions éthérées, l’âme contracte quelque chose de leur inaltérable pureté239 ». Retraite solitaire, apaisement, pureté, grandeur, le panel d’évocations est si large chez l’écrivain que chaque auteur, après lui, y trouve nourriture à sa sensibilité.
58Bernardin de Saint-Pierre, très fortement influencé par Rousseau, exalte lui aussi le sentiment de la nature dans Paul et Virginie. Mais c’est vers son Étude de la Nature qu’il faut se tourner pour y découvrir sa conception des liens entre montagne et patriotisme :
L’amour de la patrie semble croître à proportion qu’elle est innocente et malheureuse. Voilà pourquoi les peuples sauvages aiment plus leur pays que les peuples policés ; et ceux qui habitent des contrées âpres et rudes, comme les habitants des montagnes, que ceux qui vivent dans des contrées fertiles et dans de beaux climats240.
59La Villemarqué accorde une place très importante aux montagnards dans son texte241. Il est indéniable que cette place de la montagne dans le Barzaz-Breiz n’est pas étrangère au bain de culture rousseauiste et bernardiniste qui nourrit tous les écrivains de l’époque romantique, mais il faut aussi sans doute se tourner vers Macpherson et Walter Scott dont l’image des Highlanders est devenue mythique, pour trouver l’une des sources d’inspiration principales de La Villemarqué. C’est certainement aussi Fauriel, grande connaissance de La Villemarqué, et son ouvrage sur les Chants populaires de la Grèce moderne dont La Villemarqué s’est inspiré pour choisir le plan de son ouvrage, que l’on peut citer comme l’une des sources de l’auteur du Barzaz-Breiz en matière de goût pour la montagne. Le commentaire que fait Fauriel sur les airs des chants bretons du Barzaz-Breiz et que La Villemarqué place en fin de volume montre suffisamment l’enthousiasme des deux auteurs à l’égard de la montagne : « on dirait, à les entendre, qu’ils ont été faits exprès pour être chantés dans les montagnes et répétés ou prolongés par les plus sauvages et les plus bruyants de leurs échos242 ». Les mêmes idées de liens entre patriotisme fort, fermeté des sentiments et montagnards se retrouvent exprimées chez les deux auteurs. La Villemarqué regrette, en publiant les paroles de certains chants comme celui de la « Fête des Pâtres », que « l’écho des montagnes lui manque243 ». Dans les montagnes, « le caractère est tout différent244 », on y utilise un « langage naïf et figuré particulier aux hommes des montagnes245 ». Fauriel, quant à lui, explique que les chants des montagnards grecs ont « une vigueur de ton singulière » et une « hardiesse sauvage de conception, de composition et d’idées246 ».
60La montagne est perçue comme le dernier refuge des sentiments religieux et national : « Lorsque son propre peuple l’[la muse populaire] outrage en répudiant sa langue, lorsqu’il cesse de la nourrir de regrets et d’espérances, elle fuit vers les montagnes, où elle recommence à chanter, comme le rossignol, dans les forêts, quand l’incendie a dévoré le toit où il avait son nid247. » Si bien que « les regrets patriotiques que nourrissent encore les plus énergiques des Bretons modernes » se trouvent « principalement parmi le peuple des montagnards248 ». La Villemarqué a consulté un grand nombre de personnes pour préparer son ouvrage et il affirme que pour trouver les chants les plus riches en sentiments religieux et national, les Bretons qu’il faut rencontrer, ce sont « surtout ceux des montagnes, qui avaient fait partie des bandes armées du dernier siècle, et dont la mémoire, quand elle consent à s’ouvrir, est le répertoire national le plus riche qu’on puisse consulter249 ». L’auteur donne à cela quelques explications : « les montagnards avaient prouvé naguère, avec tous les Bretons, leur horreur pour la servitude française250 », ils comptent parmi les meilleurs « défenseurs armés de la liberté religieuse et nationale251 », comme par exemple Guillou Arvern dont les chants « sont dignes des vieux bardes guerriers de Bretagne, dont il est l’imitateur et le représentant252 ». Ceci explique qu’on y trouve plus qu’ailleurs des chansons guerrières : « On chante encore dans les montagnes noires une chanson guerrière sur ces événements253 », dit par exemple l’auteur à propos du faucon du seigneur Geoffroi Ier. Et si l’auteur du Barzaz-Breiz n’hésite pas à donner aux montagnards une image d’hommes cruels, c’est parce que cette cruauté est légitime et juste, et qu’elle n’est exercée qu’envers leurs ennemis, la France et l’Angleterre : « Ainsi se vengeaient les montagnards bretons forcés de se faire justice eux-mêmes, à défaut de chefs nationaux de leur race pour la leur rendre254 », conclut La Villemarqué255.
