Chapitre I. L’empire colonial portugais d’Afrique
Un monde qui ne concevait pas sa fin (1961-1974)
p. 23-52
Texte intégral
1L’indépendance du Brésil, en 1822, marqua la fin de ce qui est communément appelé le « second empire colonial portugais ». Une nouvelle ère de l’histoire coloniale portugaise commençait alors, marquée par un recentrage de l’empire autour des possessions portugaises d’Afrique. Le « troisième empire colonial portugais » qui émergea de ce recentrage était constitué de l’Angola, du Mozambique, de la Guinée (actuelle Guinée-Bissau), des archipels du Cap Vert et de Sao-Tomé-et-Principe, ainsi que des territoires asiatiques du Timor-Oriental, de Macau et des comptoirs indiens de Goa, Daman et Diu.
2Alors qu’au lendemain de la Seconde Guerre mondiale le principe du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes fut réaffirmé et que les puissances coloniales européennes furent confrontées aux premières contestations dans les territoires sous leur domination, le Portugal, dirigé depuis 1932 par António de Oliveira Salazar, résista au vent de l’histoire. Ainsi, et malgré les nombreuses critiques essuyées sur la scène internationale, notamment au sein de l’Organisation des Nations unies (ONU)1, l’Estado Novo réaffirma sa détermination à maintenir son empire colonial. L’année 1961 marqua un véritable tournant, ou plutôt une rupture, dans l’histoire coloniale portugaise, et dans l’histoire contemporaine du Portugal de manière générale. En effet, 1961 est considérée comme ayant été l’annus horribilis de la dictature salazariste. En janvier, le capitaine Henrique Galvão, un ancien administrateur colonial, détourna le paquebot Santa Maria et fit de nombreuses déclarations contre le régime salazariste2. En avril, Salazar dut faire face à une tentative, avortée, de coup d’État organisée par le ministre de la Défense, le général Júlio Botelho Moniz. Et en décembre de la même année, Goa, Daman et Diu furent envahis par les troupes de l’Union indienne3. 1961 marqua également une importante rupture quant au colonialisme portugais en Afrique. Ce fut, en effet, en février et mars de cette même année qu’éclata une première guerre de libération en Angola. En 1963 et 1964, la guerre coloniale se propagea à la Guinée et au Mozambique4.
3Ce premier chapitre présente une synthèse des dernières années du colonialisme portugais en Afrique, depuis le début des guerres coloniales jusqu’à la chute du régime de Salazar/Caetano le 25 avril 1974. Il s’articule autour de la question suivante : quelle fut la réponse apportée par le régime de Lisbonne à l’émergence de la lutte armée dans les colonies d’Afrique ?
1961 : début des luttes anticoloniales en Afrique portugaise
4Alors que le début des années 1960 fut marqué par une vague sans précédent d’indépendances des anciennes colonies africaines des empires coloniaux européens, ce ne fut qu’à partir de 1961 que commencèrent officiellement les luttes anticoloniales dans les territoires africains sous domination portugaise. Un facteur d’explication du caractère relativement tardif de l’éclosion de ces conflits réside dans la nature même du régime portugais. En effet, le caractère autoritaire de l’Estado Novo se faisait également sentir dans les colonies, notamment en ce qui concerne l’absence de liberté d’expression et d’organisation politique. L’installation en 1957 dans chacune des colonies d’Afrique de la Police internationale et de défense de l’État (PIDE, Polícia Internacional e de Defesa do Estado), police politique de l’Estado Novo, confirma le caractère répressif de la politique coloniale portugaise et rendit encore plus difficile l’émergence de mouvements de contestation5. En 1957, Salazar lui-même se félicitait de l’inexistence « d’organisations subversives » remettant en cause la souveraineté portugaise dans les colonies6.
La création des mouvements indépendantistes
5Dans le cas de l’Angola, l’historien Malyn Newitt indique qu’en 1960 cinquante-huit organisations nationalistes angolaises étaient présentes en exil à Léopoldville, actuelle Kinshasa, capitale de la République Démocratique du Congo7. Cependant, seulement trois mouvements indépendantistes marquèrent particulièrement la lutte contre la domination portugaise : le Mouvement populaire de libération de l’Angola (Movimento Popular de Libertação de Angola, MPLA), l’Union des peuples d’Angola/Front national de libération de l’Angola (União dos Povos de Angola/ Frente Nacional de Libertação de Angola, UPA/FNLA) et l’Union nationale pour l’indépendance totale de l’Angola (União Nacional para a Independência Total de Angola, UNITA).
6Le MPLA est créé en décembre 1956, regroupant en son sein plusieurs organisations politiques clandestines8. Ce nouveau parti fut initialement dirigé par Viriato da Cruz et Mário Pinto de Andrade, puis par Agostinho Neto. Cependant, le mouvement ne s’organisa formellement qu’à partir de 1960, une fois en exil à Conakry, après avoir été la cible d’une vague de répression de la part de la PIDE à la fin des années 1950 qui conduisit notamment à l’emprisonnement de nombreux membres et responsables9. En termes d’idéologie, le MPLA maintint des relations étroites avec le Parti communiste portugais (Partido Comunista Português, PCP), relations que ses dirigeants avaient établies lors du séjour de certains d’entre eux à Lisbonne. Malyn Newitt présente le parti comme ayant tenté « d’unir les Angolais autour d’une base non-tribale et non-raciale10 ». Le mouvement comptait en effet parmi ses membres des personnalités noires, blanches et métisses, pour la plupart originaires de la capitale Luanda, ou des principales villes angolaises11.
7L’UPA apparaît, quant à elle, en 1958, prenant la suite de l’Union des Peuples du Nord de l’Angola (União dos Povos do Norte de Angola, UPNA) créée en 195712, à la tête de laquelle se trouvait Holden Roberto. En 1962 l’UPA sera rebaptisée le FNLA et devint le mouvement indépendantiste le plus important en termes d’effectifs jusqu’en 1974. Une des différences marquantes entre le MPLA et le FNLA était le fait, comme le remarque l’historien António Costa Pinto, que le FNLA, à la différence du MPLA, jouissait, en termes de soutien, « d’une excellente base ethnique transfrontalière13 ». René Pélissier présente le FNLA comme faisant partie d’un courant « ethnonationaliste », en opposition au MPLA qu’il qualifie de « moderniste14 ».
8Le troisième mouvement de libération angolais qui joua un rôle dans la lutte contre les Portugais est l’UNITA. Ce mouvement fut créé en mars 1966 par Jonas Savimbi, membre du FNLA jusqu’en 1964 et ancien « ministre des Affaires étrangères » du Gouvernement révolutionnaire d’Angola en exil (Governo Revolucionário de Angola no Exílio, GRAE) formé par le FNLA en 1962.
9En Guinée, c’est en 1956 que vit jour son principal mouvement indépendantiste : le Parti africain de l’indépendance (Partido Africano da Independência, PAI), ancêtre du Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (Partido Africano para a Independência da Guiné e de Cabo verde, PAIGC). Fondé par un groupe de Cap-verdiens travaillant en Guinée, ce parti est dirigé par Amílcar Cabral. En 1959, le PAIGC dut s’exiler, après avoir été contraint par la PIDE à cesser ses activités sur le territoire guinéen15. Le PAIGC trouva un appui majeur en Guinée-Conakry, en la personne de son Président, Sékou Touré, ce qui lui permit d’établir une base à l’extérieur du territoire guinéen. L’idéologie défendue par le PAIGC est décrite par Malyn Newitt comme « un genre de socialisme à base villageoise16 ». Pour l’historien, la force du PAIGC résidait dans la figure d’Amílcar Cabral, qui « donna au mouvement indépendantiste un ensemble d’idées par lesquelles se projetait un avenir qui allait au-delà d’un simple renversement du gouvernement colonial portugais17 ».
10Cependant, l’histoire de la lutte de libération de la Guinée fut également marquée par la création de mouvements rivaux au PAIGC, notamment le Front de libération et d’indépendance nationale de la Guinée, (FLING, Frente de Libertação e Independência Nacional da Guiné), soutenu par le Sénégal de Léopold Sédar Senghor. L’opposition au PAIGC, au-delà d’une divergence idéologique, était également une opposition à la composante cap-verdienne de sa direction. Amílcar Cabral souhaitait l’union du Cap-Vert et de la Guinée au sein d’un seul État. Il déclarait à ce propos : « Par nature, par l’histoire, la géographie, les tendances économiques […], la Guinée et le Cap-Vert ne font qu’un18. » Cette position n’était pas acceptée par tous. Malgré ces divergences, le PAIGC resta néanmoins jusqu’à la chute du régime salazariste le seul véritable adversaire des forces portugaises, et ce même après l’assassinat d’Amílcar Cabral le 20 janvier 1973.
11Le Mozambique, comme le souligne l’historien Norrie MacQueen, fut « la dernière colonie à créer un véritable mouvement indépendantiste national19 ». En effet, il fallut attendre pour cela la création en juin 1962 du Front de Libération du Mozambique (Frente de Libertação de Moçambique, FRELIMO). Il devint l’opposant le plus important aux forces portugaises au Mozambique. Résultant de l’union de différents mouvements préexistants fondés sur des bases ethniques, le FRELIMO est décrit par Norrie MacQueen comme étant le plus faible des mouvements indépendantistes africains du point de vue de sa définition idéologique20. Cette idée est partagée par Malyn Newitt qui présente le parti comme étant « une sorte de caméléon politique, capable de changer sa couleur idéologique en fonction des circonstances21 ». Le FRELIMO fut dans un premier temps dirigé par Eduardo Mondlane, avant que ce dernier ne soit assassiné en février 1969. Samora Machel, commandant militaire du FRELIMO depuis 1966, lui succéda, faisant prendre au parti un tournant plus à gauche et plus radical.
Le début des conflits dans les colonies
12Si, selon les dires de Salazar, la guerre outre-mer était inévitable dès 195922, il fallut attendre le début de l’année 1961 pour que le conflit éclate ouvertement en Angola. Le 4 février, des prisons de Luanda furent attaquées par des Angolais dans le but de libérer des prisonniers politiques. Comme le souligne René Pélissier, ces attaques revendiquées par le MPLA23 étaient des attaques « suicides » et de ce fait, vouées à l’échec ; toutefois leur effet psychologique fut, quant à lui, une réussite24. Ces attaques occasionnèrent une violente répression de la part de l’administration coloniale et de groupes de colons armés. Cette répression fut particulièrement violente dans les musseques, bidonvilles de Luanda où résidait la grande majorité de la population noire de la ville. Cependant, la date qui fut considérée par le Portugal, et par la communauté internationale, comme marquant le début de la guerre coloniale, fut le 15 mars 196125. Ce jour-là l’UPA attaqua dans le nord du pays des exploitations agricoles et des postes administratifs, causant des centaines de morts parmi la population blanche, mais également parmi la population africaine. Ces attaques, qui durèrent jusqu’au 18 mars, et la répression qui suivit de la part des colons, provoquèrent un déplacement massif des populations locales vers le Congo voisin, ainsi que l’évacuation de 3 500 colons vers Lisbonne au moyen d’un pont aérien26.
13Le 23 janvier 1963 la révolte armée se propagea à la Guinée, où des actions de guérilla furent menées au sud du territoire par le PAIGC contre les installations militaires portugaises, situées à Tite. Au Mozambique, la guerre commença en 1964, sous le commandement du FRELIMO : le 25 septembre 250 guérilléros attaquèrent la base de Chai, située au nord-est du territoire27.
