Chapitre IX. Trajectoires-type après la désunion
p. 187-202
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Texte intégral
1Les chapitres précédents ont permis de mettre en évidence l’importante hétérogénéité des situations après une rupture conjugale. De cette lecture quantitative émergent plusieurs facteurs qui orientent, et semblent même presque façonner des trajectoires particulières, ainsi que des tissus relationnels ou des réseaux de sociabilité et de soutien assez typiques : le sexe du parent gardien, son âge, et son milieu social. Au premier facteur correspondent manifestement des attitudes et des stratégies différentes à l’égard de la recomposition ou des nouvelles unions, ou si l’on veut à l’égard de la « parentalité solitaire ». En effet, qu’ils soient ou non parents gardiens, les hommes envisagent, semble-t-il, plus systématiquement et beaucoup plus rapidement une nouvelle union. Les femmes, presque toujours mères gardiennes, demeurent plus fréquemment en situation monoparentale, par choix, par crainte des implications d’une nouvelle rencontre, ou par contrainte. Elles sont aussi plus nombreuses à vivre des situations conjugales sans cohabitation, maintenant ainsi leur nouveau partenaire à distance, pour préserver leurs enfants et/ou une autonomie souvent difficilement (re)conquise, ou dans l’attente de former une nouvelle famille.
2Le second facteur, l’âge, joue un rôle d’autant plus significatif qu’il renvoie plus globalement au temps qui s’écoule1. Évoquer l’âge et ses effets, c’est aussi bien tenir compte de l’âge au mariage, de l’âge lors de la rupture, de l’âge au moment de la nouvelle rencontre, ou encore du temps écoulé depuis la désunion. Ce peut être aussi prendre en considération l’âge des enfants ; le temps en un mot ; un temps qui définit des horizons conjugaux variables. En effet, on n’envisage évidemment pas dans les mêmes termes une rupture conjugale ou une nouvelle union, à vingt, trente, quarante ou cinquante ans. On ne projette pas les mêmes choses, on n’aspire pas au même devenir. On n’a pas non plus les mêmes opportunités, les mêmes contacts, etc.
3Troisième facteur, enfin, l’appartenance sociale, qui recouvre à la fois des pratiques culturelles, des valeurs, des repères normatifs différents et, nous l’avons amplement souligné, des modes de sociabilité, des types de réseaux nettement caractérisés et des soutiens variables. Aux milieux faiblement diplômés, les réseaux serrés et denses, principalement composés de membres de la famille. Aux milieux fortement diplômés, les réseaux larges d’amis et de collègues et le soutien plus systématique et plus intense des proches. Ces pratiques culturelles s’expriment aussi dans l’idée que chacun se fait du couple, de ce qui le fonde, de la division des rôles des sexes, etc.
4Dans ce chapitre, nous proposons une autre lecture de ces trajectoires, construite à l’aide de procédures statistiques adaptées : l’analyse factorielle de correspondance et l’analyse typologique. Dans les deux cas, nous avons sélectionné un certain nombre de variables, dépendantes et indépendantes, de façon à limiter le nombre de modalités à manipuler2. Nous avons ainsi repéré six catégories de trajectoires, qui regroupent la totalité des 321 individus qui ont répondu à l’ensemble des items de nos deux enquêtes postales. Nous présentons pour chaque catégorie quelques cas exemplaires.
Des mères seules actives : une autonomie relative mais précieuse
5La première catégorie, qui regroupe près de la moitié de notre échantillon (47 %, soit 152 personnes), est composée essentiellement de femmes de la quarantaine, actives, moyennement diplômées, ayant connu une rupture après peu de temps de vie de couple et vivant depuis de nombreuses années (souvent depuis plus de dix ans) en situation monoparentale, avec des enfants pré-adolescents ou adolescents, parfois aussi avec une relation conjugale non cohabitante. Ces femmes bénéficient généralement d’un important soutien familial, les rapports avec l’ex-conjoint étant en revanche limités au cadre strict prévu par le jugement de divorce. Dans ce groupe, la recomposition est rare ; les résistances, les craintes ou les réserves étant nombreuses. Ceci ne compromet pas nécessairement tout projet matrimonial, mais l’entrave sérieusement. La priorité semble être de ne pas perdre l’indépendance parfois chèrement acquise, suite à la désunion.
Cas 1 :
Madame André a trente-huit ans en 1990. Ses parents, ouvriers l’un et l’autre, ont élevé cinq enfants. Ils se sont séparés ; son père vit seul et sa mère est remariée. Madame André se marie en 1978 avec un homme légèrement plus jeune qu’elle, fils d’agriculteur, sans aucun diplôme, et employé de commerce. Elle a alors vingt-cinq ans. Ils ont ensemble une fille l’année suivante. Ils se séparent en 1985. « Mésentente due aux trop grandes différences de caractère et surtout, aucune (ou trop peu) d’affinités, tant intellectuelles que physiques ». Son ex-conjoint, qui a conservé le logement du couple, cohabite avec une nouvelle partenaire sans enfant. Les rapports sont plutôt mauvais et se limitent à ce qui concerne l’enfant et au versement de la pension alimentaire. Madame André reste seule.
Avant son mariage, elle a passé un BTS de secrétariat. Elle occupe un poste de secrétaire dans un bureau d’études. Ses ressources mensuelles s’élèvent à 6 600 francs, principalement composées de son salaire. En 1990, quatre années se sont écoulées depuis la rupture. Le divorce a été prononcé par consentement mutuel deux ans auparavant. Madame André est toujours sans partenaire. « Je n’éprouve pas le besoin de me remarier et préfère rester dans la situation où je me trouve actuellement ». Sa fille a onze ans. Madame André a suivi une formation complémentaire en informatique et gestion administrative. Elle occupe toujours un poste de secrétaire pour un salaire de 5 700 francs. Son ex-conjoint verse irrégulièrement une pension de 200 francs et exerce son droit de visite tous les quinze jours. Elle considère donc qu’il fait toujours partie de la famille « parce qu’il a conservé de bonnes relations avec sa fille, même s’il se contente seulement d’exercer son droit de visite ».
La famille, parents et fratrie, réside à une vingtaine de kilomètres. Leurs rencontres sont très fréquentes. Même sans avoir eu besoin de solliciter leur soutien, ceux-ci l’ont aidée au niveau de la garde de sa petite. Madame André compte également trois amis proches, qu’elle avait déjà avant sa rupture. Ses relations familiales fréquentes avant la rupture, et ses faibles relations amicales sont demeurées sensiblement identiques après, ce qui fait qu’elle estime avoir un tissu de relations restreint à dominante familiale.
Cas 2 :
Madame Bertrand a quarante-cinq ans en 1990. Née dans une famille de cinq enfants, elle a perdu sa mère alors qu’elle avait sept ans. Son père, directeur commercial s’est remarié presque aussitôt. Lors de la première enquête, Madame Bertrand n’a plus ses parents. Elle se marie à dix-neuf ans, avec un homme légèrement plus âgé, pupille de l’assistance publique qui, après son baccalauréat, est employé comme éducateur dans un centre social. Ils ont trois enfants, deux filles en 1965 et 1967, et un garçon en 1969. Ils se séparent en 1972, après huit années de vie de couple. « Il a rencontré une autre femme ». Le divorce par « demandé/accepté » est prononcé huit mois plus tard. Son ex-conjoint se remarie et a d’autres enfants. Leurs relations cessent totalement.
