L’activité des officialités aux xiiie et xive siècles au prisme des formulaires
Le cas de l’officialité épiscopale de Rouen
p. 225-238
Note de l’auteur
Cet article n’aurait pu voir le jour sans les échanges avec Charles Vulliez et Benoît Grévin (dans le cadre du séminaire de latin pragmatique de master et doctorat de l’université Paris 1). Je dédie cet article à Charles Vulliez qui nous a quittés en 2021.Texte intégral
1Dès leur apparition (fin xiie-début xiiie siècle), les officialités constituent un « laboratoire diplomatique » de premier plan1, dont les résultats sont repris par les administrations laïques dès le milieu du xiiie siècle : elles mettent en place, en effet, des procédures judiciaires, des modalités de transcription du droit, bénéficiant des premiers enseignements juridiques qui se développent depuis le milieu du xiie siècle en Europe. En leur sein se constituent des groupes de professionnels de l’écrit, clairement identifiés, héritiers d’usages de chancelleries plus anciennes mais également juristes de premier plan en matière d’innovation dans les pratiques d’écriture des actes. Ces connaissances et ces usages se diffusent ensuite à d’autres groupes de professionnels extérieurs au monde des officialités (à moins que ce phénomène ne s’accompagne d’un mouvement d’individus ?). Étudier les formulaires établis au sein des officialités au xiiie siècle renvoie donc à une réflexion plus globale sur le processus de standardisation des pratiques professionnelles de production écrite2.
2« Écrire à l’ombre des cathédrales », c’est aussi écrire auprès du tribunal épiscopal, dont l’importance au sein des institutions judiciaires de la société toute entière n’est plus à démontrer3. À partir de la fin du xiie siècle, se développe la délégation de compétence depuis l’évêque ou l’archidiacre à son official et, autour de lui, un groupe de plusieurs individus (chauffe-cire, notaire, etc.). Si les premières officialités sont attestées à partir de l’extrême fin du xiie siècle4, un certain laps de temps est nécessaire avant que cette délégation ne s’institue en tant qu’administration en soi5. Dès les années 1210-1230, cette organisation de justice déléguée se diffuse à une large échelle principalement dans le Nord-Ouest de l’Europe et elle constitue un modèle d’exercice de la justice à la pointe de la modernité. La production d’actes établis au nom de l’évêque ou de l’archevêque prend alors, de façon massive, la forme des actes d’officialité.
3Si l’institution des officialités est bien connue, la question de la production écrite « effective » au sein de ces institutions est encore complexe. Il faut en effet en premier lieu constater une quasi-absence d’archives issues de cette administration pour les premiers siècles de son fonctionnement : un seul registre de juridiction est conservé pour le xiiie siècle (diocèse de Mende, fin du siècle) et seuls des éléments isolés sont identifiés pour le xive siècle6. Les registres de la première moitié du xive siècle, pour le royaume de France, peuvent facilement s’énumérer : le registre de l’abbaye de Cerisy (1314-1346, puis 1370-1457) détruit lors de l’incendie des Archives départementales de la Manche pendant la Seconde Guerre Mondiale7 ; une série importante des registres des contrats et sentences des officialités du chapitre cathédral et du grand archidiaconé de Chartres à partir du milieu du xive siècle8. À partir des années 1370, les séries commencent à s’étoffer : registres d’amende et comptabilités (officialité du chapitre Saint-Julien-du-Sault, 1350-1366 ; officialité de Beauvais, 1382-1383) ; registres de sentences (officialité de Périgueux, 1369 ; officialité de Bordeaux, 1382 ; officialité de Paris, 1384-1397 ; officialité de Troyes, 1390-1396) ; registres de contrats (officialité de Bordeaux, 1377)9.
4Afin de combler cette lacune, les historiens des institutions ecclésiastiques se sont alors tournés vers les originaux produits par l’institution et conservés dans les chartriers des établissements religieux ou des institutions ecclésiastiques : c’est la méthode employée par Paul Fournier dans son travail sur la diplomatique des actes d’officialité10 et, plus récemment, par Olivier Guyotjeannin à propos des actes de l’officialité de Paris au xiiie siècle et Grégory Combalbert pour l’officialité de Rouen11. Mais d’autres sources donnent accès à l’activité des officialités, tels les formulaires d’actes : proposant des actes établis au nom de l’official d’une cour, ils donnent à voir une partie de l’activité d’écriture des officialités. Mais ces formulaires d’officialités, comme les formulaires en général, restent peu traités par la bibliographie12 ou, plutôt, apparaissent au croisement de plusieurs approches distinctes : diplomatique médiévale, études sur l’ars dictaminis, études d’histoire de la procédure judiciaire.
5Alain de Boüard, déjà, signalait l’importance des formulaires pour l’étude des institutions productrices d’actes13. La plupart des manuscrits cités par A. de Boüard n’ont pour le moment pas été étudiés, ou ponctuellement : je citerai par exemple des modèles de lettres établies par l’officialité archiépiscopale de Rouen (xiiie siècle), ou le formulaire de Guillaume de Paris, notaire de l’officialité de Paris14. Bien sûr, des formulaires d’actes privés ou de chancellerie existent dès le haut Moyen Âge15 mais le renouveau des études juridiques à partir du xiie siècle amène la production de nouveaux formulaires, à partir du foyer italien (artes notariae et artes dictaminis). Il faut souligner la porosité entre lettres au sens de correspondance et lettres au sens d’actes au Moyen Âge16 : l’apprentissage du dictamen entre en jeu dans la constitution d’une structure des actes au sens diplomatique, qu’ils soient issus de la production de chancelleries pontificale, royale ou ecclésiastique17 ou de simples « actes privés » du quotidien. Par ailleurs, la pratique judiciaire se formalise en parallèle dans les officialités du Nord-Ouest de l’Europe, notamment sous l’impulsion des canonistes anglo-normands18. Les formulaires d’officialité s’intègrent alors à la production d’ordines judiciarii19 mais il n’existe pas de corpus constitué de formulaires d’officialité associés à ces ordines20. Les recueils de cette typologie documentaire se comprennent à la fois comme des styles de la cour (explication du processus du jugement, définition des personnes pouvant être appelées comme témoin, comme greffier, etc.) et des formules de lettres suivant l’ordre même de ces procédures judiciaires.
6Si ces formulaires ont été étudiés, c’est dans une perspective d’histoire du droit ou d’histoire des institutions mais peu dans le cadre d’une histoire sociale des professionnels de l’écrit, qu’ils soient simples clercs ou notaires de l’official. C’est dans cette perspective que les pages qui suivent chercheront à définir les typologies d’actes produits par les officialités à partir de la fin du xiiie siècle. Peut-on observer une spécialisation de cette production écrite et, si oui, laquelle ? Si l’aspect quantitatif de cette production est bien sûr inaccessible, les formulaires donnent au moins des informations qualitatives qui permettent de répondre à ces questions. À travers ces documents, ce sera la place des officialités dans le rapport de la société médiévale aux actes de la pratique qui sera éclairée.
