Introduction
p. 29-42
Texte intégral
1Ce livre est le fruit d’une rencontre ou plus exactement du choc de deux personnalités opposées par certains traits, mais possédant en commun un plan de réflexion qui leur permettait de se comprendre, de se confronter parfois non sans passion, mais toujours dans les limites d’une solide amitié et d’une réciproque estime.
2Ce qui rapprochait Boris de Schlœzer et Alexandre Scriabine, c’était ce qu’on pourrait appeler leur dimension, leur « format ». Tous deux visaient au plus haut et leur échelle de valeurs commune avait pour sommet l’art, la métaphysique, le domaine des idées. Sur ce terrain privilégié, tous deux faisaient preuve de la même ardeur pour défendre des positions profondément différentes. Ces antagonismes mêmes se montrent particulièrement féconds pour nous, dans ces pages. N’ont-ils pas obligé Scriabine à préciser ses idées, à étayer plus solidement ses théories, face à l’esprit rigoureux d’un adversaire aussi solidement armé sur le terrain philosophique que musical ? Au cours de ses entretiens avec ses amis, raconte B. de Schlœzer, « Scriabine exposait rarement ses idées sous une forme achevée, fixée ; mais il pensait pour ainsi dire devant nous, créant au fur et à mesure ses théories. Les causeries, avec leur échange de demandes et réponses, les discussions et l’examen des problèmes qui en découlent excitaient sa réflexion et l’orientaient en partie ». C’est pour cela que nous ne possédons pas de traité théorique rédigé par le compositeur lui-même, mais seulement des relations qu’ont fait de mémoire ceux qui avaient participé à ces entretiens. Mais comme un exposé improvisé dans le feu de la discussion ne peut avoir la rigueur d’un texte mûrement élaboré, que la formulation varie selon l’argumentation des contradicteurs et que la pensée elle-même, sinon dans l’essentiel, tout au moins dans les aspects qu’elle revêt au fur et à mesure de son approfondissement, évolue, s’incarne dans des images différentes, beaucoup de ceux qui ont écrit sur Scriabine et notamment Sabanéev, ont déformé en les rapportant les propos du compositeur, ou les ont interprétés dans un sens erroné, soit en ne faisant pas la part de flottement dû au langage parlé, soit en prenant pour contradiction ce qui n’était qu’approches différentes d’un contenu difficilement formulable. B. de Schlœzer est sans doute le seul qui ait pu nous restituer dans leur complexité et leur unité les conceptions de Scriabine relatives à l’art, au Mystère, au rôle de l’artiste et à L’Acte final qui conduisait l’humanité à l’union extatique avec l’Un. Si nous pouvons faire confiance à l’auteur de cet ouvrage, c’est d’abord en raison de la fréquence des entretiens, du fait aussi que, beau-frère du compositeur, l’auteur a souvent habité chez les Scriabine, partageant les événements quotidiens et parvenant ainsi à une connaissance plus fine de la manière de sentir, de penser, de créer, de l’auteur de Prométhée. Aussi ne s’arrêtait-il pas à telle outrance, à telle déformation de langage arrachée par la violence d’une discussion passionnée, mais au fur et à mesure que s’exprimaient une pensée et une expérience spirituelle particulièrement malaisées à expliciter, il suivait les étapes de ce progressif développement, sans lâcher le fil conducteur, sans se laisser égarer par les digressions ; il se faisait préciser les points obscurs, bref, grâce à son esprit philosophique, il arrivait à faire la synthèse et à conceptualiser avec la clarté qui caractérisait sa forme d’intelligence, les idées, les images, les intuitions de l’artiste, du visionnaire et du mystique qu’était Scriabine.
3Ceux qui connaissent l’œuvre de B. de Schlœzer, dont on se rappelle l’influence sur l’esthétique musicale, surtout à partir de la publication en 1947 de son Introduction à J.-S. Bach, savent que le plus grand souci de l’auteur était la rigueur. On le voyait toujours attentif à éviter les prises de position a priori, à éliminer dans ses études et ses recherches l’écueil du goût personnel – et Dieu sait si B. de Schlœzer connaissait, en matière de musique, des préférences et des antipathies – à ne fonder ses conclusions que sur des faits bien établis ou des analyses sans faille. Chacun de ses articles ou de ses ouvrages séduit par sa logique, son unité, sa sobre clarté et sa construction élégante. Celui qui ne le connaîtrait que par ses écrits serait en droit d’imaginer B. de Schlœzer comme un intellectuel un peu froid, un homme dominé par l’intelligence. Un tel portrait serait très loin de la réalité : B. de Schlœzer n’était pas seulement, comme il a été dit, un passionné dans les discussions d’idées, c’était, et cela aussi le rapprochait de Scriabine, un hypersensible, un affectif, facilement bouleversé, réagissant violemment aux événements.
