Un âge d’or politico-humanitaire ?
La diplomatie française et la crise des réfugiés vietnamiens, cambodgiens et laotiens entre 1975 et 1980
p. 113-128
Texte intégral
1Les migrations « indochinoises » – cambodgiennes, laotiennes et vietnamiennes – occupent une place singulière dans l’histoire contemporaine des migrations, comme dans l’histoire diplomatique française. Les trois pays de l’ex-Indochine française, qui n’avaient pourtant jamais été de grands pays d’émigration comme leur gigantesque voisin chinois, ont connu des vagues d’émigration inédites dans la deuxième moitié du xxe siècle. La colonisation française avait déjà suscité, dans la première moitié de ce siècle, des phénomènes migratoires importants, non seulement au sein de l’espace sud-est asiatique, voire de l’empire colonial1, mais aussi en direction de la métropole, devenue un véritable laboratoire de la politisation des élites2. Seules, toutefois, les guerres mondiales, puis les longues et tragiques guerres qui se sont déroulées dans la péninsule indochinoise entre 1945 et la fin des années 1980, provoquèrent des départs massifs et sans précédent, du fait de leurs graves conséquences humaines, économiques et sociales3. La Première Guerre mondiale fut à l’origine d’une première grande vague d’émigration organisée par la métropole : entre 1915 et 1919, plus de 90 000 hommes, majoritairement d’origine rurale, modeste et nord-vietnamienne, furent affectés à la logistique du front ou dans les usines de guerre4. La Seconde Guerre mondiale puis la guerre d’Indochine (1945-1954) suscitèrent une deuxième grande vague migratoire en métropole, bien que plus réduite : environ 35 000 hommes5, dont 20 000 travailleurs et 15 000 tirailleurs, dont certains participèrent à la libération du territoire français, y compris dans la Résistance6, suivis par un nombre à peu près équivalent de « rapatriés » d’Indochine pendant la guerre d’Indochine et dans la décennie qui l’a suivie7. L’immigration vietnamienne, cambodgienne et laotienne était encore marginale dans le paysage sociologique de la France à la fin de la guerre du Vietnam (1961-1975). Ainsi, d’après les premières statistiques de l’INSEE les concernant, Cambodgiens, Laotiens et Vietnamiens ne représentaient alors que 0,5 % des étrangers en 19758.
2Mais, en avril 1975, les chutes successives de Phnom Penh, tombée aux mains des Khmers rouges, et de Saigon, prise par les Vietnamiens communistes, puis l’aggravation des tensions intrarégionales jusqu’à l’explosion des combats entre le Vietnam, le Cambodge, et la Chine, inaugurèrent un troisième et tragique cycle de violences qui poussa cette fois-ci des centaines de milliers de Cambodgiens, Laotiens et Vietnamiens à quitter leur pays – un total estimé à trois millions par le HCR entre 1975 et 1995, dont 2,5 millions furent réinstallés dans un autre pays9. Peu après la victoire des Khmers rouges au Cambodge et des Vietnamiens communistes au Sud-Vietnam, au moins 200 000 d’entre eux s’enfuirent de leur pays, dont la moitié fut accueillie aux États-Unis. La France ne tarda pas à réagir, en coordonnant les efforts et les bonnes volontés au sommet de l’État et en exploitant toutes les ressources de la diplomatie, bilatérale, multilatérale et humanitaire. Par l’importance et la constance de son action, elle réussit même à produire un effet d’entraînement positif sur les États-Unis lorsque le président Carter décida d’admettre en 1978, après une relative interruption d’environ deux ans, 25 000 réfugiés supplémentaires avant le mois de juin 1978 en se prévalant justement du précédent français10.
Un effort précoce, prolongé et sans précédent de la France, relativement isolé en Europe
3Dès le mois de mai 1975, la France engagea au plus haut niveau une politique d’accueil volontariste, initialement fixée à un millier de réfugiés par mois. Le secrétaire d’État auprès du ministre de la Santé se vit confier par le président Giscard d’Estaing la responsabilité de coordonner l’ensemble des opérations d’assistance aux réfugiés, en liaison avec l’action des pouvoirs publics et les organisations non gouvernementales bénévoles impliquées dans l’installation des réfugiés en France. Des instructions très libérales furent d’emblée données au ministre de l’Intérieur pour que l’asile politique fût accordé au plus grand nombre, assorti toutefois à partir de décembre 1975 de certaines restrictions à l’encontre des intermédiaires douteux, reconnus coupables de juteux trafics à Bangkok ou Ho Chi Minh-Ville. La reconnaissance de la qualité de réfugié politique par l’Ofpra de ceux qui arrivaient par des « prélèvements dans les camps ou des visas réguliers » était automatique dans le cadre des opérations de réinstallation. En revanche, les clandestins arrivant par leurs propres moyens de Belgique, d’Allemagne fédérale ou d’autres pays asiatiques comme la Thaïlande ou la Chine, voyaient leurs demandes le plus souvent rejetées11. Le ministère du Travail, quant à lui, apporta dès 1975 une aide spécifique aux nouveaux arrivants pour faciliter leur insertion professionnelle. Quant au ministère de l’Éducation, il prit l’initiative d’allouer des bourses d’études dont les premiers bénéficiaires devaient être, sans surprise, les étudiants de l’ex-Indochine française12. Cet accueil contribua à désorganiser l’Ofpra. Bien que l’instruction fut réduite par le programme de réinstallation, l’office dut établir rapidement pour ces réfugiés l’état civil qui conditionnait les aides publiques. Ce travail était d’autant plus important que ces réfugiés venaient en famille et que figuraient parmi eux un certain nombre de mineurs non accompagnés qui étaient placés sous la protection de l’office, lequel était aussi sollicité pour faciliter les adoptions13. C’est sur la base de cette expérience des réfugiés du Sud-Est asiatique que fut mis en place le livret de famille du réfugié. Les cartes ou certificats de réfugiés que délivrait alors l’office étaient ensuite renouvelés tous les trois ans14.
4Au total, entre le 15 mai 1975 et le 1er avril 1979, 49 924 réfugiés – soit effectivement un millier environ par mois, en moyenne – ont été accueillis en France, majoritairement partis de Bangkok et du Vietnam, mais aussi de Singapour, Hong Kong, Kuala Lumpur et Manille, pour les réfugiés ayant quitté le Vietnam par bateau ou recueillis par des navires français15. Encore convient-il d’ajouter à ces quelque 50 000 « réfugiés16 », au sens des conventions de Genève, 11 744 Français ou Franco-Vietnamiens « rapatriés » de l’ex-Indochine française, entre décembre 1974 et avril 1975, ainsi que près d’un millier de métis eurasiens. Une troisième et dernière catégorie de 4 500 personnes rassemblait les étudiants, stagiaires ou diplomates qui avaient gagné la France, entre décembre 1974 et avril 1975, et qui, rejoints peu à peu par leurs familles, ont finalement choisi d’y rester vivre17.