7Pour ce faire, le propos se composera de deux parties : en premier lieu, il s’agira de s’arrêter sur ce que l’on connaît des formulaires d’officialité pour la période du xiiie siècle et de la première moitié du xive siècle. La question terminologique devra être posée afin de comprendre la tradition de ces manuscrits. La seconde partie traitera particulièrement de formulaires et modèles d’actes établis au nom de l’officialité de Rouen et rédigés vers la deuxième moitié du xiiie siècle. Que nous permettent-ils de comprendre de l’activité de l’officialité de Rouen à cette période ? Peut-on observer des évolutions ?
Les formulaires d’officialité : un corpus encore mal connu
8Les corpus de formulaire d’officialité sont finalement peu traités par l’historiographie, une liste des manuscrits connus pour le Nord de la France manque encore. Deux explications à cela : d’une part l’explosion documentaire à partir du xiiie siècle et donc le nombre important de manuscrits ; d’autre part, leur grande dispersion dans les fonds. Les manuscrits signalés ci-après sont conservés non pas dans les fonds des officialités, dans la série G des archives départementales ou dans la série Z/1o des Archives nationales pour l’officialité de Paris, mais, pour beaucoup, dans des bibliothèques (tableau 1).
Tableau 1. – Liste des manuscrits conservant des formulaires ou des modèles d’actes établis par des officialités, xiiie-xive siècles.
Type de documents | Description du manuscrit | Date | Localisation de l’institution dont les actes émanent |
A., B., C. iudices | Formulaire procédural | 1200-1220 | Oxford |
Formules d’actes | Traité de poésie de Jean de Garlande | Vers 1230 | Paris |
Modèles d’actes d’officialité | Geoffroy de Trani, Summa super titulos Decretalium | Vers 1265 | Rouen |
Formulaire d’actes d’officialité | Guillaume de Paris | Vers 1280-1290 | Paris |
Usus curie ordinaris | Formulaire juridique | Fin du xiiie siècle | Région de Laon |
Formulaire d’actes ecclésiastiques (et annotations diverses) | Manuel de Jean de Bologne, notaire | Fin du xiiie siècle (v. 1290) | Cantorbéry |
Formulaire d’actes d’officialité | Manuel (modèles de deeds, de compte manorial) d’un auteur inconnu | Fin du xiiie siècle | Rouen/Angleterre |
Formulaire d’actes d’officialité | Manuel d’un auteur inconnu | Fin du xiiie siècle | Rouen |
Modèles d’actes | Geoffroy de Trani, Summa super titulos Decretalium | xiiie siècle | Chartres |
Modèles d’actes | Geoffroy de Trani, Summa super titulos Decretalium | Fin du xiiie siècle | Chartres |
Formules d’actes d’administration ecclésiastique | Manuel d’un auteur inconnu | xiiie siècle | Rouen |
Formulaire d’actes | Manuel d’un auteur inconnu | Fin du xive siècle | Bourges |
Les lignes en grisé indiquent les manuscrits perdus de nos jours.
9Une dizaine de manuscrits peuvent être identifiés à partir des catalogues de bibliothèques même s’il serait possible d’y ajouter d’autres manuscrits, étudiés par ailleurs21. Cette liste ne constitue qu’un premier recensement, qui devra être complété par d’autres enquêtes, plus larges. Ceux indiqués ici s’inscrivent dans l’espace du nord-ouest européen, même si cette répartition géographique n’est pas liée à une recherche spécifique : les espaces anglo-normands apparaissent particulièrement riches en termes de production de formulaires (on note ainsi quatre manuscrits pour la seule officialité de Rouen).
10Les manuscrits listés n’apportent pas tous le même type d’informations. Plusieurs ne contiennent en réalité que quelques modèles d’actes, qu’ils aient été copiés dans les interstices vierges du manuscrit ou qu’ils ne soient mentionnés que comme exemple d’un cas plus général. C’est le cas des occurrences les plus anciennes, telles les quelques formules d’actes que l’on trouve dans le traité de poésie de Jean de Garlande. Cet ouvrage est un traité de rythmique poétique22. Dans le chapitre vii, consacré à la construction des lettres (en général) avec également quelques passages sur les « lettres de contrats », Jean de Garlande propose quelques modèles d’actes dans un but d’exemple d’application de ses remarques sur la théorie du rythme : on y trouve une « carta » établie au nom de l’évêque de Paris, un « cyrographum » et deux actes établis au nom de l’officialité de l’évêque de Paris (« littere memoriales », « cytatio »). Il s’agit de l’un des plus anciens modèles d’actes conservés pour l’officialité de Paris, en l’état des recherches (l’œuvre de Jean de Garlande étant datable des années 1230).
11Les deux manuscrits de Chartres, ici en grisés, sont aujourd’hui perdus car ils étaient conservés dans les collections de la bibliothèque municipale de Chartres qui ont subi un incendie à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Il nous en reste seulement les descriptions qui en ont été établies dans le Catalogue Général des Manuscrits des bibliothèques publiques de France :
no 329 (ancien 367). « Summa super titulos Decretalium composita a magistro Gofrido de Trano, domini pape subdiacono et capellano. » Commence : « Glosarum diversitas… » – Finit : « malui repeti quam deesse ». Fol. 239 vo, on lit : « Hec via exequendi mandatum apostolicum a legato seu subdelegato super provisione alicujus vel aliqua ecclesias catedrali… » Fol. 240 vo, Formules d’actes d’officialité. xiiie-xive siècle. Manuscrit parchemin, 243 feuillets à 2 colonnes (provient du chapitre cathédral).
no 330 (ancien 368). « Bernardi Compostellani et Gaufridi de Trano opuscula. » Fol. 1 « Tituli Decretalium » ; fol. 8 « Bernardi Compostellani casus de jure canonico […] » ; fol. 112 « Summa Gauffridi de Trano super titulis Decretalium. Glosarum diversitas… – malui repeti quam deesse » ; fol. 252 « Alberti Galeotti Summula quaestionum » ; fol. 283-285 « Capitula decretorum » ; fol. 285 vo Formules d’actes d’officialité. Note au sujet d’« Henricus dictus Blondus, clericus Atrebatentis dyocesis », qui déclare, contrairement à l’accusation portée contre lui, ne pas avoir participé au meurtre d’« Adam de Mondricourt, clericus » (xiiie siècle) ; « xiiie siècle. Manuscrit parchemin, 286 feuillets à 2 colonnes (provient du chapitre cathédral) ».