61Le peuple breton du Barzaz-Breiz, doué d’une force et d’une énergie impressionnantes, et décrit comme étant perpétuellement au combat, se montre parfois aussi doux et délicat. La Villemarqué avoue d’ailleurs dans la préface de 1867 que « ce sont ces croyances et ces sentiments qui ont charmé par leur énergie ou leur grâce256 ». Il arrive qu’il évoque une scène d’une « infinie délicatesse257 », tel « trait plein de délicatesse et de sensibilité258 », de « douces croyances », une « gaieté calme et tempérée259 ». L’auteur affiche son émotion en soupirant qu’« il est impossible d’exprimer avec plus de délicatesse un sentiment plus doux260 ». Ce lot de sentiments contraste nettement avec la force, la détermination et la jubilation sanguinaire dont l’auteur exploite par ailleurs les images.
62Il semble que ce soit le christianisme qui soit à l’origine de cette éclosion de sentiments et de la temporisation de l’énergie débordante du peuple breton. La Villemarqué rappelle le moment où naît cette nouveauté sentimentale : « Mais quel changement soudain s’est opéré en lui ? [...] Le barbare tombe à genoux devant le Dieu qu’il a invoqué, et auquel il doit la victoire ; il lui élève des autels comme au soutien de son pays, comme à son protecteur, et la religion remporte [sur lui]261 un nouveau triomphe262. » Ce moment est crucial pour l’auteur car le peuple breton vient de découvrir par le christianisme une véritable mère consolatrice, protectrice et apaisante263. Elle parle aux Bretons comme à des enfants :
Pensez, chers petits, leur dit-elle, que Dieu vous regarde, comme le soleil, du haut du ciel ; pensez qu’il vous fait fleurir, comme le soleil, les roses sauvages des montagnes... Quand viendra le jour de la Fête-Dieu, ceux d’entre vous qui auront été bien sages seront choisis pour jeter des fleurs sur les pas du Sauveur, en attendant qu’ils en jettent devant lui au ciel264.
63Le christianisme semble remplir le pôle religieux de la matrice d’un volume maternel, de douceur et de mesure. Le pôle paternel, quant à lui, est occupé par le sentiment national. Il est davantage lié au sol, à la force, à la virilité et à l’agressivité. Il semble que la virilité des Bretons doive être à la fois cultivée et modérée : cultivée pour éviter l’envahissement de l’indigène par l’étranger et modérée pour éviter la démesure, ce qui permet à l’auteur de présenter son personnage, le peuple breton, comme un alliage paradoxal du doux et du dur. Il n’est d’ailleurs pas étonnant de constater que l’endroit où cet alliage est le plus dense est la montagne, image de l’intériorité donc de l’inconscient de la terre, qui peut aussi bien produire de la lave et du feu que des cristaux et des pierres précieuses265. La constitution androgyne du peuple breton réapparaît dans la dernière phrase du Barzaz-Breiz ; elle met en scène le Breton ayant toujours un lien fort au sol, au pôle masculin, mais inexorablement attiré par le pôle féminin, marchant vers les bras de la foi-mère : « le Breton, toujours le même par le cœur, depuis douze siècles, toujours le front calme et serein, s’avance d’un pas ferme et sûr au milieu des tombeaux, pleins d’échos, de ses pères, vers un point rayonnant du ciel que lui montrent au loin l’Espérance et la Foi266 ».
Notes de bas de page
1 Cité par Ricarda Huch, Les romantiques allemands, traduit par André Babelon, Aix-en-Provence, Pandora-Essais, 1933-1979, t. I, p. 117.
2 Jean-René Derré, Lamennais, ses amis et le mouvement des idées à l’époque roman-tique (1824-1834), Paris, Librairie C. Klincksieck, 1962, p. 6.