4Deux œuvres littéraires de fiction, tout à la fin de sa vie – une nouvelle, Rapport secret et un roman, Mon Nom est personne – montrent que si B. de Schlœzer n’était pas ce qu’on peut appeler un esprit créateur, ce dont lui-même se rendait compte, il possédait cependant une imagination originale, pourvu qu’elle puisse prendre appui, pour s’épanouir, sur une idée de caractère philosophique. Les personnages de son roman n’étaient pas des créatures surgies de son imagination, comme ceux de Dostoïevski par exemple, ils étaient recréés à partir d’expériences et de rencontres, mais possédaient une présence et une vie propre. Qu’on ne m’accuse pas de m’égarer loin de mon sujet : la faculté de recréer un personnage à partir d’une réalité, d’en saisir la vérité profonde et de le faire vivre, lui a permis certainement de saisir la personnalité de Scriabine, d’être fasciné par son étrangeté même, et de nous la restituer dans ce livre avec toute la vivacité de l’écrivain-né qu’il était.
5D’une vaste intelligence et d’une culture très étendue, excellent musicien sans avoir jamais été un exécutant remarquable, théoricien et esprit philosophique de premier ordre, B. de Schlœzer n’était ni visionnaire ni mystique. Il écrivait une langue souple, limpide, vivante, mais même dans ses œuvres de fiction, n’usait presque jamais d’images et n’en éprouvait pas le besoin, tout en admirant profondément ce don chez ceux qui le possédaient. Et s’il manifestait un grand respect et un vif intérêt pour la mystique, il affirmait toujours que cette forme d’expérience religieuse lui était étrangère.
6Scriabine ne possédait ni la culture philosophique, ni la rigueur conceptuelle de B. de Schlœzer, bien que celui-ci nous dise que « dans les discussions, il se montrait un adversaire très dangereux, toujours inventif, et avec lui, il fallait être sur ses gardes. Parfois, il était étrange de voir comment ce poète qui venait de nous charmer par son art, immédiatement après cela, se révélait un dialecticien habile, portant de rudes coups à son adversaire ». Mais Scriabine était, lui, un créateur visionnaire et un mystique. Tout ce qu’il créait, vivait, sentait, pensait, se déployait à partir d’une expérience intérieure de caractère mystique, donc essentiellement incommunicable dans sa réalité, et que cependant il s’efforçait de transmettre, tant dans son œuvre musicale que dans ses écrits poétiques, dans ses théories, ses projets, ses conversations avec ceux qui pouvaient le comprendre.
7Face à cette personnalité originale, B. de Schlœzer écoute, observe, participe à cette aventure unique avec toute son intelligence en éveil, son affection lucide, sa sensibilité. S’il n’accepte pas les vues du compositeur, s’il refuse ses projets, conteste ses théories, l’expérience qui se déroule devant lui touche à ce qui, pour lui aussi, est d’une importance capitale : le sens de l’art et sa fonction dans la vie et le destin des hommes. Surtout il assiste non pas seulement à l’éclosion, déjà passionnante en elle-même, d’une théorie philosophique, au développement d’une pensée originale, mais au jaillissement parallèle d’une création musicale qui découle, il le comprend, de la même et mystérieuse source intérieure. D’où le double projet de l’ouvrage qui devait comprendre deux volets. Le premier a été achevé. C’est la passionnante et profonde étude d’une personnalité sans doute unique, d’un « cas » singulier, mais approché non pas avec la suspecte objectivité du psychologue, mais la clairvoyante pénétration de l’ami, aidé certes par tout ce que peuvent apporter l’esprit et l’érudition philosophiques.
8Un second volume devait être consacré à l’œuvre musicale du compositeur. Il n’a jamais été écrit par suite de circonstances contraires. Émigré en France en 1920, ayant comme beaucoup d’autres tout perdu dans la tourmente révolutionnaire, B. de Schlœzer dut assumer à Paris des travaux plus immédiatement rentables. Remis à plus tard, le second volume ne vit jamais le jour. Cependant B. de Schlœzer consacra à l’œuvre musicale de Scriabine plusieurs études, moins importantes certes que ne l’eût été le volume projeté, mais qui diminuent un peu nos regrets de ce projet manqué. Cependant, si l’un des deux volumes devait être sacrifié, je pense qu’il est avantageux pour nous que c’eût été le second. La musique de Scriabine est le bien commun de tous. Pour en faire l’analyse, pour l’étudier dans ses divers aspects, il suffit d’être musicien, de comprendre la technique utilisée, de connaître à fond les partitions. Ces qualités ne sont sans doute pas si fréquentes, cependant elles peuvent et pourront se rencontrer à notre époque ou plus tard. Un ouvrage sur l’œuvre musicale de Scriabine pourra donc être écrit n’importe quand, et il est même très souhaitable qu’il le soit bientôt, car, soit dit en passant, nous l’attendons toujours. Mais une étude de la personnalité et des théories de Scriabine, de ce qu’on pourrait peut-être appeler sa mythologie, seul B. de Schlœzer pouvait nous la donner et nous l’a effectivement donnée, car il réunissait la compétence du musicien et du philosophe, la familiarité d’une fréquentation prolongée et le don de faire revivre l’ami et le musicien.