Madame Bertrand avait arrêté ses études avant son mariage. Elle entreprend donc de passer son baccalauréat et fait des études d’infirmière après le divorce, de vingt-six à trente et un ans. En 1987, lors de la première enquête, elle exerce comme infirmière hospitalière, pour un salaire de 7 500 francs. Elle perçoit également une pension alimentaire de 1 200 francs, ses ressources variant entre 11 et 12 000 francs par mois. Les trois enfants ont poursuivi leurs études, l’un est en faculté de lettres, l’autre de médecine, et le dernier finit ses études secondaires. Après de nombreux déménagements, Madame Bertrand emprunte pour accéder à la propriété d’une maison de cinq pièces.
En 1990, les enfants, tous majeurs, résident toujours avec leur mère. Celle-ci n’a toujours pas de partenaire et vit donc en situation monoparentale depuis près de dix-neuf ans. Elle n’a pas de projets conjugaux : « J’aime mon indépendance ». Les ressources de Madame Bertrand se sont améliorés : un salaire de 9 500 francs et des bourses pour les études de ses enfants, soit 14 000 francs par mois. En revanche, son ex-conjoint au chômage depuis trois ans, ne verse plus de pension. Le contact est totalement rompu. Il ne voit même plus ses enfants. « Mon ex-mari a tiré, tout comme moi, un trait sur son mariage. De plus, nos lieux d’habitation sont éloignés ». Il ne fait donc plus partie de la famille.
Le réseau de Madame Bertrand est également très limité, puisque ses parents sont décédés, et que le plus proche de ses frères et sœurs réside à 400 kilomètres. Pour autant, lors de la rupture, la famille a été une source de support : essentiellement sur le plan financier, ou pour fournir des garanties de caution lors de l’achat du logement. Madame Bertrand dit n’avoir aucun ami intime. « Je me confie facilement avec des collègues ou des “clients malades”. Je n’ai aucun ami(e) spécial et ne reçois pas chez moi, sauf exception ». Elle est donc, en réalité assez isolée, quoique bien entourée encore par ses enfants adultes. Mais cet isolement relatif est, selon elle, largement compensé par son activité et correspond à ses aspirations : « Je suis très indépendante. Et puis mon travail m’amène à rencontrer beaucoup de monde, environ 2 000 personnes différentes par an ». La trajectoire de Madame Bertrand à la suite de son divorce, et, en particulier, sa réussite professionnelle, font qu’elle considère que cette rupture lui a plutôt permis de développer son autonomie.
Cas 3 :
Madame Jean a quarante-deux ans lors de notre seconde enquête. Issue d’une famille de commerçants de six enfants, elle a un niveau baccalauréat. Elle se marie en 1968, l’année de ses vingt ans, avec un homme légèrement plus âgé, de milieu modeste, qui après ses études secondaires trouve un emploi de chargé d’études. En 1973, naît une petite fille trisomique. Cette naissance bouleverse l’équilibre du couple. Deux ans plus tard, ils sont séparés : « Suite à la naissance d’une enfant handicapée trisomique, mon mari a refusé celte petite fille et nous a abandonné sans nous donner aucune nouvelle ». Aucune procédure n’est engagée.
En 1987, Madame Jean signale que les contacts avec son ex-conjoint sont très réduits, celui-ci étant parti à l’étranger. Les relations avec sa belle-famille ont cessé dès la rupture. Elle vit seule. Suite à la séparation, elle a ouvert un commerce. Ses ressources sont cependant assez modestes : 6 000 francs par mois. Trois ans plus tard, le divorce a été prononcé selon une procédure de « demandé/accepté ». Près de quinze ans se sont écoulés depuis la séparation. L’enfant a seize ans. « J’ai acquis une certaine indépendance, nous dit Madame Jean, et aurais certainement du mal à revivre complètement avec quelqu’un. De plus, je n’ai pas trouvé une personne avec qui je puisse “repartir” dans un mariage ». Ses ressources n’ont guère évolué. Toutefois, Madame Jean perçoit désormais une pension alimentaire de 1 200 francs par mois, mais son ex-conjoint ne rencontre jamais son enfant, qu’il ne connaît pour ainsi dire pas. « Il ne fait plus partie de la famille. Nous n’avons aucune relation. Je ne sais pas ce qu’il devient. Il refuse de rencontrer sa fille qu’il ne connaît pas ».
Madame Jean voit régulièrement sa famille (ses parents, environ une fois par mois et le plus proche de ses frères et sœurs, deux fois par mois). Ils résident à une vingtaine de kilomètres. Sa famille a été une source de soutien dès la rupture. Madame Jean n’a d’ailleurs pas hésité à faire appel à eux, que ce soit au niveau financier ou pour l’enfant. Elle considère avoir trois amis intimes, des proches sur lesquels compter en cas de besoin, mais ceux-ci sont un peu éloignés, du fait que Madame Jean a déménagé après sa rupture. En somme, les relations familiales, fréquentes avant la rupture, le sont demeurées ensuite. Les relations amicales, peu développées, n’ont guère évolué non plus. Madame Jean considère donc qu’elle est intégrée dans un tissu restreint de relations, à dominante familiale.
Cas 4 :
Madame Leclerc a eu quarante ans en 1990. Issue d’une famille de quatre enfants, de milieu modeste (le père, chef de chantier, et la mère au foyer), elle arrête ses études après un CAP de secrétariat. Elle se marie à vingt ans avec un homme, de deux ans son aîné. Il a un CAP et occupe un emploi de « conducteur d’installation ». Ils ont deux enfants, une fille en 1972, et un garçon, en 1976. Ils se séparent en 1985, après quatorze ans de vie maritale, pour « mésentente ». Le divorce est prononcé six mois plus tard, selon une formule de « demandé/accepté ». Madame Leclerc ne sait pratiquement rien de ce qu’est devenu son ex-conjoint. Leurs contacts sont rares, exclusivement liés aux enfants, et plutôt conflictuels. L’ex-conjoint verse régulièrement la pension alimentaire de 1 200 francs pour les deux enfants. En revanche, Madame Leclerc n’a plus aucun contact avec sa belle-famille.
En 1987, elle signale avoir un partenaire non-cohabitant et souhaiter revivre en couple. Elle a conservé l’emploi qu’elle occupait avant la rupture : un poste d’employée de bureau, pour un salaire mensuel de 5 000 francs. Au total, elle dispose de 7 300 francs de ressources mensuelles. En 1990, cinq ans après la rupture, la situation n’a guère évolué. Madame Leclerc a toujours le même partenaire non-cohabitant depuis près de quatre ans désormais. Ils se rencontrent tous les week-ends. Celui-ci est de seize ans plus âgé. Il occupe un poste d’ingénieur, est lui-même séparé avec trois enfants qui ne sont pas à sa charge. Leur choix est liée à leur expérience respective passée : « Malgré notre bonne entente, après un divorce pour moi et une séparation pour lui, je crois que l’on réfléchit plus ». Ce nouveau partenaire est bien intégré dans la famille de Madame Leclerc.
