Critique des réfutations négationnistes
p. 189-204
Texte intégral
1Dès la capitulation de l’Allemagne nationale-socialiste signée le 8 mai 1945, des voix, d’abord éparses, puis de plus en plus nombreuses, se sont élevées pour contester l’existence de la politique d’extermination menée par le régime hitlérien. Selon les estimations, on compterait aujourd’hui 40 000 à 60 000 sites Internet voués au déni du génocide nazi1. Depuis plusieurs années, les sciences humaines ont critiqué la propagation toujours croissante de cette opinion fallacieuse, évoquant ses raisons idéologiques, psychologiques et culturelles2. Mais comme les nouvelles dispositions légales destinées à bannir les discours racistes de la place publique virtuelle3, les démarches scientifique, pédagogique et civique n’ont pas conduit à des résultats concluants. Interrogeant ce constat d’échec, notre réflexion sera consacrée à la rhétorique du déni de la Shoah et de sa réfutation sur le Net, afin de soulever la question suivante : que faire d’un objet de réflexion dont on a certes démontré les procédés persuasifs fallacieux, mais qui ne cesse d’être validé par une partie de l’opinion publique ?
2Pour préciser cette question éminemment éthique, nous développerons la thèse suivante : les modèles d’analyse de la réfutation sophistique – en l’occurrence négationniste – ont perdu de leur emprise sur une partie de l’opinion publique de plus en plus dubitative à l’égard de l’institution universitaire chargée de la transmission du savoir établi et de la production de discours fondateurs de la chose publique, que ce soit dans les domaines historique, juridique ou scientifique. Ce doute affecte en premier lieu les méthodologies des sciences humaines destinées à critiquer le fonctionnement paralogique des discours, a fortiori ceux qui soutiennent des arguments extrémistes menaçant la paix sociale. La mise en réseau illimité des acteurs sociaux a conduit en effet à une juxtaposition des opinions, empêchant ainsi une hiérarchisation claire des domaines sémantiques nécessaires à la définition de la vérité objective. Dès lors, nous, récepteurs, serons irrémédiablement renvoyés à nous-mêmes ; tenus pour responsables de notre opinion, nous sommes pourtant dépourvus de moyens fiables pour assumer notre choix. Ainsi, l’opinion tend à devenir croyance. Or comme la croyance ne se discute pas, cette problématique échappe largement aux études des arguments dans le discours, études consacrées au concept antique du logos.
3À cela s’ajoute une autre difficulté. Comment reconnaître les faiseurs d’opinion dans le flux ininterrompu des voix qui circulent librement sur le Net ? Même si l’école française de l’analyse des discours a contribué ces dernières années au renouvellement des recherches sur la construction de l’image de soi que se donne l’orateur pour étayer sa crédibilité auprès de son public – concept aristotélicien de l’ethos (Amossy 1999 et 2006 : 69-96, Maingueneau 2004 : 203-221) –, il paraît de plus en plus aléatoire de vouloir distinguer l’orateur crédible d’un orateur manipulateur, voire mensonger (Breton 2000 : 33-51). Dorénavant le travail persuasif peut être à la fois déconnecté d’une argumentation raisonnée et dépourvue d’un fondement éthique et moral, sans toutefois perdre de son efficacité. D’un point de vue rhétorique, ce constat nous conduit à reconnaître toute l’importance de l’argumentation par le pathos. On a beau décrier la force manipulatrice déployée par les orateurs négationnistes, encore faut-il disposer de concepts critiques pour réfuter leurs « thèses » de façon efficace. Or, comme le montre l’histoire de la philosophie du langage et davantage celle, plus récente, des sciences du langage, la conceptualisation de l’argumentation pathémique a été largement abandonnée en raison même de son objet : l’usage des émotions dans le discours persuasif paraît empêcher la quête de la vérité objective, but ultime de toute démarche scientifique (Declercq 2003 : 17). Comme si œuvrer en faveur du triomphe de la raison consistait à ignorer la corporéité du sujet parlant. Mais la zone de combat rhétorique que l’on peut découvrir sur Internet est précisément celle des corps. Les négationnistes ne cherchent pas à défendre les causes qui ont conduit à la disparition des victimes du nazisme, mais à affirmer leur inexistence. En cela, ils actualisent le principe de fonctionnement même des chambres à gaz et des fours crématoires : lieux géographiques et sémiotiques de production de cette inexistence des corps.
4Selon la thèse proposée, l’un des enjeux majeurs de la réfutation du négationnisme consisterait ainsi à modéliser l’argumentation pathémique. Cette scénographie critique du corporel dans le discours contribuerait à la redéfinition culturelle et humaine du corps social menacé aujourd’hui comme hier de désintégration. Afin de discuter la thèse que nous soumettons à l’analyse, nous procéderons par trois étapes successives : d’abord, nous dresserons une typologie sommaire des discours négationnistes sur le Net. Ensuite, nous mettrons en exergue les différentes stratégies de réfutation adoptées par les sites institutionnels destinés à transmettre le savoir historiographique de la Shoah. Enfin, analysant des sites individuels anti-négationnistes, nous montrerons de quelle manière l’humour peut être conçu comme un argumentaire pathémique de la réfutation sophistique contemporaine.