5D’un point de vue sociologique, les diplomates français identifiaient alors deux phases migratoires : une première, dès 1975, composée des « privilégiés des régimes déchus, des personnes engagées dans la lutte anticommuniste, des commerçants aisés, craignant de subir des représailles ou de perdre leur situation avantageuse ». Les origines sociales s’élargirent ensuite, à partir de 1976, à toutes les catégories sociales, y compris les plus pauvres. Communes aux trois pays, les motivations au départ leur semblaient directement liées, non seulement au rejet des multiples obligations politiques imposées par les nouveaux régimes communistes (camps de rééducation, « bourrage de crâne » politique quotidien, transferts de populations dans les nouvelles zones économiques…), mais aussi et peut-être surtout à la dégradation de leurs conditions économiques et alimentaires (famine au Cambodge, pénuries au Vietnam et au Laos18). À partir de 1979, des causes plus spécifiques pouvaient aussi expliquer ces départs : au Cambodge, la poursuite de la guerre civile, le chaos économique et social, la survivance de la menace des Khmers rouges et l’occupation militaire du pays par l’ennemi héréditaire vietnamien ; au Laos, la force des traditions d’indépendance et d’anticommunisme des Hmong, la présence militaire et civile vietnamienne, la crainte d’une incorporation dans l’armée à cause de la détérioration des relations entre le Vietnam et la Chine ; au Vietnam, les discriminations subies dès mars 1978 par les Hoa, cette minorité vietnamienne d’origine chinoise implantée de longue date et désormais considérée comme une « cinquième colonne » de Pékin – mais aussi, la crainte de devoir aller se battre au Cambodge ou au Laos pour les jeunes hommes.
6Dans ces années 1975-1979, pourtant marquée par les crises pétrolières, la dégradation du marché de l’emploi et le coup de frein à l’immigration de travail au profit de l’immigration familiale19, la diplomatie française pouvait s’honorer d’avoir joué un rôle précoce, et même incitateur pour d’autres pays. Elle justifiait sa généreuse politique par la tradition française de l’asile et les « liens » noués à travers l’histoire avec les populations de cette région.
Tableau 1. – Nombre de réfugiés « indochinois » accueillis en France entre le 15 mai 1975 et le 31 décembre 1979.
1975 | 1976 | 1977 | 1978 | 1979 | Total | |
Cambodgiens | 3 303 | 3 718 | 3 469 | 3 891 | 4 171 | 18 552 |
Laotiens | 2 708 | 5 715 | 6 030 | 5 235 | 4 442 | 24 130 |
Vietnamiens | 3 632 | 2 785 | 2 855 | 3 929 | 6 987 | 20 188 |
Total | 9 643 | 12 218 | 12 354 | 13 055 | 15 600 | 62 870 |
Tableau 2. – Nombre de réfugiés « indochinois » dans les pays d’accueil définitif, au 31 mars 1980.
Pays | Antérieurement au 31 décembre 1978 | Total général au 31 mars 1980 |
États-Unis | 59 808 | 213 382 |
France | 58 470 | 78 344 |
Canada | 10 337 | 47 039 |
Australie | 15 966 | 34 144 |
RFA | 2 382 | 13 025 |
Grande-Bretagne | 1 199 | 8 051 |
Suisse | 1 121 | 4 487 |
Belgique | 1 197 | 3 007 |
Pays-Bas | 328 | 2 736 |
7Au cours de la période 1975-1979, les efforts des partenaires européens de la France se révélèrent insignifiants – quelques milliers, tout au plus –, sauf si l’on prend en considération le fait qu’Hong Kong, encore britannique, accueillit à elle seule 15 000 réfugiés. Les États membres de la Communauté européenne se sont bornés à des échanges de vue mais n’ont pris aucune initiative concertée ou commune, en dépit des velléités du gouvernement britannique de faire adopter une position plus dure à l’égard des autorités vietnamiennes. Faute d’une approche européenne de cette question, la France a traité directement avec les autorités des pays d’exil, mais aussi avec le HCR dans les pays sud-est asiatiques d’accueil provisoire, eux-mêmes de plus en plus réticents à accorder l’asile, même à titre provisoire, aux dizaines de milliers de réfugiés qui y débarquaient. Leur afflux massif était perçu comme une menace de déstabilisation politique, sécuritaire, économique et sociale20. Frontalière avec le Cambodge et très attachée à sa neutralité dans le conflit entre Hanoi et Phnom Penh, la Thaïlande s’inquiétait de la disparition de l’État-tampon qu’avait jusqu’alors constitué le Cambodge, même sous la férule sanguinaire des Khmers rouges, et du risque élevé de déstabilisation, voire de subversion de sa frontière après le renversement du régime de Pol Pot et l’occupation du Cambodge par les forces armées vietnamiennes.
Tableau 3. – Nombre de réfugiés « indochinois » dans les pays d’accueil provisoire, en juin 1979.
Chine | 250 000 |
Thaïlande | 250 000 |
Malaisie | 76 000 |
Hong Kong | 60 000 |
Indonésie | 30 000 |
Philippines | 15 000 |
8La « nord-malisation » du Sud-Vietnam décidée par Hanoi puis surtout, l’aggravation des tensions entre le Vietnam, le Cambodge et la Chine en 1978, conduisirent les autorités vietnamiennes à prendre de nouvelles mesures discriminatoires à l’encontre des Hoa, les poussant à fuir massivement21. Hanoi tentait de profiter de la volonté des Occidentaux – États-Unis et France surtout – d’opérer les regroupements familiaux nécessaires pour expulser les catégories de population qui gênaient sa politique : Hoa et personnes jugées inassimilables par le régime communiste. De même, les Hmong anticommunistes en guerre avec les forces militaires laotiennes et vietnamiennes, commencèrent à fuir massivement. La France en avait déjà relogé 500 en Guyane, en 1977, pour y défricher et mettre en valeur des terres. Forte de cette expérience jugée positive, elle était prête à en accueillir plusieurs milliers d’autres, surtout que la diplomatie française, habituellement mesurée, n’hésitait plus à évoquer, à la suite des bombardements vietnamiens au napalm, un véritable « génocide22 ». Enfin, la fuite des Cambodgiens en proie aux violences et aux famines dans leur pays meurtri par le régime des Khmers rouges et désormais occupé par l’ennemi héréditaire vietnamien, s’accéléra rapidement. Convaincus que la responsabilité de l’accueil de ces populations réfugiées incombait avant tout aux pays industrialisés, les pays voisins, déjà récalcitrants, se crispèrent sur une attitude de rejet, jusqu’à refouler par milliers ces réfugiés, comme la Malaisie face à l’afflux d’embarcations précaires et surchargées, égarées en haute mer à la merci de nombreux pirates, ou la Thaïlande vis-à-vis de réfugiés cambodgiens toujours plus nombreux. De fait, une poignée de pays industrialisés dont la France, déjà engagés dans l’accueil, intensifièrent encore leurs efforts tout en s’efforçant de mobiliser d’autres soutiens internationaux.
Une fructueuse complémentarité entre diplomatie bilatérale et diplomatie multilatérale
9Pour atténuer les effets de cette tragédie et tout en gelant son aide économique entre 1978 et 1981, Paris s’efforça de maintenir un dialogue régulier avec les autorités vietnamiennes, malgré leur totale marginalisation par les Occidentaux et la plupart des pays asiatiques soucieux de sanctionner leur décision d’envahir et d’occuper le Cambodge. Mais, l’ampleur de la tragédie ne pouvait qu’être gérée à l’échelle internationale. Plusieurs conférences multilatérales furent organisées, à l’initiative de divers pays ou organisations internationales, au premier rang desquelles le HCR.
