« Cette croyance blanche au cannibalisme des Noirs »
Jean Guiart et le mythe de l’anthropophagie en Nouvelle-Calédonie
p. 175-188
Texte intégral
« Les idées fausses ont la vie dure. Une des raisons est leur universalité. On les connaît dès le haut Moyen-Âge, appliquées à tous les peuples non européens, tous considérés comme sauvages et cannibales, y compris les Mongols du Prêtre Jean ou les Abyssins, pourtant christianisés bien avant l’Europe. La liste des peuples dits sauvages n’a cessé de s’agrandir, au fur et à mesure qu’on croyait en découvrir de nouveaux. Celle de ceux que l’on accusait de cannibalisme est par contre en régression. Au fur et à mesure que l’on s’installait solidement, il apparaissait inopportun d’ajouter l’injure à la perte d’indépendance politique. »
Jean Guiart1.
1L’ethnologue français Jean Guiart (1925-2019) qui arpentait la Mélanésie dès la fin des années 1940, s’était inscrit d’emblée dans la tradition ethnographique de son mentor, le pasteur-ethnologue Maurice Leenhardt (1878-1954), qu’il avait rencontré pendant son adolescence à l’occasion d’un camp de la Commission missionnaire des jeunes2. Personnage ombrageux, homme de terrain infatigable, Guiart fut notamment un observateur minutieux des transformations du monde « canaque » (sic), avant de devenir un lecteur extrêmement critique de toute la littérature ethnologique et historique consacrée aux cultures autochtones d’Océanie3.
2Guidé et initié par les anciens élèves de Leenhardt à la mission protestante de Houaïlou, Guiart a tiré de ses enquêtes de terrain en Nouvelle-Calédonie de très nombreuses données sur l’organisation sociale et culturelle traditionnelle, mais surtout sur l’impact sociologique et symbolique de l’évangélisation et de la colonisation, que ce soit sur la Grande Terre, l’île des Pins ou les îles Loyauté. Auteur prolifique, lecteur insatiable et critique, cet intellectuel inclassable est resté fidèle jusqu’au bout à celui qu’il décrivait comme son « vénéré maître4 », Maurice Leenhardt, notamment lorsque les travaux ethnographiques de ce dernier ont été ouvertement disqualifiés par les nouvelles générations de chercheurs, au motif qu’ils relevaient moins de la véritable pratique scientifique en pays kanak que de « l’ethnologie missionnaire5 ».
3Toutefois, et bien qu’il restât le défenseur inconditionnel des audaces méthodologiques et épistémologiques de Leenhardt, il est un point sur lequel le « disciple » semble avoir désavoué son « maître » : à partir de la seconde moitié des années 1970, il récuse en effet l’existence de formes avérées de cannibalisme chez les Mélanésiens de Nouvelle-Calédonie. En cela, Guiart occupe une position très particulière dans le débat qui a agité la communauté scientifique à propos de l’existence ou non de pratiques qui relèveraient de l’anthropophagie chez les peuples océaniens, et plus particulièrement dans le monde mélanésien6.
Extraire les « primitifs » de leur « gangue tribale » : le poids de la doctrine missionnaire
4Guiart a rappelé – avec d’autres – que les accusations de cannibalisme formulées à l’encontre des peuples océaniens l’avaient d’abord été par les premiers explorateurs occidentaux, puis par les missionnaires, aux seules fins de justifier l’œuvre civilisatrice qu’ils étaient venus accomplir7 :
« L’accusation de cannibalisme a toujours été le fait des missionnaires, dont elle justifiait l’action parfois brutale, qu’ils soient protestants, de la London Missionnary Society qui en a introduit le concept systématique aussi bien en Polynésie qu’en Mélanésie (Nouvelle-Calédonie, Vanuatu, Papouasie), ou catholiques8. »
5Comme souvent, Guiart adopte ici une position catégorique qu’il justifie tout d’abord par l’absence de données archéologiques, et répète à l’envi qu’il n’existe aucune preuve matérielle pouvant confirmer l’hypothèse d’une consommation régulière ou même épisodique (catastrophes naturelles, famines, guerres) de chair humaine. L’absence de « charniers » suffirait ici à démontrer que le cannibalisme n’est que pure invention et prétexte avancé par les « civilisateurs » désireux de justifier leur apostolat et de se donner bonne conscience :
« Personne en effet n’a jamais apporté de preuves de type juridique à ce cannibalisme affirmé. Il n’y a jamais de corps du délit et les fouilles archéologiques n’ont trouvé aucun témoignage des massacres racontés de façon si convaincante par les auteurs européens du siècle dernier, missionnaires ou autres9. »
« Le discours sur le cannibalisme est une forme de racisme intellectuel. Il n’y a pas de cannibalisme, seulement des accusations. […] Comme il n’y avait pas d’infanticides ari’ioi à Tahiti, mais des accusations, toujours pour faire plaisir aux missionnaires, qui trouvaient là, avec une simplicité bien peu évoluée, une justification de leur vocation hors du commun10. »