12On retrouve également quelques modèles d’actes de l’officialité de Rouen à la fin d’un volume de la Somme de Geoffroy de Trani23. Cette somme sur les décrets pontificaux, très diffusée au xiiie siècle, semble être largement utilisée par des institutions ecclésiastiques diverses (ici le chapitre cathédral de Chartres, le manuscrit avec des actes de l’officialité de Rouen étant associé à une église normande), et les modèles ajoutés à la fin des volumes dans les pages laissées vierges laissent entendre un usage très fréquent, à la manière d’une référence, au sein des bureaux d’écriture de ces institutions.
13Les dépouillements font apparaître également le courant des premiers ordines judiciarii dans la seconde moitié du xiiie siècle. Le mouvement apparaît plus tardif que dans d’autres espaces européens mais l’augmentation est nette. C’est dans cette période qu’apparaissent en effet des manuscrits spécialement dédiés à la copie de modèles d’actes, qu’il s’agisse en réalité d’actes de la procédure judiciaire, dans l’ordre de la procédure ou de formulaires plus généraux, contenant des modèles d’actes de toute typologie, des sentences comme des actes de juridiction gracieuse. De ce point de vue, le formulaire de Guillaume de Paris, soi-disant notaire de l’officialité de Paris, apparaît particulièrement structuré24. Rédigé vers 1290, son existence effective au sein de l’officialité n’a pour le moment pas été confirmée par le dépouillement des chartriers parisiens. Le manuscrit présente en premier lieu un ordo judiciaire, utilisant de nombreuses summae (dont le Speculum judiciale de Guillaume Durant) puis un formulaire en tant que tel, d’abord sous la forme d’un ordo puis d’un formulaire mélangeant tous types de contrats. L’objectif de l’auteur de ce manuscrit est clair : participer à l’enseignement des notaires et des tabellions25. Cet objectif est partagé de façon plus ou moins explicite dans d’autres manuscrits, notamment dans le formulaire rédigé par Jean de Bologne, notaire à Cantorbéry26. Dans ce dernier, intitulé Summa notarie, nous retrouvons de nombreux actes, plus ou moins anonymés, et qualifiés par des titres en marge, rubriqués. Si la volonté de servir de modèle aux futurs notaires est clairement assumée, ce formulaire s’éloigne cependant des ordines judiciarii puisqu’il ne suit pas les actes selon la procédure judiciaire.
14À travers ces quelques exemples, le mouvement d’ensemble de la mise par écrit des savoirs des actes judiciaires des officialités apparaît plus complexe que la « simple » émergence d’un style à part. Il est clair que ce mouvement s’appuie sur des auteurs rattachés à des mouvements contemporains souvent étudiés séparément de la construction des officialités, comme les artes dictaminis. Ainsi, Charles Vulliez avait remarqué que deux modèles de lettres proposés par Jean de Garlande dans son traité sont des reprises soit du préambule soit d’une grande partie d’un acte présenté par Bernard de Meung dans son œuvre27. Maintenant que ce panorama a pu être posé, arrêtons-nous sur les formulaires de l’officialité de Rouen, se présentant à la fois sous forme de modèles isolés et sous forme de manuscrits complets.
Les formulaires de l’officialité de Rouen : quelle activité au sein des officialités ?
15Les formulaires de l’officialité de Rouen sont les plus nombreux parmi la liste des manuscrits relevés. Comme indiqué précédemment, ce résultat n’est pas lié à une recherche spécifique et apparaît plutôt comme la marque d’un mouvement de fixation des savoirs dans le monde anglo-normand.
16Ces trois recueils n’apportent pas le même genre d’informations et ne contiennent pas le même nombre de modèles (tableau 2)28.
Tableau 2. – Descriptif des manuscrits contenant des modèles d’actes de l’officialité de Rouen.
Cote | Nature du document | Description du manuscrit | Nombre de modèles | Date |
BnF, latin 18224 | Modèles d’actes d’officialité | Geoffroy de Trani, Summa super titulos Decretalium ; modèles d’actes au nom de l’official de Rouen | 7 | v. 1265 |
British Library, Royal MS. 8 A VI | Ordo judiciari | Manuel d’un auteur inconnu, suivi d’extraits de Barthélémy l’Anglais (Le livre des propriétés des choses), correspondance d’un étudiant parisien, mesure de terres (Angleterre) | 54 | Fin du xiiie siècle |
British Library, Add. Ms. 41201 | Modèles d’actes d’officialité | Formulaire de deeds et de comptes manoriaux ; procès devant l’officialité de Rouen (transcription puis extraits) | 5 | 1301 |
17L’ordo est daté, selon C. Haskins, de la fin du xiiie siècle. Il s’agit d’un manuscrit parchemin de petit format (12,5 × 20 cm environ). Le formulaire (qui porte le titre : « Formularius curie Rothomagensis ») est rédigé au sein d’un cahier aux informations diverses, mais l’ensemble est transcrit de la même main : un extrait du livre de Barthélémy l’Anglais (Livre des propriétés des choses) et un modèle de lettres de correspondance d’un étudiant parisien. Des caractéristiques paléographiques peuvent laisser envisager un scribe insulaire (« r » plongeant sous la ligne d’écriture, « s » finaux). Le manuscrit qui contient ce cahier a appartenu au fonds de l’abbaye Saint-Augustin de Cantorbéry : on peut se demander si ce formulaire n’a pas été produit en dehors de l’officialité de Rouen, peut-être en Angleterre dès son origine.
18Cette première hypothèse paraît confirmée par l’existence de modèles de lettres de procédure devant l’officialité de Rouen au début du xive siècle, modèles présents au verso d’un formulaire d’actes anglais, en forme de rouleau. Ce manuscrit (British Library, add. ms. 41201), édité en 193329, contient, au recto, 36 modèles de deeds (terme anglais qui désigne principalement des transactions) et un traité de comptabilité manoriale. Au verso, plusieurs actes et modèles d’actes (datés de 1301) ont été inscrits : il s’agit d’actes ayant trait à une procédure de non-paiement de dettes entre Robert de Montigny (de Monteniaco) et Thomas Naguet30 ; suivent un acte entre Jeanne veuve de Nicolas d’Auge et Eudes, bourgeois de Dieppe, à propos d’injures, et des modèles d’actes passés au nom de l’évêque de Chichester.
19Le troisième manuscrit (BnF, lat. 18224) contient, quant à lui, sept formules établies au nom de l’official de Rouen, à la suite de la Summa sur les décrétales de Geoffroy de Trani. Juriste et canoniste, originaire de Trani (Pouilles), il a suivi l’enseignement d’Azon (auteur de la célèbre Somme) avant de devenir professeur de droit à Naples puis à Bologne31. Sa Summa super titulis Decretalium (rédigée vers 1241-1245) est devenue un des ouvrages de référence dans l’étude du droit canonique et les manuscrits encore conservés de cette œuvre sont très nombreux. Rien de très original, donc, à ce que des formules de procédures devant une cour ecclésiastique se trouvent à la fin d’une telle Somme. Ici, le peu que nous puissions savoir du contexte de production nous laisse penser qu’il pourrait s’agir d’un manuscrit rédigé sur le continent (peut-être par une personne ayant à travailler au sein de l’officialité de Rouen ou au sein d’une institution ecclésiastique puisque d’autres actes copiés font référence à une église du diocèse de Rouen).