Les trois fronts des guerres de libération
14Face à l’émergence de la lutte armée en Angola, et au refus catégorique de Salazar d’engager des négociations avec les mouvements indépendantistes, l’Estado Novo ne tarda pas à réagir en envoyant les premiers appelés, suivant la célèbre phrase de Salazar : « Vers l’Angola, rapidement et en force28 ! » Les premiers bataillons débarquèrent à Luanda en mai 196129. De leur côté, les mouvements indépendantistes durent tous composer avec un jeu de rivalités, que ce soit une forte opposition exprimée par des mouvements concurrents, ou une contestation au sein même de leurs rangs. Ces dissensions, ajoutées aux difficultés d’ordre organisationnel et/ou matériel rencontrées par les organisations nationalistes eurent des conséquences, plus ou moins importantes selon les cas, nuisant à l’efficacité de leurs actions contre les forces armées portugaises.
15Les historiens s’accordent sur le fait qu’en Angola les forces portugaises réussirent très rapidement à contrôler l’apparition et la propagation de l’insurrection. Selon Malyn Newitt, en huit mois, elles réussirent à reprendre le contrôle du nord de l’Angola30. Norrie MacQueen conclut quant à lui que, « durant la lutte armée, les nationalistes ne représentèrent jamais une réelle menace à la présence portugaise en Angola31 ». Ceci permit même à Venâncio Deslandes, gouverneur général de l’Angola, de déclarer dès octobre 1961 que la guerre était finie32. Pour António Costa Pinto, deux ans après l’émergence de la révolte menée par l’UPA, « la situation en Angola était militairement sous contrôle33 ». Ce qui joua un rôle majeur dans la relative facilité avec laquelle les forces coloniales portugaises réussirent à contrôler l’insurrection en Angola fut le fait que les mouvements nationalistes entrèrent rapidement en guerre les uns contre les autres. Les tentatives de négociation amorcées par le MPLA à destination du FNLA furent un échec. Dès 1962, des affrontements éclatèrent au nord-ouest du territoire entre les deux mouvements rivaux. Ces heurts furent encore plus néfastes pour la lutte contre la présence portugaise lorsque fut créée l’UNITA. En effet, ce mouvement de Jonas Savimbi alla jusqu’à passer des accords de non-agression avec l’armée portugaise, connus sous le nom d’« Opération Madère » (Operação Madeira), protégeant ainsi ses troupes tant que l’UNITA s’engageait à combattre le MPLA sur le front ouvert par ce dernier en 1966 à l’est du territoire34.
16Norrie MacQueen résume la situation en Angola au cours des années 1960 en ces termes :
« En Angola, les Portugais étaient confrontés à un triple défi nationaliste. Dans d’autres circonstances, cela aurait représenté une grande menace, déployée sur trois fronts régionaux. Mais cela n’aurait été possible qu’en cas de coopération et de coordination entre les mouvements, alors que ces derniers semblaient être plus intéressés à prolonger leur inimitiés réciproques au détriment d’une lutte anticoloniale à long terme35. »
17En 1974, à la veille de la révolution des Œillets, l’armée portugaise présente en Angola, composée de 60 000 soldats, se trouvait en position de force face aux trois mouvements de libération angolais36.
18Une situation complètement différente attendait les militaires portugais lorsque la guerre se déclara en Guinée au début de l’année 1963 dans le sud du territoire : les actions de guérilla menées par le PAIGC connurent un rapide succès. Ceci amena, six mois plus tard, le 18 juillet 1963, le ministre de la Défense, le général Gomes de Araújo, à reconnaître publiquement que le mouvement dirigé par Amílcar Cabral contrôlait 15 % du territoire guinéen37. Pour l’historien Malyn Newitt, ce succès s’explique notamment par le fait qu’« Amílcar Cabral avait réussi à construire une coalition ethnique qui lui permit de représenter un défi militaire sérieux face aux Portugais, en éliminant la majorité, mais pas la totalité, de ceux qui pouvaient le défier38 ». L’unité permit donc au PAIGC de mettre les troupes portugaises en grande difficulté, comme ce fut le cas par exemple au cours de la bataille de l’île de Como, qui dura deux mois et demi39. Alors que, à partir du milieu des années 1960, les forces étaient équilibrées, en mai 1968, l’arrivée du général António de Spínola comme gouverneur militaire à la tête de la Guinée, marqua une rupture. D’un côté on assista à des bombardements, souvent au napalm, des villages situés dans les zones contrôlées par le PAIGC, décrits par Norrie MacQueen comme étant « constants40 » et tuant un grand nombre de civils ; de l’autre, des négociations quant à l’avenir de la colonie furent organisées par Spínola avec le président sénégalais Léopold Sédar Senghor.
19L’année 1973 fut également une date marquante dans la guerre de Guinée puisque, le 20 janvier, le leader historique du PAIGC, Amílcar Cabral, fut assassiné. Cela aurait pu avoir de graves conséquences pour le PAIGC si celui-ci n’avait pas réussi à se réorganiser rapidement et à intensifier ses actions militaires contre les forces coloniales. Selon Norrie MacQueen, les troupes portugaises se trouvaient alors « isolées et vulnérables, sous la menace constante d’attaques de guérilla dévastatrices41 ». Ce fut également en 1973, le 24 septembre, que le PAIGC proclama unilatéralement l’indépendance de la Guinée-Bissau, à Madina do Boé, à l’est du territoire. En quelques semaines seulement, la nouvelle République fut reconnue par plus de 80 pays, et, en novembre de la même année, une résolution qui condamnait l’occupation illégale de la Guinée-Bissau par le Portugal fut adoptée par l’ONU42. Cependant, les combats, opposant les 32 000 soldats portugais aux 7 000 combattants du PAIGC43, ne prirent fin qu’à la chute du régime de Lisbonne.
20Si, en Guinée, le PAIGC réussit à mettre en grande difficulté l’armée coloniale portugaise, au Mozambique, le FRELIMO, reconnu et soutenu dès 1963 par l’Organisation de l’unité africaine (OUA), ne représenta jamais une menace réelle pour les forces portugaises44. Les premières années du conflit au Mozambique furent marquées par les revers essuyés par le FRELIMO dans la région de Cabo Delgado, située au nord du territoire, où se concentrait l’activité du mouvement. En effet, les actions de répression menées par la PIDE à l’encontre des membres du mouvement dans les centres urbains du sud du territoire contraignirent le FRELIMO, à l’instar des mouvements angolais et guinéen, à limiter ses actions aux zones rurales. Aux difficultés militaires rencontrées face aux troupes portugaises s’ajoutèrent des divisions internes qui aboutirent, en 1965, à la création du Comité Révolutionnaire du Mozambique (Comité Revolucionário de Moçambique, COREMO). La création de ce mouvement ne mit toutefois pas fin aux divisions, le FRELIMO continuant à faire face à « une menace sérieuse, et potentiellement fatale, quant à son existence comme un mouvement de libération nationale45 », divisions qui culminèrent avec l’assassinat d’Eduardo Mondlane en février 1969. Selon Malyn Newitt, ce ne fut qu’à partir de l’arrivée de Samora Machel à la tête du mouvement que le FRELIMO devint « apte à représenter un défi militaire sérieux pour les Portugais dans le nord et le centre du Mozambique46 ». L’année 1970 marqua ainsi une rupture dans la guerre au Mozambique, et ce sur plusieurs plans. Le FRELIMO décida de déplacer ses actions vers le centre du territoire, dans la région de Tete, où se situait le chantier d’un des plus grands barrages au monde, Cahora Bassa, chantier lancé par le Portugal la même année avec des financements internationaux47. 1970 fut également l’année de l’arrivée de Kaúlza de Arriaga à la tête des forces armées portugaises au Mozambique, poste qu’il occupera jusqu’en 1973. Pour les historiens Bruno Cardoso Reis et Pedro Aires Oliveira, cela eut pour conséquence l’intensification de la guerre, motivée par la forte volonté personnelle du commandant en chef de « garder, à tout prix, les territoires portugais d’Afrique48 ». Les actions menées par les troupes portugaises étaient désormais dans la majorité des cas des opérations aéroportées au cours desquelles les troupes parachutistes étaient assistées par des raids menés par des troupes spéciales, ayant comme objectif la destruction des bases du FRELIMO49. Ce fut également durant cette période que le Portugal fut confronté à d’intenses critiques quant aux guerres coloniales, notamment en 1973 lorsque fut publiée la Une du Times du 10 juillet. Ce journal y accusait l’armée portugaise d’avoir perpétré en décembre 1972 un massacre dans la région mozambicaine de Tete, connu sous le nom de « massacre de Wiriyamu », qui aurait fait des centaines de victimes civiles, parmi lesquelles un grand nombre de femmes, d’enfants et de personnes âgées50. À la veille de la révolution des Œillets, au Mozambique, l’initiative militaire était du côté de la guérilla menée par le FRELIMO51.
21Alors que l’opinion internationale émettait des doutes quant à la capacité du régime de Salazar à résister sur les trois fronts de la guérilla52, le Portugal mobilisa de grands moyens financiers et humains afin de faire face aux mouvements de libération. En 1968, la part du budget de l’État dédiée aux dépenses militaires atteignait 42,4 %. Le nombre de soldats mobilisés, qui en 1961 était de 40 000, atteignit 217 000 en 197453. Selon António Costa Pinto, ce fut près d’1 % de la population portugaise qui fut mobilisée pour l’ensemble des guerres coloniales54. Ainsi, contrairement aux pronostics de la communauté internationale, les guerres coloniales ne prirent fin qu’à la suite de la révolution des Œillets, le 25 avril 1974, soit après treize années de conflits55.
Guerres coloniales, réformes et situation coloniale
22L’approbation de l’Acte Colonial (Acto Colonial) le 8 juillet 1930 fixa dans la loi la terminologie officielle du régime concernant les territoires qui se trouvaient alors sous domination portugaise : « Les possessions d’outre-mer se nomment les colonies et constituent l’Empire Colonial Portugais56. » En 1951, cette terminologie fut abandonnée, dans le cadre de la révision de la Constitution de l’Estado Novo. Le Portugal y est désormais présenté comme formant avec ses « provinces d’outre-mer » une nation pluricontinentale, une et indivisible. Cette idée fut renforcée en 1953 avec la promulgation de la Loi Organique de l’Outre-mer Portugais (Lei Orgânica do Ultramar Português). Cette « décolonisation sémantique57 » opérée par l’Estado Novo, faisait partie d’une vaste restructuration de son idéologie coloniale, qui avait pour but la défense de son empire contre les attaques dont il était la cible sur la scène internationale depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
23Ainsi, pour résister au nouvel ordre international de l’après guerre, qui était de plus en plus en faveur du droit des peuples à l’autodétermination, et d’une manière générale pour la fin du système colonial, Salazar trouva dans les théories lusotropicalistes du sociologue brésilien Gilberto Freyre un « prêt-à-penser » idéologique58. Ces théories soulignent le caractère unique du colonialisme portugais, considérant que « les Portugais avaient une capacité spéciale de s’unir aux tropiques par un lien d’amour, et non d’intérêt, et où ils construisirent des sociétés multiraciales, marquées par le métissage et par une interpénétration culturelle59 ». L’historienne Maria de Conceição Neto résume bien la rupture opérée par l’Estado Novo : « Salazar, le même qui, dans les années trente, parlait habituellement de “races inférieures”, se transforma, comme par magie, en défenseur d’une “société pluriraciale” […], “totalement dénuée de racisme”, présentant le Portugal comme une “nation composite, euro-africaine et euro-asiatique”60. » L’Exposition du monde portugais organisée en 1940, dans la veine des expositions coloniales qui connaissaient un très grand succès en Europe, avait déjà été une occasion de réaffirmer le « carinho, cette “tendresse”naturelle des Portugais à l’égard des autres peuples61 ».