Ses deux enfants de dix-sept et treize ans vivent toujours avec elle. Elle a également conservé le même emploi. Si salaire et pension ont légèrement augmenté, le total des ressources disponibles est le même. L’ex-conjoint de Madame Leclerc verse régulièrement les pensions alimentaires, exerce régulièrement son droit de visite et rencontre effectivement ses enfants tous les quinze jours. Pour autant, elle considère qu’il ne fait plus partie de la famille. Madame Leclerc réside à 3 kilomètres de ses parents et les rencontre tous les quinze jours au moins. Le plus proche de ses frères et sœurs est à 2 kilomètres et les rencontres sont presque aussi fréquentes. Dès la rupture, Madame Leclerc a reçu soutien matériel et affectif de ses parents. Elle considère également avoir conservé les relations amicales qu’elle avait avant la rupture et compte quatre proches. Globalement les fréquentes relations familiales et les quelques relations amicales n’ont guère évolué après la rupture et Madame Leclerc considère donc que sa sociabilité est principalement familiale.
Cas 5 :
Madame Aurel a quarante-quatre ans en 1990. Née dans une famille de deux enfants, dont le père, aujourd’hui décédé, était officier, et la mère, secrétaire, elle commence des études de psychologie. Elle se marie à 23 ans. De deux ans son aîné, son conjoint, fils de commerçant, est éducateur. Ils ont ensemble deux enfants, en 1971 et 1974. Leur union est très brève, puisqu’ils se séparent en 1976, après à peine sept ans de vie de couple, et divorcent un an plus tard par consentement mutuel. L’ex-conjoint se remariera par la suite avec une femme qui a elle aussi connu une rupture avec des enfants d’une première union, et ils auront ensemble de nouveaux enfants. Les rapports de Madame Aurel avec son ex-conjoint sont plutôt médiocres et limités à ce qui concerne les enfants.
Après une formation complémentaire en thérapie familiale, Madame Aurel obtient un poste de chef de service éducatif. Suite à la rupture, elle conserve le logement, qu’elle entreprend d’acheter par la suite. À son salaire de 10 000 francs, s’ajoutent 700 francs d’allocations familiales, et les 800 francs que lui verse très irrégulièrement son ex-conjoint. L’année qui suit son divorce, elle rencontre dans le cadre de son activité professionnelle un homme plus jeune de trois ans, célibataire sans enfant et responsable d’un établissement éducatif, avec lequel elle établit une relation conjugale sans cohabitation.
Lors de notre seconde enquête en 1990, Madame Aurel a donné naissance à un troisième enfant issu de sa relation non cohabitante, qui dure désormais depuis plus de douze ans. Malgré cette naissance, Madame Aurel affirme ne pas avoir de projet matrimonial, ni même de cohabitation. « Nous n’avons pas assez d’intérêt commun ». Prime encore « l’indépendance que donnent les logements séparés et la gestion indépendante des budgets ». Les ressources de Madame Aurel ont légèrement augmenté : 13 300 francs par mois, pour l’essentiel constitué de son salaire de 11 000 francs et des allocations familiales. En revanche, l’ex-conjoint refuse de verser les pensions alimentaires et ne rencontre plus ses enfants (de seize et dix-neuf ans) qu’épisodiquement (moins d’une fois par mois).
Malgré la centaine de kilomètres qui la sépare de ses parents, Madame Aurel les voit à peu près toutes les semaines. Si ceux-ci ont d’abord désapprouvé son divorce, ils se sont néanmoins montrés aidants. Ils ont accueilli également avec beaucoup de réserve sa nouvelle relation. Madame Aurel n’a pas conservé les amis qu’elle fréquentait avant sa rupture. Son réseau amical s’est considérablement appauvri par la suite. Elle considère n’avoir qu’un ou deux intimes et de nombreux collègues-amis. C’est pourquoi elle estime être intégrée dans un tissu de relation restreint et à dominante familiale.
Précaires et dépendantes
6Cette seconde catégorie regroupe 59 parents gardiens (18 % de notre population). Elle est composée essentiellement de femmes de la quarantaine en situation monoparentale, séparées depuis relativement peu de temps, peu entourées par leur famille et en situation de précarité économique, voire de dépendance à l’égard de leur ex-conjoint et/ou du secteur social. Ces mères gardiennes, faiblement diplômées, souvent croyantes, éprouvent de sérieuses difficultés pour dépasser une rupture intervenue après une longue vie de couple (de 10 à 20 ans). Outre le fait qu’elles sont d’origine modeste, la précarité est liée pour certaines au fait qu’elles n’ont pas travaillé depuis longtemps ; pour d’autres, actives, à la faiblesse de leurs revenus. Les enfants nés de ces unions sont aujourd’hui adolescents ou majeurs. Ces mères seules maintiennent le plus souvent des rapports avec leur ex-conjoint. En revanche, elles sont assez éloignées de leurs propres parents, les rencontrent rarement (une fois par mois, voire quelques fois par an) et ne leur ont jamais demandé d’aide. Au moment de la rupture, ceux-ci se sont d’ailleurs montrés relativement indifférents. Leurs relations ont donc plutôt eu tendance à diminuer depuis la rupture. Ces personnes se sentent relativement isolées, avec quelques rares proches autour d’eux, plutôt des amis, quelquefois découverts après la rupture.
Cas 6 :
Mme Jasmin a quarante-sept ans en 1990. Elle est née dans une petite commune de la Manche d’un père et d’une mère agriculteurs. Elle a trois frères et sœurs. Aujourd’hui, son père vit seul et sa mère est décédée. Elle le rencontre plutôt rarement et ne lui demande jamais aucune aide particulière, même si leurs rapports sont « plutôt bons ». Mme Jasmin a passé un certificat d’étude primaire. Elle est croyante, mais non pratiquante. Elle réside aujourd’hui dans un petit bourg du Calvados. Elle se marie en 1968 avec un homme dont les parents sont également agriculteurs. Il est plus jeune de quatre ans et plus diplômé. Il a un BEPC et a gravi les échelons qui l’ont conduit à exercer une fonction de directeur d’un foyer d’handicapés mentaux. Il est également maire de sa commune. Ils ont ensemble deux filles (en 1969 et 1973) et un garçon (en 1971). Après quinze ans de mariage, son conjoint la quitte pour une femme de douze ans plus jeune qu’elle. Celle-ci a des enfants d’une précédente union. Le divorce intervient trois ans plus tard, avec une procédure d’appel pour litige sur le montant de la prestation compensatoire.
Depuis leur rupture, Mme Jasmin n’a pratiquement plus de contact avec sa belle-famille, et les rapports avec son ex-conjoint sont limités au minimum nécessaire, c’est-à-dire aux décisions concernant les enfants. Mme Jasmin n’a jamais travaillé durant ces quinze années de vie conjugale. Après la rupture, elle entreprend donc un stage « retravailler ». Elle a conscience des difficultés qui sont les siennes sur le marché du travail, et éprouve de surcroît des problèmes de santé qui en limitent encore l’accès. Elle vit donc avec 7 500 francs par mois, composés d’allocations, des pensions alimentaires et de la prestation compensatoire. Mme Jasmin a conservé la maison que le couple avait acquis en commun.
