De nouvelles figures de militants catholiques : les groupes du Renouveau charismatique dans l’Ouest de la France
p. 225-241
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Texte intégral
1Depuis plus d’un quart de siècle, on assiste en France à une multiplication des groupes et communautés charismatiques, avec une concentration remarquable dans l’Ouest. Il ne s’agit pas de militants au sens le plus traditionnel du terme mais bien de catholiques qui ont choisi la spiritualité et l’aide de l’Esprit pour les transformer et à travers eux transformer le monde dans lequel ils vivent aujourd’hui.
2Les formes de ce courant du Renouveau charismatique, de cette démarche nouvelle peu habituelle, sont tellement différentes qu’il est difficile de faire un diagnostic complet, de classer toute cette diversité de communautés. Chacune est active à sa manière, diffuse le message évangélique selon ses modalités de vie et d’engagement le plus souvent dans les structures ecclésiales connues des mouvements, de la paroisse, du diocèse mais aussi parfois dans la société plus globale où ses membres s’impliquent, investissant de l’énergie et du temps, parfois de façon étonnante.
Du renouveau charismatique
3Participant des nouvelles communautés de l’Église catholique en France, les charismatiques offrent de nouvelles formes de militantisme, moins centré sur des catégories sociales, plus ostensiblement orientés vers la réalisation de communautés réunissant ordonnés et laïcs, adultes et jeunes, familles et célibataires, ouvriers et cadres supérieurs. Les formes développées semblent en rupture avec les modèles de l’Action catholique.
Du militant d’Action catholique au militant charismatique
4Dans l’Église catholique de France d’aujourd’hui, les militants sont les pratiquants et fidèles qui au-delà de la stricte observance s’engagent à porter le message dans la société où ils vivent. On connaît l’expression « apostolat des laïcs » qui est récente et désigne bien ce phénomène associatif devenu l’un des vecteurs de la mission de l’Église actuelle et participe largement à porter au quotidien et à diffuser par l’exemple le message évangélique. On ne peut donc pas négliger cette grande richesse associative dont la hiérarchie ne se lasse de souligner l’utilité et les mérites et qui comprend des mouvements d’apostolat et des communautés.
5Les objectifs et les pédagogies de chaque mouvement sont très variés. « Chacun développe un aspect particulier de la mission de l’Église en fonction d’un groupe social, d’un aspect de la vie ou d’une tradition spirituelle » (Conférence des Évêques de France) : enfants, jeunes, éducation, formation, famille, solidarité, santé, culture, vie économique et professionnelle. Ces derniers (vie économique et professionnelle) sont connus sous le nom de mouvements d’Action catholique. Ils apparaissent souvent comme les plus militants et ont connu en France leurs heures de gloire à partir des années cinquante, au moment où, après la Seconde Guerre mondiale tout était à relever où la culture et la volonté des catholiques participait à cette reconstruction économique et sociale. Le militant d’Action catholique vit quotidiennement le message qu’il souhaite faire connaître et reconnaître dans sa classe sociale, sa tranche d’âge, son milieu de vie. La classique trilogie « voir, juger, agir » qui est devenue au fil des temps « regarder, discerner, transformer » reflète cette volonté d’imprégner les mentalités, aider les personnes, modifier les structures. Sa mission est à la fois collective (des équipes, un système hiérarchisé), dynamique et ouverte sur un monde en progrès, une définition à caractère universel.
6À l’autre extrémité de l’étendue des associations de fidèles se situent les communautés spirituelles dont la militance est fortement liée à la prière, au rassemblement, au partage, a fortiori à la pauvreté et à l’obéissance, quelquefois relevant de la vie monastique avec vœux. C’est là que se situent les communautés du Renouveau charismatiques. Elles naissent de la conjugaison de plusieurs effets : l’imprégnation latente de religiosité des catholiques ou protestants, issue du dernier siècle assortie, aujourd’hui, d’un réel besoin de vie plus spirituelle, les nouvelles façons de vivre où chacun doit retrouver son bien-être au sens « être bien » mais loin de l’égoïsme et de l’individualisme, au contraire puisque le troisième effet est la quête de l’altérité à travers l’expérience religieuse et enfin l’exigence d’une vérité à construire et enrichir par la formation plus qu’à simplement recevoir. Dans ce décor le groupe prend forme et devient le vecteur essentiel de développement du charisme. Ainsi, au-delà de toutes les considérations religieuses et ecclésiologiques, par leurs charismes, les membres de la communauté, refusant toute référence politique, se rapprochent, semble-t-il, de leurs contemporains et de leurs interrogations. En se changeant soi-même, c’est le monde qui est transformé. Peut-être est-ce là l’originalité du militantisme des charismatiques dans la société actuelle.
Les principales cimmunautés charismatiques en France par diocèse
7(Sources : Les Cahiers de feu et de lumière, décembre 2000, communauté des Béatitudes de Chalonnes-sur-Loire.)