Typologie des discours négationnistes
5Nos recherches nous ont permis de dresser une typologie des discours négationnistes qui repose sur les principales stratégies argumentatives déployées, à savoir le brouillage référentiel, la polyphonie informationnelle et la délectation ludique4. Pour le premier cas de figure, le brouillage référentiel, on peut consulter, à titre d’exemple, la page d’accueil du site de Russ Granata, négationniste américain (http://www.russgranata.com5) (consulté le 23/11/2003). Du point de vue rhétorique, la prise de contact entre l’hôte et ses visiteurs est déconcertante : la présentation de la page d’accueil est confuse ; des colonnes verticales et horizontales empêchent une hiérarchisation claire des rubriques proposées, enfin un mélange de voix locutrices renforce l’impression de se trouver dans un « brouillard » sémiologique. Si l’on a quelque peine à mettre en relation les signes distinctifs du blason pseudo-aristocratique des Granata avec le visage de grand-père qui s’affiche au milieu de la page, l’ethos de l’orateur, c’est-à-dire l’image qu’il cherche à donner de lui-même semble incohérente lorsque l’internaute s’intéresse à sa notice biographique intitulée « Biographical Sketch ». Il y apprendra que Russ Granata est effectivement un grand-père et que, matelot sur le porte-avions Houston durant la Seconde Guerre mondiale, il a vu décoller et atterrir George Bush père, pilote de chasse et futur président des États-Unis. Cette rencontre fortuite semble avoir été un des grands moments de la vie de Russ Granata.
6Selon la tradition rhétorique, ses exploits guerriers peuvent témoigner de son caractère vertueux, de même que son regard de grand-père devrait susciter la bienveillance des internautes. Mais si l’on se réfère au modèle aristotélicien, on reconnaît aisément l’absence de la troisième condition nécessaire pour gagner l’adhésion des internautes : le bon sens. Comment mettre en relation le patriotisme dont se prévaut Russ Granata avec son engagement aux côtés des adversaires déclarés des États-Unis ? En effet, en activant les entrées rangées dans la colonne gauche de la page d’accueil, on constate que Russ Granata entretient des relations étroites avec l’extrême droite américaine raciste et suprématiste, notamment avec celle qui approuve l’attentat perpétré contre le Murrah Federal building à Oklahoma le 19 avril 1995, causant la mort de 168 personnes. Par ailleurs, le site de Russ Granata sert de station relais à plusieurs négationnistes européens. Il assure également la diffusion du site raciste et antisioniste « Radio Islam » qui se sert de l’argumentaire négationniste occidental pour entretenir le conflit israélo-arabe. Enfin, les icônes de la croix gammée située en haut de la page d’accueil et de la silhouette du loup figurant le diminutif du prénom de Hitler (Wolf) rappellent que Russ Granata cherche en même temps à revaloriser le passé nazi, mettant ainsi en dialogue néofascisme, néonazisme, antisémitisme, antisionisme et islamisme radical.
7Le travail persuasif de ce discours négationniste consiste ainsi à déstabiliser les références historiographiques indispensables à la compréhension du génocide nazi et des usages culturels de sa mémoire. Pour bien comprendre son fonctionnement sémio-pragmatique, on se gardera de sous-estimer l’impact communicatif du dilettantisme affiché par Russ Granata et ses successeurs, dont Ahmed Rami, gérant de « Radio Islam », paraît le plus efficace. À ce titre, on peut évoquer le cas de la vague de solidarité planétaire déclenchée par les photographies et les récits fournis par de simples touristes occidentaux victimes du Tsunami en Asie en 2004. L’exemple de Russ Granata permet de mieux comprendre pourquoi des carences sur le plan discursif et éthique peuvent renforcer le pouvoir de persuasion des émotions.
8Par rapport au premier type de site négationniste dont nous venons de relever la stratégie argumentative par brouillage référentiel, le deuxième cherche à s’affirmer résolument dans les nouveaux paysages médiatiques qui se sont dessinés durant les années 1990. À titre d’exemple, nous nous proposons d’analyser le modèle persuasif adopté par « Zundelsite » (http://www.zundelsite.org) (consulté le 18/05/2005). Géré par Ernst Zündel, un citoyen allemand résidant au Canada6, ce site peut être envisagé comme le précurseur de ce que nous appelons la polyphonie informationnelle. L’internaute peut s’orienter en fonction d’enseignes iconiques clairement hiérarchisées selon un ordre chronologique et des parties textuelles qui font appel, par zones interactives, au contenu des images. Contrairement aux sites de R. Granata ou de A. Rami, celui d’E. Zündel traduit la volonté de capter l’attention du visiteur par le biais d’une disposition du contenu et d’un fonctionnement argumentatif dépouillé. Il adopte l’organisation du cursus universitaire américain (les cours de première année portent le chiffre 101, ceux de la deuxième année le chiffre 202, etc.). La rubrique intitulée « Revisionisme 101 » indiquée en haut de la page d’accueil permet de découvrir toute la panoplie de l’argumentaire négationniste, allant de la prise en charge du révisionnisme historique par les négationnistes légitimant l’appel au débat sur les causes et les effets de l’Holocauste, pour finir par la prétendue censure exercée par un lobby juif qui serait capable d’exercer son pouvoir d’influence au niveau planétaire, en passant par la remise en question systématique du fonctionnement même des chambres à gaz dans les camps d’extermination nazis.
