Chapitre XII. La prise de parole des villes auprès du roi
p. 193-206
Texte intégral
1Les mécanismes de pouvoir et plus particulièrement la prise de décision royale relèvent de logiques et de fonctionnements éloignés du cadre urbain et dont la complexité a effrayé plus d'une fois les corps de ville. Certes, la prudence a souvent été le maître mot des démarches municipales auprès d'un souverain dont les intérêts pouvaient varier radicalement en fonction des circonstances, des influences individuelles ou du contexte diplomatique. Cependant, on l'a vu à Poitiers autour notamment de deux grands dossiers au milieu du xve siècle, les corps de ville n'hésitent plus à élaborer en destination de l'autorité royale un discours élaboré, ambitieux et déterminé. La démarche se développe encore après 1470, passe le plus souvent par les mêmes moyens (l'ambassade) et révèle de constantes négociations entre les corps de ville et le pouvoir royal.
Les ambassades urbaines, outils officiels de remontrance et de participation
2Le développement des délégations urbaines au milieu du xve siècle va de pair avec la spécificité des problèmes qui se posent à la communauté urbaine. La remise en place du système financier, le retour à la paix dans le royaume, ou encore, à Poitiers, la lutte contre l'instauration de la gabelle et pour l'obtention d'un Parlement sont autant de difficultés qui justifient le développement des contacts1. Il serait sans aucun doute bien long, fastidieux et, qui plus est, inutile de dresser l'inventaire de la totalité des ambassades que les corps de ville ont mis sur pied jusque vers 1540. Certes des rythmes existent, mais varient d'une ville à l'autre en fonction des circonstances. Mieux vaut essayer de déterminer les grandes lignes du discours urbain développé par celles-ci. La difficulté réside ici dans le fait que bien souvent (même lorsque ce sont les registres de délibérations qui les rapportent) les lignes politiques poursuivies restent abstruses et certainement adaptables aux réponses formulées par le souverain. Parmi l'ensemble des ambassades que l'on peut déterminer à partir des délibérations poitevines, tant pour le xve siècle que pour le xvie, il est au moins possible de dégager les principaux objectifs poursuivis par ces délégations.
Ambassades de révérence et d'information
3La première catégorie de ces délégations urbaines peut être considérée comme des actions de circonstances, liées au passage du roi ou du prince. Ces actions sont nombreuses et répétitives. Il s'agit en particulier des voyages entrepris à chaque mutation de règne. Là, le développement d'ambassades constitue pour les corps de ville un acte politique coutumier traduisant l'allégeance de la collectivité au roi. Il se double de plus d'une recherche beaucoup plus pragmatique, la confirmation et le renouvellement des privilèges municipaux. Le corps de ville de Bourges, en 1498, met sur pied « ainsi qu'on a coutume de faire »une ambassade qui dépasse le simple cadre municipal. Elle se compose du grand archidiacre du chapitre cathédral, du prieur de Saint-Ursin, d'un chanoine de la Sainte-Chapelle, de l'avocat du roi en Berry, puis du maire et de cinq des principaux représentants municipaux2. Ils partent « luy faire et rendre obeissance a son joyeulx et novel advenement ». Ils seront encore une huitaine à entreprendre un semblable voyage depuis Bourges au début de l'année 1515 pour les mêmes raisons, mais cette fois-ci sous la direction de Martin Chambellan, procureur du roi en Berry3. De la même façon, le 8 avril 1498, à l'annonce du décès de Charles VIII, une imposante ambassade de l'élite politique tourangelle est dépêchée vers Blois afin d'offrir au duc d'Orléans « les corps et biens [de la ville] comme ses subjectz et serviteurs »et lui présenter peut-être aussi les clefs de la ville4.
Les ambassades sollicitées par le roi
4Les lettres closes reçues par les municipalités rapportent toute une série d'occasions pour lesquelles des mandataires urbains sont convoqués par le roi. En 1470, Louis XI demande au corps de ville de Poitiers d'envoyer deux marchands (toujours vers Tours) « pour assister avec les autres marchans de royaume mandez par ledit seigneur pour faire et ordonner touchant le fait de marchandise5 ».
5Les archives tourangelles plus loquaces expliquent alors que le roi veut aviser de l'endroit où doivent se tenir les foires de Flandres suite à l'interdiction d'aller en Bourgogne6. En 1466, les mêmes documents rapportaient que face aux « désordres du royaume »plusieurs citadins étaient convoqués par le roi pour traiter des problèmes liés à l'entretien de la justice dans le royaume7. Des motivations proches animent encore le souverain en 1468, lorsqu'il convoque plusieurs bourgeois pour assister à Amboise au procès de Martin d'Argouges8. En 1479, les représentants tourangeaux sont sollicités à quatre reprises par le roi : en février une délégation est appelée au Plessis, en mars ou avril une autre doit se rendre à Langeais, en juin des bourgeois sont priés de se rendre à Paris pour traiter du problème des monnaies et enfin, en septembre, ils doivent rejoindre le souverain au Plessis9 pour évoquer le cas de Raoulet Toustain, marchand de sel qui pour grossir ses affaires (elles-mêmes liées à celles de Jean Briçonnet le jeune et Jean Grizeau d'Angers) essaie de détourner à son profit la ferme de la traite du sel aux Ponts-de-Cé10. En mars et mai 1481, de nouvelles convocations sont faites par le roi, alors que déjà en 1480 Louis XI avait fait venir trois bourgeois au Plessis pour demander à la ville de lui « faire finance »d'un vaisselier pour garder sa vaisselle d'argent11. Un avis sans doute plus politique est par contre demandé aux échevins poitevins en 147612 puis en 1483 (pour traiter du commerce de « la mer du levant13 »), comme à leurs homologues berruyers en 1516. Dans ce dernier cas, il s'agit d'envoyer vers le roi deux représentants pour « adviser quelle voye et chemyn »afin de « trouver pour enricher notredit royaume et le soullaiger en toutes choses14 ». Il s'agit là cependant de l'ultime sollicitation royale que la documentation municipale permet d'identifier.
Ambassades et contestation : entre remontrances et recherche d'avantages
6La grande majorité des ambassades relèvent de la propre autorité des communautés urbaines et illustrent une certaine contestation municipale. L'objectif est de porter les remontrances de la ville au roi ou à ses commissaires.