8Entre les uns, les mouvements d’apostolat des laïcs, et les autres, les communautés du Renouveau charismatique, se mettent aujourd’hui en place, ici ou là, dans près d’un quart des diocèses de France, des cellules d’évangélisation selon le modèle de celles de Sanary (Italie) dont il est parfois difficile de comprendre la place entre la communauté paroissiale connue et les groupes de la mouvance charismatique. Elles réunissent les intuitions de l’Action catholique, évangéliser son milieu (leur oïkos) et celles du Renouveau avec la louange et la prière. Leur place est actuellement grandissante en France.
9Les réseaux charismatiques se sont largement étendus en France depuis une vingtaine d’années, d’un diocèse à l’autre, souvent par effet de proximité. Les diocèses et beaucoup de paroisses sont obligés de prendre en compte la présence de communautés charismatiques qui les interpellent. Aujourd’hui chaque diocèse a nommé un prêtre diocésain auprès des groupes de prière et des communautés charismatiques. L’Église catholique n’attendait pas les charismatiques mais elle les reconnaît. Ainsi, l’insertion de leurs engagements dans les diocèses est maintenant sans problème ou presque. À ce titre la carte de France a donc été faite par diocèse, non par département, et les effectifs représentés sont des estimations d’après diverses sources statistiques, soit par les évêchés, soit par certaines grandes communautés. Se dessinent ainsi en France de grands foyers charismatiques. Dans les grandes villes s’esquissent des points forts comme L’Emmanuel à Paris, et dans le Sud à Montpellier, Marseille, Toulouse, Bordeaux, on en connaît bien les manifestations dans l’espace public (squares, métro.), Le Chemin Neuf surtout à Lyon, Le Puits de Jacob à Strasbourg. Toute la région Ouest est marquée : L’Arche fondée par Jean Vanier et assimilée au Renouveau dans les Pays de la Loire, Les Béatitudes en Anjou et à Lisieux dans des terres plus pratiquantes, Réjouis-toi et Le Pain de Vie en Basse-Normandie, alors que la Bretagne profonde peut paraître moins accueillante. Il faut noter cette image renforcée de la France religieuse habituelle où une diagonale est/sud-ouest de Nancy à Bordeaux montre un certain désintérêt religieux, pas de ville importante, pas de grandes infrastructures, moindre peuplement, prépondérance des zones rurales, pratique religieuse traditionnellement faible.
L’Ouest pionnier
10Les premières manifestations du Renouveau charismatique en France datent de 1971 et sa diffusion commence par le Grand Ouest. Dès l’année suivante se dessinent deux grandes tendances : celle des groupes de prière et celle de la vie communautaire se divisant elle-même en communautés de vie et communautés d’alliance. La seconde tendance naît presque toujours des réseaux de groupes de prière, plus ou moins clandestins où chacun aspire à une vie spirituelle plus intense associée à une forte densité émotionnelle de la pratique. Dans les groupes de prières on insiste sur les potentialités intrinsèques de l’homme, sur ses richesses intérieures portées voire comblées par l’effusion de l’Esprit. Face à un catholicisme traditionnel qui prône par ses mouvements d’action catholique l’engagement, le volontarisme, l’action, le Renouveau charismatique insiste sur la rencontre personnelle avec Dieu, sur l’émotivité religieuse, accompagnées de pratiques corporelles par des gestuelles codifiées libérant le corps et par le langage en langues (glossolalie). L’arrivée des groupes charismatiques a bousculé quelques habitudes. Les communautés émanent tout naturellement des groupes de prière. Leur mise en place progressive se fait à partir de deux pôles géographiques, le Grand Ouest avec le Bec Hellouin et Beauvais d’une part et dans la région de Lyon à partir d’un réseau jésuite devenu Le Chemin neuf d’autre part. Aujourd’hui on dénombre six communautés importantes du Chemin neuf dans la seule agglomération de Lyon et quelques-unes dans les départements voisins.
Estimation des principales communautés charismatiques par diocèse en 2001
11(Sources : Les Cahiers de feu et de lumière, décembre 2000, communauté des Béatitudes de Chalonnes-sur-Loire.)
12Aux origines pour l’Ouest, se retrouve le père Regimbald, du Renouveau charismatique québécois en visite à Carhaix, chez des protestants. Une série de conférences aux publics de protestants et catholiques mêlés le mène à l’abbaye du Bec Hellouin où se forme le premier rassemblement catholique, qui sera ensuite défini comme le premier groupe de prière charismatique. Le mouvement de réveil protestant intéresse déjà nombre de courants spirituels en France : Dominicains, Jésuites et aussi Bénédictins du Bec Hellouin. Ces enseignements rejoignent les préoccupations des écoles d’oraison du père Caffarel, à Troussures près de Beauvais, qui intègrent les expériences et témoignages de jeunes français aux États-Unis. De ces rencontres, discussions émergent de nombreux groupes de prière et les premières communautés surgissent.
Les principales communautés charismatiques de l’Ouest de la France en 2000
13(Sources : Les Cahiers de feu et de lumière, décembre 2000, communauté des Béatitudes de Chalonnes-sur-Loire.)
