La fabrique des mangeurs d’hommes
Autour de l’affaire du Sarah Ann (1856-1857) et de l’affaire Ramin (2011)
p. 189-202
Texte intégral
1Rapprocher l’affaire du Sarah Ann de l’affaire Ramin ne peut manquer d’interloquer. Le décalage chronologique, comme la distance géographique qui les séparent, devraient en effet l’interdire. Il y a pourtant, entre les deux, des similitudes et l’occasion d’une mise en perspective éclairante sur une question dont la complexité – par ce qu’elle met en jeu – le dispute à la profondeur et à l’intensité des émotions qu’elle suscite. Dans un cas comme dans l’autre – de façon différente certes – il y a « non-lieu » ; alors même qu’à leur propos, la qualification d’anthropophagie et de cannibalisme était en cause.
2C’est autour de ce « non-lieu » qu’il est intéressant de réfléchir. Ainsi quant à ce qui est advenu à Nuku Hiva en 2011 et à Tematangi en 1856-1857, le propos est moins de statuer sur la réalité du fait cannibale que de clarifier ce qui explique qu’il en soit question, dans l’espace qui est celui de la Polynésie française d’aujourd’hui, plus précisément aux îles Marquises et aux Tuamotu-Gambier.
Des parallèles
3La mort de Stefan Ramin, en 2011, à Nuku Hiva a fait les gros titres de la presse ; en Allemagne tout particulièrement, dont la victime était originaire. Un certain nombre de ces manchettes ont démontré que, de façon tenace, les Marquisiens sont tenus pour anthropophages « par essence1 ». Ce qui suscita un tollé ; et pour cause, en l’occurrence2. Rappelons les péripéties de ce fait divers tragique. Jeune plaisancier accomplissant un tour du monde à la voile, en compagnie de sa fiancée Heinke Dorsch, Stefan Ramin avait fait escale à Nuku Hiva. Là, avec Arihano Haiti, un Marquisien, pour guide et accompagnateur, il était parti en randonnée. On ne retrouva que son corps calciné. Arihano Haiti, quant à lui, disparut. Se cachant dans la montagne après s’en être pris à Heike Dorsch, restée seule sur le voilier, il finit par se rendre aux forces de l’ordre en avouant l’homicide. Or le procès qui aboutit à la condamnation de l’assassin à 28 ans de réclusion criminelle, comme la remarquable enquête menée sur place par James Vlahos, ont clairement démontré que si cette affaire pouvait révéler ce qui caractérise – en partie – la vie aux Marquises, elle n’avait rien à voir ni avec un cas d’anthropophagie (le fait de consommer de la chair humaine), ni avec la perpétuation d’une tradition de cannibalisme (le fait de consommer rituellement et de façon institutionnelle « régulière » de la chair humaine)3.
4Un siècle et demi plus tôt, le sort supposé des naufragés de la goélette Sarah Ann aux Tuamotu avait défrayé pareillement la chronique4. Ce navire était parti de Valparaiso, au Chili, en mars 1856 à destination de Tahiti. Il y avait dix-sept personnes à bord : neuf hommes d’équipage auxquels s’ajoutaient le capitaine Krayser et son épouse qu’accompagnaient un enfant de deux ans et une domestique tahitienne ainsi que quatre autres passagers : un subrécargue, un négociant de retour d’un voyage d’affaires à Valparaiso et les deux enfants du capitaine tahitien Stevens attendus par leur mère à Papeete. Or, après une escale attestée à Mangareva aux Gambier, en avril 1856, on resta sans nouvelles du Sarah Ann qui n’arriva jamais à bon port. Il fut tenu pour disparu « corps et biens » jusqu’en juin 1857. En effet, à cette date, la goélette la Julia, propriété de la maison Hort-frères, affrétée par les autorités du protectorat passa à proximité de l’île de Tematangi (nommée à cette époque île Bligh ou Blight), à l’extrémité orientale de l’archipel des Tuamotu, proche de celui des Gambier. Son capitaine aperçut à terre des « indigènes » portant des vêtements européens ainsi que des étoffes du même type, accrochées aux arbres. Il vit également les restes d’une épave qu’il supposa être celle du Sarah-Ann. À deux reprises, il se heurta à l’hostilité des habitants de l’atoll qui, armés de frondes et de lances, empêchaient qu’on les approchât.
Ill. 1. – « Anthropophages de l’île Blight (archipel des Pomotu). 1) Mapuhia, père du roi ; 2) Kahiveroa, roi de l’île Blight ; 3) Turoa, mort à l’hôpital de Papeete ; 4) Temaheva, vieillard aux cheveux roux, mort à l’hôpital de Papeete ; 5) Makave ; 6) Hohaia, mère du roi ; 7) Tokahira ; 8) Tahuroa-Vahine, femme ; 9) Temahu-Vahine, femme.

Source : D’après une photographie de M. Gilbert Cuzent, 1857, dans Gilbert Cuzent, Voyage aux îles Gambier, Paris, V. Masso, 1872.