3 H. Y. Arquillère, Histoire de l’Église, éd. revue et augmentée, Paris, Éditions de l’École, 1941, p. 421.
4 F. R. de Chateaubriand, Génie du christianisme, 1802, rééd. GF-Flammarion, Paris, 1966, p. 57.
5 Jean-René Derré, op. cit., p. 40-41.
6 Ibid., p. 8.
7 H. Y. Arquillère, op. cit., p. 442.
8 Jean-Yves Guiomar, Les Historiens bretons au xixe siècle. Le Bretonisme, thèse, Rennes, 1986, p. 87.
9 Pierre de La Villemarqué, La Villemarqué, sa vie et ses œuvres, éd. revue et augmentée, Paris, Honoré Champion, 1926, p. 8.
10 La Villemarqué, « Les précurseurs de nos études. III : Chateaubriand », Revue des Traditions populaires, Paris, Maisonneuve et Leclerc, 1888, t. III, p. 418-421.
11 Paul Sébillot, « Ce que m’a dit La Villemarqué », Le Fureteur breton, 7e année, 1911-1912, p. 175-176.
12 La Villemarqué, « Les précurseurs de nos études. III : Chateaubriand », op. cit., p. 418.
13 Pierre de La Villemarqué, op. cit., p. 14-16.
14 Ibid., p. 16-18.
15 Ibid., p. 24-25.
16 Ibid.
17 Jean-Yves Guiomar, La Nation entre l’histoire et la raison, Paris, Armillaire, Éd. La Découverte, 1990, p. 103-104.
18 Ibid., p. 104.
19 Ibid., p. 120.
20 BB 1845, Combat de la surveillante, t. II, p. 203.
21 Frédéric Besset, Introduction à l’histoire du xixe siècle, Paris, Armand Colin, 1998, p. 51.
22 Félix Ponteil, L’Eveil des nationalités et le mouvement libéral (1815-1848), Paris, PUF, nouvelle édition, 1960, p. 153-157.
23 Ibid., p. 168-171.
24 Hume, cité par Félix Ponteil, op. cit., p. 438. Voir aussi p. 436-441.
25 Ibid., p. 172.
26 Ibid., p. 172-184.
27 Ibid., p. 184-189.
28 Ibid., p. 242-246, 266-276.
29 Ibid., p. 238-242, 276-279.
30 Ibid., p. 458-477.
31 Jacques Droz, La Formation de l’unité allemande, 1789-1871, Paris, Hatier Université, 1970.
32 Félix Ponteil, op. cit., p. 279-282.
33 B. Reizov, l’historiographie romantique française, 1825-1830, moscou, éditions en langues étrangères, s. d., p. 133.
34 Claudine Lacoste, « Les Gaulois d’Amédée Thierry », dans Paul Viallaneix (dir.), Nos Ancêtres les Gaulois, Actes du colloque international de Clermont-Ferrand, Faculté des Lettres et Sciences Humaines, 1982, p. 206.
35 Bernard Tanguy, Aux origines du nationalisme breton. Le renouveau des études bretonnes au xixe siècle, Paris, UGE, 10/18, 1977, p. 249 ; et Bernard Tanguy, « De la gallomanie au nationalisme breton », dans Paul Viallaneix (dir.), Nos Ancêtres les Gaulois, op. cit., p. 187.
36 La celtomanie et le mythe de l’unité de la Bretagne et de la Celtie ont été principalement interprétés à partir de l’Historia regum Britanniae de Geoffroy de Monmouth auquel La Villemarqué se réfère à de nombreuses reprises. Voir David Greene, Makers and Forgers, Cardiff, University of Wales Press, 1975 ; et Joseph Rio, Mythes fondateurs de la Bretagne, Aux origines de la celtomanie, Rennes, Éditions Ouest-France, 2000.
37 Jean-Yves Guiomar, « Le celtisme chez les intellectuels français/bretons de gauche au xixe siècle », dans Alain Droguet (éd.), Les Bleus de Bretagne, de la Révolution à nos jours, Actes du colloque de Saint-Brieuc-Ploufragan, 3-5 octobre 1990, Fédération Côtes-du-Nord 1989, 1991, p. 288.
38 Ibid., p. 283.
39 Bernard Tanguy, « De la gallomanie au nationalisme breton », op. cit., p. 187.
40 Voir Bernard Tanguy, Aux origines du nationalisme breton, op. cit. , p. 249-275.
41 Publié en 1799.
42 Jean-Yves Guiomar, « Quand les bretonistes répudièrent la Gaule (1840-1850) », dans Paul Viallaneix (dir.), Nos Ancêtres les Gaulois, op. cit. , p. 195.