24Cependant, selon l’historien Valentim Alexandre, ce discours, au-delà de sa fonction première qui était de réaffirmer la souveraineté du Portugal outre-mer, n’eut aucune répercussion concrète : dans la pratique, « du point de vue politique, rien de fondamental ne changea dans le système colonial62 ». Cette idée est partagée par l’historien Pedro Aires Oliveira qui souligne l’incapacité du Portugal « à développer un abordage politique qui puisse, d’une certaine manière, rendre crédible cette idée de ‘partenariat multiracial’63 ». Ce ne sera qu’en 1961, face à l’insurrection qui avait débuté en Angola, que l’Estado Novo amorça une réforme de sa politique coloniale.
Les guerres coloniales et la propagande sous l’Estado Novo
25Comme le souligne Norrie MacQueen, « le début des guerres eut, paradoxalement, comme effet de consolider le régime de Salazar, en réduisant au silence les critiques internes existantes quant à sa politique coloniale64 ». En effet, la violence et le choc suscité par les massacres de mars 1961 perpétrés par l’UPA dans le nord de l’Angola firent que le régime put compter sur le soutien de la population portugaise lorsque Salazar décida d’envoyer des troupes en Angola pour défendre l’empire65. L’anthropologue Maria José Lobo Antunes souligne que les images des massacres « furent la cible d’une instrumentalisation médiatique sans précédents, basée sur la diffusion illimitée de représentations visuelles d’une extrême violence66 ». Ces images envahirent ainsi la presse, les cinémas portugais, et furent également présentées par l’ambassadeur du Portugal aux Nations unies afin de démontrer le bien-fondé de la réponse militaire apportée par le régime. La population portugaise apporta son soutien à Salazar et à la guerre en organisant une manifestation de grande envergure à Lisbonne le 27 août 196367. Le premier ministre de la Justice post-25 avril, le socialiste António Almeida Santos, confia à ce propos : Salazar « avait le soutien de la majorité de la population, y compris de certains de ses plus grands adversaires politiques68 ». Jouissant de ce soutien interne, ces guerres furent l’occasion pour l’Estado Novo de réaffirmer sa mystique coloniale afin de répondre aux attaques extérieures de plus en plus fréquentes, notamment de la part de l’ONU et de l’OUA, fondée en 1963.
26Dès 1961, toutes les occasions furent bonnes pour réaffirmer les différents volets de la vulgate coloniale de l’État Nouveau. Ainsi, le 28 mai 1961, afin de motiver les troupes peu avant leur départ vers l’Angola, le ministre des Armées Mário Silva rappela aux soldats le devoir du Portugal de rester de manière perpétuelle en Afrique69. Un reportage télévisé de la RTP datant de 1961 rappelait quant à lui le caractère indivisible de la nation portugaise : il présentait Luanda comme étant « la troisième ville portugaise ». Il s’agissait ainsi de prouver le bien-fondé des théories lusotropicalistes avec, notamment, un plan montrant trois enfants noirs et un enfant blanc assis sur un banc, accompagné du commentaire suivant : « Toute cette jeunesse […] a conscience que les Portugais qui vivent ici, égaux en droits et considération, sans exception de couleur [de peau], sont tout simplement Portugais70. » Le retour des premiers soldats d’Angola, en août 1962, fut également une occasion pour réitérer l’idéologie coloniale de l’Estado Novo. Le Diário de Lisboa (DL) consacra une partie de sa Une, ainsi qu’un long article, à cet événement dans les pages centrales de son édition du 2 août 1962. Les soldats y étaient présentés comme les héros qui « endurèrent, dans sa phase la plus difficile, les violentes attaques perpétrées contre le territoire portugais71 ». L’Angola était une partie intégrante du Portugal, comme le rappelait un soldat qui avait cousu sur son uniforme la célèbre phrase « l’Angola est à nous72 ! » Les premiers soldats partis défendre la « province » portugaise d’Angola furent, sans grande surprise, accueillis par le ministre des Armées, le général Mário Silva. Ce dernier tint à cette occasion un discours dont l’objectif était, une fois encore, de réaffirmer le bien-fondé de la réponse militaire portugaise en Angola à la suite des « graves événements qui ensanglantèrent la province d’Angola, provoqués par la barbarie, ivre et sanguinaire, à la solde de la démagogie internationale73 ». Le ministre donna également une nouvelle mission aux soldats fraîchement débarqués. Après avoir défendu militairement le Portugal en Angola, ils devaient à présent, dès leur retour dans leur village ou dans leur ville d’origine,
« continuer à servir la Nation, comme ils le firent jusqu’ici, en racontant ce qu’ils ont vu de leurs propres yeux, l’œuvre civilisatrice que depuis des siècles nous menons dans les provinces d’outre-mer et pour laquelle il vaut la peine de se battre, pour maintenir ce patrimoine matériel et moral, et en affirmant que la société multiraciale d’où ils arrivent est une réalité, où les lois humaines ne font aucune distinction de croyances ou de races. Et s’ils rencontrent de l’incrédulité de la part de ceux qui les écoutent, ils devront les éclairer, et s’ils comprennent qu’ils sont en présence de détracteurs ou de lâches, d’ennemis ou de traîtres, ils devront à présent les combattre, pas avec leurs anciennes armes, mais avec les idées et la vigueur de leurs convictions de Portugais loyaux74 ».
27Le ton était donné : la mission des soldats portugais ne s’arrêtait donc pas une fois rentrés des différents théâtres d’opérations, mais continuait après leur retour en métropole, le ministre leur ayant fourni le script de leur nouvelle mission. On peut également souligner que les légendes des photographies qui accompagnaient l’article présentaient les soldats portugais comme étant avant tout nostalgiques de l’Angola. En dessous d’une photographie d’un soldat, publiée à la Une, on pouvait lire : « La jubilation de ce soldat concernant son retour semble ternie par la nostalgie de l’Afrique75. » La légende d’une photo d’un autre soldat, tout sourire et portant sur son épaule un sac, publiée dans les pages centrales, était rédigée dans le même esprit : « Quel trésor rapporte-t-il, caché dans ce sac blanc qui ne pèse rien et qui le fait sourire ainsi ? De la tendresse pour ses parents ? Des souvenirs pleins d’amour pour sa fiancée ? Ou peut-être tout un monde de souvenirs d’Angola qui, une fois là-bas, dans sa terre natale, se transformera en nostalgies grandissantes de ces terres ensorcelantes76. » Il était bien évidemment fondamental pour l’Estado Novo de présenter les soldats souriants et déjà nostalgiques de l’Angola, afin de ne pas décourager les milliers d’autres combattants qui allaient devoir les remplacer en Afrique.
28Chaque Portugais se voyait donc confier la mission de défendre le colonialisme portugais. Parmi eux, l’ambassadeur de l’Estado Novo à Washington, Pedro Theotónio Pereira, joua en ce sens un rôle particulièrement important. Alors que l’ONU remettait en question le bien-fondé de la présence portugaise en Afrique, ce dernier déclara lors d’un discours, le 20 octobre 1962 :
« Le Portugal est présent en Afrique depuis près de 500 ans et l’incorporation au sein de la mère-Patrie de ces terres que les Portugais ont ouvertes au christianisme et à la civilisation s’est réalisée dès les premiers instants. Par le biais d’un processus lent de fusion surgirent des sociétés multiraciales, à une échelle que jusqu’alors aucune autre nation européenne n’avait réussi à atteindre. L’absence de quelque forme de discrimination raciale que ce soit dans les territoires d’outre-mer peut naturellement découler de cette origine multiraciale77. »
29Ce fut dans ce contexte de réaffirmation idéologique que, le 12 août 1963, Salazar déclara : « L’Angola est une création portugaise et n’existe pas sans le Portugal », avant d’ajouter : « Le Mozambique n’est le Mozambique uniquement parce que c’est le Portugal78 », martelant ainsi le caractère un et indivisible de la nation portugaise. La réaffirmation du rôle central du Portugal et de sa « mission civilisatrice » dans l’histoire de l’Humanité est quant à elle au centre d’un discours datant de 1967 de Franco Nogueira, alors ministre des Affaires étrangères de Salazar. Il déclara :
« Ce fut nous, et nous seuls, qui apportâmes avant quiconque à l’Afrique la notion des droits de l’Homme et d’égalité raciale, et ce fut nous, et nous seuls, qui pratiquâmes le multiracialisme, reconnu par tous comme étant l’expression la plus parfaite et ambitieuse de la fraternité humaine et du progrès sociologique79. »
30En parallèle, la propagande salazariste développa un discours visant à discréditer les différents mouvements de libération. Le discours officiel consistait à nier toute légitimité aux combattants africains, désignés comme étant des « terroristes » à la solde du communisme et ne disposant d’aucune base de soutien de la part des populations locales80. Marcelo Caetano déclarait en 1974 : « Comment aurions-nous pu abandonner aux mains de quelques douzaines d’aventuriers toutes ces populations, tout le travail que nous avions accompli81 ? »
31Il est intéressant de souligner que l’efficacité de l’idéologie lusotropicaliste défendue par le régime salazariste dépassait les frontières du Portugal et de ses « provinces ultramarines ». À titre d’exemple nous pouvons citer une anecdote relatée par le leader du PAIGC, Amílcar Cabral. Un nationaliste africain lui dit en 1960 : « Vous c’est différent… vous n’avez pas de problèmes avec les Portugais82. » On peut également citer le ministre des Affaires étrangères du Kenya, Njoroge Mungai, qui déclara en 1973, face à l’Assemblée générale de l’ONU : « Le Portugal est une Nation au sein de laquelle le racisme n’existe pas83. »
32Jusqu’à la chute de l’Estado Novo, le 25 avril 1974, le régime ne cessa de réaffirmer l’exceptionnalité du colonialisme portugais, comme en témoigne le discours de Marcelo Caetano du 5 mars 1974 devant l’Assemblée Nationale, au cours duquel le président du Conseil déclara : « Nous estimons qu’il est de notre devoir de protéger une œuvre qui représente une contribution positive pour le progrès de l’Humanité et de la Civilisation84. »
Les réformes de la politique coloniale sous le ministère d’Adriano Moreira (1961-1962)
33Face à l’émergence de la guerre en Angola, une des réponses du régime fut de nommer un nouveau ministre en charge de l’outre-mer. Adriano Moreira, un fervent défenseur des théories lusotropicalistes, entra ainsi en fonction en avril 1961 avec pour mission de réformer la politique coloniale portugaise. Pour l’historien Fernando Tavares Pimenta, ce réformisme, qui visait une autonomie politique croissante des colonies, fut « une réaction politique à la guérilla nationaliste, mais également une réponse aux prétentions politiques de la population blanche [des colonies], en particulier des élites économiques85 ». Salazar ayant conscience qu’il devait répondre favorablement à certaines revendications de ces élites afin d’empêcher toute tentative de sécession de la part de la population blanche86, une plus grande autonomie fut alors concédée aux organes politiques locaux.
34Cependant, l’aspect le plus marquant du réformisme mené par Adriano Moreira, fut, sans aucun doute, l’abrogation le 6 septembre 1961 du Statut des Indigènes portugais des provinces de la Guinée, de l’Angola et du Mozambique (Estatuto dos Indígenas Portugueses das Províncias da Guiné, Angola e Moçambique)87. Dorénavant, la citoyenneté portugaise, et les droits qui y étaient associés, était accordée à tous les individus résidant dans les colonies, faisant ainsi disparaître la catégorie d’« indigène ». Les « indigènes » étaient considérés comme des « non-civilisés » (« não civilizados »). Avant cette abrogation, ils pouvaient obtenir la nationalité portugaise sous certaines conditions et entrer ainsi dans la catégorie des « assimilés ». Dans le cas de l’Angola, ces derniers représentaient en 1961 moins de 1 % de la population africaine88. En 1962, ce fut au tour du travail forcé d’être officiellement aboli par l’entrée en vigueur d’un nouveau Code du travail rural (Código do Trabalho Rural)89.
