La métafiction postmoderne
p. 69-78
Texte intégral
Questionnement ontologique et médiation
1Lorsque l'effet métatextuel est la dominante dans une œuvre de fiction, on a affaire à ce que les théoriciens anglophones appelle la métafiction. Patricia Waugh, dans Metafiction : The Theory and Practice of Self Conscious Fiction, situe l'origine du terme dans un essai écrit par l'écrivain/théoricien William H. Gass en 1970.1 Il s'agit, selon Waugh, d'une fiction qui explore des questions théoriques à travers une structure fictionnelle : « Metafiction pursues such questions through its formal self-exploration, drawing on the traditional metaphor of the world as book, but often recasting it in the terms of contemporary philo-sophical, linguistic or literary theory. »2 Waugh constate l'émergence de la métafiction comme dominante dans la fiction contemporaine : « Over the last twenty years, novelists have tended to become much more aware of the theore-tical issues involved in constructing fictions. In consequence, their novels have tended to embody dimensions of self-reflexivity and formal uncertainty. »3 De même, Linda Hutcheon, dans Narcissistic Narrative : The Metafictional Paradox4 associe la métafiction au postmodernisme : « the formal and self-consciousness of metafiction today is paradigmatic of most of the cultural forms of what Jean-François Lyotard calls our « porstmodern » world – from television com-mercials to movies, from comic books to video art. We seem fascinated lately by the ability of our human systems to refer to themselves in an endless mirroring process. »5 La métafiction théorise son propre fonctionnement, créant un miroir dans lequel le lecteur peut percevoir le reflet des discours qui interviennent dans notre relation au monde empirique. Selon Waugh, cette forme d'exploration serait caractérisée par une conscience de l'idée que tout est donné à travers la culture, que la langue véhicule toute perception. Il s'agit du concept de médiation :
The metafictionist is highly conscious of a basic dilemma : if he sets out to « represent » the world, he or she realizes fairly soon that the world, as such, cannot be « represented ». In literary fiction it is, in fact, possible only to « represent » the discourses of that world. Yet, if one attempts to analyse a set of linguistic relationships using those same relationships as the instruments of analysis, language soon becomes a « prisonhouse » from which the possibility of escape is remote. Metafiction sets out to explore this dilemma.6
2En accentuant cette « prison » que constitue tout langage, l'auteur de la métafiction souligne la relation problématique qui existe entre nos modes de représentation et le monde empirique. Par une manipulation de procédés fictionnels il dévoile comme fausse toute notion de transparence en matières de communication linguistique. C'est pour cette raison que Waugh associe le texte de métafiction moins à un questionnement épistémologique (ce qui caractérise le modernisme) et l'assimile plutôt à un questionnement ontologique. Le texte de métafiction se concentre sur de questions telles que celle de la possibilité de connaître la réalité de notre monde à travers le langage, d'échapper au piège d'un langage saturé par la culture et l'idéologie, de sortir de ce labyrinthe sans fin qui nous empêche d'accéder à la vérité.
3Le jeu sur la transparence prétendue de l'illusion référentielle est une manifestation de ce questionnement. La métafiction utilise les procédés de création de cette illusion dans le seul but de la démonter devant les yeux du lecteur pour lui dévoiler le fonctionnement du texte de fiction : « the lowest common denominator of metafiction is simultaneously to create a fiction and to make a statement about the creation of that fiction. »7 C'est une stratégie parmi d'autres qui permet d'instaurer la réflexion métatextuelle. Certes, cet effet n'est pas proprement postmoderne puisqu'on retrouve la même réflexivité dans des romans tels que Tristram Shandy (1760), Don Quixote (1604), et Tom Jones (1749).8 De même le caractère auto-référentiel de l'écriture moderniste est difficilement discutable. On peut aller jusqu'à dire que tout texte contient certaines des stratégies que l'on assimile aujourd'hui au genre de la métafiction. Mais le caractère postmoderne de ce phénomène réside plus dans le degré d'affichage de telles stratégies que dans la simple réfléxivité. C'est à ce niveau que l'on peut réellement parler de la métafiction postmoderne. C'est là où ces stratégies sont poussées à l'extrême, où la dimension auto-référentielle du texte de fiction et son rôle de médiation culturelle peuvent difficilement passer inaperçus. Selon Waugh ceci s'accomplit par le biais d'un certain nombre de stratégies :
- mise en crise des codes et parodies des conventions littéraires
- jeux jubilatoires sur les franchissements de niveaux narratifs
- jeu entre narrateur et narrataire
- création de mondes alternatifs pour aboutir à la déréalisation
- saturation des formes et des structures jusqu'au vertige
- massive mobilisation du réseau intertextuel
- dénudation de l'artifice du mystère de la littérature et refus d'escamoter l'illusion.
