Théâtre antipapal : trois textes dramatiques du début du XVIe siècle
p. 109-122
Texte intégral
1On apprécie depuis longtemps l’importance du théâtre profane comme véhicule de la satire religieuse à la fin du Moyen Age. La présentation par Jonathan Beck de quelques pièces comiques du Recueil la Vallière, par exemple, permet de brosser, du moins à Rouen, le tableau d’une activité théâtrale fort mouvementée à l’époque de la Réforme, où des bandes de comédiens, partisans tant des protestants que des catholiques, couraient les rues tirant les uns sur les autres dans une sorte de « théâtre des guérillas », d’une agressivité d’ailleurs souvent bien farouche1. Les genres dramatiques de la fin du Moyen Age – les sotties et leur thème de la folie universelle ; les moralités, dont les allégories peuvent fonctionner au niveau polémique aussi bien que didactique – se prêtaient aisément à ce genre de propagande sectaire ou anticléricale. On pense, par exemple, à la Sottie des sotz ecclesiastiques qui jouent leurs bénéfices2, sketch de sots dont la satire s’explique dans le titre même ; ou bien à la Moralité d’Eglise, Noblesse et Pauvreté qui font la lessive3, jouée par les Cornards de Rouen lors du carnaval de 1541. Ajoutons, pour garder une stricte impartialité en la matière, le cas du Gouvert d’Humanité (1541) de Jehan d’Abondance, pièce catholique, où le personnage luthérien d’Erreur essaie en vain de persuader Humanité d’abandonner les pratiques de confession et de jeûne4.
2Une telle propagande théâtrale se révèle assez répandue en France dans la première moitié du xvie siècle, sa polémique naturellement variable selon les circonstances de la production. Rarement spécifique, la satire y est souvent même voilée, par crainte de se faire censurer ou de subir une punition parfois sévère. Ma perspective ici sera pourtant de mettre sous la loupe des productions bien plus spécifiques, non seulement dans le caractère ad hominem de leur satire, mais aussi dans leur période chronologique. Mes trois pièces datent des années 1508 – 1512, période des plus troublées de l’histoire politique et religieuse, marquée en France par les arguments en faveur de l’église gallicane contre la suprématie de la papauté. De tels arguments entrèrent en conflit avec les ambitions de plus en plus temporelles du pape Jules de Rovère, « il papa terribile », dont le comportement guerrier, tout évident dans d’autres productions artistiques et littéraires de l’époque, se traduit particulièrement bien sur la scène comique. En 1508, le pontife vient de signer avec ses alliés européens La Ligue de Cambrai contre la république de Venise, que les Français mettront pourtant en déroute à la victoire d’Agnadel quelque six mois plus tard. Ces événements dicteront la politique du pape de « jeter les Français hors d’Italie ». À partir de 1510 Louis XII, « roi treschrestien », fils aîné de l’Église, se trouva en état de guerre contre la papauté5.
3Notre perspective dans ces quelques pages sera de passer en revue moins l’arrière-plan politique et religieuse, tout important qu’il soit, que la transmission sur la scène d’une propagande qui visait ce « pape terrible » dans sa lutte contre la monarchie française. La question que nous posons est la suivante : par quels procédés dramatiques et satiriques nos trois dramaturges ont-ils pu affronter le problème de la mise en scène d’un portrait peu flatteur – parfois même burlesque – du chef de l’église universelle, à un moment particulièrement tendu dans ses relations avec Louis XII ?
4Notre enquête portera sur les trois pièces suivantes :
- La Moralité de l’Estrif du Pourveu et de lElectif de l’Ordinaire et du Nommé, pour lui accorder le titre proposé tout récemment par Jelle Koopmans6. Attribuée tour à tour à Jean Bouchet, à André de la Vigne et à Pierre Gringore, elle provoque un dialogue continu quand à sa paternité et à sa provenance. La moralité a fait l’objet d’une édition par J.-M. Dejardin dans un mémoire de licence non publié de l’Université de Liège7. (Personnages : Benefice grant, Benefice petit, Pragmatique, Élection, Nomination, L’Ambitieux, Legat, Quelcun, Vouloir extraordinaire, Père saint, Provision Apostolicque, Collation ordinaire, Université, le Heraut). BnF, Rés. Ye 2988.
- Jean Lemaire de Belges, « Dialogue allégorique entre Folle Espérance, Ingratitude, Le Pape Jules, et Le Sainct Siège apostolique », BnF, Ms. fr. 25295, Lyon, juillet 15118. (Personnages : Ingratitude, Obstination, Folle Espérance, Puissance Royalle, Le pape Jules, Le Sainct Siège Apostolicque).
- Pierre Gringore, Le Jeu du Prince des Sotz et de Mère Sotte, pour P Gringore, Paris, 1512. BnF, Rés. Ye 1317 ; Bibliothèque Méjanes, Aix-en-Provence, Rés. D 4939. (Personnages : trois Sots, Le Seigneur du Pont Alletz, Le Prince de Nates, Le Seigneur de Joye, Le General d’Enfance, Le Seigneur du Plat, Le Seigneur de la Lune, L’Abbé de Frevaulx, L’Abbé de Plate Bource, Le Seigneur de Gayecté, Le Prince des Sotz, La Sotte Commune, La Mère Sotte, Sotte Fiance, Sotte Occasion, Croulecu).
