Étude pragmatique des relations langagières entre les chevaliers des lignages du roi Lot et du roi Ban : évolution entre La Mort le roi Artu et le Tristan en prose
p. 101-113
Texte intégral
1Alors que le Lancelot propre ou la Queste du Graal sont plutôt centrés sur des itinéraires d’individus, la Mort le Roi Artu1 raconte des destinées collectives et souligne fortement les oppositions entre les lignages. La guerre entre le lignage du roi Ban et celui du roi Lot, qui provoquera la catastrophe finale, ne se manifeste pas seulement en termes de valeur au combat ou de loyauté : chaque lignage se caractérise aussi par une manière de communiquer qui s’organise sous l’autorité du chef de lignage. Les décisions, les discussions et autres conseils contribuent à construire les groupes de personnages, leur donnant ainsi une sorte d’idiolecte tant sur la forme des interactions que sur leur fond. L’étude des actes de langage et des marqueurs des relations verticales ou horizontales entre les personnages nous permettra de montrer que le lignage du roi Lot, féodalement organisé en parage selon les historiens2, c’est-à-dire fondé sur l’égalité des frères sous un même suzerain, Arthur, est un lieu de discussions souvent houleuses, où aucune autorité ne vient trancher les débats. En revanche, le lignage du roi Ban, organisé en frérage, c’est-à-dire que Lancelot est le seigneur de son frère et des ses cousins, est entièrement dominé par ce dernier dont les décisions sont en général sans appel et sans critique.
2Le Tristan en prose3 connaît une inflation de frères, de cousins et de fils, par rapport à la Vulgate. Blyoberis, Hélyan et une vingtaine d’anonymes sont venus s’ajouter à ceux que l’on connaissait déjà. Reprenant à la Mort Artu la rivalité entre les deux familles auquel il ajoute la concurrence du lignage du roi Pellynor de Galles, le texte durcit les oppositions : l’harmonie qui règne dans le lignage du roi Ban témoigne du rôle civilisateur que joue cette chevalerie consacrée sous l’influence de Lancelot, tandis que les discordes qui enveniment le lignage du roi Lot symbolisent la corruption qui le suit.
3Dans la Mort Artu, le lignage d’Arthur se présente d’emblée comme éclaté, sans autorité de tutelle capable de rassembler les cinq neveux du roi, sans projets communs, ni unité d’esprit. La rupture repose sur l’épineuse question d’informer ou non le roi Arthur de l’infidélité de son épouse. La scène où Agravain révèle cette infortune à son oncle est d’emblée construite sur un conflit. Si on l’examine en utilisant les outils mis en place par les pragmaticiens, sa violence est encore plus frappante. Les théoriciens Brown et Levinson4 ont mis en place une théorie de la politesse qui ne repose pas sur les mœurs ou les sociétés, mais qui prend appui sur des composantes psychologiques de la personne. Selon eux, la politesse repose sur la notion de face. Chaque individu possède deux faces : d’une part la face négative qui correspond aux « territoires du moi » (territoire corporel, spatial ou temporel, biens matériels, savoirs secrets) ; d’autre part la face positive qui correspond au narcissisme et à l’ensemble des images valorisantes que chaque individu a de lui-même. En parlant, chacun est constamment en train de « menacer » son interlocuteur. Le simple fait de lui parler empiète sur sa face négative, plus encore si on lui pose une question ou lui donne un ordre ; lui faire une critique ou un reproche met en cause sa face positive. Mais le locuteur peut aussi mettre en danger sa propre face négative, en prenant un engagement par exemple, ou sa propre face positive en faisant un aveu. Tout individu essaye donc de se ménager lui-même et de ménager son interlocuteur pour maintenir l’harmonie des rapports humains. Pour cela, chacun est amené à adoucir ses actes de langage menaçants – ces linguistes parlent de FTA, Face Threatening Act – d’une part, et d’autre part à produire un certain nombre d’actes de langage valorisants – Face Flattering Acts – remerciements, compliments, vœux… qui font plaisir à l’interlocuteur. Les personnages des romans médiévaux se plient eux aussi à ces règles qui donnent leur aspect naturel à de nombreuses conversations.