4La métafiction postmoderne, caractérisée par la profusion de ces stratégies, débouche sur une absence de limites, et une exploration des frontières (le fantastique) de manière à cultiver une attitude de vigilance critique chez le lecteur. La perte de l'innocence vis-à-vis de la transparence du langage est affichée de façon frappante dans ce genre. Selon Waugh c'est une littérature de l'extrême, une fiction qui met en place une stratégie de l'épuisement en ce qu'elle vise à repousser les limites de la signification par le recours à la saturation. Le soupçon atteint les possibilités même du langage. La métafiction devient ainsi l'aventure d'une écriture plutôt que l'écriture d'une aventure.
5Waugh souligne le concept du jeu comme central à cette expérimentation sur les limites de la fiction. Elle a recours à la théorie de Roger Callois pour caractériser la métafiction comme forme d'activité entropique9 : « Such novels usually set up an internally consistent ‘play’ world which ensures the reader’s absorption, and then lays bare its rules in order to investigate the relation of ‘fiction’ to ‘reality’, the concept of ‘pretence’. »10 Au lieu de voir l'illusion littéraire comme effet positif, Waugh, à l'instar de Callois et de Huizinga perçoit dans cet effet de « laying bare the rules » et dans la déconstruction de l'illusion, le rôle civilisateur de l'art littéraire : « In literature then, realism, more than aleatory art, becomes the mode most threatening to full civilization, and metafiction becomes the mode most conducive to it ! »11 La métafiction met en scène les anciennes règles romanesques et les subvertit afin de produire de nouveaux jeux déstabilisants. La dimension ludique de ce processus permet la mise en place d'une forme de questionnement fictionnel qui vise à ébranler le lecteur.12 Son activité de lecture, telle qu'elle est dessinée par le texte de métafiction, incite à percevoir les conventions qui gèrent notre perception de la réalité. La vie des personnages et leur cohérence s'effritent sous ses yeux. La voix du narrateur est troublée de façon à rendre le lecteur conscient du fonctionnement de la structure narrative. La mise en abyme de différents univers au cours du même récit amène un questionnement sur les modes de réalité : « Frames are set up only to be continually broken. Contexts are ostentatiously constructed, only to be subsequently deconstructed. »13 Par conséquent, le statut ontologique du texte de métafiction acquiert une qualité vacillante aux yeux du lecteur puisque, malgré le développement d'une lucidité critique face à ces bouleversements, sa recherche de la réalité ne cesse de lui poser un défi.
Poétique et Politique
6Wenche Ommundsen, dans son livre Metafictions ?14 insiste en effet sur la dimension pragmatique de la métafiction. Ommundsen, tout comme Waugh, souligne les différents modes de métafictions comme étant une déstabilisation à outrance de conventions romanesques jusqu'à une sursaturation de sens et un brouillage à l'extrême du statut ontologique de l'univers fictif. Selon Ommundsen, la tension qui émerge entre une perception de l'objet esthétique et commentaire sur cet objet qu'est le texte de fiction crée un effet de « double-take » chez le lecteur de la métafiction. C'est dans cette réaction que réside la pertinence sociale de ce genre de fiction. Le rôle du lecteur serait essentiel pour conférer à ces jeux de lecture un caractère politique. Ommundsen aborde la métafiction selon cette perspective pragmatique et souligne dans quelle mesure la métafiction contemporaine met en relief le rôle du lecteur dans la production du sens, dans une relation de coopération et de conflit avec le texte. Des procédés tels que le contrat de lecture, les questionnements sur le statut du texte de fiction, et l'agression intertextuelle incite à une relation entre texte et lecteur. Le décodage de l'implicite de la métafiction dépend de la capacité du lecteur à percevoir le contrat ironique, notamment dans l'utilisation de clichés et de stéréotypes qui pourraient être pris au premier degré. Comme Hutcheon le cons-tate dans Narcissistic Narrative la métafiction entretient une relation analogique avec la liberté du lecteur :
The book is a material object ; it can be opened and closed at will. It can be read in bits, violating its temporality ; it can be reread in part or whole, violating its linearity. It moves with the reader and is still when he abandons it. This material freedom has its analogue in the imaginative realm. The paradoxically « induced » liberation is taught by Fowles's heroines in The French Lieutenants Woman, is felt by the reader, as by the author. The critic too is freed from the restrictions of any single methodology by the fact, emphasized throughout this study, that metafiction embodies within itself its own critical frame of reference as part of its theme and often its form.15