7Le sujet récurrent est de nature fiscale et financière. On l'a vu, à chaque nouvelle demande royale la ville tente d'obtenir rabais des sommes qui lui sont imposées et pour cela délègue des représentants en cour ou vers les généraux des finances. Un discours alors bien étudié est développé, souvent présenté par écrit dans des articles ou des mémoires que les délégués emmènent avec eux. En juin 1522, face aux demandes financières qui se multiplient, le corps de ville de Poitiers développe ses arguments15 : la ville est peuplée essentiellement de religieux ou d'universitaires exempts de tout subside, la mortalité est importante, nombre de femmes sont « veuves et pupilles », les impositions sont nombreuses alors que les blés sont chers... L'année suivante les délégués poitevins en rajoutent encore en signalant les nombreux « avanturiers »qui parcourent le pays et en se prétendant « seule defense jusqu'à la mer16 ». À Poitiers de telles délégations sont également mentionnées en 1464, 1467, 1522 (juin puis septembre), 1523 (août puis septembre), mais aussi 1538, 1542, 1543, ou encore 1544 (à la suite à l'arrivée en ville des commissaires royaux pour la gabelle17).
8Les remontrances sont de nature politique également, car les bourgeois n'hésitent pas à signaler au souverain le non-respect des privilèges urbains. Il en va ainsi entre 1464 et 1470 à Poitiers lorsque Louis XI s'emploie à nommer par lettres closes maires ou échevins. En 1466, face à la généralisation du phénomène et à l'obtention de fausses lettres par un des prétendants royaux, des représentants municipaux partent en cour pour « remontrer les privileges de la ville18 ». Vers 1520, l'instauration de l'office de contrôleur des deniers communs provoque un émoi semblable qui, avant d'être réglé, suscite l'envoi de plusieurs délégations vers le roi19. Le début du xvie siècle voit aussi le corps de ville de Poitiers se lancer dans une véritable bataille administrative pour renforcer l'autorité de la ville sur le Poitou. Elle se traduit concrètement par diverses tentatives pour conserver l'étendue du ressort de la sénéchaussée de Poitiers face au morcellement des cadres juridiques20. Ces affaires vont occuper lourdement les débats des conseils municipaux et entraînent la multiplication des ambassades vers le roi mais plus largement aussi vers tous les hommes de pouvoir21.
9Ces derniers exemples le montrent, les luttes municipales dépassent rapidement le seul intérêt particulier de la collectivité bourgeoise. Comme à l'occasion des grandes luttes du milieu du xve siècle, les ambassades se voient associés des membres extérieurs au corps de ville. En 1531, face à un différend relatif aux privilèges de la ville, le Conseil décide d'adjoindre deux représentants de la justice nommés par le lieutenant général à la délégation poitevine qui part vers la cour22.
10Remontrances fiscales ou politiques, recherches d'avantages particuliers ou généraux, la parole urbaine transportée par l'intermédiaire de ces ambassades suit une finalité précise. Dans tous les cas il s'agit pour les villes de développer vers le roi un discours ouvert aux négociations. Il reste encore à déterminer si toute l'énergie urbaine qui se manifeste porte ses fruits.
Une écoute complexe
11La diffusion du message urbain vers le roi est une chose établie, sa prise en compte en est une autre. Les requêtes urbaines qui s'expriment à travers ces ambassades ont des sorts variables. La réception de la parole urbaine par le roi est une question qui reste ouverte et qui renvoie aux conditions dans lesquelles s'élabore la décision royale. Plusieurs affaires dans la seconde moitié du xve siècle et la première moitié du siècle suivant offrent la possibilité de saisir tous les méandres d'une quête urbaine incertaine.
Un certain accord autour des questions économiques
12Plusieurs dossiers économiques marquent en effet une franche accession de l'autorité royale aux désirs municipaux. La question de la draperie urbaine revient à Tours comme à Poitiers. Les municipalités aux côtés des marchands tentent d'obtenir et obtiennent des lettres de franchises. C'est le cas à Tours en 146123, avant que les débats soient marqués par la création — royale avant tout — de la soierie dans la ville. À Poitiers l'affaire devient récurrente du fait de l'impossibilité d'en établir une définitivement faute d'activité économique suffisamment importante sans doute. Les premières requêtes apparaissent dès 1451 et 1452, elles sont renouvelées en 1487 devant Charles VIII qui fait son entrée, avant que l'intérêt urbain ne soit relancé vers 152024. Les travaux liés à la navigation des rivières en sont une autre illustration. Bien que les premiers projets liés à la mise en navigation du Clain vers Poitiers, ou du Cher, de l'Yèvre et de l'Auron vers Bourges remontent à la première moitié du xve siècle et restent quelque peu obscurs, par la suite il est incontestable que les corps de ville manifestent périodiquement un activisme déterminé25. Ils sont les seuls à pouvoir défendre, coordonner et mener une quête dont la charge dépasse les forces ou l'intérêt d'un seul corps de métier. Les multiples projets de 1450 à 1550 nécessiteront de nombreuses délégations vers des souverains toujours disposés à accroître les richesses de leur province. Les corps de ville se heurtent principalement à des problèmes techniques et financiers mais l'écoute royale leur est favorable car d'une façon générale les lettres de commission sont régulièrement obtenues afin de rassembler des fonds (rarement) et de faciliter certains travaux26. Convergences d'intérêts qui portent cette fois-ci leurs fruits puisqu'au milieu du xvie siècle les dernières écluses sur le Clain sont réalisées (grâce à des concessions financières importantes de François Ier27) alors que la fréquentation de l'Yèvre est attestée jusqu'à Bourges28.
La question des foires de Bourges (fin xve siècle)
13À Bourges, les célèbres foires installées par Charles VIII à la suite des états généraux de 1484 en remplacement de celles qui se tenaient jusqu'alors à Lyon constituent un des grands moments où la parole urbaine se construit. Le discours urbain dirigé alors vers le roi tente d'appuyer ou au contraire de détourner les actions entreprises depuis le centre monarchique. Là aussi la contestation urbaine doit être replacée dans son contexte. En effet, même lorsqu'il s'agit de s'opposer à certains actes royaux, les véritables enjeux des ambassades et des délégations sont de lutter contre les diverses influences qui, autour du roi, procèdent à la prise de décision royale. Tant à l'occasion de la translation de ces foires, que pour leur maintien voire, après le grand incendie de 1487, pour obtenir leur retour dans la capitale berrichonne, les négociations successivement entreprises par la ville révèlent en effet les multiples obstacles que doivent franchir les revendications municipales.