9Après ces remarques, il nous faut dire quelques mots du livre. Paru en russe en 1923, aux éditions Grani, à Berlin, c’est le premier ouvrage de B. de Schlœzer qui, jusqu’alors, n’avait publié que des articles dans divers journaux et revues.
10Ceux qui connaissent l’œuvre ultérieure de l’auteur aimeront retrouver dans ce volume les caractères dominants des études qui suivront celle-ci et se développeront tout au long des quarante-cinq années qui séparent ce Scriabine de la mort de son auteur en 1969. Déjà B. de Schlœzer s’efforce de soumettre la riche matière de son texte à un plan d’ensemble qui l’ordonne, la classe, cherchant toujours dans ses exposés la clarté tant des idées que de l’expression. Pour cerner une personnalité aussi complexe que celle de Scriabine, il éclaire successivement les divers aspects de son sujet, s’astreignant à tracer des frontières, que lui-même reconnaît parfois malaisées à définir, entre les différents domaines qu’il explore.
11L’ouvrage est divisé en deux parties comprenant chacune trois chapitres. La première, consacrée à la personnalité de Scriabine, étudie le Penseur, l’Artiste, le Mystique. Division un peu rigide sans doute que l’auteur eût peut-être quelque peu assouplie dans sa maturité, lorsqu’il arrivait à conférer à une architecture tout aussi rigoureuse l’élégance d’un style qui semblait se déployer d’une seule coulée. Il est probable aussi qu’il eût su éviter quelques retours sur des points importants, imposés par le découpage du texte qui ne pouvait éviter certains recoupements : ainsi les idées sur l’art, l’artiste et sa fonction concernaient-elles naturellement le Penseur, mais tout aussi bien l’Artiste dont elles stimulaient la création, et le Mystique puisqu’elles prenaient naissance au plus profond de l’expérience spirituelle vécue par le compositeur. Cependant, à une lecture attentive, il ne s’agit jamais de redites ou de répétitions à proprement parler, mais d’un abord quelque peu dévié, d’un point de vue plus aigu sur une échappée préalablement aperçue. On trouve dans ces retours un développement, la retouche d’un souvenir qui donne plus de relief à un trait entrevu en demi-teinte, ou en précise la signification. Et malgré la contrainte qu’impose à un esprit épris de logique les limites qu’il s’est tracées, on sent dans ce livre une spontanéité, une chaleur, la vivacité d’une amitié encore palpitante, que les autres ouvrages de B. de Schlœzer, centrés sur des problèmes plus abstraits ou sur des personnalités moins directement impliquées dans son existence personnelle, ne possèdent plus. Seules certaines pages consacrées au philosophe Léon Chestov, un autre grand ami, vibrent parfois de la même émotion sous-jacente.
12Pourtant, en lisant le titre des chapitres qui traitent de la personnalité : le Penseur, l’Artiste, le Mystique, on pourrait se demander si l’auteur ne néglige pas une part de l’homme qu’il se propose de faire revivre, la part de l’existence quotidienne de l’individu Alexandre Scriabine. Mais très vite nous nous rendons compte que cette part n’était jamais isolée de l’expérience intérieure : « J’ai remarqué, nous confie B. de Schlœzer dès les premières pages, que quoi qu’il fasse, quoi qu’il dise, toujours se poursuivait en lui un certain travail intérieur personnel, dont la tension ne se relâchait jamais et dont lui-même n’était pas toujours conscient. » Et à plusieurs reprises, B. de Schlœzer insiste sur le fait que pour Scriabine l’expérience intérieure de caractère mystique qu’il vivait avec une intensité parfois douloureuse, bien que son essence fût une joie ineffable, constituait la réalité la plus évidente, la certitude la plus absolue, l’unique critère auquel tout le reste, y compris les actions quotidiennes, devaient se référer. Aussi devons-nous savoir gré à B. de Schlœzer d’avoir gardé, en explorant la personnalité de Scriabine, cette perspective qui dessinait au premier plan les valeurs fondamentales par rapport auxquelles s’ordonnaient, en plans dégradés, toutes les autres.
