La répression des mobilisations sociales en contexte postaccord de paix en Colombie
Le « droit à la contestation » au cœur du débat public
p. 147-160
Texte intégral
Introduction
1L’objectif de cette réflexion est de comprendre comment émerge le débat sur le « droit à la contestation » (derecho a la protesta), qui défend le principe de la « contestation » sociale pacifique en Colombie, et la façon dont ce débat s’articule avec, d’une part, la dénonciation de la répression multiforme contre toute forme de contestation et, d’autre part, la défense du processus de paix, supposé faciliter l’élargissement de la mobilisation et de la participation politique. Malgré la prévalence d’un régime démocratique depuis 1958, celui-ci s’avère largement formel et restreint par de nombreuses périodes d’état d’exception et par l’imposition des logiques de conflit armé aux populations civiles et aux mobilisations sociales1. Depuis l’émergence des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc) en 1964, la répression des mobilisations s’est largement confondue avec la lutte contre les guérillas, sous couvert de lutte antisubversive.
2La lutte antisubversive imprègne encore les débats politiques actuels, malgré la négociation de l’accord de paix avec cette guérilla conclue en 2016 par le gouvernement de Juan Manuel Santos (2010-2018), accord qui n’inclut pas une autre guérilla encore en activité, l’Armée de libération nationale (ELN), d’inspiration guévariste. Le gouvernement Santos doit cependant faire face à une forte opposition politique et institutionnelle regroupée derrière l’ancien président Álvaro Uribe (2002-2010)2, qui juge l’accord de paix trop « indulgent » envers la guérilla, refusant l’entrée en politique de membres des Farc et les aides économiques pour la reconversion des combattants démobilisés. Le président Duque, proche d’Uribe, après s’être montré très hostile à l’accord pendant la campagne électorale, l’applique de mauvaise grâce et avec de nombreuses réserves3.
3La décennie 2010 se caractérise par la résurgence et l’articulation progressive de mouvements sociaux très divers (paysans, étudiants, écologistes, pacifistes)4 qui se rassemblent pour dénoncer la violence et la répression dont les acteurs mobilisés et les civils font l’objet, puis pour appuyer le processus de paix. Les mobilisations de 2019 illustrent la rencontre d’attentes sociales ou économiques (emploi, retraites, éducation) et politiques (ouverture de la représentation et la participation), longtemps mises de côté pendant le conflit. Mais c’est aussi le moment où se consolide un discours portant sur la nécessité de mieux définir et encadrer le dénommé « le droit à la contestation ». Ce terme désigne, pour les acteurs, le droit d’occuper la rue et l’espace public, et plus généralement d’organiser des actions collectives pacifiques (manifestations, occupations d’édifices publics, sit-in), sans risquer leur vie, comme l’illustre le slogan unificateur : « Que défendre la paix ne nous coûte pas la vie5. » Or ce droit reste entravé par des textes et des pratiques qui font encore aujourd’hui des acteurs sociaux le relais des guérillas qualifiées de « terroristes », et qui donnent lieu à une répression policière ou militaire aussi bien que judiciaire. Partant, revendiquer le « droit à la manifestation » revient à dénoncer publiquement la répression élevée des mobilisations. C’est là une dénonciation qui n’est pas nouvelle, mais qui devient en 2019-2020 l’objet d’une contestation citoyenne mieux coordonnée, et reçoit le soutien des milieux académiques publics et privés ainsi que d’acteurs connaisseurs des milieux judiciaires (collectifs d’avocats, associations citoyennes).
4On examine dans une première partie les diverses modalités de la répression à l’œuvre, tout en retraçant l’essor et l’articulation des mobilisations de la décennie 2010, débouchant sur la contestation multisectorielle de 2019. Dans le même temps, on voit émerger et se consolider le débat sur le droit à la manifestation, qui articule la dénonciation de la répression et la défense du processus de paix, débat examiné dans la seconde partie. Cela montre que les pratiques répressives héritées du conflit armé font désormais l’objet d’un débat public beaucoup plus coordonné.
Répressions et violences envers les mobilisations en contexte de postaccord de paix
5La répression des mobilisations sociales reste aujourd’hui enchevêtrée à la violence sociale et politique. Elle atteint un degré très élevé en Colombie, et malgré l’accord de paix, le conflit armé persistant et la présence de divers groupes armés locaux ou régionaux déterminent les modalités de cette répression. Nous décrirons brièvement ces modalités pour en illustrer les imbrications et l’impact.
Continuité de la répression et des violences malgré l’accord de paix
6Les mouvements sociaux colombiens sont fortement réprimés durant le conflit armé qui a cours depuis les années 1960. Dans un contexte de guerre froide accentué après la Révolution cubaine (1959) et qui suscite l’essor de mouvements révolutionnaires et de guérillas en Amérique latine, le conflit armé colombien se traduit sur le plan idéologique par une lutte contre la « subversion » des guérillas qui questionnent le contrôle du pouvoir par les partis traditionnels, libéral et conservateur6. Cela favorise un fort contrôle militaire du pouvoir politique, qui s’appuie sur la doctrine de Sécurité nationale et diverses lois « anti-terroristes » et « anticommunistes », qui encouragent la répression féroce des mouvements sociaux, en particulier paysans et étudiants, et des opposants politiques tels le parti Union patriotique, issus d’une démobilisation partielle des Farc, dont au minimum 3 000 militants sont assassinés dans les années 19807. Un certain apaisement politique survient avec la nouvelle Constitution (1991), qui reconnaît des droits sociaux et culturels élargis à diverses minorités (afro-descendants, autochtones), tandis qu’émergent des mouvements pacifistes dans les années 1990. Toutefois le conflit armé se poursuit, malgré la démobilisation de diverses guérillas en 19918.