10Les 11 et 12 décembre 1978, à Genève, une trentaine de délégations gouvernementales réunies par le HCR avaient tenté d’apporter des solutions pour faciliter la gestion des réfugiés. La France s’était alors engagée à augmenter de 10 % pendant six mois le nombre de réfugiés admis sur son territoire, mieux que ses partenaires européens dont les engagements d’accueil oscillaient entre une centaine de réfugiés (Belgique) à un millier (Grande-Bretagne). L’afflux massif de réfugiés hoa à Hong Kong, à partir du mois de mars 1979 (5 000 Boat People en mars ; 18 700 en mai ; 60 000 en juin…) poussa le gouvernement britannique de Margaret Thatcher à solliciter la réunion d’une nouvelle conférence internationale de l’ONU pour internationaliser un problème qu’il ne souhaitait pas régler par lui-même. Convaincue de la nécessité de ne pas s’aliéner le Vietnam en le mettant en position d’accusé, la diplomatie française soutint l’initiative britannique mais se désolidarisa du caractère antivietnamien de la lettre adressée par le Premier ministre britannique à Kurt Waldheim, secrétaire général de l’ONU. Au demeurant, les autorités vietnamiennes étaient en pleine négociation avec le HCR d’un programme d’émigration « légale ».
11Les cinq membres fondateurs de l’Association des nations d’Asie du Sud-Est23 avaient, eux aussi, unanimement condamné l’intervention vietnamienne au Cambodge et l’installation d’un régime provietnamien, et stigmatisé la responsabilité première du gouvernement vietnamien dans le drame des réfugiés24. Malgré d’évidentes divergences sur la perception de la « menace vietnamienne » – entre une position très antivietnamienne en Thaïlande ou à Singapour et une attitude plus favorable à Hanoi mais nettement défavorable à la Chine en Indonésie, où le gouvernement craignait que les populations hoa créent une cinquième colonne, tous redoutaient les conséquences d’un afflux important de réfugiés sur leur territoire. À la différence de la Malaisie, caractérisée par un fragile équilibre ethnique (54,7 % de Malais, 34,2 % de Chinois, 9 % d’Indiens et 1 % de divers) et encore marquée par le souvenir des derniers affrontements ethniques sino-malais du printemps 1969, la Thaïlande, assouplit légèrement sa position. Après avoir refoulé environ 40 000 réfugiés en les abandonnant aux menaces de représailles et à leur terrible sort au Cambodge, la Croix-Rouge thaïlandaise organisa, avec le soutien de sa présidente – la reine Sirikit, personnellement très investie dans l’aide aux réfugiés cambodgiens25 – la prise en charge de deux camps qui abritaient, en juin 1979, une quarantaine de milliers de réfugiés au total, malgré les pressions de généraux inquiets des risques sécuritaires26.
12De même, la conférence réunie à l’initiative de l’Indonésie, en mai 1979, se borna-t-elle à faciliter la création d’un centre de transit pour 15 à 20 000 réfugiés, alors que leur nombre commençait à décupler. Réunissant 24 délégations, elle permit toutefois quelques avancées positives, malgré l’absence du HCR et l’apparition d’un clivage entre pays bailleurs de fonds (« Nous payons, recevez-les ! ») et pays d’accueil, qui tentaient de faire monter les enchères. Les bailleurs de fonds s’engagèrent finalement pour une enveloppe financière de 18,5 millions de dollars. Les États-Unis, qui avaient adopté un profil bas, le Japon, la Corée du Sud, mais aussi l’Australie et la Nouvelle-Zélande, optèrent pour un engagement inconditionnel ; plusieurs autres pays dont la Grande-Bretagne et la RFA, choisirent de conditionner leur engagement à une étude de faisabilité ; une dernière catégorie constituée par la France, la Belgique et l’Italie, refusa tout engagement. Paris se justifia, précisément, par l’importance de son effort en matière d’accueil des réfugiés, l’efficacité de ses propres filières d’évacuation, et la nécessité de répartir plus équitablement la charge de l’accueil d’un nombre exponentiel de réfugiés27.
13Son appel fut entendu. Le 18 juin 1979, les ministres des Affaires étrangères des Neuf de la CEE firent connaître leur intention d’intervenir auprès du haut-commissaire pour les réfugiés, du gouvernement vietnamien, et des pays de l’ASEAN, pour précipiter la réunion d’une conférence onusienne, trouver des solutions pratiques à la tragédie des réfugiés et mieux répartir les efforts entre les membres de la communauté internationale. L’Élysée apporta aussitôt son soutien à cette initiative. Face à ce qu’elle considérait désormais comme un dramatique « transfert de populations », elle soulignait qu’aucun pays ne pouvait rester insensible à la détresse d’un aussi grand nombre de réfugiés, et que jusqu’à présent, les États-Unis, la France et l’Australie avaient consenti les plus grands efforts pour résoudre un problème qui se posait non seulement à l’échelle régionale mais aussi et surtout à l’échelle mondiale28. L’initiative reçut un accueil tout aussi favorable des ministres des Affaires étrangères de l’ASEAN réunis à Bali, les 29 et 30 juin 1979. Leur communiqué pointait clairement les responsabilités vietnamiennes dans l’extension du conflit et l’ampleur de l’exode, tout particulièrement des « Cambodgiens immigrés illégalement en Thaïlande ». Il exprimait la fermeté de leur solidarité avec la Thaïlande, que les initiatives de l’armée vietnamienne en territoire cambodgien confrontaient à une « situation explosive » sur sa frontière avec le Cambodge, tout en soulignant leur droit à renvoyer au Vietnam et vers leurs pays d’origine les « immigrés illégaux » et « réfugiés » provisoirement établis dans les camps aséaniens29. Certes, la prévalence accordée aux aspects politiques, et au sacro-saint devoir de non-ingérence, sur le respect des droits de l’homme allait marquer durablement cette organisation. Mais, les rencontres bilatérales que les ministres des Affaires étrangères de l’ASEAN eurent peu après avec plusieurs de leurs homologues occidentaux permirent d’infléchir cette position très dure. Au titre de la présidence irlandaise de la CEE, Michael O’Kennedy, le ministre irlandais des Affaires étrangères appela les États de l’ASEAN à suspendre l’application des mesures affectant les réfugiés, au moins jusqu’à la conférence onusienne, comme Cyrus Vance, le secrétaire d’État américain30.
14Préparée du côté français par une mission d’information du secrétaire d’État aux Affaires étrangères, Olivier Stirn, à Bangkok, Kuala Lumpur, puis Hanoi, la conférence onusienne se tint finalement à Genève, les 20 et 21 juillet, exactement 25 ans après la conférence qui avait mis un terme à la première guerre d’Indochine et permis les premières migrations massives du Vietnam avant la partition provisoire du pays31. Après avoir rencontré le jour même de l’ouverture de la conférence ses homologues de l’ASEAN, et quelques ministres en exercice, René Servoise, ambassadeur de France en Indonésie (1977-1980), rapportait à Paris que l’exécutif de l’ASEAN n’avait su anticiper ni la crise ni ses conséquences : l’ampleur de la mainmise de l’appareil communiste vietnamien sur la péninsule indochinoise, la rapidité de la mobilisation générale et de la reconversion de l’économie vietnamienne en une économie de guerre en 1979, la relative impuissance de la tentative d’intimidation de la Chine, la force du développement de l’axe Moscou-Hanoi, et « leur propre incapacité de répondre efficacement aux appels de la Thaïlande, qui se trouve être le pays de l’ANSEA en première ligne ». Si le diplomate français jugeait exagérée leur perception de la menace que les réfugiés indochinois semblaient faire peser sur leur stabilité interne (« 50 000 réfugiés répartis sur 16 îles par rapport à une population de 142 millions d’habitants, c’est un pourcentage de 0,035 % de personnes aisément assimilables à condition de les disperser »…), il n’en concluait pas moins d’une façon plus pessimiste au risque d’implosion de l’ASEAN, en raison de l’aggravation des égoïsmes nationaux face au défi migratoire, et plus largement, aux bouleversements géopolitiques de la péninsule indochinoise32.