35Ce réformisme eut également un volet économique visant à accélérer le développement des colonies. Il se concrétisa par une augmentation de l’investissement public, l’ouverture des marchés coloniaux à de nouveaux capitaux étrangers ainsi que par la création d’un Espace Économique Portugais (Espaço Económico Português)90. Dans le cas de l’Angola, selon l’économiste Manuel Ennes Ferreira, la période allant de 1962 à 1973 fut marquée par un développement économique notable, caractérisé par une augmentation de plus de 11 % du PIB et par l’installation d’industries diversifiées91. Enfin, dans le domaine de l’éducation, le 23 juillet 1962 fut annoncée la création des Études générales universitaires d’Angola et du Mozambique (Estudos Gerais Universitários de Angola e Moçambique).
36Cette première expérience de réforme du système colonial portugais fut brève, s’achevant le 4 décembre 1962 lorsque Adriano Moreira quitta le ministère de l’outre-mer, face aux pressions exercées au sein du régime par les « intégrationnistes », qui refusaient toute politique visant à une plus grande autonomie des colonies. Si l’historien René Pélissier estime que grâce aux réformes de 1961-1962 les relations entre les populations blanches et africaines s’améliorèrent92, pour l’historien Norrie MacQueen, ces réformes, qui avaient pour but de se protéger contre les critiques essuyées sur la scène internationale par le régime de Salazar, n’eurent, en pratique, qu’un effet limité, et ne réussirent en aucun cas à changer le cours du conflit ; de plus, le travail forcé continua bien à exister dans les colonies portugaises, et ce malgré son abolition en 196293.
L’ultime tentative de réforme de la politique coloniale sous l’ère de Marcelo Caetano (1968-1974)
37Désigné par le président de la République, Américo Tomaz, pour être le successeur d’António Oliveira de Salazar à la tête de l’État, compte tenu de l’incapacité de ce dernier à exercer le pouvoir à la suite des conséquences d’une mauvaise chute94, Marcelo Caetano, ministre des Colonies entre 1944 et 1947, prit ses fonctions de président du Conseil le 27 septembre 1968.
38Durant sa présidence, il se trouva face aux mêmes difficultés qu’Adriano Moreira en 1961, lorsqu’il tenta de mettre en œuvre une seconde politique de réformes concernant les colonies portugaises. Son objectif était de préparer une indépendance à terme des colonies, contrôlée par Lisbonne et menée par les élites blanches, assistées par les élites noires et métisses. Selon Fernando Pimenta, pour le nouveau président du Conseil, les colons, « qui avaient été les “vrais bâtisseurs” des colonies, seraient aussi les fondateurs des nouvelles nations », créant ainsi de « nouveaux Brésil en Afrique95 ». Cette politique, qui visait une autonomie progressive et participative des colonies, et qui représentait pour Marcelo Caetano un « juste milieu » entre, d’un côté, la position défendue en métropole par les « intégrationnistes », à la tête desquels se trouvait le président de la République, et, de l’autre, la position défendue dans les colonies par les différents mouvements nationalistes, celle d’une indépendance totale, avait pour but d’accorder une plus grande autonomie politique et économique aux colonies. Alors que son prédécesseur, António Salazar, ne s’était jamais rendu dans les colonies d’Afrique, Marcelo Caetano visita l’Angola et le Mozambique six mois après son entrée en fonction. Ce voyage fut pour lui l’occasion de présenter son projet d’autonomie, projet qui fut très bien accueilli par les élites blanches de ces deux territoires. Cependant, confronté, comme le fut Adriano Moreira avant lui, à la pression et aux critiques de l’aile « intégrationniste » de l’Assemblée nationale96, il lui fallut attendre le 23 juin 1972 pour que soit publiée la nouvelle Loi organique d’outre-mer (Lei Orgânica do Ultramar), et le 1er janvier 1973 pour qu’entrent en vigueur les nouveaux statuts des colonies portugaises. Ces derniers transformèrent l’Angola et le Mozambique en « États » et le reste des possessions portugaises, mise à part Macau, en régions autonomes97.
39Selon l’historien Fernando Tavares Pimenta, « Marcelo Caetano ne réussit jamais à mettre totalement en pratique son projet d’autonomie pour les colonies, ni à créer les conditions nécessaires pour leur indépendance98 ». De ce fait, cette seconde tentative de réforme de la politique coloniale portugaise fut un échec, ne faisant qu’augmenter le degré d’insatisfaction des élites blanches des colonies portugaises et ne permettant aucunement d’amorcer une sortie de guerre99.
La situation coloniale : hiérarchie raciale et autoritarisme
40Si le discours colonial lusotropicaliste développé par l’Estado Novo à partir des années cinquante avait pour but de différencier le colonialisme portugais des autres colonialismes européens, insistant sur son prétendu caractère humain et l’absence de toute forme de racisme, dans la pratique, les faits venaient contredire cette mystique. La réalité dans les colonies portugaises d’Afrique était très différente : elle se caractérisait par une ségrégation de fait et par des pratiques discriminatoires.
41Au-delà d’une ségrégation spatiale100, qui eut comme résultat l’exclusion des Africains des centres urbains, de plus en plus réservés aux populations blanches, et qui allait jusqu’à interdire l’accès à certains lieux aux populations locales101, la société coloniale portugaise se caractérisait par une ségrégation sociale basée sur la couleur de peau102. Comme l’écrit l’historienne Isabel Castro Henriques,
« Le cadre de “l’idée coloniale” permet aux colons, quelles que soient leurs origines sociales ou leurs compétences techniques, de se considérer comme “naturellement” supérieurs aux Africains, comme le montre le fait que les Européens décident de tutoyer tous les Africains, renforçant ainsi leur domination et humiliation103. »
42Cette domination était également la règle dans le monde du travail : les Africains fournissaient une main-d’œuvre peu coûteuse, voire gratuite dans certaines circonstances, pour les travaux manuels, comme dans les exploitations agricoles, alors que les postes à responsabilités et d’encadrement étaient réservés aux Européens. À travail égal, les Africains étaient également moins payés que leurs collègues blancs104. Dans le domaine de l’éducation également, les populations africaines étaient discriminées. À titre d’exemple, en 1956, dans la colonie angolaise seulement 1 % des Africains en âge d’être scolarisés l’était. Selon l’historien Norrie MacQueen, en 1960, 91 % de la population du Mozambique était analphabète et 99 % dans le cas de la Guinée105. Selon Gerald J. Bender, ce n’est qu’en 1919 que fut ouvert le premier lycée d’Angola. L’auteur décrit la société coloniale angolaise comme étant basée sur une « multitude de mécanismes informels » de discrimination106. Dans le cas particulier des « assimilés », les droits dont ils jouissaient juridiquement, à la suite de l’acquisition de la nationalité portugaise, ne les protégeaient en aucun cas des discriminations liées à la couleur de leur peau107. En effet, comme le fait remarquer Fernando Tavares Pimenta, « la petite bourgeoisie africaine “assimilée” […] était dans la pratique cantonnée à des positions secondaires et était laissée à la marge du pouvoir par l’administration coloniale portugaise108 ».
43Les barrières raciales établies dans les colonies, qui selon Claúdia Castelo étaient plus marquées en Mozambique du fait de la proximité géographique de cette colonie avec la Rhodésie et l’Afrique du Sud de l’apartheid109, venaient contredire un élément central de la vulgate coloniale de l’Estado Novo : l’affirmation de l’existence inédite d’un métissage généralisé dans les provinces portugaises d’outre-mer. L’inexactitude de cette affirmation est bien confirmée par les recensements réalisés dans les colonies, identifiant un nombre de métis « obstinément résiduel110 », et ce malgré le dicton populaire selon lequel « Dieu créa les Portugais et les Portugais créèrent le métis111 ». L’historien Gerald J. Bender souligne que le métissage avait lieu lorsque le nombre de femmes blanches présentes sur le territoire était inférieur au nombre d’hommes blancs. Lorsque cette situation s’équilibra, le métissage diminua de manière naturelle. Il s’agissait donc d’une pratique liée à des variables démographiques et non pas à une « prédisposition naturelle » des Portugais pour le métissage. L’auteur ajoute que le climat angolais, qui représenta longtemps un frein à l’émigration métropolitaine dans son ensemble, était considéré comme particulièrement dangereux pour les femmes, ce qui fut un élément d’explication de la faible présence féminine qui caractérisa longtemps le peuplement portugais en Angola112.
44S’il est difficile de déterminer dans quelle mesure le caractère autoritaire du régime portugais eut une influence sur les relations entre les colons portugais et les populations colonisées, il ne fait aucun doute que ce dernier se faisait sentir dans les colonies. En effet, comme dans la métropole, le régime utilisait différents instruments coercitifs afin d’exercer un fort contrôle sur les populations, populations africaines mais également populations blanches. Ainsi, la PIDE était présente dans les colonies africaines depuis 1957 et exerçait un contrôle étroit afin de tenter d’empêcher, puis, après le début de la guerre, de contenir les foyers de contestation. L’Estado Novo utilisait également la propagande et la censure dans le but de limiter l’expression de la contestation de son autorité dans les colonies. Cette situation fut notamment dénoncée par Víctor Barros, un député blanc d’Angola, qui déclara, le 9 février 1962, face à l’Assemblée nationale : « Par coercition ou par la censure de défenseurs de la liberté d’expression et de pensée, on fit taire les voix de ceux qui souhaitaient pointer des erreurs, suggérer des solutions, demander justice113. »
45L’historienne Amélia Neves de Souto souligne parfaitement l’interdépendance du caractère autoritaire et colonial de l´Estado Novo :
« De l’Empire à la nation pluricontinentale et multiraciale, le régime inculqua de manière profonde dans la conscience des Portugais l’amour de la grande nation portugaise, qu’il était nécessaire de préserver et de protéger par tous les moyens, et sans laquelle le Portugal serait un petit pays et lui-même une colonie d’un autre pays. La mystique impériale, en contribuant à la consolidation du régime, conduisit à une grande méconnaissance de la réalité de “l’Empire”, que la propagande, le contrôle des organes de presse, la censure et la répression aidèrent à consolider, ce qui amena les forces libérales et l’opposition à ne commencer, que tardivement, à remettre en question la politique coloniale et surtout à reconnaître le droit des peuples des colonies à l’autodétermination et à l’indépendance114. »
Population blanche et guerres de libération
L’évolution de la population blanche des colonies portugaises d’Afrique (1940-1974)
46« Dans aucune autre partie de l’empire portugais il ne fut aussi difficile de convaincre des hommes et des femmes libres de s’installer que dans le cas de l’Angola115. » Cette citation de l’historien Gerald J. Bender illustre les difficultés rencontrées par le Portugal pour encourager l’émigration métropolitaine vers l’Angola. Cependant, si ces difficultés furent plus marquées dans le cas de l’Angola, territoire qui souffrait d’une mauvaise réputation de la part de la population métropolitaine, notamment due au fait d’être une colonie où étaient envoyés des Portugais bannis pour cause de crimes116, ces difficultés concernaient également le Mozambique117. Ainsi, la présence de colons originaires du Portugal installés dans les territoires africains ne fut significative que tardivement, et ce malgré les diverses tentatives de l’État portugais de mettre en place des programmes de « colonisation dirigée118 ».