7Dans les années 1995-2003, période d’expansion des acteurs paramilitaires9, la lutte contre les guérillas associe davantage, avec des variations régionales, les forces de l’ordre et les organisations paramilitaires unies par le discours de lutte antisubversive, qui répriment les acteurs civils (syndicats, communautés ethniques), qualifiés d’acteurs « terroristes » au même titre que les guérillas armées qu’ils sont accusés de soutenir10. Depuis 2016, les groupes paramilitaires, qui se sont reconstitués sur le plan local à la suite d’une démobilisation très partielle en 2005-200711, visent tous les acteurs civils (journalistes, étudiants, activistes sociaux) favorables au processus de paix (à la fois l’accord de paix et les réformes qui en découlent), lequel remet en cause le statu quo économique ou politique hérité du conflit armé. Or, celui-ci conforte une répartition foncière très inégalitaire, mais aussi l’appropriation illégale de près de 7 millions d’hectares de terres par des groupes armés ; terres qui doivent être restituées aux paysans, selon la loi 1748 (2011) et selon l’accord de paix dont le point 1 promeut cette redistribution dans le cadre d’une « réforme rurale intégrale ». La promotion de la paix et notamment de la redistribution foncière expose donc les acteurs sociaux à diverses formes de violence par ces acteurs armés illégaux. Actuellement, les organisations paramilitaires très fragmentées12 se mêlent à une nébuleuse de « groupes armés organisés13 », issus du narcotrafic (parfois relais de cartels mexicains), mafieux et criminels, très mouvants sur le terrain et dominants là où l’État est peu présent14.
8Le contexte depuis 2016 est ainsi marqué par une répression intensifiée contre les promoteurs des réformes politiques et économiques liées à l’accord de paix, les populations civiles, mais aussi les combattants des Farc démobilisés en voie de réinsertion15. Elle vise notamment les acteurs paysans et tenants de la réforme rurale ou de la substitution des cultures illicites, pourtant engagés dans des programmes liés à l’accord de paix pour financer la reconversion des producteurs de coca vers des cultures alternatives16. La répression ou la violence sont le fait, selon des configurations locales changeantes, des acteurs institutionnels (police, armée), paramilitaires, de groupes mafieux liés au narcotrafic (opposés à la substitution des cultures) et de groupes dissidents des Farc, et le plus souvent de plusieurs acteurs à la fois. L’enjeu est de s’assurer la soumission des civils dans les territoires contrôlés par les groupes armés. Des recherches de synthèse17 reflètent cette intensification de toutes les formes de violence, durant la négociation de l’accord (tableau 1). Ces tendances s’aggravent depuis lors18.
Tableau 1. – Les agressions contre les défenseurs des droits de l’homme (2012-2018).
Agressions contre des défenseurs DH (total) | Vol information/saccage local | Détentions arbitraires/usage abusif du système légal | Attentats/violences sexuelles (vs) | Menaces de mort | Assassinats (A)/disparitions (D) | |
2012 | 357 | 3 | 27 | 50 + 1 vs | 202 | 69A+ 5D |
2013 | 366 | 7 | 32 | 39 | 209 | 78A+1D |
2014 | 626 | 10 | 31 | 41 | 488 | 55A+1D |
2015 | 682 | 8 | 34 | 35 | 539 | 63A+3D |
2016 | 481 | 6 | 26 | 49 + 1vs | 317 | 80A+2D |
2017 | 560 | 2 | 32 | 50 | 370 | 106A |
2018 | 805 | 6 | 23 | 34 | 583 | 155A+4D |
9La répression provenant des acteurs institutionnels (forces de l’ordre, pouvoir judiciaire) s’exerce essentiellement selon deux modalités : la répression policière et militaire, avec des arrestations massives de leaders ou sympathisants de groupes sociaux jugés suspects lors des marches et grèves ou en amont, puis la répression judiciaire avec la pénalisation des manifestants, la plupart des modalités d’action collective étant pénalisées par les textes, comme on le montre plus loin. S’y ajoute, sous couvert de lutte antisubversive, le travail de surveillance de groupes supposés proches des guérillas ou « infiltrés » par elles, traités comme des « ennemis de l’intérieur », des forces « déstabilisatrices » ou des « relais de puissances étrangères ». En outre, il existe une forte stigmatisation sociale et médiatique envers les acteurs sociaux, qualifiés de « terroristes », ce qui constitue l’une des composantes du processus de criminalisation des mobilisations sociales19.
10La répression paramilitaire, parfois associée à celle des forces de l’ordre, s’exerce de façon collective durant le conflit armé, sous forme de massacres à l’encontre de villages ou de communautés indiennes, mais aussi par des disparitions d’activistes, pour lutter contre la « subversion20 ». Depuis 2016, celle-ci devient plus ciblée, avec l’assassinat de « leaders sociaux » (les dirigeants et militants d’organisations sociales) ou les menaces contre des catégories sociales jugées « nuisibles » (les « délinquants », les « marginaux »), au titre du « nettoyage social21 ». Mais les massacres, qui selon la définition de l’ONU désignent l’assassinat d’au moins trois personnes au même moment, dans le même lieu et par le même auteur, tendent à ressurgir dans le contexte du confinement lié à la pandémie de Covid-19 en 202022.