15Réunissant l’exécutif du HCR, les représentants des pays de premier asile et d’accueil définitif, et le Vietnam, la conférence onusienne permit néanmoins quelques avancées notables : la promesse de l’ouverture de nouveaux camps de transit aux Philippines et en Indonésie (en grande partie grâce à une aide financière japonaise importante), l’engagement pris par Hanoi d’assouplir sa position et de limiter les départs, l’engagement des représentants d’une trentaine de pays d’accueillir, au total, 260 000 réfugiés, dont 182 000 aux États-Unis, 90 000 au Canada, 14 000 en Australie, 13 000 en RFA, 10 000 en France (elle en accueillera finalement 10 500, pour l’essentiel des Boat People en provenance de Malaisie, Singapour et Jakarta), 5 000 en Argentine, 3 000 en Belgique, 3 000 en Norvège, 1 900 aux Pays-Bas et 1 700 en Italie – les principaux pays d’accueil33. Quelques mois plus tard, on pouvait mesurer pour la première fois une légère décroissance des effectifs de réfugiés dans les camps, passant de 352 000 en août à 342 000 en septembre, liée essentiellement à la diminution des départs clandestins par bateau (Boat People), contrairement aux land people34.
16Une nouvelle conférence eut lieu à New York, cette fois-ci à l’initiative de la France et en présence du ministre français des Affaires étrangères, pour accroître la participation financière des États membres. À la suite d’une décision prise en conseil des ministres, le 10 octobre, le gouvernement français, en effet, avait pris lui-même l’initiative d’approcher le secrétaire général avec l’espoir de contribuer à soulager la « détresse du peuple cambodgien », victime depuis le début des années 1970 et jusqu’à la récente occupation vietnamienne du pays, de longues et dures années de « privations » et de « sévices ». Le déficit budgétaire cambodgien, que l’aide internationale ne permettait pas de combler, lui semblait tenir au refus de Hanoi et des « autorités de Phnom Penh » de subordonner ses « ambitions politiques » aux « considérations humanitaires », en acceptant une distribution équitable des secours. Le directeur d’Asie Jean-François Noiville soupçonnait même Hanoi de vouloir conduire une « politique délibérée de dépopulation du Cambodge de manière à le rendre plus facilement colonisable35 ». La conférence, réunie le 5 novembre, permit d’obtenir 210 millions de dollars d’engagements dont deux des États-Unis (69 millions), de la CEE (43), du Japon (40), du Canada (15), de la RFA (11), de la Grande-Bretagne (7,5), de la Suède (6), de la France (5) et de l’Australie (4,5)36…
La mobilisation générale des acteurs publics, parapublics et associatifs au service d’une nouvelle « diplomatie humanitaire »
17Parallèlement à ses activités habituelles et de long terme, la diplomatie française a apporté son soutien à plusieurs initiatives humanitaires ponctuelles. Servie par une campagne médiatique intensive, une équipe de médecins (dont Bernard Kouchner) et d’intellectuels résolument anticommunistes (comme André Glucksmann) réussit à convaincre des personnalités de gauche comme de droite, au premier rang desquels Jean-Paul Sartre et Raymond Aron, d’apporter leur soutien à une opération de secours humanitaire pour quelque 2 500 réfugiés majoritairement d’origine chinoise refoulés sur leur vieux cargo Hai Hong par les autorités indonésiennes et malaisiennes, en novembre 1978, et abandonnées depuis lors à une mort certaine faute de médicaments37. Baptisée « Un bateau pour le Vietnam » – par allusion (ironique ?) à une initiative lancée par le PCF en novembre 1967 pour concrétiser l’envoi d’une aide matérielle aux Vietnamiens communistes sur des cargos de la marine marchande soviétique – , la campagne politico-médiatique permit d’affréter depuis Nouméa le navire hôpital Île de lumière, grâce à l’intervention du président Giscard d’Estaing que Bernard Kouchner avait rencontré à l’Élysée le 26 juin 1979, et de l’envoyer vers la petite île malaisienne de Poulo Bidong, au cœur de l’été 1979. L’Île de lumière put ainsi recueillir 894 naufragés en mer de Chine méridionale, dont 692 furent accueillis en France. Un moment méfiante, par crainte des répercussions de la médiatisation et du déroulement de cette opération présentée par Jean Lacouture comme « le drame de l’Exodus vietnamien38 », mais que Hanoi ne fut pas longue à dénoncer comme une « ingérence dans ses affaires intérieures », la diplomatie française avait finalement choisi de faciliter leur départ pour la France. Les navires français marchands de la zone recueillirent, quant à eux, 1 211 réfugiés jusqu’en 1980, dont 922 purent être admis en France39. Parmi eux, le porte-conteneurs Chevalier Paul, affrété par les Chargeurs Réunis en 197640, sauva 180 femmes et enfants en péril, le 3 juillet 197841. D’après le HCR, 67 000 Boat People furent ainsi secourus, 200 000 à 400 000 périrent en mer42.