La Moralité de l’estrif
5Après l’érudition qu’a consacrée récemment Jelle Koopmans à cette pièce complexe, on aurait dit qu’il n’y a presque rien de nouveau à dire sur notre moralité, intitulée jusqu’ici, comme le précise sa page de titre, « La Moralite du Nouveau monde ». Or notre collègue néerlandais a pu démontrer, de façon fort convaincante, que son titre (la pièce n’ayant rien d’utopique) devrait se lire tout simplement : L’Estrif du pourveu et de l’ellectif de l’Ordinaire et du nommé, c’est-à-dire « la lutte de celui qui a obtenu un bénéfice et de celui qui est nommé par élection10 ». Imprimée à Paris par Guillaume Eustache vers 1511, elle fut représentée pour la première fois à Toulouse le 11 juin 1508, jour de la Pentecôte :
[…] sous la tante
De l’Université plaisante
En la place tresbien duysante
Qu’est de Sainct Estienne nommee (Helmich, p. 372)
6c’est-à-dire sous les auspices de l’Université de Toulouse. Il s’agit d’une pièce dont le thème principal est la Pragmatique Sanction11, sujet qui, de prime abord, semblerait se prêter difficilement à un traitement dramatique. Or ce n’est pas l’endroit, ici, d’entrer dans le détail quant à l’importance historique de la Pragmatique. Rappelons pourtant que, promulguée à Bourges en 1438 par le roi Charles VII lors d’un concile de l’Église gallicane, elle définit non seulement les droits de l’Église de France, mais aussi les limites des pouvoirs du Père-Saint. Elle souligne d’abord et surtout l’indépendance de l’Église gallicane, et particulièrement la question de l’élection et la nomination aux bénéfices, tout en menaçant le pouvoir du pape en tant que chef de l’Église universelle. La Pragmatique représente donc un important document conciliariste en ce qu’elle proclame la supériorité du concile général de l’Église sur les pouvoirs papaux.
7Il n’est guère étonnant donc que l’Université de Toulouse se fût déclarée défenseur acharné de la Pragmatique et des libertés gallicanes. Dans la séance de tribunal qui termine la pièce (l’un des motifs conventionnels, avec ceux du mariage symbolique et de la bataille allégorique, qui structurent la pièce), c’est la figure d’Université qui, en dispensatrice de la justice, défend La Pragmatique opprimée, et qui passe en revue tous les protagonistes de « L’Estrif » en leur rappelant leur devoir de vivre selon Droit et Raison. Ce jugement, ainsi que l’action qui précède, ne simplifie pas pour autant le problème de la Pragmatique en présentant le conflit entre la monarchie et la papauté comme une simple opposition entre bons et mauvais.
8Nous ne nions pas bien sûr que le pape, désigné sans équivoque dans la liste des personnages comme « Le Père Sainct », soit représenté ici sous un aspect peu flatteur. Il est tout simplement une caricature grotesque (« un stéréotype comique » selon Britnell)12, le comique grossier de son apparence physique destiné sans doute à susciter le gros rire de l’assistance rassemblée devant la cathédral Saint-Etienne de Toulouse. Envoyés consulter « Le Père Sainct », Vouloir Extraordinaire et L’Ambitieux (personnage énigmatique, qui veut la charge de Benefice Grand, devenu vacant…) se rendent « au-delà des monts » pour obtenir le soutien du pape ; mais c’est d’abord avec difficulté qu’ils arrivent à reconnaître le saint Père :
Veez ci ung grand homme et blancz cheveulx,
Qui porte une grande saincture.
Esse point celui d’aventure
Qu’il nous fault, ou quelque autre sainct ? (p. 339)
9Avec cette simple homophonie entre « père saint » et « père ceint » (sanctus/cinctus) notre pièce exploite un jeu de mots qu’aurait sans doute souligné le costume d’un personnage caractérisé par sa ceinture énorme, à laquelle le texte fait souvent allusion, attirant l’attention du spectateur sur le physique du pape : « Grant saincture a, dont pere sainct/L’appelle on par le pays » (p. 338). On voit également plus d’un brin de xénophobie dans ce portrait, marqué d’un comique lié au jargon italianisant que l’auteur place dans la bouche du Père Sainct, langage parfois intelligible, mais qui provoque le rire aussi de par son « étrangeté » linguistique13. Une série de procédés comiques peu subtils donc, par lesquels l’autorité du pontife est subvertie dans une pièce qui a su faire rire par une caricature carnavalesque qui ne nuit pas pour autant à un sérieux sous-jacent.