7C'est cette forme de libération qui est mise au premier plan de la métafiction. Comme Waugh, Hutcheon retrace le développement de ce genre qui privilégie la mise en scène de jeux de lecture. Et tout comme Ommundsen, elle constate que ce qui sépare la métafiction postmoderne des autres modes d'auto-représentation dans la littérature, c'est la façon dont elle met en lumière le contrat de lecture et le processus par lesquels l'auteur et le lecteur pratiquent le jeu littéraire :
In the earlier texts, the main interest is in the writing process and its product. The focus today broadens to include a parallel process of equal importance to the concretization of the text – that of reading. [...] In overtly or covertly baring its fictional and linguistic systems, narcissistic narrative transforms the authorial process of shaping, of making, into part of the pleasure and challenge of reading as a co-operative, interpretative experience.16
8La liberté inhérente au jeu de la lecture est exploitée à outrance dans le texte de métafiction. Hutcheon identifie certains des enjeux politiques qui émergent de ce processus, et suggère que le déchiffrement du texte de métafiction peut constituer un acte politique pour le lecteur.17
9De même, Ommundsen évoque le débat sur le rôle politique de la métafiction. Repli narcissique pour certains, (Jameson, Eagleton), elle est une mise en cause politique de nos modes de pensées pour d'autres (Barthes, Foucault, Bakhtine et Brecht). Parfois la métafiction constitue un cas d'auto-réflexivité – portant donc sur le texte lui-même –, mais dans d'autres cas, l'objet de réflexion devient la culture au sens large ou parfois certaines idées politiques. De fait, la politique constitue très souvent la visée de la métafiction postmoderne. Comme le constate Linda Hutcheon, cette relation est complexe et parfois dangereuse puisque les méthodes employées dans la métafiction, telles que la parodie, peuvent déboucher sur une forme de critique complice, une transgression autorisée dont l'effet final n'est que le renforcement de la norme. De même, lorsque la dimension narcissique de la métafiction est poussée trop loin, elle peut glisser vers un état d'anti-représentation. Ainsi métafiction prend-elle part au débat sur les rapports entre le postmodernisme et la politique.
Métafictions historiographiques
10Hutcheon explore ces relations paradoxales dans The Poetics of Postmodernism18 lorsqu'elle met en rapport la métafiction postmoderne et le domaine de l'histoire pour identifier un sous-genre qu'elle intitule, « Historiographic Metafiction ». Elle définit l'historiographie comme la reconstruction imaginative du processus historique et la métafictionalité comme les stratégies qui mettent ouvertement l'accent sur les processus de construction, de sélection et de classement des faits relatés par la fiction. La métafiction historiographique se veut donc une textualisation et une problématisation de notre connaissance du passé. La mise en scène textuelle de faits historiques déclenche un questionnement et une prise de conscience : « Historiographic metafiction, for example, keeps distinct its formal auto-representation and its historical context, and in so doing problematizes the very possibility of historical knowledge, because there is no reconciliation, no dialectic here – just unresolved contradiction (...). »19 Les romans qui appartiennent à ce genre examinent nos représentations culturelles du passé, et mettent ainsi en avant la primauté du discours dans la connaissance que nous avons de ce passé. Pour Hutcheon, l'histoire et la fiction interagissent sans qu'il y ait valorisation de l'une par rapport à l'autre :
Fiction and history are narratives distinguished by their frames (see B. H. Smith 1978), frames which historiographic metafiction first establishes and then crosses, positing both the generic contracts of fiction and of history. The postmodern paradoxes here are complex. The interaction of the historiographic and the metafictional foregrounds the rejection of the claims of both ‘authentic’ representation and "inauthentic" copy alike, and the very meaning of artistic originality is as forcefully challenged as is the transparency of historical referentiality.20
11Le paradoxe postmoderne figure au centre de la métafiction historio-graphique puisque ce genre met au premier plan le problème de la représentation et notre connaissance du monde empirique. A travers une manipulation de techniques fictionnelles, la métafiction historiographique permet de sonder les frontières entre le monde et les faits historiques, voire culturels. L'un des procédés fréquemment utilisés est l'usage à outrance de l'intertextualité : « one of the postmodern ways of literally incorporating the textualized past into the text of the present is that of parody. »21 L'intertextualité signale que le passé ne peut se connaître qu'à travers d'autres textes, à travers des traces intertextuelles.
