Quel avenir pour la planification ?
p. 163-170
Texte intégral
1Une planification indicative appliquée à l’économie nationale a été mise en place, à l’issue de la Seconde Guerre mondiale, dans un petit nombre de pays européens, en particulier aux Pays-Bas (sous l’influence de Jan Tinbergen et du Centraal Planbureau) et en France sous l’impulsion de Charles de Gaulle et de Jean Monnet. L’ambition de la démarche était alors manifeste : tracer des objectifs économiques et sociaux à moyen terme et des voies pour les atteindre, en osant s’appuyer sur des cadrages macroéconomiques fournis par la comptabilité nationale et en imposant le respect de conditions de cohérence. Bien qu’indicatif, le Plan comportait une dimension normative forte, puisqu’il traduisait les préférences collectives, ou du moins les préférences étatiques. C’était pour nous en France « l’ardente obligation » de la planification indicative (Général de Gaulle), le « plan ou l’antihasard » (Pierre Massé) comme réponse face à l’incertitude.
2La planification indicative à la française n’a pas résisté à l’ouverture de notre économie et à la mondialisation. C’est justement l’exposition croissante à des chocs externes, donc pour l’essentiel exogènes, ainsi que la perte de contrôle des autorités nationales sur nombre de leviers des politiques publiques qui ont provoqué la mort de la planification nationale.
3Pourtant, l’esprit du Plan à la française tel qu’initié par Jean Monnet doit rester une référence pour les politiques publiques, qu’il s’agisse de se projeter dans le long terme ou d’organiser l’espace économique et social.
Le Plan, incitation à se projeter dans le long terme
4Depuis des années, l’horizon économique des décideurs a eu tendance à se réduire au point de voir se généraliser le « court-termisme ». Lorsqu’ils arrivent au pouvoir, les décideurs politiques prétendent tous rompre avec les pratiques de leurs prédécesseurs, en affichant des stratégies pour le moyen-long terme. Mais très vite, l’horizon de la gestion publique se rétrécit, les politiques conjoncturelles prennent le pas sur les réformes structurelles et le cycle électoral pousse à mettre en sourdine une part significative des réformes structurelles annoncées. Les marchés financiers sont souvent accusés de myopie et de court-termisme. Mais, d’abord, cette accusation n’est pas toujours fondée. En second lieu, si myopie il y a, elle concerne tout autant les pouvoirs publics que la finance, par le jeu de phénomènes de contagion auxquels en pratique peu d’opérateurs économiques ont su résister.
5La planification indicative à la française avait d’emblée adopté un horizon de moyen-long terme. Loin d’être démodée, cette dimension temporelle devrait être réhabilitée dans le monde d’aujourd’hui et de demain. Car partout, dans les pays avancés comme dans les pays émergents ou en développement, ce que j’appelle la demande de long terme s’accroît, alors que l’offre de long terme a du mal à suivre. De ce déséquilibre structurel découlent un certain nombre d’échecs et de frustrations du côté des politiques publiques.
Une demande croissante de long terme
6La plupart de ces politiques publiques exigent aujourd’hui l’abandon du court-termisme, l’adoption d’horizons de long terme. Il ne s’agit pas, à travers ces exemples, de refaire une planification indicative, morte de sa belle mort, mais de réhabiliter ce que j’appelle l’esprit du Plan tel que posé par Jean Monnet.
7L’ambition d’une réindustrialisation de la France, de retrouver une part de l’industrie dans le PIB à 20 % alors qu’elle n’est plus que de 10 %, n’a de sens que dans le temps long. Un horizon de cinq à dix ans est en effet requis pour mettre en œuvre une vraie politique d’innovation et de recherche, pour améliorer notre compétitivité-prix et hors prix, pour promouvoir la localisation, plutôt que la passéiste relocalisation, d’activités porteuses d’activité et d’emplois qui concernent tous les secteurs (y compris les services, la filière agro-alimentaire, la santé et le médicament, l’énergie…), pour promouvoir et retenir les talents, etc. Il s’agit de concevoir de nouvelles politiques industrielles, pour partie nationales pour partie à l’échelle de l’Europe, dont le champ dépasse comme indiqué la seule industrie. Des politiques industrielles qui, comme dans le passé, combinent une vision verticale par secteur et des mesures horizontales (exemples de la politique de la concurrence ou des mesures relatives au financement), et qui retrouvent un peu de la « granularité », en d’autres termes de la sélectivité, des premiers Plans français.