47Il fallut attendre le boom économique que connurent au lendemain de la Seconde Guerre mondiale les denrées coloniales, principalement le café, pour que les colonies portugaises d’Afrique deviennent des destinations attractives. Cependant, comme le souligne Norrie MacQueen, s’installer dans les colonies ne garantissait pas aux Portugais d’y trouver une meilleure situation que celle qu’ils quittaient, ce que montre la présence en 1960 en Angola de 7 000 colons sans emploi119. L’Estado Novo avait pourtant imposé à partir des années 1930 des restrictions à l’installation de nouveaux colons afin d’empêcher l’installation de personnes susceptibles d’augmenter le nombre de blancs pauvres existant dans les colonies, « considérés comme étant un signe alarmant de l’échec de l’œuvre coloniale et civilisatrice » du Portugal120. Selon les chiffres présentés par l’historienne Cláudia Castelo, entre 1950 et 1960, 93 703 nouveaux individus s’installèrent en Angola, et 49 032 au Mozambique, doublant ainsi, dans les deux cas, la population blanche présente alors dans ces territoires121. Les individus originaires des régions rurales et pauvres de la métropole furent les plus enclins à s’installer définitivement dans les colonies portugaises d’Afrique (graphique 1)122.
Graphique 1 – Population blanche résidente en Angola et au Mozambique (1940-1973).

Données extraites de Castelo Cláudia, Passagens para África. O Povoamento de Angola e Moçambique com Naturais da Metrópole (1920-1974), op. cit., p. 97, p. 143, construction de l’auteure.
48Le début de la guerre en Angola en 1961 ne mit pas fin, contre toute attente, à cette vague migratoire en provenance de la métropole. Au contraire, à la suite du début du conflit, l’État Nouveau considéra l’émigration vers les colonies africaines comme étant une priorité123. Encourager le peuplement des « provinces d’outre-mer » par des colons venant de la métropole fit partie de la réponse apportée par le régime pour tenter de combattre les effets de la guerre et permettre la survie du colonialisme portugais124.
49Selon René Pélissier, le régime salazariste développa ainsi une stratégie de « blanchiment de l’Angola », stratégie qui fut également favorisée par l’exil massif des populations noires du nord du territoire à la suite des attaques de l’UPA et de la répression qui suivit en mars 1961125. Avec cet objectif furent créées, le 6 septembre 1961, les Délégations Provinciales de Peuplement d’Angola et du Mozambique (Junta Provincial de Povoamento de Angola e Moçambique, JJP). Elles avaient pour but d’organiser et d’encadrer toutes les initiatives de peuplement afin d’augmenter numériquement, et de manière durable, la présence portugaise dans les zones rurales de ces deux colonies126. Gerald J. Bender souligne que la JJP avait également comme objectif de créer des communautés « mixtes » en Angola, en faisant notamment appel jusqu’en 1968 à des colons cap-verdiens, afin de prouver le caractère multiracial du colonialisme portugais en Afrique. Ces communautés furent au nombre de neuf. L’auteur estime que les actions de la JJP en Angola furent un échec. Si ces nouveaux colons participèrent bien à l’augmentation de la population blanche présente en Angola, une partie de ces derniers contribuèrent toutefois, après une courte période de fixation dans les zones rurales, à l’augmentation du nombre de personnes blanches sans emploi dans les villes angolaises. Les résultats en termes de production agricole furent également faibles, si ce n’est négatifs. L’auteur souligne par ailleurs le fait que ce fut au début des années 1970 que la demande de terres par les colons fut la plus élevée, venant ainsi intensifier le processus d’expropriation des populations angolaises, notamment dans le nord du territoire127. En 1962, la libre circulation de personnes au sein de l’Espace Économique Portugais fut quant à elle instaurée128.
50En termes d’évolution démographique, entre 1960 et 1970, la population blanche résidant en Angola passa de 172 529 individus à 280 101, quand celle du Mozambique passa de 97 245 à 162 967 individus. En 1970, ces deux groupes représentaient respectivement 4,94 % et 1,99 % de la population totale de l’Angola et du Mozambique129. Selon les estimations de Norrie MacQueen, durant la période du conflit contre les Portugais, la Guinée ne comptait que 2 000 civils européens, dont la majorité s’avérait être des fonctionnaires de l’administration coloniale130. Si l’émigration vers les colonies ne s’était pas arrêtée avec le début de la guerre coloniale, elle commença néanmoins à connaître une baisse dans le cas du Mozambique à partir de 1965, soit un an après le début de la guerre, et dans le cas de l’Angola à partir de 1970 (graphique 2)131.
Graphique 2 – Évolution de l’immigration métropolitaine vers l’Angola et le Mozambique (1940-1973).

Données extraites de Castelo Cláudia, Passagens para África. O Povoamento de Angola e Moçambique com Naturais da Metrópole (1920-1974), op. cit., p. 97, p. 143, construction de l’auteure.
51Il est intéressant de souligner que l’Angola et le Mozambique ne furent pas les premières destinations des émigrés Portugais. En effet, l’historien Victor Pereira estime qu’un million et demi de Portugais émigra entre 1957 et 1974, mais ils furent plus de 900 000 à choisir la France comme pays d’accueil132. Par ailleurs, entre 1960 et 1973, les installations dans les deux colonies africaines ne concernèrent que 244 226 Portugais. Malgré les légères différences de balise chronologique, il est possible de conclure que l’émigration métropolitaine vers l’Angola et le Mozambique représenta moins de 20 % de l’émigration portugaise de cette période. La population blanche installée dans les colonies portugaises d’Afrique présente par ailleurs les caractéristiques suivantes : originaire, pour la majorité, des régions du nord et du centre du Portugal, mariée, en âge de travailler, et d’un niveau d’instruction scolaire supérieur à celui de la majorité de la population métropolitaine133.
52La réalité montrée par les chiffres concernant la présence européenne dans les colonies portugaises d’Afrique, et en particulier l’Angola et le Mozambique, vient contredire le discours officiel portugais. Ce discours insistait, et dans certains cas insiste encore aujourd’hui, sur l’idée d’une présence portugaise en Afrique vieille de cinq siècles, alors que le peuplement de ces territoires connut son apogée seulement au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.
La population blanche confrontée aux guerres de libération
53Si les effets de la guerre furent directement ressentis par une partie de la population africaine des colonies portugaises, comme ce fut le cas des populations locales concernées par les déplacements forcés orchestrés par l’armée portugaise dans le but espéré de diminuer leur soutien aux différents mouvements de libération134, le contact des populations blanches avec la guerre varia, notamment en fonction de leur zone de résidence. En Angola, à la suite de la répression sanglante organisée par les autorités coloniales et les colons après l’attaque par le MPLA de la prison de São Paulo de Luanda, le 4 février 1961, les mouvements de libération angolais décidèrent de limiter leurs actions aux campagnes, faisant de cette attaque « le premier et le dernier événement marquant de guérilla urbaine dans l’ensemble de l’empire durant les guerres135 ». De ce fait, la guerre devint « une réalité lointaine pour la majorité de la population blanche d’Angola136 ». Cependant, les actions menées ce 4 février marquèrent profondément les esprits, créant au sein de la communauté blanche de Luanda une suspicion systématique à l’égard de l’ensemble de la population africaine de la ville. L’historien René Pélissier décrit la situation en ces termes : « La peur réciproque et la haine raciale s’emparèrent aussi bien de la communauté noire que de la communauté blanche », avant d’ajouter : « Les Africains n’osaient plus entrer dans les lieux fréquentés par les blancs, de peur d’être arrêtés ou attaqués137. » Des colons portugais confièrent quant à eux à Gerald J. Bender qu’à la fin des années 1960 ils étaient en permanence prêts à attaquer, munis de fusils et grenades, les musseques de Luanda au moindre signe de révolte138.
54Cette dégradation des relations raciales s’aggrava à la suite des attaques de l’UPA en mars 1961 dans le nord du territoire. Ces massacres conduisirent les colons à prendre les armes afin d’assurer leur défense contre l’UPA, et entraina de leur part une répression sanglante. La nouvelle des massacres du 15 mars 1961 se propagea dans l’ensemble du territoire et, dans des régions où aucun incident n’avait été à déplorer, la population blanche s’organisa dans des milices, en effectuant notamment des rondes qui causèrent aussi un grand nombre de morts du côté des populations africaines139. Lorsque la révolte éclata dans le nord de l’Angola, la présence militaire portugaise était très faible, ce qui expliqua que les colons aient pris eux-mêmes les armes. On estime qu’en 1961 entre 15 000 et 20 000 militaires, policiers, membres de l’administration ou d’organisations paramilitaires, étaient présents sur le territoire angolais, pour une superficie 13 fois supérieure à celle du Portugal140.
55Álvaro Silva Tavares, gouverneur général en Angola entre 1960 et 1961, qualifia de « terrible » la situation141. Le colonel Carlos Fabião, alors capitaine lorsqu’il débarqua à Luanda en mai 1961, fait état d’un « désir de vengeance extrêmement fort » de la part de la population blanche venue saluer l’arrivée des troupes envoyées par Lisbonne142. Par ailleurs, Cláudia Castelo souligne que, dans les régions d’Uíge et du Kwanza Norte, les autorités durent faire face à de vives réactions de la part de la population blanche, mécontente de ne pas être soutenue par les autorités dans leurs actions punitives menées contre les populations africaines143.
56Une autre conséquence qu’eut le conflit armé en Angola sur les populations blanches fut d’ordre politique. En effet, certains Portugais résidant en Angola adhérèrent alors aux différents mouvements de libération nationale144, et une partie de l’élite économique et intellectuelle blanche de Luanda tenta même de négocier des accords avec les mouvements nationalistes angolais145. Une autre partie de la population, qui aspirait à une plus grande autonomie pour la colonie, voire à une indépendance menée par la minorité blanche, abandonna alors ses positions séparatistes, se trouvant étroitement dépendante de la protection assurée par l’armée portugaise146.
57Certains colons d’Angola exprimèrent leur mécontentement face aux réformes menées par l’État portugais à partir de 1961. Ces dernières, visant notamment à améliorer les conditions de vie de la population africaine, étaient vivement critiquées comme étant le résultat d’une politique de discrimination à l’encontre de la population blanche. On retrouve notamment ces critiques dans un rapport de l’administration de la commune angolaise d’Icolo e Bengo, datant de 1964 dans lequel il est écrit : « La population européenne résidente de la commune […] critique toutes les mesures de valorisation des autochtones […] comme étant une politique inconvenante, se basant sur l’allégation vague et fausse selon laquelle la population aborigène n’est pas préparée pour comprendre une explosion aussi subite de droits147. » L’auteur du rapport exprima également sa crainte de voir les relations entre la population européenne et la population africaine se détériorer en conséquence du refus de la politique de réformes de la part d’une partie de la population blanche.