18Démunis de tout, la plupart de la cinquantaine de milliers de réfugiés accueillis en France entre 1975 et 1979, furent pris en charge par la collectivité nationale pour des périodes pouvant aller jusqu’à six mois, renouvelables une fois, offrant la gratuité du logement et de la nourriture. 35 700 d’entre eux furent envoyés dans 122 centres d’hébergement ouverts dès le mois de mai 1975 (la moitié était encore en activité fin 1979) pour une dépense globale de 439 610 000 francs (compte non tenu des frais médicaux), entre le 15 mai 1975 et le 31 décembre 197843. En France, le ministère de la Santé chargé de la coordination travailla, dès 1975, en étroite collaboration avec six associations qui avaient déjà joué un rôle dans l’accueil des réfugiés chiliens : le Secours catholique, France terre d’asile (FTDA), la Croix-Rouge française, le service œcuménique d’entraide (Cimade44), le service social d’aide aux émigrants (SSAE) et le Centre juif d’aide sociale et de reconstruction (COJASOR). Certaines d’entre elles bénéficièrent de subventions exceptionnelles – en plus des dotations budgétaires ordinaires – des ministères français des Affaires étrangères ou de la Santé, ou encore du HCR, à l’instar du Fonds pour l’installation locale des asilés d’Indochine (FILAID) mis en place en décembre 1975 pour aider les familles sorties des centres d’hébergement provisoire, ayant trouvé un travail et un logement, à s’installer définitivement. Un protocole d’accord signé en mai 1975 assurait la répartition des tâches : l’accueil aux aéroports ainsi que le transport vers les centres de transit (Croix-Rouge), la responsabilité des centres de transit installés en région parisienne et des centres d’hébergement (FTDA), l’assistance aux personnes « en solution individuelle » (Secours catholique et SSAE), l’enseignement du français (CIMADE, dans les centres provisoires d’hébergement). Pour pallier le manque d’efficacité de cette organisation en réseau rapidement relevé par les différents acteurs, fut mis en place, à partir d’un noyau d’anciens militaires et diplomates d’Indochine, un Comité national d’entr’aide (CNE) franco-vietnamien, franco-cambodgien et franco-laotien, fondé et présidé par Jean Sainteny jusqu’à sa mort en février 1978. La présidence de l’ancien délégué général du gouvernement français en République démocratique du Vietnam, après les accords de Genève de 1954, puis ministre des Anciens Combattants du général de Gaulle, entre 1962 et 1966, ayant ensuite joué un rôle reconnu d’intermédiaire entre Américains et Vietnamiens, lui conférait un caractère presque officiel45, d’autant que Sainteny avait porte ouverte à l’Élysée. À plusieurs reprises, en effet, on le vit convaincre Valéry Giscard d’Estaing d’assouplir les dispositions d’accueil françaises, par exemple vis-à-vis des réfugiés des camps de Thaïlande en butte au durcissement de la politique de Bangkok à leur égard, pour lesquels il obtint que les Boat People fussent exclus du quota mensuel de mille départs de Bangkok et Saigon. De même, la présence dans ce comité subventionné pour l’essentiel par le secrétariat d’État à l’Action sociale de fonctionnaires mis à la disposition par les ministères de l’Intérieur, de l’Éducation nationale, de la Défense et des Anciens Combattants, en complément des bénévoles, crédibilisait son action. Constitué en association loi de 1901, le CNE joua un rôle d’intermédiaire privilégié entre les pouvoirs publics et les ONG pour faciliter l’insertion des réfugiés dans la vie économique et sociale, et sensibiliser l’opinion publique par des campagnes de presse ciblées sur les offres d’emploi et de logement, notamment dans la presse régionale. Tout en favorisant leur intégration, le CNE s’est aussi battu, sous l’égide de son président, pour favoriser le maintien de liens étroits avec leur langue et leur culture d’origine, tant celui-ci semblait indispensable à la préservation d’un équilibre psychologique durement éprouvé par les traumatismes des guerres, des violences de masse, du déracinement et de l’exil en terre étrangère.
19Ce rôle de facilitateur déjà expérimenté par Jean Sainteny pendant la guerre du Vietnam s’avéra d’autant plus nécessaire que les phénomènes de rejet de ces populations immigrées qui n’en avaient jusqu’alors jamais subis, commencèrent à faire leur apparition, début 1978, moins à cause de l’ampleur pourtant réelle des phénomènes de fraude que des problèmes criants et insolubles de logement (spécialement en région parisienne, où vivaient les noyaux de réfugiés les plus importants) et des concentrations excessives d’enfants dans certaines écoles primaires qui provoquèrent un certain malaise parmi les parents d’élèves et les municipalités46. L’enquête sociologique menée par Le Huu Khoa au tournant des années 1970-1980 allait confirmer l’ampleur des obstacles politiques, administratifs, linguistiques et culturels que Vietnamiens, Cambodgiens et Laotiens durent surmonter et qui contribuèrent à leur net déclassement professionnel et social : entre 1975 et 1979, 45 % des cadres étaient devenus travailleurs manuels. Pire, un « nombre non négligeable » de réfugiés, plutôt chômeurs et âgés, demandèrent leur retour au Vietnam auprès de l’Ambassade de la République socialiste du Vietnam47.
20L’afflux des réfugiés Hoa à partir de 1978 provoqua néanmoins, en France, un surcroit de mobilisation exceptionnel auprès d’une opinion déjà très mobilisée par cette tragédie. Les diplomates s’en félicitèrent. Dans un élan humanitaire d’une ampleur considérable, de nombreuses municipalités, organisations caritatives et associations intervinrent auprès des pouvoirs publics pour proposer d’accueillir les nouveaux réfugiés et lancer des collectes de médicaments. Cependant, bien des offres d’emploi proposées par des comités, associations, communes ou particuliers habitant des zones rurales ne purent trouver preneurs auprès de réfugiés majoritairement citadins, et plus enclins au regroupement ethnique, clanique ou familial. Parmi eux, en 1979, seuls 36 % étaient actifs (travailleurs manuels et employés, en particulier) contre 64 % d’inactifs – étudiants, personnes âgées, enfants et adolescents parmi lesquels plusieurs centaines de mineurs isolés venus des camps de réfugiés cambodgiens en Thaïlande et placés en parrainage dans des familles françaises48. La diplomatie française était bien consciente de ces difficultés. Portée à privilégier, parmi les réfugiés toujours plus nombreux, les francophones et les plus modestes à l’égard desquels la France avait une « dette morale », au détriment des plus aisés qui, ayant rejeté la langue française, ne cherchaient le refuge d’un pays que pour poursuivre leurs lucratives activités économiques, elle tenta de freiner discrètement le flux des départs des réfugiés, à partir de 1978. Sans jamais prononcer le mot de contingentement, elle révisa nettement à la baisse le nombre de visas délivrés par les consulats français des pays de départ. À Bangkok, par exemple, celui-ci devait passer de 800 ou 900 par mois, en 1976-1977, à un peu plus de 500 au printemps 197849. Cette diminution allait encore s’accentuer après 1982.
21Considérée comme exceptionnelle, bien que très sélective, cette mobilisation générale avait, à l’évidence, été facilitée par une évolution profonde des mentalités. Devenues majoritairement anticommunistes, l’intelligentsia et la presse françaises avaient progressivement abandonné, dans les années 1970, les sympathies manifestées à l’égard du Vietnam communiste pendant la période de la guerre du Vietnam. Certes, le PCF était de plus en plus discrédité dans l’opinion qui le jugeait alors archaïque, mal géré et trop inféodé à l’URSS, notamment dans le conflit afghan50. Mais, les facteurs exogènes liés à la découverte des pratiques totalitaires des régimes communistes, parfois amalgamés jusqu’à la caricature, paraissent avoir été déterminants dans cette évolution. Si les années 1960 avaient signé la perte de l’innocence des États-Unis, engagés dans une guerre apparemment sans fin contre le communisme en Asie du Sud-Est, les années 1970 révélaient au contraire violemment la face sombre et les divisions des régimes communistes. Tour à tour, l’onde de choc de la publication de L’Archipel du Goulag, en 1973 par Alexandre Soljenitsyne, révélant l’enfer des camps de travaux forcés en URSS ; les atrocités commises par les Khmers rouges dans le Kampuchéa démocratique, que des observateurs pourtant autorisés avaient commencé à dénoncer dès 1975 dans la presse51 ; les choix collectivistes désastreux et les pratiques totalitaires et génocidaires des régimes communistes des trois pays (camps de « rééducation » vietnamiens assimilés aux Goulags soviétique, Boat People « indochinois », crimes de masses et génocide perpétré par les Khmers rouges au Kampuchéa démocratique) ; enfin l’effondrement du mythe de la solidarité communiste dans les ruines de la troisième guerre d’Indochine à partir de 1979, achevèrent de soulever une vague de désillusion qui ébranla jusqu’aux intellectuels de gauche autrefois les plus engagés dans le mouvement de soutien aux révolutionnaires vietnamiens, cambodgiens et laotiens52…
22Désormais, par l’un de ces retournements de l’histoire inattendus, la « transformation du monde » passait par l’accueil et la solidarité avec les réfugiés fuyant le communisme sud-est asiatique, comme l’écrivait le 3 juillet 1979 dans La Croix Menotti Bottazzi, le secrétaire général du comité catholique Faim-Développement, quand bien même ils n’étaient pas francophones (Pierre Luc Seguillon dans Témoignage chrétien, le 2 juillet 1979).