4Dans la scène de la Mort le Roi Artu où Agravain révèle son infortune à son oncle, les FTA se multiplient entre les frères et surtout envers le roi. Les cinq hommes conversent entre eux jusqu’à ce que l’arrivée d’Arthur crée une tension :
Il avint un jor qu’il estoient tuit cinc enmi le palés et parloient de ceste chose moult a estroit ; et Agravains en estoit plus engoissex assez que nus es autres. Endementiers qu’il parloient de ceste chose, avint que li rois issi de la chambre la reïne et quant messire Gauvains le voit, il dist a ses freres : « Tesiez, vez ci monseigneur le roi. » t Agravains respont qu’il ne s’en tera ja por lui. Li rois oï bien ceste parole ; si dist a Agravain : « Biax niés, dites moi de quoi vos parlez si hautement. » (chapitre 85, p. 107-108)
5En intimant à son frère l’ordre de se taire, c’est-à-dire en lui adressant un FTA, Gauvain se place d’emblée en position haute dans la relation qui l’unit à lui. La rebuffade d’Agravain qui refuse cet ordre est un acte d’une grande violence, plus grave encore que l’ordre initial. Par là il refuse l’autorité de son frère et met en place une stratégie de résistance, de contre-pouvoir, revendiquant une égalité de principe. Cette égalité de statut permet alors à la polémique5 de se déclencher. Cet échange a un auditeur additionnel, non prévu par le locuteur, le roi lui-même, et on peut penser qu’il constitue un acte menaçant aussi pour la face négative de celui-ci, tant il est vrai que nul n’apprécie que l’on se dispute à son sujet en son absence. Arthur interroge donc Agravain, mais c’est Gauvain qui répond en affirmant fortement qu’il refuse de porter à la connaissance du roi l’information dont il dispose, nouvelle violence à l’égard de son oncle, bafoué dans son autorité et dans sa face positive, et manière d’élever encore cette information au statut d’objet de désir. L’intrusion de Gauvain dans un échange qui ne lui est pas destiné et le détournement qu’il opère de la parole de son frère, sont aussi un acte menaçant, encore renforcé par la deuxième intrusion, celle de Gaheriet dont la participation au dialogue n’avait jamais été explicitement sollicitée. Ils prennent l’initiative de la parole, sans que la parole leur ait été donnée, alors que leur infériorité de statut leur imposerait une position réactive. Gaheriet prend la précaution d’adoucir son FTA par une formulation polie, replaçant son oncle en position haute dans leur relation : por ce vos loeroie ge com a mon seigneur lige que vos lessissiez atant le demander. Mais cette formulation ne fait, à notre avis, que renforcer l’impolitesse de leur rebuffade en la doublant d’une déloyauté au plan féodal. Par conséquent, le refus du roi de renoncer à la connaissance fait monter encore d’un cran l’atmosphère de violence : son ordre se fait plus pressent, assorti de marques d’énonciation d’autorité : Par mon chief, fet li rois, non ferai, einz vos requier orendroit seur le serement que vos m’avez fet que vos me diez de quoi vos estiez orendroit en estrif entre vos. La réponse de Gauvain montre le déplacement de la polémique : celle-ci passe de l’argument, la révélation d’une information, à l’énonciateur. C’est la personne même du roi qu’il met en cause : Merveilles est de vos, fet missire Gauvains, qui si estes ardanz et curieus de savoir nouveles. Celui-ci en reste ébahi et menace ses neveux d’une violence physique : si dit qu’il le savra ou il les fera toz destruire. Désormais, seule la violence physique peut prolonger l’interaction. Nous en sommes à la dernière étape d’un dialogue de type polémique auquel Gauvain met un terme en abandonnant son statut de participant à la conversation. Ce départ, cette dislocation du groupe familial, est un nouveau FTA envers la face positive du roi, qu’il quitte avec Gaheriet sans même prendre congé, c’est-à-dire sans adoucir la rupture par un acte de langage phatique. C’est une défaite pour Gauvain et Gaheriet qui perdent leur statut de locuteur mais plus encore pour Arthur qui n’a toujours pas eu accès à l’information demandée et dont l’autorité a été à plusieurs reprises remise en cause. Cette scène est répétée immédiatement après puisqu’il demande à Agravain de lui dire enfin quel est ce secret qu’on lui cache : Agravain et ses deux frères commencent par refuser à nouveau. Il faut que le roi menace de tuer son neveu pour qu’enfin il puisse connaître la vérité. Deux clans se sont donc formés après cet échange de propos violents.
6Les scènes suivantes confirment l’éclatement du lignage. L’harmonie y est désormais impossible :
A l’heure de none vint messire Gauvains et Gaheriez avec lui ; et quant il virent le roi, si connurent bien a sa chiere que cil avoient dites novieles de Lancelot ; pour ceste chose ne tornerent il onques vers lui, einz alerent as fenestres del palés. La sale estoit coie et serie ; si n’i avoit nul leanz qui osast mot dire por le roi qu’il veoient corroucié. (chapitre 87, p. 110)
7Les deux neveux s’isolent dans l’abri que procurent les fenêtres ; la salle est plongée dans l’apathie par le silence du roi. La réconciliation est impossible : Arthur refuse violemment les conseils de Gauvain et le destitue donc de son rôle vassalique. Mais ce dernier ne change pas d’attitude et persiste à affirmer le bien-fondé de sa conduite :
A cest conseil sorvint messire Gauvains, et quant il les vit parler si a estroit, si dist au roi : « Sire, Dex doint que de ce conseill ne vos viengne se bien non, car ge i espoir plus mal a vos qu’a autre. Agravain, biaus freres, je vos pri que vos ne commenciez chose que vos ne puissiez parfornir ; et ne dites riens de Lancelot se vos nel savez veraiement ; car il est li mieldres chevaliers que vos onques veïssiez. — Gauvain, fet li rois, fuiez de ci, car vos estes li hom en qui ge ne me fierai jamés, car mauvesement vos estes contenuz envers moi, quant vos saviez ma honte et la soufriez ne ne le me fesiez asavoir. — Certes, fet messire Gauvains, onques ma traïson ne vos fist mal. » (chapitre 87, p. 111)
8L’attitude de Gauvain est pleinement insultante pour le roi, il agresse sa face positive en prédisant une issue désastreuse à la vengeance entreprise et sa face négative en se mêlant d’une affaire où il a été désavoué et en se plaçant ouvertement du côté de son ennemi. Le conseil qu’il donne à son frère est aussi adressé indirectement à Arthur. Celui-ci ne s’y trompe pas, en prenant la parole à la place d’Agravain. Il lance à l’aîné de ses neveux un reproche général remettant en cause toute son attitude et partant sa face positive : Vos estes li hom en qui ge ne me fierai jamés, car mauvesement vos estes contenuz envers moi. Gauvain réfute aussitôt ce reproche : Certes, fet messire Gauvains, onques ma traïson ne vos fist mal. Cette réfutation6 est particulièrement habile, elle admet le présupposé du roi : Gauvain a bien trahi son seigneur, mais refuse les conséquences pragmatiques de cette trahison, implicitement comparées à leur avantage aux conséquences de la guerre qui ne manquera pas d’avoir lieu entre les deux lignages.