14L’Ouest de la France constitue rapidement un pôle privilégié de développement des communautés charismatiques. Sans doute trouve-t-on là les espaces ruraux écartés et silencieux propices à la prière et un terrain de fidélité et de pratique religieuses accueillant pour ces nouvelles formes de réflexion spirituelle. La naissance de la communauté Réjouis-toi en sera le symbole. C’est en novembre 1972 que naît à Caen le premier groupe de prière charismatique du diocèse de Bayeux et de Lisieux. Il est composé de 7 personnes et un prêtre, souvent membres des écoles d’oraison. Quelques temps après il prend le nom de Magnificat et essaime dans le diocèse et au-delà dans les diocèses voisins avec l’idée de développer à la campagne ce qui se construit en ville. Des temps de formation intergroupes ont lieu à Caen de temps en temps. La proximité géographique joue un rôle important dans cette diffusion. Est-ce pour cette raison que la Communauté Réjouis-toi a été fondée par le Père Michel Santier, prêtre de la Manche, à Coutances avec cinq autres personnes le 5 novembre 1977 ? Elle a été reconnue seulement huit années après par l’évêque de Coutances. Depuis l’audience de cette communauté de vie s’est élargie : elle est maintenant présente dans 18 diocèses dont 10 de l’Ouest. Elle comprend 400 membres engagés et bien davantage, sans qu’on puisse les dénombrer avec précision, de membres sympathisants participant épisodiquement à ce réseau affinitaire. Cette communauté se présente comme la plus ouverte et sans doute moins exigeante que d’autres, elle est en pleine expansion d’autant que son rôle dans le diocèse est inscrit dans sa charte.
Principales communautés présentes dans l’Ouest
15L’inventaire dressé en 2002 des principales communautés charismatiques dans les régions de Normandie, Bretagne et Pays-de-la-Loire fait apparaître une quarantaine de groupes et d’implantations, mais cette valeur est sous estimée, car les repérages ne sont aisés que pour les principales communautés diffusées en France et se donnant à connaître. La distribution géographique témoigne de la forte dispersion des communautés dans les quatorze diocèses, avec cependant un regroupement remarquable dans le diocèse de Bayeux.
16L’effet régional joue pleinement avec la place exceptionnelle des deux grands mouvements apparus en Basse-Normandie et qui se sont d’abord diffusés dans les diocèses de l’Ouest. Les dix implantations de la communauté Réjouis-toi, qui constituent la moitié des groupes présents en France, correspondent à neuf diocèses. Les localisations concernent surtout des petites villes, comme Bayeux, Coutances, Argentan… mais aussi des grandes agglomérations comme Nantes ou les Ponts-de-Cé près d’Angers. Seules les communautés bretonnes se situent hors de l’ombre des villes. Pour la communauté du Pain de Vie, les groupes se répartissent aussi bien au cœur des agglomérations que dans les solitudes rurales. La moitié de leurs communautés françaises est présente dans l’Ouest avec une densité remarquable dans le diocèse d’origine de Bayeux.
17Mais les communautés d’origine bas-normande ne sauraient suffire pour répondre aux divers besoins de spiritualité et d’engagement des catholiques. L’Ouest a très largement accueilli des groupes des autres grandes communautés françaises. Le courant le plus largement représenté, présent dans tous les diocèses sauf Évreux, Sées et Le Mans, est constitué par l’Emmanuel, dont la spécificité est l’organisation en assemblées de prière. Elles disposent d’églises et de salles paroissiales pour leur réunion. Les localisations se trouvent strictement urbaines, comme si l’abondance des édifices permettait plus facilement des mises à disposition temporaires. Les localisations sont donc directement calquées sur le réseau de villes, de La Roche-sur-Yon à Rouen, de Brest à Caen. Dans l’agglomération de Nantes, deux bâtiments sont ouverts, dont une chapelle pour l’assemblée de prière des jeunes le mercredi soir. La tonalité est beaucoup plus rurale pour la communauté des Béatitudes très présente dans l’Ouest, avec un tiers de ses implantations françaises. Ce sont plus les petits bourgs, les chefs-lieux de canton que les écarts ruraux qui accueillent fréquemment les groupes dans des édifices religieux, monastères couvents ou abbaye, comme l’Abbaye blanche de Mortain dans la Manche. Cela n’exclut cependant pas totalement la proximité de la ville, selon les édifices disponibles, comme aux Essarts près de Rouen, aux Sables-d’Olonne ou encore à Lisieux1. Enfin, l’Arche constitue la troisième communauté d’origine extérieure bien implantée dans les Pays-de-la-Loire, en Ille-et-Vilaine et Seine-Maritime. Les six lieux de vie représentent le quart des sites français. Pour ces communautés, c’est l’éloignement de la ville, la recherche du rural profond qui semble la règle pour accueillir, aider et vivre avec des personnes gravement handicapées…
18L’inventaire ainsi dressé n’épuise pas toute la richesse et la diversité des communautés charismatiques de l’Ouest. D’autres groupes venus du reste de la France sont aussi présents comme des communautés locales émergentes. Une des difficultés du recensement vient moins de la visibilité des groupes que de leur évolution. Certains disparaissent ou migrent, d’autres naissent dans les diocèses. S’ils s’installent dans de vénérables bâtiments, souvent à l’écart, ce n’est pas pour se figer ou s’isoler. Les communautés sont bien vivantes.