43 Bernard Tanguy, « De la gallomanie au nationalisme breton », op. cit., p. 188.
44 Bernard Tanguy, Aux origines du nationalisme breton, op. cit. , p. 320.
45 Jean-Yves Guiomar, Les historiens bretons au xixe siècle. Le Bretonisme, op. cit., p. VII.
46 Ibid., p. 148.
47 BB 1845, Conclusion, p. 474.
48 « L’enseignement que le prêtre païen donne à son élève est sérieux, grave, sombre, et, avant tout, religieux. [...] La même voie fleurie le mène à l’amour du merveilleux ; [...] Passant à un autre ordre d’idées, le maître apprend à son élève qu’un jour des vaisseaux étrangers descendirent sur les rivages de la patrie, qu’ils la dévastèrent ; que les prêtres, pères et chefs du peuple, furent égorgés par eux, hormis un petit nombre qu’on voyait errer, fugitifs, avec des épées brisées, des robes ensanglantées, des béquilles. Et, devant ce tableau plus saisissant encore que celui devant lequel fit serment le jeune Annibal, l’enfant va jurer haine à mort aux étrangers, et protester qu’il défendra éternellement, contre eux, le culte de ses pères, les lois de son pays et son indépendance. De la sorte, naît en son cœur, comme un doux fruit sur une tige amère, cet amour du sol natal et de la liberté, cet esprit de résistance opiniâtre, ce dévouement aux chefs nationaux, et cet instinct de conservation qu’il ne perdra jamais. » (BB 1845, Conclusion, p. 474-475).
49 BB 1839, Introduction II, p. v.
50 Ibidem, p. iv.
51 L’auteur élargit d’ailleurs clairement les dimensions de sa fresque en transformant le titre de la première partie des chants de l’édition de 1839, « chants historiques », en « chants mythologiques, héroïques et historiques » dans l’édition de 1845.
52 BB 1845, Conclusion, p. 475.
53 Jean-René Derré, op. cit., p. 64-66, 143-147, 258-260.
54 BB 1845, Introduction II, p. XVIII.
55 Ibid., Séries, t. I, p. 16.
56 Ibid., Conclusion, p. 474.
57 Ibid., p. 486.
58 Ibid., p. 485-486.
59 Ricarda Huch, op. cit., p. 120.
60 Même si pour lui le catholicisme est l’évolution normale du christianisme, par opposition au protestantisme. Voir chapitre suivant.
61 En 1839, 36 « chrétien, christianisme » pour seulement 4 « catholique » ; en 1845, l’écart se creuse davantage avec 61 « chrétien, christianisme » pour 5 « catholique » ; et en 1867, 65 « chrétien, christianisme » pour 6 « catholique ».
62 BB 1839, Enfer, t. II, p. 347.
63 BB 1845, Conclusion, p. 486.
64 Ibid., p. 479.
65 BB 1845, chouans, t. ii, p. 243.
66 BB 1839, Prêtre Exilé, t. II, p. 153.
67 BB 1845, conclusion, p. 487.
68 Ibid., Mal du Pays, t. II, p. 369.
69 Ibid., conclusion, p. 478.
70 Ibid, Baron de Jauioz, t. I, p. 352, et BB 1845, Conclusion, p. 476.
71 BB 1845, conclusion, p. 479.
72 Ibid, Introduction X, p. LXVII.
73 Ibid, Conclusion, p. 486.
74 BB 1839, Prêtre Exilé, t. II, p. 153.
75 Les mots « fidèle » et « fidélité » apparaissent 8 fois en 1839, 28 fois dans l’édition de 1845 et 30 en 1867. Le nombre de termes en lien avec le « dévouement » s’élève à 6 en 1839, 19 en 1845 et en 1867.
76 BB 1845, Conclusion, p. 488.
77 BB 1839, Introduction X, p. lxviij.
78 BB 1845, Conclusion, p. 477.
79 Ibid, Mort de Pontcalec, t. II, p. 164.
80 BB 1839, Élégie Nevet, t. II, p. 98.
81 Ibid, Introduction X, p. lxviij.
82 Ibid, Frère de Lait, t. I, p. 198.
83 BB 1845, Conclusion, p. 481.
84 Ibid., p. 475.
85 BB 1845, Introduction X, p. LXVII.
86 Ibid, Conclusion, p. 481.
87 BB 1839, Introduction X, p. lxviij.
88 BB 1845, Marche d’Arthur, t. I, p. 83.
89 Ibid., Lez-Breiz, t. I, p. 127.
90 Ibid., Conclusion, p. 481-482.
91 Anne-Marie Thiesse, La création des identités nationales. Europe xviie-xxe siècle, Paris, Seuil, coll. L’Univers historique, 1999, p. 14.