9Si le prestige de Gauvain le met à l’abri des ordres du roi, ce n’est pas le cas de Gaheriet qui doit obéir aux ordres de celui-ci et se joindre à la troupe des hommes armés qui accompagnent Guenièvre au supplice. Mais il maintient cependant son opposition à son seigneur, représenté ici par Agravain. Il n’obéit que sous la menace et précise qu’il n’hésitera pas à passer dans le camp adverse :
Li rois li [à Gaheriet] commande et il dit qu’il n’en fera riens. Et neporquant li rois le menace tant que il li promet que il ira. Si vet prendre ses armes et tuit li auutre ausint. Et quant il furent armé et il furent hors de la cité, si esgarderent qu’il furent bien quatre vins. « Ore, Agravain, fet Gaheriet, cuidiez vos que g’i soie venuz por moi mesler a Lancelot, se il vouloit la reïne rescorre ? Or sachiez bien que ja ne me mellerai a lui. Einz voudroie ge mielz qu’il la tenist toz les jorz de sa vie einz que ele moreust issi. » (chapitre 93, p. 123)
10Gaheriet oppose ainsi une sorte de clause de conscience à l’obéissance que lui demande son chef de lignage dont l’autorité apparaît en fin de compte assez nulle et trop faible pour maintenir l’unité de son lignage quand des forces séparatrices le déchirent. L’amitié et le prestige de Lancelot entraînent ainsi la division du clan en deux groupes antagonistes. Il faudra la mort de ses frères et de Gaheriet, le meilleur d’entre eux, pour que Gauvain se sente à nouveau investi d’une solidarité familiale quand il n’a presque plus de famille.
11Inversement, dans le lignage du roi Ban, l’autorité du chef de lignage est toujours reconnue et acceptée quasiment sans discussion. La différence ne tient pas ici aux enjeux de ces discussions car le droit et le péché sont répartis de manière à peu près identique entre les deux lignages. Cependant, aucune des décisions de Lancelot, même les plus surprenantes, n’est contestée. Le héros s’est bien éloigné de l’adolescent timide qui sortait juste des jupes de sa mère adoptive. C’est désormais un homme mûr aux engagements fermes et solides. Son dénuement progressif après l’épisode de la Joyeuse Garde, signe de son cheminement vers la sainteté, ajoute encore à l’autorité de ses propos :
« Par foi, fait li rois Boorz, moult estes ore merveillous, qui si l’amés de grant cuer, et il vous het mortelment. — Par foi, fait Lancelos, ceste merveille poés veoir ; il me savra ja tant haïr que je ne l’aime ; si nel deïsse mie encore si apertement, mais je sui el point de morir ou de vivre, puis que je a la bataille en sui venus. » Tel parole dist Lancelos de monseigneur Gauvain dont tuit cil qui l’oïrent se merveillierent moult et l’en prisierent assez plus qu’il ne fesoient devant. (chapitre 145, p. 186)
12Les propos paradoxaux de Lancelot, que l’on pourrait même qualifier de scandaleux tant ils s’opposent à la justice, loin de choquer les hommes de son lignage, engagés avec lui dans la guerre et la vendetta, lui attirent leur admiration. Quand il décide, à La Joyeuse Garde, de rendre Guenièvre au roi, ses amis protestent de sa décision mais celle-ci est sans appel et met fin immédiatement à la conversation :
Quant Boorz ot dite ceste parole, li autre dui [Hestor et Lyonnel] s’i acorderent bien et commencent Lancelot a blasmer ; si dient : « Sire, quel poor avez vos del roi que vos madame li rendés ? » Et il dit qu’il la rendra, que qu’il l’en doie avenir, neïs s’il en devoit morir par defaute de lui. Atant est li parlemenz finez quant il oent ce que Lancelos dit qu’il nel leroit en nule maniere qu’il ne la rendist. (chapitre 118, p. 155)
13Le reproche que lui font ses parents les plus proches agressent la face positive de Lancelot, soupçonné de peur, mais celui-ci ne semble pas affecté par ce reproche : sans réfuter cette accusation insultante, sans justifier sa démarche, il se contente de réitérer sa décision qui n’accepte aucune critique. De telles formules de clôture reviennent périodiquement dans les conversations de ce lignage :