58Au Mozambique, au cours des premières années de la lutte anticoloniale, les actions menées par le FRELIMO se limitèrent au Nord du territoire, région marquée par une faible présence des populations blanches. Ce ne sera qu’en 1972 et 1973, après que le FRELIMO eut renforcé ses activités de guérilla, que ces dernières atteignirent pour la première fois des zones où résidaient des colons, comme Tete, Zambézia, Manica et Sofala. Ce contact direct de la population blanche du Mozambique avec la guerre eut pour conséquence la tenue de manifestations de centaines de colons contre les forces armées portugaises dans la ville de Beira en janvier 1974. Ces derniers reprochaient aux militaires portugais de manquer de courage face au FRELIMO et de ne pas remplir leur mission de protection de la population civile du Mozambique148. Alors que Cláudia Castelo conclut que les forces armées devinrent le « bouc émissaire » de la population blanche du Mozambique149, de leur côté, l’opinion, déjà négative, que se faisaient les militaires des colons du Mozambique, se dégrada150. Bruno Reis et Pedro Aires Oliveira soulignent l’efficacité stratégique du choix du FRELIMO de déplacer ses actions de guérilla : « Cela augmenta la portée psychologique de l’insurrection, ébranlant le sentiment de sécurité relatif que les colons portugais ressentaient depuis longtemps quant à un conflit lointain confiné au nord151. » À l’instar de ce qui se passa en Angola, une partie de la population blanche du Mozambique se plaignit de la mise en place des réformes et se présenta comme victime de la nouvelle politique coloniale. Un rapport des Services de centralisation et coordination de l’information du Mozambique (Serviços de Centralização e Coordenação da Informação de Moçambique, SCCIM) relate à ce propos : « Sur le plan juridique […] les blancs sont victimes de vols, agressions, offenses, etc. ; et la loi les abandonne, mais, si les victimes sont noires, le blanc est persécuté et cruellement et injustement puni152. »
59Alors que l’émigration métropolitaine vers les colonies portugaises d’Afrique augmenta fortement après le début des luttes armées, le caractère urbain de la population blanche résidente des deux plus grandes colonies portugaises d’Afrique, et en particulier en Angola, eut pour conséquence le fait que les colons ne furent que très rarement en contact direct avec les conflits, l’exception la plus marquante étant le cas des colons du nord de l’Angola, qui furent la cible des massacres perpétrés par l’UPA en mars 1961. Ces massacres eurent de fortes répercussions sur l’état d’esprit de la population blanche des colonies portugaises et contribuèrent à l’augmentation des tensions raciales déjà existantes.
⁂
60Pendant que la majeure partie des colonies africaines devenaient indépendantes, le Portugal répondit par la force à l’émergence de la contestation en Angola en 1961 et s’engagea dans des guerres coloniales qui durèrent jusqu’à la chute du régime de Lisbonne en avril 1974. Pour tenter de limiter l’adhésion des populations africaines d’Angola, de la Guinée et du Mozambique aux différents mouvements de libération nationale, et pensant ainsi « gagner le cœur et l’esprit des Africains153 », l’Estado Novo tenta, à deux reprises, de réformer sa politique coloniale. Malgré la diffusion d’une propagande visant à réaffirmer le caractère humain et civilisateur du colonialisme portugais, ces réformes se soldèrent par un échec, tant par leur caractère anachronique que par l’absence de résultats concrets pour les populations africaines154.
61Les effets les plus visibles de ces politiques réformistes, le développement économique, la création d’universités, l’augmentation de l’émigration métropolitaine, associés à l’effort de guerre considérable déployé par le régime, furent perçus par la population blanche de ces colonies comme les preuves indéniables du caractère éternel de la présence portugaise en Afrique. Le 5 octobre 1964, on pouvait ainsi lire à la Une du journal mozambicain Notícias de Lourenço Marques : « Nous sommes ici et nous y resterons155 ! » Il fallut attendre la destitution du régime de Lisbonne, le 25 avril 1974, pour que soit pensée une véritable politique de décolonisation des territoires portugais d’Afrique.
Notes de bas de page
1Sur les critiques internationales essuyées par l’Estado Novo, voir Oliveira Pedro Aires, « A descolonização portuguesa: o puzzle internacional », in Rosas Fernando, Machaqueiro Mário et Oliveira Pedro Aires (dir.), O Adeus ao Império. 40 Anos de Descolonização Portuguesa, Lisbonne, Nova Vega e Autores, 2015, p. 60-77.
2Cet évènement fit notamment la Une du numéro de Paris Match paru le 7 février 1961, sous le titre « À bord de la Santa Maria – La fantastique aventure de Galvao et des pirates de la révolution ».
3Pour une analyse des conséquences de cette invasion sur la communauté indienne installée au Mozambique voir Thomaz Omar Ribeiro et Nascimento Sebastião, « Nem Rodésia, nem Congo: Moçambique e os dias do fim das comunidades de origem europeia e asiática », in Castelo Cláudia, Thomaz Omar Ribeiro, Nascimento Sebastião et Cruz e Silva Teresa (dir.), Os Outros da Colonização. Ensaios sobre o colonialismo tardio em Moçambique, Lisbonne, Imprensa de Ciências Sociais, 2012, p. 315-339, p. 318 et suivantes.
4Pour une analyse des réactions de la France, du Royaume-Uni, de la République fédérale allemande et des États-Unis face au début de la guerre coloniale portugaise, voir Rodrigues Luís Nuno, « The International Dimensions of Portuguese Colonial Crises », in Jerónimo Miguel Bandeira et Pinto António Costa (dir.), The Ends of European Colonial Empires. Cases and Consequences, Hampshire, Palgrave Macmillan, 2015, p. 243-267.
5Le 18 novembre 1969, la PIDE changea de nom pour Direction générale de sécurité (Direcção-Geral de Segurança, DGS). Wheeler Douglas et Pelissier René, História de Angola, Lisbonne, Tinta-da-China, 2009, p. 233. Selon Miguel Bandeira Jerónimo et António Costa Pinto, alors que le nombre d’agents de la PIDE dans les colonies était en 1954 inférieur à 100, en 1972 ce nombre était de 1 700 agents (Jerónimo Miguel Bandeira et Pinto António Costa, « A Modernizing Empire? Politics, Culture, and Economy in Portuguese Late Colonialism », in Jerónimo Miguel Bandeira et Pinto António Costa (dir.), The Ends of European Colonial Empires. Cases and Consequences, Hampshire, Palgrave Macmillan, 2015b, p. 51-80, p. 57). Il faut souligner qu’avant même le début de la lutte armée en Angola, la répression de toute forme de contestation avait fait de nombreuses victimes. En 1953, la répression opérée par les autorités portugaises fit environ 1 000 morts à Sao Tomé-et-Principe suite à des contestations ; le 3 août 1959, 50 grévistes furent tués au port de Bissau, Pidjiguiti. En juin 1960, 500 Mozambicains furent tués lors d’une manifestation de producteurs de coton dans la ville de Mueda, au nord du Mozambique et en janvier 1961 plusieurs centaines de producteurs de coton furent tuées dans la région de Malanje en Angola (Macqueen Norrie, The decolonization of Portuguese Africa. Metropolitan Revolution and the Dissolution of Empire, New York, Addison Wesley Longman Limited, 1997, p. 17-18. L’auteur avance la date d’août 1960, au lieu de 1959, en ce qui concerne le massacre de Pidjiguiti).
6Pinto António Costa, « Portugal e a Resistência à Descolonização », in Bethencourt Francisco et Chaudhuri Kirti (dir.), História da Expansão Portuguesa: Último Império e Recentramento (1930-1998), Lisbonne, Círculo dos Leitores, 1999a, p. 51-64, p. 52.
7Newitt Malyn, « Os Partidos Nacionalistas Africanos no Tempo da Revolução », in Rosas Fernando, Machaqueiro Mário et Oliveira Pedro Aires (dir.), O Adeus ao Império. 40 Anos de Descolonização Portuguesa, Lisbonne, Nova Vega e Autores, 2015, p. 25-43, p. 27.
8René Pélissier souligne que la date de création du MPLA fait débat (Wheeler Douglas et Pelissier René, op. cit., p. 237).
9Pinto António Costa, O Fim do Império Português, Lisbonne, Livros Horizontes, 2001, p. 38.
10Newitt Malyn, « Os Partidos Nacionalistas Africanos no Tempo da Revolução », op. cit., p. 35.
11Justin Pearce souligne le caractère urbain du MPLA, qui rencontra des difficultés à établir un contrôle sur les zones rurales angolaises au cours de la guerre coloniale (Pearce Justin, A Guerra civil em Angola 1975-2002, Lisbonne, Tinta da China, 2017, p. 66).
12Pinto António Costa, O Fim do Império Português, op. cit., p. 41.
13Ibid, p. 38.
14Wheeler Douglas et Pelissier René, op. cit., p. 235 et suivantes. Cette classification fait cependant débat. Voir Pearce Justin, op. cit., p. 56.
15Newitt Malyn, « Os Partidos Nacionalistas Africanos no Tempo da Revolução », op. cit., p. 28.
16Ibid., p. 30.
17Ibid., p. 28.
18Cité par Newitt Malyn, ibid.
19Macqueen Norrie, The decolonization of Portuguese Africa. Metropolitan Revolution and the Dissolution of Empire, op. cit., p. 21.
20Ibid.
21Newitt Malyn, « Os Partidos Nacionalistas Africanos no Tempo da Revolução », op. cit., p. 37-38.
22Salazar déclara en 1959 : « Ce qui est sûr c’est que nous allons avoir une guerre en outre-mer et que ça sera une guerre de guérilla. » Cité par Pinto António Costa dans, « A Guerra Colonial e o Fim do Império Português », in Bethencourt Francisco et Chaudhuri Kirti (dir.), História da Expansão Portuguesa: Último Império e Recentramento (1930-1998), Lisbonne, Círculo dos Leitores, 1999b, p. 65-98, p. 72.
23Fernando Tavares Pimenta, comme d’autres historiens, remet en cause la théorie d’une « paternité » du MPLA de l’attaque du 4 février. Voir Pimenta Fernando Tavares, Portugal e o Século xx. Estado-Império e Descolonização (1890-1975), Porto, Edições Afrontamento, 2010, p. 102-103.
24Wheeler Douglas et Pelissier René, op. cit., p. 253.
25Pinto António Costa, « A Guerra Colonial e o Fim do Império Português », op. cit., p. 70.
26Castelo Cláudia, Passagens para África. O Povoamento de Angola e Moçambique com Naturais da Metrópole (1920-1974), Porto, Edições Afrontamento, 2007, p. 350. L’historien René Pélissier estime qu’entre 200 et 300 colons perdirent la vie (Wheeler Douglas et Pelissier René, op. cit., p. 258). Norrie MacQueen, de son côté, avance les chiffres de 300 à 500 morts du côté de la population blanche et de 1 500 Africains, victimes de l’UPA. La répression très violente de la part de la population blanche et de l’armée portugaise, causa un nombre beaucoup plus élevé de pertes humaines (Macqueen Norrie, The decolonization of Portuguese Africa. Metropolitan Revolution and the Dissolution of Empire, op. cit., p. 24). Entre le début du conflit et l’été 1961, les pertes humaines s’élevèrent à 2 000 Européens et 50 000 Africains, et un dixième de la population locale se réfugia au Zaïre (Bender Gerald J., Angola sob o Domínio Português. Mito e Realidade, Luanda, Editorial Nzila, 2a Edição, 2009, p. 262).
27Pinto António Costa, O Fim do Império Português, Lisbonne, Livros Horizontes, 2001, p. 43.
28Cité par Pereira Victor, « La société portugaise face aux guerres coloniales (1961-1974) », Cahier d’histoire immédiate, no 48, 2015, p. 35-58, p. 38.
29Pimenta Fernando Tavares, Angola. Os brancos e a independência, Porto, Edições Afrontamento, 2008, p. 223. Peu après le début de la guerre en Angola, Salazar déclara également : « Nous ne vendrons pas, nous ne céderons pas, nous ne capitulerons pas, nous ne partagerons pas […] ne serait-ce que la plus petite parcelle de notre souveraineté. » Cité par Young Crawford, « Imperial Endings and Small States: Disorderly Decolonization for the Netherlands, Belgium, and Portugal », in Jerónimo Miguel Bandeira et Pinto António Costa (dir.), The Ends of European Colonial Empires. Cases and Consequences, Hampshire, Palgrave Macmillan, 2015, p. 101-125, p. 117.
30Newitt Malyn, « Os Partidos Nacionalistas Africanos no Tempo da Revolução », op. cit., p. 34.
31Macqueen Norrie, The decolonization of Portuguese Africa. Metropolitan Revolution and the Dissolution of Empire, op. cit., p. 35.
32Ibid., p. 28.
33Pinto António Costa, O Fim do Império Português, op. cit., p. 55.