8La transition énergétique et écologique (TEE), qui ne fait que commencer, n’a de sens que dans le long terme, et même dans la perspective de ce que Schumpeter appelait la « dynamique grandiose ». L’horizon 2030 se rapproche d’une échéance de moyen-long terme privilégiée dans le temps par la planification indicative française. Mais l’objectif de neutralité carbone pour 2050 nous projette bien au-delà. Cette TEE requiert des investissements, publics et privés, de long terme, qu’il s’agisse des infrastructures (nucléaire, énergies renouvelables, etc.) ou de la gestion de ces infrastructures. On le voit bien dans la part que prend la TEE dans l’enveloppe globale des investissements d’avenir, du plan France 2030 comme des plans de relance mutualisés à l’échelle de l’UE dans le cadre des stratégies post-Covid. Le défi du financement de la TEE pose une question souvent abordée dans le passé par les Comités et Commissions de financement de plusieurs Plans français : comment attirer une part significative de l’épargne des ménages, massivement liquide ou à court terme, vers le financement d’investissements de long terme ? Une différence importante entre aujourd’hui et l’époque des Plans indicatifs : les banques à l’époque ont financé une bonne part de la croissance des Trente Glorieuses grâce à la « transformation » (prêts à long terme financés à partir d’une épargne de court terme), alors que la réglementation bancaire désormais en vigueur (Bâle III) encadre étroitement les possibilités de « transformation » par les banques.
9La gestion des finances publiques nécessite aussi, plus que jamais, une stratégie de long terme. La pandémie puis la guerre en Ukraine ont pesé et pèsent encore sur les déficits et les dettes publiques avec l’incontournable politique du « quoi qu’il en coûte ». Un peu partout, l’augmentation des charges d’intérêt de la dette, due au resserrement des politiques monétaires, ainsi que la hausse des budgets de défense requise par l’insécurité et les bruits de bottes en Europe obligent les États à se préoccuper de l’efficacité de leurs dépenses afin de retrouver de petites marges de manœuvre, dans un contexte où il faut en même temps financer la TEE et sanctuariser les dépenses de santé, d’éducation et de formation. C’est uniquement dans la durée et grâce à une programmation pluriannuelle des finances publiques que les États, dont l’État français clairement surendetté aujourd’hui, peuvent sortir de ce qui ressemble à la quadrature du cercle. L’exercice européen des programmes de stabilité, qui englobe les trois niveaux concernés (État, collectivités territoriales, sécurité sociale), suggère le caractère complexe mais nécessaire de la réforme de l’État et de celle des retraites. Des réformes insuffisantes si elles laissent de côté ce qui concerne les collectivités territoriales. À la fin des années 1960, la rationalisation des choix budgétaires (RCB) avait été introduite en lien étroit avec la planification indicative. Maintenant que cette planification a disparu, l’esprit et l’horizon temporel du Plan à la française doivent imprégner la gestion publique ; ils doivent, après les déceptions des tentatives successives (LOLF, RGPP, MAP, CAP22, etc.), guider une nouvelle approche de l’efficacité de la dépense publique.
10La révolution numérique exige également que les entreprises comme les États adoptent une stratégie de long terme. Les enjeux sont considérables, car ils touchent de plein fouet à la compétitivité des entreprises et à l’autonomie stratégique de l’Europe vis-à-vis des États-Unis et de la Chine. On ne va pas refaire en France un plan Calcul comme à l’époque du général de Gaulle. On ne va pas répondre à la puissance et au pouvoir des GAFAM américaines par des GAFAM françaises, allemandes, etc. La constitution d’entreprises européennes compétitives à l’échelle mondiale dans le secteur de la blockchain, de l’intelligence artificielle et de ChatGPT requiert une approche duale, combinant des firmes de grande taille profitant d’économies d’échelle et des start-ups agiles et innovantes. C’est au marché d’opérer le tri et les restructurations incontournables, l’État se bornant ici, dans le cadre des nouvelles politiques industrielles, à infléchir certaines évolutions désirées ou au contraire redoutées au moyen d’incitations et de l’arme fiscale.