14Pour la première installation des foires dans la capitale berrichonne, il est difficile d'estimer les démarches entreprises étant donné la disparition des archives municipales. Toutefois, la liste des articles en faveur de la ville présentée au roi par les délégués urbains insiste sur l'avantageuse localisation de Bourges au centre du royaume à proximité de plusieurs rivières navigables et montre la richesse économique de la région29. Ils constituent cependant une argumentation par négativité dont le but est de montrer les inconvénients présentés par les autres villes candidates (Troyes et Lyon).
15Les difficultés ne font que commencer pour les Berruyers qui se heurtent désormais à l'incessante opposition de leurs homologues lyonnais plutôt qu'à une véritable volonté royale de revenir en arrière. C'est tout du moins dans cette optique qu'est comprise l'arrivée à Bourges, le 28 septembre 1485, de deux conseillers royaux chargés de l'enquête pour déterminer où se tiendraient définitivement les foires. Selon le procès-verbal dressé par ces deux émissaires, la parole urbaine dépasse ici le cadre municipal puisque, outre le conseil de la ville qui coordonne de loin l'affaire, les officiers royaux interviennent et tout le peuple s'associe à eux en prenant ouvertement à partie les deux représentants royaux30. Très vite, consignés dans l'auberge où ils séjournent, ces derniers reçoivent des menaces physiques et doivent abandonner l'ensemble des pièces collectées au cours de leur périple entre Dijon, Beaune, Chalon-sur-Saône, Mâcon et Lyon. Même si l'affaire tourne au préjudice de quelques responsables locaux (des officiers royaux, dont on ne connaît d'ailleurs pas le sort exact bien qu'ils soient mis en accusation par le roi31), cette prise de parole urbaine appuyée par des actes musclés, déterminés et répétitifs32, finalement, l'emporte.
16Espoir de courte durée cependant puisque le grand incendie de 1487 réduit à néant les bases de l'argumentaire berruyer. Il est désormais impossible de tenir des foires dignes de ce nom dans une ville en partie à reconstruire. Progressivement les marchands se détournent vers Troyes avant que Louis XII n'officialise le retour des foires à Lyon en 1498. Pendant toute cette période (et même encore par la suite dans les premières années du xvie siècle33) un incessant travail de requête est pourtant effectué par le corps de ville de Bourges et constitue la troisième étape de la prise de parole municipale. Celui-ci commence en novembre 1487 par l'envoi d'une ambassade vers le roi, délégation composée (entre autres) du bailli (Beraud Stuart) et du procureur du roi (Gilles Pain34). De semblables entreprises seront organisées régulièrement avant 1491, dans lesquelles on retrouve le seigneur de Baugy, des représentants religieux (grand archidiacre de Bourbon, le doyen de l'Église de Bourges...) et des représentants municipaux, parmi lesquels le plus souvent nommés sont François Bochetel, François Du Breuil, Jean Vesse ou François Marecte. Le roi n'est d'ailleurs pas le seul interlocuteur des délégués urbains. Le duc de Bourbon est également sollicité (en 1489) comme le seigneur de Nançay (Gabriel de La Châtre). D'autres sont encore accueillis avec tous les égards dus à leur rang (tel les évêques d'Albi et de Bordeaux, le seigneur de Cluny). Les frais se multiplient mais les espoirs ne sont pas récompensés35. De nouvelles requêtes sont formulées en 1498 lors de l'accession au trône de Louis XII et malgré l'attribution de 200 livres par la ville leur translation ne pourra être obtenue36. La parole urbaine se heurte ici à des jeux d'influences complexes et à la multiplication des groupes de pression autour du roi.
La lancinante question du Parlement poitevin
17La création d'une chambre de parlement à Poitiers constitue un thème récurrent de la politique poitevine. Après le départ vers Paris en 1436 de la chambre de Charles VII, les mentalités poitevines vont se nourrir de l'espoir de voir celle-ci recréée, espoir un instant concrétisé en 1454. Par trois fois par la suite (en 1469, 1496 et 1520), l'occasion se présente et permet aux échevins poitevins d'exprimer à nouveau leur parole et leurs revendications. L'attribution de la Guyenne en apanage à Charles de France en 1469 relance de nouveau les espoirs de la ville. À la lecture des registres de délibérations, même lorsque la cour souveraine vient s'installer à Poitiers en 1469, il est difficile de comprendre dans quel contexte émergent les revendications municipales. À cette date, il convient pour le roi de prendre une décision face à une situation juridictionnelle particulière. Une politique de harcèlement pointe à travers certaines pièces documentaires et porte alors véritablement ses fruits sans que l'on puisse toutefois en estimer l'impact réel37. En 1496, il est clair que le projet d'établissement d'un Parlement à Poitiers résulte de la colère du roi vis-à-vis des Parisiens. Dans ces cas, comme en 1523, la parole urbaine ne vient que s'inscrire dans une brèche inattendue ouverte par un élément extérieur à la ville. Même si l'affaire, d'un grand « proffit pour le Poitou », justifie à chaque fois la multiplication d'ambassades détentrices d'une parole urbaine déterminée38, celle-ci est ballottée dans un jeu politique dont les termes dépassent désormais largement les conditions socio-politiques sur lesquelles le corps de ville peut encore jouer. Sensiblement décalé par rapport au milieu royal, en 1523, le corps de ville de Poitiers a sans doute bien du mal à suivre le cours des événements. Encouragés par l'annonce officielle de la création de la chambre, les échevins avaient commencé à rechercher les sommes nécessaires à son installation39. Il semble bien cependant qu'au même moment l'accord soit déjà caduc si l'on en croit du moins les paroles du premier président du Parlement de Paris.
18L'ensemble de ces exemples révèle la multiplicité des chemins que doit emprunter la parole urbaine pour obtenir l'écoute royale. Pour les municipalités, s'en remettre au roi n'est pas forcément synonyme d'échec, au contraire. Cependant cela signifie pénétrer au cœur de jeux de pouvoirs, de tractations politiques dont les conseils ne maîtrisent pas toujours les règles ni les acteurs. C'est pour cela que, dans bien des cas, la parole urbaine se transforme en une véritable politique de gratifications, aux apparences confuses, mais qui cherche de toutes les façons possible à orienter l'avis de son interlocuteur.