20Deux voies de circulation semblent se dégager de cette première analyse : une production extérieure à l’officialité et une autre peut-être plus interne. Cela nous oblige également à replacer ces formulaires non seulement dans une production de chancellerie, mais surtout dans la dynamique de production des actes du xiiie siècle.
21Ces recueils contiennent dans leur majorité des actes procéduraux entre les différentes juridictions de l’archevêché et non des actes de juridiction gracieuse comme les contrats32. À ce titre, leur analyse complète les études réalisées à partir des archives conservées dans les chartriers ecclésiastiques qui contiennent majoritairement des contrats ou des sentences33. Contrairement à d’autres ordines conservés, le « formulaire » ne s’appuie pas sur un texte théorique traitant de la procédure en elle-même. C’est au lecteur de comprendre que l’ordre des actes reflète l’ordre de la procédure. Certains actes présentent des qualificatifs : « Tercia monicio antiqua », « Modo autem de novo additur ista clausula », « Liberacio antiqua ecclesiasticarum personarum vel crucesignatorum super quibuscumque bonis » ; « Liberacio ecclesiasticarum personarum istius dyocesis tempore moderno si dubitaveri de periculo. » L’actualisation des formes des actes par rapport à l’évolution de la procédure est un point important de ce type de formulaire (on le retrouve également dans le formulaire de Guillaume de Paris, pour l’officialité de Paris) mais explique aussi leur faible conservation : en fonction de l’évolution de la procédure, ces textes se périment relativement rapidement.
22Il faut cependant souligner que le formulaire de l’officialité de Rouen présente plusieurs modèles d’actes gracieux (actes 39 à 47). Ceux-ci sont pris dans un ensemble assez complet d’actes établis soit à la suite d’un contentieux, soit en vue d’un contentieux éventuel (exécution des reconnaissances). Au regard d’un ordo, il semble que ce type d’actes soit un peu marginal34. Pour autant, la comparaison avec d’autres formulaires contemporains (Usus curie ordinaris de Laon, formulaire de Guillaume de Paris) montre une présence récurrente de ce type de documents parmi les actes présents dans les formulaires.
23Les actes procéduraux se présentent comme des échanges de lettres entre l’official et les doyens ou les curés de son diocèse, puisque, dans les différentes étapes de la procédure ecclésiastique, l’official fait appel à de nombreuses reprises aux curés ou aux doyens de son diocèse. Les modèles d’actes conservés à la suite de la Somme de Geffroy de Trani (BnF, lat. 18224) font également état de mandements ou de transmission d’informations entre l’official de Rouen et un doyen ou un prêtre, mais on trouve également des cas qui mettent en lien l’official avec d’autres officiaux ou avec l’administration royale. Ces documents permettent ainsi de reconsidérer le rôle de l’official dans l’administration de l’Église, au-delà de la rédaction des actes purement gracieux.
24Les actes en eux-mêmes sont particulièrement résumés dans tous ces cas :
« Citatio prima ~ Officialis Rothomagensis tali presbitero vel decano salutem. Citastis talem vel talem ad talem diem contra talem coram nobis.
De facto [hec ?] citatio secunda Officialis Rothomagensis tali presbitero vel decano salutem. Quia citastis talem ad talem diem contra talem coram nobis nec comparvit ipsum peremptorie, ad talem diem citetis eidem significantes quod ipsum excuminicabimus [sic] nisi comparuerit ea die quo facto35. »
25L’acte ici est réduit à sa structure la plus centrale, sans préambule, sans même annonce du sceau. Il s’agit, pour l’official de Rouen, de s’adresser au prêtre ou au doyen d’une paroisse afin qu’ils informent telle personne qu’elle est appelée à comparaître en jugement devant l’official, à tel jour. Cette citatio est la première étape de la procédure mise en place au début du xiiie siècle au sein des officialités, dans le cas où, lorsque le demandeur fait état de son opposition contre un tiers, les deux parties ne seraient pas présentes devant le juge36. Il doit être fait autant de citations que d’étapes dans le cadre de la tenue du procès.
26La comparaison avec d’autres formulaires contemporains montre que leur forme est déjà bien standardisée, au point que les abréviations sont particulièrement nombreuses pour ce modèle :
« Forma citationis vel erit […]
Officialis curie Parisiensis presbitero tali salutem in domino vobis mandamus quanto citatio talem ad talem diem coram nobis tali responsatori. Datum anno domino CC octogesimo nono die lune ante conversionem sancti Pauli quo incepi istum librum37. »
« Citatio.
Talis officialis tali presbitero salutem. Vobis mandamus quatinus R. citatis coram nobis, ad talem diem, ut coram nobis compareat tali responsurum38. »
27Dans les formulaires parisiens et laonnois, les actes (ici première citation d’une des parties dans le cadre d’un procès) sont également complètement anonymés et leur structure réduite à la plus simple expression. Dans le second exemple, celui issu de l’usus de l’officialité de Laon, le nom du diocèse est même complètement retiré. Les modèles utilisés dans le formulaire de Rouen ne sont donc pas de pures créations de la part de leur auteur : il s’agit de modèles qui circulent largement dans un grand espace nord-ouest européen.
28Si l’on poursuit l’analyse du formulaire de Rouen, le groupe de modèles de contrats permet d’étudier les modèles des actes aujourd’hui encore conservés, notamment la « recognitio ». Pour le formulaire de Rouen, sept des 54 formules désignent des contrats, qu’il s’agisse de « recognitio » ou d’« obligacio ». Nous retrouvons une proportion semblable dans l’usus curie de Laon (16 modèles pour un total de 55). Dans le cas du formulaire de Guillaume de Paris, pour Paris, sur 36 formules explicitées, 21 sont des actes de juridiction gracieuse mais le formulaire ne donne pas le texte de l’ensemble des mémoriaux produits par l’officialité. Là encore, il est possible de comparer plusieurs modèles de contrats, entre différentes juridictions :
« Recognicio antiqua et bona
Constitutus in jure coram nobis talis recongnovit [sic] se debere talem tantum ex causa tali quod promisit se redditurum ad talem terminum; voluit autem dictus talis et concessit quod non credatur solutioni nisi factus fuerit coram nobis in jure. Datum etc.39. »
« Recognitio
Omnibus presentes etc. Notum vobis facimus quod, in nostra presencia constitutus, R. recognovit se debere G. XII libras Parisiensium quas promisit se redditurum eidem, videlicet in hunc modum ad Natale Domini VI libras et ad Pascha totidem, volens et concedens quod si in aliqua solutione prenominata deficeret dictus R., nos ipsum ubicumque esset, possemus excommunicationis sententiam promulgare40. »
29Les « recognitio » décrivent, ici, une reconnaissance de paiement à terme d’une certaine somme, sans qu’un lien avec un objet ou un bien immeuble soit spécifié : le terme renvoie donc à un prêt simple41.