5À la suite du rapport qu’il fit à Papeete, un navire de guerre, le vapeur Le Milan, flanqué de deux autres bâtiments fut envoyé à Tematangi/Bligh, afin de porter secours aux éventuels survivants du naufrage du Sarah-Ann. Or, à terre, les militaires ne trouvèrent personne, même s’il y avait des traces très récentes et incontestables de la présence d’habitants qui, à l’évidence, se cachaient dans un environnement dénué de cocotiers où une brousse à pandanus très dense rendait la progression difficile. Pour les débusquer, on décida d’utiliser les obusiers du Milan pour bombarder l’atoll. Mais ce fut sans résultat. Aussi les militaires mirent-ils le feu aux habitations et aux pirogues avant de repartir5. Les dix jours que dura cette mission se soldèrent donc par un échec et l’on ne savait toujours rien de ce qui avait pu arriver au Sarah Ann et à ses passagers. Or Mme Stevens dont les deux enfants se trouvaient à bord disposait d’une certaine fortune. Elle décida alors d’armer, à ses frais, la Julia et de recruter moyennant de généreux émoluments une équipe de vingt-cinq Polynésiens, menée par le chef Teina, pour retourner fouiller Tematangi/Bligh en juillet 1857. Cette nouvelle expédition fut effectivement plus concluante que la précédente. Elle découvrit la caverne corallienne où se dissimulait la poignée d’habitants que comptait l’île. Aucun passager du Sarah Ann n’était parmi eux. On trouva, en revanche, pour reprendre les termes du compte rendu de cette opération :
« “Des débris d’ossements humains, une chevelure blonde qu’on [supposait] avoir appartenu à la femme du capitaine, une moitié d’enfant desséchée au soleil et plantée au sommet d’un bâton pour servir de fétiche, des dents et des phalanges furent [également] retrouvées dans l’île. Les crânes avaient été taillés triangulairement pour en extraire le cerveau”. La totalité des habitants de Tematangi/Bligh, soit seize personnes dont quatre enfants fut embarquée sur le Julia pour répondre devant la justice de leur “crime”6. »
6La nature de ce « crime » est clairement exprimée par le titre donné à la gravure tirée de la photographie prise par Gilbert Cuzent : « les Anthropophages de l’île Blight ». Cette image montre les « inculpés » qu’il est possible d’identifier nominalement, grâce aux numéros placés derrière chacun qui renvoient à leur titre et patronyme indiqués au bas. Le cliché qui en est à l’origine a très probablement été réalisé peu après l’arrivée du Julia à Papeete, le 5 août 18577. Même si le dessin est de piètre qualité, il est frappant de constater que ces « anthropophages » apparaissent plus abattus que féroces et redoutables. Cette représentation est conforme à la manière dont Gilbert Cuzent les décrit après les avoir rencontrés. Ce dernier, pharmacien de Papeete, était l’un des notables de la toute récente « société » coloniale apparue avec la mise en place du protectorat français à Tahiti en 1842. Ces « anthropophages » donnaient tous les signes des conséquences de conditions de vie très précaires et du plus grand dénuement : extrêmement maigres, couverts de boutons, exhibant, par contraste avec l’allure soignée des Tahitiens, des cheveux longs sans soin et grouillant de vermine et une peau sèche, écaillée et ulcérée. Trois d’entre eux étaient morts d’ailleurs durant le voyage vers Tahiti et deux autres encore décédèrent peu après à l’hôpital. Aucune condamnation ne fut prononcée à leur encontre et les poursuites s’arrêtèrent là. C’est ce qui m’autorisait à parler de « non-lieu ». Les enfants furent confiés à des familles d’accueil et les sept adultes survivants purent rester à Tahiti, d’après ce qu’écrit Gilbert Cuzent qui ajoute : « C’est là un acte de haute humanité qui honore le Protectorat de la France8. »
7Dans l’affaire Ramin comme dans l’affaire du Sarah Ann, la facilité de l’assignation au cannibalisme est proportionnelle au silence de ceux qui sont mis en cause. Les gros titres « ont fait la une » à propos de ce qui s’était passé à Nuku Hiva alors qu’aucune investigation médico-légale n’avait pu être menée sur les restes de Stefan Ramin et que Arihano Haiti, « en cavale » ne pouvait donner forcément aucune explication sur les faits. On s’interroge sur le dossier d’instruction (si instruction il y a bien eu) concernant les habitants de Tematangi/Bligh. Apparemment, le Sarah Ann avait bien fait naufrage aux abords de l’île, puisque des canons qu’on lui attribue ont été retrouvés. Mais peut-on être tout à fait sûr de cette attribution ? En tout cas, en raison de l’absence au milieu du xixe siècle des moyens techniques et des procédures scientifiques qu’utilisent les enquêteurs d’aujourd’hui, l’identification des ossements découverts est incertaine. S’agissait-il bien donc des passagers de la goélette ? Si oui, lesquelles des dix-sept personnes à bord étaient concernées ? Donc combien de survivants à un éventuel naufrage ou bien les cadavres de quels passagers exactement avaient-ils échoués sur l’île ? Effectivement, on est dans l’impossibilité de savoir si ces ossements pouvaient révéler une nécrophagie (une éventuelle consommation post mortem) ou bien un massacre précédant « consommation9 » ? Quant aux crânes « taillés en triangle pour en extraire le cerveau », combien y en avait-il exactement ? Ces dommages relevaient-ils effectivement d’une intervention délibérée de cet ordre ou bien s’agissait-il de traumatismes consécutifs au choc du naufrage ou au contact brutal avec le récif par exemple ? De même, il est frustrant de ne pas en savoir davantage sur ce « fétiche » : ne pourrait-on le considérer plutôt comme une forme d’exposition des cadavres en usage en Polynésie ? Et dès lors s’agit-il bien des restes d’un enfant de type européen ?