Une offre de long terme insuffisante
11Face à une exigence accrue de long terme, ce que j’appelle l’offre de long terme demeure en retrait, et ce malgré l’essor de la planification dans les entreprises.
L’essor de la planification stratégique des firmes
12Le déclin de la planification nationale en France à partir des années 1970 s’est accompagné du développement d’une planification, de la volonté de se projeter de manière volontariste dans le moyen-long terme, de la part des entreprises, en particulier des plus grandes. Cet effet de ciseau entre la sphère publique et le secteur privé relève-t-il d’une simple corrélation, ou y aurait-il ici un lien plus étroit relevant de la causalité ? En fait, les deux mouvements découlent d’une même origine, la mondialisation. L’ouverture des frontières au plan mondial, accentuée pour nous par l’intégration européenne, a précipité la crise de la planification indicative à la française, victime des incertitudes croissantes, des aléas multiples et de la multiplication des chocs d’origine externe. Cette même mondialisation, pour les mêmes raisons, a conduit les grandes entreprises, tout spécialement les firmes multinationales, à essayer de reprendre la maîtrise de leur destin en recourant à des exercices de planification stratégique et de prospective. Ce n’est pas l’essor de la planification privée qui aurait rendu superflue la planification nationale. La causalité a plutôt joué dans l’autre direction, les plans d’entreprises prenant le relais d’une planification nationale en crise. On peut relier ce débat à l’insuffisance des marchés à terme, marchés qui permettent à certains de se couvrir contre l’incertitude et les aléas. Pierre Massé avait à l’époque beaucoup insisté sur le fait que la planification à la française sert à pallier l’incomplétude du système des marchés à terme. Car ces marchés existent seulement, encore aujourd’hui, pour un petit nombre de biens ou services et pour des horizons rapprochés. La planification des entreprises remplit un peu le même rôle, puisqu’elle se veut réductrice d’incertitude comme pourraient l’être les marchés à terme s’ils étaient plus développés.
La crise de la prévision macroéconomique
13À l’époque du deuxième mandat présidentiel de Charles de Gaulle, le Ve Plan (1966-1970) a constitué d’une certaine façon l’apogée de la planification indicative à la française durant les Trente Glorieuses, par ses ambitions, ses prétentions à un chiffrage macroéconomique précis et cohérent, par son lien avec la politique d’aménagement du territoire. Il a évidemment été chamboulé par mai 1968 et ses conséquences. Ce Plan reposait, pour tester sa cohérence, sur un modèle implicite, sans modélisation macroéconomique explicite. Il a fallu attendre le VIe Plan (1971-1975) pour que le modèle sous-jacent à l’exercice de planification soit explicité. Ce fut l’heure du modèle fifi (pour « physico-financier), qui a eu pour principale vertu d’imposer dans le débat économique français le clivage devenu canonique entre les secteurs exposés à la concurrence internationale (obligés de s’aligner sur les prix internationaux, donc « preneurs » de prix) et les secteurs abrités (« faiseurs » de prix). Avec l’essor de la mondialisation, les secteurs exposés ont gagné du terrain sur les secteurs abrités.
14Le VIe Plan avait donc opéré un saut qualitatif de taille dans l’utilisation de la prévision macroéconomique de moyen-long terme. Pour des raisons qui n’ont rien à voir avec la nature du modèle fifi, ce Plan est rapidement devenu non pertinent, sous l’effet conjugué de l’ouverture croissante de l’économie (la mondialisation), de la mort du système de Bretton Woods (1971-1973) et du premier choc pétrolier (1973-1974). Du coup, pour le VIIe Plan (1976-1980), la modélisation de référence a été moins explicite qu’avec le modèle fifi. Un modèle STAR (schéma théorique d’accumulation et de répartition) a servi alors à opérer la jonction entre les exercices de prévision à court-terme (pour les budgets économiques) et la prévision de long terme.
15Devant la multiplication des aléas et des chocs d’origine extérieure, il a fallu se résoudre à accorder moins de poids aux prévisions découlant de modèles économétriques détaillés. Même pour la démographie, l’un des rares domaines permettant habituellement des prévisions fiables à moyen-long terme, il a fallu constater des erreurs de prévision dues à l’instabilité des taux de fécondité ou à l’incertaine prévisibilité des soldes migratoires.