23La gauche ainsi ébranlée, et largement vacante, la droite allait s’arroger tout naturellement le monopole du cœur53…
Conclusion
24À l’aube des années 1980, le drame des réfugiés du Sud-Est asiatique était loin d’être terminé. La France, bien que de manière plus réduite, allait poursuivre sa généreuse politique d’accueil. Au total, près de 130 000 ressortissants de l’ancienne Indochine émigrèrent légalement sur le territoire français54. Après une période de distanciation marquée vis-vis du Vietnam socialiste, la diplomatie française allait intensifier ses contacts avec tous les acteurs directs et indirects de la « troisième guerre d’Indochine », non seulement pour soulager le drame vécu par des millions de réfugiés, mais aussi désormais pour tenter de peser en faveur d’un règlement du conflit, jusqu’à la nouvelle conférence de Paris réunie en 1991 pour reconstruire la paix au Cambodge55.
25La deuxième moitié des années 1970 a sanctionné un indéniable succès de la diplomatie française, très impliquée dans la prise en charge des réfugiés à différents niveaux. Mais le cercle vertueux fut nourri par une pluralité d’acteurs de l’État et de la société civile que l’on ne saurait oublier. Pareille entreprise collective trahissait une victoire sur soi-même, sur les nombreuses inquiétudes que pouvaient susciter, au sein d’un vieux pays et notamment parmi ses diplomates, la constitution d’une communauté étrangère potentiellement perçue comme une source potentielle de difficultés et de critiques, voire comme une menace de déstabilisation politique et sociale interne, comme dans les jeunes États membres de l’ASEAN en quête de consolidation de structures stato-nationales encore bien fragiles. Précisément, l’incapacité de la France à convaincre ses partenaires européens d’accueillir davantage de réfugiés semble avoir eu des répercussions négatives sur les pays de l’ASEAN qui, sensibles à l’effort de la France mais dépités par le manque de réactivité des autres pays « nantis » de la communauté internationale, renoncèrent parfois à ouvrir des camps de transit sur leur territoire, contribuant à aggraver les conséquences de la tragédie. Éternel cercle vicieux.
26Dans cette chaîne de responsabilités internationales, la contribution de la France, avec ses forces et ses limites, a crédibilisé l’idée que les dirigeants et une majorité d’intellectuels de l’époque, qu’ils fussent de droite ou de gauche, se faisaient alors de la vocation de la France et des traditions humanitaires protégées par la Constitution elle-même, celles d’une authentique terre d’asile. Nul doute que les efforts convergents de l’Élysée, du gouvernement, des collectivités territoriales et des ONG, permirent de sauver des centaines de vies, de réunir des milliers de familles, et de redonner espoir à des dizaines de milliers de déracinés. Non sans raison, la diplomatie française se félicitait que la France fût encore « l’une des ultimes terres d’asile dans un monde en convulsion ». Mais, si la diplomatie humanitaire mise en œuvre pour alléger le drame des réfugiés indochinois sert toujours aujourd’hui de référence historique obligée aux responsables du ministère français de l’Europe et des Affaires étrangères56, cet âge d’or de l’engagement politique, diplomatique, et sociétal, paraît aujourd’hui terriblement éloigné. Les dirigeants vietnamiens, en revanche, ont progressivement réalisé le bénéfice qu’ils pouvaient tirer d’un rapprochement pragmatique avec les Viet Kieu – Vietnamiens d’outre-mer – de France, des États-Unis, du Canada, d’Australie et de tous les pays d’accueil qui ont cru de leur devoir, quelles que fussent leurs motivations et arrière-pensées, de les accueillir aux heures les plus difficiles de l’histoire de leurs pays d’origine57.
Notes de bas de page
1Sur les migrations coloniales au sein et autour de l’espace indochinois : Guerassimoff Éric, Hardy Andrew, Nguyen Phuong Ngoc et Poisson Emmanuel (dir.), Les migrations impériales au Vietnam. Travail et colonisation dans l’Asie-Pacifique français, xixe-xxe siècles, Paris, Larose, 2020 ; Burtin Pauline, « De “Pondichéry” à l’Indochine française, réminiscences croisées. Exposer les récits de migrations intercoloniales françaises en Asie », Hommes et moigrations, vol. 4, no 1327, 2019, p. 182-186, [https://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/hommesmigrations/10458?lang=en], consulté le 24 juillet 2023 ; Legrandjacques Sara, « Interconnexions universitaires. Pour une approche transimpériale de l’enseignement supérieur en Asie coloniale, années 1850-1930 », Cahiers Sirice, no 20, 2018, p. 29-48.
2Journoud Pierre, « Paris 1917-1923 : l’entrée en politique du futur Ho Chi Minh, au prisme de la sûreté française », Guerres mondiales et conflits contemporains, vol. 273, no 1, 2019, p. 35-48 ; Brocheux Pierre, « Une histoire croisée : l’immigration politique indochinoise en France (1911-1945) », Hommes et migrations, no 1253, janvier-février 2005, p. 26-38, [https://www.persee.fr/issue/homig_1142-852x_2005_num_1253_1], consulté le 24 juillet 2023 ; Hémery Daniel, « Du patriotisme au marxisme : l’immigration vietnamienne en France de 1926 à 1939 », Le Mouvement social, no 90, 1975. Nettement moins traitée, la période de la guerre froide est le cadre de la thèse commencée par Ombeline Bois sous ma direction : L’engagement et les mobilisations des vietnamiens en France sous le prisme associatif (1954-1996).
3Journoud Pierre, « Les guerres, 1945-1991 », in Benoît de Tréglodé (dir.), Histoire du Viêt Nam de la colonisation à nos jours, Paris, Éditions de la Sorbonne, 2018, p. 49-71. Sur la dimension civile de la guerre : Guillemot François, Viêt-Nam, fractures d’une nation. Une histoire contemporaine de 1858 à nos jours, Paris, La Découverte, 2018. Et sur son cadre régional : Tertrais Hugues, Derrière la chute de Saigon, une nouvelle région. Approches françaises de la scène indochinoise 1972-1982, mémoire HDR, Paris, université Paris 1, 2007.
4Le Van Ho Mireille, Des Vietnamiens dans la Grande Guerre : 50 000 recrues dans les usines françaises, Paris, Vendémiaire, 2014 ; Eckert Henri, Les militaires indochinois au service de la France (1859-1939), Villeneuve-d’Asq, Presses universitaires du Septentrion, 1998.