10La risée de tous, cette figure du pape n’a pourtant rien ici de la spécificité, ni de la virulence, des portraits de ce même Jules II que nous présentent les deux autres textes de notre groupe. Ce personnage représente bien sûr la papauté, sans être particulièrement reconnaissable comme Jules II de Rovère, mais il n’est guère le scélérat de la pièce. Ce rôle est réservé ici plutôt au personnage de Legat, autrement dit Georges d’Amboise, ministre royal et cardinal-légat papal qui, depuis 1503 jusqu’à sa mort en 1510, joua le rôle d’agent du roi, une sorte d’éminence grise auprès de Louis qui lui valut la désapprobation des universitaires toulousains. Jouant sur la forme méridionale du mot « légat » (le gat = « le chat »), Université le voit d’un fort mauvais œil, critiquant en particulier son caractère guerrier :
Sus, gat, allés aillieurs choisir
Vostre lieu, dea ; convient il estre
A ung homme qui se dit pretre
Enmy lances, chevaulx et armes
Estre directeur de gensdarmes ? (p. 369)
11C’est un portrait qui annonce en quelque sorte l’invective que Gringore dirigera plus tard contre Jules II14. Si d’Amboise (Legat) est condamné par Université dans la comparution des agresseurs de Pragmatique à la fin de la pièce (il sera renvoyé à Rome où il se contentera d’une mission apostolique conforme à son état…), le roi Louis XII, à peine voilé sous le nom de Quelcun, n’en est pas moins visé (il est invité à faire comme ses aïeux qui ont remis sur pied La Pragmatique.). Son aspect physique dans la pièce nous rappelle la position ambiguë de Louis vis à vis la Pragmatique : s’en déclarant souvent son défenseur afin de renforcer son image, dans la réalité et avec la complicité de Georges d’Amboise, il l’observait en effet très peu. La Pragmatique représente donc « une pomme de discorde non seulement entre la France et le saint-Siège, mais aussi entre le roi et nombre de ses sujets influents15 » surtout les membres de l’Université. Loin d’être un panégyrique de Louis XII, comme le prétendait Picot16, la moralité de L’Estrif traite des plaintes de l’Université de Toulouse devant le désordre qui régnait dans les bénéfices en France, ses préoccupations plus compliquées qu’un simple conflit entre Louis et Jules. Les plaintes des érudits de Toulouse se comprennent mieux sur le plan national ou régional. C’est pour cette raison que son auteur concentre ses attaques les plus acharnées non seulement sur Georges d’Amboise, mais aussi sur l’Ambitieux, en apparence une allégorie typique du genre de la moralité, mais qui devait avoir ici une pertinence bien plus locale17. Quant au pontife, il joue dans cette pièce un rôle quelque peu marginal par rapport aux vrais coupables, bien qu’il soit irrévérencieusement caricaturé. C’est dans des textes composés entre 1510 et 1512, pourtant, quand le conflit entre le roi et le pape est au plus fort, que les attaques contre Jules deviennent plus virulentes et plus nettement dirigées vers la personne même du pontife.
Jean Lemaire de Belges : Allégorie contre Jules II
12On ne compte pas d’habitude Jean Lemaire de Belges parmi les hommes de théâtre du début du xvie siècle. Précurseur de la Pléiade, poète attitré de la cour royale, il est connu surtout pour son imprimé en prose – Le Traicté de la différence des schismes et des conciles de l’église de 1511 – texte de propagande destiné (comme sa Légende des Vénitiens de 1509) à persuader son lectorat de la légitimité de la politique du roi. En 1511, Lemaire se désigne « historiographe de la royne », c’est-à-dire d’Anne de Bretagne, que Louis avait épousée en 1498 après le scandale de son divorce d’avec Jeanne de France. On dit souvent que la nouvelle épouse du roi s’opposait vivement à la campagne contre le pape et qu’elle insistait pour que les poètes dans son service modérassent leur propagande en faveur de Louis. L’évidence d’un texte manuscrit18, rédigé à Lyon en juillet 1511, juste après la publication du Traicté, semble pourtant démentir cette interprétation de l’attitude de la reine. Il s’agit d’un prosimètre allégorique sans titre, auquel ont accordé ses plus récents éditeurs le titre de Vim Ludovicus Habet, d’après la légende que porte la bannière de Puissance Royalle, l’une des allégories qui figurent dans la remarquable miniature qui précède le texte19.
13Le texte de cette allégorie qui, selon Jennifer Britnell, « functions rather like a morality play20 », constitue une attaque bien plus cinglante et personnalisée contre Jules II que ne fait celui de la pièce toulousaine. Bien que l’allégorie puisse nous sembler assez anodine et ses qualités dramatiques assez plates (surtout l’exposition numérologique et étymologique autour du nom de LUDOVICUS de la section en prose), la satire en est fortement mise en relief par la miniature qui précède le texte, et qui mérite, à mon avis, l’attention des historiens du théâtre pour ce qu’elle peut nous communiquer du potentiel dramatique d’un simple texte. Dans cette évocation picturale de la défaite (on dirait même la déposition) de Jules, notons d’abord, à gauche, le trône de saint Pierre, inoccupé (parce que Jules ne le mérite pas), orné des clés pontificales, derrière lequel se tient un personnage élevant le bras gauche, symbole du Saint-Siège apostolique. Un peu à côté, vêtu d’une robe bleue fleurdelisée, un personnage couronné (Puissance Royalle) représente la royauté française portant un étendard brodé des mots : « Vim Ludovicus habet ». À droite s’élève par contraste un trône en bois dans lequel est assis un personnage barbu, qu’on reconnaît facilement comme Jules II. Appuyant son menton sur sa main gauche, il tourne le dos aux autres personnages et a l’air de somnoler. Ce trône porte la devise : Io som Julio/papa secundo/Qui aconcero/o guastero/tutto el/mondo (« Je suis le pape Jules II qui s’apprête à détruire le monde »). À ses pieds, trois figures féminines, portant des armes mais complètement terrassées, semble-t-il, et qui représentent sans doute les autres allégories de la pièce : Ingratitude, Obstination, et Folle Espérance (celle-ci portant le capuchon d’un sot). Dans le fond, une ville (Bologne ? reprise à Jules par les Français en mai 1511) ; devant la ville, on voit des troupes au combat.