16D’où le recours croissant de tous les opérateurs, publics ou privés, à des scénarios plutôt qu’à des prévisions. La démarche par scénarios est exigeante, car elle nécessite de bien identifier et de bien contraster les futurs possibles, et car elle requiert une approche pluridisciplinaire dans laquelle l’analyse économique n’est que l’une des portes d’entrée à considérer. Ce passage de la prévision à une problématique de scénarios s’accélère dans les années 1970 et 1980. Il est quasiment officialisé par la crise financière enclenchée en 2007-2008, qui a sonné le glas de ce qui restait de solide dans la prévision macroéconométrique usuelle.
L’impossible anticipation des ruptures technologiques
17Sur des horizons de cinq à dix ans, interviennent des ruptures et des bifurcations technologiques qu’il est très difficile de prévoir. Cela pèse sur toute planification et programmation publiques tout autant que sur la planification des entreprises. On en rencontre aujourd’hui une illustration majeure, avec la transition énergétique et écologique. Cette transition repose sur l’articulation entre des technologies et des comportements, et les ruptures technologiques (dans les énergies renouvelables, dans la capture et la gestion des déchets nucléaires…) sont encore plus difficiles à prévoir que les modifications dans les comportements. De manière transversale, qui, avant leur arrivée et leur essor, avait vraiment anticipé l’impact d’Internet, de la blockchain, de l’IA ou de ChatGPT ? Pourtant, dans l’approche par scénarios qui, comme indiqué, a supplanté la prévision au sens strict, il faut imaginer les chemins technologiques possibles lors de l’exercice de projection dans le futur. Pour avoir présidé en 2005-2006 la commission facteur 4 chargée de se préoccuper de la neutralité carbone pour la France à l’horizon 2050, je me souviens des divergences entre experts à propos du devenir de la voiture électrique. Des débats qui restent d’actualité, alimentés par l’extrême difficulté à anticiper les sauts technologiques.
Cycle électoral et court-termisme
18En regardant dans le rétroviseur, on se rend compte que chaque nouveau président de la République et chaque nouveau gouvernement prétendent, à la différence de leurs prédécesseurs, se projeter dans le long terme, mais que très vite les échéances électorales et les circonstances les amènent à gérer le court terme. Le tempo des élections est essentiel ; il fournit à la démocratie son espace de respiration. Derrière l’articulation court-terme/long terme se joue le sort des réformes structurelles, qui requièrent, elles, un temps long. Il appartient aux entreprises comme à l’État de mieux articuler les différents horizons temporels concernés. Telle était l’ambition, aux États-Unis au milieu des années 1960, du « Planning programming budgeting system » appliqué par Robert McNamara au ministère de la Défense. On ne va pas ressusciter le PPBS américain, mais le défi que cette approche cherchait à relever est encore devant nous, nécessitant de combiner le courage politique et la bonne méthodologie.
Le Plan et l’organisation de l’espace économique et social
19Le Plan indicatif à la française a été, dès le Plan Monnet, l’espace privilégié pour organiser la concertation entre les partenaires sociaux. Il a été également le moteur de l’organisation de l’espace économique via la politique d’aménagement du territoire.
L’esprit du Plan au service de la concertation
20Tout de suite après la Seconde Guerre mondiale, l’administration de mission qu’était le Commissariat général du Plan a structuré le dialogue social entre les syndicats de salariés, le patronat, les administrations, des personnalités qualifiées… C’était, avec le Conseil économique et social créé en 1946 et devenu plus récemment Conseil économique, social et environnemental, l’un des rares lieux où les uns et les autres, tout en représentant des groupes d’intérêt, acceptaient de dépasser leurs divergences le temps de discuter de l’avenir à moyen terme du pays.
21Ce que j’appelle à nouveau, mais sous un autre angle, l’esprit du Plan a été symbolisé dans le rôle joué par les Commissions et Comités réunis à l’initiative de la rue de Martignac. En tant qu’économiste, j’ai participé aux Comités de financement de plusieurs Plans des années 1970 et du début des années 1980, et je veux témoigner de l’ouverture et de la qualité des débats, ainsi que de la valeur ajoutée des rapports publiés.