30Les deux modèles sont là encore très proches, même si le formulaire de Rouen est encore plus synthétique que celui de Laon : il remplace tous les éléments contextuels par « talis / talem », là où celui de Laon indique des dates de termes de paiement, un montant. Nous sommes donc loin des artes dictaminis ou notarie qui proposent des réflexions précises sur la forme des actes, sur des emprunts à tel ou tel auteur. Ici, si le modèle est directement utilisable, il faut bien admettre qu’il nécessite un minimum de connaissance de la forme finale attendue pour pouvoir produire un acte (notamment pour insérer la suscription, l’adresse ou encore l’annonce du sceau). En ce sens, le formulaire de Laon apparaît plus précis, puisqu’il ajoute la suscription (qui reste très générique pour les actes d’officialité) et l’adresse générale caractéristique des actes de juridiction gracieuse (« notum vobis facimus »). L’autre point d’attention est l’absence, dans ces formules, de clauses finales ou alors seulement dans une forme particulièrement réduite. Pourtant, la deuxième moitié du xiiie siècle voit l’apparition de ces clauses qui agrandissent très rapidement les actes produits par les officialités. L’objectif de ces formules doit donc se trouver en dehors du champ des indications juridiques précises.
31Un dernier élément reste à explorer dans le cas des formulaires de Rouen : à l’exception des modèles venant à la suite de la Somme de Geffroy de Trani, les deux autres recueils contenant soit un formulaire (British Library, Royal Ms. 8 A VI) soit des modèles précis (British Library, Add. Ms. 41201) ont été produits dans un contexte anglais. Dans le cas du formulaire, l’écriture laisse peu de place au doute, surtout qu’il s’agit de la même écriture sur l’ensemble du volume, y compris pour le chapitre qui suit directement le formulaire, concernant les mesures de superficie utilisées en Angleterre. De la même façon, même si les modèles du add. ms. 41201 sont davantage une copie d’actes un peu anonymée qu’un modèle à proprement parler, ils sont inscrits au verso d’un rouleau de modèles de deeds et de comptes manoriaux. Dans ces cas très précis, il est évident que ces ordines, formulaires et autres modèles circulent, non pas seulement au sein de l’institution ecclésiastique (officialité ou église paroissiale dans ses échanges avec l’official de l’évêque), mais aussi auprès d’autres institutions ou d’autres publics plus généralement. Ce mouvement de diffusion de modèles n’est donc pas uniquement à but de formation des individus qui travaillent au sein des institutions mais probablement aussi auprès de (certains) « utilisateurs » de ces mêmes administrations, afin de connaître, précisément, la nature des actes à produire dans le cadre de leur propre procès.
⁂
32En conclusion, ce premier corpus, que d’autres recherches augmenteraient sans aucun doute, interroge de nombreuses manières la production écrite au sein des officialités. Les formulaires recensés montrent des évolutions nettes, depuis les premiers temps liés à l’ars dictaminis, dans des réflexions générales sur l’écriture des lettres et des documents, vers des abrégés de procédure juridictionnelle. Entre temps, l’œuvre de réflexion juridique des canonistes, notamment des canonistes anglo-normands, s’est largement diffusée et la procédure judiciaire elle-même connaît des évolutions importantes, sans compter les relations avec les autres juridictions qui se développent dans le courant du xiiie siècle42. Par la suite, plus loin dans le xive siècle, la rédaction des formulaires et autres recueils de modèles se poursuit (sept ont pu être identifiés pour les années 1360-1500). Contrairement à ce que la documentation conservée laisse voir dans les chartriers, la production écrite au sein des officialités se maintient après le premier tiers du xive siècle, semble-t-il encore pour des actes de la vie courante comme des prêts, des ventes pour de faibles sommes43.
33La place des actes répartis entre contentieux/procéduraux et gracieux constitue un critère important dans l’étude de ces formulaires. Les ordines ont pour but de donner des modèles pour des actes nécessaires à la procédure ecclésiastique. Il apparaît cependant que la présence d’actes gracieux n’est pas si rare44, ce qui laisse deviner le poids de cette production écrite au sein de l’officialité. Ces recueils présentent en effet plusieurs écueils : si, d’un côté, ils permettent d’étudier un ensemble très large de documents produits effectivement par l’officialité dans le cadre de son fonctionnement quotidien, de l’autre ils ne permettent pas de se représenter la masse quantitative que cette production représente. Si chaque procès doit donner lieu à ces échanges de transmission d’informations entre l’official et les doyens ou les curés, il est aisé d’imaginer le nombre de documents produits pour chaque procès. La masse de la documentation de la juridiction gracieuse, aujourd’hui conservée, devrait alors être réévaluée en comparaison avec l’ensemble des pièces produites par l’officialité dans le cadre de son activité.
34Le cas de Rouen a valeur, ici, d’exemple-type : les modèles consignés dans ces « formulaires » (au sens le plus générique du terme) apparaissent particulièrement synthétiques, venant non pas forcément en appui de l’apprentissage de la procédure ou de la mise par écrit des actes. La différence est nette avec un ouvrage comme celui de Guillaume de Paris qui rattache ses modèles à des réflexions générales sur les notions de la procédure judiciaire, donne des modèles anciens mais toujours utilisés face à des nouveautés en lien avec les évolutions de la procédure. La question reste donc celle des hommes présents au sein de ces institutions : combien étaient-ils ? Où se formaient-ils ? La diffusion bien au-delà de la seule officialité de Rouen laisse supposer que le savoir juridique de ces formulaires (sur le fond et sur la forme) est peut-être plus partagé au sein de la société médiévale qu’auprès des seuls professionnels de l’écrit.