14L’allégorie s’ouvre avec un échange entre les trois « filles d’enfer » (v. 44) : Ingratitude, Obstination et Folle Espérance – représentant des défauts du pape lui-même ! – qui invectivent contre leur maître d’avoir succombé aux Français. Mais Jules, incorrigible, dans sa seule et unique réplique de la saynète (v. 57-70), n’a pas dit son dernier mot :
Je suis bien viel, mais s’il fault que je saulte,
Oncq on ne vit comedie de Plaute
Si bien jouer soubz theatre ne vaulte
Que on la verra jouer par mon adveu. (v. 67-70)
15Jules peut tout faire : comme Legat de L’Estrif, il « jouera bien son personnage ».
16Certaines allusions dans le texte sont renforcées visuellement pour rendre plus directe la vitupération de Jules montrée par Lemaire et son miniaturiste anonyme. Signalons entre autres le motif de « l’écrevisse estrange et lunaticque », auquel fait allusion Folle Espérance (v. 42), repris dans l’emblème du trône de bois, et dont le contraste avec les clès apostoliques du Saint-Siège permet de souligner le caractère imprévisible de Jules21. Ou bien le motif du chêne évoqué au v. 15 (« arbre sans fruict et de meschant mesrien », v. 15), blason de la famille della Rovera, dépeint sur l’écu tombé et qui renforce encore une fois la distinction entre la personne du pape et le Saint-Siège, gemmé d’or et de pierres précieuses : « consideré que ton chesne est subject à decadence et de feuilles et de glans… Mais je suis immortel et permanent » (p. 19). Toujours est-il qu’il porte une canne, que ses 65 ans ainsi que sa corpulence rendaient sans doute nécessaire, malgré son absence dans tous les portraits officiels du pontife22. Et puis il y a la barbe que porte Jules, sujet controversé à une époque où les poils disgracieux désignaient un Juif ou un Musulman23 – encore un point satirique dans ce portrait peu flatteur du pape. Comme le disent bien Armstrong et Britnell, « tout ce complexe métaphorique fort dense, auquel Lemaire a intégré éloge et blâme politiques est mis en relief par la miniature24 ». Celle-ci témoigne, à mon sens, d’une sémiotique qui met fortement en relief l’opposition entre « le père du peuple » d’une part et « le pape terrible » de l’autre, dans une polémique dont la théâtralité se sent d’ailleurs dans bien d’autres détails picturaux : les costumes, le décor simultané impliqué par les deux trônes, le gestuel signifiant (le pape endormi ; la réprimande de Saint-Siège ; la main de Puissance Royalle posée sur l’accoudoir.). Une telle représentation ne nous a malheureusement laissé aucune trace. Toujours est-il que, « présentée » éventuellement en juin-juillet 1511 devant la cour réunie au sud-est de la France25, (Louis se proposant de rejoindre ses armées en Italie), cette polémique reflète les préoccupations des pouvoirs français à une époque particulièrement délicate dans l’aventure italienne du roi, préoccupations que cette miniature anime de façon fort révélatrice.
Pierre Gringore : Le Jeu du Prince des Sots
17Quelques six mois plus tard la situation politique a beaucoup évoluée, pourtant. La France étant alors en pleine guère contre Jules, il fallait persuader non seulement la cour mais aussi un parterre de citadins de la légitimité de la politique antipapale du roi, d’où la représentation aux Halles de Paris, le mardi gras 1512 (n.s.) du Jeu du Prince des Sotz de Pierre Gringore : poète, comédien, éditeur, impresario quasi officiel d’entrées royales, et célèbre « Mère Sotte ». On nous reprochera sans doute le fait qu’il n’existe aucun document prouvant que Louis ait commandé à Gringore sa « trilogie » carnavalesque26. Il avait pourtant déjà affirmé ses sympathies gallicanes dans des pamphlets comme La Chasse du cerf des cerfs, où Jules est dépeint comme un septuagénaire guerrier et matérialiste. Les diverses formes dramatiques que comporte son Jeu accorderont à Gringore des « voix » différentes27, pourtant, lui permettant de dresser un portrait satirique de Jules qui est bien plus ad hominem, tout en exploitant cette période de licence qui caractérise la fête des jours gras afin de triompher du respect superstitieux que le pontife inspirait ordinairement à la foule.