9Mais sur le plan rhétorique, le site emprunte deux stratégies argumentatives contradictoires, contribuant à réduire sa portée persuasive. D’une part, cette contradiction se manifeste au niveau de l’accroche de la page d’accueil, juxtaposant le logo et le slogan du site. Le signifiant iconique du logo, figurant – dans une position désaxée – la lettre Z contenue dans le nom de l’hôte, s’inscrit sur un fond rouge et blanc. La référence à la croix gammée du drapeau nazi est clairement affirmée. Focalisé sur une vision passéiste d’E. Zündel, l’ensemble du programme d’éducation proposé par le site est consacré à la promotion du déni de la Shoah dont le but consiste à revaloriser le régime nazi. D’autre part, selon le slogan du site « S’il vous plaît, soutenez le site le plus assiégé du Web » placé à côté du logo, le gérant cherche à se présenter comme le défenseur de la liberté de parole sur Internet. Cet appel insistant à la solidarité lancé à la communauté des internautes pour soutenir le « Zündelsite » ne pourra atteindre qu’un public restreint, compte tenu du but déclaré d’E. Zündel qui consiste à « combattre le nouveau Monde ». On peut supposer que E. Zündel pense au nouvel ordre mondial proclamé par le président américain George Bush après la première guerre du Golf dans les années 1990. Mais ce même ordre a précisément fait naître le public auquel il s’adresse aujourd’hui et qui est sa cible principale.
10Compte tenu de la notoriété dont bénéficie le « Zündelsite » sur Internet depuis de nombreuses années, l’analyse rhétorique permet certes de constater la visée contradictoire de ce type de discours. Mais elle ne conduit pas à expliquer ses effets perlocutoires. On peut penser qu’en adoptant le modèle de l’homo communicans (Breton 1997 : 51) sous-jacent au fonctionnement cybernétique du Net, E. Zündel est parvenu à multiplier les instances informationnelles dont il est le seul émetteur. Le morcellement infini des auditoires auxquels il s’adresse lui assure ainsi la pérennité de son travail de persuasion7.
11Le troisième type de discours négationniste emprunte à la délectation ludique. À titre d’exemple, nous choisissons le site « Action Report » de David Irving, historien autodidacte anglais (http://www.fpp.co.uk/online) (consulté le 03/12/2004)8. Jouant habilement plusieurs rôles à la fois, celui du chercheur reconnu, du pamphlétaire teigneux, de l’éditorialiste acerbe et du guide charismatique, D. Irving gère son site comme une tribune oratoire. Présenté sous forme de journal électronique, « Action Report » prétend satisfaire un lectorat étendu en proposant des contenus variés. S’il est vrai que le premier exemple que nous en avons tiré le 19/02/2001 était centré sur le cliché du Juif avide d’argent, l’ensemble de la page d’accueil actuelle emprunte davantage à la presse à scandale. Ainsi, l’antisémitisme du gérant est habilement mis en scène. Se coulant dans le moule du registre discursif adopté, « Action Report » cherche aujourd’hui à répondre aux aspirations d’une jeune génération d’internautes avides de chroniques scandaleuses (en septembre 2001, D. Irving prétend connaître les vrais mobiles des Américains en Irak), et de divertissements (les éditions de la même époque publiaient une section intitulée « flag girl », montrant l’image que l’on pouvait agrandir pour découvrir une femme à demi nue.)
12La polémique engagée par D. Irving contre ses contradicteurs se caractérise par un mélange de jeux de langage et d’images iconiques. Ainsi, dans la rubrique intitulée « Quelques ennemis traditionnels de la liberté de parole » (notre traduction)9 (consultée le 13/11/2005), on peut découvrir une section consacrée au « Centre Simon Wiesenthal » (http://www.wiesenthal.com). Le milieu de la première page est occupé par la photographie officielle de Simon Wiesenthal, fondateur du centre. L’entête de la page affiche la lettre « W » peinte en jaune, inversant le logo de la chaîne de restauration rapide américaine MacDonald’s. Le nom « Wiesenthal » est inscrit dans ce pseudo-logo. Cette iconisation du verbal induit à penser que le Centre Simon Wiesenthal poursuit des buts mercantiles. À la même hauteur de la page, on peut lire une phrase non signée qu’il faut attribuer à D. Irving : « Le Centre Simon Wiesenthal diffuse tous les jours six millions de mensonges et de légendes sur l’Holocauste autour du monde » (notre traduction)10. Cette affirmation péremptoire soutient l’idée de la puissance médiatique dont disposerait le centre pour mener une entreprise de propagande à l’échelle planétaire. Quant au chiffre de « six millions », établi par l’historiographie au sujet des victimes juives de la Solution finale, il est avancé pour renforcer la « thèse » qui nie l’existence du génocide nazi.
13D. Irving s’affirme comme un orateur doué, mélangeant savamment les grands genres des discours de conviction : le judiciaire, le délibératif et l’épidictique11. D’une part, en empruntant le genre judiciaire, il prétend faire appel à la Seconde Guerre mondiale dans une finalité éthique, afin de distinguer clairement le juste de l’injuste. D’autre part, se servant du genre délibératif, il revêt le rôle traditionnel de conseiller auprès d’un public de non-spécialistes, cela dans le but déclaré de proposer à son auditoire une prise de position favorable à l’égard des opinions défendues par son journal électronique. Enfin, s’appuyant sur sa pseudo-réputation d’historien, il oriente son discours sur la promesse d’un avenir radieux où seule la liberté de parole gouvernerait les sociétés contemporaines, mais dont le but sous-jacent est de ternir la mémoire de la Shoah. D. Irving cherche ainsi à banaliser les crimes nazis sur le mode de l’infotainment.