13Le Penseur, l’Artiste, le Mystique : ces trois aspects correspondaient aussi aux trois modes d’expression jaillissant d’une source commune : l’expérience intérieure. Les visions grandioses de l’accomplissement du Mystère entraînant la transfiguration de l’humanité, les spéculations théoriques qui conféraient à ces visions une base philosophique, et les œuvres musicales, ces trois éléments n’étaient aucunement liés entre eux en tant que sujet et développement, ou thème et illustration, ou encore théorie et explication. C’étaient trois façons parallèles de communiquer l’incommunicable. « On peut admettre pleinement, affirme B. de Schlœzer, qu’entre l’activité spéculative et l’activité créatrice artistique existe un tout autre rapport, celui où ces activités étant parfaitement autonomes et indépendantes l’une de l’autre, sont liées du fait qu’elles jaillissent d’une source commune – l’intuition vivante. »
14Ainsi non seulement en étudiant ces trois aspects, B. de Schlœzer ne sacrifie nullement l’individualité de Scriabine, mais au fur et à mesure qu’il relate ses entrevues, à travers des entretiens portant cependant toujours sur des sujets philosophiques ou esthétiques, nous rencontrons l’homme Scriabine singulièrement vivant, avec son caractère, ses faiblesses, son allure frêle, son comportement, ses élans, ses réactions et sa sensibilité. Nous le sentons vivre bien plus intensément que si l’auteur avait scrupuleusement rendu compte des gestes de son modèle, de ses mimiques, ou nous avait informé des moindres détails de ses actes quotidiens.
15La deuxième partie s’intitule le Mystère et comprend également trois chapitres.
16Le titre de cette seconde partie a de quoi surprendre. A-t-elle bien sa place dans ce volume qui traite de la personnalité et de la création, le second volume seul, celui qui n’a jamais été écrit, devant être consacré aux œuvres ? Et dans ce second volume même, cette partie n’eût-elle pas dû se situer à la fin, dans un chapitre consacré aux œuvres inachevées puisque l’Opéra, le Mystère, L’Acte Préalable dont il est question n’ont jamais dépassé le stade de l’esquisse ? Seules quelques scènes de l’Opéra avaient été ébauchées ; le Mystère est toujours resté à l’état de projet, lui-même mouvant, soumis à bien des métamorphoses, tandis que L’Acte Préalable ne nous a livré qu’un texte poétique dont nous ignorons l’utilisation prévue dans la structure générale de l’œuvre, et des brouillons musicaux épars, simples repères dans une matière en pleine genèse.
17Pour ma part, je crois qu’en consacrant la plus longue partie de son livre à ces trois projets, B. de Schlœzer a fait preuve d’une grande lucidité, en allant à l’essentiel, selon son habitude. Car c’est le Mystère – et les deux autres œuvres n’en sont que des aspects – qui est la clef de toute la pensée, de toute l’activité de Scriabine.
« Le Mystère, remarque B. de Schlœzer, n’a pas, semble-t-il, été réalisé, il demeure uniquement comme projet, mais ce projet, élaboré en détail dans certaines de ses parties par l’artiste, est la solution de toute son activité : il nous donne la clef de sa création. »
18En effet, non seulement du point de vue psychologique, ce projet gouvernait toute l’activité de Scriabine tant sur le plan musical que conceptuel, mais on est obligé d’admettre « que ce but central, plus exactement ce but unique de Scriabine, a tout de même commencé à se réaliser, qu’il n’est pas resté à l’état d’intention, de rêve, de projet, mais qu’il se réalisait, s’incarnait et maintenant existe tout de même objectivement, bien que sous une forme toute différente de celle que voulait Scriabine lui-même ». En réalité, tout l’art de Scriabine est « mystériel » selon l’expression de B. de Schlœzer qui ajoute : « toutes ses créations sont en réalité des esquisses seulement, une série d’approches du Mystère ».
19Ce qu’était ce projet, comment il s’est développé au cours de la vie de son auteur, quelles transformations il a subies, B. de Schlœzer nous l’expose dans cette deuxième partie de l’ouvrage, tout en soulignant à plusieurs reprises que si profondes qu’aient pu paraître les métamorphoses du projet initial, celui-ci cependant contenait un noyau immuable, dont seule pouvait se modifier la conceptualisation, la formulation, nous dirions peut-être aujourd’hui la mythologie, à condition de n’attacher à ce terme aucune nuance péjorative, de n’en pas faire surtout le synonyme de fantaisie, de fiction ou de mensonge. Cette idée centrale du Mystère, B. de Schlœzer la résume ainsi : « Avant tout et en schématisant à l’extrême, le projet central de Scriabine, son Mystère peut se définir comme l’union de toute l’humanité dans la commune béatitude de l’extase. » Extase qui devait transfigurer, diviniser l’homme et l’univers. L’instrument de cette universelle transfiguration libératrice, de cette accession à l’état divin est l’art qui possède une puissance unificatrice et théurgique sans limites.