La mobilisation multisectorielle et la défense de l’accord de paix
11Après diverses mobilisations majeures, étudiantes (2011) et paysannes et rurales (2013-2014), on observe une articulation croissante de ces acteurs, mais aussi des alliances avec des mouvements écologistes et défenseurs des minorités indiennes et des mouvements pacifistes, tous réunis pour défendre le processus de paix23. La mobilisation sociale en 2019 illustre la diversité multisectorielle des acteurs sociaux et des populations non organisées qui y prennent part, ce qui lui confère une ampleur inédite depuis les années 197024.
12La « grève nationale » prend la forme de diverses manifestations culturelles, de concerts de casseroles (cacerolazos) et de marches, le terme « paro nacional 21N » regroupant les protestations de la fin 2019 et du début 202025. Le 21 novembre (21N), la marche est l’épicentre des protestations qui réunit des organisations étudiantes, paysannes, indiennes, environnementalistes et féministes, mais aussi des secteurs non organisés. Autoproclamée « mobilisation citoyenne », la contestation axe son discours autour de trois thèmes principaux : d’abord la lutte contre la corruption, notamment au sein de la classe politique et dans l’enseignement supérieur ; ensuite la défense de l’accord de paix et le refus de la violence sociale (assassinats, menaces, disparitions) à l’encontre des acteurs sociaux et des ex-combattants démobilisés ; et enfin le refus de plusieurs réformes en débat au parlement (réforme fiscale, réforme des retraites et réforme du droit du travail). On voit ainsi se constituer deux axes majeurs de débat : d’un côté, le refus de la politique sociale et économique du gouvernement qui touche à la fois les jeunes sans emploi et les retraités ; et de l’autre, une forte volonté de préserver la mise en œuvre de l’accord de paix, qui mobilise les défenseurs de la paix et les secteurs affectés par le conflit (paysans, communautés indiennes, victimes du conflit).
13Ce second axe acquiert une importance accrue dans le débat public, alors même que le processus de paix se voit encore fragilisé lorsqu’une partie des dirigeants des Farc reprend les armes fin août 201926. La défense de l’accord de paix, renégocié après le référendum d’octobre 2016 où avait été rejetée la première version de l’accord, témoigne d’une remobilisation des secteurs « mobilisés pour la paix » (pacifistes, organisations de victimes et défenseurs de l’accord), qui attribuent les failles du processus aux représentants législatifs et aux pouvoirs publics. Les partis politiques traditionnels n’ont pas conduit les réformes politiques découlant de l’accord de paix (hormis de rares mesures concernent les droits de l’opposition)27. Mais c’est surtout une mise en cause du pouvoir exécutif, car le gouvernement Duque est jugé responsable, aux yeux des secteurs mobilisés, de la violence sociale et politique persistante envers les mouvements sociaux et les ex-combattants des Farc démobilisés, comme en témoigne la plainte déposée par des associations contre le président Duque, l’ex-président Uribe et quelques autres hauts fonctionnaires pour crime contre l’humanité devant la cour pénale internationale (CPI) le 13 mai 2021. Le gouvernement est aussi accusé de faire montre d’une certaine indifférence aux victimes du conflit, notamment les adolescents recrutés de force par des groupes paramilitaires ou les dissidences des Farc28. Le thème du recrutement des jeunes mineurs revient sur le devant de la scène début novembre 2019, lorsque surgit la nouvelle de la mort de huit jeunes adolescents lors d’un bombardement par l’armée d’un camp de la fraction remobilisée des Farc29.
14Ainsi, la mobilisation en 2019 réaffirme la nécessité de défendre le processus de paix, tout en mettant en débat l’impact des violences sur la population civile et les acteurs mobilisés. Ces enjeux restent pleinement d’actualité en 2020, car la situation s’aggrave encore. Le confinement de cinq mois (25 mars-26 août) coïncide avec une expansion de la violence perpétrée par des acteurs armés qui font appliquer les restrictions de mobilité30, tout en accentuant le recrutement de mineurs et en commettant plusieurs massacres31.
Le droit à la contestation au cœur du débat public (2019-2020)
15C’est dans ce contexte tumultueux qu’émerge le débat sur le « droit à la contestation » (derecho a la protesta) ; un débat très présent dans toute l’Amérique latine32. Dans le cas colombien, ce débat se focalise sur la dénonciation de la répression excessive de la mobilisation sociale et sur la nécessité de renouveler le cadre juridique encadrant le droit à la manifestation afin de mieux le protéger.
La dénonciation croissante des « abus policiers » et de la répression des mobilisations
16La répression de la mobilisation sociale par la police, rattachée au ministère de la Défense, dont « l’Escadron anti-mutineries et troubles à l’ordre public » (Esmad : Escuadrón antimotines y disturbios), fait l’objet d’une dénonciation de plus en plus ample33. La répression est jugée « systématique », « démesurée », et souvent non motivée sur le plan légal34. La contestation est désormais relayée par une grande part du secteur académique public et privé, mais aussi par les organisations de défense des droits de l’homme, avec le soutien de médias alternatifs tels « Contagio Radio » et « Pacifista » qui couvrent les luttes sociales.