Lors de la seconde enquête, les enfants ont entre seize et vingt et un ans. La plus âgée est inscrite à l’université. Mme Jasmin signale avoir fait une rencontre dans les trois années qui ont séparé les deux enquêtes, relation éphémère qui a abouti à une nouvelle rupture. Elle s’inquiète de son avenir : « C’est très difficile de reprendre une vie commune après six ans de séparation, et avec des grands enfants, ce n’est pas évident. » Elle n’a toujours pas d’emploi. Ses ressources ont légèrement diminué, même si l’ex-conjoint continue de verser régulièrement une pension alimentaire de 1 400 francs par enfant. Celui-ci rencontre ses enfants tous les quinze jours. En revanche, comme le précise Mme Jasmin, « on ne se parle pas, sauf cas grave au sujet des enfants ».
Elle ne rencontre son père, qui réside à 35 kilomètres, que quatre ou cinq fois par an. Elle voit moins encore ses frères et sœurs, qui sont pourtant assez peu éloignés. Lors de la rupture, sa famille a plutôt désapprouvé et refusé cette séparation, ou s’est montrée indifférente. Mme Jasmin ne leur a donc jamais demandé d’aide, et n’en a reçu aucune. En revanche, elle dit avoir conservé les amis qu’elle avait avant la rupture. Pour autant, elle ne compte que deux amis intimes ou proches, qui l’ont aidé lors de sa séparation. Mme Jasmin se sent donc relativement isolée. Ses relations familiales sont faibles, notamment du fait de la désapprobation dont elle se sent la cible. Quant aux relations amicales, si celles-ci se sont légèrement renouvelées après la rupture, Mme Jasmin fait le constat que ce sont des relations éphémères. Seules ses deux proches, amis de toujours, sont restés.
Cas 7 :
Mme Pesnel a quarante-trois ans en 1990. D’origine très modeste,-son père, décédé, était cantonnier et ouvrier agricole ; sa mère, sans profession a élevé cinq enfants, et vit seule-, elle occupe une place de concierge. Mme Pesnel a le certificat d’étude primaire. Elle est croyante et pratiquante. Elle se marie en 1968 avec un assureur, dont le père était chauffeur routier. Il a sensiblement le même âge qu’elle, et le même niveau d’étude. Ils ont eu deux enfants ensemble, un garçon en 1969 et une fille, quatre ans plus tard. Ils se séparent en 1984, après seize ans de vie conjugale, pour cause d’adultère du mari. Pour autant, aucune procédure n’est engagée, et Mme Pesnel dit avoir conservé des relations amicales avec son ex-conjoint, lors de la première enquête en 1987. Celui-ci vit seul. En revanche, les contacts avec la belle-famille se sont nettement distendus. En 1987, les ressources de Mme Pesnel se composent de son salaire de 4 200 francs, de 700 francs d’allocations familiales et de 3 000 francs de pensions alimentaires, soit environ 8 000 francs. Elle est logée à titre gratuit dans un appartement de quatre pièces, qu’elle a conservé avec son travail lors de la rupture. En 1990, les enfants ont respectivement vingt et un et dix-sept ans. Mme Pesnel est toujours seule. Le divorce a été prononcé en 1989, au tort du conjoint. Les ressources de Mme Pesnel ont diminué. Elle ne touche plus que 1 300 francs de pensions alimentaires, soit un total de 6 000 francs. Les rapports avec l’ex-conjoint se sont aussi beaucoup distendus. « Il ne joue plus aucun rôle dans la famille ». Il voit d’ailleurs ses enfants moins d’une fois par mois.
Mme Pesnel rencontre sa mère et l’un ou l’autre de ses frères et sœurs, tous les quinze jours. Ils résident à 25 kilomètres. Ceux-ci s’étant montrés relativement indifférents lors de la rupture, Mme Pesnel ne leur a pas demandé d’aide. Elle dit avoir conservé les amis qu’elle avait avant la rupture, mais n’avoir en fait qu’une amie intime ou proche. Mme Pesnel est donc relativement isolée. Ses relations familiales sont fréquentes, mais source de peu de support, et ses relations amicales sont très réduites.
Cas 8 :
Mme Renaud a quarante-trois ans lors de notre seconde enquête. Elle est née et réside toujours dans de petites communes de la périphérie caennaise. Elle a un certificat d’étude primaire. Son père était artisan mécanicien automobile, sa mère le secondait dans son entreprise. Elle a une sœur. Elle a fait un apprentissage pour devenir coiffeuse, métier qu’elle exerce jusqu’en 1975, avant de se consacrer à sa famille. Elle se marie en 1971 avec un homme de deux ans son aîné. Il a le même niveau d’étude qu’elle, et conduit des poids lourds. Ils ont ensemble deux garçons, en 1971 et en 1973. Ils se séparent en 1981 et divorcent une année plus tard selon une procédure de rupture de vie commune : « Un an après notre mariage, mon mari a exercé de nombreuses scènes de violence à mon égard, lorsqu’il était en état d’ivresse. Il a proféré des menaces de mort à mon égard, abandonné le domicile conjugal plusieurs fois en emportant l’argent du ménage et les allocations familiales. » Madame Renaud obtient la garde de ses enfants et quitte le logement conjugal. Son ex-conjoint se remet en couple avec une femme également séparée, qui élève un enfant de sa précédente union. Les rapports de Mme Renaud avec son ex-conjoint sont limités à ce qui concerne les enfants, et cela se passe plutôt mal. Elle n’a plus aucun contact avec sa belle-famille.
En 1987, Mme Renaud signalait avoir une relation conjugale non cohabitante, sans donner plus de précision. Après sa rupture, Mme Renaud va tenter de retravailler. Elle est inscrite à l’ANPE de 1982 à 1984 et effectue différents stages. Elle vit donc avec de très modestes ressources : 3 500 francs par mois, essentiellement composées d’allocations diverses. Son mari ne versant aucune pension alimentaire, Mme Renaud perçoit l’allocation de soutien familial. En 1990, les enfants ont respectivement dix-sept et dix-neuf ans. Mme Renaud vit seule et ne projette pas de reformer un couple : « Mes enfants sont habitués à vivre seuls avec moi depuis neuf ans, ils ne supporteraient pas un homme qui les commanderaient. Ce serait un sujet de discorde. Je me préoccupe plutôt de leur faire une situation stable. Lorsque je serai seule, pourquoi pas ? » Les ressources du foyer sont toujours très réduites : 1 400 francs de Revenu minimum d’insertion, 830 francs d’allocations de soutien familial, 2 100 francs d’aide personnalisée au logement. Les contacts avec l’ex-conjoint sont totalement rompus.