* « Sire, font il, puis que il vos plest, nous irons ; mes moult volsissons o vos remanoir por vos fere compaignie. » Et il dist que ce ne velt il pas. Si en lessierent atant la parole ester. (chapitre 5, p. 4)
* Et il dient, puis que sa volenté i est, il le feront. Et Lancelos dit qu’il velt qu’il soient coroné a la Touz Seinz. (chapitre 125, p. 164)
* Lancelos dit a Hestor qu’il se tese atant quar assez en avoit dit, et il si fet. (chapitre 148, p. 192)
14Les interlocuteurs de Lancelot sont régulièrement réduits au silence par son autorité sans qu’il ait besoin de passer à la violence, que ce soit celle, morale, des insultes ou celle, physique, des coups. Cela ne l’empêche pas de prendre conseil auprès de ses hommes quand il a une question stratégique à leur poser, comme l’organisation des combats à la Joyeuse garde, ou dans l’un des rares moments de désarroi qu’il connaît. Ainsi il accepte de quitter sa position haute et de mettre en danger sa face positive quand pour la première fois il souffre de la froideur et de la jalousie que lui manifeste Guenièvre : Or me conseilliez donques, fet Lancelos, et me dites que g’en porrai fere, car se ge pes ne pooie trouver vers lui, ge ne porroie pas longuement durer. […] Et por ce vos di ge, biaus douz amis, que vos me conseilliez, car ge ne voi pas que ge puisse fere de moi après ce que vos m’avez ci dit (chapitre 59, p. 73), ou quand il revient, après l’embuscade que lui a tendue Agravain, sain et sauf mais visiblement effrayé et inquiet. Dans ce passage, après cette scène violente et déchirante, aucun terme n’explicite sa réaction mais son silence inhabituel dans un roman si fin au plan psychologique est frappant.
15Ainsi là où Arthur échouait à maintenir l’unité de son lignage et à se faire obéir par ses hommes, l’autorité de Lancelot est incontestée, son frère et ses cousins non seulement se solidarisent sans états d’âme à ses aventures amoureuses et guerrières mais ne remettent jamais en cause ses décisions. La cohésion du lignage est totale tant par obligation que par amitié.
16Les oppositions se durcissent dans le Tristan en prose. La structuration féodale de chaque lignage y est moins nette et nous n’avons pas réussi à dégager, sur les volumes observés, si les lignages du roi Ban et du roi Lot étaient, comme dans la Mort Artu, organisés en frèrage et en parage. De toute façon, l’opposition entre les deux lignages se situe désormais à un niveau moral : le lignage du roi Lot apparaît comme essentiellement divisé et la venue de Drian ou Lamorat, les fils du roi Pellynor, sert de déclencheur à leurs instincts violents. Le contraste est net avec le lignage du roi Ban dans lequel la violence est contenue et maîtrisée de manière incontestée par Lancelot. Alors que sa parenté constate avec dépit que la renommée de Tristan commence à faire de l’ombre à celle de Lancelot, leur volonté de vengeance ne trouve pas à se concrétiser. L’attitude des deux lignages est très intéressante à comparer sur ce point.
Chelui jour que si grant los et si grant pris avoit esté dounés en la maison le roi Artu a Lamorat, de monsigneur Tristran et de Dynadant, parla mesire Gavains a ses freres, a Guerrehés, a Agrevain, a Mordret, mais Gaheriés n’i estoit mie : « Signeur, fait mesire Gavains, que porrom nous faire de Lamorat, ki orendroit est li plus morteus anemis que nous avons en chest monde ? Ses peres ochist le mien, bien le savés. Graindre damage ne nous pot il faire ne plus grant deshounour. Or vont montant de jour en jour en orgueil et em beubant li enfant le roi Pellynor, et Lamorat plus que li autre. De chelui nous devom nous plaindre trop durement et par maintes occoisons. Ses peres, ensi com je vous ai dit, ochist le nostre. Le damage et la honte que nous avom de chestui fait ne li soufist encore pas, ains nous en fait plus cascun jour de chele meïsment ki nous porta. Et quant il de chele nous fait honte et vergoigne, il nous moustre bien apertement que assés poi nous doute et