Des militants pour de multiples communautés
19Il est difficile de rendre compte de toutes les activités déployées par les charismatiques tant les communautés sont nombreuses et leurs objectifs variés. Toutefois, à côté de la spiritualité personnelle et de son développement collectif, les membres des communautés donnent, plus ou moins durablement, du temps pour l’évangélisation, du temps et de l’énergie pour les autres.
Quelles formes de militance ?
20La plupart des grandes communautés charismatiques sont reconnues par l’Église sous différents statuts, le plus courant relevant des associations privées de fidèles, reconnues canoniquement dans les diocèses. De même, les courants les plus implantés sont identifiés comme participant à la mission de l’Église et comme relevant, dans leurs spécificités, du vaste champ de l’apostolat des laïcs. Depuis 1993, la Conférence des évêques de France procède à l’inventaire des communautés nouvelles dont celles du Renouveau charismatique. Et depuis 1994 l’Église distingue plusieurs formes de communautés résultant de leur organisation, mode de fonctionnement et secondairement de leurs activités. Si nous reprenons le classement officiel de 1994, réitéré par la suite, nous pouvons dégager les diverses formes de militance des communautés.
21Un premier ensemble pourrait être constitué par ce qu’il est convenu d’appeler des groupes de prière, c’est-à-dire des personnes se réunissant essentiellement autour de pratiques collectives de prière. La dimension active hors des réunions semble faible. Mais ce premier stade de mise en commun est à l’origine de la construction de formes plus structurées.
22Les communautés d’alliance rassemblent des personnes qui restent insérées dans la vie active et la société civile, y compris les personnes consacrées. Elles s’engagent pour une vie de prière, pour des formations, pour l’accompagnement spirituel et aussi pour des services aux autres à l’intérieur de l’Église comme dans le reste de la société. Elles sont marquées par une double militance, celle de l’évangélisation en tous milieux et celle de l’accueil ou de l’aide en direction de multiples catégories de populations. Une dizaine de communautés sont ainsi reconnues en France, avec des effectifs très variables. L’exemple de la plus importante en effectifs (entre 700 et 1 000 adultes), les Fondations pour un Monde Nouveau peut fournir l’illustration, en matière de mise en pratique des dimensions conséquentes de la foi. Outre l’évangélisation, la formation et l’animation, la communauté intervient sur le terrain des sociétés locales en suscitant ou créant des entreprises relevant de l’économie solidaire ou en facilitant leur montage par le jeu de garantie de prêts bancaires. Dirigée depuis la région parisienne, et forte d’une quarantaine de communautés en France, elle n’est représentée dans l’Ouest qu’à Angers, avec l’abbaye Saint-Nicolas.
23Les communautés de vie forment un troisième ensemble, riche aussi d’une dizaine d’appellations, rassemblant en un lieu et avec des règles de vie proches des monastères, des personnes de toutes catégories pour des formes de prière contemplatives. Elles peuvent parfois être classées selon la dichotomie weberienne sur le versant mystique des nouvelles formes communautaires2. La communauté des Béatitudes, la plus importante de la catégorie avec plus d’un millier de membres prononçant des vœux, développe de multiples activités de travail, prière, évangélisation, organisation de pèlerinages ou de rassemblements de jeunes, mais aussi l’accueil et le service des pauvres dans près d’une quarantaine de maisons en France.
24Une dernière catégorie regrouperait des formes mixtes, c’est-à-dire relevant des maisonnées avec diverses règles et des groupes se réunissant périodiquement pour la prière par exemple. Elle compte aussi, les communautés qui ne se reconnaissent pas dans les deux premières, comme l’Emmanuel. Le caractère innovant ou la multiplicité des activités ne permet pas toujours le classement et la catégorie est fort hétérogène. Pour l’Emmanuel, première communauté charismatique de France par les effectifs (peut-être 6 000 membres), la militance renvoie surtout à l’évangélisation, à la rencontre des autres en milieu urbain3, à la tenue de permanence (SOS Prière) et à l’animation des paroisses en diocèse. Au Chemin Neuf, la dimension d’intervention sociale s’ajoute plus fortement avec l’animation de diverses institutions (étudiantes ou médicales) ou la participation à de multiples formes de réinsertion des personnes en difficulté par le travail.
25Ces quelques éléments n’épuisent pas la diversité des activités et des formes de militance des groupes charismatiques, mais ils soulignent la constance du double versant des objectifs : évangélisation d’une part et action en direction des populations démunies ou défavorisées d’autre part.
Orants et militants
26Il reste difficile de connaître l’ensemble des personnes présentes dans les multiples variantes des groupes et communautés. Certains se donnent à voir, d’autres travaillent plus discrètement. Cependant, en quelques occasions, les membres du Renouveau charismatique se rassemblent et échangent, comme lors de la réunion nationale du Bourget de 1988, mobilisant plus de 15 000 personnes. À une échelle plus modeste, comme celle du diocèse, diverses réunions intermouvements se produisent de manière irrégulière sinon aléatoire, ou clairement définie comme une veillée de Pentecôte.