Mme Renaud a de très fréquents contacts avec ses parents, et même ses grands-parents, qui résident tous à moins de cinq kilomètres. Pour autant, elle nous dit n’avoir jamais eu recours à eux pour lui fournir de l’aide. Ils se sont d’ailleurs montrés indifférents lors de la rupture et n’ont pas proposé leurs services. Elle estime même que ses relations familiales, fréquentes précédemment, ont nettement diminué ensuite : « Je n’aime pas les critiques derrière mon dos », nous dit-elle. Mme Renaud a conservé les amis qu’elle avait avant la séparation et a obtenu leur aide. Elle considère même que ses relations amicales, peu développées durant sa vie de couple se sont développées ensuite. Pour autant, elle ne compte que deux intimes ou amis proches et se sent, somme toute, relativement isolée.
Les divorcés de la cinquantaine, entre isolement et intégration
7Cette catégorie, qui regroupe 28 personnes (8,7 % de notre échantillon), est composée principalement de personnes de plus de cinquante ans, en situation monoparentale, ayant connu (assez récemment) une rupture après une longue vie de couple (plus de quinze ans), le plus souvent isolées (parents décédés, enfants majeurs et abandon de l’ex-conjoint). On y trouve proportionnellement un peu plus d’hommes que dans les autres classes (14 % de pères gardiens contre 7 % en moyenne dans notre population). Deux sous-catégories sont perceptibles : en effet un tiers n’ont aucun diplôme, et un quart ont, au contraire, un niveau supérieur ou égal au baccalauréat. Les enfants sont le plus souvent majeurs. Ils peuvent donc choisir de rencontrer chacun de leurs parents, sans que cela nécessite ou justifie le maintien d’un rapport parental. La plupart de ces parents gardiens considèrent que leur ex-conjoint ne fait plus partie de leur famille. La moitié de ces parents gardiens n’ont plus leurs parents. Pour les autres, les contacts sont relativement rares. Le sentiment global des personnes de cette catégorie varie entre ceux qui se considèrent plutôt isolés (46 %, contre 33 % pour la population globale), et ceux qui estiment avoir un réseau important de relations (25 % contre 17 % globalement). La variable importante est ici manifestement l’âge du parent gardien, qui détermine pour une large part la situation familiale : une vie sans partenaire et sans projet conjugal.
Cas 9 :
Monsieur Ammed a cinquante six ans en 1990, lors de notre seconde enquête. « Enfant de la DDASS », il n’a pas connu ses parents et n’a passé aucun diplôme. Il s’est marié en 1959, à vingt-cinq ans avec une femme de vingt ans, sans diplôme, fille d’un petit fonctionnaire. Les naissances se succèdent rapidement : en 1960, 1962, 1964, 1965 et 1969 ; trois filles et deux garçons. Sa seconde fille décède peu après la naissance. La rupture intervient six ans plus tard, sans que Monsieur Ammed puisse se l’expliquer, nous confie-t-il. Le divorce est prononcé l’année suivante. Monsieur Ammed n’a ensuite plus aucune nouvelle de son ex-épouse.
Il occupe un poste de gardien/portier dans une administration, pour un salaire de 5 000 francs. Avec ses allocations familiales et son allocation logement, ses ressources mensuelles s’élèvent à 5 500 francs. En 1990, Monsieur Ammed est séparé depuis près de six ans. Les enfants ont entre vingt et un et trente ans. Il occupe le même emploi et réside toujours dans un petit pavillon de trois pièces, qu’il loue. En dehors de ses enfants, qui lui rendent encore visite, Monsieur Ammed a très peu de relations : aucune relation familiale, et très peu d’amis, c’est-à-dire quelques collègues de travail. Il se sent donc très isolé et estime même ne pouvoir compter sur personne en cas de « coup dur ».
Cas 10 :
Madame Brière a cinquante et un ans en 1990. Fille d’un cheminot (décédé) et d’une mère au foyer, elle a été élevée avec ses deux frères et sœurs. Après des études supérieures, elle se marie l’année de ses 24 ans, avec un homme du même âge, diplômé du supérieur, fils d’un fonctionnaire d’une mutuelle, et lui-même chargé d’études dans une Direction régionale de l’équipement. Ils ont ensemble cinq enfants, trois garçons, deux filles, en 1964, 67, 68, 70 et 76.
Ils se séparent en 83, après vingt ans de vie de couple, pour la raison suivante : « Mon mari a quitté le domicile conjugal pour « vivre une autre vie » avec une amie d’enfance, retrouvée il y a quatre ans et il a engagé un divorce pour faute ». Il s’installe avec cette femme, qui n’a pas d’enfant. Les rapports de Madame Brière avec son ex-conjoint sont depuis lors quasi-inexistants et très conflictuels. Il en est de même avec sa belle-famille, même si ses enfants les rencontrent encore épisodiquement.
Madame Brière est contrainte de trouver un emploi à la suite de cette rupture. Elle devient ainsi secrétaire comptable à temps partiel dans une association Loi 1901, pour un salaire de 3 500 francs. Son ex-conjoint verse régulièrement 8 500 francs de pensions alimentaires, ce qui permet à Madame Brière de bénéficier mensuellement de 14 500 francs de budget pour le ménage. Elle conserve également le logement du couple, une maison de six pièces. Lors de la première enquête, elle est en cours d’accession à la propriété.
En 1990, quatre de ses enfants vivent encore au foyer. Ils ont entre quatorze et vingt-trois ans. Seul son fils aîné, qui a fait l’École des Mines de Nancy, a pris son autonomie. La procédure de divorce n’a toujours pas abouti, près de sept ans après la rupture. Madame Brière a cependant un rapport beaucoup plus serein avec son ex-mari. Elle considère d’ailleurs qu’il fait encore partie de la famille, et que leurs rapports sont amicaux. Celui-ci rencontre les enfants assez rarement (moins d’une fois par mois). Les ressources de Madame Brière n’ont guère varié : si le montant des pensions alimentaires a diminué, le salaire a augmenté sensiblement d’autant. Madame Brière rencontre sa mère, qui réside à cinq kilomètres, toutes les semaines. Celle-ci, ainsi que la fratrie ont bien accepté la rupture et se sont montrés aidants, notamment au niveau des enfants. Madame Brière a également conservé les amis qu’elle avait avant la rupture et a reçu leur soutien. Elle compte environ dix proches ou intimes, dont la majorité réside dans la même ville, et aucun collègue de travail. À ce titre, Madame Brière estime être intégrée dans plusieurs réseaux, que ses relations familiales se sont plutôt développées depuis la rupture, et que ses relations amicales se sont maintenues à l’identique.
Les divorcées devenues veuves, sans réseau
8Cette catégorie ne regroupe que 13 cas (soit 4 % de notre échantillon). Ils sont cependant très typiques : exclusivement des femmes très peu diplômées, fréquemment inactives, ayant connu une vie de couple relativement brève, suivie d’un long épisode de vie en situation monoparentale. Leur famille s’est le plus souvent montrée indifférente lors de la rupture, et n’a pas apporté de soutien. Mais ces femmes se caractérisent surtout par le fait qu’elles demeurent sans partenaire, quelque soit leur âge, et que toutes ont perdu leur ex-conjoint depuis la rupture. La plupart d’entre elles sont croyantes et pratiquantes. La moitié de ces femmes se sentent isolées, leurs relations familiales et amicales ayant toujours été réduites, que ce soit avant ou après la rupture.