12Ces références parodiques sont rarement dépourvues d'une charge sémantique qui suggère une relation sociale, voire idéologique. La métafiction s'éloigne ainsi de l'auto-représentation qui caractérise le modernisme et remet en lumière le référent. Le social s'infiltre dans le texte sous forme de discours divers et permet ainsi de thématiser le problème de la référence qui figure au centre de la théorie post-structuraliste :
Historiographic metafiction problematizes the activity of reference by refusing either to bracket the referent (as surfiction might) or to revel in it (as non-fictional novels might). [...] The text still communicates – in fact it does so very didactically. There is not so much "a loss of belief in a significant external reality"(403) as there is a loss of faith in our ability to (unproblematically) know that reality, and therefore to be able to represent it in language.22
13La métafiction historiographique instaure l'ordre du rapport référentiel entre le discours et le monde dans le seul but de problématiser celle-ci : « Historiographic metafiction, [...] installs totalizing order only to contest it by its radical provisionality, intertextuality, and, often, fragmentation ».23 C'est ainsi que l'intertextualité permet la subversion du discours historique, voire littéraire. Par une dissémination de voix sociales dans le texte de fiction, le genre remplace la relation auteur/texte par une autre relation, celle qui s'instaure entre le lecteur et le texte et donc situe le lieu où s'élabore le sens au sein même du discours. Le lecteur est invité à percevoir le passé au travers des traces textuelles dans lesquelles il se dévoile. Ceci implique que le lecteur décèle le processus ironique par lequel ces traces s'inscrivent dans le texte fictionnel. Hutcheon cite par exemple les références parodiques au conte de fées chez Alice Walker : « Alice Walker calls upon ironic versions of familiar fairy tales in The Color Purple : Snow White, the Ugly Duckling, Sleeping Beauty, and so on. But the significance of the parodies is not clear until the reader notices the gender and race reversal effected by her irony : The world in which she lives happily ever after is a female and black one. »24 La responsabilité d'interprétation des faits historiques est déplacée en effet de l'auteur vers le lecteur. Une perspective pragmatique permet de comprendre les implications politiques de ce genre de fiction.
14Dans le texte de métafiction historiographique, l'histoire, voire l'idéologie, se transforment devant les yeux du lecteur pour devenir une forme de jeu social. Selon Hutcheon, la position du sujet joue un rôle essentiel dans ce processus. Le questionnement tourne non seulement autour de ce nous pouvons savoir mais aussi autour de qui sait, voire qui interprète les faits de notre passé. Tout comme la métafiction historiographique rejette l'auto-référentiel en faveur d'une forme de référence qui permet de problématiser notre connaissance discursive du monde, elle thématise le débat sur le sujet qui est, selon la théorie poststructuraliste, décentré, disséminé, discontinu. Certains romans postmodernes posent des questions sur la position du sujet, l'identité sexuelle de celui-ci, et aussi sur la représentation de la femme.25 Selon Hutcheon, le travail de Teresa de Lauretis (1984) et de Kaja Silverman (1983) permet d'aborder le caractère politique de ce questionnement. Leur recherche sur le rôle du sujet féminin dans le cinéma a permis entre outre d'établir un parallèle avec le « point de vue » dans la fiction, et de reconnaître dans quelle mesure nous sommes influencés par la sexualisation du sujet : « In both reading and viewing, we are already socially constituted as women and men (121), not just in the sense of being simply female or male, but in the sense of being each armed with a semiotic history (personal and social), a series of previous identifications by which we have been en-gendered (145). »26 Hutcheon se focalise sur l'exemple de The White Hotel de D. M. Thomas pour illustrer ce point : « In The White Hotel, the female protagonist is not fully or consistently a traditional Jamesian centre of consciousness with whom the reader can identify as subject. Nor does she seem to be the reflec-tion of any authorial subjectivity upon which she might be based. Instead she is presented as the 'read subject' of her own and of others' interpretations and inscriptions of her. She is literally the female product of readings. »27 Dans le cas de ce roman, le sujet féminin et sa dimension idéologique deviennent objets de réflexion. La femme apparaît comme être intégral et comme être fragmenté, composé de différents discours sociaux qui sont infiltrés par des tendances idéologiques en matières de sexualité. On peut percevoir partout dans la métafiction historiographique une tension entre l'unité du sujet et sa dissémination dans une pluralité de perspectives. Cette crise se voit par exemple dans Midnight's Children de Salman Rushdie où le traitement du narrateur permet de mettre en scène la crise du sujet masculin par rapport au contexte politique de l'Inde au moment de l'indépendance :