34Ces accords informels prirent de fait fin lorsque les troupes portugaises attaquèrent l’UNITA à la fin de l’année 1973 (Macqueen Norrie, « O Balanço Militar em 1974 nos Três Teatros de Operações », in Rosas Fernando, Machaqueiro Mário et Oliveira Pedro Aires [dir.], O Adeus ao Império. 40 Anos de Descolonização Portuguesa, Lisbonne, Nova Vega e Autores, 2015, p. 44-59, p. 47).
35Ibid., p. 46. Pour une analyse des neuf premières années de la guerre en Angola, voir Wheeler Douglas et Pelissier René, op. cit., p. 249-336.
36Un grand nombre de témoignages et de romans furent publiés sur la guerre en Angola, notamment ceux de l’écrivain António Lobo Antunes, qui publia en 1979 Le Cul de Judas (Os Cus de Judas). On peut également noter que les lettres que celui-ci envoya à sa femme lors de son stationnement en Angola, après avoir été publiées en 2005, furent adaptées au cinéma en 2016 par Ivo Ferreira (Lettres de la Guerre, Cartas da Guerra).
37Cité par Macqueen Norrie, The decolonization of Portuguese Africa. Metropolitan Revolution and the Dissolution of Empire, op. cit., p. 61.
38Newitt Malyn, « Os Partidos Nacionalistas Africanos no Tempo da Revolução », op. cit., p. 36.
39Macqueen Norrie, The decolonization of Portuguese Africa. Metropolitan Revolution and the Dissolution of Empire, op. cit., p. 38.
40Ibid., p. 40.
41Macqueen Norrie, « O Balanço Militar em 1974 nos Três Teatros de Operações », op. cit., p. 55.
42Macqueen Norrie, The decolonization of Portuguese Africa. Metropolitan Revolution and the Dissolution of Empire, op. cit., p. 62.
43Chiffres avancés par Macqueen Norrie, « O Balanço Militar em 1974 nos Três Teatros de Operações », op. cit., p. 56.
44Pinto António Costa, « A Guerra Colonial e o Fim do Império Português », op. cit., p. 85.
45Macqueen Norrie, The decolonization of Portuguese Africa. Metropolitan Revolution and the Dissolution of Empire, op. cit., p. 44.
46Newitt Malyn, « Os Partidos Nacionalistas Africanos no Tempo da Revolução », op. cit., p. 40.
47Bruno Cardo Reis et Pedro Aires Oliveira voient dans la décision du régime portugais de construire ce barrage « la démonstration visible de son engagement à long-terme de rester en Afrique ». Reis Bruno Cardoso et Oliveira Pedro Aires, « Cutting Heads or Winning Hearts: Late Colonial Portuguese Counterinsurgency and the Wiriyamu Massacre of 1972 », Civil War, no 14:1, 2012, p. 80-103, p. 88.
48Ibid., p. 86.
49À titre d’exemple, l’opération connue sous le nom d’« Opération Nœud Gordien » (« Operação Nó Górdio ») qui se déroula en juillet 1970, mobilisa quelque 8 000 hommes (ibid., p. 88).
50Voir à ce sujet Reis Bruno Cardoso et Oliveira Pedro Aires, op. cit., p. 80-103.
51Macqueen Norrie, « O Balanço Militar em 1974 nos Três Teatros de Operações », op. cit., p. 49.
52Alexandre Valentim, « A descolonização portuguesa em perspetiva comparada » in Franco Manuela (dir.), Portugal, os Estados Unidos e a África Austral, Lisbonne, Instituto Português de Relações Internacionais IPRI, 2006a, p. 31-59, p. 51.
53Pereira Victor, « La société portugaise face aux guerres coloniales (1961-1974) », op. cit., p. 36.
54Pinto António Costa, « A Guerra Colonial e o Fim do Império Português », op. cit., p. 75.
55Selon António Costa Pinto, en treize années de guerre, 8 300 soldats portugais perdirent la vie et 28 000 furent blessés et mutilés (ibid., p. 78). L’historien Victor Pereira avance le nombre de 4 000 morts du côté des mouvements de libérations. Pereira Victor, « La société portugaise face aux guerres coloniales (1961-1974) », op. cit., p. 36. Sur la question de la mémoire de la guerre coloniale, voir Antunes Maria José Lobo, Regressos quase perfeitos. Memórias da guerra em Angola, Lisbonne, Edições Tinta da China, 2015.
56Article 3 de l’Acte Colonial (Acto Colonial, 1930), cité par Léonard Yves, « O Império Colonial Salazarista », in Bethencourt Francisco et Chaudhuri Kirti (dir.), História da Expansão Portuguesa: Último Império e Recentramento (1930-1998), Lisbonne, Círculo dos Leitores, 1999a, p. 10-30, p. 17.
57Jerónimo Miguel Bandeira et Pinto António Costa, « A Modernizing Empire? Politics, Culture, and Economy in Portuguese Late Colonialism », op. cit., p. 54.
58Léonard Yves, « O Ultramar Português », in Bethencourt Francisco et Chaudhuri Kirti (dir.), História da Expansão Portuguesa: Último Império e Recentramento (1930-1998), Lisbonne, Círculo dos Leitores, 1999b, p. 31-50, p. 37. L’historien Norrie MacQueen souligne que cette idée d’exceptionnalité du colonialisme portugais n’est cependant pas apparue avec l’instauration de l’État Nouveau, mais était déjà présente avant même la Première Guerre mondiale (Macqueen Norrie, The decolonization of Portuguese Africa. Metropolitan Revolution and the Dissolution of Empire, op. cit., p. 6).
59Castelo Cláudia, Passagens para África. O Povoamento de Angola e Moçambique com Naturais da Metrópole (1920-1974), op. cit., p. 108.
60Neto Maria da Conceição, « Ideologia, contradições e mistificações da colonização de Angola no século xx », Lusotopie, 1997, p. 327-359, p. 341.
61Vargaftig Nadia, « L’empire des dictateurs : la propagande coloniale sous Salazar et Mussolini (1922-1940) », in Lorin Amaury et Taraud Christelle (dir.), Nouvelle histoire des colonisations européennes. xixe-xxe siècles. Sociétés, cultures, politiques, Paris, Presses universitaires françaises, 2013, p. 65-76, p. 74.
62Alexandre Valentim, « A descolonização portuguesa em perspetiva comparada », in Franco Manuela (dir.), Portugal, os Estados Unidos e a África Austral, op. cit., p. 54.
63Oliveira Pedro Aires, « Um Império para encher o olho? (1926-1961) », in Oliveira e Costa João Paulo (dir.), História da Expansão e do Império Português, Lisbonne, A Esfera dos Livros, 2014, p. 479-509, p. 509.
64Macqueen Norrie, The decolonization of Portuguese Africa. Metropolitan Revolution and the Dissolution of Empire, op. cit., p. 25. Carlos Maúricio souligne que lorsque la guerre éclata, au sein de l’opposition au régime, seul le Parti communiste portugais (Partido Comunista Português, PCP) défendait le droit à l’autodétermination des colonies portugaises, se positionnant ainsi contre les guerres coloniales (Maurício Carlos, « A Guerra Colonial e a Descolonização vistas pelas Sondagens de Opinião [1973-2004] », Nação e Defesa, no 130-5.a série, 2011, p. 267-295, p. 272). Voir également Rosas Fernando, « O anticolionalismo tardio do antifascismo português », in Rosas Fernando, Machaqueiro Mário et Oliveira Pedro Aires (dir.), O Adeus ao Império. 40 Anos de Descolonização Portuguesa, Lisbonne, Nova Vega e Autores, 2015, p. 12-24.
65Pimenta Fernando Tavares, Portugal e o Século xx. Estado-Império e Descolonização (1890-1975), op. cit., p. 108.
66Antunes Maria José Lobo, « O que se vê e o que não pode ser visto: Fotografia, Violência e Guerra Colonial », in Peralta Elsa, GÓis Bruno et Oliveira Joana (dir.), Retornar. Traços de Memória do Fim do Império, Lisbonne, Edições 70, 2017, p 213-227.
67Pereira Victor, « La société portugaise face aux guerres coloniales (1961-1974) », op. cit., p. 42-43.
68Cité par Reis Bruno Cardoso, « Myths of Decolonization: Britain, France, and Portugal Compared », in Jerónimo Miguel Bandeira et Pinto António Costa (dir.), The Ends of European Colonial Empires. Cases and Consequences, Hampshire, Palgrave Macmillan, 2015a, p. 126-147, p. 138.
69Reportage vidéo « A Guerra », Joaquim Furtado [https://www.youtube.com/watch?v=zeVdQe7tYPA&index=13&list=PLDE29E7CC2EF76E39&ab_channel=ccac2321].
70Ibid.
71DL, 2 août 1962, p. 8.
72Ibid.
73Ibid.
74Ibid., p. 8-9.
75Ibid., p. 1.
76Ibid., p. 9.
77DL, 20 octobre 1962, p. 6.
78Discours d’António Salazar du 13 août 1963. Cité par Léonard Yves, « O Império Colonial Salazarista », op. cit., p. 14.
79Cité par Bender Gerald J., op. cit., p. 28.
80Pereira Victor, « La société portugaise face aux guerres coloniales (1961-1974) », op. cit., p. 37-38.
81Cité par Reis Bruno, op. cit., p. 141.
82Amílcar Cabral, cité par Macqueen Norrie, The decolonization of Portuguese Africa. Metropolitan Revolution and the Dissolution of Empire, op. cit., p. 13.
83Cité par Bender Gerald J., op. cit., p. 28.
84Marcelo Caetano cité par Bender Gerald J., ibid., p. 25.
85Pimenta Fernando Tavares, Angola. Os brancos e a independência, op. cit., p. 279.
86Pour une analyse détaillée des revendications des élites blanches d’Angola, voir Pimenta, ibid.
87Décret-loi no 43 893 du 6 septembre 1961.
88Léonard Yves, « O Ultramar Português », op. cit., p. 48.
89Sur le travail forcé et autres mesures discriminatoires, voir Castelo Cláudia, « Migração ultramarina: contradições e constrangimentos », Ler História, no 56, 2009, p. 69-82, p. 283-330. Voir également Mateus Dalila Cabrita, « El Trabajo Forzado en las Colonias Portuguesas », Historia, Trabajo y Sociedad, no 4, 2013, p. 63-87 ; Bender Gerald J., op. cit., p. 233-241 ; Varela Raquel et Louçã João Carlos, « De que é feito um império? Trabalho forçado nas colónias portuguesas », Trabalho Necessário, ano 14, no 24, 2016, p. 8-22. Sur le nouveau Code du travail rural de 1962 voir Wheeler Douglas et Pelissier René, op. cit., p. 279-283.
90Après la Seconde Guerre mondiale les colonies portugaises avaient déjà connu un développement économique, dû à la hausse des prix des produits coloniaux, notamment du café (Ferreira Manuel Ennes, Angola-Portugal. Do espaço económico português às relações pós-coloniais, Lisbonne, Escher Publicações, 1990, p. 141).
91Ibid., p. 142-143. Selon René Pélissier, la présence sur le territoire angolais des troupes portugaises, pendant plus d’une décennie, participa également à la stimulation de l’économie de la colonie (Wheeler Douglas et Pelissier René, op. cit., p. 285).
92René Pélissier décrit l’entrée en vigueur du nouveau Code du travail rural en 1962 comme étant « une réforme réellement fondamentale pour modifier les relations sociales entre les Africains et la communauté blanche » (ibid., p. 279).
