Préambule
p. 13
Texte intégral
1Les fers avaient dessiné autour de ses chevilles comme deux hémisphères. Grattant ses croûtes, redessinant sa crasse et parcourant les auréoles, Christophe croyait revoir à Majorque, mirobolante, la mappa mundi d’Abraham Cresques, par qui tout avait commencé. Alors il se penchait en quête de l’incertaine Cipango qu’il croyait toujours apercevoir au-delà de cette barrière d’îles où l’avaient jeté ses heureuses expéditions. S’il n’y avait pas eu ce salaud de Pinzón pour lui ravir sa gloire et ce condottiere d’Amerigo Vespucci pour lui voler son continent, lui qui se prenait toujours pour le Découvreur, le Parieur d’Utopie, le défricheur de l’Ultima Thulé chère à Sénèque, et que l’ingratitude royale avait jeté aux geôles d’Espagne où tant des siens croupissaient aux mains de l’Inquisition, il aurait été encore cet Amiral de la Mer Océane dont il ornait le front, sur toutes ses missives, de cabbalistiques fioritures. Mais là, ce rêveur des deux rives, cet insensé, cet avorton de la grande aventure n’était livré qu’aux morsures des rongeurs et aux pointes des railleurs :
2– Qu’espères-tu encore, ô fils de Sion, ô bâtard de Sodome ? L’arrivée du Messie ?
3Et Colomb toujours répondait, en levant ses yeux aveugles sur les lucarnes des hauts murs :
4– Le retour des Caravelles !…
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