Stratégies rhétoriques contre le déni de la Shoah
14La section suivante consistera à savoir comment les stratégies de réfutation parviennent à bloquer l’argumentation négationniste qui fonctionne par brouillage référentiel, par polyphonie informationnelle et par délectation ludique. Cette question permettra de dresser une typologie des sites Internet destinés à garder vivante la mémoire de la Shoah. Dans le dispositif de la lutte contre l’influence grandissante des « thèses » négationnistes, il faut d’abord reconnaître le rôle que revêtent les sites des nombreuses institutions publiques et privées – musées, fondations et bibliothèques comme le Mémorial de la Shoah à Paris (http://www.memorialdelashoah.org), le Yad Vashem à Jérusalem (http://www.yad-vashem.org) ou le United States Holocaust Memorial Museum à Washington (http://www.ushmm.org). Ces institutions de réputation internationale se chargent de l’archivage, de l’élaboration, de la gestion et de la représentation de la mémoire historique. Leurs sites donnent accès à un grand nombre de sources documentaires, historiographiques, pédagogiques et scientifiques. Leur rôle consiste ainsi à diffuser largement le savoir établi par la communauté des chercheurs qui en garantit la fiabilité. Aussi fournissent-ils un ensemble d’arguments puissants pour réfuter les stratégies discursives centrées sur le brouillage référentiel dont se servent Russ Granata ou Ahmed Rami. Enfin, comme le montre le cas du US Holocaust Memorial Museum (USHMM), ces institutions peuvent également faire usage de leur pouvoir de représentation pour intervenir directement dans les débats politiques : en février 2006, Fred S. Zeidman, directeur de l’USHMM a condamné publiquement les propos du Président iranien Mahmud Ahmadinejad qualifiés de négationnistes, d’antisémites et d’antisioniste (http://www.ushmm.org) (consulté le 28/03/2006).
15Les procédures de réfutation auxquelles peuvent conduire les sites institutionnels sont de première importance car elles ne cessent d’actualiser la critique historiographique, redéfinissant la relation entre les mots (les discours de représentation) et les choses (le fait réel de l’extermination). En termes de rhétorique, la complexité sémantique, philosophique et idéologique de la relation entre les mots et les choses porte sur l’argumentation logico-discursive qui paraît d’autant plus persuasive qu’elle prend assise sur la crédibilité de l’orateur. Tel est le cas de ceux qui parlent au nom des institutions prestigieuses que nous venons de mentionner, parmi lesquelles il faut également ranger les centres universitaires de recherches consacrées à l’étude de l’antisémitisme comme le Zentrum für Antisemitismusforschung de Berlin (http://tu-berlin.de/zfa) et le Vidal Sassoon International Center for the Study of Antisemitism (http://sicas.huji.ac.il). Cependant, il est fort à craindre que ce type de discours ne puisse fournir de réponses adéquates aux convictions nationales-socialistes d’un Russ Granata et à l’intégrisme islamiste d’un Ahmed Rami car ces derniers puisent leur force de persuasion dans l’argumentation pathémique destinée à éveiller les émotions du public auquel ils s’adressent. Leurs discours du faire comme si la Shoah n’avait pas eu lieu se soustraient largement à l’opinion établie par le savoir institutionnel.
16On peut penser qu’il en va autrement pour les sites individuels qui engagent directement la polémique avec les négationnistes. Comme ils ne sont pas tenus de respecter les règles de production, de gestion et de diffusion du savoir objectif en raison même de leur caractère non institutionnel, ils peuvent en tirer leur principale force argumentative à l’encontre de la polyphonie informationnelle dont se servent Ernst Zündel ou Serge Thion. Répondant à la loi de proximité qui régit tout acte de communication publique, ces sites s’inscrivent davantage dans des traditions rhétoriques spécifiques à leur pays d’origine. Compte tenu de la mondialisation des flux d’information dont profite la mouvance négationniste, les différences nationales paraissent frappantes lorsqu’on compare, par exemple, le site français de Michel Fingerhut intitulé « Ressources documentaires sur le génocide nazi et sa négation » (http://www.anti-rev.org), le site nord-américain de Ken McVay appelé « The Nizkor Project » (http://www.nizkor.org) ou encore celui de Jürgen Langowski, la « Holocaust-Referenz » hébergée en Allemagne (http://h-ref.de).
17Michel Fingerhut emprunte au discours des Lumières ; son site revêt un rôle éducatif, explicatif et informatif ; il propose un véritable programme d’apprentissage des connaissances essentielles relatives à la Shoah. En cela, il est proche des sites institutionnels. Mais en écartant systématiquement le doute cartésien quant à la réalité même du fait historique, son but argumentatif vise directement l’annulation des « thèses » négationnistes. Son entreprise paraît donc encyclopédique. M. Fingerhut réunit un grand nombre de textes originaux d’historiens, de philosophes, de sociologues, de pédagogues, mais également d’écrivains et de poètes qui se sont exprimés sur le crime nazi et sur les tentatives de sa négation. En outre, garantissant le copyright à l’ensemble des ressources documentaires proposées, M. Fingerhut inscrit son site dans le dispositif légal qui régit le monde de l’édition, ce qui renforce l’aspect logico-discursif de sa démarche persuasive. Enfin, il propose une bibliographie fournie, ainsi qu’un calendrier complet et actuel des rencontres, colloques et conférences portant sur la problématique. Par le souci de mettre à disposition de l’internaute une documentation exhaustive de la Shoah, M. Fingerhut se démarque donc clairement des démagogues racistes qu’il cherche à réduire au silence.