18Après un Cry parodique qui annonce dès le début l’atmosphère carnavalesque, Gringore réunit dans la sottie tous les motifs traditionnels – parallèle entre monde des sots et monde réel, séance de tribunal, combat burlesque, jeux de costume, accessoires signifiants, enfin tous les rituels du carnaval – en vue de chanter des louanges d’un Prince des Sots/Louis XII et de tourner en ridicule Mère Sotte/ Jules II, indigne détenteur de la Papauté. Mère Sotte, jouée selon toute probabilité par Gringore lui-même, se condamne de sa propre bouche dès son entrée en scène :
Le temporel vueil acquérir
Et faire mon renom florir.
Ha ! brief, vela mon entreprise.
Je me dis Mere Saincte Eglise,
Je vueil bien que chascun le note ;
Je maulditz, anatematise ;
Mais soubz l’habit, pour ma devise,
Porte l’habit de Mere Sotte (vv. 343-350).
19transparence cruciale, bien sûr, et qui incite les spectateurs à transférer d’emblée leur mécontentement à la personne de Jules II, dont la réputation est d’autant plus sapée par la présence de ses deux acolytes : Sotte Fiance et Sotte Occasion, représentants de son matérialisme et de sa fourberie légendaires28.
20S’ensuit un complexe de propos décousus qui effleurent tous les lieux-communs de la satire antipapale contemporaine : Mère Sotte/Église se mêle d’astrologie (v. 379) ; elle est fourbe, perverse : « La Bonne Foy ? c’est le vieil jeu ! » (v. 406) ; assise dans sa chaire elle « y repose et dors » (v. 414)29. Elle rappelle à ses prelatz – Croulecu, Sainct Liger, Frevaulx, La Courtille et Plate Bourse – son désir de mélanger « temporalité » (v. 429) et « espritualité » (v. 433). C’est toujours elle qui mène le jeu, graissant la patte à ses suppôts avec des promesses de « rouges chappeaulx » (v. 459), essayant en vain de convaincre les « seigneurs » de se joindre à elle avec des offres de « pardons » (v. 509). Alors que le Prince ne veut que la paix (v. 603), c’est elle qui déclare la guerre (v. 461 : « Frappez de crosses et de croix ! »), se transformant en « gendarme » furieux (v. 532), sa crosse de pontife (v. 176) devenue attribut guerrier, pour redevenir à la fin de la pièce sa marotte de fou. À noter que Le Prince/Louis ne participe pas à la bataille de prelatz et princes qu’annonce l’une des rares didascalies (v. 595) bien que les « seigneurs » l’assurent qu’il lui est permis de se défendre « justement, canoniquement » (v. 606). Le dénouement s’effectue quand Mère Sotte/Église perd son déguisement d’Église pour révéler son costume de sot qu’elle porte « par dessoubz ». Elle est alors ignominieusement expulsée de sa chaire (élément important du décor, comme on le verra) et la fin n’est que jeu – plus précisement jeu de carnaval, où jugement satirique, déshabillement burlesque, et combat carnavalesque se réunissent pour emporter les spectateurs, comme le fera la farce qui termine l’ensemble du Jeu, dans l’euphorie collective et rassurante de la fête.
21Ce n’est pas sans adresse que Gringore a su s’approprier de ces rites de carnaval à des fins propagandistes, surtout celui de la bataille burlesque. Au niveau de la politique extérieure il est permis d’y voir une évocation satirique de la prise de Mirandole, qui eut lieu le 12 janvier 1512, c’est-à-dire juste avant la représentation du Jeu et à laquelle Jules lui-même avait pris part30. Au niveau carnavalesque pourtant les spectateurs l’auraient sans doute assimilé aussi au canevas de la bataille traditionnelle entre Carnaval et Carême. Comme l’a bien démontré J.-C. Aubailly : superposée à la structure de séance de tribunal, il y aurait eu, pour les spectateurs des Halles, une structure tout aussi significative de jeu-combat burlesque, dans laquelle le Prince des Sots et ses « seigneurs » représenteraient la liesse débridée de carnaval, et Mère Sotte/Église, avec sa bande de misérables « abbés », la maigre figure de Carême31. Dans un tel concours Mère Sotte/Église serait l’inéluctable perdant.
22Il en reste pourtant une justice plus haute, plus justicière, pour ainsi dire, et c’est là le domaine de la moralité, dans laquelle encore une fois Gringore détourne avec talent les motifs du genre. Si la sottie est polémique, la moralité, elle, est éthique et didactique, traitant de la situation dans un style et par des procédés qui relèvent de l’allégorie et des méthodes du prédicateur32. Ce sont Pugnition Divine et Les Demerites Communes qui soulignent le plus cette nouvelle perspective. Ce qui n’empêche pas une satire toute aussi virulente contre la personne de Jules, désigné ici l’Homme Obstiné, mais qui est facilement reconnaissable dès son entrée en scène : une caricature grotesque du « pape terrible » et qui débite sa première réplique en véritable matamore, s’accusant lui-même de tous les maux, que la forme balladique (à refrain auto-présentationnel : « Regardez moy, je suis l’Homme Obstiné ») rend d’autant plus choquants. Il est pervers (89) ; il ne peut « de mal faire abstenir » (91) ; il est « menteur » (93), « variable comme la mer » (94). Il fait allusion à ses origines génoises (96) ; au fait qu’il avait une mère grecque (93) ; à sa manie de l’astrologie (172, 453) ; à sa passion pour l’alcool (118120 ; 207-20) ; le motif de l’écrevisse y est également repris (179).