Une écoute entretenue : la politique de cadeaux et de gratifications des corps de ville
19La prise de parole par les corps de ville passe également par le développement d'une politique relationnelle dont l'objectif est de faciliter l'accès au roi. Par un ensemble de démarches simples et aujourd'hui bien établies, à savoir par l'attribution de cadeaux et autres récompenses40, les municipalités entretiennent un réseau sinon d'amitiés du moins de contacts dans un but clairement politique. Les registres de comptes, plus encore que les pièces délibératives qui ne les mentionnent que par allusion, fournissent ainsi de longues séries de « dons et recompanses »pour les « agréables services rendus »à la ville, voire « pour les honneurs de la ville »ou mieux encore « pour entretenir en recommandation la ville envers le roy41 ». Elles montrent la diversité des destinataires (du simple valet d'un prince ou du roi, au chancelier de France, en passant par les évêques ou les conseillers en Parlement), comme la variété des cadeaux offerts par les villes (à la base se trouve le vin blanc, rouge, comme clairet ou encore de l'hypocras puis viennent les torches et le poisson, voire plus exceptionnellement des fruits, telles les poires « Bons chrestiens »très prisées à Tours, de la confiture, des dragées et des gâteaux).
La quête d'un appui en cour
20L'usage du don par les municipalités traduit tout d'abord un regard constant vers la cour royale. Les hommes d'influence qui gravitent autour du souverain constituent, alors, des cibles privilégiées42. Les princes de sang sont particulièrement visés par une telle politique dont les premières manifestations remontent fort loin43. En 1466, la ville de Poitiers s'interroge sur la « gratuité »à donner à la sœur du roi qui s'avance vers la ville. L'accueil sera presque alors solennel car la ville offre des présents de poisson (esturgeons) et de vin mais fait également accompagner la princesse par les archers et convoque les notables44. La richesse des cadeaux présentés à Anne de Beaujeu en 1488 par la ville de Bourges illustre toutes les attentions qui doivent être entretenues vis-à-vis des personnalités royales. Plus de 1300 livres sont alors engagées dans la réalisation de pièces d'orfèvrerie45. À Poitiers, une vigilance toute particulière est attribuée aux passages successifs de « Monsieur »(le futur François Ier, qui va vers sa mère) en 1513 et 1514. À plusieurs reprises les archers de la ville l'accompagnent et des quantités importantes de vin sont distribuées46. Une trentaine d'années après, « Madame la Dauphine »(Catherine de Médicis) aura une réception semblable47. De la même manière, la capitale poitevine assume avec tous les honneurs l'accueil des différents princes qui accompagnent Charles Quint dans son voyage à travers le France en 1539, mais aussi les passages d'Henri d'Albret (1541, 1544 janvier et juillet48), d'Antoine de Bourbon (1542), ou encore du cardinal de Bourbon venu en 1541, en compagnie de Jeanne d'Albret, sacrer l'abbesse de Sainte-Croix49. À chaque fois outre les cadeaux et la révérence de circonstance, les maires tiennent discours et mettent en avant la situation de la cité, « remontrent la pauvreté de la ville50 », le tout « affin qu'ils portassent bonnes parolles51 ».
21Il en est de même vis-à-vis des grands responsables de l'État qui gardent des attaches régionales. Les cas se multiplient à Poitiers dans la décennie 1520 lorsque l'amiral de France séjourne sur ses terres poitevines52. Situation qui n'est bien sûr en rien comparable avec celle de Tours qui, bien logiquement, développe une telle politique de cadeaux en faveur des différents seigneurs qui entourent le roi lors de ses passages de plus en plus fréquents en Touraine53. Celle-ci est renforcée encore par la présence dans les murs mêmes d'un grand nombre d'officiers royaux. L'attention des conseils est toutefois différente car plusieurs de ces grands responsables (tels Thomas Bohier, Jacques de Beaune ou les Briçonnet) sont, au début du xvie comme autrefois au xve siècle, membres du corps de ville. En fait, c'est certainement à Bourges que la situation est la plus remarquable. Le siège métropolitain draine déjà un nombre important de personnalités, mais la position géographique de la ville y est encore plus favorable. Sur la route qui mène de la vallée de la Loire au Lyonnais, la capitale berrichonne représente une étape idéale et les comptes de la ville en témoignent. La liste pourrait être longue54. Les passages sont si fréquents que les receveurs municipaux n'en suivent pas le rythme et attribuent souvent l'ensemble des dépenses à « des gens de bien »dont ils n'arrivent pas toujours à conserver le nom55. Pour la ville, l'objectif politique de ces multiples présents n'est certainement pas clairement identifié, mais ils entrent dans des pratiques de courtoisie dont il ne faut en aucun cas s'affranchir.
22En fait, très vite et très régulièrement, une telle politique oblige les corps de ville à effectuer des défraiements systématiques et toujours plus généreux. À Tours dans la seconde moitié du xve siècle, alors que la cour réside en ville, les échevins attribuent régulièrement des étrennes aux officiers de l'entourage royal afin de mieux y pénétrer56. Sans véritablement parler toutefois de pots-de-vin, un certain nombre de commissaires royaux reçoivent de même un traitement de faveur. Chargés par le roi de s'adresser directement aux corps de ville dans le cadre d'une mission bien particulière et limitée (de nature fiscale généralement), ces derniers font l'objet de toute l'attention de corps de ville qui s'engagent dès lors dans un étroit processus de négociations. En septembre 1512, la ville de Poitiers débourse plus de 60 livres pour entretenir quelques jours seulement les commissaires royaux qui sont venus demander un emprunt de 5000 livres57. En 1522, à Bourges, les frais d'un conseiller royal sont pris en charge alors que celui-ci a la tâche de demander à la ville l'entretien de 500 hommes de guerre. Les « commissaires »pour l'impôt seront encore défrayés en 152858. En 1544, la vente d'une partie du domaine royal lance sur les routes de nombreux commissaires royaux, tous accueillis comme il se doit par les villes qui cherchent à ne pas être trop contraintes financièrement par les conséquences de leurs actions59.