« Les meurtres de blancs bien documentés n’ont jamais donné lieu à l’accusation de cannibalisme. Il est vrai que partout dans le monde du sud, on vous racontera sans ciller la vieille histoire de la viande du blanc qui n’aurait pas de goût et qui serait comme celle de la chèvre. Or pour accuser ainsi tout un peuple d’un crime contre l’humanité, il faudrait des preuves solidement étayées. Les quelques témoignages prétendus directs sont suspects, traduisant à chaque fois l’imaginaire ou la méchanceté coloniale. Que des chercheurs continuent à colporter une accusation sans même chercher si des preuves existent est le résidu d’une forme ancienne de sentiment de supériorité, sinon de racisme inconscient11. »
6La position de Guiart rejoint, sur bien des points, celle des auteurs qui ont œuvré à déconstruire le « stéréotype du canaque12 » : ce dernier était apparu abondamment dans des articles de revues et des romans d’aventures parus à la fin du xixe et au début du xxe siècle, mettant en scène les « sauvages cannibales » qui fascinaient et effrayaient les lecteurs métropolitains en quête d’exotisme13. Plusieurs écrivains calédoniens, tels que Georges Baudoux (1928), Alain Laubreaux (1928), ou encore Jean Mariotti (1930), ont également alimenté les clichés sur la férocité du monde mélanésien, en décrivant des scènes improbables de « festins cannibales » truffées de détails plus crus et abjects les uns que les autres, et censés démontrer l’état de « sauvagerie » des hordes païennes des Mers du Sud14. Selon Dauphiné :
« Au premier regard, le Néo-Calédonien ne semblait pas très exotique car il ne faisait pas rêver et ne donnait guère prise à l’imagination. Mais il pouvait encore faire peur, l’anthropophagie étant toujours perçue comme l’horreur absolue. C’est ce que comprirent les écrivains calédoniens : leurs canaques devaient être conformes à ce que l’on croyait savoir d’eux dans le public métropolitain15. »
7Dans la même veine, les détails de la mise en scène des « cannibales » du « village canaque » lors de l’Exposition coloniale de 1931 sont rapportés par Dauphiné à l’appui des brochures, courriers et journaux de l’époque16. Quoique romancées et fantasmées, ces descriptions alimentaient l’imaginaire colonial et fascinaient les curieux venus à la rencontre des « vrais » anthropophages17. L’exposition de 1931 a d’ailleurs donné lieu à la rediffusion d’un film réalisé l’année précédente par Antoine et Lugeon, au titre très évocateur, Chez les mangeurs d’hommes (1930), qui met pareillement en scène des acteurs sommés de jouer les « sauvages » :
« Les figurants recevaient un shilling par jour de travail, du tabac, et, en plus, une bonne dose d’eau-de-vie. “Les opérateurs opérèrent comme l’on fait d’habitude pour tourner des films. Dépouillés de ce qui, dans leur costume, sentait trop la civilisation, bien exercés, les cannibales d’occasion exécutèrent sans difficulté les scènes terrifiantes des combats, les incendies de villages ennemis’’, c’est-à-dire, en fait, quelques cases dressées pour la circonstance en feuilles sèches de cocotiers18. »
L’erreur de Maurice Leenhardt
8Alors que le cannibalisme est bel et bien devenu un enjeu épistémologique, source d’un âpre débat autour des conditions d’une recherche sur les données réelles ou supposées de pratiques anthropophages en contexte colonial ou postcolonial19, Guiart rejoint le camp de ceux qui n’y voient qu’un marqueur du dogme évolutionniste et essentialiste de l’idéologie impérialiste (au même titre, selon lui, que la sorcellerie ou les sacrifices humains). Sa critique, qui ne laisse place ni au doute, ni à la discussion, égratigne au passage le pasteur-ethnologue Leenhardt :
« Maurice Leenhardt y a malheureusement cru lui aussi, en expliquant plus tard son existence par l’absence de protéines animales dans l’alimentation (on ne connaissait pas encore l’importance et la qualité des protéines végétales, celles du taro, de la patate douce et même de l’igname). Le dossier se clôt étrangement sur la fille cadette du missionnaire [Roselène Dousset-Leenhardt, ndlr], imaginative au-delà de toute raison, qui accusera son père d’avoir mangé de la chair de gendarme en 1917 […]20. »
9Guiart s’attache donc à rectifier les interprétations de Leenhardt, dont la lecture trop prosaïque des récits autochtones aurait occulté la véritable intentionnalité symbolique que les locuteurs kanak ne pouvaient manquer de leur donner :
« Dans son ouvrage de maturité, Do Kamo (1947), Maurice Leenhardt traite de l’existence, à côté de la grande chefferie Bula, de pays de Lösi, Lifou, d’une famille dite la “viande du chef”. Il nous raconte sa rencontre avec une vieille dame lui expliquant que sa famille souffre du fait que le grand chef n’a plus mangé aucun des siens au cours des dernières générations, et qu’elle regrette le temps passé où c’était leur destin21. »
10De fait, dans un chapitre du Do Kamo consacré aux îles Loyauté, le missionnaire a brièvement évoqué un témoignage sur la manière dont les offrandes de porcs ont peu à peu remplacé la chair humaine dans les prémices apportées au Maître de la terre :