20Ce qui a pu varier au cours de la vie du compositeur, de son itinéraire spirituel, c’est sa conception de l’homme, dieu lui-même ou fils de Dieu investi d’une mission, ainsi que celle du rôle dévolu à l’artiste et en particulier à Scriabine lui-même. Les diverses étapes de ce trajet sont retracées par B. de Schlœzer, qui souligne les transformations des idées, sans jamais laisser perdre le fil conducteur qui les relie.
21L’ouvrage date de 1923. Ce que l’auteur, malgré toute sa clairvoyance, ne pouvait imaginer, mais seulement obscurément pressentir comme en témoigne la phrase citée au sujet de la réalisation du Mystère, c’est que nombre d’idées de Scriabine, qui pouvaient à l’époque apparaître comme le rêve isolé d’une imagination enfiévrée, destiné à s’évanouir avec la disparition de son auteur, ressurgiraient un demi-siècle plus tard sous des formes inattendues, parfois aberrantes, mais cependant reconnaissables.
22Je voudrais en effet attirer l’attention sur un certain aspect « actuel » des idées de Scriabine, qui fait que l’intérêt de l’ouvrage que nous présentons n’est pas uniquement historique. C’est cette actualité de la personnalité de Scriabine, déjà sensible dans l’audience de plus en plus large que rencontre aujourd’hui son œuvre musicale (notamment parmi la jeunesse non conformiste) qui donne toute sa signification à la traduction de ce volume, cent ans après la naissance du compositeur.
23Ce n’est sans doute pas une coïncidence si, comme l’affirme à plusieurs reprises B. de Schlœzer, Scriabine vivait déjà dans ce futur qu’il appelait de toute son âme.
24Jugeant ses œuvres passées dont il reconnaissait avec beaucoup de lucidité tant les qualités que les faiblesses, Scriabine finissait par dire avec humeur : « Ce n’est pas ça ! » Mais il suffisait alors de faire allusion à ses projets, en un mot au futur, pour qu’il s’épanouisse, oubliant immédiatement le passé, goûtant déjà les félicités du monde à venir. « En réalité, je ne vis que dans le futur. » Cette phrase, il la répétait souvent. Dans les dernières années de sa vie, cet élan vers l’avenir dont il ne cessait de rêver atteignit une force et une acuité particulières. L’impatience l’envahissait, l’attente le tourmentait. Or cette tension de tout son être vers un futur lumineux, incarné dans le projet du Mystère, éclaire le rôle essentiel de celui-ci dans tout le processus de la création de Scriabine, ainsi que dans l’élaboration de ses théories philosophiques, et justifie pleinement l’importance que B. de Schlœzer a accordé à ces œuvres non réalisées.
25Mais une autre remarque s’impose aussitôt. L’espérance dans un avenir qui résoudra les problèmes du monde actuel ne caractérise-t-elle pas précisément la pensée moderne, par opposition aux civilisations antiques qui situaient dans le passé le mythe de l’Âge d’or où étaient inconnues la souffrance et la mort ? Ce phénomène, dont on peut sans doute percevoir les signes avant-coureurs dès la Renaissance, s’impose et domine la pensée des xixe et xxe siècles. À la nostalgie du paradis perdu, au sentiment de la dégradation successive des périodes de plus en plus sombres succédant à l’Âge d’or, se substitue peu à peu la certitude de la marche en avant vers un avenir meilleur, qui se manifeste dans tous les domaines : c’est la croyance au progrès scientifique aboutissant à la domination de la nature, au contrôle de ses forces ; les grands mythes politiques imaginent des sociétés idéales dispensatrices de paix et de bonheur, tandis que naît l’attente quasi-religieuse d’une surhumanité, que celle-ci soit le produit de ces sociétés parfaites ou le fruit de l’évolution biologique, au besoin dirigée par l’homme lui-même. Et cette inversion des pôles d’attraction temporels, basculant du passé des origines vers le futur des aboutissements, comporte d’incalculables conséquences que nous commençons seulement à entrevoir aujourd’hui. Les principales caractéristiques, si déconcertantes parfois, de l’art contemporain ne découlent-elles pas directement de cette attitude nouvelle ?
26Si l’Âge d’or est senti dans un lointain passé, tout ce qui éloigne de cet instant d’équilibre et de béatitude ne peut qu’en ternir le souvenir, en effacer progressivement l’empreinte, en masquer la clarté ; d’où le respect de valeurs fixées héritées du passé, la tendance à créer des œuvres durables, des monuments bravant les siècles, car plus on s’enfonce dans le passé, plus le monde a des chances de garder un reflet de la lumière édénique. Aussi dans cette perspective, le nouveau est suspect, la destruction sacrilège. Tous les mythes des secrets perdus, des sagesses oubliées, des puissantes Atlantides et des Arcadies innocentes anéanties par la perversité des hommes n’ont pas d’autre source que le regret du bonheur originel.