27Une enquête réalisée à Caen en 19984 a permis de définir les caractéristiques des membres des groupes charismatiques du diocèse de Bayeux-Lisieux, réunis pour une veillée de prière. Le questionnaire passé auprès de moins de 200 personnes présentes fournit quelques indications. Si la présence de membres du clergé est remarquable avec des prêtres en activité ou non, des religieux et religieuses avec un dixième de l’effectif, les laïcs constituent l’essentiel avec une large majorité féminine (81 %). Ce trait rappelle, en l’exacerbant, la composition des assemblées dominicales, mais il tient aussi en grande partie à l’occasion de la réunion, veillée de prière qui mobilise plus les personnes sans activité extérieure. L’importance des retraités, plus encore que des femmes au foyer, constitue une autre similitude avec la population des messalisants avec respectivement environ un tiers et un dixième des présents. Toutefois, la distribution par âge présente l’originalité d’une répartition relativement équilibrée : 28 % de moins de 40 ans, 31 % de 40 à 59 ans et 40 % de plus de 60 ans, clergé inclus. Cette prédominance des adultes est un trait habituel des populations de militants, avec la caractéristique d’avoir du temps à donner, que l’on soit étudiant, mère au foyer ou actif. Si les personnes en activité ne forment que la moitié de l’effectif total, leur profil socioprofessionnel, en ne tenant pas compte des membres du clergé, retrouve les distributions des fidèles urbains avec plus des trois quarts des actifs dans les catégories de cadres moyens et d’employés. Les ouvriers sont un peu mieux représentés que de coutume avec près d’un cinquième du total, et à l’opposé les catégories sociales plus aisées (cadres ou commerçants) ne pèsent guère (7 %).
28Dans le tableau de la militance caractérisée en général par des investissements à temps limité, les membres des groupes charismatiques semblent se distinguer par la durée. L’enquête montre qu’un tiers des membres participent depuis plus de 10 ans, et plus de la moitié depuis plus de 5 ans. Elle montre aussi l’importance du renouvellement avec un quart des présents suivant les activités des groupes depuis moins d’un an, sans compter les personnes sympathisantes ou curieuses venues à la veillée (un cinquième de l’ensemble).
Tant de communautés…
29La question des effectifs peut paraître triviale, car l’Esprit souffle partout et peut atteindre tout un chacun, sans que nécessairement l’effusion soit partagée et que se constitue un groupe ou une communauté. Il s’avère impossible de prendre en considération les personnes participant à des groupes de prière, régulièrement pour certains, très occasionnellement pour d’autres selon diverses temporalités de besoin de spiritualité. Il serait tout aussi aventureux de les localiser et d’apprécier leur poids d’un diocèse à l’autre. Cependant quelques estimations circulent5, et sont avancés des effectifs de 50 000 participants habituels et 300 000 occasionnels, pour des groupes réputés charismatiques. De son côté la Communauté des Béatitudes a recensé en 2000 plus de 260 communautés d’une trentaine de membres chacune. Il semble bien délicat de tenter des vérifications. Les effectifs sont très variables car ils ne sont soumis à aucune règle. On compterait 16 grandes communautés charismatiques. Mais, si effectivement, les groupes de prière du Renouveau charismatique se trouvent en liaison assez étroite avec les communautés connues, reconnues et recensées, il faut imaginer que leur prolifération est proportionnelle à l’implantation des assemblées et maisonnées.
30Une autre marge d’incertitude provient du repérage des communautés et de leur répartition en différentes catégories. Certaines sont classées comme relevant du Renouveau charismatique par l’Église, d’autres apparaissent comme nouvelles et sans rapport avec ce courant. Ce serait, par exemple, parmi bien d’autres la communauté de dimension paroissiale développée à Saint-Michel-de-Tordouet dans le diocèse de Bayeux-Lisieux et reconnue canoniquement en 1990. Les Béatitudes en indiquent 62 différentes6. C’est certainement bien en deçà de la réalité. Leur prolifération est sans fin. Enfin, la communauté de l’Arche ne semble relever pour l’institution ni des communautés nouvelles, sans doute un effet de durée car apparue trop tôt en 1964 à Trosly-Breuil (Oise), ni du Renouveau charismatique, bien que les recensions réalisées par les Béatitudes l’incluent dans les grandes communautés charismatiques.
31D’autres difficultés apparaissent pour le recensement des différentes communautés, car les statuts et places dans l’Église sont d’une grande diversité : reconnues, en cours de reconnaissance, œcuméniques, etc. Les compilations institutionnelles font état de nombreuses petites communautés locales dont les effectifs affichés s’échelonnent entre 50 et 60 personnes et les implantations uniques. L’Ouest compte ainsi cinq communautés d’alliance de plus : le Cénacle au Havre, Epheta à Caen, Cœur ouvert au Mans, La Main du Seigneur à Vannes et Source vive à Pontivy. Il faut ajouter une communauté de vie à Saint-Denis-du-Maine (Marie Reine de Paix) en Mayenne et une communauté mixte au Mans (Rocher d’Israël). De cette prolifération connue en 1997, il n’est pas sûr que toutes aient survécu ou n’aient pas changé de nom. D’ailleurs certaines formes d’essaimage ne font pas référence à la communauté d’origine comme la fraternité Marie, Source de Vie de Rolleville (Seine-Maritime), associée à celle de Saint-Denis-du-Maine.