« Un clan présente aussi quelques porcs. Ce sont des bêtes modernes ; elles sont substituées à l’homme d’antan. Car autrefois ce clan avait la charge d’apporter en offrande l’un de ses membres au titre de condiment de la nourriture féculente. Le membre désigné pouvait se soustraire à sa destinée, s’il réussissait à donner une tortue en échange de sa vie. Mais il n’est pas simple de capturer une belle tortue de mer, si les circonstances ne vous favorisent pas. Et l’extraordinaire résignation des victimes de l’anthropophagie officielle est un des exemples les plus frappants de la solidarité des membres du groupe. J’ai connu à Maré une vieille femme portant le nom biblique de Débora, qui s’enorgueillissait d’être une “viande du chef’’, c’est-à-dire d’appartenir à ce clan qui, autrefois, lors des prémices des récoltes, donnait l’un de ses membres en condiment de la nourriture du chef22. »
11Selon Guiart, l’interprétation par Leenhardt de ces données ethnographiques est erronée :
« Maurice Leenhardt interprète le terme manger comme la réalisation d’un acte cannibale. Il se trompe du tout au tout. Même les meilleurs peuvent commettre ainsi des erreurs de grandes dimensions [sic]. Ici, la “viande du chef” n’a pas trait à de la chair humaine vouée à un festin d’anthropophages, et “manger” ne signifie nullement le repas à la suite d’un corps humain mis au four. Il s’agit de bien autre chose23. »
12Guiart établit alors un parallèle avec la manière dont un groupe d’appartenance ou de résidence s’attache à réparer certains déséquilibres sociaux en lien avec la transmission d’un nom et d’une tenure foncière :
« Lorsqu’une lignée se trouve en déshérence, les rivalités pour la remplacer, en partie sur le plan des appropriations foncières potentielles, créent un trouble public qui nécessite souvent l’arbitrage de la grande chefferie (angaxoju). Le grand-chef “mange” toujours dans la même famille, c’est-à-dire qu’il prend toujours un membre de cette famille dans de telles circonstances, pour le réaffecter en tant que nouveau titulaire des noms (c’est essentiel) de la lignée éteinte. L’homme “mangé” change de noms, ce qui entraîne de facto le changement de statut social et de statut foncier, pour lui et les siens. Le fait de “manger” toujours dans la même famille évite les accusations de favoritisme. »
« Mon expérience personnelle de ce type de tradition est qu’il existe des pseudos sacrifices humains qui couvrent en réalité des changements de noms et de statut social de la soi-disant victime […]. On entonnera le chant et la danse du sacrifice d’une victime humaine […], mais celle-ci, parfaitement vivante, sera adoptée dans un lignage de cadets classificatoires de la chefferie réceptrice de la victime humaine, et se verra attribuer une nouvelle épouse, devenant de ce jour interdite de relations pour sa famille antérieure24. »
13Par conséquent, selon Guiart, les interlocuteurs du missionnaire l’ont laissé se méprendre sur le sens de leurs paroles :
« les informateurs de Leenhardt, le chef officiel Trutrue Bauc, dit Bula, […] et la vieille dame interrogée, savaient tout cela. Ils n’ont rien expliqué à Maurice Leenhardt, parce que ce dernier devait comprendre sans y être aidé. J’ai mis trente ans pour ce faire, grâce au parallèle avec une institution identique au nord Malekula, au Vanuatu, où j’avais pu pousser l’enquête aussi loin que nécessaire, parce que l’institution y était devenue extrêmement formalisée et par conséquent provoquait plus facilement l’interrogation25 ».
Anthropophagie et faux-semblants
14Par-delà les données ethnographiques, l’expression vernaculaire évoque en définitive une forme institutionnalisée de réassignation lignagère ou clanique ayant pour effet de fournir une nouvelle identité sociale à celui qui sert de « nourriture » et qui se trouve « phagocyté » par son nouveau groupe d’appartenance. Afin d’appuyer sa démonstration, Guiart évoque un cas similaire qu’il a pu observer chez les nëmbalian du nord de Malekula (Mallicolo), au Vanuatu26 : il reconnaît au passage, de manière implicite, avoir pu lui-même se montrer crédule en prenant au pied de la lettre les récits de ses interlocuteurs. On ne s’étonnera donc pas de (re)lire la monographie, il est vrai un peu datée, qu’il consacrait, au début de sa carrière, à l’île de Tanna. L’ethnologue y relatait alors, comme son « vénéré maître » avant lui, et dans le détail, les penchants anthropophages de ceux qui, parmi ses hôtes, pouvaient se prévaloir d’un certain statut social. Sa description « ethnographique » du transport du cadavre putréfié n’est pas sans rappeler les envolées lyriques des romans populaires de Georges Baudoux :