Cas 11 :
Madame Simon a cinquante-sept ans en 1990. Issue d’un milieu modeste (un père artisan plâtrier, une mère laveuse et trois frères et sœurs), elle n’obtient aucun diplôme avant de se marier, en 1955, avec un artisan maçon, lui aussi issu de milieu modeste (un père cantonnier et une mère inactive). Ils ont ensemble sept enfants, presque un chaque année : quatre garçons, trois filles, en 56, 58, 59, 60, 62, 66 et 69. Ils se séparent en 1974, Madame Simon a alors quarante et un ans, et divorcent trois ans plus tard selon une procédure « par faute », pour adultère du mari. Celui-ci se remarie avec une femme elle-même divorcée avec des enfants. Ils auront de nouveaux enfants ensemble. Les rapports de Madame Simon avec son ex-conjoint sont très réduits et nettement conflictuels. Elle maintiendra cependant quelques contacts avec sa belle-famille.
Madame Simon n’a jamais exercé d’activité professionnelle. Elle reçoit en revanche une allocation adulte handicapée et une pension alimentaire de 250 francs pour son dernier enfant. En 1987, ses ressources s’élèvent à 2 750 francs. En 1990, lors de la seconde enquête, le dernier enfant de Madame Simon, qui réside encore avec elle, a vingt et un ans. L’aîné a trente-quatre ans. La plupart d’entre eux travaillent comme employés ou artisans. Son ex-conjoint est décédé. Madame Simon voit encore régulièrement sa mère (son père est décédé), et très rarement ses frères et sœurs, qui sont éloignés. Sa famille s’est toujours montrée indifférente à sa situation conjugale. Elle n’a d’ailleurs jamais demandé ni reçu de soutien de leur part. En dehors de ses enfants, Madame Simon se sent totalement isolée, ses relations familiales ayant toujours été réduites, ainsi que ses relations amicales.
Les jeunes faiblement diplômés, isolés et dépendants
9Cette catégorie regroupe 43 personnes (soit 13,5 % de notre population). Elles sont dans l’ensemble jeunes, (les trois quarts ont la trentaine), voire très jeunes (puisqu’un quart d’entre elles ont moins de 30 ans) ; faiblement diplômées (près des trois quarts ont un niveau inférieur ou égal au CEP ou au CAP, dont 30 % sans aucun diplôme) et fréquemment inactives (45 %). Leur jeune âge indique que les ruptures sont intervenues très tôt (80 % avant 25 ans), après une très brève vie de couple (dans 65 % des cas, moins de trois ans). Dans la moitié des cas, moins de dix ans se sont écoulés depuis la séparation. Ces jeunes parents ont aussi de très jeunes enfants (37 % entre cinq et dix ans, et même près de 30 %, moins de trois ans). La grande majorité de ces parents gardiens (65 %) sont en situation monoparentale depuis plus de trois ans ; un quart ont recomposé une famille (18 % cohabitants, 7 % remariés). Près de 65 % de ces jeunes parents gardiens ont été totalement abandonnés par leur ex-conjoint. Ils ne le considèrent donc pratiquement jamais comme un membre de leur famille, même si les ruptures sont relativement proches. En revanche, ils vivent très près de leur parents (les deux tiers à moins de dix kilomètres) ; 37 % les rencontrent d’ailleurs quotidiennement. Lors de la rupture, ceux-ci se sont montrés le plus souvent aidants, mais aussi fréquemment indifférents. Ces jeunes parents séparés leur ont le plus souvent demandé de l’aide au moment de la rupture. Cette dépendance relative à l’égard du soutien familial fait que la sociabilité de ces parents gardiens est assez limitée et principalement centrée sur le réseau familial.
Cas 12 :
Madame Jeanne est née en 1960. Son père est décédé alors qu’elle n’avait que sept ans. D’une nouvelle union de sa mère, qui est cuisinière, elle aura cinq demi-frères et sœurs. Elle n’a aucun diplôme. Elle se marie à 17 ans avec un jeune garçon de 21 ans, sans diplôme ni formation, chômeur, issu d’une modeste famille d’artisan. Ils ont ensemble trois filles, en 1979,1981 et 1983. Un an plus tard, son mari la quitte pour aller vivre avec une autre. Au départ, leurs relations semblent se maintenir dans de bons termes. Leur divorce est prononcé en 1986 par consentement mutuel. Lors de la première enquête, Madame Jeanne n’a aucun partenaire. Elle est à la recherche d’un emploi. Elle n’a travaillé qu’une fois dans un atelier de couture. Ses ressources sont très faibles : 3 000 francs par mois, dont une allocation mensuelle de la DDASS, une aide personnalisée au logement, un complément familial et des allocations familiales. Elle touche alors également, quoiqu’irrégulièrement, 900 francs de pension alimentaire.
Trois ans plus tard, (ses enfants ont entre sept et onze ans), Madame Jeanne est toujours seule. « J’ai tenté de retrouver une vie de couple, mais cette expérience s’est soldée par un échec. Cela a eu pour conséquence de me rendre très prudente quant à une nouvelle union ». Elle est inscrite à un stage rémunéré d’insertion et de remise à niveau. Elle perçoit également le Revenu minimum d’insertion et dispose de près de 4 000 francs de ressources mensuelles. En revanche, tout contact avec son ex-conjoint est rompu. Celui-ci, insolvable, ne verse aucune pension, et ne rencontre plus jamais ses enfants : « Il a coupé tous les liens avec ses trois enfants ».
Madame Jeanne rencontre ses parents, qui demeurent à trois kilomètres, toutes les semaines. Ceux-ci l’ont aidé au moment de la rupture, que ce soit sur le plan financier ou au niveau des enfants. Madame Jeanne a également perdu les relations amicales qu’elle avait avant sa rupture. « J’ai eu envie de rompre avec tout ce qui me rappelait mon mariage et mon ex-mari ». Elle compte trois personnes proches, qui l’ont aidé à différentes occasions. Elle est donc relativement isolée, ou intégrée à un tissu de relations à dominante familiale. Ces relations familiales se sont d’ailleurs développées à la suite de la rupture au sens où « mon ex-conjoint n’aimait pas trop la vie de famille et son caractère avait des répercussions sur nos relations familiales et amicales ».
Cas 13 :
Madame Bessin est née en 1960. Elle est issue d’une famille de cinq enfants, dont le père est marin-pêcheur et la mère au foyer. Elle n’a aucun diplôme lorsqu’elle se marie à dix-huit ans avec un jeune homme de vingt-deux ans, lui aussi marin pêcheur et sans diplôme. De leur union naissent deux enfants, en 1979 et 1981. Ils se séparent en 1984. Leur divorce par « demandé/accepté » est prononcé un an et demi plus tard. « Nous n’étions pas faits l’un pour l’autre. Il disait toujours oui partout, alors qu’il n’en pensait pas moins, mais surtout..., il buvait ». Après leur rupture, son ex-conjoint change de métier et travaille aux ponts et chaussée. Leurs rapports sont très conflictuels.