23Au cours de l’action pourtant, la virulence de l’attaque s’atténue peu à peu, cédant la place à une satire anticléricale plus générale. La double ballade de Simonie et d’Hypocrisie constitue le premier véhicule de ces attaques, qui ont pour effet de dissiper la franchise de l’invective dirigée contre Jules. La ballade de Punition Divine (refrain : « On se repend aucunes fois trop tard »), dont l’entrée est marquée par « ung merveilleux signe » (164), reprend quelques réprimandes particulières : Jules est « ingrat, fol, felon, pervers » (171-72), « rebelle, fantastique » (183). Les plus dures reproches sont pourtant réservées aux abus ecclésiastiques en général : ce sont des usurieux (191), des luxurieux, des sodomites (192), des nécromanciens (202), des sybarites (212). Vers la fin de la moralité, le personnage de Demerites Communes, abstraction symbolisant les fautes communes à toute l’humanité, atténue encore plus les réprimandes particulières, en exhortant tout le monde à s’amender. Non seulement les personnages sur scène, mais toute l’assistance sont appelés à un acte collectif de contrition que souligne un jeu de scène complexe incorporant le costume de Demerites Communes, auquel seul l’Homme Obstiné refuse de prendre part. Si la sottie se base sur la notion que notre monde n’est peuplé que de fous, la moralité, elle, nous rappelle dans un dernier tableau, que nous sommes tous des pécheurs.
24Qu’on me permette, pour terminer mes remarques sur le Jeu de Gringore, un petit mot sur la farce qui termine le spectacle et que – chose curieuse – Cynthia Brown exclut de sa récente édition. Ce n’est pas que j’y voie une reprise de la thématique des pièces précédentes, comme l’a suggéré Charles Oulmont33. Sa structure de jugement-charivari, son thème de maris cocus dont on se moque publiquement et son jeu de l’équivoque érotique, ne nous semblent pas pour autant entièrement sans rapport avec l’esprit carnavalesque des autres pièces du Jeu. On notera en plus l’importance d’une chaire, « haultement eslevée », dans le dispositif scénique de chaque élément de l’ensemble. Cette chaire sera destinée dans la sottie à Mère Sotte qui en est déposée sans cérémonie ; dans la moralité elle sera occupée par la figure terrifiante de Pugnition Divine ; alors que dans la farce cette chaire n’est point celle du Prince des Sots (comme le croit le couple farcesque qui s’y rend pour qu’il puisse juger leur cas) : le Prince y a été alors remplacé par le Seigneur de Balletreu – et par tout ce que ce personnage implique d’outrance priapique. Comme le dit bien André Tissier : « après la satire politique, Gringore renouait avec l’esprit de carnaval ; et le public allait quitter les Halles sur un rire débridé », c’est-à-dire sans trop se soucier de l’image de sa Sainteté Jules II satirisée34.
25Trois pièces de circonstances donc, composées pour des occasions particulières, leur ton et leur perspective moulés par des « moments » spécifiques, gauchis sans doute par des intérêts particuliers, dans une période fort complexe dans le cadre des rapports de plus en plus tendus entre le monarque et le chef de l’Église universelle. Trois milieux distincts : l’Université, la Cour, la Ville.
26Dans le cas de L’Estrif, l’engagement de son auteur anonyme (Jean de la Vigne, dit « Mondi » ? selon Koopmans)35, vise moins le pape que le roi lui-même, et surtout son ministre George d’Amboise, cible particulière d’une satire universitaire toulousaine autour des libertés gallicanes. Il en reste pourtant des questions à résoudre ici : il serait intéressant, par exemple, d’en savoir plus sur le personnage de L’Ambitieux. Pour le lectorat de l’imprimé parisien de 1511, ce serait sans doute une abstraction universelle du type qu’on relève souvent dans les moralités ; pour un public toulousain de 1508, pourtant, on imagine une spécificité bien plus locale, qu’il reste à préciser.
27Dans le cas de l’allégorie de Lemaire, il s’agirait de pousser un peu plus loin la question de sa représentation éventuelle. Notons de plus que sa tonalité fortement pro-monarchique peut s’expliquer non seulement par le moment politique, mais aussi par l’intérêt personnel de son auteur, qui devint, au début de 1512 « hystoriographe de la royne36 ».
28Bien que la perspective du Jeu de Gringore soit un peu plus nuancée, notre dramaturge a pour autant profité d’un ensemble de formes dramatiques et d’une liberté d’expression sanctionnée par la fête du mardi gras, afin de produire un divertissement qui est subversif, non par un renversement des hiérarchies (comme le proposerait la thèse bakhtinienne), mais qui renonce au rôle contestataire de Mère Sotte pour se mettre, comme nous rappelle Nicole Hochner, « à la solde du pouvoir37 ».