« Sur Tanna, il n’y avait dans chaque groupe tribal, au plus qu’une lignée, c’est-à-dire un groupe restreint, dont les membres avaient le droit de participer au festin cannibale. Les cadavres des ennemis tués leur étaient envoyés en suivant les routes cérémonielles […]. Le cadavre était apporté, attaché à une perche comme un cochon, par les gens du groupe meurtrier, jusqu’au yimwayim allié qui devait être sa première étape. Les gens du lieu le recevaient et le suspendaient par les pieds pour la nuit à un arbre particulier du bord de la place. Ils remettaient en échange un porc glabre et le nekaẅa d’usage aux porteurs qui s’en allaient sans se préoccuper des suites de l’affaire. Sauf si les cannibales du lieu — s’il y en avait — désiraient garder le mort pour eux, ils l’envoyaient plus loin le jour suivant, recevant en échange à leur tour un porc glabre et un nekaẅa. Le voyage se poursuivait ainsi de yimwayim en yimwayim, jusqu’à ce que le mort fût propre à être mangé, quand il en était au point de pourriture où les humeurs font éclater la peau, et jusqu’à ce qu’un groupe comprenant une lignée de cannibales décidât de garder le cadavre. L’acceptation du mort et sa mise au four, impliquait l’obligation de renvoyer en échange un jour le cadavre d’un ennemi tué, en suivant la même route mais en sens contraire. La cuisson et la manducation de cette chair humaine putréfiée, par les hommes et les femmes intéressés, avait lieu dans un endroit spécial sis à l’écart du yimwayim et des habitations27. »
15Quarante ans plus tard, Guiart n’évoque plus ce type de scènes d’exocannibalisme – sauf pour les démythifier – et privilégie à l’inverse la dimension métaphorique du discours vernaculaire, qu’il analyse comme un modèle narratif très répandu en Océanie :
« La théorie océanienne prêtant vie à cette croyance blanche au cannibalisme des noirs, théorie qui explique, mais ne justifie en aucune façon les accusations, se trouve dans l’analyse classique du concept de mana, en partie au moins telle que l’École de sociologie française s’y est intéressée, la nourriture étant l’inverse ou le contraire du mana et du tapu. L’insulte la plus grave est de menacer de transformer l’adversaire en nourriture, ce qui lui fait ispo facto, même si on ne le touche pas, perdre son mana à moins de tirer une revanche éclatante de l’injure28. »
16Ainsi, il est une forme communément admise d’éloquence guerrière qui consiste à menacer de se repaître du corps d’un ennemi pour mieux l’anéantir, le simple fait de vouloir porter atteinte symboliquement à l’existence charnelle d’autrui équivalant à l’humilier publiquement. Pour autant, ni les « sacrifices », ni les « festins de chair humaine » n’existeraient en dehors des exagérations de ceux qui les décrivent et des fantasmes de ceux qui les écoutent :
« La seule réalité est que, dans toute la région, l’injure suprême est de dire d’un adversaire que l’on va en faire sa nourriture, parole qui se suffit à elle-même en ce qu’elle porte déjà une atteinte dangereuse au prestige de l’intéressé, la parole, comme on le sait, équivalant à l’acte29. »
Le cannibale, c’est l’autre !
17Pour en finir avec les « idées fausses » dans lesquelles Guiart a fini par ranger la quasi-totalité des références à l’anthropophagie en terre kanak, une autre manière de manifester oralement son hostilité à l’égard des membres d’un clan ou d’un groupe de lignages consisterait à les traiter de « mangeurs d’hommes », comme le faisaient auparavant les missionnaires à propos des païens dans le seul but de justifier les bienfaits de l’évangélisation. Guiart a ainsi décrit dans le détail les origines polynésiennes d’un réseau de clans alliés extrêmement puissant, baptisé Xetriwaan, composé des descendants de groupes allochtones venus par la mer depuis l’archipel des Tonga via le Vanuatu, pour faire souche ensuite aux îles Loyauté (Lifou, Maré), sur la Grande Terre30, et jusqu’à l’île des Pins où ce même réseau aurait fondé la grande chefferie :
« Par ailleurs, accuser les autres de cannibalisme est un jeu social auquel on ne résiste guère, témoin les nombreux textes qui décrivent à Lifou les Xetriwaan comme guerriers et cannibales, et à Houaïlou les mêmes accusations contre leurs correspondants locaux, appelés Kabokarê pour ne pas avoir à les désigner plus avant31. »
18Ce point particulier est sans doute le plus intéressant, car il suggère une réappropriation de la rhétorique primitiviste et évolutionniste des colonisateurs par les colonisés, c’est-à-dire une sorte de « reconversion de la conversion » qui reproduit, sous une forme inversée, l’essentiel des principes et des représentations occidentales – en particulier missionnaires – de l’altérité culturelle32.
19Ainsi, à travers quelques exemples tirés de sa bibliographie récente, Guiart prône au sujet de la Nouvelle-Calédonie et de ses « indigènes », une vision strictement métaphorique des scènes de cannibalisme consignées par les scribes occidentaux33. Dans le débat idéologique sur le cannibalisme34, le positionnement de Guiart apparaît donc sans équivoque : l’ethnologue s’inscrit de facto dans une démarche épistémologique en faveur d’une objectivation des conditions de production du discours anthropologique et historiographique occidental sur les pratiques « anthropophages » des peuples mélanésiens – un discours que les Kanak eux-mêmes finissent par reprendre à leur compte pour le (re)transmettre ensuite à plusieurs générations d’ethnologues en quête d’exotisme.