prise. Cheste parole vous ai je ore mise avant pour ce que tout estes mi frere et que vous partés a cheste honte aussi com je fas. Se vous avés tel cuer com chevalier doivent avoir, pensés de ceste cose en tel maniere que ceste honte soit vengiee prochainnement, car, de tant com nous irom plus atendant, de tant croistra plus nostre honte. Lamorat, ki monte en orgueil, doit ore tost venir a cort, et quant il sera a cort venus, gardom bien que nous ne demourom puis granment que nous ne vengom nostre honte. » Et li autre s’acordent bien a chestui fait et dient que, s’il lour escape, on ne les devra ja puis tenir as chevaliers. (manuscrit 2542, tome 4, p. 208-2097)
17Là où le lignage de Gauvain éclate dans la violence, celui de Lancelot est ramené à de plus justes valeurs :
Et saciés, par le pris qu’il gaaingna, adont conmencha la renommee de Lanselot a apeticier ; si i avoit a celui tans aucun del lingnage le roi Ban qui avoient grant doeil de ce que la renomme Lanselot estoit si apeticie et la renommee monsigneur Tristran estoit montee en haut. Adont eüssent ocis u fait mout grant vilonnie a monsigneur Tristran, mais il le laissirent pour ce que Lanselos disoit tout plainnement que il amoit monsigneur Tristran mout durement, et se il me metoient a mort pour nule aventure du monde, s’amour n’aroient il jamais. Et pour ce remaint mesire Tristrans en vie, bien le saciés, c’autrement l’eüssent il ocis et mis a mort. (manuscrit 2542, tome 6, p. 111-1128)
18Il y a dans ce roman un pessimisme profond dissimulé derrière l’exaltation de la vaillance. Dynadan avait raison : malgré tous les discours que chacun porte sur les bons chevaliers et sur la saine émulation que provoque leur fréquentation, les rancœurs et les jalousies ne s’en développent pas moins à l’égard des meilleurs. Les chevaliers se jaugent et s’évaluent mais pas forcément avec la bienveillance qu’ils affichent. Les lignages sont ainsi mis à l’épreuve de cette tentation : d’un côté, celui de Gauvain est définitivement désuni : Gaheriet est exclu de la communion de tous ses frères dans la même détestation de tous les autres chevaliers valeureux ; de l’autre, malgré les difficultés, le lignage de Lancelot maintient sa cohésion et son unité d’esprit.
19Quand Mordret, Agravain et Gauvain prennent ensemble la décision de tuer les fils du roi Pellynor de Galles, ils précisent bien que cette information doit rester cachée à leur frère :
Et misere Gauvain lor dit : « Se nos encontrions Gaheriet par aucune aventure, bien vos gardéz qe vos de ceste chose qe vos avéz ainssi porpenssee ne li feïssiéz rien a savoir. Il ayme tant Lamorat de grant amor qe je sai vraiement qu’a sa mort ne se poroit il acorder. Se a la mort de Lamorat venoit, il se torneroit ançois de sa partie qe de la nostre. — An non Dieu, fet Agravain, donques poons nous avoir mauvese fïance en lui. Si m’aïst Dex, tant m’en avéz dit qe, se nous venions demain a tel point, et je veoie qe Gaheriéz se tornast encontre nous por l’amour de Lamorat et de ces freres, par Sainte Croiz, je ocirroie plus volentiers Gaheriet qe nus des autres. Sanz faille, se il venoit entre nous, de tot ce qe nous avons ja dit ne li feroie ge riens savoir. — Ne ge certes ! » ce dit Mordés. En tele maniere et sanz autre achoison fut porpensee la mort au bon chevalier. (manuscrit 757, tome 2, p. 124-1269)
20Longtemps Gaheriet sera celui qui lutte, qui résiste pas à pas, argument par argument, à ces désirs violents. Il croit avoir réussi quand Lamorat sauve Gauvain de la mort. Gaheriet attend alors de son frère qu’il reconnaisse la dette qu’il a à son égard. La première partie de ce dialogue semble un éloge unanime des mérites de Lamorat et de la gratitude qui lui est due :
Il m’a tout plainement delivré de mort. De ce qe je vif doit je solement Dieu merciéz et lui après, et nul autre non. — Si m’aïst Diex, biau frere, fet Gaheriet, autretel vos redi ge de lui : sachéz vraiement q’il abandonna ci son cors a mort pour ma vie sauver.