5Daum Pierre, Immigrés de force, les travailleurs indochinois en France 1939-1952, Arles, Actes Sud, 2009 ; Luguern Liêm-Khê, « Ni civil ni militaire : le travailleur indochinois inconnu de la Seconde Guerre mondiale », Le Mouvement social, no 219-220, avril-septembre 2007, p. 185-199, [https://0-www-cairn-info.catalogue.libraries.london.ac.uk/revue-le-mouvement-social-2007-2-page-185.htm], consulté le 24 juillet 2023 ; thèse en cours à l’EHESS sur les travailleurs indochinois requis pour la Seconde Guerre mondiale ; Rives Maurice et Deroo Éric, Les Linh Tâp : les militaires indochinois au service de la France (1859-1960), Paris, Lavauzelle, 1999 ; Rives Maurice, « 1939-1954, les travailleurs indochinois en France », Hommes et migrations, no 1175, avril 1994, p. 24-29, [https://www.persee.fr/doc/homig_1142-852x_1994_num_1175_1_2192], consulté le 24 juillet 2023.
6La thèse en cours d’Alexandre Peyrony sous ma direction, consacrée aux tirailleurs indochinois dans la Seconde Guerre mondiale, devrait combler une lacune encore persistante de notre historiographie qui ne l’aborde que par touches impressionnistes dans les publications citées dans la note précédente.
7Voisin Alice, « Rapatrier les Français·e·s d’Indochine en métropole : La mise en place d’une politique d’intégration dans le contexte des migrations postcoloniales (1945-1962) », Les Carnets du LARHRA, no 1, 2019, [https://publications-prairial.fr/larhra/index.php?id=495], consulté le 24 juillet 2023 ; Denéchère Yves, « Les “rapatriements” en France des enfants eurasiens de l’ex-Indochine », Revue d’histoire de l’enfance « irrégulière », no 14, 2012, p. 123-141, [https://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/rhei/3398], consulté le 24 juillet 2024 ; Rolland Dominique, « De Saigon à Sainte-Livrade-sur-Lot, l’épopée des rapatriés d’Indochine, 1956-2009 », L’Autre : Cliniques, cultures et sociétés, vol. 11, no 1, 2010, p. 49-60 ; Petits Viêt-Nams. Histoires des camps de rapatriés français d’Indochine, Bordeaux, Elytis, 2009 ; Brée Fanny, Les migrations de la décolonisation : le cas des Français rapatriés d’Indochine 1946-1956, mémoire de master 2 sous la direction de Jean-Louis Lenhof, Caen, université de Caen Normandie, 2007.
8Luguern Liêm-Khê, « La représentation des immigrants », Hommes et migrations, no 1314, 2016, [http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/hommesmigrations/3694], consulté le 24 juillet 2023.
9Haut-commissariat aux réfugiés (HCR), The State of The World’s Refugees 2000: Fifty Years of Humanitarian Action, chap. iv « Flight from Indochina », p. 1, [https://www.unhcr.org/3ebf9bad0.html], consulté le 24 juillet 2023.
10Archives du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, La Courneuve (AMEAEC), série Asie-Océanie (AO), sous-série Généralités 1973-1980, dossier no 1887, note non signée ni datée (mais écrite probablement à l’été 1978) de la direction d’Asie sur les réfugiés indochinois.
11Archives Ofpra, DIR1/2, rapport d’activité pour l’année 1979, p. 11 et pour l’année 1981 p. 15-16.
12Ibid.
13Ibid., rapport d’activité pour l’année 1975.
14Ibid.
15Ibid., note de P. Enfoux sur les réfugiés d’Indochine, 19 avril 1979.
16Les statistiques de l’Ofpra recensent 44 047 réfugiés du Sud-Est asiatique protégés depuis 1976, sans compter les mineurs accompagnants (voir graphique 1).
17Ces données statistiques ne prennent pas en compte les clandestins venus de Belgique, d’Allemagne fédérale ou d’autres pays asiatiques comme la Thaïlande ou la Chine, ces derniers ne relevant pas de la catégorie de réfugiés politiques. Le Rapport d’activité de l’Ofpra pour l’année 1979 les évoque sans les comptabiliser (MEAE, archives de l’Ofpra).
18AMEAEC, AO, sous-série Généralités 1973-1980, dossier no 1887, note no 184/1S non signée sur les réfugiés d’Indochine, 27 juillet 1979. Sur la situation économique au Vietnam à cette période : Guillemot François, Viêt-Nam, fractures d’une nation, op. cit., chap. vi. Et pour une enquête sociologique confirmant l’importance du facteur économique dans les motivations au départ et contrastant avec les titres sensationnels des médias français sur les « fuyards du goulag » (Libération, 16 juin 1979) ou des « camps de concentration » (TF1, Journal de 20 h, 2 juin 1979) : Le Huu Khoa, Les Vietnamiens en France. Insertion et identité, Paris, L’Harmattan/CIEM, 1985.
19Insee, « Histoire des migrations et diversité des origines géographiques des immigrés », 30 mars 2023, [https://www.insee.fr/fr/statistiques/6793226?sommaire=6793391#documentation] (erreur en 2024).
20Ibid., échanges de télégrammes entre Paris, Bangkok, Manille et Jakarta, mars-mai 1979.
21Gédéon Laurent, Les Hoa au Vietnam, Lille, Presses universitaires du Septentrion, 2001.
22AMEAEC, AO, sous-série Généralités 1973-1980, dossier no 1887, note de Maurice Portiche pour le ministre sur les réfugiés d’Indochine, 26 juin 1979.
23L’ASEAN, selon le sigle anglais plus souvent utilisé que l’ANASE.
24Journoud Pierre (dir.), Un triangle stratégique à l’épreuve. La Chine, les États-Unis et l’Asie du Sud-Est depuis 1947, Montpellier, PULM, 2020. « Des reniements aux renaissances. L’ONU, l’ASEAN et les conflits interétatiques de la péninsule indochinoise entre 1979 et 1991 », in Pierre Journoud (dir.), Un triangle stratégique à l’épreuve…, op. cit.
25Cette contribution a été rappelée dans la presse lors du 88e anniversaire de la « reine mère » (veuve du roi Bhumibol Adulyadej et mère de l’actuel souverain, le roi Maha Vajiralongkorn – Rama X), célébrée le 12 août 2021.
26AMAEAC, AO, sous-série Généralités 1973-1980, dossier no 1887, note non signée sur les réfugiés d’Indochine, 13 juin 1979 ; note sur les réfugiés d’Indochine pour le ministre, de Maurice Portiche, chef adjoint du cabinet du ministre des Affaires étrangères au ministre, 26 juin 1979.
27Ibid., télégramme no 219/29 de René Servoise (Jakarta) à Paris, 18 mai 1979.
28Ibid., note no 185/AS de Jean Gory (direction d’Asie-Océanie) sur les réfugiés en Indochine, 21 juin 1979 ; communiqués en annexes.
29Ibid., extrait du communiqué publié à l’occasion de la 12e conférence des ministres des Affaires étrangères de l’ASEAN, Bali, 29-30 juin 1979.
30AMAEAC, AO, sous-série Généralités 1973-1980, dossier no 1887, télégramme no 571/80 au départ du 9 juillet 1979, signé Gory.
31En particulier celle des quelque 900 000 Vietnamiens dont environ 600 000 catholiques du Nord-Vietnam vers le Sud-Vietnam : Journoud Pierre, Dien Bien Phu. La fin d’un monde, Paris, Vendémiaire, 2019, p. 234-242.
32AMAEAC, AO, sous-série Généralités 1973-1980, dossier no 1887, télégramme à l’arrivée no 1011-1020 signé Servoise, 20 juillet 1979.
33Ibid., fiche non signée sur le problème des réfugiés du Sud-Est asiatique, 8 septembre 1979.