8Le problème tient, de plus, au fait que l’on ne sait pas précisément ce qu’ont pu dire les « rapatriés » de Tematangi/Bligh. Il a certainement fallu avoir recours à un interprète. Le chef Teina a-t-il pu jouer ce rôle ? Avait-il des liens particuliers avec cette île des Tuamotu qui lui auraient permis de « trouver » la cachette des habitants ? Apparemment les « anthropophages » ont pu expliquer que leurs ancêtres venaient de Hitiia à Tahiti. Mais les a-t-on bien compris ? Et d’ailleurs pouvaient-ils réellement s’exprimer ? Étaient-ils trop frustres ou bien souffraient-ils de handicaps mentaux pour pouvoir le faire clairement ?
Des incertitudes
9Faut-il considérer la grande misère qui était la leur comme le résultat de l’environnement ingrat qui caractérise l’île de Tematangi et/ou de leur inadaptation à ce milieu10 ? Le recours à l’anthropophagie (si anthropophagie, il y a eu) s’inscrivait-il alors dans une stratégie de survie11 ? Jamais en tout cas Gilbert Cuzent n’envisage que la détresse des « anthropophages » ne soit consécutive, à la destruction, après le passage du Milan, de leur village et des embarcations qui devaient leur permettre de pêcher ?
10En tout état de cause, il est clair que l’affaire Ramin comme l’affaire du Sarah Ann vérifient ce qu’induit le caractère sensationnel du fait divers qui « donne à dire » autant qu’il « dit », comme l’a expliqué Dominique Kalifa, dans la mesure où subliminalement et « en négatif », en quelque sorte, il énonce ce qui doit être12. L’horreur de l’anthropophagie attribuée aux habitants de Tematangi/Bligh qui rencontre la mansuétude à Papeete, montre (et justifie) l’ordre, non seulement juste mais bienveillant, qui s’institue sous l’autorité coloniale française. Les propos de Gilbert Cuzent l’indiquent sans ambages13. La fin de Stefan Ramin est spectaculairement dramatique au regard de ses dernières photos, prises à Nuku Hiva qui le montrent véritablement rayonnant d’une défiante jeunesse. En illustration des articles de presse qui rapportaient son sort tragique, l’effet était spectaculairement saisissant. Ce qui apportait implicitement, selon la morale d’un « tabloïd » comme Bild-Zeitung, un démenti à l’anticonformisme et aux idéaux de fraternité universelle qui marquaient le mode de vie qu’il partageait avec Heinke Dorsch.
11L’une comme l’autre, ces deux affaires reposent sur un cannibalisme présumé plutôt que solidement prouvé. Quand bien même il y ait pu avoir anthropophagie à Tematangi/Bligh, cela corroborerait plutôt le caractère unique et très particulier de cette île et de ses habitants. En effet, la plus grande prudence est observée à présent en ce qui concerne les preuves « concrètes » de la généralisation de telles pratiques dans la zone Tuamotu-Gambier, quand elles ne sont pas purement et simplement révoquées comme nulles et non avenues.
12Il en va ainsi du « Dressoir à chair humaine » de Mangareva, acquis sur place dans la deuxième moitié du xixe siècle par le Dr Pierre Couteaud. Ce dernier, médecin de 1re classe de la Marine nationale a consacré à cet objet une notice datée du 18 novembre 1884 (à Toulon) et publiée dans la Revue d’ethnographie en 1885. Il y fait la description de ce réceptacle cylindrique posé sur un socle taillé de manière à empêcher les rats de pouvoir y grimper et surmonté de quatre tiges en forme de bras terminées par des mains tournées vers le haut. Il explique aussi que ce « dressoir » est consacré au dieu de l’anthropophagie des temps anciens, selon ce qu’il a appris d’un « vieux Mangarévien14 ». Or « l’information donnée au Dr Couteaud n’est [tout simplement] pas crédible ». Elle repose en effet sur l’interprétation erronée et fautive du terme « ‘ata ‘akakiko » qui signifierait plutôt « socle à nourriture », ce que ne traduit que partiellement le mot « viande » que, par un glissement sémantique abusif, le Dr Couteaud transforme en chair humaine et associe en opérant, comme le constate fréquemment, un trop rapide amalgame15 en évoquant des rituels relevant du cannibalisme16.
Ill. 2. – Dressoir à chair humaine de Mangareva.

Source : Dessin de Pierre Couteaud, Revue d’Ethnographie, t. III, 1885, p. 548.