27Mais que ce paradis soit projeté dans un futur, non moins mythique d’ailleurs, et toutes les valeurs s’inversent. Tout ce qu’on peut savoir de l’Âge d’or attendu, c’est qu’il sera profondément différent de l’humanité d’aujourd’hui, que l’homme y sera libre, puissant, heureux. Dès lors, loin de prôner les valeurs durables et de veiller sur des héritages immémoriaux, on renie toute tradition, puisque seul ce qui est autre, différent, peut avoir quelque chance de capter un reflet de la lumière à venir. Tout ce qui éloigne du passé, tout ce qui le conteste, le récuse, le détruit, a par là même des chances de hâter l’avènement du nouveau monde. Valorisation du neuf, recherche de l’original, du jamais vu, expériences toujours plus hardies sont les conséquences logiques de cette fuite en avant, de cet élan éperdu vers l’Éden futur.
28Mais il existe deux attitudes distinctes, deux manières de vivre cette expérience. La première est celle de l’attente sans objet précis, l’aveu de notre totale inconnaissance de ce monde futur qu’on appelle cependant, qu’on éprouve comme devant apporter un bonheur et une libération dont on ignore la nature. Cette attitude se traduit par le désir de détruire ce qui existe pour ouvrir les chemins de l’avenir ou au moins les déblayer des résidus de traditions qui les encombrent, sans agir, ou très peu, en vue d’une édification du nouvel univers. C’est une sorte de pari aveugle, un acte de foi dans les puissances génératrices d’un nouveau chaos.
29L’autre attitude ne nie pas certes la nécessité d’une destruction du monde actuel, mais en vue de sa réédification selon un plan préconçu obéissant à des lois nouvelles. D’où une certaine logique jusque dans le processus destructeur. Inutile de dire que Scriabine se situe dans cette seconde perspective. Mais l’univers dont il appelait l’avènement n’était en aucun cas une société humaine réalisée sur le plan politique, si juste, si fraternelle, si heureuse qu’on puisse imaginer une pareille société : il s’agissait pour lui d’une « nouvelle terre et de nouveaux cieux » selon l’expression de l’Apocalypse, d’un cosmos et d’une humanité transfigurés, déifiés, unis à l’Un dans une commune extase. Et ce dessein ne serait jamais réalisé par des moyens purement matériels : guerres, révolutions, bouleversements sociaux, tous ces événements ne pouvant, dans le meilleur des cas, que préparer le terrain à la réalisation finale, par l’unification de la terre ; la transfiguration ne pouvait être obtenue, elle, que par un acte théurgique, conçu sous la forme d’une liturgie dans laquelle se fondraient toutes les formes de l’art.
30Des idées d’un caractère aussi nettement religieux ne sont-elles pas très loin, au contraire, de la mentalité actuelle pour laquelle c’est l’action politique, et elle seule, qui est capable de résoudre les difficultés et les contradictions de la société d’aujourd’hui ? Or c’est chez l’auteur même du présent ouvrage, chez B. de Schlœzer, que nous pouvons suivre les métamorphoses possibles des thèmes scriabiniens. Chez cet auteur, dont nous avons souligné les profondes différences de vues et de tempérament avec ceux de Scriabine, on peut retrouver des versions considérablement modifiées, repensées, mais à mon avis reconnaissables, de certaines idées qui avaient été discutées, au cours des entretiens entre le compositeur et le philosophe. Il est intéressant de constater que le thème de l’homme ayant pris son destin en main pour dépasser sa condition, et qui parvient d’abord à l’immortalité puis à la divinisation, grâce à son seul et conscient effort, a ressurgi dans l’avant-dernière œuvre de B. de Schlœzer, soit plus d’un demi-siècle après que Scriabine lui avait fait part de ses grandioses visions.
31Si les images choisies par B. de Schlœzer dans son Rapport secret, nouvelle parue dans le Mercure de France en 1964, diffèrent, si c’est par la voie de la science que les habitants de la planète visitée par une mission humaine trouvent le chemin de l’immortalité, puis de la déification, l’état d’union auquel atteignent ces êtres, à l’origine aussi humains que nous-mêmes, et dont une des caractéristiques, remarquons-le en passant, est de se projeter toujours vers l’avenir, cet état présente trop de ressemblance avec la condition à laquelle devaient aboutir les participants au Mystère scriabinien pour qu’on n’y devine l’image, sans doute inconsciente, imprimée dans l’esprit de B. de Schlœzer par le compositeur visionnaire.
32Est-ce aussi l’idée, si essentielle chez Scriabine, de la toute-puissance de l’art qui, sous une apparence différente apparaît dans la dernière œuvre de B. de Schlœzer : son roman Mon Nom est personne, dans lequel l’auteur d’un roman crée des personnages vivants, mais se révèle lui-même une création de ceux-ci ? Vision pessimiste et néantisante, sorte de cercle infernal auquel aboutit ici l’acte créateur, image renversée de la liturgie libératrice attendue par Scriabine.