34Ibid., note no 290 de Jean-François Noiville sur projet de communication au conseil des ministres du 24 octobre 1979, 22 octobre 1979.
35Ibid.
36Ibid., note no 325/AS de Jean Gory sur les problèmes humanitaires en Asie du Sud-Est, 16 novembre 1979.
37Voir le témoignage de l’un des principaux intéressés : Kouchner Bernard, L’Île de lumière, Paris, Éditions Ramsay, 1980.
38Le Nouvel Observateur, 20 novembre 1978.
39AMAEAC, AO, sous-série Généralités 1973-1980, dossier no 1887, note de la direction des Français à l’étranger relative à l’accueil des réfugiés et personnes déplacées du Sud-Est asiatiques (1979), 16 janvier 1980.
40Pour un bilan synthétique de l’évolution de la marine marchande française dans le monde : Cassagnou Bernard, Les grandes mutations de la marine marchande française (1945-1995), vol. 1, Vincennes, Institut de la gestion publique et du développement économique/CHEFF, 2002, [https://0-books-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/igpde/1559], consulté le 24 juillet 2023.
41AMAEAC, AO, sous-série Généralités 1973-1980, dossier no 1887, note non signée ni datée (mais écrite probablement à l’été 1978) de la direction d’Asie sur les réfugiés indochinois.
42HCR, op. cit.
43Ibid., note non signée du 13 juin 1979 sur les réfugiés d’Indochine ; note no 70 de la direction d’Asie sur les réfugiés d’Indochine, 1er mars 1978.
44Sur l’action discrète et persévérante de la Cimade auprès des réfugiés indochinois : Tertrais Hugues, « La Cimade, l’Indochine et ses réfugiés (1969-1979) », in Dzovinar Kévonian, Geneviève Dreyfus-Armand, Marie-Claude Blanc-Chaléard et al. (dir.), La Cimade et l’accueil des réfugiés, Paris, Presses universitaires de Paris Nanterre, 2013, p. 173-181, [https://0-books-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/pupo/2565], consulté le 24 juillet 2023.
45Journoud Pierre, De Gaulle et le Vietnam (1945-1969), Paris, Tallandier, 2011, p. 263-277.
46AMAEAC, AO, sous-série Généralités 1973-1980, dossier no 1887, note non signée ni datée (mais écrite probablement à l’été 1978) de la direction d’Asie sur les réfugiés indochinois ; Lacroze Luc, Dix-sept ans au service des réfugiés d’Indochine (1975-1992), CNE, 1994 (préface du général G. Simon). Voir aussi les Papiers Sainteny déposés à la FNSP (série 6SA1, dossier 2).
47Le Huu Khoa, Les Vietnamiens en France, op. cit., p. 73. Sur la diversité des parcours de réfugiés, et de leurs représentations : Meslin Karine, Les Réfugiés du Mékong. Cambodgiens, Laotiens et Vietnamiens en France, Bordeaux, Éditions du Détour, 2020 ; Gayral-Taminh Martine, « Voyage au bout de la mer : les boat people en France », Hommes et migration, no 1285, 2010, [http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/hommesmigrations/1200], consulté le 24 juillet 2023 ; Daniel Valérie, L’identité narrative des jeunes Vietnamiens en France, thèse de doctorat de sociologie sous la direction de Michel Oriol et Trinh Van Thao, Nice, université de Nice Sophia-Antipolis, 1996.
48AMAEAC, AO, sous-série Généralités 1973-1980, dossier no 1887, note de la direction des Français à l’étranger relative à l’accueil des réfugiés et personnes déplacées du Sud-Est asiatiques (1979), 16 janvier 1980.
49Ibid., note non signée ni datée (mais écrite probablement à l’été 1978) de la direction d’Asie sur les réfugiés indochinois.
50Ranger Jean, « Le déclin du Parti communiste français », Revue française de science politique, no 1, 1986, p. 46-63.
51Dauzat Pierre-Emmanuel, « L’aveuglement des intellectuels face au génocide khmer rouge », L’Express, 10 janvier 2011, [https://www.lexpress.fr/culture/livre/l-aveuglement-des-intellectuels-face-au-genocide-khmer-rouge_1069522.html], consulté le 24 juillet 2023 ; Ponchaud François, Cambodge Année zéro, Paris, Juillard, 1977.
52Hourmant François, Le désenchantement des clercs : figures de l’intellectuel dans l’après-Mai 68, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2015 ; Journoud Pierre, « Laurent Schwartz et le Vietnam : la “perte de l’innocence” », in Antonin Durand, Laurent Mazliak et Rossana Tazzioli (dir.), Les mathématiciens et la guerre, Paris, CNRS Éditions, 2013, p. 81-94.
53Meslin Karine, « Accueil des boat people : une mobilisation politique atypique », Plein droit, vol. 3, no 70, 2006, p. 35-39, [https://0-www-cairn-info.catalogue.libraries.london.ac.uk/revue-plein-droit-2006-3-page-35.htm], consulté le 24 juillet 2023.
54Ibid., p. 47.
55Ghazarian Maxime, L’ouverture diplomatique de la République socialiste du Viet Nam (1989-1995) : l’aube d’une ère nouvelle dans les relations franco-vietnamiennes, mémoire de master 2 HIRISS sous la direction de P. Journoud, Montpellier, université Paul-Valéry Montpellier 3, 2021 ; L’Autorité provisoire des Nations unies au Cambodge : entre peace keeping d’envergure et inertie onusienne, mémoire de master 1, UPVM3, 2020.
56MEAE, « Stratégie humanitaire de la République française (2018-2022) », mars 2018, [https://www.diplomatie.gouv.fr/IMG/pdf/strategie_humanitaire_web_cle023719.pdf], consulté le 24 juillet 2023.
57Journoud Pierre, « Les relations ambivalentes entre l’État-parti vietnamien et les Vietnamiens de l’étranger », Hérodote, no 157, 2e trimestre 2015, p. 97-125.
Auteur
Université Paul-Valéry Montpellier 3.
Pierre Journoud, professeur d’histoire contemporaine et responsable des coopérations avec le Vietnam à l’université Paul-Valéry Montpellier 3, dirige le diplôme universitaire « Tremplin pour le Vietnam » [https://etu-ufr3.www.univ-montp3.fr/fr/du-et-pr%C3%A9pa-concours/du-tremplin-vers-le-vietnam]. Il est l’auteur de nombreuses publications sur l’histoire des relations franco-vietnamiennes, des conflits indochinois et des processus de paix, dont Dien Bien Phu. La fin d’un monde (Vendémiaire, 2019, avec la collaboration de Dao Thanh Huyen) ; De Gaulle et le Vietnam, 1945-1969. La réconciliation (Tallandier, 2012), traduit en vietnamien en 2019 et Paroles de Dien Bien Phu. Les survivants témoignent (Tallandier, 2004, réédité en 2012 et 2021, traduit en vietnamien en 2024, en collaboration avec Hugues Tertrais). Il a également dirigé plusieurs ouvrages collectifs sur l’histoire des relations internationales en Asie-Pacifique pendant et depuis la guerre froide, dont La mer de Chine méridionale au prisme du soft power. Nouvelles approches franco-vietnamiennes d’un vieux conflit maritime (L’Harmattan, 2022) ; Un triangle stratégique à l’épreuve. La Chine, les États-Unis et l’Asie du Sud-Est depuis 1947 (PULM, 2022).
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