Document 5. Lettres et télégrammes de soutien aux grévistes du Joint français
p. 407-414
Texte intégral
1[Ces documents, adressés à Jean Le Faucheur, à Yves Le Foll (maire PSU de Saint-Brieuc) ou au journal Le Télégramme permirent à Guy Lorant d’alimenter ses articles puis, ultérieurement, ses deux contributions aux ouvrages collectifs. Ils reflètent la diversité des solidarités, l’importance de la symbolique, le sens du pratique, l’expression de la colère. Ils traduisent aussi la ferveur des appartenances vécues et sont empreints d’une spontanéité, comme d’un espoir ou d’une langue venant d’un temps révolu. Certains disent aussi la peur panique de la dénonciation et la puissance des régimes d’autorité d’alors.]
2[sur carte bristol]
« Nous sommes deux petites filles, moi, je m’appelle Fabienne, j’ai 8 ans, ma sœur Florence a 10 ans. Nous voulons donner un peu d’argent de notre tire-lire, pour que vous achetiez de la viande et un peu de friandises aux enfants des grévistes du Joint français. Je crois que vous allez être plein de joie
Florence ; Fabienne
Hamon, 35 Rennes »
3[carte de visite]
4Paris 8e
5Mr et Mme J. Bourges
6[au] Comité de grève du Joint français
« Refusant l’exploitation ouvrière en Bretagne, nous devons nous exiler à Paris, où cette exploitation est moindre.
Désirant revenir en Bretagne rapidement, ce combat est celui de tous les Bretons où qu’ils soient. Que notre modeste aide vous aide à gagner notre combat à nous Bretons. »
7[carte avec petite médaille miraculeuse en métal]
« Monsieur le Maire,
Voulez-vous accepter pour votre ville, pour qu’une solution juste soit trouvée au plus vite, pour toutes les familles d’ouvriers, voulez-vous accepter cette petite médaille ? En même temps, elle vous protégera ; la Sainte Vierge a promis, à ceux qui la porteraient avec confiance beaucoup de grâces. Et ces grâces si elles sont spirituelles, sont souvent matérielles. Et notre maman du Ciel soit bénie, c’est bien ce dont nous avons besoin. Elle sait aussi que la misère engendre la hargne et rien que pour éviter d’être méchant… mais surtout malheureux, car Elle nous aime beaucoup, Elle nous donne ce qui est nécessaire. En échange, Elle nous demande seulement une confiance d’enfant.
Si je vous heurte dans vos convictions philosophiques, veuillez me le pardonner. Alors, voudriez-vous donner la médaille à une personne malade ou pauvre ?
Je vous remercie.
Veuillez agrée Monsieur le Maire, mes salutations respectueuses et mes souhaits de prospérité pour votre ville. [signature illisible] »
8[carte de visite : Daniel Ungemach-Benedite
9Directeur littéraire Éditions Rombaldi – 222, boulevard St-Germain, Paris, VIIe]
10ci-joint 200 francs
11Pour les grévistes du « Joint français » avec ses vœux de succès pour leur courageux mouvement.
12[sur papier libre]
13« AUX OUVRIERS GRÉVISTES DU JOINT FRANÇAIS
14QUOIQU’A L’ARMÉE NOUS AVONS SUIVI AVEC INTERET VOTRE GREVE EXEMPLAIRE PARCE QUE MALGRÉ NOTRE UNIFORME, NOUS FAISONS TOUJOURS PARTIE INTÉGRANTE DU MOUVEMENT OUVRIER
15POUR VOUS PROUVER NOTRE SOLIDARITÉ ON A FAIT UNE COLLECTE PARMI LES MATELOTS DE LA BASE QUI VIENNENT DE TOUTES LES RÉGIONS DE FRANCE
16ON N’A PAS PU JOINDRE BEAUCOUP DE CAMARADES PARCE QU’IL NOUS A FALLU PRENDRE DES PRÉCAUTIONS ; ET COMME EN PLUS ON NE GAGNE PRESQUE RIEN, NOTRE CONTRIBUTIONS SERA MODESTE. 90 FRS
17UN GROUPE DE MATELOTS, ENGAGÉS ET APPELÉS BASE AERONAVALE LANDIVISIAU
18adressé parMonsieur Miossec Jean, 39 rue Camille Desmoulins 29 N Brest
19[sur papier libre]
« Afin que du passé il soit fait table rase…
Bon courage »
20[signature illisible]
21[carte de visite]
22Faculté des Sciences économiques de Nice]
« Solidarité d’un compatriote pour les ouvriers du Joint français
R Guéhéneuf
Professeur de Sciences économiques »
23Mairie de Bouguenais
24Motion
« Le Conseil Municipal de Bouguenais (Loire-Atlantique)
Affirme sa solidarité avec les travailleurs en lutte pour leur condition de vie du “Joint Français” à Saint-Brieuc Côtes-du-Nord.