22L’esprit du Plan n’est pas mort avec la planification indicative. La concertation a désormais lieu entre les « parties prenantes », une notion plus large que les partenaires sociaux puisqu’elle ajoute à ces derniers toutes les composantes de la vie des entreprises (y compris donc les clients-consommateurs, l’État et les collectivités territoriales, dans certains cas des ONG…). Les conseils des parties prenantes, les comités de mission mis en place depuis la loi Pacte de 2019 dans les entreprises ayant choisi de devenir sociétés à mission, sont à mes yeux les héritiers de la planification à la française pour le dialogue social et sociétal.
Renouveau nécessaire de la politique d’aménagement du territoire
23Même si la dimension territoriale du développement économique est présente dès le Plan Monnet, c’est le IVe Plan (1962-1965) qui consacre une place éminente à l’aménagement du territoire. En 1964, sous l’impulsion coordonnée de la DATAR et du Plan, sont désignées huit « métropoles d’équilibre » censées faire contrepoids face à l’essor de l’agglomération parisienne. En 1973, cinq grandes villes sont « assimilées » et adjointes à la liste précédente, mais tout ce bel édifice est mis en sommeil à partir de 1974, vu la nécessité de faire face au premier choc pétrolier par des mesures macroéconomiques plutôt que locales ou territoriales. Même si la DATAR va demeurer active et imaginative, la politique d’aménagement du territoire en France connaîtra alors un recul parallèle au déclin de la planification indicative nationale.
24Durant les années 1960, c’est-à-dire pendant cette période où Plan et DATAR coopèrent étroitement et efficacement, la politique d’aménagement du territoire vise à la fois à lutter contre « le désert français » dénoncé dès 1947 par Jean-François Gravier et contre la concentration excessive sur Paris. Outre les métropoles d’équilibre » déjà citées, cette politique s’appuie sur les externalités positives engendrées par les infrastructures (autoroutes, transports, éducation, santé…) pour favoriser la localisation des entreprises et de la population dans certains territoires. Sous cet angle, la politique des pôles de compétitivité mise en œuvre à partir de 2004 est dans la ligne des initiatives des années 1960, puisque cette politique privilégie la création d’externalités positives, cette fois-ci grâce à l’innovation, à la R&D et aux liens universités-entreprises.
25Depuis le Covid, nous avons vu croître ce que j’appelle « une demande de proximité » : les citoyens se tournent davantage vers leur environnement immédiat, qu’il s’agisse de production, de consommation, de loisirs…Comme le suggère la dialectique local/global, cette demande de proximité, proximité géographique bien sûr mais aussi proximité sociale, culturelle etc., est catalysée par certains effets non désirés de la mondialisation ; de manière presque paradoxale, elle n’est pas atténuée par les nouvelles technologies de la communication, loin de là.
26Face à cette demande croissante pour la proximité, l’offre de proximité ne suit pas. Elle ne sera à la hauteur des besoins exprimés ou attendus que si nous arrivons à mener en France une véritable décentralisation des pouvoirs et des moyens financiers et si, avec un peu d’imagination et beaucoup de courage politique, nous arrivons à réinventer la politique d’aménagement du territoire.
27Le Plan Monnet a su créer la rupture et promouvoir le redressement. Le choix dans ce Plan de privilégier six secteurs de base afin d’éviter le saupoudrage a permis de combiner la gestion du temps mais aussi celle de l’espace, car ces secteurs privilégiés s’inscrivaient dans des territoires déterminés. À nos décideurs publics de relever un défi qui, dans un contexte évidemment différent, nécessite d’articuler à nouveau la projection des activités dans le temps et leur inscription dans l’espace des territoires et de la proximité.
Auteur
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.
Christian de Boissieu, vice-président du Cercle des économistes et professeur émérite à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, agrégé des facultés de droit et de sciences économiques, fut président du Conseil d’analyse économique (CAE), ainsi que membre de la Commission Attali, de la Commission du Grand Emprunt, et du Collège de l’Autorité des marchés financiers. Parmi ses publications récentes : Le patriotisme économique a-t-il un sens aujourd’hui ? Ou la mondialisation en question (dir. avec Dominique Chesneau, éd. Maxima Laurent du Mesnil, 2020), Les 100 mots de la politique monétaire (PUF, 2020).

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