Entretenir l'entente avec les officiers royaux de la province
23Si ces dépenses s'inscrivent dans une politique d'apparat ou, du moins, dans l'entretien de bonnes relations pouvant à l'occasion servir la cause urbaine, les frais engagés par les corps de ville au profit des officiers locaux ont des visées politiques beaucoup plus pragmatiques et immédiates. La nomination des principaux responsables royaux de la province est un des moments important de la politique relationnelle des municipalités. En 1451, 100 livres sont données au sénéchal du Poitou Louis de Beaumont pour lui recommander les intérêts de la ville mais aussi du pays60, et les habitants de Tours, la même année, offrent 120 livres à Jean d'Aubusson (et à sa femme) qui vient de prendre possession du bailliage61. L'attention se porte parfois aussi sur leurs proches62. Elle trouve son apogée au milieu du xvie siècle avec la célébration de véritables entrées solennelles. En 1533, après la mort d'André de Vivonne, sénéchal du Poitou, le Conseil de Poitiers décide d'aller au-devant du nouveau sénéchal, Antoine Desprez, et de lui offrir de nombreux présents « ayans consideration a l'auctorité dudit personnage et au grant acces et credit qu'il a envers le roy nostre seigneur63 ». Une véritable entrée lui est alors proposée, au cours de laquelle la ville prend en charge ses dépenses de chevaux, réalise une robe pour sa femme et surtout, malgré la saisie des revenus de la ville, fait confectionner une coupe d'argent dorée d'une valeur de 100 livres, que le maire avec sept ou huit des échevins en robe longue iront porter après dîner pour lui recommander la ville64. Hormis ces quelques cas qui demeurent exceptionnels, les mutations d'office se traduisent plus communément par des présents en nourriture dont on peut penser qu'ils sont distribués dans des repas officialisant une prise de contact entre les deux autorités65.
24Une grande majorité de ces présents s'inscrivent cependant dans l'activité même des officiers du roi. Il s'agit presque alors de pots de vin puisque la ville compte sur eux pour obtenir des faveurs. Le cas est particulièrement net lorsque baillis ou sénéchaux doivent convoquer l'arrière-ban de la noblesse dans les villes. L'arrivée de troupes armées suscite toujours une certaine angoisse parmi des corps de ville qui n'entretiennent pas une force armée suffisante pour pallier d'éventuels troubles urbains. Les cadeaux municipaux constituent un moyen de rappeler aux gens du roi la bonne disposition de la ville à leur égard et de les encourager à bien surveiller leurs troupes66. Lorsque les enjeux sont plus importants, les sommes versées peuvent être tout aussi exceptionnelles67. Plus communément, lorsque le lieutenant général ou le procureur du roi travaillent pour la ville (participation à une ambassade urbaine, suivi d'une procédure judiciaire) des sommes leurs sont attribuées en dédommagement et parfois viennent remplacer de véritables gages annuels. À Bourges, tous les ans, le lieutenant général du bailli reçoit 100 sous « pour son porc ». Bien comptabilisée dans la rubrique « Dons »et en aucun cas dans celle de « Gages et offices », la somme est (d'après les premiers registres de comptes) cédée pour services rendus. Très tôt, elle est en fait coutumière et représente le défraiement dû pour la présence du lieutenant aux assemblées, auxquelles celui-ci n'est plus tenu d'assister depuis les réformes municipales de la fin du xve siècle68. Il en est de même toujours à Bourges pour les officiers du grenier à sel, mais là, l'objectif est financier et immédiat. Leur gratification permet d'assurer à la ville le versement régulier du substantiel revenu de la gabelle cédée par le roi69.
25Enfin, il conviendrait aussi de prendre en compte l'ensemble des petits cadeaux en nature attribués également presque de façon coutumière aux officiers royaux. Le corps de ville de Bourges adresse ainsi un grand nombre de torches au lieutenant général, mais aussi procureur du roi et avocat du roi, plus rarement cités par ailleurs. Données autour de chaque fête religieuse, ces torches constituent une de ces marques matérielles qui illustrent l'entretien par la municipalité d'une certaine sociabilité urbaine70.
26Développer la parole urbaine, entretenir son écoute auprès du souverain passe donc par de multiples voies que les conseils municipaux explorent tous azimuts. Globalement les résultats payent, les négociations financières le prouvent à elles seules. Porter la parole municipale signifie également que celle-ci a acquis une dimension politique qui dépasse le cadre des murs de la cité. Le fait est tangible depuis les années 1430 au moins lorsque les villes œuvraient auprès du roi à rétablir la sécurité du pays. Après 1460, le lent processus d'amplification que connaît l'expression du discours urbain résonne singulièrement au regard du lien épistolaire que le roi, de son côté, entretient avec la ville. On peut donc voir dans ce va-et-vient de correspondances qui ne se répondent pas forcément, le développement d'un dialogue qui sait dépasser le cadre étroit des considérations militaires ou fiscales pour gagner celui de la rhétorique politique.
Notes de bas de page
1 Dans le cas poitevin, un autre thème de l'action communale va justifier le développement de tractations avec certains milieux de pouvoir : ta navigabilité du Clain.
2 Bourges, arch. comm., CC 268, rubrique « Voyages ». Les représentants urbains sont : Jean de Blois, grand archidiacre, Guillaume Du Breuil, procureur de Saint-Ursin, Jacques de La Loë, chanoine de la Sainte-Chapelle, Jean Salat, maire, Pierre Du Breuil, avocat du roi, Jacques de Treignac, avocat de la ville, Guillaume Chambellan, Ursin de Sauzay, François Bochetel, échevins et conseillers de la ville, ainsi que le receveur de la ville, Claude Pichonnet.
3 La délégation comprendra, outre Martin Chambellan, Guillaume de Cambray, chancelier de Saint-Étienne, Jacques Du Breuil, archidiacre de Bourbon, Michel de Cambray, échevin, Jean Fradet, lieutenant général, Jean Duverger, avocat du roi en Berry, Denis Belin, clerc de la ville, ainsi que le messager de la municipalité Nicolas Le Rat (id., CC 285, p. 137-138).
4 C'est ce qu'affirment les paroles du maire, Thomas Bohier, rapportées dans les registres de délibérations (id., BB 33, f° 232 v°). Font partie de cette délégation : Jean Falaiseau, juge de Touraine, Jean Lalement, chanoine et grand archidiacre de Tours, Jean Gaudeau, chanoine et vicaire de Tours, Jean Beaufilz, chanoine, Jacques Bouhalle et N. Pellieu, chanoines de Saint-Martin, Jean Briçonnet, Jean Lopin, Jean Hubaille, Macé Papillon, Mery Lopin, Guillaume Berthelin, Jean Quetier (le jeune), Robert Le Masle, Pierre Dupuy, Michelet Poisson, René Sireau tous membres du corps de ville, et un certain nombre officiers du roi. Le maire (Thomas Bohier) reçoit la charge de porter parole au nouveau roi (Tours, arch. comm., CC 51, f° 96).