17La contestation de la répression policière connaît deux épisodes majeurs, liés à des cas emblématiques. Le premier cas est la mort du jeune lycéen Dilán Cruz lors d’une marche le 23 novembre 2019. Un policier est incriminé du fait du calibre de l’arme utilisée. Cela ravive les plaintes des citoyens mobilisés contre l’usage d’armes létales lors des manifestations. Sur le plan judiciaire, une trentaine d’organisations, dont des collectifs d’avocats, et de nombreux citoyens portent plainte de façon générale contre la répression de la mobilisation durant la grève nationale, sous la forme d’une « tutelle » (tutela), recours légal adressé à la cour suprême de justice qui sera examiné en septembre 2020. Le second cas est la mort d’un avocat et chauffeur de taxi, Javier Ordoñez, décédé de plusieurs décharges de taser peu après son arrestation, le 9 septembre 2020. Cela déclenche trois jours d’émeutes urbaines (9-12 septembre), elles-mêmes fortement réprimées35. Cette fois, ce sont près de cinquante citoyens qui déposent une tutelle contre le déploiement de force policière et l’abus systématique de la force lors des manifestations, mais aussi des interpellations liées au respect des mesures sanitaires durant le confinement36. Cela participe d’un débat médiatique naissant y compris dans certains médias plutôt mesurés37, au sujet des « abus policiers systématiques » et du « droit à la manifestation qui doit être respecté38 ».
18La cour suprême de justice (CSJ) répond le 22 septembre 2020 à la tutelle déposée en 2019 (sentence STC-7641-2020) en émettant un avis considéré comme inédit de par son contenu39. Celui-ci comporte trois principales recommandations. La première est l’obligation faite au ministre de la Défense (qui coordonne l’ensemble de la force publique) de présenter des excuses publiques sur divers médias pour la répression durant les mobilisations de 2019. La deuxième est de restructurer la police et l’Esmad, principalement en modifiant les comportements des policiers et en luttant contre les préjugés grâce à des « formations aux droits humains » ; des certificats d’assistance aux cours pourront être exigés aux policiers appelés à intervenir durant les manifestations. La troisième recommandation porte sur l’interdiction de l’usage des armes létales, dont le pistolet de calibre 12, arme incriminée dans le décès de D. Cruz en 2019. Plus généralement, il s’agit de faire respecter le droit à manifester pacifiquement, reconnu par l’article 37 de la Constitution40.
Le droit à la contestation mal régulé
19L’avis de la CSJ est rendu dans un contexte marqué par le flou juridique au sujet du « droit à la contestation », qualifié en espagnol de « droit à la protestation41 ». Pour y remédier, la CSJ ordonne au gouvernement de se concerter avec la société civile sur ce sujet. À l’issue du dialogue conduit fin 2020, le gouvernement émet le décret 003 du 5 janvier 2021 qui laisse encore, selon les acteurs juridiques et sociaux, de nombreux aspects mal régulés, principalement les comportements des forces de l’ordre durant les manifestations42. Or, selon Lalinde (2019), les normes existantes, trop floues, favorisent des pratiques mal régulées de répression policière et judiciaire43.
20Bien que floues, les dispositions en vigueur en la matière n’en sont pas moins restrictives, comme l’illustrent les travaux d’Uprimny et de Sanchez (2010), ainsi que de Lalinde (2019). À ce jour, le cadre juridique restreint toute forme de contestation, rejoignant ainsi le discours politique dominant qui stigmatise et pénalise la majorité des modalités d’action collective en Colombie. Cela favorise la continuité du modèle répressif en vigueur, même après 2016. Les deux principaux textes qui encadrent le droit à la manifestation et divers modes de contestation sont le code pénal (loi 599/2000) et le code de police (loi 1801/2016). Le code pénal (datant de l’an 2000) établit trois types de délits directement liés à l’exercice du droit à la contestation pacifique, mais le caractère flou de leur définition donne une ample marge de manœuvre aux forces de l’ordre44. Ces délits sont :
le « délit de soulèvement de type émeutier » (art. 469, en espagnol asonada)45 ;
le « délit de perturbation du transport public collectif » (art. 353) ;
le « délit d’obstruction ou de blocage de voies publiques qui affecte l’ordre public » (art. 353A).
21Cela expose les acteurs qui recourent à ces modes d’action à une répression judiciaire majeure46. Ces restrictions pénales, elles-mêmes contestées, font l’objet de divers recours dans les années 2010. En résultera la directive 008 du 27 mars 2016 de la Fiscalía (un équivalent approximatif de l’Attorney general aux États-Unis), qui valide le concept de « protestation sociale pacifique », mais sans abolir les délits mentionnés par le code pénal. De plus, ces délits, surtout celui de « soulèvement47 », sont en pratique reliés, dans les chefs d’accusation contre les manifestants, à des délits politiques (sédition, rébellion), plus sévèrement sanctionnés encore48. Tout cela se veut dissuasif, en criminalisant ou stigmatisant la contestation. Le code de police (actualisé en 2016) est plus ambivalent. Il établit dans son article 53 la régulation du « droit à la protestation sociale » dans l’espace public. Bien qu’il mentionne l’importance de ne pas stigmatiser la contestation et les manifestants (art. 55), et qu’il instaure des dispositifs de médiation et dialogue de la police avec les organisateurs en amont et durant la manifestation (art. 57), il restreint aussi le droit à l’intimité et entrave le principe d’inviolabilité des communications privées (art. 139, art. 32). Le code de police reste pourtant imprécis concernant les comportements des forces de l’ordre49, d’où l’insistance de la CSJ pour obtenir une norme statutaire définissant clairement les limites et la portée des interventions policières, et régulant les sanctions applicables en cas d’infractions.
22Ainsi, ces deux textes majeurs comportent des définitions floues du droit de contestation et des modalités d’action collective. À la faveur de ce flou, de nombreuses restrictions au droit de protester subsistent, dans les textes comme en pratique. D’autres textes témoignent en outre de la continuité du cadre politique et juridique répressif issu du gouvernement Uribe (2002-2010), comme la loi 1621/2013, qui reprend diverses dispositions de l’acte législatif 02 de 200350 : elle facilite la surveillance électronique, l’interception et le suivi des communications privées des manifestants, sans contrôle judiciaire51.