13Il faut considérer comme tout aussi peu probants les fours « cannibales » exhumés, au milieu du xxe siècle, à Afaahiti, près de Taravao à la limite de la presqu’île de Tahiti. La découverte est signalée à la date du 14 mars 1946 dans le numéro d’avril du Pacific Islands Monthly par le correspondant local de ce périodique. Celui-ci rapporte que des squelettes se trouvaient dans ces fours (ahimaa) anciens en pierre et il explique qu’il s’agit des vestiges d’un festin cannibale apprêté à la suite d’une razzia par des guerriers venus des Tuamotu. Mais ces derniers, brusquement contraints à battre en retraite, auraient donc abandonné là les corps qu’ils avaient mis à cuire, sans avoir le temps de les consommer17. Cet article fait, à coup sûr, écho aux recherches du Professeur Kenneth P. Emory (1897-1992) menées à partir de 1925 aux îles de la Société18, puis aux Tuamotu en 1929-1930. Il put notamment recueillir là-bas une tradition orale faisant état de la férocité des guerriers parata assimilés à des requins voraces et « mangeurs d’hommes19 ». Or, la question de l’interprétation littérale ou métaphorique de ce texte a été posée. La réalité même de l’accomplissement de sacrifices humains est mise en doute. Pour Frédéric Torrente, il y a lieu de penser que des simulacres avaient lieu, plutôt des passages à l’acte20.
14Il s’est avéré impossible sur l’atoll de Takaroa, dans le même archipel des Tuamotu, de procéder à la fouille approfondie d’un four recelant possiblement des ossements humains. Celui-ci, signalé à Kenneth Emory par un informateur comme ayant servi à des pratiques cannibales, avait été repéré dans les années 1980 ; mais se trouvant dans le périmètre de restriction d’activité et de circulation du Centre d’Essais du Pacifique, un travail archéologique satisfaisant était alors inenvisageable. Or lorsque des recherches furent à nouveau entreprises dans le secteur par l’ethno-archéologue Jean-Michel Chazine, dans les années 2000, le corail avait recouvert le site et lui en interdisait désormais l’accès, l’amenant lui aussi à beaucoup de circonspection sur la question21.
15Si tant est que le cannibalisme ne soit que difficilement avéré dans l’espace de la Polynésie française d’aujourd’hui, le fait d’en parler – même à tort – est loin d’être anodin. Ce qui est advenu, en Ituri, au Congo au début des années 2000, alors que la guerre civile y faisait rage, en fournit un exemple. En janvier 2003, des Pygmées Mbuti de Mambasa informèrent les organisations humanitaires et les agences de presse et autres media d’information que des membres de leur tribu avaient été tués, cuits et dévorés par les soldats du Mouvement pour la Libération du Congo (MLC). Or, deux ans plus tard, en 2005, les accusateurs se rétractèrent spectaculairement. Johan Pottier qui a analysé cette affaire explique, en s’appuyant sur la manière dont ces accusations puis ces rétractations ont été couvertes par la presse congolaise., que dans ce contexte de grave crise politique et morale, le « cannibalisme à Mambasa » devait être d’abord, et avant tout, compris comme une métaphore politique de violence et de souffrance extrêmes, bien que l’on ne puisse pas exclure la possibilité que des actes de cannibalisme aient bien été commis22.
Et si c’était vrai ? À l’épreuve de la datation
16L’anthropophagie et sa pratique ritualisée, le cannibalisme, renvoient à un absolu de l’insoutenable et par-dessus tout, il permet de tracer la limite entre civilisation et barbarie comme synonyme de sauvagerie radicale. Ce qui revient à stigmatiser ceux qui s’y adonnent et à autoriser qu’ils soient rejetés ou « réformés », par la conversion au christianisme notamment. Cette distinction ou plus exactement cette démarcation est clairement à l’œuvre au début de l’époque moderne lorsque les Européens se sont trouvés confrontés aux nations amérindiennes. On pense tout particulièrement à ce que Jean de Léry tire de son expérience au Brésil auprès des Tupinamba23.
17Nicolas Cambon a montré quels processus discursifs ont, de même, durablement construit l’identité « cannibale » assignée aux îles du Pacifique comme il a rappelé que sa véracité était d’autant plus « convaincante » qu’elle était, par-dessus tout racontée et répétée24. Le cas des Marquises en fournit une parfaite illustration : les commentaires suscités par la mort de Stefan Ramin constituant bien un prolongement de ce phénomène. L’idée reçue du cannibalisme invétéré des habitants de Nuku Hiva procède de la rumeur qui l’entretient et l’amplifie, comme le rapporte Georg Heinrich Langsdorff (1774-1852), naturaliste de l’expédition russe qui fait relâche dans cette île en août 1803. Il note qu’il a entendu dire à Valparaiso que les Marquisiens trouvent les Européens trop salés et qu’ils préfèrent consommer des Anglais plutôt que des Français25.
18Taipi (Typee) le roman, publié en 1846, grâce auquel Herman Melville devient un écrivain célèbre a précisément pour cadre Nuku Hiva. Il raconte l’histoire d’un marin déserteur d’un baleinier qui, pour se cacher, s’aventure à l’intérieur de l’île. La rumeur de la voracité cannibale de la tribu des Taipi est le ressort de l’intrigue. Le héros qui cherche à les éviter s’égare dans le dense couvert végétal et finit par se retrouver au milieu de ceux qu’il redoutait. Il vit un moment parmi eux avant de les fuir pour regagner la « civilisation ». De tous les livres d’Herman Melville, Taipi fut le mieux vendu et le plus populaire de son vivant. Ce succès n’a pas manqué de donner plus d’ampleur encore à la réputation « cannibale » des Marquisiens, aussi ambivalente que soit la narration quant aux Taipi. Cette œuvre qui relève de la fiction plus que d’une authentique expérience personnelle de l’auteur26 constitue certainement un élément crucial de l’identification de ces îles et de leurs habitants à la pratique de l’anthropophagie. En le faisant résonner bien au-delà des tavernes à matelots et du cercle étroit des seuls lecteurs de récits de voyage, elle a contribué à l’induration d’un lieu commun désormais familier du grand public par ce truchement27. Or la circulation de ce lieu commun, par un effet pervers bien connu – le talent de l’écrivain aidant – rend convaincant, en lui donnant de la véracité, ce qui n’a pas de fondement solide, comme l’illustre l’affaire de Hautefaye en Périgord, en août 1870, étudiée par Alain Corbin28.