Annexe
Tableau des intitulés des formules de différents ordines
A. BL. Royal ms. 8 A VI, formulaire de la cour de l’officialité de Rouen45
1. Citatio prima ; 2. De facto X… citacio secunda ; 3. Excommunicacio ; 4. Aggravacio ; 5. Justicia excommunicat[i] ; 6. De eodem prima ; 7. De eodem ; 8. Monicio secunda ; 9. Tercia monicio antiqua ; 10. Modo autem de novo additur ista clausula ; 11. Item quarto moneatur addita ista clausula in principio litterarum post salutem ; (12) Citatio prima quando matrimonium allegatur et extraneum ducitur ; 13. Secunda citatio ; 14. Citacio quando a decano huius dyocesis appellatur apud nos ; 15. Citacio quando a decano huius dyocesis appellatur apud nos ; 16. Absolucio quando decanus eum ob appellacionem excommunicat’ ; 17. Absolucio ab excommunicacione quam fert quando pars adversa debet vocari ; 18. Aggravacio plurium vel unius in una causa ; 19. Citacio prima in causa appellacionis sive ab officiali sive a decano sive ab aliquocumque appellatur ad nos ; 20. Iste clausule apponende sunt quando dubitatur de sevicia eius a quo appellatur et de citacione ; 21. Secunda citacio in causa appellacionis ; 22. Excommunicacio in causa appellacionis ; 23. Prima liberacio bonorum ecclesiasticarum personarum dyocesis ; 24. Alia monicio quando iuniores domini regis capiunt bona ecclesiastica vel crucesignati utpote [?] animalia ; 25. Liberacio antiqua ecclesiasticarum personarum vel crucesignatorum super quibuscumque bonis ; 26. Liberacio ecclesiasticarum personarum istius dyocesis tempore moderno si dubitaveri de periculo ; 27. Antiqua liberacio ecclesiasticarum personarum ut supra ; 28. Ista clausula additur pro clerico ut supra ; 29. Liberacio extra dyocesim in provincia ; 30. Liberacio extra provinciam ; 31. Super eodem quando successive de loco ad locum transfertur in provincia Rothomagensi ; 32. Commissio modice cause in dyoseci [sic] Rothomagensi ; 33. Com[m]issio alia recta ; 34. Commissio de consensu parcium super recta ; 35. Quando aliqui ignoti imponunt manus violentas in clericum vocacio et excommunicacio ; 36. Alia quando certum est de personis delinquentibus antiqua ; 37. Commissio extra dyocesim in provincia Rothomagensi ; 38. Causa remissa appellacione frivola reputata ; 39. Recognicio debitorum sine ¢46 Discussione litis ; 40. Recognicio post altercaciones inter partes ; 41. Obbligacio47 alicuius rei immobilis pro debito non approbanda ; 42. Obbligacio approbanda pro debito ; 43. Obbligacio alicius rei immobilis pro debito non approbanda ; 44. Pignus obbligatum pro debito ad tempus ; 45. Recognicio antiqua et bona ; 46. Execucio istius recognicionis antiquitus ; 47. Alia execucio aliarum recognicionum modernarum ; 48. Secunda monicio post istam ; 49. Inhibicio quando opponit se pacifice possidere ; 50. Execucio simplex quando aliquis obligat se pro aliquo eum defendendo ; 51. Execucio quando per procuratorem recognitum est debitum ; 52. Secunda execucio ut supra ; 53. Alia quando aliquis recognoscit se procurasse aliqua bona et dicit ea capi in debito ; 54. Liberacio bonorum extra diocesis ex causa »
B. BnF. lat. 18224, modèles d’actes établis par l’official de Rouen48
1. Hec est forma de minus iuste quando proceditur contra episcopum ; 2. Eodem modo proceditur de forma huiusmodi contra […] officialem suffraganei quando officialis suffraganei procedit pro episcopo seu causa vel iure episcopi seu ecclesie ipsius episcopi contra aliquem, dum tamen sit ad nullius alterius instanciam ; 3. Sic debet mandare fieri limitatio cimiterii vel elemosine ecclesie a feodo laicali ; 4. Sic debet iusticiari presbiter suspensus et excommunicatus ; 5. Hec est forma appellationis a sententia diffinitiva lata a suffraganeo ad metropolitanum ; 6. Absolutio ad cautelam ; 7. Littera questoribus ab […] officiali concedenda.
C. BnF, lat. 13468, usus curie ordinaris, en usage à l’officialité de Laon49
1. Citatio ; 2. Expectationis ; 3. Excommunicacio pro defectu diei ; 4. Aggravacio sentencie ; 5. Alia ; 6. Tercia ; 7. Quarta ; 8. De eo qui mittitur in possessione causa rei servande ; 9. Littere absolucionis ; 10. Absolucio pro defectu diei ; 11. Dies ad deliberandum ; 12. Peticio super possessorio ; 13. Peticio super petitorio ; 14. Item peticio super petitorio ; 15. [Exceptio excommunicationis] ; 16. Exceptio excommunicationis ; 17. Probacio super ex-communicatum ; 18. Littere absolutionis ; 19. Citatio subretroacta ; 20. Ad proponendum omnes ; 21. Notula ad litem contestandam ; 22. Dies ad iurandum de calumpnia ; 23. Item de eodem ; 24. Item de eodem ; 25. [Item de eodem] ; 26. Secunda productio ; 27. Tertia productio ; 28. De citatione testium ; 29. Quarta productio cum juramento ; 30. Ad dicendum in testes et in dicta productione eorum ; 31. Ad dicendum secondo ; 32. Ad dicendum ultimo ; 33. Notula pro pace ; 34. Prima notula ad audiendum sententiam ; 35. Secunda ad audiendam sententiam precise ; 36. Probatio sententie super possessorio ; 37. Executio sentencie et admonicio ; 38. Alia monicio ; 39. De satisfactione solutionis ; 40. Testimonium super matrimonio ; 41. De festino matrimonio ; 42. Recognitio ; 43. Item, de matrimonio ; 44. Item de eodem ; 45. Karta vendicionis ; 46. Compromissum ; 47. Arbitrium ; 48. De feodi foro conservando ; 49. Delegatio ; 50. De quitacione matrimonii ; 51. De satisfactione competenti ; 52. De assentatione cuiusdam domus ; 53. De sententia excommunicacionis iniusta post appellationem lata ; 54. De debito ; 55. Procuratio.
Notes de bas de page
1Guyotjeannin Olivier, « L’officialité, laboratoire diplomatique ? Quelques réflexions à partir des actes de l’officialité épiscopale de Paris au xiiie siècle », in Véronique Beaulande-Barraud et Martine Charageat (dir.), Les officialités dans l’Europe médiévale et moderne, des tribunaux pour une société chrétienne, Turnhout, Brepols, 2014, p. 109-132.
2Pour un panorama large en ce qui concerne la standardisation des actes à l’échelle européenne, voir Bertrand Paul, « L’uniformisation de la culture écrite au xiiie siècle : les rouages de l’“européanisation” de l’Occident médiéval », in Histoire monde, jeux d’échelles et espaces connectés, XLVIIe congrès de la SHMESP, Paris, Éditions de la Sorbonne, 2017, p. 163-178.
3Fournier Paul, Les officialités au Moyen Âge : étude sur l’organisation, la compétence et la procédure des tribunaux ecclésiastiques ordinaires en France, de 1180 à 1328, Paris, Plon, 1880 ; Beaulande-Barraud V. et Charageat M. (dir.), Les officialités dans l’Europe médiévale, op. cit.