Dénonce la responsabilité du patronat et du Pouvoir misant sur la lassitude des travailleurs dans leur combat pour ne pas prendre en considération leurs justes revendications.
Rappelle en outre que certaines entreprises comme le “Joint francais” dont l’implantation a été facilitée par l’octroi de fonds publics à des conditions particulièrement avantageuses en raison de la crise de l’emploi dans la Région détournent cette aide de sa véritable destination au profit de quelques-uns et au détriment de l’intérêt général.
Le Conseil Municipal unanime espère que ces luttes exemplaires serviront la cause de la classe ouvrière toute entière. »
2592 Chatenay-Malabry
26Paris, le 16-4-72
« Camarades,
Le chèque que je vous envoie ci-joint est destiné aux travailleurs du Joint français. Cette somme est le résultat d’une collecte organisée à l’École centrale et à l’ENSET par des camarades bretons.
Bien que n’étant pas sur place, nous suivons de très près le déroulement du conflit. Il est très dur, mais assurez les camarades du Joint de tout notre soutien.
Salutations militantes. » [signature]
27[L’orthographe, traduisant une certaine difficulté d’expression écrite auxquelles s’ajoutent des bretonismes, a été conservée en l’état]
28Plouagat, le 23 avril 1972
« M. Faucheur (sic)
Je ne vous connais pas, que part vous avoir vu à la télévision et sur les journaux je ne sais comment vous féliciter pour votre courage et la lutte que vous menez, pour les ouvriers et en particulier pour ceux du Joint français à S Brieuc Mais je vous serais reconnaissante si pour les ouvriers du Bâtiment vous pourriez quelque chose. Il y a encore des ouvriers du Bâtiment qui tous les jours et part [sic] tout [sic] les temps gagne [sic] 530 c’est-à-dire 5 cinq francs trente centimes de l’heure et encore toutes les heures ne sont pas payées pour motif qu’on est au mois […] continuez votre lutte je vous félicite mais enquêté un peu dans les bourgs et vous trouverez des pâtrons qui profite plus que ceux du Joint. Je sais le bâtiment est dûr et si on est malade on pert tous. Mon mari a été malade le 8 janvier au 24 janvier eh bien il a eu cent francs de la sécurité sociale car on attend de la caisse du patron Je ne vous dit pas son nom car demain mon mari aurais le portail grand ouvert. Faites quelque chose pour les ouvriers qui sont à tout les vents pire que des chiens. Encore une fois je vous félicite et vous dit courage si je pourrais vous aidez je ferrai. » [signature]
29[sur papier monogrammé avec en-tête BREIZh et hermine]
3026.4.72
« Messieurs,
Nous vous avions déjà écrit pour vous exprimer notre soutien le plus total dans la lutte que vous menez et que vous poursuivez depuis déjà 7 semaines. Voyant précisément la poursuite de votre action, nous avons décidé de faire une petite collecte dans notre école. Cette somme, bien que modeste, traduira l’attachement d’une vingtaine de jeunes Bretons à la situation qui vous est faite. Si nous avons pensé que nous devions vous soutenir, c’est que le combat que vous menez est celui de toute la Bretagne. Les élans de solidarité nous portent à croire qu’enfin, ouvriers, paysans, commerçants et étudiants bretons ont compris que la première cause de leur révolte et de leur lutte est la colonisation. Aujourd’hui ce sentiment se généralise et les souffrances que vous endurez, viennent, à notre avis, de l’exploitation d’une bourgeoisie minoritaire et centralisatrice sur un peuple que nous connaissons bien puisque nous en faisons partie intégrante. Enfin les Bretons se réveillent et prennent conscience que n’importe qui ne pourra pas faire de notre terre un “jardin de l’Élysée”, un pays à soldats ou à touristes, pas plus que de faire de notre peuple une main d’œuvre inépuisable que l’on peut exiler ou exploiter à sa guise
Nous affirmons donc une nouvelle fois avec force que nous soutenons tous les ouvriers du “joint français” luttant contre l’exploitation de quelques individus pour qui le profit est la base de tous les abus.