Often those two types of metafictional narration – the resolutely singular and disconcertingly plural – come together, as in Salman Rushdie's Midnight's Children and, as a result, both the male subject and history are simultaneously decentered, along with the narrative itself. Despite the presence of a single, insistent, controlling narrator – a writer who knows he both reports and creates public and private history – the (male) center of this novel is constantly displaced and dispersed. The search for unity (narrative, historical, subjective) is constantly frustrated.28
15La métafiction historiographique travaille donc dans une relation dialectique avec la critique littéraire. Le texte romanesque devient la scène sur laquelle se joue toute une panoplie de concepts liés à l'idéologie et à cette relation particulière qu'entretien le sujet humain avec le discours. La métafiction met en question l'identité du sujet à plusieurs niveaux et met en crise la conception de celui-ci comme « WASP » (White Anglo-Saxon Protestant) pour ouvrir la métafiction à des questions idéologiques. Hutcheon souligne en effet dans quelle mesure le questionnement de la métafiction historiographique tourne essentiellement autour de la relation entre l'esthétique littéraire et le pouvoir : « In the postmodern ‘history-like’, the ideological and the aesthetic have turned out to be inseparable. The self-implicating paradoxes of historiographic metafiction, for instance, prevent any temptation to see ideology as that which only others fall prey to. What postmodern theory and practice has taught is less that ‘truth’ is illusory than that it is institutional, for we always act and use language in the context of politico-discursive conditions. »29 Cependant, le côté paradoxal de la métafiction historiographique par sa validation et sa mise en crise simultanées du référent crée un champ de signification qui est en mouvement constant. C'est là que le marxiste ne pourra pas trouver un reflet fidèle de son idéologie et que l'artiste ne pourra pas trouver un reflet innocent du texte de fiction. Hutcheon, à l'instar de Mikhaïl Bakhtine30, confirme qu'une telle forme de littérature réflexive ne permet ni d'entrer en relation directe avec un contexte politique, ni de tomber dans le piège du texte purement auto-référentiel. Au contraire, la métafiction historiographique permet d'ériger cette relation entre l'art et le monde comme problème à résoudre. Il s'agit bien d'une fiction de questionnement esthétique et politique : « I would agree with Habermas that this art does not 'emit any clear signals' (1985a, 90), but, then again, it does not try to. It tries to problematize and, thereby, to make us question. But it does not offer answers. It cannot, without betraying its non-totalizing ideology. »31
Notes de bas de page
1 Patricia Waugh, Metafiction : The Theory and Practice of Self-Conscious Fiction (Londres et New York : Routledge, 1985, 2.
2 Waugh, 2-3.
3 Waugh, 2.
4 Linda Hutcheon, Narcissistic Narrative : The Metafictional Paradox (Londres, New York : Routledge, 1980).
5 Hutcheon, Narcissistic Narrative xii.
6 Waugh, 3-4.
7 Waugh, 6.
8 Waugh, 24.
9 Waugh, 40.
10 Waugh, 40-41.
11 Waugh, 41.
12 Waugh souligne dans quelle mesure le concept du jeu est central au contexte postmoderne et cite en plus de Callois et Huizinga le travail de Wittgenstein, de Lacan, de Derrida, d'Eric Berne, et de Michael Beaujour. Waugh 41-42.
13 Waugh 101.
14 Wenche Ommundsen, Metafictions ? (Melbourne : Melbourne University Press 1993).
15 Hutcheon, Narcissistic 152.
16 Hutcheon, Narcissistic 154.
17 Hutcheon fait cette observation en relation avec les romans canadiens Trou de mémoire (1968) de Hubert Aquin et Beautiful Losers (1966) de Leonard Cohen.
18 Linda Hutcheon, The poetics of postmodernism (Londres et New York : Routledge, 1988).
19 Hutcheon, The poetics of postmodernism 106.
20 Hutcheon, The poetics of postmodernism 110.
21 Hutcheon, The poetics of postmodernism 118.
22 Hutcheon, The poetics of postmodernism 119.
23 Hutcheon, The poetics of postmodernism 116.
24 Hutcheon, The poetics of postmodernism 134.
25 « However, many of these postmodern novels (The White Hotel, The French Lieutenants Woman, Blackout, among others) are contestatory on yet another level : they overtly pose questions about subjectivity that involve the issues of sexuality and sexual identity and of the representation of women. » Hutcheon, The Poetics of Postmodernism 160.
26 Hutcheon, The Poetics of Postmodernism 161. (Hutcheon fait une synthèse ici des idées de Teresa de Lauretis).
27 Hutcheon, The Poetics of Postmodernism 161.
28 Hutcheon, The Poetics of Postmodernism 161.
29 Hutcheon, The Poetics of Postmodernism 178.
30 Hutcheon, The Poetics of Postmodernism 183.
31 Hutcheon, The Poetics of Postmodernism 231.
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