19Effectivement, si l’on cherche à inventorier des sources fiables pour établir et donc dater approximativement l’existence d’un authentique « fait cannibale » à Nuku Hiva et plus généralement aux Marquises, on se heurte à un double problème ou plutôt à une double absence. Les témoins les plus anciens au moment du Contact, à l’extrême fin du xviiie siècle et au tout début du xixe siècle ne sont guère diserts sur le sujet, quand les plus récents, à l’aube du xxe siècle se défaussent. Les journaux de l’aventurier britannique Edward Robarts, comme celui du Révérend Crook qui ont l’un et l’autre fait de longs séjours parmi les Marquisiens vers 1800, ne livrent pas d’expérience vraiment « directe » de pratiques cannibales29. Quant au Français Joseph Kabris, l’autre aventurier, voisin et rival de Robarts à Nuku Hiva, comme l’a montré Christophe Granger, la relation de ce qui lui est advenu, aux Marquises et après, reflète autant ce que des tiers projettent sur lui que ce qu’il a effectivement pu livrer comme informations30. Tardivement, c’est-à-dire entre 1927 et 1930, le Dr Louis Rollin (1887-1972)31 a exercé dans l’archipel. Passionné par la culture des ancêtres de ses patients, il en est devenu l’un des premiers spécialistes francophones. Il ne consacre qu’un très court paragraphe au cannibalisme dans son livre consacré aux Mœurs et coutumes des anciens Maoris des îles Marquises qui ne doit pas obérer, explique-t-il, l’estime et l’attention qu’ils méritent. Il renvoie le cannibalisme à une pratique du passé dont les dernières manifestations remonteraient à 1867 à Nuku Hiva et en 1879 à Hiva Oa « tout au moins officiellement32 ». En cela, il s’appuie principalement sur les propos du Père Siméon Delmas (1862-1939), un missionnaire catholique français, fort d’un apostolat de 53 ans aux Marquises, entre 1886 et 1939 et auteur de La religion ou le paganisme des Marquisiens (1927) et d’un Essai d’histoire de la mission des îles Marquises jusqu’en 1881 (1929)33. Certes, le missionnaire a de claires visées apologétiques particulièrement quand il parle de cannibalisme34, pourtant Louis Rollin s’y réfère parce que connaissant le « terrain », il apprécie la qualité et l’authenticité des données qu’il fournit. Or, on ne peut manquer de constater une certaine similitude entre ce que signale le Père Delmas et ce qu’a pu décrire à Tahiti le Révérend William Ellis de la London Missionary Society quand il évoque les débordements de brutalité et la violence délirante, conséquence de l’alcoolisation massive35. Ainsi, en termes de datation de faits d’anthropophagie et de cannibalisme, la période-clé ne serait pas celle du Contact mais plutôt du « post- » et de l’après-contact, c’est-à-dire l’horizon des années 1820 et jusqu’au début des années 1860 peut-être. Clairement, le savoir sur la question est tributaire de sources européennes mais au-delà, on peut en venir à penser que si anthropophagie et cannibalisme il y a pu avoir, ce n’est pas forcément parce qu’il y avait cannibalisme auparavant (c’est-à-dire avant le Contact) mais parce qu’il y avait violence généralisée désormais36.
Un contre-cannibalisme ? Un autre regard
20De fait, ce sont les Européens qui donnent de l’actualité au cannibalisme et de plusieurs manières. D’abord parce qu’ils le pratiquent eux-mêmes et dans le Pacifique précisément, à la même époque. L’exemple des rescapés du naufrage du navire baleinier Essex vient forcément à l’esprit. Ce dernier sombra, le 20 novembre 1820, au large des Galapagos. Les vingt membres de l’équipage, se répartirent alors dans les trois canots mais, au bout de 90 jours en mer, seuls huit arrivèrent en vie sur les côtes de l’Amérique du Sud. Or ces derniers ne durent leur salut qu’à l’anthropophagie. Il ne s’est pas uniquement agi pour eux de pratiquer la nécrophagie, c’est-à-dire la consommation des cadavres de leurs camarades décédés, recours relativement « banal » en conditions extrêmes de survie37. Ils en sont venus en effet à une forme de « zoéphagie » ou de « vivophagie », si l’on peut risquer le néologisme, puisque, délibérément, certains d’entre eux, tel le jeune Owen Coffin furent tués pour être mangés et assurer ainsi la survie du reste des autres38. La qualification de cannibalisme paraît s’appliquer à de tels faits, dans la mesure où ils ne sont pas tout à fait exceptionnels et qu’ils relèvent, semble-t-il, d’une certaine « ritualisation » parmi les équipages. L’affaire du radeau de La Méduse immortalisée par Géricault pourrait le suggérer39. Sept autres cas d’anthropophagie après la mise à mort « sacrificielle » de l’un ou plusieurs des rescapés du naufrage, ont été signalés, notamment dans le Pacifique, avec ce qui advint, à bord de La Mignonette, un yacht à destination de Sydney en 188440.