Nous dénonçons également, avec la direction, le gouvernement et ses représentants en la personne du préfet qui, avec les mots de concertation, participation, dialogue et démocratie à la bouche, vous envoie les gardes mobiles ou les CRS pour faire taire la vérité.
Nous regrettons de ne pouvoir et n’avoir pu assister aux diverses manifestations que vous avez organisées mais seule “l’École” en est la cause et lorsqu’on ne peut guère y affirmer sa position comment pourrait-on participer à des manifestations, qu’elles soient de gauche ou de droite ?
Nous pensons que vous comprendrez la situation et c’est également pour cela que nous vous demandons de ne pas divulguer cette lettre ;
Malgré tout, nous tenons à ne pas être renvoyés pour une cause aussi juste.
Kendalac’h evit Breizh.
Mickaël Tallec et Bruno-Ar-Mason
Marcel Marchand
Bld Colonel Entrevent 52 Saint-Dizier. »
31[tampon : Parti socialiste unifié – Fédération de la Haute-Marne]
32Section de Saint-Dizier, au camarade Yves Le Foll,
33Maire de Saint-Brieuc.
34Saint-Dizier, le 27 avril 1972
« Mon cher Camarade,
J’ai le plaisir de te faire parvenir ci-joint un chèque de 250 francs don de la section PSU de Saint-Dizier pour le soutien financier aux grévistes du Joint français
Je compte sur toi pour le leur transmettre avec notre salut le plus fraternel.
Amitiés socialistes,
Marcel Marchand, secrétaire de la section, Adjoint au maire de Saint-Dizier. »
35A[lain] Even
3615, rue P. Loti
3735 Rennes
« Monsieur,
Je vous envoie sous ce pli un chèque de 580 francs résultat d’une collecte faite auprès des enseignants SNE-sup de la faculté de Droit et de la faculté des Sciences économiques de Rennes.
Une somme de 280 francs avait été envoyée la semaine dernière.
Des membres de notre section syndicale ont pris comme engagement d’assurer un soutien matériel tant que durera la grève du Joint français à Saint-Brieuc. Ils m’ont délégué pour vous faire savoir qu’ils avaient ainsi l’intention de témoigner de leur solidarité.
Nous espérions que cette contribution régulière pourra, avec d’autres, vous permettre de poursuivre votre lutte. Sincèrement votre, A. Even. »
38Madame Janine Duytes.
3975 Paris 19e
40Paris, le 2 mai 1972
« Monsieur le Maire,
C’est à la fois une joie et un honneur pour moi d’avoir été choisie par les camarades de la 20e section du PSU de Paris, parce que je suis briochine, pour vous faire parvenir un chèque de 360 francs au nom du comité de soutien des grévistes du Joint français de Saint-Brieuc.
Les militants de la 20e section du PSU de Paris ont organisé des prises de parole, des distributions de tracts et des collectes sur les marchés du 20e arrondissement.
Ils ont expliqué les problèmes de la région et fait comprendre que les travailleurs sont tous solidaires.
Veuillez agréer, Monsieur le Maire, l’expression de nos meilleurs sentiments.
Amitiés socialistes. »
41Mlle Decocq Gisèle
4277 Lizy-sur-Ourcq (et 22 Saint-Jacut-du-Mené)
43Le 3 mai 1972
« Bravo les Bretons et bon courage !