32Une autre marge d’incertitude provient du repérage des communautés et de leur répartition en différentes catégories. Le bouillonnement est incessant et la demande en spiritualité des catholiques déçus, égarés ou en recherche renforce les créations de petits groupes entrant en effervescence, se propageant ici ou là, parfois éphémères ou au contraire se raccrochant à de grands courants existants. On a assisté à une grande diversification à la fin du siècle dernier. Mais déjà certaines communautés voient leurs membres vieillir, s’apaiser et mal se renouveler tandis que surgissent, à la suite des grands rassemblements comme celui de 300 000 charismatiques à Rome en 1998 autour du pape ou des JMJ de 1997 à Paris, de nouvelles communautés. Apparaissent notamment des groupes de jeunes gens dynamiques comme Ressuscito à Versailles (maintenant plus de 400 membres) ou Abba à Paris, en petites communautés à proximité des paroisses et avec déjà plus de 100 membres. Tout se passe comme si on assistait au Renouveau du Renouveau (venu de l’extérieur) avec une implication croissante dans la vie de l’Église en France. Il est étonnant de constater que ce sont les manifestations organisées par l’Église catholique traditionnelle qui ont provoqué ce changement (JMJ, Rome).
33Enfin, les variations d’effectifs sont incessantes, par entrées et sorties, par segmentation pour fonder de nouveaux groupes. Il paraît étonnant que les communautés du Chemin Neuf ne soient plus représentées dans l’Ouest en 2001 et que la diffusion s’arrête à Chartres. D’autant plus que la communauté était présente en 1994 à Angers et Saint-Brieuc, en 1997 à Angers, Nantes, Rennes et Brest. En fait le Chemin Neuf n’est pas absent, mais il s’est dilué, parfois en fraternités Cana, et ne compte plus de grosse communauté méritant d’être signalée dans les recensions disponibles.
34C’est donc une estimation limitée aux cinq plus grosses communautés représentées dans l’Ouest qui peut être proposée à partir des indications de membres données par les mouvements. Le résultat en 2001 souligne l’importance de deux pôles : les diocèses d’Angers et de Bayeux, le premier par la vitalité des groupes exogènes, le second par le poids des communautés endogènes. Mais globalement, la distribution dans l’Ouest souligne moins le réseau urbain que dans le reste de la France. Ce qui veut dire que l’Ouest se caractérise par la multiplicité de communautés petites par les effectifs. Mais cela témoigne aussi des spécifités du réseau urbain de l’Ouest avec de nombreuses villes intermédiaires et une forte densité de villes petites et moyennes.
De la diversité des communautés actuelles
35La multiplicité évoquée des mouvements charismatiques dans l’Ouest ne facilite pas leur rattachement à de grandes catégories d’analyse. Il est possible de se rallier avec M. Hébrard7, au répertoire fourni par la Conférence des évêques, avec la nécessaire catégorie « autres » ou « mixtes » pour les inclassables : groupes de prière et communautés, subdivisées en communautés de vie et communautés d’alliance. Les recherches sociologiques sur le thème les classent aussi en deux grandes familles : contestataires, d’implantation rurale et de mode de vie monastique (Pain de Vie) et attestataires d’implantation urbaine, avec une variété de vie communautaire pratique8. Ceci n’exclut d’ailleurs pas des communautés exceptionnelles n’entrant pas dans ces deux types d’attitudes.
36Il nous semblerait utile de réexaminer ces catégorisations à la lumière des formes d’action, à l’aune du militantisme. En pratique, quel que soit le mode d’organisation ou le style de vie proposé, les militants œuvrent soit dans le cadre de l’évangélisation, soit dans celui de l’aide ou de l’accueil des autres, en plus ou moins grande difficulté. Nous pourrions ainsi distinguer des communautés mixtes spécialisées dans l’évangélisation des masses et prêtes à aider les structures institutionnelles comme l’Emmanuel ou Réjouis-toi. Il s’agirait finalement de communautés travaillant dans les cadres habituels de l’Église. Cette forme paraît donc essentiellement supplétive, c’est-à-dire palliant les manques institutionnels d’encadrement. Dans une autre dimension, beaucoup plus développée sur l’accueil des personnes en difficulté et relevant finalement des dimensions d’aide et assistance aux plus démunis, Le Pain de vie, communauté mixte également, relèverait d’un axe caritatif. Restent les autres, pour lesquelles il serait nécessaire d’établir peut-être une catégorie particulière, car neuves dans les structures, diverses dans les militances : ce serait le domaine de l’innovation, comme pour le Chemin neuf. Deux exemples nés en Normandie peuvent illustrer ces catégories.
Le Pain de vie
37La communauté du Pain de vie, centrée sur la mystique de l’Eucharistie, avec adoration perpétuelle du Saint-Sacrement et participation quotidienne à tous les offices (messes, laudes, vêpres et complies) selon les membres ordonnés ou non, peut être considérée comme relevant du modèle contestataire. Comme la communauté des Béatitudes, elle réunit en vie commune des familles, des célibataires, des personnes consacrées dans un mode de vie de type monastique, lorsqu’une maisonnée peut être constituée.