21Mais malgré cela, Gauvain persiste dans son opinion : Et, ce diex me conseult, je voudroie qe je amasse son lignage de si bone amour come j’aing le parenté au roi Ban. La conversation des deux frères se fait alors polémique. Gaheriet demande à son frère la confirmation de son opinion, il refuse son affirmation et oblige Gauvain à expliquer l’origine de sa haine : Li rois Pelynor, lor pere, ocist le roi Loth, par quoi je n’aimai oucquez le roi Pellynor ne jai n’amerai ses enfanz por chose qe il me facent. Gaheriet s’efforce de réfuter ce jugement, ce qui l’oblige à multiplier dans la réplique suivante les FTA. Il porte un jugement négatif sur ce que vient de lui dire Gauvain : Si m’aïst Diex, biax frere, fet Gaheriet, vous dites trop mal et nie son argument par un raisonnement fondé sur une échelle de valeur entre les différents faits : Se Lamorat de ses propres mains eüst ocis le roi Loth nostre pere, si a il tant fet por vos et por moi qe vos le deüssiéz de bon cuer pardonner la mort de nostre pere et lui amer et touz ses freres. Si l’assassinat du roi Lot est un acte condamnable, il est largement compensé par les bienfaits que Lamorat a apportés aux fils de Lot, qui devraient le pardon à tous ceux de son lignage. Gauvain ne renonce pas pour autant à sa position mais il la reformule de façon nettement moins péremptoire : Certes, fet miserer Gauvain, je ne le hé pas et neporquant je vos di conme a mon frere qe je ne le porroie vraiement amer, ne lui ne ses freres. Cette reformulation montre qu’il a été touché par le raisonnement de son frère, mais il refuse cependant d’abandonner ses désirs de vengeance. Gaheriet lui assène alors deux nouveaux arguments fondés sur une comparaison entre les personnes de Gauvain et de Lamorat : il établit une nette hiérarchie entre les deux chevaliers. Gauvain est ingrat envers Lamorat, chevalier d’une générosité exceptionnelle et prêt à mourir pour les neveux d’Arthur ; Gauvain ne donne que haine alors que Lamorat est tout amour : il a trop mauvesement emploié le service qe il vos a fet, et mult est sa pensee diverse de la vostre, quant il vos ayme de tot son cuer et vos le haiéz si durement ! Il construit ainsi une figure quasi-christique du jeune chevalier de Galles, et inversement il renvoie à son frère une image de lui-même très dévalorisante. Cette argumentation tourne à l’insulte directe (il mostre miex qe il soit estréz de gentil lignee et de lignee roial qe vos ne mostréz, qe il est cortois et debonairez, et vos estez trop felon et trop cruex !)et entraîne la défaite de Gauvain, le silence, mais celui-ci ne change pas d’opinion pour autant. Gaheriet est exclu – il s’exclut de lui-même – des complicités meurtrières qui unissent ses frères. S’il remporte d’apparentes victoires argumentatives, il ne peut à lui seul changer le cœur de Gauvain ni empêcher le massacre des fils du roi Pellynor.
22Dans le lignage du roi Ban, c’est Bohort qui joue ce rôle modérateur en l’absence de Lancelot mais au nom de son cousin dont la seule mention suffit à mettre fin aux velléités agressives et déloyales de ses compagnons.
Hestor de Marés parole tout premierement et dist : « Signeur, que vous est avis de cest cevalier ki orendroit se part de nous ? » Et il respondent : « Il ne nous est avis se bien non. Il est sans faille li mieudres cevaliers et li plus fors et li plus seürs que nous trouvissom piecha mais. Ce n’est pas gieu de sa prouece ! — Signeur, fait Dryans, que vous diroie je ? Il est mestiers que je vous die de cestui fait que je em pens. Or saciés que li cevaliers ki de ci s’en vait et que nous avom tant proiié que il son non nous deïst et il nel nous vaut dire, se gabera des ore mais de nous, quant ensi nous est escapés. Je l’otroie, se Diex m’aït, que nous alissom aprés lui et li feïssom dire son non, vausist u non. Adonc pora il bien connoistre que nous ne sommes pas cevalier que on doie escondire de si poi de cose ! Il nous em prisera plus des ore mais et plus redoutera les cevaliers aventurous ! »
A ceste cose s’acorde bien Hestor des Marés, et ausi fait Blyoblerys. Si se fuissent tout maintenant mis a la voie, se ne fust Boors, ki lour deffent tant com il puet et lour dist : « Signeur, que volés vous faire ? Vous estes tout tenu pour preudoume, mais or vous volés vous honnir et avillier pour poi de cose ? Certes, grant hounour i avriom et mout en croisteroit nostre los, se nous, ki chi sommes. IIII. cevalier dont tous li pires quide valoir un preudomme au besoing, aliom droit asaillir un cevalier estrange ! Diex, con nous feriom merveilleuse prouece ! Et grant pris nous en donroit Lanselos du Lac, ki est chief et honour de nostre lignage ! Si m’aït Diex, s’il savoit ore que nous eüssom tenu de ceste cose parlement, il nous em priseroit mains a tous les jours de nos vies ! Ne dites mais tele merveille, mais pensés a un autre fait, car de cestui ne vous poroit venir se hontes non. »
Quant il oent ceste parole, pour che k’il entendent bien que Boors ne lour dist se verité non et cose ki a hounour lour tourne, se soeffrent il atant de chelui fait. (manuscrit 2542, tome 2, p. 14910)
23Bohort réussit à faire échouer leur projet d’agression en se fondant sur deux arguments : il les menace de voir leur réputation, leur los, baisser, s’ils attaquent à quatre un chevalier étranger et surtout il leur rappelle l’importance qu’a Lancelot pour eux, ki est chief et honour de nostre lignage. Il joue essentiellement sur leur face positive, l’image qu’ils ont d’eux-mêmes et surtout l’image qu’ils veulent offrir aux autres pour les faire revenir à des sentiments plus honorables. Mais sa critique est acceptée et la rupture qui risquait d’apparaître dans leur amitié ne perdure pas. La parole de Bohort, qui prolonge celle de Lancelot, réussit à vaincre les tendances agressives des chevaliers de ce roman pour maintenir, au nom de l’honneur, un code de conduite pacifique.
24Lancelot se caractérise désormais par une parole maîtrisée et convaincante : le tome 111 de l’édition du manuscrit 757 se termine sur un long et magnifique discours qu’il adresse à tout son lignage12. Quand il prend la parole face à ses hommes, il agit en pleine conscience de ses capacités rhétoriques.