Répression de l’action collective non violente
23L’usage de la répression est justifié par le pouvoir colombien en raison de la violence dont feraient preuve les acteurs mobilisés. Cela n’est pas confirmé par l’analyse quantitative des répertoires d’action collective en Colombie, de 1975 à 2016, qui reprend les catégories de répertoire d’action décrites par Sidney Tarrow (conventionnel, disruptif ou violent)52. Les auteurs montrent que l’usage de modes d’action conventionnels, qui ne perturbent pas le fonctionnement habituel des institutions et de la vie quotidienne, est prédominant ; l’usage de la violence dans la contestation est marginal (4 % des actions y ont recours, et s’adressent plutôt à des acteurs publics non armés ou des forces de sécurité) et régresse sur la période étudiée53, tandis que le répertoire « disruptif » – qui comprend selon ces auteurs le blocage de route ou l’occupation d’édifices publics – tend à s’accroître depuis 2007. Ces modes d’action non violents sont pourtant pénalisés dans le code pénal. Ces auteurs signalent qu’il existe de forts « imaginaires » relatifs à l’usage de la violence par certains groupes comme les étudiants, et que les chiffres ne confirment pas. La majorité des acteurs sociaux mobilisés qui font face à des acteurs armés préfèrent user de répertoires pacifiques proches de la désobéissance civile.
24L’usage de la répression, tout en étant généralisé, varie selon le type d’acteur ou d’action ciblé, même si on manque de données à ce sujet. Ce sont les acteurs paysans et ruraux qui en sont les principales cibles : tous les modes de répression policière et judiciaire sont employés lors de la grève nationale agraire en août-septembre 2013, durant laquelle l’un des modes d’action les plus usités est le blocage de routes, car il permet aux paysans de montrer leur rôle dans l’approvisionnement des villes. C’est d’ailleurs l’une des mobilisations les plus réprimées des vingt dernières années, avec un essor des détentions illégales (plus de 800 en trois semaines), comme le montre Lalinde (2019). La seule inflexion a lieu lors de la grève qui réunit les étudiants des secteurs public et privé en 201154. Traditionnellement très réprimés, surtout dans le secteur public55, les étudiants adoptent cette fois une stratégie consistant à témoigner de leur « affection » et même de leur « amour » pour la police, à travers les « marathons de baisers et d’embrassades » réalisés sur le campus de l’université nationale entre étudiants et policiers, ce qui contribue à diminuer les affrontements. Ainsi, même si la répression est très élevée, elle varie en intensité en fonction du secteur mobilisé et de la capacité des acteurs à lui faire face. Les progrès obtenus par les étudiants en 2011 s’avèrent cependant fragiles, puisque le cadre juridique se durcit à la suite des mobilisations agraires de 2013, comme l’illustre la loi 1621 déjà mentionnée56. En 2015-2017, la répression policière et judiciaire vise des étudiants de l’université nationale, certains étant accusés de collusion avec la guérilla de l’ELN et même de participer à des attentats.
25Il existe donc un net décalage entre les représentations véhiculées par l’évocation de la « lutte antisubversive » pour réprimer les acteurs sociaux mobilisés pacifiquement, mais qu’à plusieurs reprises les autorités ont pu aller jusqu’à qualifier de « vandales terroristes », et l’emploi effectif – et de facto marginal – de la violence par les manifestants, qui répond surtout à la répression déployée. La continuité du discours « antisubversif » (supposé viser la subversion des guérillas « communistes ») oriente ainsi une réponse étatique marquée par une répression multiforme, facilitée par un cadre juridique ambivalent et restrictif, et qui est allée en s’accentuant en 2019-2020 face à l’articulation croissante des acteurs réunis autour de la défense du processus de paix. Le discours consistant à dénoncer « l’infiltration » supposée des manifestations par les guérillas ou tout acteur assimilé (dissidents) reste donc omniprésent.
Conclusion
26Le contexte colombien, à l’instar d’autres en Amérique latine, a été marqué par l’aggravation de la répression de la protestation sociale comme de la criminalisation des opposants politiques et sociaux dans la décennie 201057. La perpétuation du conflit armé, malgré l’accord de paix avec les Farc, facilite ici l’usage d’une rhétorique antisubversive par le gouvernement, laquelle continue de se traduire par une répression des mobilisations sociales traditionnellement élevée, mais s’aggravant y compris envers des acteurs mobilisés pacifiquement et pour la défense de la paix. Il en résulte un enchevêtrement entre les ressorts de la violence politique et sociale dérivée du conflit armé et les modalités de répression des mobilisations sociales. La répression s’exerce aussi bien envers les acteurs organisés que contre les populations civiles et, plus généralement, elle peut toucher toute voix critique du statu quo socio-économique et politique. La contestation, en tant que telle ou par définition, reste considérée par le gouvernement comme une activité violente ou a minima déstabilisatrice. Aussi le cadre juridique constitué avant le processus de paix contribue-t-il à favoriser une répression plus spécifiquement judiciaire, qui s’est ajoutée à celle des forces de l’ordre lors des principales manifestations des années 2010.