92 Jacques Rançière, Mallarmé. La politique de la sirène, Paris, Hachette, coll. Incises, 1996, p. 7475. À propos de Wagner.
93 L’indigène est représenté entre autres par les 123 « breton- », 249 « Bretagne » et 42 « national ». Le terme « étranger », s’il n’est utilisé que 16 fois en 1839, l’est à 70 reprises en 1845 et à 66 en 1867.
94 Claudine Lacoste, « Les Gaulois d’Amédée Thierry », dans Paul Viallaneix (dir.), op. cit., p. 203-209. (Amédée Thierry, Histoire des Gaulois, depuis les temps les plus reculés jusqu’à l’entière soumission de la Gaule à la domination romaine, 1828.)
95 BB 1845, Introduction V, p. XLIII.
96 BB 1839, Carnaval de Rosporden, t. I, p. 256.
97 BB 1845, Vin des Gaulois, t. I, p. 75.
98 BB 1839, Baron de Jauioz, t. I, p. 177.
99 BB 1845, Tribut de Noménoë, t. I, p. 185.
100 Ibid., Introduction II, p. X. ; 1845, Temps Passé, t. II, p. 286 ; BB 1845, Hirondelles, t. II, p. 393 ; BB 1845, Conclusion, p. 477.
101 BB 1839, Élégie de M. de Névet, t. II, p. 98.
102 BB 1845, Introduction X, p. LXXVIII.
103 Ibid, Introduction VIII, p. LXII (note).
104 Ibid, Introduction VIII, p. LXIII.
105 BB 1839, Introduction VIII, p. lxij.
106 BB 1845, Introduction VIII, p. LXI.
107 Ibid., Bataille des Trente, t. I, p. 333. Dans le Dictionnaire Larousse du xixe siècle (t. IX, p. 694), une « mémoire ingrate » est une « mémoire infidèle, qui ne retient pas les choses qu’on lui confie ». Voir aussi sa vision négative du parler vannetais qu’il considère comme trop mélangé au français, dans Bernard Tanguy, Aux origines du nationalisme breton. op. cit., t. I, p. 165-166.
108 On trouve des traces de cette distinction indigène/étranger chez d’autres auteurs, comme chez le poète écossais Allan Ramsay dès 1724 qui parle déjà avec regret des « garnitures étrangères », des « broderies étrangères », de « poésie gâtée par les importations du continent », les opposant aux « bons vieux bardes », au « produit de leur propre pays », etc. Le même principe caractérise les œuvres des Suisses Béat de Muralt, von Haller et Bodmer. (Anne-Marie Thiesse, op. cit., p. 30).
109 BB 1839, Introduction VII, p. lvj.
110 Jean-Jacques Rousseau, La Nouvelle Héloïse, Œuvres Complètes, Paris, La Pléiade, 1961, t. II, p. 242.
111 Ibid., p. 243.
112 BB 1867, Lez-Breiz, p. 111.
113 BB 1845, Avant-Propos, p. xviij.
114 Ibid., Introduction II, p. XII.
115 BB 1839, Introduction V, p. xxxix.
116 Ibid, Introduction X, p. lxxiij.
117 Ibid, Introduction X, p. lxxvij.
118 René Girault, Peuples et nations d’Europe au xixe siècle, Paris, Hachette, 1996, p. 84.
119 BB 1839, Introduction X, p. lxviij.
120 BB 1845, Introduction X, p. LXVIII.
121 Ibid, Introduction X, p. LXXIV.
122 BB 1839, Introduction X, p. lxxv.
123 BB 1845, Introduction X, p. LXXV.
124 BB 1839, Introduction X, p. lxxvij.
125 BB 1845, Introduction X, p. LXXVII.
126 Les mots « nation » et « national » apparaissent 35 fois en 1839, 82 fois en 1845 et 79 fois en 1867.
127 Le mot « populaire » apparaît 139 fois en 1839, 198 fois en 1845 et 197 fois en 1867.
128 Par exemple, les « roches druidiques » du tertre de Mael-Pestivien en 1845 deviennent des « roches celtiques » en 1867 (BB 1845, Vassal de Du Guesclin, t. I, p. 376. BB 1867, Vassal de Du Guesclin, p. 227), les « pierres de vérité » passent de « monuments druidiques » à « monuments celtiques » entre 1845 et 1867 (BB 1845, Fête de Juin, t. II, p. 325. BB 1867, Fête de Juin, p. 430).