38Née de la rencontre de deux couples aux itinéraires spirituels variés, mais pour l’un marqué par le passage dans une communauté charismatique, la communauté apparaît à Évreux en 1976 et se développe dans un premier temps essentiellement dans l’Ouest de la France. C’est l’opportunité d’occuper, dès 1981, l’ancien séminaire diocésain de Sommervieu près de Bayeux qui enracine les premières formes communautaires dans la région : Caen, Lisieux, Livaie dans le diocèse de Sées, Plemet dans celui de Saint-Brieuc. C’est après la reconnaissance comme association de fidèles en 1984 que la diffusion des communautés s’étoffe dans le reste de la France, mais jusqu’au milieu des années 1990, la région Ouest regroupe la majorité des implantations françaises.
39À côté de la prière, les communautés du Pain de Vie se consacrent à l’accueil des pauvres pour quelques jours ou parfois quelques années, à la rencontre et à l’écoute. L’organisation utilisée pour remplir ces tâches se trouve très diversifiée. À Sommervieu, c’est une communauté de vie, de type monastique, avec une petite production agricole commercialisable. Ailleurs, à La Cassine (Livaie) ou à Plemet, les maisonnées rassemblent des fraternités de prière. Pour Lisieux, le Refuge Notre-Dame est tenu par une fraternité de service. Ainsi, les maisonnées de vie commune et de prière semblent privilégier les implantations rurales, alors que les lieux d’écoute, de rencontre et d’accueil sont implantés dans les villes. Le meilleur exemple se situe à Caen où la communauté a ouvert un bar « Arc-en-ciel », dans un ancien lupanar, permettant les rencontres autour d’un verre sans alcool. Depuis peu, le bar a été reconverti en magasin, « La Boutique », permettant la commercialisation des productions de Sommervieu.
40Reconnue par l’Église, la communauté occupe le plus souvent d’anciens bâtiments religieux disponibles comme à Sommervieu, mais aussi comme à Verneuil-sur-Avre, diocèse d’Évreux, avec l’installation récente d’une communauté de vie à l’abbaye Saint-Nicolas. La restauration des constructions, la remise en état des chapelles constituent des objectifs pour les fraternités. C’est aussi l’occasion de mobiliser autour de la communauté des jeunes de moins de 30 ans de tous pays invités à participer à l’« École Évangile et Développement » mise en place depuis quelques années, et qui se tient dans les sites européens ou africains de la communauté.
41Ainsi, l’originalité de la communauté du Pain de Vie provient de sa double implantation dans les espaces ruraux les plus reculés pour les communautés de vie, dans les espaces urbains pour les fraternités de service. Elle peut constituer une variante du modèle de communauté contestataire9.
Réjouis-toi
42Réjouis-toi se définit par trois grands caractères. La communauté est au service de l’évangélisation dans l’Église diocésaine. À ce titre, elle est composée de 30 ou 40 membres, des familles, des jeunes, des actifs, des anciens, des prêtres, des diacres et forme ainsi une communauté de service dans toute sa diversité. Elle est très attachée à l’évêque et à la hiérarchie du diocèse où elle vit. Elle est aussi une communauté de prière, mais chacun continue à vivre dans le monde s’engageant, par ailleurs, à respecter une charte : participer à une veillée de prière chaque semaine, prendre un temps de partage une fois par mois, faire ensemble une retraite par an, maintenir chaque jour un temps d’oraison personnelle, participer à la vie de prière de la paroisse. Elle est une communauté de partage, de la vie avec ses joies, ses soucis et ses peines mais aussi d’une petite partie des ressources financières. Par exemple, elle aide à Coutances l’école de la Foi, également fondée par le Père Michel Santier pour les jeunes, parrainée par les évêques de l’Ouest. Cette école a formé 195 jeunes en 11 ans et voit croître ses demandes d’entrée. Nommé évêque de Luçon le 19 juin 2001, le Père Santier, le berger de la Communauté depuis ses débuts en 1977 a été remplacé par Alain Gueydier, diacre permanent pour le diocèse de Nantes.
43Actuellement la communauté Réjouis-toi se développe au-delà des frontières normandes. Parmi ses activités, en dehors de ses rencontres internes, on peut en souligner trois plus récentes. Elle organise depuis quelques années, à Pontmain en Mayenne, une session annuelle intitulée Conversion et Guérison, rejoignant par là le souci des charismatiques de raviver en eux le Don de Dieu et chacun est invité, grâce à l’Esprit, à découvrir un nouveau chemin de disponibilité. Il s’agit bien, malgré le titre, d’une démarche spirituelle et non psychologique ou thérapeutique. Les maisons de Lazare (Versailles, Caen) agissent également en ce sens. Par ailleurs, le nombre de petites communautés augmente et chaque année un ou deux diocèses en accueillent une nouvelle. Cette activité d’insertion dans les diocèses est assortie d’un rapprochement avec les nouvelles cellules d’évangélisation, s’installant petit à petit, dans les paroisses. Constituées d’une douzaine de personnes, elles sont destinées à s’agrandir et à se multiplier. Par leur spiritualité elles se rapprochent naturellement des communautés charismatiques. Parfois ce sont les mêmes personnes qui nourries de l’expérience charismatique s’investissent dans les cellules. Cette situation est récente et mérite d’en poursuivre l’observation. Fidèle au diocèse, Réjouis-toi est peut-être appelé à le devenir dans les paroisses où elle met en route des groupes de prière et participe aux cellules. En troisième lieu, les communautés relevant de Réjouis-toi s’ouvrent à des actions de solidarité précises, liées aux grandes inégalités économiques et sociales, par le don d’argent, de temps et de compétences. C’est son rôle de partage. Les enseignements réguliers que ses membres reçoivent enrichissent à la fois la vie spirituelle et le sens du don et du partage. Chacun se prépare ainsi à cette transformation interne qui permet d’agir sur le monde et, à son tour, le transformer. Le repli communautaire n’est pas toujours de mise et en ce sens les charismatiques de Réjouis-toi sont également, à leur manière, des militants.