Mais tachez de vous souvenir de la leçon, afin que l’on ne puisse pas faire rimer votre nom “Bretons avec c…” »
44Corcessin F.
45Noisy-le-Grand Noisy, le 3 mai 1972
« À Monsieur le Maire de St-Brieuc,
Je vous demanderai de bien vouloir transmettre au Comité de grève de l’usine du Joint français une modeste obole pour le soutien des familles, de la part d’un agent de maîtrise électricien de la RATP. Je vous demanderai si possible l’anonymat.
En vous remerciant, je vous prie d’agréer Monsieur le Maire, l’expression de mes sentiments distingués. »
46Le 4 mai 72
« Monsieur le Maire,
Je vous adresse ce modeste mandat pour les grévistes du Joint français.
Je suis une ancienne Havraise et je me souviens des heures sombres qu’ont connu les ouvriers havrais.
Assurez les délégués syndicaux de toute ma sympathie, qu’ils ne perdent pas courage. Leur cause est juste et c’est pour toute la classe ouvrière qu’ils luttent en ce moment.
Espoir et confiance. »
47[mandat de Mme Dutout, Yvetot, 50 francs]
48R. Beaunez
49Colombes 4/5/72
« Cher Camarade,
ci-joint un chèque postal de frs 150, représentant d’une part une augmentation imprévue et d’autre part les deux heures de ménage d’une de mes filles ! pour verser aux grévistes du Joint français de St-Brieuc.
Je compte sur toi pour compléter et avec mes remerciements, reçois, cher camarade, nos amitiés. » [signature]
50Miellet
51Marcq-en-Baroeuil 59
524 – 5 – 72
« Cher Camarade,
À l’occasion du mariage de ma fille, j’ai obtenu du curé de la paroisse, que la moitié de l’offrande de la messe, soit versée pour les grévistes du Joint français. Je te joins le chèque. Bon courage et bien amicalement. » [signature]
536 – 5 – 72
« Camarade,
Suite à une quête de soutien aux grévistes du « Joint », ci-joint un chèque de 194 F 34. Collecte effectuée par le Secours rouge et le PSU de Bois-Colombes – 94 ce jour.
Dans la lutte, mes salutations fraternelles.
Languet 3, Ph. De Metz 92 Bois-Colombes. »
5412 mai 1972
55FEDERATION DES INDUSTRIES CHIMIQUES
56CFDT 26, RUE DE MONTHOLON PARIS IXE – FRANCE
57de la part de
58THE UNITED RUBBER WORKERS OF AMERICA STANDS SOLIDLY BEHIND THE WORKERS OF THE JOINT FRANÇAIS IN THEIR STRIKE AGAINST THE FRENCH GENERAL ELECTRIC COMPANY.
59PETER BOMMARITO – INTERNATIONAL PRESIDENT URW AFL-CIO CLC

Le texte seul est utilisable sous licence Creative Commons - Attribution - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 4.0 International - CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Le Joint français, printemps 1972
Ce livre est diffusé en accès ouvert freemium. L’accès à la lecture en ligne est disponible. L’accès aux versions PDF et ePub est réservé aux bibliothèques l’ayant acquis. Vous pouvez vous connecter à votre bibliothèque à l’adresse suivante : https://0-freemium-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/oebooks
Si vous avez des questions, vous pouvez nous écrire à access[at]openedition.org
Le Joint français, printemps 1972
Vérifiez si votre bibliothèque a déjà acquis ce livre : authentifiez-vous à OpenEdition Freemium for Books.
Vous pouvez suggérer à votre bibliothèque d’acquérir un ou plusieurs livres publiés sur OpenEdition Books. N’hésitez pas à lui indiquer nos coordonnées : access[at]openedition.org
Vous pouvez également nous indiquer, à l’aide du formulaire suivant, les coordonnées de votre bibliothèque afin que nous la contactions pour lui suggérer l’achat de ce livre. Les champs suivis de (*) sont obligatoires.
Veuillez, s’il vous plaît, remplir tous les champs.
La syntaxe de l’email est incorrecte.
Référence numérique du chapitre
Format
Référence numérique du livre
Format
1 / 3