129 BB 1839, Baron de Jauioz, t. I, p. 176.
130 BB 1867, Baron de Jauioz, p. 210.
131 BB 1839, Mal du Pays, t. II, p. 271-275.
132 BB 1845, conclusion, p. 477.
133 MM. Benoiston de Chateauneuf et Villermé, Rapport d’un voyage fait dans les cinq départements de la Bretagne pendant les années 1840 et 1841, d’après les ordres de l’Académie des Sciences morales et politiques, Paris, Firmin Didot Frères, 1843, rééd. Tud ha Bro, Sociétés Bretonnes, 1982.
134 BB 1845, Mal du Pays, t. II, p. 374. Voir MM. Benoiston de Chateauneuf et Villermé, op. cit., p. 9.
135 BB 1845, Mal du Pays, t. II, p. 374.
136 BB 1839, Mal du Pays, t. II, p. 271.
137 Voir aussi les exemples de renoncements à l’état ecclésiastique : l’écolier « jette au feu ses livres de classe, maudit la ville et le collège, renonce à l’état ecclésiastique et revient au village ». (BB 1839, Introduction IV, p. xxxvj). La Villemarqué cite aussi, en modifiant légèrement le texte, MM. Benoiston de Châteauneuf et Villermé qui relatent une anecdote sur des Bretons à la compagnie des Indes : « On raconte que l’ancienne compagnie des Indes, frappée des pertes nombreuses qu’éprouvaient les équipages de ses vaisseaux presque tous composés de matelots nés en Bretagne, et qui, transportés sur les bords du Gange, y pleuraient la patrie absente et mouraient de douleur, prit le parti d’embarquer sur chacun de ses navires un joueur de biniou. Le son de cet instrument chéri du Breton, en lui rendant les airs et les danses de son pays, adoucissait la longueur de son exil, et diminuait l’amertume de ses regrets. » (BB 1845, Mal du Pays, t. II, p. 374. Voir MM. Benoiston de Chateauneuf et Villermé, op. cit., p. 9).
138 BB 1839, Baron de Jauioz, t. I, p. 163.
139 Ibid., p. 176.
140 Ibid., p. 176-177.
141 Voir par exemple l’introduction par L.-F. L’Héritier de l’Ain à la traduction française de l’ouvrage des Grimm, Traditions allemandes recueillies et publiées par les frères Grimm, traduites par M. Theil, Paris, A. Levasseur, 1838, p. xiij. Mais aussi Jacques-Henri Bernardin de Saint-Pierre, Études de la nature, à partir de 1784, notamment (dans la nouvelle édition revue et corrigée, Paris, Aimé André, 1825) le tome troisième, p. 64.
142 BB 1845, Jeanne de Montfort, t. I, p. 313. Voir aussi la femme de Rolland Gouiket (BB 1839, Siège de Gwengamp, t. I, p. 236).
143 Stanislas BRETON, Essence et existence, Paris, PUF, coll. Initiation philosophique, 1962.
144 Ibid., p. 11.
145 Ibid., p. 12.
146 Ibid., p. 15.
147 Ibid., p. 12.
148 Ibid., p. 6.
149 Les mots « libre » et « liberté » sont mentionnés 13 fois en 1839, 34 en 1845 et 33 en 1867.
150 BB 1839, Lez-Breiz, t. I, p. 201.
151 BB 1845, Cygne, t. I, p. 386.
152 BB 1839, Introduction X, p. lxviij.
153 BB 1845, Conclusion, p. 478. Cite le chant « Le Faucon », t. I, p. 223.
154 Ibid., Conclusion, p. 480.
155 BB 1839, Chouans, t. II, p. 163.
156 BB 1845, Conclusion, p. 479.
157 Ibid., p. 480.
158 Jacques-Henri Bernardin de Saint-Pierre, op. cit., tome troisième, p. 64.
159 BB 1845, Avant-Propos, p. xvij.
160 Ibid., p. xvj.
161 Ibid.
162 Chateaubriand, Les Martyrs, Œuvres romanesques et voyages, Paris, Gallimard, La Pléiade, 1969, t. II, p. 201.
163 « Français », « France », « Francs » et « Gaulois » font l’objet de 103 mentions en 1839, 210 en 1845 et 225 dans la dernière édition.