27L’aggravation de la répression envers des acteurs sociaux mieux articulés sur ces dernières années et très divers, et ce nonobstant une sortie partielle du conflit armé, pose donc des défis majeurs pour l’étude des mobilisations sociales et leur rôle dans les processus de paix. Le cas colombien illustre combien la contestation – même pacifique – peut demeurer une action à haut risque. À cet égard, l’espoir né du processus de paix de voir s’ouvrir de nouvelles formes d’expression et d’action collectives a été largement frustré. La fragilité du processus de paix et la répression accrue des acteurs mobilisés agissent comme des obstacles à l’ouverture du régime démocratique colombien, et témoignent d’une consolidation de la domination politique ordinaire qu’exercent les gouvernants, élites nationales et classes supérieures sur les opposants, classes et groupes subalternes de façon générale ; un état de fait qui a été une fois de plus – et assez dramatiquement – mis en évidence par la répression des mobilisations d’avril-mai 2021.
28L’analyse du droit à la contestation et du débat croissant à ce sujet dans le pays peut alimenter une réflexion plus large au sujet de l’effet de la répression. Il existe encore peu de travaux, en Colombie, concernant l’impact de la répression sur les modes d’action des acteurs sociaux, malgré un champ d’analyse naissant relatif au travail émotionnel des acteurs sociaux face à la violence, qui montre que le recours à la violence est très rare et que l’usage de modes d’action pacifiques, face au risque élevé de répression ou de violence, est très largement majoritaire58. Il y a également peu de travaux sur la capacité des acteurs à faire évoluer la répression et adapter leur mode d’action, ou qui permettent de comprendre l’usage de modes d’action « disruptifs », tel le blocage de routes, pourtant réprimé sur le plan judiciaire. De tels travaux contribueraient à nourrir la réflexion sur les relations ambivalentes entre mobilisation et répression59.
Notes de bas de page
1Le débat sur la nature du régime est synthétisé par Gutiérrez qui relève que le principal enjeu est la façon dont la violence « anormalement élevée » s’avère compatible avec la démocratie en Colombie. Voir Gutiérrez Francisco, El orangután con sacoleva. Cien años de democracia y represión en Colombia (1910-2010), Bogotá, IEPRI-UN/Penguin Random House, 2014, p. 34 ; Grajales Jacobo, Gobernar en medio de la violencia. Estado y paramilitarismo en Colombia, Bogotá, Ediciones Universidad del Rosario, 2017.
2L’accord de paix de La Havane (27 septembre 2016), rejeté au référendum du 2 octobre 2016 par 50,2 % des suffrages exprimés (avec 60 % d’abstention), est renégocié sous l’influence d’Á. Uribe. Le nouveau texte (dit Accord du théâtre Colón) entre en vigueur le 1er décembre 2016.
3Le texte comporte 5 thèmes : la réforme rurale intégrale ; la participation politique pour la guérilla démobilisée ; la fin du conflit et les mesures à mettre en œuvre sur ce plan (démobilisation, désarmement) ; la solution au problème des drogues illicites ; le statut des victimes et les réparations qui leur sont dues. L’évaluation internationale relève des retards surtout pour les points 1 (réforme rurale intégrale) et 4 (mise en place de politiques publiques pour éliminer les cultures illicites). L’accord est mis en œuvre sous le contrôle de la mission de vérification de l’ONU. Voir Indepaz, Informe de Masacres en Colombia durante el 2020, Bogotá, septembre 2020 ; Indepaz, « Conflictos armados focalizados », Punto de encuentro, Bogotá, no 74, décembre 2018.
4Les acteurs se sont mobilisés autour de thèmes communs comme la demande d’éducation gratuite, la lutte contre la corruption, la défense de l’accord de paix, mais aussi de thèmes économiques (refus de l’extractivisme minier, défense des ressources naturelles). Pour une synthèse, voir Fondation Idées pour la paix (FIP), ¿Dónde, cómo, quiénes, y por qué se movilizan los colombianos? Preparémonos para una protesta social amplia y menos violenta, Bogotá, 2017 ; Lalinde Sebastián (dir.), Elogio a la bulla. Protesta y democracia en Colombia, Bogotá, Dejusticia, coll. « Documentos », no 49, 2019.
5Robayo Alejandro, « “Que la paz no nos cueste la vida”. El trabajo emocional de los movimientos sociales frente a la guerra en Colombia », Aposta. Revista de Ciencias Sociales, no 74, 2017, p. 204-240.
6En 1948-1953, dans la période dite « La Violencia », les partis libéral et conservateur s’opposent, donnant lieu à un conflit civil après l’assassinat en 1948 de Jorge Eliecer Gaitán, issu du Parti libéral, et le retour au pouvoir des conservateurs (1946). Le pacte démocratique (1958) instaure la période du Front national (1958-1974), durant laquelle a lieu une alternance des partis libéral et conservateur tous les quatre ans à la présidence de la République. Mais l’émergence de diverses guérillas rompt cet équilibre en suscitant une contestation de la répartition du pouvoir entre les partis traditionnels et amenant la rupture de l’alternance automatique en 1974. Les gouvernements des années 1980-2000 poursuivent la lutte contre les guérillas avec des méthodes très répressives. Voir Gutiérrez Francisco, El orangután con sacoleva…, op. cit.
7Gómez-Suarez Andrei, « La coyuntura geopolítica genocida de la destrucción de la Unión Patriótica (1985-2010) », Estudios Políticos, no 43, 2013, p. 180-204.
8Archila Mauricio, Idas y venidas, vueltas y revueltas. Protestas sociales en Colombia, Bogotá, ICANH-CINEP, 2003.
9L’origine des paramilitaires se situe dans les années 1980 avec des groupes type « escadrons de la mort » réalisant du « nettoyage social » et participant à l’élimination d’opposants politiques au gouvernement. Les années 1990 voient l’émergence de « milices d’autodéfense » des propriétaires terriens contre la guérilla des Farc, qui séquestre certains d’entre eux. Voir Grajales Jacobo, Gobernar en medio de la violencia, op. cit.