5 Poitiers, arch. comm., registre de délibérations n° 5, p. 220, 6 octobre 1470.
6 Tours, arch. comm., BB 32, f° 106, 22 octobre.
7 Convocation faite également par lettres closes en juillet 1466. Si l'on en croit les paroles de représentants de Chinon qui se présentent au corps de ville de Tours en août, il s'agit de régler des problèmes liés à la justice dans le royaume. Entre-temps, le corps de ville de Tours a pris soin de dresser la liste de tous les points qui lui semblent poser problème : la Pragmatique sanction, les privilégiés qui abusent de leurs droits, la multiplication des offices, la gabelle et les francs archers (Tours, arch. comm., BB 32, f° 55 à f° 57 et CC 38, f° 52).
8 Id., BB 32, f° 78 v°, 1er juin. Nous n'avons pas pu établir les raisons de ce procès.
9 Les références de toutes ces visites sont respectivement : Tours, arch. comm., BB 32, fos 179 v°, 178 v°, 168 v° et 187.
10 Pour la synthèse sur cette affaire, voir B. Chevalier, La ville de Tours..., op. cit., p. 291-295.
11 Tours, arch. comm., CC 44, fos 103-104 et CC 45 fos 38 et 42 v°.
12 Ils devaient envoyer deux ou trois des plus notables gens de la ville à Tours et, si le roi n'y est pas, il leur est demandé d'aller trouver « de noz gens qui besoignent avec nous » (lettre du 10 février 1476, Lettres des rois..., op. cit., B. Ledain (éd.), p. 180). Le sujet de cette convocation n'est pas stipulé.
13 Les archives berruyères conservent les « Memoire et remontrances des deputez des villes... »sur ce point. Le texte signale qu'ont pris part à la rédaction de ces articles les députés des villes de Poitiers, mais aussi Tours et Bourges (Bourges, arch. comm., HH 17).
14 Bourges, arch. comm., AA 13, lettre cotée 12.
15 Poitiers, arch. comm., registre de délibérations n° 17, p. 628-630, 2 juin 1522.
16 Id., registre de délibérations n° 18, p. 346-347, 10 août 1523.
17 Id., registre de délibérations n° 26, p. 90, 3 novembre 1544.
18 Id., registre de délibérations n° 5, p. 84, 20 octobre 1466, à l'occasion de la mairie d'André de Conzay.
19 Une première ambassade est envisagée en juin 1520 (id., registre de délibérations n° 17, p. 163). L'affaire est cependant rapidement traitée par les rouages administratifs traditionnels de la ville, tant à Poitiers qu'à Paris. Seul un échevin, André Juge, semble faire plusieurs fois le voyage.
20 Il s'agit pour la ville de contrer la création d'un siège ordinaire à Fontenay-le-Comte, de travailler au rattachement de certaines châtellenies (Montmorillon, Loudun et Mirebeau) au siège de Poitiers, de conserver le rattachement du « bailliage de Gâtine »en s'opposant aux « entreprises de ceux de Nyort »(Poitiers, arch. comm., registre de délibérations n° 11, p. 73), puis, sous François Ier, de lutter contre la création des sénéchaussées de Châtellerault (après l'érection de la vicomté en duché-pairie en 1515), de Civray (en 1526) ou encore de Montmorillon.
21 À chaque fois que des événements nouveaux interviennent dans l'une ou l'autre de ces affaires, une délégation est mise sur pied. Avant son départ, les archives communales sont soigneusement inspectées, des recueils de lettres sont préparés pour aider le ou les délégués dans leurs démarches auprès du souverain. Il est impossible ici de citer toutes ces ambassades en référence.
22 Poitiers, arch. comm., registre de délibérations n° 19, p. 103, 17 novembre 1531.
23 B. Chevalier, La ville de Tours.... op. cit., p. 259-260.
24 Au milieu du xve siècle, plusieurs délégations poitevines l'attestent (celles de 1451 et de 1452, Poitiers, arch. comm., registre de délibérations n° 4, p. 47-50). Pour 1487 voir id., Registre n° 11, f° I v°. En 1520, le conseil de la ville relance le problème (Poitiers, arch. comm., registre de délibérations n° 17, p. 243) et à partir de cette date le conseil nomme des commissions pour visiter les rivières.
25 Le projet poitevin de rendre navigable le Clain remonte en fait aux années 1429-1432. Il est relancé en 1451 avant de prendre véritablement forme après 1540 (pour son histoire, voir L. La Marsonniere, « La navigation du Clain », dans Bull. soc. ant. Ouest, t. VII, 1895-1897, p. 237-258). Les projets berrichons de même nature sont mentionnés dès les spremières années du règne de Louis XI, comme le laissent penser les articles présentés au roi par la ville en 1472 (Bourges, arch. comm., AA 5), mais les premiers travaux sur l'Yèvre ne sont attestés qu'en 1490 (voir V. Mauret-cribellier, « Les voies navigables en Berry entre la fin du xve et le début du xviiie siècle : projet et réalisations », dans Cahiers d'archéologie et d'histoire du Berry, n° 141, 2000, p. 13-28).
26 Il n'est pas question ici de dresser la liste de tous les appuis royaux reçus par les villes. Le sujet demanderait une étude à lui seul. Notons qu'à Poitiers en 1465 le roi lui-même dépêche Antoine Marin pour réaliser les travaux sur le Clain et cède une partie des impositions pour les achever (Poitiers, arch. comm., registre de délibérations n° 4, p. 271). À Bourges, un peu plus tard, Louis XII enverra plusieurs lettres closes à la ville attestant une certaine attention protectrice en regard des travaux sur l'Yèvre (Lettres de Charles VIII et de Louis XII..., op. cit., D. Rivaud [éd.], p. 107-108, deux lettres en faveur de Jean de Vaulx et de Jacques Bouchart).