La « doctrine Guiart » : la rencontre entre « naïveté du blanc » et « perversité océanienne »
20Une des principales critiques dont Guiart a parsemé ses innombrables comptes rendus d’articles et d’ouvrages sur l’Océanie concerne ce qu’il nomme avec le plus grand mépris la « naïveté » des chercheurs occidentaux35. Cette tare quasi systématique serait d’autant plus regrettable qu’elle aurait été parfaitement perçue et aussitôt instrumentalisée par les Mélanésiens eux-mêmes, qui auraient inventé de toutes pièces des histoires de « festins cannibales » destinées à tous les Européen-ne-s crédules, à la fois horrifié·e·s et désireux·ses de les entendre :
« La complication est que lorsque le blanc, depuis deux siècles, veut entendre des histoires de cannibales, l’Océanien les lui fournit avec brio et pour s’amuser, en les fabricant sur place, ou en les adaptant d’autres histoires entendues à une autre occasion. Faire passer un frisson dans le dos des femmes européennes est pour beaucoup un vrai plaisir36. »
« La perversité océanienne […] amène à porter jugement sur la naïveté du blanc, et l’on rencontrera une complicité générale pour tromper l’intéressé en lui en rajoutant dans le spectaculaire, en premier lieu en analysant les questions incessantes de l’enquêteur pour y trouver les éléments de réponse qui permettront d’imaginer dans le sens désirable. Cela a commencé en Polynésie à la fin du xviiie siècle avec les missionnaires anglo-saxons à qui l’on racontait toutes les histoires de massacres, de cannibalisme et de stupre qu’ils voulaient entendre37. »
21Si la plupart des chercheurs océanistes ont été ouvertement dénigrés par Guiart, c’est tout de même l’ethnologue Bensa qui fut le plus souvent et le plus violemment visé par ses attaques. Il faut rappeler ici la profonde animosité qui s’était développée dès le milieu des années 1980, entre Jean Guiart (1925-2019) et Alban Bensa (1948-2021) : le second, qui fut l’étudiant du premier, avait soutenu sa thèse sous sa direction, puis il avait été son assistant à l’université de Paris V. Tandis que Bensa s’imposait peu à peu comme une figure tutélaire incontournable de l’anthropologie de l’Océanie, et du monde kanak en particulier, les règlements de comptes entre les deux hommes ont pris un tour personnel, presque passionnel, qui a nourri une part non négligeable de leurs écrits38. Guiart reprochait surtout à Bensa de ne pas reconnaître tout ce qu’il devait au travail préparatoire mené par Leenhardt dans la région de Houaïlou, et de balayer l’œuvre du missionnaire aux seules fins d’asseoir sa propre légitimité scientifique. L’un de ses arguments a consisté à déplorer la crédulité de Bensa,
« qui dans son adolescence intellectuelle eut des faiblesses pour l’image exotique des explorateurs parisiens de la salle Pleyel, et dont la croyance naïve aux massacres et au cannibalisme fausse l’objectivité de son jugement39 ».
22À propos du cannibalisme, Guiart a toujours dénigré les travaux de Bensa et des chercheurs qui suivirent ses traces, par des propos très acerbes, répétés de manière quasi incantatoire :
« En ce qui concerne les sacrifices humains, j’observe une concurrence entre spécialistes pour raconter les histoires les plus affreuses, depuis qu’Alban Bensa met sa carrière en jeu pour des histoires de massacres, de festins cannibales et de sacrifices humains parfaitement inventés en Nouvelle-Calédonie. Il a créé des sacrifices humains, qui n’ont jamais existé, au moment des rituels des prémices, pour le reste ce sont des accusations canaques fréquentes vis-à-vis de ceux avec lesquels on est en compétition de prestige. On raconte des histoires horribles aux blancs pour se faire valoir et faire du tort à l’adversaire. L’accusation est un fait social qui doit être tout d’abord analysé en tant que tel40. »
« Bensa nous raconte des histoires modernes à dormir debout, comme il a pris l’habitude de nous présenter, pour la Calédonie, une société canaque qui n’a jamais existé, pleine d’horreurs, de massacres et de festins cannibales, exactement ce que racontaient les missionnaires et leurs zélateurs, qu’il voue pourtant aux gémonies. On se demande d’ailleurs bien pourquoi, puisqu’il fait chorus avec eux41. »
Conclusion
23Guiart, s’il fut prompt à dénoncer une forme de naïveté méthodologique chez bon nombre d’ethnologues occidentaux, a ouvert ici une véritable brèche épistémologique : à travers l’exemple du cannibalisme, ce qui se joue en réalité ressemble plutôt à un renversement symbolique du stigmate colonial et, par ricochet, de la relation ethnographique, dans laquelle « l’ethnologisé » prend le dessus sur l’ethnologue, lequel finit par être instrumentalisé par son propre « objet de recherche ». Je tiens à rappeler que Guiart pensait sensiblement la même chose au sujet de la sorcellerie42, dont il disait lors de notre rencontre, chez lui, rue de Sébastopol, en juillet 2018, que « c’est un truc que les Kanak ont inventé pour se moquer des blancs43 ».