10Ibid. ; Gutiérrez Francisco, El orangután con sacoleva…, op. cit.
11Jacobo Grajales montre les ambiguïtés de la loi Justice et paix (2005) qui instaure le démantèlement des structures paramilitaires, en fait très limité sur le plan militaire (faible remise des armes) et politique (les structures se recomposent localement sous diverses appellations). Voir Grajales Jacobo, Gobernar en medio de la violencia, op. cit.
12Un même groupe change de nom d’une région à l’autre ou en fonction de son activité, tel le Clan du Golfe, organisation impliquée dans le narcotrafic, qui est aussi une organisation paramilitaire appelée « Autodéfenses gaitanistes de Colombie (AGC) » lorsqu’elle agit en tant qu’acteur de la « lutte antisubversive ». Le groupe Aigles noirs (« Aguilas Negras ») est désigné comme une « franchise » que peuvent s’approprier divers acteurs locaux plus ou moins consolidés. Voir Indepaz, « Conflictos armados focalizados », art. cité.
13Ce terme officiel englobe divers types d’acteurs, des dissidents des Farc aux paramilitaires, brouillant les catégories. Voir ibid.
14Indepaz, « Conflictos armados focalizados », art. cité ; International Crisis Group (ICG), « Tranquilizar el pacífico tormentoso: violencia y gobernanza en la Costa de Colombia », Informe, no 76 (AL), 2019.
15Indepaz, Informe de Masacres en Colombia durante el 2020, op. cit.
16Gutiérrez Francisco, Marín Margarita, Machuca Diana, Parada Mónica et Rojas Howard, « Paz sin garantías: el asesinato de líderes de restitución y sustitución de cultivos de uso ilícito en Colombia », Estudios Socio-jurídicos, 22/2, 2020, p. 1-58.
17International Crisis Group (ICG), « Tranquilizar el pacífico tormentoso: violencia y gobernanza en la Costa de Colombia », art. cité ; CCJ-IEPRI-CINEP-UN et al., ¿Cuáles son los patrones? Asesinatos de líderes sociales en el post-acuerdo, Bogotá, 2018.
18Indepaz, Informe de Masacres en Colombia durante el 2020, op. cit.
19Alvarado Alejandro, « La criminalización de la protesta social : un estado de la cuestión », Revista Rupturas, no 10.1, 2020, p. 25-43.
20Ortega Pablo, Aproximación teórica al impacto del conflicto armado en la movilización social, Bogotá, Universidad Javeriana, Documentos de CERAC, no 20, 2013.
21CNMH-IEPRI-UN, Limpieza social, una violencia mal nombrada, Bogotá, 2016.
22Indepaz, Informe de Masacres en Colombia durante el 2020, op. cit.
23Fondation Idées pour la paix (FIP), ¿Dónde, cómo, quiénes, y por qué se movilizan los colombianos?…, op. cit.
24En 2019, selon diverses sources de presse, environ 800 000 personnes se seraient mobilisées le 21 novembre à Bogotá (sur 8 millions d’habitants), 80 000 à Medellín (sur 2,4 millions d’habitants). Voir Massal Julie, « Mobilisations sociales : le processus de paix au cœur des attentes », Newsletter de l’IFEA, no 16, 2020.
25Aguilar-Forero Nicolás, « Las cuatro co de la acción colectiva juvenil: el caso del paro nacional de Colombia (noviembre 2019-enero 2020) », Análisis Político, no 98, 2020, p. 26-43.
26Le 29 août 2019, plusieurs anciens chefs des Farc qui s’étaient démobilisés en 2016 et avaient négocié l’accord de paix reprennent les armes et créent le mouvement de la « Seconde Marquetalia », ainsi nommé en référence au lieu de naissance des Farc en 1964.
27Kroc Institute for International Peace Studies, Tres años después de la firma del Acuerdo Final de Colombia : hacia la transformación territorial, Bogotá, 2020.
28Fondation Idées pour la paix (FIP), Trayectorias y dinámicas de las disidencias de las Farc, Bogotá, 2018 ; Indepaz, « Conflictos armados focalizados », art. cité.
29Le scandale éclate le 6 novembre 2019, lorsque le sénateur R. Barreras accuse le ministre de la Défense (G. Botero) d’avoir dissimulé pendant deux mois la mort de jeunes adolescents durant ce bombardement « Barreras denuncia que en bombardeo murieron 7 niños que fueron reportados como bajas en combate », El País, 5 novembre 2019.
30Staff ¡Pacifista!, « “Quédate en casa o te matamos”, el “decreto” de grupos armados por el Covid-19 », ¡Pacifista!, 16 juillet 2020.
31« Si no salimos nos van a masacrar a todos… volveremos a las calles », Contagio Radio, 25 août 2020 ; Indepaz, Informe de Masacres en Colombia durante el 2020, op. cit.
32Zaffaron Raúl, « Derecho penal y protesta social », in Eduardo Bertoni (dir.), ¿Es legítima la criminalización de la protesta social? Derecho penal y libertad de expresión en América Latina, Buenos Aires, Universidad de Palermo, 2010, p. 1-15 ; Rabinovich Eleonora, « Protesta, derechos y libertad de expresión », in Eleonora Rabinovich, Ana Lucía Magrini et Omar Rincón (dir.), ‘Vamos a portarnos mal’. Protesta social y libertad de expresión en América Latina, Bogotá, Centro de Competencia en Comunicación para América Latina, Friedrich Ebert Stiftung, 2011, p. 17-30 ; Sierra Cadena Grenfieth de J., « La liberté de manifestation dans l’espace public latino-américain (II) : la dimension juridico-constitutionnelle comparée (Argentine, Colombie, Venezuela et Cour interaméricaine des droits de l’homme) », in Aurélie Duffy-Meunier et Thomas Perroud (dir.), La liberté de manifester et ses limites : perspective de droit comparé (publications extraites de colloque), Aix-Marseille, Aix-Marseille université/CNRS, 2016 ; Alvarado Alejandro, « La criminalización de la protesta social : un estado de la cuestión », art. cité.