27 En 1540, en effet sur les 7 000 livres que François Ier demande à voir lever, il en cède 3200 à la ville pour terminer le projet de la mise en navigation du Clain (Poitiers, arch. comm. K 11 et D 38). Les travaux vont alors se hâter. Dès avril un spécialiste italien est arrivé en ville (id., registre de délibérations n° 22, p. 305, 26 avril), et donne son avis sur l'état du Clain de Vivonne à Châtellerault (ibid., p. 313-314).
28 Celle-ci est attestée par J. Glaumeau en 1553. Au port de La Chappe l'observateur berruyer prétend que plus de 10 bateaux arrivent par jour (Journal..., op. cit., p. 55).
29 Ces articles sont conservés aux archives départementales du Rhône et ont été publiés par L. Raynal (Histoire du Berry..., op. cit., t. III, p. 524-534).
30 Procès-verbal édité par L. Raynal, ibidem, t. III, p. 539-548.
31 Pour le développement de ces différentes affaires, voir L. Raynal, ibidem., t. III, p. 145-153. Il semble qu'en mars 1486 les officiers royaux qui dirigèrent la première altercation avec les deux commissaires royaux furent mis à l'amende par le conseil du roi. Aucun document ne permet de connaître précisément les suites de ces affaires.
32 En effet, une mobilisation similaire a lieu à la fin de la même année lors de la venue d'un conseillerau Parlement, Guy Arbeleste, pour enquêter sur diverses actions du lieurenant général contre certains marchands lyonnais soupçonnés de détourner l'activité économique au profit de Lyon. Une fois encore le représentant du roi doit faire face aux affronts de la foule, des officiers royaux et des échevins venus lui signifier de quitter la ville (ibid.).
33 La dernière tentative du corps de ville que nous ayons pu identifier date de 1507. Un des représentants urbains, Guillaume Sardé, part vers le roi pour obtenir des lettres de renouvellement de certains octrois, mais reçoit aussi la charge d'évoquer le problème des foires (Bourges, arch. comm., CC 277, p. 102).
34 Id„ BB 3, acte d'assemblée des habitants.
35 Pour l'ensemble des références liées à ces passages entre 1487 et 1491, voir les comptes de la ville (id., CC 259 à CC 262, non foliotés, voir rubrique « Voyages »ou « Dons »)
36 Id., CC 268, « Voyages ». Un autre voyage sur le même sujet est entrepris en 1499 (id, CC 269 « Voyages »). En 1506, après la venue du roi, l'assemblée se pose encore le problème d'obtenir leur rétablissement. Deux voyages sont alors organisés vers le roi (id., CC 277, « voyages », et BB 4, 26 octobre 1506).
37 À partir de 1461 en effet, il semble que le corps de ville mène plusieurs actions pour récupérer une telle chambre, et notamment cherche l'appui de certains représentants saintongeais (Poitiers, arch. comm., registre de délibérations n° 4, p. 182).
38 La perte des registres de délibérations de la fin du xve siècle rend vaine la recherche de toute indication sur les tractations menées par les Poitevins. Par contre en 1523, le conseil de la ville délègue onze de ses représentants vers Guillaume Gouffier, amiral, présent dans son château de Bonnivet (Poitiers, arch. comm., registre de délibérations n° 18, p. 223, 25 avril 1523).
39 Lettres des rois..., op. cit., B. Ledain (éd.), t. IV, p. 285-286 ; Poitiers, arch. comm., registre de délibérations n° 18, p. 275-276, 6 juillet 1523 ; Paris, Bibl. nat. France, Dupuy 216, f° 78 et v°.
40 Pour le détail de quelques exemples bretons ou bourguignons, voir J.-P. Leguay, « Un aspect de la sociabilité urbaine : cadeaux et banquets dans les réceptions municipales de la Bretagne ducale au xve siècle », dans Charpiana, Mélanges offerts par ses amis à Jacques Charpy, Rennes, 1991, p. 349-359 ; et A. Derville, « Pots de vin, cadeaux, racket, patronage. Essai sur les mécanismes de décision dans l'État bourguignon », dans Revue du Nord, n° 56, 1974, p. 341-364.
41 On trouve aussi : « Pour tenir la ville recommandee auprès du roi. »Ces expressions sont récurrentes et communes à l'ensemble des comptes (voir par exemple, Bourges, arch. comm., CC 258, rubrique « Dons »)
42 Il convient de noter cependant que lorsque le roi se présente en ville en dehors de sa première entrée, lui sont aussi attribués des cadeaux en vin et nourriture. C'est le cas à Tours en 1443, 1446, 1450, 1451, 1458 et décembre 1458 (respectivement : Tours, arch. comm., BB 28, fos 265 v°, 297, 324, 295 et BB 30, fos 256 v°, 298 v°, 305 et 313).
43 En 1406, le duc d'Orléans de passage à Poiriers avec ses fourriers et autres serviteurs reçoit du vin, de la viande et de l'avoine pour entretenir sa suite, dans le but déclaré de les détourner de toute « oppression et logis de gens d'armes » (Poitiers, arch. comm., J 419). Les comptes tourangeaux, manifestement mieux conservés et certainement aussi mieux tenus pour le début du xve siècle, possèdent une rubrique « dons et présents »bien avant 1436. Ils n'ont pas été inspectés mais présenteraient certainement un bon nombre d'exemples rapportant de semblables cadeaux.
44 Id., registre de délibérations n° 5, p. 66, 24 juin 1466.
45 À savoir 12 tasses, 5 pots d'argent et une aiguière en argent (Bourges, arch. comm., CC 259, « Dons et récompenses »).
46 En décembre 1513, il reçoit trois pipes de vin (une devin de marche, une de vin clairet, une de rouge), douze torches et quarante-huit hypocras (Poitiers, arch. comm., registre de délibérations n° 13, p. 22-23, 21 décembre 1513). Il repasse en janvier de l'année suivante, mais la commune met plus de temps à s'accorder sur la teneur et les quantités de victuailles offertes car sa femme est aussi annoncée (ibid., p. 26, 16 janvier 1514).
47 Id., registre de délibérations n° 25, p. 43, 29 août 1542. Tous les échevins l'accueillent à cheval, en robe longue, en présence des officiers royaux. Lui sont offerts des fruits, du vin et deux douzaines de torches.