24Subsidiairement, il a tenté d’utiliser les incertitudes et les ambiguïtés inhérentes à tous les travaux de recherche sur le cannibalisme pour réaffirmer sa propre autorité scientifique :
« J’ai évité ainsi de me faire raconter une nouvelle fois les billevesées que l’on rencontre dans les écrits d’Alban Bensa (les histoires de massacres, de cannibalisme et de sacrifices humains, inventées et développées pour faire plaisir au chercheur qui n’attend que cela pour se prendre pour un super ethnologue… ou au blanc, missionnaire, gendarme, administrateur, aujourd’hui enseignant naïf, qui s’imagine acquérir à bon compte une connaissance faussement approfondie)44. »
25L’argument que je voudrais retenir à l’issue de ce texte – qui visait aussi à mieux cerner une personnalité aussi complexe et controversée que celle de Jean Guiart –, est son parti pris en faveur d’une réappropriation et d’un contrôle, par les Kanak eux-mêmes, des discours (littéraires ou scientifiques) et des représentations qui les concernent directement : depuis les premières formes d’agentivité, voire d’instrumentalisation, du savoir ethnologique auxquelles j’ai fait référence, jusqu’à une émancipation des éternels clichés sur le cannibalisme qui, pour faire écho à ce qui est écrit dans cet ouvrage, nous parlent sans doute plus de l’histoire de l’imaginaire occidental que de la cosmologie et des structures sociales kanak. Cet argument revêt une importance particulière dans la démarche réflexive qui doit être celle de tout chercheur, ainsi que dans l’objectivation de la construction des savoirs en sciences sociales : on ne s’y trompera pas en lisant les louanges dont Guiart couvre, a contrario, le livre d’un chercheur kanak, Jean-Marc Pidjo, dont il publie les travaux en 2002 dans sa maison d’édition. Dans la préface de l’ouvrage, signée par Guiart, ce dernier écrit :
« Accessoirement, il est rafraîchissant de lire un texte où l’auteur n’a pas imaginé de mettre ce qui plaît tant aux lecteurs européens, même spécialisés malheureusement, les histoires de massacres et de cannibalisme qui sont le quotidien de la littérature coloniale, imaginées à toutes les générations et partout dans la région, à chaque fois que l’interlocuteur océanien avait une raison cachée de faire plaisir aux blancs45. »
26Peut-être est-ce encore une forme de pudeur épistémologique qui nous prive aujourd’hui des contributions – pourtant initialement prévues – de nos collègues enseignants-chercheurs kanak ? J’aimerais conclure par un hommage empreint de respect et d’humilité à deux intellectuels kanak originaires de Maré46, Wapone Cawidrone et Eddie Wadrawane, qui pourraient nous éclairer sur la place particulière de ce clan que Leenhardt décrivait en 1956, et dont le nom en nengone signifie « la petite viande du chef ». Comme sur bien d’autres sujets « classiques » de l’anthropologie, il faut en effet souhaiter que les Kanak eux-mêmes s’approprient l’évocation et l’interprétation des récits et des représentations du cannibalisme, réel ou imaginaire, tels qu’ils les rencontrent dans leurs propres groupes sociaux.
27Pani buice co beredron! Inomelei!47.
Notes de bas de page
1Guiart Jean, « Réflexion sur le concept de culture », Études mélanésiennes, 1996, 30, p. 37-38.
2Guiart Jean, « Les conditions d’une enquête sur la mythologie du masque en Nouvelle-Calédonie : dialogue avec Maurice Leenhardt, Journal de la Société des Océanistes, 1974, 42-43, p. 111.
3L’orthographe « canaque » fut longtemps la plus communément employée, y compris dans la littérature scientifique, pour désigner le peuple mélanésien autochtone de Nouvelle-Calédonie. L’orthographe « kanak », d’abord inspirée du mouvement nationaliste de libération de ce même peuple, s’est imposée progressivement à partir des années 1980. En dépit de ses convictions progressistes et de sa proximité avec le monde kanak, Guiart n’a jamais cessé d’utiliser l’orthographe coloniale dépréciative.
4Guiart Jean, Un siècle et demi de contacts culturels à Tanna, Nouvelles-Hébrides, Publications de la Société des Océanistes, no 5, Paris, Musée de l’Homme, 1956, p. 5.
5Bensa Alban et Bourdieu Pierre, « Quand les Canaques prennent la parole », Actes de la recherche en sciences sociales, 1985, 56, p. 69-85. Je renvoie aussi au dossier consacré à Jean Guiart, publié en 2022 dans le no 154 du Journal de la Société des Océanistes, [https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/jso.12498], consulté le 19 janvier 2023. Sur la lecture critique de Leenhardt par ses successeurs, voir Graille Caroline, « Tuer le père ? Les enjeux d’une analyse critique de Maurice Leenhardt par les ethnologues » dans Murphy Gwénael, Barbe Dominique et Graille Caroline (dir.), Maurice Leenhardt (1878-1954). Contexte et héritages, Paris, L’Harmattan, 2022, p. 155-178.
6Je remercie Patrice Godin qui a évoqué le souvenir d’un changement de discours sur le cannibalisme dans les cours d’anthropologie de Guiart, dont il fut l’élève, changement qu’il situe un peu avant 1975 (intervention de P. Godin au colloque « Traces, récits et représentations du cannibalisme en Océanie », Nouméa, 28 octobre 2021).
7Les citations placées sous cette référence (Guiart Jean, Maurice Leenhardt, le lien d’un homme avec un peuple qui ne voulait pas mourir, Nouméa, Le Rocher-à-la-Voile, 2003), sont extraites de la troisième édition du livre qu’il consacre à Maurice Leenhardt (1997 pour la 1re édition).