33Enfin, dans son Introduction à J.-S. Bach, B. de Schlœzer développe magistralement l’idée de ce qu’il appelle le Moi mythique de l’artiste opposé au Moi quotidien, au moi de l’individu Untel. Repensée, recréée, cette idée ne fait-elle pas écho à celle des deux moi si souvent développée au cours des entretiens, ce que Scriabine appelait le grand moi et le petit moi ? Mais de quel « moi » est-il ici question ? Bien entendu non pas d’Alexandre Nikolaïevitch Scriabine qui ici, en ce moment, éprouve ceci ou cela, mais de ce « Moi » qu’Alexandre Nikolaïevitch Scriabine a perçu en lui-même, qui est la Conscience de l’Unique, jaillie en lui, Scriabine. De ces deux « moi », le grand et le petit, Scriabine en parle très clairement dans un de ses cahiers : « Dans le temps et l’espace, je suis soumis aux lois du temps et de l’espace, mais les lois du temps et de l’espace ont été créées par mon grand “Moi”… »
34Certes, le moi mythique schloezerien est le moi du créateur-artiste, non du créateur-Dieu. Cependant nous le voyons créer les êtres de chair de Mon Nom est personne. Qu’on m’entende bien, il ne s’agit aucunement dans ces cas d’influence, pas même peut-être d’inconscientes résurgences, mais de rencontres induites sans doute par les thèmes des entretiens auxquels l’esprit de B. de Schlœzer avait imprimé son sceau personnel.
35Rien ne peut mieux nous faire saisir que ces exemples ce qui à la fois rapprochait et opposait B. de Schlœzer et A. Scriabine, face aux thèmes fondamentaux qui les fascinaient tous deux.
36Des rencontres d’idées, nous en trouverons beaucoup, et cette fois chez des personnalités qui ignorent tout de la pensée du compositeur. L’on sera surpris du nombre de thèmes et de conceptions que Scriabine avait en commun avec les hommes d’aujourd’hui.
37En élaborant le projet de son Mystère, Scriabine a été amené à se poser le problème du théâtre. Or, tout comme les auteurs dramatiques, comme les metteurs en scène d’aujourd’hui, il voulait un théâtre sans rampe, sans séparation entre acteurs et spectateurs, il voulait que tous participent à des degrés divers à l’œuvre dramatique. Mais, comme toujours, sous cette ressemblance existe une dimension mystique que renieraient sans doute les créateurs d’aujourd’hui : « Pour lui, le théâtre comme édifice, comme un certain ensemble constitué par une scène et une salle isolée par la rampe, n’était que l’expression dans les formes de l’espace du besoin inné de l’homme de se réincarner, ce besoin qui l’attirait vers le masque. Tout le sens du théâtre se concrétisait dans la mascarade. Et il voulait vaincre ce masque même, ce masque au moyen duquel nous voulons nous sauver de la pauvreté et de la fragilité de notre existence individuelle. […] De ce point de vue, le théâtre n’est qu’un succédané de la vie. » Mais pour atteindre l’épanouissement et la plénitude de vie qui conduit non au masque, mais à une véritable transfiguration, Scriabine affirme qu’il n’existe qu’une seule voie, « la voie religieuse, la voie de l’union de son “Moi” avec l’Un, de son enracinement en Lui ».
38L’importance que Scriabine attribuait à l’érotisme le rapproche sans doute aussi de la sensibilité de l’homme d’aujourd’hui. N’allait-il pas jusqu’à inclure parmi les formes artistiques qui devaient participer au Mystère, celles du goût et du toucher sous forme de « caresses », et B. de Schlœzer nous dit qu’il concevait l’extase finale comme une sorte de « grandiose acte sexuel ». Mais ici encore, il ne faut jamais oublier le plan sur lequel devait se situer le Mystère. Ainsi il serait inexact de croire que Scriabine voulait créer des arts nouveaux dont la matière première eût été les sensations du goût et du toucher. « Il est clair, explique B. de Schlœzer, qu’il était question de tout autre chose : il s’agissait d’inclure les odeurs, les sensations de goût et de tact dans le tissu même du Mystère, d’entrelacer de nouveaux fils dans ce tissu, en même temps que ceux de la musique, de la peinture, du geste, de la poésie. Puisqu’était reconstituée l’unité de l’“Art total”, on devait revivifier, ressusciter les éléments de cet art qui, dans l’impossibilité de se développer indépendamment, isolés des autres, semblent avoir péri sans laisser de traces. »
39L’idée même d’un art total, sans frontières entre les diverses activités, rejoint bien des tendances actuelles, mais une fois de plus, les plans diffèrent. L’effacement des frontières entre les arts aboutit souvent aujourd’hui à la négation de l’art, à sa fusion pure et simple dans la vie. Chez Scriabine, l’art total devait lui aussi se résoudre dans une vie supérieure, mais ce n’était pas l’art qui disparaissait dans la vie, mais l’art faisait accéder à une vie supérieure, exaltée, absolue, dont les arts incomplets tels que nous les connaissons aujourd’hui, ne sont qu’un pressentiment, une lointaine approche. Et tandis que c’est dans la spontanéité, le geste incontrôlé, la plongée dans l’inconscient, que l’on cherche actuellement les sources d’une vie plus intense, le Mystère devait au contraire amener à la conscience, par une élaboration créatrice et volontaire, les sens les plus obscurs du corps, les plus sombres profondeurs de la psyché.