21Il est clair que l’immensité de l’Océan Pacifique rendait particulièrement périlleuses les fortunes de mer et que l’éventualité d’avoir à en venir à de telles extrémités pouvait y être plus fréquente ou plus présente, en tout cas, à l’esprit des marins. Il resterait à l’établir plus systématiquement car la chose était bel et bien tue. Elle était en effet peu conforme à ce qui cautionnait, on l’a vu, l’instauration d’un rapport de domination des Européens « civilisateurs » sur des Océaniens, dont la sauvagerie se manifestait d’abord et avant tout par la pratique de l’anthropophagie41. Dans ces conditions, l’occultation de la réalité de ce que l’on pourrait qualifier de tradition cannibale européenne s’imposait à coup sûr42. Ce travers ouvre la possibilité d’envisager le problème tout autrement, en inversant les points de vue et reconsidérant qui incrimine et pourquoi.
22Pour cela, il faut revenir au moment du Contact en interrogeant ce qui laisse entrevoir la manière dont les Océaniens pouvaient percevoir les choses. Mai (ou Omai) de Raiatea qui séjourna en Angleterre, de 1774 à 1776, au retour du deuxième voyage de Cook auquel il s’était joint, expliqua à ses hôtes que les siens lui avaient déconseillé de partir, dans la mesure où les Tahitiens précédemment partis avec les Européens n’étaient pas revenus. Ces derniers, soutenaient ses proches, étaient privés de nourriture chez eux. L’état dans lequel les marins arrivaient en Polynésie pouvait inciter à le penser effectivement. Donc, il était à craindre, de l’avis de l’entourage de Mai, que ces Européens ne viennent dans l’archipel de la Société que pour se ravitailler et donc ne mangent finalement ceux qui partaient avec eux. Bref, on soupçonnait les Européens d’être cannibales43.
23Il y a lieu d’envisager que ce ne soit la rivalité entre missionnaires catholiques et protestants qui ne rende le cannibalisme « présent ». Les débuts de l’évangélisation catholique des Gambier incitent à le penser, en tout cas. Sur ce point le témoignage du Père Laval (1808-1880) de la Congrégation des Sacrés-Cœurs de Jésus et Marie (dite de Picpus) s’impose. Il rapporte comment une jeune femme de Mangareva fuit en agrippant son bébé lorsqu’arrivent les missionnaires en soutane comme lui : c’est qu’elle craint qu’ils ne croquent son enfant. Pour expliquer cette réaction, le Père Laval met en cause la circulation d’un libelle protestant en langue tahitienne, imprimé à Londres, qui présente, notamment, de façon tendancieuse le dogme catholique de la transsubstantiation : « … il y est dit que le pape auquel on donne le nom de « pagana » (païen) se nourrit de chair humaine et on le représente en effet entouré d’ossements, bien qu’il ait une espèce de tiare à la tête et devant lui le crucifix44. »
24Or, la trace de ce libelle a été retrouvée. Il s’agit de l’opuscule Te Tere o pererina, publié par la Religious Tract Society, en 1847 qui donne une version tahitienne du fameux Pilgrim’s Progress de John Bunyan effectivement empreint de l’anti-catholicisme qui caractérisait l’Angleterre de la fin du xviie siècle45 et qui, avec ses gravures impressionnantes, ne pouvait que créer la confusion.
Conclusion
25De ce qui précède deux éléments peuvent ressortir. En premier lieu, indéniablement, la manipulation sous diverses formes et en bien des aspects est de mise en ce qui concerne l’anthropophagie et le cannibalisme en Océanie. Il importe donc d’abord et avant tout d’élucider les ressorts et les procédés de cette manipulation. Ensuite, il apparaît que si ce phénomène relève bien de la compétence de l’anthropologie et des outils d’investigation de la narratologie, il est aussi et avant tout peut-être une question d’histoire.
Notes de bas de page
1« Bild »-Zeitung « Urlaubs-Horror auf der Kannibalen-Insel » und fragte: « Gibt es auf der Todesinsel wirklich immer noch Menschenfresser? », 20/10/2011 ; « Weltumsegler Stefan Ramin tot. Kannibalismus fraglich », [https://segelreporter.com›panorama], consulté le 22 juin 2022 ; « Un cas de cannibalisme aux Iles Marquises ? », [https://www.parismatch.com›Actu›International], consulté le 22 juin 2022.
2Selon le site tahiti-infos.com sur l’affaire Ramin.
3Vlahos James, « Last Sail of Adventure Seekers », [https://www.gq.com/story/arihano-haiti-stefan-ramin-murder-french-polynesia], consulté le 20 mars 2023.
4Messager de Tahiti, no 35, 18 août 1857.
5Compte rendu rédigé par l’enseigne X. Caillet, cité dans Rey-Lescure Philippe, « La tragédie de la goélette Sarah Ann », Bulletin de la Société des Études Océaniennes, t. 6, 1939, 67, p. 222-234.
6Rapport de l’enseigne X. Caillet, ibid.
7Rey-Lescure Philippe, ibid.