8Voir la synthèse de Francis Bryard, qui rappelle la disparition inexpliquée de l’expédition conduite par La Pérouse (1785), ainsi que le massacre en 1839 des missionnaires John Williams et James Harris à Erromango (Nouvelles-Hébrides) : une expédition partie en 1840 retrouva leurs « restes » et on en déduisit qu’ils avaient été « dévorés » : Bryard Francis, Bougainville, le mythe du bon sauvage et le cannibale. Regards occidentaux sur le Pacifique et la Mélanésie, 2013, p. 7-8, [https://www.academia.edu/41608470/Bougainville_le_mythe_du_bon_sauvage_et_le_cannibale_Regards_occidentaux_sur_le_Pacifique_et_la_Mélanésie_?f_ri=1036270], consulté le 11 mars 2023.
9Guiart Jean, « Réflexion sur le concept de culture », art. cité, p. 37-38.
10Guiart Jean, Ça plaît ou ça ne plaît pas III, Essai de bibliographie critique : Vanuatu et Océanie, Nouméa, Le Rocher-à-la-Voile/Les Éditions du Cagou, 2007, p. 467. Voir aussi p. 463.
11Guiart Jean, Maurice Leenhardt, le lien…, op. cit., p. 184.
12Dauphiné Joël, Canaques de la Nouvelle-Calédonie à Paris en 1931. De la case au zoo, Paris, L’Harmattan, 1998, p. 56.
13On trouve de nombreuses références littéraires et iconographiques dans l’exposition Kannibals et Vahinés et dans l’ouvrage éponyme publié par l’ethnologue Boulay Roger, Kannibals et Vahinés, Imagerie des Mers du Sud, La Tour d’Aigues, éditions de l’Aube, coll. « Carnets de Voyage », 2000. Sur la littérature savante et populaire, voir aussi Guille-Escuret Georges, Sociologie comparée du cannibalisme. Ennemis intimes et absorptions équivoques en Amérique, Paris, PUF, 2013, ainsi que Eddy Banaré ou encore Guillaume Molle et al. dans ce volume.
14Leurs ouvrages les plus explicites s’intitulent respectivement Légendes canaques, Takata d’Aîmos, et Yan-le-Métis.
15Dauphiné Joël, Canaques de la Nouvelle-Calédonie à Paris…, op. cit., p. 56.
16Ibid., p. 63-77 et documents annexes.
17Voir l’article de Laubreaux Alain paru dans Candide, le 14 mai 1932 cité dans ibid., p. 150-154.
18O’Reilly Patrick, « Le “documentaire” ethnographique en Océanie », Journal de la Société des Océanistes, 1949, 5, p. 122-123.
19Arens William, The Man-Eating Myth. Anthropology and Anthropophagy, New York, Oxford University Press, 1979 ; Barker Francis, Hulme Peter et Iversen Margaret (dir.), Cannibalism and the colonial World, New York, Cambridge University Press, 1998 ; Lindenbaum Shirley, « Thinking about cannibalism », Annual review of Anthropology, 2004, 33, p. 475-498.
20Guiart Jean, Maurice Leenhardt, le lien…, op. cit., p. 184-185.
21Guiart Jean, Ça plaît ou ça ne plaît pas III…, op. cit., p. 316.
22Leenhardt Maurice, Do Kamo. La personne et le mythe dans le monde mélanésien, Paris, Gallimard, coll. TEL, 1985 (1947), p. 204. Plus loin, Leenhardt énumère les « sous-clans » descendant des frères du premier chef Naisseline, dont un « clan chargé de la nourriture du chef, y compris, jadis, la fourniture de la viande, chair humaine ou tortue » (p. 205-206). À noter que cette interprétation est encore donnée aujourd’hui par certains dignitaires et intellectuels kanak originaires de ce même district (communication personnelle de W. Cawidrone, Nouméa, juillet 2021).
23Guiart Jean, Ça plaît ou ça ne plaît pas III…, op. cit., p. 316, ainsi que pour la citation suivante.
24Guiart Jean, Ça plaît ou ça ne plaît pas : éléments de bibliographie critique. I, Nouvelle-Calédonie, Nouméa, Le Rocher-à-la-Voile, 2004, p. 109.
25Guiart Jean, Ça plaît ou ça ne plaît pas III…, op. cit., p. 317.
26Guiart Jean, Ça plaît ou ça ne plaît pas I, op. cit., p. 109.
27Guiart Jean, Un siècle et demi de contacts…, op. cit., p. 57. Guiart nous précise dans la bibliographie détaillée qu’il publie sur son site officiel que cet ouvrage écrit dans les années 1950 « a été renouvelé récemment, par une édition très complétée en anglais, fruit d’en engagement pris à la demande des intéressés » (« Bibliographie : Ouvrages. État au 30 avril 2012 », p. 2, extrait du site [http://www.jeanguiart.org/pdf/ouvrages.pdf], consulté le 13 février 2023). Il est particulièrement intéressant de noter qu’en réalité, l’auteur a entièrement réécrit l’ouvrage, évacuant les « erreurs » qu’il imputait sans doute à sa crédulité de jeune chercheur, et recentrant la discussion sur les pratiques anthropophages autour du mythe universel de l’ogre (Guiart Jean, Tanna revisited II, Nouméa, Le Rocher-à-la-Voile, 2012, p. 67 et sq.). L’anecdote aux détails truculents qui faisait référence au transport de la « viande » a entièrement disparu de cette version « renouvelée » et publiée en langue anglaise.