4Fournier P., Les officialités au Moyen Âge, op. cit., p. 309-313.
5C’est le cas de l’officialité de Beauvais (Guytojeannin Olivier, Episcopus et comes. Affirmation et déclin de la seigneurie épiscopale au nord du royaume de France [Beauvais-Noyon, xe-début xiiie siècle], Paris, École des chartes, 1998).
6Petit Joseph, Registre des causes civiles de l’officialité épiscopale de Paris, 1384-1387, Paris, Imprimerie nationale, 1919, particulièrement Introduction, p. x-xvi ; Donahue Charles Jr. (éd.), The Records of the Medieval Ecclesiastical Courts, Part I: The Continent, Berlin, Duncker & Humblot, 1989, particulièrement, p. 59-115 ; Hartmann Wilfried et Pennington Kenneth (éd.), The History of Courts and Procedure in Medieval Canon Law, Washington, The Catholic University of America Press, 2016, particulièrement p. 305-312.
7Dupont Gustave (éd.), « Le registre de l’officialité de l’abbaye de Cerisy, 1314-1457 », Mémoires de la Société des Antiquaires de Normandie, vol. XXX, 1880, 392 p.
8Merlet Lucien, « Registres des officialités de Chartres », Bibliothèque de l’École des chartes, 1856, t. XVII, p. 574-594. Les registres ont été utilisés par Claudine Billot dans sa thèse sur l’histoire de Chartres aux xive et xve siècles (Billot Claudine, Chartres à la fin du Moyen Âge, Paris, EHESS, 1987).
9Ces éléments ont été synthétisés à partir du premier dépouillement proposé par Joseph Petit dans le cadre de l’édition du plus ancien registre de sentences conservé pour l’officialité épiscopale de Paris (Petit J., Registre des causes civiles, op. cit., p. x-xvi) et des travaux de Charles Donahue (Donahue C. Jr. [éd.], The Records of the Medieval Ecclesiastical Courts, op. cit.).
10Fournier Paul, « Étude diplomatique sur les actes passés devant les officialités au xiiie siècle », Bibliothèque de l’École des chartes, 1879, t. XL, p. 296-331. Voir également Tessier Georges, « La diplomatique et l’histoire ecclésiastique », Revue d’Histoire de l’Église de France, t. XXV, no 106, 1939, p. 33-46.
11Guyotjeannin O., « L’officialité, laboratoire diplomatique ? », art. cité ; Id., « Premiers dévoilements ? Les mentions hors teneur dans les lettres d’officialité (Paris, xiiie siècle) », in Olivier Canteaut (dir.), Le discret langage du pouvoir, Les mentions de chancellerie du Moyen Âge au xviie siècle, Paris, École des chartes, 2019, p. 295-313 ; Combalbert Grégory, « Le premier siècle de l’officialité de Rouen (v. 1185-v. 1280) », in V. Beaulande-Barraud et M. Charageat (dir.), Les officialités dans l’Europe médiévale, op. cit., p. 35-63.
12Haskins Charles H., « Formulary of the officialité of Rouen », in Mélanges Paul Fournier, Paris, Sirey, 1929, p. 359-362, p. 359 : « Among the various formularies which have come down to us from the Middle Ages, comparatively little attention has been paid to the formularies of the jurisdiction exercised by the bishop’s official in France. »
13Boüard Alain de, Manuel de diplomatique française et pontificale, t. II. L’acte privé, Paris, Picard, 1949, sur les formulaires aux p. 150-158, ici p. 158 : « Il en allait de même dans les pays de droit coutumier, où les contrats furent généralement, au Moyen Âge, passés devant les juridictions, pourvues de bonne heure de formulaires pour leurs sentences et procédures. Il n’est pas rare de rencontrer des collections de modèles d’actes privés dans les fonds d’officialités, de tabellionages ou d’échevinages, ou dans les bibliothèques de manuscrits. »
14Ce dernier document a été étudié et en partie édité par Louis Tanon : Tanon Louis, Notice sur le formulaire de Guillaume de Paris, Paris, Imprimerie nationale, 1888.
15Autour des formulaires du haut Moyen Âge, Rio Alice, « Les formulaires et la pratique de l’écrit dans les actes de la vie quotidienne (vie-xe siècle) », Médiévales, no 56, 2009, p. 11-22.
16Sur l’ars dictaminis en général, voir les travaux de Charles Vulliez : Vulliez Charles, « L’ars dictaminis, survivances et déclin, dans la moitié nord de l’espace français dans le Moyen Âge tardif (milieu xiiie-milieu xve siècles) », Rhetorica, vol. XIX, no 2, 2001, p. 141-153.
17Fossier Arnaud, « L’exemple ou la norme ? De l’art d’administrer par formulaire (xiiie-xive siècles) », in Laurence Giavarini (dir.), Pouvoir des formes, écriture des normes, brièveté et normativité (Moyen Âge/Temps Modernes), Dijon, Éditions universitaires de Dijon, 2017, p. 21-40.
18Kuttner Stephan et Rathbone Eleanor, « Anglo-norman canonists of the Twelfth Century: An Introductory Study », Traditio, vol. VII, 1949-1951, p. 279-358.
19Voir, pour une première approche, Fowler-Magerl Linda, “Ordines iudiciarii” and “Libelli de ordine iudiciorum” from the middle of the Twelfth to the end of the Fifteenth, Turnhout, Brepols, 1994 ; Avril Joseph, « L’Usus Curie ordinaris (Paris, Bibl. nat., lat. 13468, fol. 131-132). Contribution à l’étude des officialités au xiiie siècle », in Studia Gratiana, XIX : Mélanges G. Fransen, t. I, 1976, p. 1-29 ; Vulliez Charles, « Un formulaire d’officialité orléanais inconnu du début du xiiie siècle », Bulletin de la Société Nationale des Antiquaires de France, 2006 (2001), p. 82-88.
20Linda Fowler-Magerl a établi un important recensement des ordines judiciarii mais les formulaires constituent un sous-groupe particulièrement restreint (Fowler-Magerl L., “Ordines iudiciarii” and “Libelli de ordine iudiciorum”, op. cit., p. 72 ; voir également : Fowler-Magerl L., Ordo iudiciorum vel ordo iudiciarius: Begriff und Literaturgattung, Francfort-sur-le-Main, Klostermann, 1984, particulièrement p. 157-159).
21Fowler-Magerl L., “Ordines iudiciarii” and “Libelli de ordine iudiciorum”, op. cit. ; Avril J., « L’Usus Curie ordinaris », art. cité.
22Garlande Jean de, The Parisiana Poetria of John Garland, éd. Traugott Lawler, New Haven/Londres, Yale University Press, 1974, particulièrement chapitre vii (p. 148-152). Les modèles présents dans ce chapitre du traité ont été publiés par Rockinger Ludwig, Briefsteller un Formelbücher des 11. Bis 14. Jahrhunderts, Munich, 1863-1864.