A l’endemain aucquez matin, le jor meïsmes de la Pentecoste, s’asemblerent a l’ostel monseignor Boorz de Gaunes, ou Lancelot avoit jeü celle nuit, tuit li chevalier du parenté le roi Ban qui bien pooient estre adont jusqu’à. XX., tuit de celui lignage, qui tuit estoient chevalier de grant renommee et de grant bonté, et prisié de haute chevalerie sor toz celz qui en l’ostel le roi Artus repairoient. Il s’asistrent tuit en celle chambre devant monseignor Lancelot, car chascun le tenoit a seignor et a ami, ne il ne doutoient nul home du monde autant con il doutoient lui solement, por la grant amor que il avoient a lui. Quant il furent illuec tout assemblé, vestuz d’une meïsmes robe, que li roys Artus lor avoit fete et le jor devant envoiee, […] et il estoient tuit si quoi et si mu que nus n’i fesoit parole por ce que il voient monseignor Lancelot auques pensis et l’atendoient que il parlast, misere Lancelot au chief de piece lieve la teste et les conmence a regarder. Et quant i les a auques regardéz, il parole en telle maniere que tuit le poent bien entendre. (p. 493)
25Dès la mise en place des participants à cette interaction, une hiérarchie s’organise nettement en faveur de Lancelot. La disposition proxémique de chacun souligne la distance verticale. Lancelot est assis devant ses hommes et ceux-ci attendent qu’il prenne l’initiative de la parole. Le texte souligne qu’il est obligé de hausser la voix pour être entendu par tout le groupe. Autant d’éléments qui l’installent dans son statut de leader. Son discours suit un déroulement rhétorique rigoureux qui définit le lignage en tant que tel. Ce n’est pas un hasard s’il prend la parole à la Pentecôte, il constitue littéralement ses hommes en disciples qu’il envoie en mission, c’est-à-dire en guerre pour la justice.
« Signors, fet il, puis que nos somes tuit estrait d’une char et concrié d’un lignage, et non pas de si basse gent, qui bien voudroit encerchier et enquerre le conmencement de nostre lignage, qu’il ne trovast de branche en branche, par droit descendement de lingniee que nostre ancessor descendirent du lignage le roi David, de celle haute branche somes nos descendu, de celui arbre fusmes nos concrié, et bien apert encore au fruit que cilz arbres fu de grant bonté, car li fruiz est si merveilleux et si gracieux que de la bonté de lui est toz li roiaumes de Logres enluminéz. Nos peres furent bons sanz doutence et tout cil fill resont itel que de toutes les foiz qu’il me sovient de lor bonté, je ne me porroie trover en si grant mesese ne en si grant ire que mes cuers ne fust maintenant tornéz en joie. Se n’est mie merveille se je m’esjoie de vostre bonté et de vostre valor, car je voi que tuit li preudome du monde s’en esjoissent et sont desirrant de nostre acointance. Vous estes bons. Vous estes biax. Vos estez li beneüréz lignages que Diex a mandé ou roiaume de Logres por metre a fin les aventures perilleuses que nostre ancessor ne porent achever. » (p. 494)
26Il commence par un exorde destiné à rendre son auditoire attentif et bienveillant en soulignant les qualités de ces hommes, qualités naturelles dues à l’excellence de leur lignée, qualités aux effets contagieux et aux vertus salvatrices qui se propagent dans tous les cœurs :
Nos peres furent bons sanz doutence et tont cil fill resont itel que de toutes les foiz qu’il me sovient de lor bonté, je ne me porroie trover en si grant mesese ne en si grant ire que mes cuers ne fust maintenant tornéz en joie.
27 Il annonce son récit de manière emphatique :
« Or quant vos estes si preudomes conme je vos ai dit, et encore plus il convient que je vos face connoistre un vostre anemi, qui mult s’esforce de tout son poer et c’est esforciéz de metre a domage et a perte nostre lignage. Et sachiéz que il ne het nul lignage du monde autant conme il het le nostre. Et vos dirai conment je le sai : je meïsmes l’ai esprové ; por quoi je le di devant vos seürement. » (p. 495)
28Au moment de la péroraison, il cherche à susciter l’indignation en récapitulant les crimes commis à son égard par le roi Marc :
« Et encor, fait il, cuident il vraiement que je soie mort. De cest forfet, de ceste honte et de ceste desloiauté que li rois me fist en Cornoaille me conplain ge a vos, biax seignors, qui estes mi ami charnel, en qui est toute m’esperance de vengier moi du plus puissant home du monde, ce il m’avoit autant mesfet conme a li rois Marc. Or regardéz entre vos que nos en porrons fere, car se je n’en sui vengiéz tout a ma volenté, je nel veill pas que l’en me tiegne des ore mes a chevalier. » (p. 496)
29Si son discours est admirable, la réaction des hommes de son lignage l’est encore plus : alors que Lancelot donne tous les signes de la domination, il termine par un acte menaçant pour sa propre face : il sollicite un avis et ce faisant, il se met en position d’infériorité. Blyobléris réagit alors. Il refuse de donner le conseil attendu :
Misere Bliobris, qui estoit li ainsnéz de toz et li plus renoméz de chevalerie enprés monseignor Lancelot du Lac, parole tout premier et dit : « Sire, fet il, mult me merveill de vos, qui estes li meillors chevalier du monde et li plus esprovéz, qui vos aléz ici plaignent du plus chetif roi, du plus coart qui soit en tout le monde et de celui qi piors chevaliers a en sa conpaignie. Sire, vos n’en deüssiéz mie fere conplainte, ce me samble, ainz deüssiéz conmander a nos. […] Pensséz et nos metrons a fin. Oncquez d’autre chose ne vos entremetéz mes fors que de conmander. » (p. 497)
30Blyobléris se met d’emblée dans une position de soumission qu’adoptent aussitôt tous les autres :
En ceste chose s’acordent tuit li autre et dient : « Sire, misere Bliobris vos a dite veritéz. Conmandéz que vos vouléz que nos façons du roi Marc et nos somes appariellié du fere. Bien sachiéz que il n’avra poer que il se deffende encontre nos. » (p. 497)
31La valeur de Lancelot est devenue telle qu’elle rend dérisoire la structure du conseil vassalique. Toute autre réponse qu’un accord absolu et inconditionnel serait incongrue.