164 Les « Anglais », l’« Angleterre » et les « Saxons » comptent 26 occurrences en 1839, 73 en 1845 et 68 en 1867.
165 BB 1845, Alain-Le-Renard, t. I, p. 204.
166 Ibid., Conclusion, p. 478.
167 Ibid, p. 481. Cite le chant « Les Ligueurs », t. II, p. 89.
168 BB 1845, Conclusion p. 479 ; voir aussi BB 1845, Jeunes Hommes de Plouié, t. II, p. 20.
169 BB 1845, Conclusion, p. 480.
170 BB 1845, Conclusion, p. 480.
171 Ibid., Ligueurs, t. II, p. 90.
172 Ibid, Conclusion, p. 481.
173 Ibid., Jeunes Hommes de Plouié, t. II, p. 20.
174 Ibid, Conclusion, p. 480.
175 Ibid., Temps Passé, t. II, p. 286.
176 Ibid., Page du Roi Louis XI, t. II, p. 31.
177 Ibid, Cygne, t. I, p. 386.
178 Ibid., Ligueurs, t. II, p. 90.
179 BB 1839, Introduction X, p. lxviij.
180 Ibid, Siège de Gwengamp, t. I, p. 236.
181 BB 1845, Bataille des Trente, t. I, p. 323.
182 Ibid, Conclusion, p. 481.
183 BB 1839, Introduction X, p. lxviij.
184 BB 1867, Conclusion, p. 524.
185 BB 1845, Ligueurs, t. II, p. 85.
186 Ibid., Cygne, t. I, p. 377.
187 Ibid, Faucon, t. I, p. 224.
188 Ibid, Bataille des Trente, t. I, p. 333.
189 Ibid., Conclusion, p. 478.
190 Ibid, Ceinture de Noces, t. I, p. 396. Cite M. de Barante, Histoire des Ducs de Bourgogne de la maison de Valois, 1364-1477, 1824-1826.
191 BB 1845, Jeanne de Montfort, t. I, p. 322.
192 BB 1867, Ligueurs, p. 284. L’auteur adoucit son propos dans la dernière édition.
193 BB 1845, Ligueurs, t. II, p. 90.
194 Ibid., Jeanne de Montfort, t. I, p. 322.
195 BB 1867, Jeanne-La-Flamme, p. 194.
196 BB 1845, Ligueurs, t. II, p. 90.
197 BB 1867, Ligueurs, p. 284.
198 BB 1839, Lez-Breiz, t. I, p. 201.
199 BB 1845, conclusion, p. 476.
200 Ibid., p. 479.
201 Les mots « sang » et « sanglant » sont utilisés 11 fois en 1839, 46 en 1845 et 48 en 1867.
202 BB 1867, Lez-Breiz, p. 97.
203 Ibid La note de bas de page n’a été insérée qu’en 1867 alors que les vers figuraient déjà dans l’édition de 1845. Il semble que ce soit une réponse à un article de C. Magnin paru dans le Journal des Savants en 1847, p. 456. Je remercie Goulven Péron pour cette remarque.
204 Tels « ennemi », « rival », « adversaire », « envahissement », « siège », « assaut », « vaincre », « victoire », « victime », « soldats », « armée », « arme », « armure », etc.
205 Au minimum puisque n’ont été comptés que les termes nommés à la note précédente.
206 BB 1839, Lez-Breiz, t. I, p. 201.
207 Ibid., p. 214.
208 Ibid.
209 Voir par exemple Walter Scott, Waverley, Robert Laffont, 1981, p. 246-247 : « Aussi, tandis que les premiers rangs d’un clan étaient composés d’hommes d’une admirable tenue, soit pour les armes, soit pour l’habillement, le reste ressemblait à de véritables bandits. L’un était armé d’une hache ou d’une épée sans fourreau, l’autre d’un fusil sans batterie ou d’une faucille au bout d’une perche, quelques-uns n’avaient que leurs dirks ou dagues, et des bâtons ou des pieux arrachés aux haies. L’air sauvage de ces hommes, leur barbe et leurs cheveux négligés les rendaient un objet de terreur autant que de surprise pour les habitants des Lowlands. »