18Quant à Ken McVay, il inscrit son site appelé « The Nizkor Project » (Nizkor signifie en hébreu « nous nous souviendrons ») dans la tradition angloaméricaine de la joute rhétorique : le détenteur de la vérité est celui qui fournit de meilleurs arguments que son adversaire. Plusieurs rubriques du site proposent ainsi un véritable « kit » d’argumentation anti-négationniste, rappelant les classes de rhétorique appliquée dans les speech departments des universités américaines. En brossant minutieusement le portrait des principaux représentants de la nébuleuse négationniste, il s’agit d’abord de reconnaître les forces et les faiblesses de leur discours. Ensuite, K. McVay et ses collaborateurs réfutent systématiquement les fameuses 66 « thèses » formulées par Ernst Zündel et Greg Raven, directeur de l’« Insitute for Historical Review » (IHR) (http://ihr.org), officine négationniste domiciliée en Californie, leur opposant un argumentaire d’une grande rigueur de 66 questions et réponses. Enfin, le site propose à l’internaute un ensemble de cours d’analyse de textes négationnistes qui lui permet de s’exercer dans la réfutation négationniste. « The Nizkor Project » peut donc être envisagé comme une véritable « trousse d’outils » dont parle Wittgenstein dans les Investigations Philosophiques (1953 : § 11), expliquant les règles de jeux de langage nécessaires pour dominer les adversaires de la société démocratique.
19Enfin, le site de Jürgen Langowski intitulé « Holocaust-Referenz » puise largement dans la tradition de la philologie allemande. Dans différentes rubriques consacrées à l’argumentaire des Auschwitz Leugner (négateurs d’Auschwitz) (notre traduction) de langue allemande, il analyse les procédures de falsification qui caractérisent leur travail de persuasion, allant de la prétendue guerre préventive engagée par la Wehrmacht contre la menace soviétique, aux stéréotypes du Juif, ennemi du peuple allemand, en passant par la spéculation sur le chiffre exact des victimes du nazisme. Ainsi, dans la rubrique « Eine Lektion in revisionistischer Sprachwitzenschaft » (mot-valise signifiant à la fois | science du langage | et | mot d’esprit | au sens de | mauvaise plaisanterie |) (consultée le 06/09/2005), J. Langowski dénonce la manière avec laquelle les négationnistes allemands se servent abusivement d’une traduction réductionniste du mot anglais race pour « prouver » que les juifs américains chercheraient à se définir comme la « race élue ». Par là, J. Langowski montre comment les négationnistes veulent mettre en exergue l’incompatibilité entre les peuples juif et allemand. Ainsi, l’analyse lexicologique permet de dévoiler les carences de leur raisonnement. Certes, le sens du mot anglais race recouvre partiellement le domaine biologique auquel réfère le mot allemand Rasse. Mais l’usage de l’expression the Hebrew race signifie également | groupe culturel |, | famille |, | nation |, | nationalité |, | gens |, | tribu | et | type |. J. Langowski affirme enfin que la traduction de jewish race en jüdische Rasse – singulièrement réductrice – serait destinée à étayer l’argument raciste soutenu par les négationnistes allemands.
20On peut conclure que les trois sites individuels empruntant à différentes traditions rhétoriques – le rationalisme cartésien (M. Fingerhut), le débat démocratique (K. McVay), et l’examen philologique (J. Langowski) –, semblent bien adaptés pour réfuter l’argumentation négationniste qui puise dans la polyphonie informationnelle. Mais leur travail persuasif reste centré sur la pertinence logique proposée par un orateur qui cherche à faire la démonstration de ses compétences analytiques et de ses valeurs morales. Cédant le terrain des émotions aux négationnistes, les sites individuels auront probablement peu d’emprise sur les discours qui empruntent à la délectation ludique dont David Irving paraît un modèle précurseur.