29Quelle est en effet la place de ces textes de théâtre dans la tradition satirique de la Renaissance ? Il ne serait pas, je l’espère, trop hasardeux de suggérer qu’ils sont au moins dans la tradition du « grand Érasme38 ». Dans ces papes sur scène on perçoit, surtout dans celui de Gringore, plus d’un trait du Julius Exclusus e coelis du satiriste de Rotterdam. J’aimerais bien croire qu’Érasme connaissait certains d’entre nos textes39, dont il y aurait d’intéressantes comparaisons à faire avec son dialogue40. La satire d’Érasme, publiée après la mort de Jules, présente un commentaire plus réfléchi du pontife véreux. Nos textes sont par contre des réactions polémiques plus immédiates : des pièces de circonstances, de caractère événementiel, leur portée ne subsistant pas au-delà du « moment » conflictuel qui les a occasionnés. Après la mort de Jules II en février 1513, que remplace un Léo X bien moins belliqueux, nos textes ont dû tomber dans l’oubli. Ils méritent pourtant notre attention tant pour leur intérêt dramatique que pour nous fournir l’occasion de saisir le jeu complexe du pouvoir royal et de la culture populaire au seuil de la Renaissance.
Notes de bas de page
1 J. Beck, Théâtre et propagande aux débuts de la Réforme : six pièces polémiques du Recueil La Vallière, Genève, 1986.
2 Le Recueil Trepperel I : Les Sotties, éd. E. Droz, Paris, 1935, p. 339-369, pièce que Droz date de 1511.
3 J. Beck, Théâtre et propagande, p. 103-144.
4 P. Aebischer (éd.), « Le Gouvert d'Humanitéde Jean d’Abondance », Bibliothèque dHumanisme et Renaissance, 24, 1962, p. 282-338.
5 Pour une analyse d’autres textes antipapaux, voir J. Britnell, « Antipapal writing in the reign of Louis XII : propaganda and self-promotion », Vernacular Literature and Current Affairs in the Early 16th Century, éd. R. Britnell and J. Britnell, Aldershot, 2000, p. 41-61. Je tiens à remercier vivement Jennifer Britnell de ses discussions électroniques sur beaucoup de points relatifs à cette communication. On consultera également F. Baumgartner, « Louis XII’s Gallican Crisisof 1510-1513 », Politics, Ideology and the Law in Early Modern Europe. Essays in Honour of J. H. M. Salmon, Rochester, NY, 1994, p. 55-72.
6 Voir J. Koopmans, « Du nouveau sur le Nouveau Monde », Lanalisi linguistica e letteraria 12, (2004), p.613-631.
7 J.-M. Dejardin (éd.), « Le Nouveau Monde » : étude et édition critique d’une moralité du xvie siècle, 2 vol., Université de Liège, Faculté de Philosophie et Lettres, 1983-1984. Pour une reproduction en fac-similé de l’imprimé original, voir W. Helmich, Moralités françaises. Réimpression fac-similé de vingt-deux pièces allégoriques imprimées aux xv et xvie siècles, t. I-III, Genève, 1980.
8 A. Armstrong et J. Britnell (éds.), Jean Lemaire de Belges : Epistre du roy à Hector et autres pièces de circonstances (1511-1513), Paris, 2000, p. 14-29, sous le titre : « Vim Ludovicus habet ». Voir aussi K. M. Munn, A Contribution to the Study of Jean Lemaire de Belges. A Critical Study of Bio-Biographical Data, Including a Transcript of Various Unpublished Works, New York, 1936, p. 168-177 ; P. Jodogne, Jean Lemaire de Belges, écrivain franco-bourguignon, Bruxelles, 1972, p. 392-395.
9 A. Hindley (éd.), Paris, 2000 ; voir aussi C. J. Brown (éd.), Pierre Gringore : Œuvres polémiques rédigées sous le règne de Louis XII, Genève, 2003.
10 Pour la véritable Sotise du Nouveau Monde, voir O. A Duhl (éd.)., Sotise à 8personnages [Le Nouveau Monde], Genève, 2005.
11 Sur cette pièce et sur d’autres textes ayant pour sujet la Pragmatique, voir J. Britnell, « La Pragmatique Sanction dans des textes français du règne de Louis XII », Lanalisi linguistica e letteraria 12 (2004), p. 455-469.
12 J. Britnell, Le Roi treschrestien contre le pape : écrits anti-papaux en français du règne de Louis XII, à paraître. Je suis redevable à Jennifer Britnell de m’avoir communiqué des sections de son manuscrit de cet ouvrage en cours.
13 Voir Dejardin, « Le Nouveau Monde », p. 27. Comme le note Britnell, Ibidem, son langage n’est nullement « macaronique », pourtant, comme le suggère Picot.
14 Cf. J. Britnell, « La Pragmatique Sanction ».
15 Voir sur ce point J. Britnell, Le Roi treschrestien contre le pape.
16 É. Picot, Les moralités polémiques ou la controverse religieuse dans l’ancien théâtre français, Paris, 1887 ; Genève, 1970, p. 16.
17 Voir J. Koopmans, « Le Théâtre à Toulouse au début du xvie siècle », dans Nathalie Dauvois (dir.), L’Humanisme à Toulouse (1480-1596), Actes du Colloque international de Toulouse, mai 2004, Paris, Champion, 2006, p. 393-407.