28Guiart Jean, Maurice Leenhardt, le lien…, op. cit., p. 184.
29Guiart Jean, « Réflexion sur le concept de culture », art. cité, p. 38. Des équivalents en français sont communément employés dans le langage familier : « ne faire qu’une bouchée » d’un adversaire, par exemple, ou encore « se laisser bouffer » par une personne qui a tendance à s’imposer.
30Guiart Jean, Une clé de la société canaque, Les réseaux d’identité partagée, Nouméa, Le Rocher-à-la-Voile/Les Éditions du Cagou, 2004, p. 86 sq.
31Guiart Jean, Maurice Leenhardt, le lien…, op. cit. p. 184. Voir aussi Jean Guiart, Une clé de la société canaque…, op. cit., p. 85-86. Sur l’île des Pins : Lagarde Louis, « L’île des Pins et ses relations avec la Polynésie. Données archéologiques et particularités stylistiques », Journal de la Société des Océanistes, 2017, 144-145, p. 253-268.
32L’expression est empruntée à Babadzan Alain, « L’invention des traditions et le nationalisme », Journal de la Société des Océanistes, 1999, 109, p. 25.
33Guiart affectionne particulièrement ce terme de « scribe » pour décrire le rôle dévolu à l’ethnologue occidental.
34Voir infra le chapitre de Vincent Vandenberg.
35Guiart Jean, Ça plaît ou ça ne plaît pas…, op. cit., p. 171 et suivantes, cité dans Graille Caroline, « A-t-on vraiment lu Jean Guiart ? », Journal de la Société des Océanistes, 2022, 154, p. 112.
36Guiart Jean, Maurice Leenhardt, le lien…, op. cit., p. 184.
37Guiart Jean, Ça plaît ou ça ne plaît pas I…, op. cit., p. 98.
38Voir notamment Bensa Alban et Rivierre Jean-Claude, « Jean Guiart et l’ethnologie », L’Homme, 1984, 24/1, p. 101-105 ; Bensa Alban et Wittersheim Éric, « Jean Guiart and New Caledonia: a Drama of Misrepresentation », The Journal of Pacific History,1998, 33/2, p. 221-224 ; Guiart Jean, « Ethnologie mélanésienne : question de méthode », L’Homme, 1984, 24/1, p. 91-99 ; Do Kamo. La personne…, op. cit. ; Ça plaît ou ça ne plaît pas, op. cit., p. 195-199 ; Trépied Benoît et Wittersheim Éric, « Un anthropologue au service de la réforme coloniale. Jean Guiart et l’Union française dans le Pacifique (1947-1957) », Les carnets du Bérose, 1999, p. 259-287.
39Guiart Jean, Une clé de la société canaque…, op. cit. p. 132.
40Guiart Jean, Ça plaît ou ça ne plaît pas III…, op. cit., p. 131.
41Guiart Jean, ibid., p. 229 : à propos d’un chapitre publié dans l’ouvrage : Hamelin Christine et Wittersheim Éric (dir.), La tradition et l’État, Paris, L’Harmattan (Coll. Cahiers du Pacifique sud), 2002. Guiart dénigre pareillement l’ouvrage de Wittersheim Éric, Après l’indépendance : le Vanuatu, une démocratie dans le Pacifique, La Courneuve, Aux lieu d’être, 2006 : comme Bensa dont il fut très proche, Wittersheim « cite les nombreux récits d’anthropophagie rapportés par les premiers Européens, sans corriger du fait que l’existence de cette anthropophagie n’a jamais été prouvée », Guiart Jean, Ça plaît ou ça ne plaît pas III…, op. cit., p. 255.
42Guiart Jean, « Réflexion sur le concept de culture », art. cité, p. 38.
43« La sorcellerie est un concept blanc plaqué sur la réalité canaque, et que ces derniers s’amusent à nous renvoyer “à la figure”, point à la ligne. Et ce n’est pas le seul », Guiart Jean, Ça plaît ou ça ne plaît pas I…, op. cit., p. 214.
44Guiart Jean, Ça plaît ou ça ne plaît pas III…, op. cit., p. 291. Voir aussi p. 131.
45Pidjo Jean-Marc, Le mwa teâma mwalebeng et le fils du soleil : organisation de l’espace foncier kanak en pays mwalebeng, Nouméa, Le Rocher-à-la-Voile, Tahiti, les Éditions du Cagou, 2003, p. 18.
46Île de l’archipel des Loyauté, en Nouvelle-Calédonie, dont la langue est le nengone.
47Expression en langue nengone que l’on peut traduire par : « Ce sont eux qui peuvent le dire ! C’est ainsi ! »
Auteur
Université de la Nouvelle-Calédonie.
Caroline Graille est docteure en anthropologie sociale et culturelle, chargée de cours à l’université de la Nouvelle-Calédonie, UR TROCA.

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