23BnF, latin 18224, Godefridus de Trano, Summa super titulis decretalium, parchemin, 284 feuillets (signalé par Haskins C. H., « Formulary of the officialité of Rouen », art. cité).
24Bibliothèque Mazarine, ms. 1319, parchemin, 167 feuillets. Ce manuscrit a été partiellement édité par Tanon Louis, « Notice sur le formulaire de Guillaume de Paris », Notices et extraits des manuscrits de la Bibliothèque nationale, etc., t. XXXII, 2e partie, Paris, 1888.
25Tanon Louis, « Notice sur le formulaire », art. cité, note 1, p. 3.
26BnF, nal. 428, formulaire d’actes ecclésiastiques, rédigé par Jean de Bologne, notaire, et dédié à Jean Peckham, archevêque de Cantorbéry, 1279-1292, parchemin, 55 feuillets. Il a été édité par Rockinger Ludwig, Briefsteller un Formelbücher, op. cit.
27Cette remarque de Charles Vulliez a été faite lors d’une séance de séminaire de latin pragmatique du Lamop mettant en parallèle les modèles présents dans l’œuvre de Jean de Garlande et les modèles utilisés par les notaires du chapitre cathédral Notre-Dame (Arch. nat., LL 386). Je voulais à nouveau remercier ce grand professeur pour toute son aide et sa gentillesse. Pour la référence au modèle de chirographe, voir l’un de ses derniers articles parus : Vulliez Charles, « Ars dictaminis “ligérienne” et chirographes », in Laurent Morelle et Chantal Senséby (dir.), Une mémoire partagée. Recherches sur les chirographes en milieu ecclésiastique (France et Lotharingie, xe-milieu xiiie siècle), Genève, Droz, 2019, p. 29-42.
28Le quatrième manuscrit identifié (Bibliothèque municipale de Rouen, ms. 533) concerne plus spécifiquement la chancellerie de l’évêque et non l’officialité (le chapitre a été identifié comme Ars epistolandi). Il conviendra cependant de le comparer avec les autres dans un second temps.
29Ratcliff Sidney Charles (éd.), Legal and manorial formularies, edited from originals at the British Museum and the Public Record Office. In memory of Julius Parnell Gilson [British Museum, Additional ms. 41201], Oxford University Press, 1933.
30Il s’agit peut-être de Thomas Naguet, bourgeois de Rouen et membre de la prestigieuse famille Naguet dont plusieurs membres furent maires de Rouen à la fin du xiiie siècle.
31Cet auteur est peu étudié dans l’historiographie française, même si ses œuvres apparaissent dans de multiples catalogues de bibliothèques médiévales. Les informations indiquées ici sont celles présentes dans la fiche réalisée par Biblissima ([https://data.biblissima.fr/entity/Q5320], dernière consultation le 13 avril 2022). Voir les travaux de Bertram Martin, notamment Kanonisten und ihre Texte (1234 bis Mitte 14. Jh), Leyde, Brill, 2013.
32Les titres des documents présents dans ces manuscrits se trouvent en annexe, à la fin de cet article.
33Roger Aubenas soulignait déjà cet aspect dans son édition de formulaires d’actes d’officialité de la fin du xive siècle : Aubenas Roger, Recueil de lettres des officialités de Marseille et d’Aix (xive-xve siècles), Paris, Picard, 1937, p. xxxi-xxxii.
34L’ordo étant destiné à la procédure judiciaire, il apparaît logique que des contrats ou autres conventions amiables n’y trouvent pas leur place.
35British Library, Royal MS. 8 A VI, fol. 1.
36Fournier P., Les officialités, op. cit., partie III : « De la procédure » (p. 128-178), titre premier « De la procédure civile », p. 129-152.
37Bibliothèque Mazarine, ms. 1319, fol. 18 vo.
38Avril J., « L’Usus Curie ordinaris », art. cité, p. 19.
39British Library, Royal Ms. 8 A VI, fol. 23 vo.
40Avril J., « L’Usus Curie ordinaris », art. cité, p. 25-26.
41Les juristes de la première moitié du xiiie siècle ont pu utiliser des formes très diverses de terminologie pour définir les contrats : certaines ventes apparaissent dans les formulaires comme des dons contre argent.
42Sur la question de la procédure, voir Fournier P., Les officialités, op. cit., partie III : « De la procédure ». Voir l’impact de l’assemblée de Vincennes de 1329 sur les évolutions des pratiques des officialités et des juridictions ecclésiastiques en général (Martin François-Olivier, L’assemblée de Vincennes de 1329 et ses conséquences. Étude sur les conflits entre la juridiction laïque et la juridiction ecclésiastique au xive siècle, Paris, Picard, 1909).
43Voir, par exemple, le formulaire du secrétariat de l’évêché de Sées de la fin du xve siècle qui fait état de contrat de vente de souliers (Arch. dép. Orne, 1G35, fol. 11).
44Plusieurs auteurs insistent sur cette présence de formules de contrats : Joseph Avril souligne la copie de seize actes de juridiction gracieuse pour qualifier « l’originalité » de l’Usus Curie de Laon (Avril J., « L’Usus Curie ordinaris », art. cité, p. 18). R. Aubenas précise également que l’importance des formulaires qu’il édite tient principalement dans le nombre d’actes de juridiction gracieuse qu’ils contiennent (Aubenas R., Recueil de lettres des officialités de Marseille et d’Aix, op. cit., p. xxxii). Mais si, à l’échelle de la « typologie » formulaire d’actes, cette présence est récurrente, la question de l’originalité se pose.
45Le formulaire n’a pas été édité par C. Haskins ; l’auteur a uniquement reporté les intitulés des actes, reproduits ici (Haskins C. H., « Formulary of the officialité of Rouen », art. cité, p. 360-361).
46Le symbole désigne ici le pied de mouche présent dans le manuscrit au sein du titre. Les pieds de mouches sont présents en marge et uniquement utilisés pour les modèles d’actes de type recognicio et obligatio.
47L’ensemble des mots dérivés de « obligacio » sont systématiquement transcrits par le scribe avec deux « b ».
48Haskins C. H., « Formulary of the officialité of Rouen », art. cité, p. 362.
49Avril J., « L’Usus Curie ordinaris », art. cité, p. 19-29.
Auteur
Archives nationales. Médiéviste.
Isabelle Bretthauer est chargée d’études documentaires aux Archives nationales. Médiéviste, ses recherches doctorales ont porté sur les systèmes de juridiction du nord-ouest du royaume de France dans les derniers siècles du Moyen Âge. Par la suite, elle a traité de la question de la constitution d’un savoir sur l’écrit, à travers le prisme des formulaires diffusés à partir du xiiie siècle.

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