En 1987, lors de la première enquête, Madame Bessin n’a pas de partenaire. Elle réside chez ses parents depuis bientôt trois ans, et recherche un emploi dans le commerce ou comme ouvrière. Sa seule expérience professionnelle a été de servir dans un bar. Elle vit donc avec très peu de ressources : 1 500 francs, dont 800 francs de pensions alimentaires versées irrégulièrement pour ses deux enfants. Trois ans plus tard, elle vit maritalement avec un partenaire qu’elle a rencontré fin 1987 et a eu un enfant de lui. Ils ont d’ailleurs le projet de se marier. Il est célibataire, a sept ans de moins qu’elle, a terminé des études secondaires avant de trouver un poste dans la marine marchande. Madame Bessin est toujours à la recherche d’un emploi. Mais ses ressources sont maintenant stabilisées, grâce aux revenus de son concubin. À cela s’ajoutent 2 200 francs d’allocations diverses et 1 100 francs de pensions alimentaires, qui sont désormais versées régulièrement. L’ex-con-joint de Madame Bessin n’exerce pas son droit de visite. Il ne rencontre même ses enfants que rarement. « Il ne prend ses enfants que quand ça l’arrange et ne se préoccupe jamais de leur bien-être ».
Cette nouvelle famille loue maintenant un logement de quatre pièces. Madame Bessin rencontre quotidiennement ses parents, toutes les semaines, ses grands-parents ainsi que ses frères et sœurs. Ses parents l’ont beaucoup aidé lors de la rupture, d’abord en la logeant, mais aussi financièrement, et au niveau des enfants. Ils ont également progressivement totalement intégré le concubin de leur fille à leur famille. Celui-ci se montre manifestement très présent avec ses belles-filles : « Il aime mes enfants, est agréable à vivre. Il les aide beaucoup dans leurs études et jouent beaucoup avec eux, et les enfants savent qu’il s’entend très bien avec moi. Il est dans la famille comme s’il y avait toujours été ». Madame Bessin a totalement rompu avec les relations qu’elle avait avant sa séparation : « C’était principalement des relations de mon ex-mari ». Elle a plutôt adopté celles de son nouveau partenaire, mais ne compte aucun ami intime. Ses relations amicales n’ont d’ailleurs jamais été très développées. Elle considère donc qu’elle est inscrite dans un tissu de relations restreint et à dominante familiale.
Les jeunes adultes qui recomposent
10Cette catégorie regroupe 26 cas, soit 8 % de notre échantillon. Tous ont la trentaine, sont plus diplômés que la moyenne et actifs. Leur rupture est intervenue après peu d’années de vie de couple, alors qu’ils avaient entre vingt-cinq et trente ans. Ils sont généralement séparés depuis moins de dix ans, avec des enfants jeunes, et souvent même très jeunes, parce qu’issus de nouvelles unions (dans un quart des cas, une naissance a eu lieu entre les deux enquêtes). Car, en effet, cette catégorie regroupe pour une large part les cas de recomposition familiale : moins d’un quart sont demeurés sans partenaire lors des deux enquêtes, alors qu’un sur trois a reformé un couple sans résidence commune, un autre tiers cohabite et un sur six environ est remarié.
11Autre caractéristique : les rapports avec Tex-conjoint sont le plus souvent amicaux, ce qui fait qu’une large majorité de ces parents gardiens le considère comme un membre de la famille. Ces jeunes adultes sont également très entourés par leur parenté. Les parents sont proches et ils les rencontrent très régulièrement (chaque semaine, ou tous les quinze jours). Ils sont aussi une importante source de soutien ; les personnes en question n’hésitant pas à leur demander de l’aide. Une large majorité de ces parents gardiens considèrent qu’ils sont inscrits dans des réseaux riches et diversifiés (famille, amis, collègues, etc.), et que leur sociabilité s’est plutôt accrue depuis leur rupture.
Cas 14 :
Madame Vallé a eu trente-trois ans en 1990. Elle est la fille unique d’un chauffeur routier et d’une ouvrière en confection. Elle a passé un BTS de secrétariat de direction. Elle se marie à vingt-deux ans avec un jeune homme du même âge, d’origine étrangère, dont les parents sont agriculteurs, et qui exerce la profession de gendarme. Ils ont une fille en 1980 et se séparent deux ans plus tard pour « mésentente due à des différences d’origine ». Trois ans s’écoulent encore avant que le divorce soit prononcé. Son ex-conjoint quitte peu après la France pour retourner dans son pays d’origine où il refait sa vie. Malgré l’éloignement, les contacts maintenus sont plutôt bons.
En 1986, Madame Vallé rencontre un partenaire avec lequel elle ne cohabite pas. Il a sept ans de plus qu’elle, est divorcé avec deux enfants à charge, et travaille comme cheminot. Dès le début, les relations de celui-ci avec sa fille sont très bonnes. Celles de Madame Vallé avec les enfants de son nouveau partenaire le sont un peu moins. Après sa rupture, Madame Vallé a recherché un travail. Son BTS lui permet de trouver rapidement un poste de secrétaire, avec un salaire de 7 000 francs. Elle perçoit aussi régulièrement la pension alimentaire de son ex-conjoint, d’un montant de 600 francs et une allocation logement. En 1990, (sa fille a alors neuf ans), Madame Vallé est désormais divorcée et cohabite avec son partenaire et ses deux enfants depuis un peu plus d’un an. Ils n’ont pas pour autant de projet de remariage, notamment, nous dit-elle, pour des questions d’intérêts financiers. Elle gère donc son propre budget de 12 000 francs mensuels environ (8 500 de salaire, 3 000 francs d’allocations diverses, et 750 francs de pension alimentaire). Son ex-conjoint s’acquitte régulièrement de sa pension et rencontre très épisodiquement sa fille, du fait de l’éloignement géographique. Les contacts entre les ex-conjoints sont maintenant très distendus.
Madame Vallé est désormais propriétaire d’une maison de cinq pièces. Elle rencontre très régulièrement (beaucoup plus qu’avant la rupture) ses parents qui résident à vingt kilomètres. Dès la rupture, ceux-ci se sont montrés très aidants (aides financières, aides au niveau de la garde de l’enfant, etc.). Ils ont totalement intégré le nouveau partenaire de leur fille. Celle-ci considère, en revanche, avoir perdu les relations amicales qu’elle avait avant la rupture (sauf une amie proche) et avoir plutôt adopté celles de son nouveau partenaire. Même si elle nous dit : « Je n’ai jamais été très ami-ami », elle estime que son réseau relationnel est assez riche et diversifié.