8Cuzent Gilbert, Îles de la Société. Tahiti : considérations géologiques, météorologiques et botaniques sur l’île, état moral actuel des Tahitiens, traits caractéristiques de leurs mœurs, végétaux susceptibles de donner des produits utiles au commerce et à l’industrie, et de procurer des frêts de retour aux navires, cultures et productions horticoles, catalogue de la flore de Tahiti, dictionnaire tahitien, Reproduction en fac-similé de l’éd. de Rochefort, Imprimerie Thèze (1860), éd. 1981.
9On pense évidemment aux travaux de Frédérique Valentin sur les restes humains provenant de Taputapu’atea qui ont démontré que ces derniers ne permettaient pas de corroborer l’hypothèse émise, vers le milieu du xxe siècle, par le professeur K. Emory et son élève et successeur « sur le terrain » le professeur Yosihiko H. Sinoto (1924-2017) quant à la pratique du cannibalisme sur ce site : Valentin Frédérique, « Taputapuatea (district d’Opooa). Etude anthropo-archéologiques des restes humains mis à jour lors de la restauration engagée en 1994-1995 par le CPSH », Bilan de la recherche archéologique en Polynésie française 2005-2015, Dossier d’Archéologie Polynésienne no 6, Tahiti, Direction de la Culture et du Patrimoine, 2021, p. 153-164.
10Nolet Émilie, « Pour une histoire de l’histoire des îles basses : le cas des Tuamotu » dans Dotte-Sarout Émilie, Di Piazza Anne, Valentin Frédérique et Spriggs Matthew (dir.), Pour une histoire de la préhistoire océanienne, approches historiographiques de l’archéologie francophone dans le Pacifique, Marseille, Cahiers du Credo, 2020, p. 239-268.
11Ce qui serait en contradiction avec la taxinomie des îles « propices » au cannibalisme établie par Paul Descamps et mise en perspective par Cambon Nicolas, « L’imaginaire du cannibalisme des îles des « Mers du sud » (du dernier tiers du xviiie au début du xxe siècle) », Carnets, 2e série, 17, 2019, p. 7.
12Kalifa Dominique, « Crimes. Fait divers et culture populaire à la fin du xixe siècle », Genèses, 19, 1995, p. 68-82.
13Guiart Jean, Découverte de l’Océanie, t. II Connaissance des hommes, Nouméa, Le Rocher-à-la-voile, 2002, « Les dossiers difficiles ou ambigus : à propos de l’affaire du Sarah Ann », p. 200-206 ; « Histoires blanches et chroniques noires » p. 271-276.
14Couteaud Pierre, « Dressoir à chair humaine de Mangareva », Revue d’Ethnographie, t. 3, 1885, p. 548-549.
15Cambon Nicolas, « De l’horreur à la méthode dans les savoirs sur l’anthropophagie ? Anglais et Français face au « cannibalisme » néo-zélandais (1769-1840) », Circé, histoire, savoirs, société, déc. 2020.
16Orliac Catherine, « Two offerings Stands from Mangareva in the Collections of the Peter-The-Great Museum of St Petersburg and the Musée du Quai Branly in Paris », The Journal of the Polynesian Society, décembre 2006, vol. 115, no 4, p. 353-364.
17« Who Were the Cannibals of Little Tahiti? Recent Discovery of Gruesome Relics », Pacific Islands Monthly, Sydney, vol. 16, no 10, May 1946, p. 44.
18Kirch Patrick V., « In Memoriam. Kenneth Pike Emory (1897-1992), Asian Perspectives, 31 (1), Spring, 1992, p. 1-8.
19Emory Kenneth P., Ottino Paul, « Histoire ancienne de “Ana” a, atoll des Tuamotu » dans Journal de la Société des océanistes, 1967, 23, p. 29-57.
20Torrente Frédéric, Buveurs de mer, mangeurs de terre. Histoire des guerriers d’Anaa-Atoll des Tuamotu, Papeete, Te Pito O te Fenua, 2012, p. 255 et 327.
21« Je me refuse à donner un avis sur le cannibalisme, car je ne veux pas dire n’importe quoi… Rechercher des données vérifiées sur les mécanismes culturels mis en jeu et en corréler les processus techniques grâce à l’archéologie est un travail de longue haleine qu’il faudra accomplir, car il nous permettra d’en savoir plus sur la préhistoire polynésienne en général et surtout, de clarifier un aspect du passé qui a été beaucoup trop manipulé » : il a pu être établi, par des travaux récents de Frédérique Valentin qu’il s’agissait de restes d’animaux. Je remercie vivement Guillaume Molle pour ces informations.
22Pottier Johan, « Rights Violations, Rumour, and Rhetoric: Making Sense of Cannibalism in Mambasa, Ituri (Democratic Republic of Congo) », The Journal of the Royal Anthropological Institute, 13 (4), 2007, p. 825-843.
23Larcade Véronique, « Jean de Léry et le siège de Sancerre » dans Histoire d’un voyage en la terre du Brésil-Jean de Léry, Journées d’étude du Centre Montaigne (10-11 décembre 1999), Bordeaux, PUB, 2000, p. 49-87.
24Cambon Nicolas, « L’imaginaire du cannibalisme des îles des “Mers du sud”… », art. cité, p. 12.
25Dening Greg, Islands and Beaches. Discourses on a Silent Land: Marquesas, Honolulu, University of Hawai’i Press, 1980, p. 224 ; Govor Elena, Twelve Days in Nuku Hiva. Russian Encounters and the mutiny in the South Pacific, Honolulu, University of Hawai’i Press, 2010.