La force des émotions dans le langage
21Proche du site de Ken McVay « The Nizkor Project » que nous venons de citer et dont il assure la diffusion en français des « 66 questions et réponses négationnistes réfutées », celui de Gilles Karmasyn intitulé « Pratique de l’histoire et dévoiements négationnistes » (PHDN) (http://www.phdn.org) fournit lui aussi un « kit » argumentatif destiné à bloquer les discours des grands leaders de l’internationale négationniste, dont David Irving, Ernst Zündel ou Ahmed Rami. Cependant, le style humoristique avec lequel PHDN engage la polémique avec Robert Faurisson, doyen français de la mouvance, puise largement dans le pathos, portant les réfutations négationnistes dans le domaine des émotions. Dans une rubrique appelée « Négations en folie » (consultée le (06/09/2005), plusieurs articles sont consacrés à Robert Faurisson. Ainsi, « The Mad Revionnist », « Mémoire en défonce : de l’inexistence d’Alain Delon » et « Le débarquement en Normandie n’a jamais eu lieu ». Ces articles se présentent sous forme de pastiches, moquant l’argumentaire de l’auteur qui les signe, un dénommé Faubert Robinson. L’anagramme de Robert Faurisson souligne la motivation sémantique entre son nom et sa stratégie discursive visant à nier des faits historiques. L’article consacré au débarquement des Alliés en Normandie servira d’exemple. Ainsi l’avertissement :
Notre maître à tous, le géant de l’intellect révisionniste, Faubert Robinson, démontre ici en recourant à son infaillible méthode (louée soit-elle), que le 6 juin 1944, aucun débarquement n’eut lieu en Normandie : il s’agit d’un mythe mensonger faisant partie des Protocoles des Sages du Mémorial de Caen… (p. 1)
22Sous forme déclamatoire, l’Internaute est invité à la tribune du dénommé Faubert Robinson présenté comme un orateur célèbre. L’exagération hyperbolique de « géant de l’intellect », la répétition pléonastique de « infaillible méthode » ou la citation inappropriée d’une formule religieuse « louée soit-elle » qui se rapporte à « méthode » tournent en dérision l’argument proposé. Cette figuration stylistique dénonce le discours négationniste qui cherche à rendre redondants mythe et mensonge dont seraient responsables les comploteurs juifs avides d’argent. L’expression sarcastique de « Protocoles des Sages du Mémorial de Caen » rappelle en effet que les négationnistes se réfèrent toujours à cet opuscule antisémite de la police tsariste intitulé Protocoles des Sages de Sion. En l’occurrence, l’utilisation du sarcasme, forme exacerbée de la moquerie qui, contrairement à l’ironie12, laisse peu de doute sur le sens du discours de l’énonciateur, sert à rappeler que la preuve établissant leurs faux n’empêche pas les négationnistes de crier au complot.
23Sur le plan formel, le pastiche imite fidèlement le procédé de R. Faurisson. L’ensemble du texte se présente comme un article scientifique, respectueux des consignes d’édition en vigueur. Cependant, sous la plume de Faubert Robinson, la démarche ne manque pas de dévoiler son caractère incongru. À titre d’exemple, nous nous proposons d’analyser un passage de la seconde partie du premier chapitre intitulé « La Normandie moins bien défendue ? Autopsie d’un mythe ». Le pseudo-auteur cherche à démontrer que les forces alliées avaient pris connaissance de la présence de divisions allemandes à proximité des plages, notamment grâce aux informations transmises par la Résistance. Pour cette raison, ils auraient renoncé au débarquement. Afin de prouver son affirmation, Faubert Robinson s’appuie sur un épisode relaté par Paul Carell (alias Paul Karl Schmidt)13 dans son livre intitulé Ils arrivent (1994) :
Que dit Paul Carell ? Que la Résistance a effectivement transmis le renseignement sur la présence de la 352e division, mais par voie de pigeon voyageur. Or, nous dit cet historien, un sniper allemand a abattu ce malheureux pigeon… Naturellement, Paul Carell ne nous fournit aucun détail supplémentaire, aucune source pour vérifier la pertinence de son affirmation. L’Allemand n’est même pas nommé, pas plus que le pigeon. Aucune trace, ni de l’Allemand, ni de la sépulture du pigeon, n’a été retrouvée. Par ailleurs, puisque ledit pigeon travaillait pour l’Intelligence Service Service (sic), on aurait pu retrouver dans les archives du Public Record Office une preuve de l’existence dudit pigeon, comme une fiche de salaire granulé, par exemple. En dix minutes de recherche au sein de ces archives, je n’ai rien trouvé de tel. Précisons qu’aucune médaille de la Résistance n’a été versée à ce pigeon, obscur héros du devoir, comme s’il avait été oublié de tous… (p. 3-4)
24Le pastiche met en exergue l’absurdité du raisonnement. Selon la « méthode » de l’hypercriticisme pratiquée par le vrai/faux Faurisson, la découverte de l’incohérence d’une information rapportée par un pseudo – historien, aussi anecdotique soit-elle, conduit à dénoncer l’incompétence du chercheur, l’accusant du même coup d’être à l’origine d’une falsification de l’Histoire. La tournure interrogative de la séquence d’ouverture s’apparente à une figure pathique de la véhémence, l’epiplexis, qui sert à blâmer l’énonciataire en lui posant des questions fourrées destinées à révéler ce qui, aux yeux de l’énonciateur, constitue son erreur. Comme il s’agit ici d’une question que l’énonciateur s’adresse à luimême, la clause emprunte à l’auto-ironie, dénonçant l’incongruité de l’argument développé. L’épisode du pigeon paraît ainsi révélateur du discours négationniste qui se caractériserait par la surexploitation d’un détail sans commune mesure avec la donnée générale, la condamnation péremptoire de la source, le dilettantisme scientifique et un lyrisme versant dans le kitsch.