32Ainsi, par rapport à la Mort le roi Artu, le bon droit et les valeurs chevaleresques ont nettement choisi leur camp dans le Tristan en prose. Les ambiguïtés morales de chacun se sont dissipées et les oppositions se sont durcies. Le lignage du roi Ban est celui de la civilisation et de la justice. Son unité est décrite comme plus fragile, moins évidente que dans la Vulgate, mais, tant dans la guerre que dans la paix, ses membres font confiance à leur seigneur. Les leaders du lignage de Lancelot prennent une position de retrait face à la personnalité incontestée de leur seigneur, seul capable de contenir la violence inhérente à la chevalerie. En revanche, le lignage de Gauvain perd son unité : sa violence et sa perversité se manifestent jusques en son sein et provoquent la rupture dans l’opposition manichéenne entre le bon Gaheriet et les déloyaux Gauvain, Agravain, Guerrehet et Mordret.
Notes de bas de page
1 La Mort le roi Artu, éd. Jean Frappier, Genève, Droz, 1961.
2 Dominique Barthélémy note : « Parage et frérage sont deux systèmes permettant au xiiie siècle à plusieurs fils héritiers d’un fief de le tenir en indivision sous l’autorité de l’aîné : dans le premier cas, ils l’aident à s’acquitter du service militaire ou de la taxe de remplacement dus au seigneur mais sans devoir l’hommage à ce frère ; dans le second cas, au contraire, les cadets tiennent de lui en fief leur part d’indivision et lui prêtent hommage » (« Tableaux : la vie privée dans les maisonnées aristocratiques », P. Ariès et G. Duby (dir.), Histoire de la vie privée, Paris, Le Seuil, 1985, p. 120).
3 Nous examinerons, sans distinction, les éditions du manuscrit 2542 publiées chez Droz et celles du manuscrit 757, publiées chez Champion. Il n’y a pas à ce niveau de différence d’esprit entre les deux versions.
4 Nous empruntons sa définition de la politesse à Catherine Kerbrat-Orecchioni, « entendue au sens large, comme recouvrant tous les aspects du discours qui sont régis par des règles, et dont la fonction est de préserver le caractère harmonieux de la relation interpersonnelle. On verra que la politesse ainsi conçue déborde très largement les fameuses “formules” dont sont friands les manuels de savoir-vivre » (La Conversation, Paris, Le Seuil, 1996, p. 51). C’est d’après elle aussi que nous utilisons les théories de Brown et Levinson. Les notions de face s’appliquent assez bien aux héros de ces textes parce qu’elles permettent de mieux percevoir la progression dans la violence.
5 Sylvie Durrer, Le Dialogue romanesque, Genève, Droz, 1994, p. 115-137.
6 Jacques Moeschler, Dire et contredire, Berne/Francfort, Peter Lang, 1982.
7 Le Tristan en prose, manuscrit 2542, tome 4, éd. Jean-Claude Faucon, Paris, Champion, 1991.
8 Le Tristan en prose, manuscrit 2542, tome 6, éd. Emmanuelle Baumgartner et Michelle Szkilnik, Paris, Champion, 1993.
9 Le Tristan en prose, manuscrit 757, tome 2, éd. Noëlle Laborderie et Thierry Delcourt, Paris, Champion, 1999
10 Le Tristan en prose, manuscrit 2542, tome 2, éd. Marie-Luce Chênerie et Thierry Delcourt, Genève, Droz, 1990.
11 Le Tristan en prose, manuscrit 757, tome 1, éd. Joël Blanchard et Michel Quéreuil, 1997
12 Charles Brucker, « Du discours sur Lancelot au discours de Lancelot : la maîtrise », Lancelot-lanzelet, Hier et aujourd’hui. Pour fêter les 90 ans du Prof. Alexandre Micha, textes réunis par Danièle Buschinger et Michel Zink, Greifswald, Reineke-Verlag, Wodan 51, 1994, p. 65-76.
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