40C’est précisément parce que par l’art l’homme pouvait atteindre à cette unification de son être « qu’il devait inclure dans la trame de l’“Art total” les sensations produites par les organes des sens inférieurs, les sensations qui possédaient une puissance énorme, bien que difficilement contrôlable, sur la psyché, capables dans une mesure encore plus grande que les sons, les paroles et les couleurs d’introduire en elle le chaos et la destruction, mais susceptibles, grâce à une utilisation habile et prudente, conjuguées avec le son, le geste ou l’image colorée, d’approfondir rapidement, d’élargir et de renforcer leur action, par l’élévation et l’excitation de toutes leurs énergies ».
41La passion intransigeante de Scriabine pour la liberté, une liberté totale, absolue, sans limites, rencontrera aussi la sympathie et la compréhension du lecteur contemporain. Liberté, elle aussi plus qu’humaine. Il ne s’agissait aucunement de toute évidence d’une liberté d’agir de telle ou telle façon, c’était là une liberté du « petit moi », liberté toujours relative, importante certes sur le plan de la vie courante, importante surtout dans la mesure où elle permettait la manifestation du « grand Moi ».
42Il peut sembler contradictoire de parler de « liberté » après ce qui vient d’être dit de la méfiance de Scriabine envers le spontanéisme, de son désir d’un art volontaire, élaboré, soumis au vouloir conscient du créateur. N’oublions pas que la liberté que visait Scriabine était une liberté absolue, divine, et on ne pouvait l’atteindre que par l’unification parfaite de tout l’être qui, dans son état terrestre, était désuni, morcelé, rempli de contradictions. L’art pouvait conduire à cette unification, mais pour l’obtenir, pour que soit pénétré de lumière, pour que devienne transparent et unifié l’homme obscur et chaotique, il fallait que soient intégrés dans l’unité de la forme tous les éléments – sonores, visuels et autres – qui composaient l’œuvre. Et c’est une fois cette unification obtenue que l’illumination intérieure conférait à l’homme transfiguré la liberté d’un Dieu. Cette liberté était ressentie comme créatrice de l’univers entier. « Si rien n’existe, c’est que tout est possible ! », s’écriait-il souvent. Et de cette sensation de souveraine puissance qui l’envahissait parfois jusqu’à l’ivresse, surgissait un conflit, très actuel lui aussi, celui entre l’absolue liberté et la notion de vérité que Scriabine, à certains moments de son existence, croyait incompatibles.
43Sans doute n’existe-t-il aucune tendance de l’art moderne, aucun courant de pensée de notre temps dont on ne puisse retrouver sans forcer les textes, les germes, le pressentiment ou même parfois la formulation explicite dans la pensée du musicien-visionnaire. La recherche d’un langage musical nouveau qui, dans ses dernières œuvres, lui fait abandonner la tonalité, les expériences tentées dans Prométhée d’un clavier à lumière, et tous les projets innombrables dans les domaines les plus divers de l’art – décor, éclairage, mouvements de masses, etc. – autant de chemins conduisant directement aux expériences des créateurs contemporains. Dans ces pages, le lecteur retrouvera bien des idées souvent développées depuis, qui font définitivement partie de notre horizon intellectuel, et déjà incluses, dans les années 1910-1915, dans le fascinant univers scriabinien.
44Mais chaque fois que se produira une telle concordance, l’on remarquera en même temps qu’un éclairage subtilement différent semble baigner ces éléments connus. Ces rencontres ont toujours lieu sur un autre registre, et essaye-t-on de passer du monde entrevu par Scriabine à ce qui en paraissait la réplique en voie de réalisation, on s’aperçoit qu’il faut franchir un seuil et opérer un choix. Et celui qui, trompé par des ressemblances qui semblent évidentes, s’engage dans ce milieu, le croyant familier, risque de s’y sentir soudain étranger. Il ne reconnaît plus le paysage car les perspectives ouvertes devant lui découvrent non point l’horizon de quelque société humaine réconciliée et heureuse, mais celui, inquiétant, du Mystère.
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