25À l’hypercriticisme s’oppose ce que l’on pourrait appeler l’hypocriticisme, rappelant que les négationnistes, sophistes de l’époque contemporaine, cherchent à affirmer tout et le contraire. Ainsi l’extrait suivant :
L’on sait également depuis la remarquable étude de Vincent Ringard, que la 2e SS Panzer se contentait de réguler la circulation dans le Limousin et que les accusations selon lesquelles le général Lammerding aurait refusé d’aider une vieille dame à traverser une rue sont infondées. (p. 10-11)
26Sous l’effet d’économie et de sous-détermination discursives, on reconnaît les événements historiques qui ont conduit au massacre d’Oradour-sur-Glane perpétré le 10 juin 1944 par les SS de la division « Das Reich ». L’expression euphémique « réguler la circulation dans le Limousin » qui vise à atténuer le choc avec la réalité historique est une injure portée à la mémoire des victimes et de leurs familles, jetant irrémédiablement le discrédit sur l’auteur fictif cité – Vincent Ringard. À l’aspect moral mis en exergue par l’euphémisme s’ajoute l’autoaccusation de médiocrité incarnée par le nom de l’auteur (Ringard). Se présentant sous la forme d’une assertion directe de la défaillance de l’accusé – alors qu’il est présenté comme exemplaire par l’orateur, la categoria, figure de discours de l’expression pathémique, rappelle la procédure rhétorique de l’epiplexis analysée précédemment. Dans les notes présentées en fin d’article, on pourra trouver les références bibliographiques relatives à l’étude mentionnée : Mon bouquin sur Oradour, une demi-tonne de mise en scène, Edition du Bunker, Asuncion, Paraguay (p. 13). Si l’usage du terme familier « bouquin » est injurieux par rapport à l’évocation du lieu géographique du massacre, la locution qualificative « une demi-tonne de mise en scène » porte la figuration discursive à un degré d’émotivité fort. On peut reconnaître le procédé rhétorique de l’abominatio, procédé qui consiste à provoquer chez l’énonciataire une aversion extrême pour le sujet visé. La force émotive investie dans l’acte de langage sollicite ainsi l’implication du public visé dans le but de provoquer une réaction pathique.
27Hyper- et hypocriticisme, mais également scientisme erroné destiné à prouver que les côtes normandes n’ont pas été bombardées (p. 5) et racisme envers les soldats afro-américains (p. 7), le pastiche passe en revue toute la panoplie de l’argumentaire négationniste, faisant la démonstration de l’ineptie de ses propos. Enfin, il procède à une attaque en règle contre la personne même d’un orateur qui puise largement dans le registre pornographique et scatologique. En effet, Faubert Robinson, faisant l’éloge de « la plantureuse Eva Braun » (p. 1) et du film intitulé « Suce le juif » (p. 1), ou comparant les fameux messages personnels de la BBC à un « préservatif », trahit son caractère cupide, tandis que le lapsus « grosse merdo » (p. 11) et la transformation nominale de Deborah Lipstadt, historienne américaine réputée, en Deborah « Lipshit » (p. 13) révèlent son goût ordurier. L’ensemble de ces expressions emprunte à l’ara, figure de la véhémence qui consiste à joindre l’exécration à l’imprécation, afin de soulever auprès de l’énonciataire la plus forte antipathie envers l’opposant. Cependant, en raison de sa charge émotionnelle extrême, ce procédé rhétorique peut déclencher des effets de retournement sur l’orateur, substituant les réactions pathiques à des raisonnements. En l’occurrence, c’est bien le discours tenu par l’énonciateur, le dénommé Faubert Robinson, qui soulève chez l’énonciataire un fort sentiment de rejet de sa personne.
28Enfin, on peut penser que le pastiche emprunte également à l’humour auquel réfère Heinrich Himmler, affirmant le 4 septembre 1943 dans un discours adressé aux cadres SS chargés de l’exécution de la Solution finale : « Wir dürfen nie den Humour verlieren. » (Nous ne devons jamais perdre le sens de l’humour) (notre traduction)14. Cependant, comme nous avons pu le constater, le texte produit par retournement argumentatif un effet d’auto-dérision, permettant d’identifier les caractéristiques de l’humour noir des nazis qui prône un scepticisme radical pour conduire au désengagement moral de l’orateur et au conformisme social du récepteur (Evrard 1996 : 77-94). Ainsi, Faubert Robinson, pour prouver les troubles de mémoire dont souffriraient les survivants de la Shoah, relate le cas d’un proche ami âgé d’une soixantaine d’années et admirateur inconditionnel du Führer, qui consacre sa vie d’Internaute à affirmer que Hitler était végétarien, pas un légume. Or l’adresse de son site serait la suivante : « http://www.Hitler.vegetable.com » (« http://www.Hitler.legume.com ») (p. 13) (notre traduction).
***
29Notre réflexion s’interroge sur le constat selon lequel l’opinion publique hésite toujours à valider le savoir institutionnalisé de la Shoah, malgré la médiatisation actuelle de la mémoire. La principale raison en est sans doute la nature du crime nazi. Penser Auschwitz paraît monstrueux, nous penser avec paraît inacceptable. Même s’il sera difficile d’évaluer l’influence réelle des négationnistes sur les sociétés contemporaines, leurs démarches persuasives sur l’agora de l’Internet dont nous avons dressé une typologie rappellent que les émotions participent grandement à nos manières de comprendre l’être humain, donc nous-mêmes. Représenter Auschwitz comme un non-lieu d’essence inhumaine cautionne ainsi l’argumentation négationniste centrée sur la peur de l’inconnu. Notre critique des réfutations négationnistes sur Internet a donc porté sur le fait qu’elles négligent grandement l’argumentation pathémique, laissant le champ libre aux discours racistes et néo-nazis.