18 BnF, Ms. fr. 25295, 12v° - 22ro.
19 A. Armstrong et J. Britnell (éds.), Jean Lemaire de Belges, p. 14-29.
20 J. Britnell, « Antipapal Writing in the Reign of Louis XII », p. 52.
21 Expression, selon P. Jodogne, Jean Lemaire de Belges, p. 393, que Lemaire aurait recueillie parmi les poètes italiens à la cour de France (satirisés plus loin dans le texte par Saint-Siège Apostolique), et signifiant : « se tromper, faire une erreur, recevoir un échec », avec en plus des nuances de « fantaisie, mutabilité, folie ».
22 Fait remarqué par R. W. Scheller, dans « Ung fil tres delicat : Louis XII and Italian affairs, 151011 », Simiolus : Netherlands Quarterly for the History of Art, 31, 2004, p. 4-46 à la p. 17.
23 Voir sur ce point Scheller, « Ung fil tres delicat », p. 17-18. On sait que Jules a laissé pousser sa barbe en 1510. Il est pourtant curieux de constater que dans L’Estrif, Pragmatique dit au Père Sainct : « Nefrotés icy vostre barbe » (Helmich, p. 349 ; noté par Britnell, Le Roi treschrestien).
24 Jean Lemaire de Belges, p. XIV.
25 Pour Scheller, « Ung fil tres delicat », p. 16, il s’agirait d’un « theatrical entr’acte for the court ». Voir aussi L’analyse de Britnell, Le Roy treschretien, qui souligne les qualités dramatiques de l’allégorie de Lemaire.
26 Cf. Britnell, « Antipapal Writing », p. 56.
27 Voir à ce sujet l’article de C. J. Brown, « Pierre Gringore : Acteur, Auteur, Éditeur », Cahiers V-L. Saulnier (Les Grands Rhétoriqueurs), 14, 1997, p. 145-163.
28 Sur le jeu des déguisements dans cette pièce voir C. J. Brown, « Patterns of Protest and Impersonation in the Works of Pierre Gringore », Vernacular Literature and Current Affairs, p. 16-40.
29 Pareille accusation dans l’allégorie de Lemaire, v. 57 : « Je ne dors pas, mais je sommeille ung peu. »
30 On pense aux v. 587-90 ; « Que l’assault aux princes on donne, Car je vueil bruit et gloire acquerre/Et y estre en propre personne. » (Mère Sotte).
31 Voir J. C. Aubailly, « Théâtre médiéval et fêtes calendaire ou l’histoire d’une subversion », Between Folk and Liturgy, éd. par A. J. Fletcher et W. Husken, Ludus 3, Amsterdam/Atlanta, 1997, p. 3164 ; sur le canevas de la bataille, voir p. 44-48.
32 Consulter sur ce point C. J. Brown, The Shaping of History and Poetry in Late Medieval France, Birmingham, Alabama, 1985, p. 119.
33 C. Oulmont, Pierre Gringore : la poésie morale, politique et dramatique à la veille de la Renaissance, Paris, 1911 ; réimpr. Genève, 1976 : « Si l’on voulait subtiliser à tout prix et rattacher la Farce à la Sotie et à la Moralité on pourrait prêter aux personnages un sens symbolique, supposer que Doublette [la femme] est la France, qui a besoin de bons ouvriers et de bons soldats, et ne reconnaît pas pour ses serviteurs ceux dont tout l’effort se dépense en beaux discours. » (p. 294 n)
34 A. Tissier, (éd.), Recueil de farces : 1450-1550, Genève, 1986-1998, t. II, p. 241.
35 J. Koopmans, « Le Théâtre à Toulouse au xvie siècle ». Voir aussi O. A. Duhl (éd.), Sotise à 8 personnaiges, p. 20-40.
36 Armstrong et Britnell (éds.), Jean Lemaire de Belges, p. VII.
37 N. Hochner, « Pierre Gringore : une satire à la solde du pouvoir ? », Fifteenth Century Studies, 26, 2000, p. 102-120.
38 Voir aussi sur ce point J. Britnell, « Antipapal Writing », p. 58.
39 On lit dans une lettre d’Erasme à l’humaniste allemand Jean Cesarius : « […] il paraît qu’un bon nombre de gens ont entre les mains je ne sais quel libelle contre le Pape Jules, où l’on raconte la manière dont après sa mort il fut exclu du ciel par Pierre. J’avais entendu dire qu’une pareille comédie avait été jouée en France, où ces sornettes ont toujours eu la plus grande liberté de se produire ». Cité par J.-B. Pineau, Érasme et la papauté : étude critique du Julius Exclusus, Paris, 1923, p. 4.
40 Dans son dialogue satirique on voit le pontife guerrier à la porte du ciel, sûr d’y être admis, mais auquel saint Pierre ferme résolument l’entrée. La caricature, et son auto-glorification en particulier, fait penser à l’entrée en scène de L’Homme Obstiné dans la moralité de Gringore. Voir J. C. Margolin, « Pamphlets gallicans et antipapistes (1510-1513) : de la Chasse du cerf des cerfs de Gringore au Julius exclusus d’Érasme », Traditions polémiques. Cahiers V.-L. Saulnier 2, Paris, n° 27, 1984, p. 21-36.
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