Cas 15 :
Madame Pinson est née en 1954 dans une famille de trois enfants, dont le père, décédé, était représentant de commerce et la mère vendeuse. Elle passe un BEP de comptabilité, et se marie en 1974 avec un homme du même âge, fils d’artisan, et lui-même agent hospitalier. Ils ont deux garçons en 1976 et 1979. Ils se séparent en 1982, et divorcent deux ans plus tard par consentement mutuel. L’ex-conjoint se remet en couple par la suite. Madame Pinson maintient de très bons rapports avec lui, et même des relations cordiales avec sa nouvelle partenaire, qu’elle rencontre régulièrement. En 1984, elle cohabite elle aussi avec un nouveau partenaire, divorcé avec deux enfants non à charge. Il a quatre ans de plus qu’elle et travaille comme agent technico-commercial. Madame Pinson estime que les relations de son partenaire avec ses enfants, ou ses propres relations avec ceux de son concubin, ou les relations des enfants entre eux sont « plutôt bonnes ». Elle rencontre également régulièrement les parents de ce nouveau partenaire.
Madame Pinson a conservé l’emploi de comptable qu’elle occupait avant la rupture. Elle perçoit un salaire de 5 000 francs par mois, auquel s’ajoutent des allocations (2 300 francs) et les pensions alimentaires d’un montant global de 1 400 francs ; soit 8 700 francs de ressources mensuelles. Elle a conservé également la maison de huit pièces où elle résidait avant sa séparation, et dont elle est propriétaire. En 1988, Madame Pinson perd son deuxième enfant d’une leucémie. Elle se remarie en 1989, sous le régime de la communauté réduite aux acquêts, et donne naissance à une petite fille. Elle continue de travailler comme comptable. Les ressources du foyer s’élèvent désormais à 17 000 francs par mois, son nouveau conjoint étant passé cadre commercial. Madame Pinson touche toujours régulièrement une pension alimentaire de 750 francs. Son ex-conjoint, avec lequel elle a maintenu d’excellents rapports (amitié, confidences, échanges de services, prêt de matériels, gardes imprévues de l’enfant, etc.), assume pleinement, selon elle, son rôle parental. Il rencontre son enfant tous les quinze jours. Et puis, « la perte de notre enfant commun nous a beaucoup rapproché ».
Madame Pinson rencontre toutes les semaines ses parents, qui résident à une dizaine de kilomètres. Lors de la rupture, ceux-ci ont reconnu la nouvelle situation sans aucune ingérence. Madame Pinson ne leur a pas d’emblée demandé d’aide. Mais par la suite, ils l’ont soutenu au niveau de la vie quotidienne. Madame Pinson n’a pas conservé les relations amicales qu’elle avait avant la rupture. Elle estime même avoir moins d’amis qu’avant (elle ne compte d’ailleurs qu’une amie proche), et être intégrée dans un réseau où priment nettement les relations familiales.
***
12Même si cette typologie est constituée de groupes de taille très inégale, elle nous semble bien rendre compte de la disparité des trajectoires post-divorce. Dans une majorité de cas, le divorce, qui intervient dans la vie familiale de femmes d’âge mûr, actives, avec des enfants d’âge scolaire ou pré-adolescents, inaugure une longue phase de monoparentalité. Dans ces trajectoires, l’enjeu semble d’abord celui de l’indépendance. Parce qu’elles sont actives et soucieuses de ne pas traverser d’autres ruptures familiales, ces femmes attachent beaucoup d’importance à leur autonomie, même si parfois cette préoccupation peut engendrer insatisfaction, voire même solitude. La frontière entre indépendance et solitude est d’ailleurs souvent ténue. Mais à choisir, mieux vaut être seule et indépendante, qu’en couple, insatisfaite. Pour elles, la monoparentalité est donc une phase durable, ni véritablement choisie, ni véritablement subie. Tout dépend des périodes et surtout des rencontres. Pour éviter la solitude, nombre d’entre elles développent des relations conjugales sans cohabitation : manière de rompre l’isolat sexuel, sans s’engager ; d’être deux pour le meilleur, sans le pire. La porte est toujours entrouverte, en attendant mieux. Il ne faut donc pas réduire ces situations à une monoparentalité définitive, mais comprendre que la recomposition n’est ici envisageable « qu’à coup sûr », avec prudence ou quand on a trouvé le partenaire quasi-idéal. Mais la possibilité de choix est d’abord le fruit de l’indépendance financière fournie par le travail. En revanche, plus de droit à Terreur pour ces femmes dont « l’horizon temporel conjugal » est réduit, au sens où elles ne peuvent plus s’offrir le luxe d’une nouvelle rupture.
13Pour les autres, l’âge et le milieu social font la différence. Ainsi en est-il pour les femmes faiblement diplômées, sans expérience professionnelle, et dont la vie de couple ne les a nullement préparés à s’assumer de manière indépendante. Pour elles, la rupture produit dépendance et précarité. Il en est de même pour ces femmes divorcées devenues veuves, souvent enserrées dans traditions et solitude. Mais cette dépendance existe aussi pour certains jeunes, prématurément mariés, puis divorcés. À peine se sont-ils engagés dans la constitution d’une famille, que déjà ils doivent faire l’expérience de la désunion, et même de l’abandon de leur premier partenaire. Et pour n’avoir pas, là non plus, les conditions de leur insertion professionnelle et donc de leur autonomie, la rupture engendre, une fois encore, isolement et dépendance.
14Au-delà du cap des cinquante ans, ceux et celles qui ont connu une longue vie de couple, et une rupture assez tardive, découvrent un même horizon : plus de projet conjugal et plus guère de réseau familial (enfants majeurs, parents décédés), mais deux types de destins, selon qu’ils sont ou non fortement diplômés. Aux premiers, de denses réseaux de sociabilité amicale ; aux seconds, la solitude.
15Quant aux jeunes diplômés et actifs, les trajectoires sont résolument tournées vers la recomposition familiale. Celle-ci semble d’autant plus aisément envisagée que la jeunesse, l’activité et le niveau socio-culturel sont trois valeurs sûres sur le marché conjugal. À cela s’ajoute une certaine capacité à « sédimenter » leurs histoires conjugales. Un couple ou une famille n’efface pas l’autre ; ils ou elles s’ajoutent, élargissant de plus en plus le tissu des proches, complexifiant les rôles et les repères.
16À la lumière de ces trajectoires typiques, apparaissent nettement des écarts dans les logiques de recomposition. Ce sont ces différences dans la façon dont est posée la fondation d’une nouvelle union que nous souhaitons analyser de manière qualitative, en nous intéressant maintenant à la conception que ces acteurs des situations familiales recomposées se font de la famille et du couple. Quels sont les projets conjugaux, mais aussi les normes de référence ? Tel est l’objet de notre dernière partie.
Notes de bas de page
1 Les analyses factorielles que nous avons réalisées montrent que l’âge est le facteur le plus clivant des trois que nous évoquons maintenant.
2 Nous avons retenu : le sexe, l’âge, le niveau d’étude, le critère actif/non actif, l’âge au mariage, l’âge à la rupture, la durée de vie de couple, la durée écoulée depuis la rupture, l’âge du dernier enfant, la situation familiale en 1987 et en 1990, le type de rapport avec l’ex-conjoint, le fait que le parent gardien considère ou non cet ex-conjoint comme un membre de sa famille, la fréquence des rencontres avec les parents, la distance entre la résidence des parents et celle du parent gardien, l’attitude des parents au moment de la rupture, le fait que le parent gardien ait ou non conservé les amis qu’il avait avant la rupture et enfin, le nombre d’amis ou de proches.
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