48 Respectivement : Poitiers, arch. comm., registre de délibérations n° 23, p. 203, 10 mars 1541 ; registre de délibérations n° 25, p. 352, 25 janvier 1544 ; registre de délibérations n° 26, p. 2, 28 juillet 1544, p. 4 et 15, 4 et 5 août 1544. À cette dernière occasion six pots de vin blanc, six pots de vin clairet et trois pots d'hypocras lui sont présentés.
49 Id. registre de délibérations n° 23, p. 321, 27 juin 1541.
50 C'est ce que fait le maire de Poitiers par exemple en 1544 devant le roi et la reine de Navarre alors que l'assiette d'un nouvel emprunt vient juste d'être réalisée (id., registre de délibérations n° 26, p. 2).
51 Les 169 livres de dépenses en poisson et certainement aussi en vin effectuées pour les 16 à 18 grands seigneurs qui accompagnent Charles VIII en mars 1498, sont ainsi justifiées dans les comptes de la ville de Bourges (Bourges, arch. comm., CC 268, « Dons », 10 mars 1498).
52 Guillaume Gouffier est en effet seigneur de Bonnivet. La ville de Poitiers lui adresse de nombreux dons en 1521 et en 1523 (Poitiers, arch. comm., registre de délibérations n° 17, p. 498-499, 24 décembre 1521 ; registre de délibérations n° 18, p. 200, 9 mars 1523 ; ibid., p. 221, 16 avril 1523 [don d'un écusson par la ville]).
53 Malgré l'exceptionnelle qualité des comptes tourangeaux pour le milieu du xve siècle, ils ne sont pas toujours suffisamment détaillés pour permettre une étude serrée de tous ces dons. Bien souvent il n'est pas précisé qui sont exactement les quelques « grands personnages »qui passent en ville. Il est de plus tout à fait impossible d'étudier l'évolution générale de la rubrique « dons et récompenses »car elle mêle indistinctement les frais somptuaires, le défraiement de certains voyages et les cadeaux réels. Il est possible de citer toutefois : en 1442, 50 livres sont données à Charles d'Orléans de passage en ville (CC 28, f° 117) ; en 1443 la duchesse d'Amon et la reine de Sicile reçoivent plusieurs gratifications (id., f° 178) ; ou encore en 1449 de la viande est offerte à plusieurs conseillers du roi et du poisson au trésorier de France (id., CC 31, f° 75) ; en 1460, enfin, Pierre Doriole et un certain nombre de princes de la cour sont gratifiés de nombreux présents (id, CC 35, fos 157 v°-160).
54 Nous avons renoncé, devant l'ampleur du travail, à établir une liste exhaustive de tous les dignitaires reçus par la ville de Bourges. Citons à titre d'exemple, en 1524, le vin donné à des gens de bien qui suivent le retour du roi de Lyon à Blois. Le roi ne semble pas passer en ville, mais la reine y fera étape (Bourges, arch. comm., CC 294, p. 49).
55 Le fait semble de plus en plus vrai au xvie siècle. En 1535 par exemple, le corps de ville dépense tout de même plus de 145 livres en vin, pâtisserie et poisson pour divers notables dont les noms ne sont pas rapportés. Certains viennent de Moulins où se sont tenus les Grands Jours (id, CC 310, p. 49, 50, 52, 56 et 58).
56 Tours, arch. comm., CC 43, f° 174 (1478-1479).
57 Ces commissaires sont pourtant restés à Mirebeau étant donné le danger de peste qui régnait alors dans la ville de Poitiers (Poitiers, arch. comm., registre de délibérations n° 11, p. 354-355 et 364, 27 et 30 septembre 1512).
58 Bourges, arch. comm., CC 292, p. 63, mars 1522 et CC 298, p. 59, mai 1528.
59 À Poitiers, à la fin de septembre 1544, du vin est présenté au commissaire du roi pour la vente du domaine. Il s'agit de Lazare de Bais, qui reçoit 112 pots de vin pendant son séjour (Poitiers, arch. comm., registre de délibérations n° 26, p. 64, 67, 74 et 88).
60 Poitiers, arch. comm., J 1164.
61 Tours, arch. comm., CC 32, f° 44, juin 1451.
62 Ainsi à Tours en 1452, la ville accorde un présent au bailli pour sa femme qui vient d'accoucher au château (id., CC 33, f° 51). En 1540, la ville de Poitiers s'interroge sur l'ordre à tenir quant aux obsèques de la belle-mère du sénéchal. Certains iront porter la révérence au nom de la ville, d'autres présenteront du vin devant le cortège (Poitiers, arch. comm., registre de délibérations n° 23, p. 57-58, 23 août 1540).
63 Poitiers, arch. comm., registre de délibérations n° 19, p. 261-262, 9 avril 1533.
64 Ibid, p. 270, 21 avril 1533.
65 Il s'agit certainement de l'affectation du présent de chair donné le 4 février 1506 à Gabriel de La Châtre venu à Bourges prendre possession de l'office de prévôt que le roi lui a attribué après la mort de Guillaume Chambellan (Bourges, arch. comm., CC 276, p. 44).
66 À titre d'exemple, à Poitiers, le fait s'illustre en mars 1514 (Poitiers, arch. comm., registre de délibérations n° 13, p. 60, 2 février) ou encore en 1537 (id., registre de délibérations n° 20, p. 326, 27 août 1537). À Tours, une telle action peut être observée en janvier 1488 (Tours, arch. comm., BB33, f° 137).
67 Celles-ci restent rares cependant. En 1469, la ville de Poitiers afin d'obtenir l'installation d'un Parlement, s'engage à donner 50 marcs d'argent au sénéchal pour qu'il intervienne auprès du roi (Poitiers, arch. comm., registre de délibérations n° 5, p. 183, 7 août 1469).
68 Cette dépense semble régulièrement attestée à Bourges dans le premier quart du xvie siècle. Elle disparaît par la suite. Nous l'avons identifiée pour la dernière fois pour 1532 (Bourges, arch. comm., CC 305, p. 78).
69 À Bourges, le « grenetier »et son « commis »(ou appelé contrôleur du grenier à sel) reçoivent respectivement 20 livres et 100 sous. Il s'agit aussi pour la ville de les rembourser généreusement des frais d'écritures liés à la présentation des sommes qu'ils doivent à la municipalité.
70 On consultera indistinctement les premiers registres de comptes conservés qui en présentent un état très précis et séparé de la rubrique « Dons » (Bourges, arch. comm., CC 258 ou 259 et 260, rubriques « Chandelles et torches »).
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