93Macqueen Norrie, The decolonization of Portuguese Africa. Metropolitan Revolution and the Dissolution of Empire, op. cit., p. 28. L’historien portugais Fernando Rosas partage cette idée et souligne notamment le fait que l’entreprise diamantifère Diamang continua à avoir recours au travail forcé jusqu’à la fin des années 1960. Reportage vidéo RTP2, « História a História África », épisode 2 « Diamang, Um Estado Dentro do Estado », RTP 2, 22 octobre 2017, [http://www.rtp.pt/play/p3951/e310842/historia-a-historia-africa].
94António Oliveira de Salazar mourut le 27 juillet 1970.
95Pimenta Fernando Tavares, Portugal e o Século xx. Estado-Império e Descolonização (1890-1975), op. cit., p. 123.
96Selon Fernando Tavares Pimenta, Marcelo Caetano fut ainsi accusé de trahison dans le cadre de campagnes de diffamation (ibid., p. 125).
97Ibid., p. 126.
98Ibid., p. 127.
99Selon Fernando Tavares Pimenta, les élites d’Angola avaient à ce titre planifié la sécession de l’Angola pour le 15 août 1974, en comptant sur l’aide de l’armée et de l’administration coloniale (ibid., p. 132-133).
100Sur la question des villes dans les colonies portugaises d’Afrique, voir Cahen Michel (dir.), Bourgs et villes en Afrique Lusophone, Paris, L’Harmattan, 1989.
101Sur ces restrictions, voir notamment Castro Isabel Henriques, « A sociedade colonial em África. Ideologias, Hierarquias, Quotidianos », in Bethencourt Francisco et Chaudhuri Kirti (dir.), História da Expansão Portuguesa: Último Império e Recentramento (1930-1998), Lisbonne, Círculo dos Leitores, 1999, p. 216-274, p. 220 et Castelo Cláudia, Passagens para África. O Povoamento de Angola e Moçambique com Naturais da Metrópole (1920-1974), op. cit., p. 286. Voir également le deuxième épisode de História a História África, « Diamang, Um Estado Dentro do Estado » réalisé par l’historien Fernando Rosas, dans lequel est abordée la question de la ségrégation raciale et spatiale dans la ville angolaise de Dundo.
102À ce titre, Gerald Bender souligne que la société coloniale dans les possessions portugaises d’Afrique ne différait en rien de la situation dans les possessions des autres puissances européennes, parlant d’une « société coloniale typique, caractérisée par la même domination omniprésente de la population blanche » (Bender Gerald J., op. cit., p. 334).
103Castro Isabel Henriques, op. cit., p. 220.
104Newitt Malyn, Portugal in Africa. The Last Hundred Years, Londres, C. Hurst & Co, 1981, p. 168-169.
105Selon l’historien, au cours des années 1960 ce taux diminua, l’analphabétisme concernant alors 75 % de la population du Mozambique (Macqueen Norrie, The decolonization of Portuguese Africa. Metropolitan Revolution and the Dissolution of Empire, op. cit., p. 12).
106Bender Gerald J., op. cit., p. 113, p. 323.
107En 1954, António Vicente Ferreira, ancien Haut-commissaire en Angola entre 1926 et 1928, décrivait les « assimilés » de la sorte : « ceux que l’on appelle “indigènes civilisés” […] ne sont, en général, rien de plus que des imitations grotesques d’hommes blancs […] [dotés d’une] mentalité de primitif, mal dissimulée par la manière de parler, les gestes et les vêtements copiés aux Européens ». Cité par Bender Gerald J., ibid., p. 341.
108Pimenta Fernando Tavares, Portugal e o Século xx. Estado-Império e Descolonização (1890-1975), op. cit., p. 34. Selon Norrie MacQueen, en 1950, leur nombre s’élevait à environ 30 000 en Angola, et à 4 500 au Mozambique (Macqueen Norrie, The decolonization of Portuguese Africa. Metropolitan Revolution and the Dissolution of Empire, op. cit., p. 12). Gerald J. Bender mentionne également des écarts de salaires entre les colons et les « assimilés » (Bender Gerald J., op. cit., p. 183).
109Castelo Cláudia, Passagens para África. O Povoamento de Angola e Moçambique com Naturais da Metrópole (1920-1974), op. cit., p. 286.
110Oliveira Pedro Aires, « Um Império para encher o olho? (1926-1961) », op. cit., p. 479-509, p. 508-509.
111Bender Gerald J., op. cit., p. 29.
112Ibid.
113Cité par Pimenta Fernando Tavares, Angola. Os brancos e a independência, op. cit., p. 286.
114Souto Amélia Neves, Caetano e o Ocaso do Império. Administração e Guerra colonial em Moçambique durante o Marcelismo (1968-1974), Porto, Edições Afrontamento, 2007, p. 359-360.
115Bender Gerald J., op. cit., p. 121.
116L’historien Malyn Newitt nous apprend que trois types de condamnés étaient ainsi envoyés dans les colonies. Le premier était composé des individus condamnés pour crimes d’atteinte à la personne ou aux biens, le second par des prisonniers politiques, et enfin le troisième groupe était, jusqu’au xixe siècle, composée d’orphelins et de prostituées (Newitt Malyn, Portugal in Africa. The Last Hundred Years, op. cit., p. 150). L’envoi de condamnés vers les colonies fut une pratique qui dura jusqu’en 1934 (Castelo Cláudia, « Migração Colonial para Angola e Moçambique [Séculos xix-xx] », in Peralta Elsa, GÓis Bruno et Oliveira Joana [dir.], Retornar. Traços de Memória do Fim do Império, Lisbonne, Edições 70, 2017, p. 63-84, p. 71). L’Angola était également pensé comme étant une terre particulièrement inhospitalière, dangereuse et infestée par d’innombrables maladies mortelles.
117Si des condamnés étaient également envoyés au Mozambique, leur nombre était beaucoup plus réduit que dans le cas de l’Angola (Newitt Malyn, Portugal in Africa. The Last Hundred Years, op. cit., p. 150).
118Selon l’historien Malyn Newitt, inciter les Portugais à s’installer en Angola et Mozambique était une tentative de l’Estado Novo de rediriger les flux de l’émigration que connaissait alors le Portugal à destination notamment du Brésil et des États-Unis, et ainsi créer un « nouveau Brésil » en Afrique (ibid., p. 152-153). Sur l’histoire du peuplement blanc en Angola, voir également Bender Gerald J., op. cit., p. 219 et suivantes.
119Macqueen Norrie, The decolonization of Portuguese Africa. Metropolitan Revolution and the Dissolution of Empire, op. cit., p. 12.
120Castelo Cláudia, « Migração Colonial para Angola e Moçambique (Séculos xix-xx) », op. cit., p. 63-84, p. 74.
121Castelo Cláudia, Passagens para África. O Povoamento de Angola e Moçambique com Naturais da Metrópole (1920-1974), op. cit., p. 97, p. 143.
122Macqueen Norrie, The decolonization of Portuguese Africa. Metropolitan Revolution and the Dissolution of Empire, op. cit., p. 11.
123Castelo Cláudia, Passagens para África. O Povoamento de Angola e Moçambique com Naturais da Metrópole (1920-1974), op. cit., p. 376.
124Neto Maria da Conceição, « Ideologia, contradições e mistificações da colonização de Angola no século xx », op. cit., p. 346.
125Wheeler Douglas et Pelissier René, op. cit., p. 278.
126Bender Gerald J., op. cit., p. 191 et suivantes.
127Ibid., p. 248.
128Castelo Cláudia, « Migração Colonial para Angola e Moçambique (Séculos xix-xx) », op. cit., p. 76.
129Castelo Cláudia, Passagens para África. O Povoamento de Angola e Moçambique com Naturais da Metrópole (1920-1974), op. cit., p. 216.
130Macqueen Norrie, The decolonization of Portuguese Africa. Metropolitan Revolution and the Dissolution of Empire, op. cit., p. 37.
131Castelo Cláudia, « Migração Colonial para Angola e Moçambique (Séculos xix-xx) », op. cit., p. 76.
132Pereira Victor, A ditadura de Salazar e a emigração. O Estado portugês e os seus emigrantes em França (1957-1974), Lisbonne, Temas e Debates-Círculo de Leitores, 2014, p. 26.
133Ibid., p. 80. Les caractéristiques de la population rapatriée des colonies portugaises d’Afrique feront l’objet d’une analyse dans le chapitre iii de cet ouvrage.
134Selon Norrie MacQueen, en Angola, plus d’un million d’individus furent concernés. L’auteur souligne notamment le fait que ces regroupements forcés permettaient l’expropriation des terres détenues par des Africains au profit de la population blanche (Macqueen Norrie, The decolonization of Portuguese Africa. Metropolitan Revolution and the Dissolution of Empire, op. cit., p. 36). Sur cette question, voir également Bender Gerald J., op. cit., p. 264 et suivantes.
135Macqueen Norrie, The decolonization of Portuguese Africa. Metropolitan Revolution and the Dissolution of Empire, op. cit., p. 24.
136Pinto António Costa, « A Guerra Colonial e o Fim do Império Português », op. cit., p. 84.
137Wheeler Douglas et Pelissier René, op. cit., p. 253.
138Bender Gerald J., op. cit., p. 371.
139Ibid., p. 262.
140Wheeler Douglas et Pelissier René, op. cit., p. 250.
141Reportage vidéo « A Guerra » Joaquim Furtado [https://www.youtube.com/watch?v=qFZx4WkMh6s&list=PLDE29E7CC2EF76E39&index=10&ab_channel=ccac2321].
142Carlos Fabião. Propos recueillis par Joaquim Furtado. Reportage vidéo « A Guerra » Joaquim Furtado [https://www.youtube.com/watch?v=XrLpzRWH81s&ab_channel=HugoCosta].
143Castelo Cláudia, Passagens para África. O Povoamento de Angola e Moçambique com Naturais da Metrópole (1920-1974), op. cit., p. 359.
144Ce fut notamment le cas d’Adolfo Maria qui fit partie du MPLA. Voir Pimenta Fernando Tavares, Angola no Percurso de um Nacionalista. Conversas com Adolfo Maria, Porto, Edições Afrontamento, 2006.
145Pimenta Fernando Tavares, Angola. Os brancos e a independência, op. cit., p. 224 et suivantes.
146Macqueen Norrie, The decolonization of Portuguese Africa. Metropolitan Revolution and the Dissolution of Empire, op. cit., p. 26.
147Castelo Cláudia, Passagens para África. O Povoamento de Angola e Moçambique com Naturais da Metrópole (1920-1974), op. cit., p. 359-360.
148Selon Cláudia Castelo, des incidents entre les colons et les forces armées éclatèrent également dans la ville de Vila Pery (actuelle ville de Chimoio) [ibid., p. 361-362].
149Ibid. Ce ressentiment contre les forces armées portugaises se renforcera à la suite du processus de décolonisation et des indépendances des anciennes colonies portugaises d’Afrique. Voir chapitre viii.
150Macqueen Norrie, The decolonization of Portuguese Africa. Metropolitan Revolution and the Dissolution of Empire, op. cit., p. 48.
151Reis Bruno Cardoso et Oliveira Pedro Aires, op. cit., p. 80-103, p. 96.
152Castelo Cláudia, Passagens para África. O Povoamento de Angola e Moçambique com Naturais da Metrópole (1920-1974), op. cit., p. 361.
153Bender Gerald J., op. cit., p. 263.
154L’historien Crawford Young conclut que ces réformes n’ont engendré que « peu de changements dans la réalité quotidienne » (Young Crawford, « Imperial Endings and Small States: Disorderly Decolonization for the Netherlands, Belgium, and Portugal », op. cit., p. 117).
155Cité par Góis Bruno, « Retornar à pergunta “O que faz partir as gentes” », in Peralta Elsa, Góis Bruno et Oliveira Joana (dir.), Retornar. Traços de Memória do Fim do Império, Lisbonne, Edições 70, 2017, p. 85-99, p. 85.

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