26Herbert Walter T., Marquesan Encounters, Melville and the Meaning of Civilization, Harvard University Press, 1980, p. 159.
27Stanguennec André, « Herman Melville ou l’impossible subversion », Littérature, 2004, no 133, p. 83-112.
28Corbin Alain, Le village des cannibales, Paris, Flammarion, éd. 2016, version numérique, empl. 51.
29Thomas Nicholas, Marquesan societies: Inequality and Political Transformation in Eastern Polynesia, Oxford, Clarendon Press, p. 169 ; G. Dening, Islands and Beaches…, op. cit., p. 248-249.
30Granger Christophe, Joseph Kabris ou les possibilités d’une vie 1780-1822, Paris, Anamosa, 2020, p. 306-307.
31Huck Dr, « Docteur Louis Rollin », dans Journal de la Société des océanistes, 1972, 35/28, p. 175-176.
32Rollin Louis, Mœurs et coutumes des anciens Maoris des îles Marquises, Papeete, Stepolde, 1974, p. 192-193.
33O’Reilly Patrick, « R. P. Siméon Delmas », Journal de la Société des Océanistes, 1945, 1, p. 124. Louis Rollin lui dédie son livre Les îles Marquises, géographie, ethnographie, histoire, colonisation et mise en valeur, Paris, Société d’éditions géographiques, maritimes, coloniales, 1929.
34Delmas R. P. Siméon, La religion ou le paganisme des Marquisiens, Paris, Beauchesne, 1927, p. 176-179.
35Ellis William, « À la recherche de la Polynésie d’autrefois (Polynesian Researches) », Journal de la Société des Océanistes, 1972, 25, p. 321-322.
36Igler David, « Hardly Pacific: Violence and Death in the Great Ocean », Pacific Historical Review, 2015, 84, 1, p. 1-18.
37[https://www.smithsonianmag.com/history/starving-settlers-in-jamestown-colony-resorted-to-cannibalism-46000815/]. Les survivants de la Cordillière des Andes, YouTube, [http://www.youtube.com/watch?v=ciQ7Q54p89s], consulté le 20 mars 2022.
38Philbrick Nathaniel, In the Heart of the Sea: The Tragedy of the Whaleship Essex, New York, Viking Press, 2000, p. 181-182, 190, 205. Comme on le sait, les conditions du naufrage de l’Essex, à la suite de l’attaque d’un cachalot, ont inspiré Herman Melville pour son roman Moby Dick.
39À propos de laquelle on consultera avec profit l’étude détaillée de Boudon Jacques-Olivier, Les naufragés de La Méduse, Paris, Belin, 2016.
40L’Univers illustré, 28 septembre 1884, [http://www.archeosousmarine.net/cannibale.php], consulté le 20 mars 2022.
41Hartog François, Anciens, modernes, sauvages, Paris, Points, Seuil, 2005, p. 48.
42Thomas Nicholas, Océaniens. Histoire du Pacifique à l’âge des Empires, Toulouse, Essais, Anacharsis, 2020, p. 67-68, 74 ; Barbe Dominique, Histoire du Pacifique, Paris, Perrin, 2008, p. 127.
43D’après le London Magazine, périodique contemporain du séjour de Mai en Angleterre : McCormick Eric H., Omai, Pacific Envoy, Auckland University Press-Oxford University Press, 1977 p. 109.
44Laval Honoré, Mémoires pour servir à l’histoire de Mangareva, ère chrétienne 1834-1871, édités par Newbury Colin W. et O’Reilly Patrick, Publications de la Société des Océanistes, no 15, Paris, Musée de l’Homme, 1968, p. 34-35.
45R. P. Piolet Jean-Baptiste, Missions catholiques françaises, t. 4, Océanie et Madagascar, Paris, A. Colin, 1902, p. 63.
Auteur
Université de la Polynésie française, UR Sociétés traditionnelles et contemporaines en Océanie (EASTCO).
Véronique Dorbe-Larcade est professeur HDR en histoire moderne à l’université de la Polynésie française, UR Sociétés traditionnelles et contemporaines en Océanie (EASTCO).

Le texte seul est utilisable sous licence Creative Commons - Attribution - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 4.0 International - CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Un constructeur de la France du xxe siècle
La Société Auxiliaire d'Entreprises (SAE) et la naissance de la grande entreprise française de bâtiment (1924-1974)
Pierre Jambard
2008
Ouvriers bretons
Conflits d'usines, conflits identitaires en Bretagne dans les années 1968
Vincent Porhel
2008
L'intrusion balnéaire
Les populations littorales bretonnes et vendéennes face au tourisme (1800-1945)
Johan Vincent
2008
L'individu dans la famille à Rome au ive siècle
D'après l'œuvre d'Ambroise de Milan
Dominique Lhuillier-Martinetti
2008
L'éveil politique de la Savoie
Conflits ordinaires et rivalités nouvelles (1848-1853)
Sylvain Milbach
2008
L'évangélisation des Indiens du Mexique
Impact et réalité de la conquête spirituelle (xvie siècle)
Éric Roulet
2008
Les miroirs du silence
L'éducation des jeunes sourds dans l'Ouest, 1800-1934
Patrick Bourgalais
2008