44On pourrait, en conclusion, retenir trois points plus récents et plus originaux. Il faut souligner avant tout ces remarquables transformations, au long des années, depuis l’arrivée du Renouveau en France, il y a plus de trente ans, jusqu’au fourmillement actuel, encore difficile à cerner mais indubitablement présent dans la sphère religieuse actuelle. Les communautés bougent, vivent et meurent, changent mais l’esprit demeure. Leur rôle de militant dans l’Église subit parfois des mutations et prend des formes parfois inattendues. C’est pourquoi ils sont rangés parmi les catholiques « actifs » dans un livre récent10.
45Par ailleurs, il paraît contradictoire de dire que le Renouveau vieillit et que le renouvellement par les jeunes se fait parfois en dehors des grandes communautés. Alors que les plus grandes continuent à s’étendre : Chemin neuf, Béatitudes, L’Emmanuel, Réjouis-toi…, d’autres sont plus fragiles et on assiste dans certains cas à de véritables difficultés internes parce que l’évolution des uns n’est plus conforme à celle des autres, proches de fondateurs et présents depuis longtemps (Le Pain de vie). Effervescence, bouillonnement, fourmillement, chaque mot les décrit, et maintenant assiste-t-on à l’explosion de certaines communautés ?
46Le militantisme des charismatiques n’est pas habituel, il prend plusieurs teintes : accueil et encouragement pour un plus grand développement de la vie spirituelle où s’ajoute l’émotion, l’effusion de l’Esprit peu connues dans la prière traditionnelle, transformation du monde extérieur grâce au renouvellement spirituel interne dans de nombreux domaines non conflictuels, liés à la compréhension et au partage dans la société, engagement dans de grandes causes caritatives par le don du temps ou de l’argent, prosélytisme par le verbe, l’écrit, l’exemple, mise en œuvre des dons visibles de l’Esprit (force, discernement, guérison). Enfin, il participe de plus en plus des nouvelles modalités d’évangélisation de l’Église interpellée par la crise qu’elle subit avec la diminution tragique du clergé et la baisse impressionnante des pratiques habituelles. Le Renouveau échappe-t-il encore à l’Église catholique dont une bonne partie du clergé l’ignore ou le refuse alors qu’il reconnaît, lui, l’autorité ecclésiale sans se soumettre à toutes ses contraintes ?
47Le rassemblement de toutes les communautés charismatiques à Lourdes en 2004 devrait montrer cette récente évolution du Renouveau en France et peut-être, souligner comme souvent, qu’il surprend et n’a pas fini de bousculer.
Notes de bas de page
1 Pèlerinage à Sainte-Thérèse de l’Enfant-Jésus dont la communauté adopte la vocation contemplative et la spiritualité.
2 À propos des Béatitudes, cf. Christine Pina, « The City, the Countryside and Nature in the discourse of two Charismatic Revival Communities », Social Compass, vol. 46, n° 1, 1999, p. 85-99. De Christine Pina, cf. Également Voyage au pays des charismatiques, Paris, Les éditions de l’Atelier, 2001, 205 p.
3 Quatre cardinaux (Paris, Bruxelles, Lisbonne, Vienne) ont demandé il y a peu à l’Emmanuel un plan d’évangélisation sur la ville.
4 Vincent Bodic, De l’espace réduit au temps présent, Mémoire de maîtrise, Caen, 1998, ronéo, 141 p.
5 Conférence des évêques de France, Guide de l’apostolat des laïcs, Paris, CEF et La Croix, 1997, p. 233.
6 Zoom sur les communautés nouvelles et leurs 1 000 adresses réalisé par la Communauté des Béatitudes dans les Cahiers de Feu et Lumière, supplément au n° 190, décembre 2000, 96 pages.
7 Monique Hébrard, Les charismatiques, Paris, Le Cerf, 1991, 127 p.
8 Martine Cohen, « Vers de nouveaux rapports avec l’institution ecclésiastique : l’exemple du Renouveau charismatique », Archives des sciences sociales des religions, n° 62-1, 1986, p. 63-65.
9 Cf. Martine Cohen, op. cit.
10 Jean-René Bertrand, Colette Muller, Où sont passés les catholiques ?, Paris, Desclée de Brouwer, 2002, 327 p. Pour les réflexions sous-jacentes à l’ensemble de cette étude, ajouter aux références indiquées ci-dessus en notes, l’article de Collette Muller : « Sociétés et Religion », Norois, n° 144, avril-juin, 1997, p. 349-353.
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