210 BB 1839, Introduction X, p. lxviij.
211 BB 1845, Jeunes Hommes de Plouié, t. II, p. 20.
212 Ibid, Conclusion, t. I, p. 475.
213 Ibid., Jeanne de Montfort, t. I, p. 322.
214 Ibid, Élégie de M. de Névet, t. II, p. 133.
215 Ibid, Conclusion, p. 482.
216 Ibid., Ligueurs, t. II, p. 90.
217 Ibid., Conclusion, p. 479.
218 Anne-Marie Thiesse, op. cit., p. 89.
219 47 occurrences de ces mots sont relevées dans l’édition de 1839 et 149 dans les deux autres.
220 Cité par Claudine Lacoste, op. cit., p. 208.
221 BB 1839, Introduction I, p. iij.
222 Ibid., Merlin, t. I, p. 91.
223 BB 1845, Siège de Guingamp, t. p. 47.
224 Ibid., Conclusion, p. 479.
225 BB 1839, Fontenelle-Le-Ligueur, t. II, p. 33.
226 BB 1845, Conclusion, p. 475.
227 Ibid.
228 BB 1845, Lez-Breiz, t. I, p. 183.
229 Ibid., Héloïse et Abailard, t. I, p. 232.
230 BB 1839, Introduction X, p. lxviij.
231 BB 1845, Baron de Jauioz, t. I, p. 352.
232 Ibid.
233 BB 1845, Avant-Propos, p. xvij.
234 Ibid, Temps Passé, t. II, p. 268.
235 Ibid, Cygne, t. I, p. 378 (deux fois) ; BB 1845, Jeunes Hommes de Plouié, t. II, p. 20-21 ; BB 1845, Conclusion, p. 481.
236 BB 1845, Conclusion, p. 482.
237 Ibid, Vin des Gaulois, t. I, p. 75.
238 Ibid, Avant-Propos, p. xvij.
239 Jean-Jacques Rousseau, La Nouvelle Héloïse, op. cit. , t. II, p. 78.
240 Jacques-Henri Bernardin de Saint-Pierre, op. cit., t. III, p. 65.
241 Les termes « montagne » et « montagnard » apparaissent 19 fois en 1839, 75 en 1845 et 69 en 1867.
242 BB 1839, Citation de Fauriel, fin du tome II.
243 Ibid, Fête des Pâtres, t. II, p. 245.
244 BB 1845, Préambule, p. xv.
245 Ibid., p. xvj.
246 Charles Fauriel, op. cit., p. cxlj.
247 BB 1845, Bataille des Trente, t. I, p. 334.
248 Ibid, Temps Passé, t. II, p. 267.
249 BB 1867, Préface, p. IV.
250 BB 1845, Jeunes Hommes de Plouié, t. II, p. 20-21.
251 Ibid, Bleus, t. II, p. 242.
252 Ibid.
253 BB 1845, Faucon, t. I, p. 217.
254 Ibid., p. 224.
255 Charles Fauriel décrit de la même façon les Klephtes, ces montagnards de la Grèce, comme des hommes dont la force des sentiments national et religieux semble exceptionnelle : ces guerriers de premier ordre contre les Turcs sont durs au combat, survivent à la faim et la soif, à la fatigue et à la douleur, mais sont par ailleurs pieux et dévoués en amitié. Et il explique que, si les Klephtes sont cruels, c’est uniquement dans leurs représailles envers les Albanais et les Turcs. (Charles Fauriel, op. cit., p. xlij).
256 BB 1867, Préface, p. VII.
257 Ibid.
258 BB 1845, Lez-Breiz, t. I, p. 183.
259 BB 1867, Hirondelles, p. 472.
260 BB 1845, Hirondelles, t. II, p. 398.
261 BB 1867, Épilogue, p. 526.
262 BB 1845, Conclusion, p. 477.
263 L’auteur la personnifie : voir BB 1845, Conclusion, p. 477 ; BB 1845, Conclusion, p. 484-485, etc.
264 BB 1845, Conclusion, p. 485.
265 Ricarda Huch, op. cit., p. 206.
266 BB 1845, Conclusion, p. 488.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Comparer l’étranger
Enjeux du comparatisme en littérature
Émilienne Baneth-Nouailhetas et Claire Joubert (dir.)
2007
Lignes et lignages dans la littérature arthurienne
Christine Ferlampin-Acher et Denis Hüe (dir.)
2007