30Certes, l’analyse du pastiche diffusé sur le site de Gilles Karmasyn (PHDN) nous a permis de montrer comment l’argumentation par les émotions paraît à la fois trop appuyée et trop familière, voire vulgaire, ce qui la rapproche, somme toute, des procédés rhétoriques des négationnistes. Ainsi, on aura reconnu l’usage des figures de la véhémence, allant du sarcasme présent dans l’avertissement, à l’exécration provoquée par l’injure scatologique, en passant par l’objurgation qui dénonce l’impiété envers les soldats alliés tombés sur les plages normandes, ou encore la provocation d’une représentation euphémique du massacre d’Oradoursur-Glane. Cependant, force est de constater l’effet persuasif de l’exercice de style : battu par ses propres moyens argumentatifs, l’orateur pseudo-négationniste se condamne au silence.
31Il importe de savoir comment interpréter ce silence-là. La question porte en premier lieu sur le dialogue incertain, ambigu, partagé entre l’esthétique et l’éthique tel qu’il s’articule dans les discours artistiques de l’extrême contemporain (Rinn 2005). Lire Imre Kertész ou Piotr Rawicz conduit, par moment, à suspendre le flux interprétatif ; mais que restera-t-il de l’Autre et du moi dans ce vide de sens ?
Bibliographie
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Notes de bas de page
1 COROLLER C., « Racisme : nettoyer le Net de la haine », in Libération, 17 juin 2004.
2 Pour une approche historiographique, voir LIPSTADT D. E., Denying the Holocaust : The growing assault on Truth and Memory (1993), TAGUIEFF P. A., La couleur et le sang. Doctrines racistes à la française (1998) et IGOUNET V., Histoire du négationnisme en France (2000).
3 Voir PANSIER F. -J. et JEZ E., La criminalité sur Internet (2000), KAHN R., Holocaust denial and the Law (2004) et LIPSTADT D. E, History on Trial (2005).
4 Voir RINN M. « Cybernégationnismes » (2006a) et « La mémoire courte d’Internet. Analyse sémiodiscursive du déni de la Shoah » (2006b).
5 Créé en avril 1999, le site de Russ Granata a disparu fin 2004. Sur une page révisionniste américaine qui lui rend hommage, on peut apprendre que R. Granata est décédé le 14 août 2004 en Californie (http://www.ihr.org/headlines/041028.shtml) (consulté le 21/03/2008).
6 Depuis 2003, ce site a perdu beaucoup de son dynamisme en raison des procédures juridiques que le gouvernement canadien a engagées contre Ernst Zündel. Ce dernier purge actuellement une peine de prison, cédant les affaires courantes du site à un acolyte.
7 D’un point de vue argumentatif, le site de Serge Thion, ancien chercheur au CNRS, intitulé « L’Association des Anciens Amateurs de Récits de Guerres et d’Holocaustes » (http://vho.org) repose sur le même modèle communicatif de la polyphonie informationnelle. Voir RINN, op. cit, 2006a.
8 Lors d’un déplacement pour une conférence à Vienne, D. Irving a été arrêté par la police autrichienne en novembre 2005. Fin février 2006, un tribunal de Vienne l’a condamné à trois ans de prison pour avoir nié la réalité de l’Holocauste. Le journal en ligne Action Report continue à être diffusé en ligne.
9 Texte original : « some traditional enemies of Free Speech ».
10 Texte original : « The Simon Wiesenthal Center serves up Six Million Lies and Legends about the Holocaust around the world daily. »
11 Pour une définition courante de ces termes empruntés à la rhétorique antique, voir RINN M., Les discours sociaux contre le sida. Rhétorique de la communication publique, op. cit., p. 171-194.
12 Pour la définition des figures rhétoriques de la véhémence, voir HALSALL A. W. (2003 : 263-281).
13 Le livre publié en France chez Robert Laffont, relatant le débarquement des Alliés en Normandie, a été un best-seller international. Cependant, l’auteur Paul Carell, célèbre pour ses ouvrages sur la Seconde Guerre mondiale, et soucieux de distinger les fait guerriers de la Wehrmacht des crimes commis par la SS, n’a rien d’un historien. Il s’agit en vérité de Paul Karl Schmidt (1911-1997), ancien SS et haut fonctionnaire du Ministère des Affaires étrangères du IIIe Reich. Depuis 1939/40, il était le directeur du service de presse et responsable de la propagande nazie à l’étranger. En 1944, il a contribué activement à la déportation des Juifs de Budapest. Après la guerre, outre la brillante carrière d’auteur populaire et de journaliste reconnu, il a été le conseiller personnel d’Axel Springer, patron de presse allemande. L’ensemble de la citation présentée comme une source historiographique emprunte ainsi à une autre figure rhétorique de la véhémence : l’objurgation. Il s’agit d’une forme rhétorique du reproche par laquelle l’énonciateur, en l’occurrence celui qui signe le pastiche, se base sur un défaut de l’adversaire – le négationniste R. Faurisson – pour le critiquer.
14 Voir http://www.nationalsozialismus.de/documente/textdokumente/heinrich-himmler-posenerrede-vom-04101943-volltext, p. 8. (consulté le 24-03-2006).
Auteur
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Comparer l’étranger
Enjeux du comparatisme en littérature
Émilienne Baneth-Nouailhetas et Claire Joubert (dir.)
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Lignes et lignages dans la littérature arthurienne
Christine Ferlampin-Acher et Denis Hüe (dir.)
2007