33Vega Santiago, « Cinco razones para regular al Esmad », ¡Pacifista!, 18 décembre 2019.
34Colprensa, « Bogotá es la ciudad con más violaciones a derechos humanos en lo que va del 2020 », El País, 6 octobre 2020.
35« La Noche del 9S », Cuestión Pública, 13 septembre 2020.
36Staff ¡Pacifista!, « Editorial : El manzano podrido », ¡Pacifista!, 12 septembre 2020.
37Rudas Nicolás et Díaz Miller, « Una delgada línea nos separa del autoritarismo », Razón Pública, 14 septembre 2020.
38Vargas Emmanuel, « El derecho y el deber de protestar contra la violencia », ¡Pacifista!, 14 septembre 2020.
39« El inédito fallo de la Corte Suprema en Colombia que le ordena al gobierno garantizar la protesta pacífica y pedir perdón por excesos de la policía », BBC Monde, 23 septembre 2020.
40Article 37 : « Toda parte del pueblo puede reunirse y manifestarse pública y pacíficamente. Sólo la ley podrá establecer de manera expresa los casos en los cuales se podrá limitar el ejercicio de este derecho » (Constitución Política de la República de Colombia, 1991).
41Les projets de réforme pour garantir ce droit ont peu avancé depuis 2016, malgré l’adoption du Protocole de la protestation sociale (résolution 1190, 3 août 2018), qui est un « manuel » donnant quelques règles de conduite dans la façon de faire face aux manifestants.
42« Cinco preocupaciones sobre el decreto que reglamenta el uso de la fuerza pública en las manifestaciones sociales », Dejusticia, 14 janvier 2021.
43« Seis ‘cuellos de botella’ en la regulación de la protesta », Nuevo Siglo, 2 octobre 2020.
44Uprimny Rodrigo et Sánchez Duque Luz María, « Derecho penal y protesta social (caso Colombia) », in Eduardo Bertoni (dir.), ¿Es legítima la criminalización de la protesta social? Derecho penal y libertad de expresión en América Latina, Buenos Aires, Universidad de Palermo, 2010, p. 47-74, en particulier p. 51-54.
45Selon le dictionnaire de la Real Academia Española, la asonada se définit ainsi : « Réunion tumultueuse et violente pour obtenir une fin, généralement politique. »
46Uprimny Rodrigo et Sánchez Duque Luz María, « Derecho penal y protesta social (caso Colombia) », art. cité, p. 47-74.
47Le délit de soulèvement est inscrit dans le titre des délits contre la « sécurité et l’existence de l’État » du code pénal, et à ce titre considéré comme un délit politique. Voir ibid., p. 51-54.
48Lalinde Sebastián (dir.), Elogio a la bulla. Protesta y democracia en Colombia, op. cit., p. 39.
49Ibid., p. 47-48.
50L’acte législatif 02/2003 est connu comme le statut antiterroriste. La loi de 2013 s’en inspire, bien que l’acte ait été déclaré invalide en 2014 par la cour constitutionnelle.
51Lalinde Sebastián (dir.), Elogio a la bulla. Protesta y democracia en Colombia, op. cit., p. 66-69.
52Barrera Víctor et Hoyos Carlos, « ¿Violenta y desordenada? Análisis de los repertorios de la protesta social en Colombia », Análisis político, no 98, 2020, p. 167-190, en particulier p. 178-188.
53Les modes d’action violents (atteintes aux personnes ou à la propriété) sont associés aux demandes « matérielles » liées à la terre et au logement, et sont un peu plus « probables » parmi les « groupes ethniques, paysans, les travailleurs informels, les étudiants et les jeunes, et les victimes du conflit et démobilisés ». Ibid., p. 183.
54Cruz Edwin, « El derecho a la protesta social en Colombia », Pensamiento Jurídico, no 42, 2015, p. 47-69.
55Archila Mauricio, Idas y venidas, vueltas y revueltas…, op. cit.
56Lalinde Sebastián (dir.), Elogio a la bulla. Protesta y democracia en Colombia, op. cit.
57Doran Marie-Christine, « The hidden Face of Violence in Latin America: assessing the Criminalization of Protest in comparative Perspectives », Latin American Perspectives, vol. 44/5, no 16, 2017, p. 183-206 ; Alvarado Alejandro, « La criminalización de la protesta social : un estado de la cuestión », art. cité.
58Massal Julie, Cante Freddy et González David, « Introducción : dossier. Emociones, movilización social y política », Desafíos, 31/2, 2019, p. 9-23 ; Robayo Alejandro, « “Que la paz no nos cueste la vida”. El trabajo emocional de los movimientos sociales frente a la guerra en Colombia », art. cité.
59Combes Hélène et Fillieule Ollivier, « De la répression considérée dans ses rapports à l’activité protestataire. Modèles structuraux et interactions stratégiques », Revue française de science politique, vol. 61, 2011, p. 1047-1072 ; Codaccioni Vanessa, Répression. L’État face aux contestations politiques, Paris, Éditions Textuel, 2019.
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Alternances critiques et dominations ordinaires en Amérique latine
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