Chapitre V. Face à la crise économique (1932-1935)
p. 125-147
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Texte intégral
1Dès la fin 1931, le patronat maritime demande au gouvernement de mettre en place un dispositif de soutien à l’armement, non seulement pour compenser les effets de la politique douanière qui a entraîné une compression des importations, mais aussi pour permettre aux compagnies françaises de pouvoir concurrencer les armements étrangers aidés par leur gouvernement respectif. Cette démarche reçoit le soutien des fédérations d’officiers et de marins1. Au même moment l’État doit trouver une solution à la situation de quasi-faillite de la Compagnie générale transatlantique, qui représente 17 % du tonnage français et emploie 15 000 personnes dont 12 000 navigants. Enfin, l’importance du chômage oblige le gouvernement à instaurer un régime d’allocation pour éviter que la situation sociale dans les ports ne devienne catastrophique. L’État retrouve donc un rôle de premier plan dans l’organisation et la protection des activités maritimes.
2Durant ces années de crise, l’activité revendicative des organisations syndicales se réduit à tenter d’empêcher de trop fortes diminutions des salaires et à appuyer les projets d’aide à la marine marchande et aux pêches maritimes. De plus, la FNSM connaît à partir de 1934 une nouvelle crise interne alors que les syndicats unitaires et autonomes connaissent un sursaut de courte durée. À la veille de la réunification syndicale de la CGT et de la CGTU, l’état du syndicalisme maritime n’est guère brillant, à l’exception de la Fédération française des syndicats professionnels de marins qui est parvenue à s’implanter chez les pêcheurs.
La nécessaire intervention de l’État
3L’intervention de l’État prend plusieurs formes : une série de décrets et de circulaires en matière sociale, la modernisation de la législation applicable aux gens de mer et la mise en place d’un nouveau régime d’aide aux compagnies de navigation.
Des mesures sociales pour la marine marchande et la réforme du service militaire des gens de mer
4Face au chômage massif qui touche les marins du commerce, l’État est contraint d’apporter des réponses d’urgence, tout en poursuivant le rapprochement de la législation régissant les inscrits maritimes avec celle appliquée aux autres professions.
5Un décret du 13 novembre 1931 crée un régime d’allocation spéciale pour les inscrits sans embarquement. Pour en bénéficier, les marins doivent justifier que postérieurement à leur débarquement, ils se sont adressés en vain, pendant 30 jours au moins, au bureau paritaire de placement maritime pour trouver un embarquement. Sont exclus du bénéfice des prestations, les pensionnés, les marins dont le chômage a été provoqué par un différend collectif de travail ainsi que ceux convaincus de se livrer habituellement à la boisson. Une circulaire en date du 1er août 1932 organise le rapatriement dans leurs pays d’origine des marins coloniaux qui en font la demande. La création de cette allocation permet d’éviter que la situation des inscrits sans embarquement ne devienne catastrophique.
6L’État décide également la généralisation des allocations familiales dans la marine marchande. En effet, depuis le milieu des années vingt, quelques compagnies versent des allocations aux familles des marins de commerce. La loi du 21 janvier 1932 sur les allocations familiales étend cette pratique à l’ensemble des inscrits navigants au commerce.
7Enfin, le 13 décembre 1932 est votée une réforme du service militaire des gens de mer. Ces derniers doivent désormais effectuer 2 ans de service au sein de la marine nationale avant d’être mis en disponibilité pendant 3 ans puis en réserve pendant 23 ans. La durée du service militaire des inscrits se rapproche donc désormais de celle du reste de la population masculine, réduite à un an en janvier 19282.
8Mais les mesures sociales sont insuffisantes face à l’ampleur de la crise. La première compagnie de navigation française, la Compagnie générale transatlantique, est même menacée de disparition.
Le sauvetage de la Compagnie générale transatlantique
9L’ancienne Compagnie générale maritime, fondée en 1854 par les frères Péreire, est en effet dans une très mauvaise posture et est incapable de faire face à ses engagements financiers. En avril 1931, un rapprochement s’est produit entre elle et la Compagnie des chargeurs réunis. Mais cela ne suffit pas pour enrayer les graves difficultés qu’elle rencontre et en mai, un appel est lancé au gouvernement. Celui-ci se décide à intervenir car près de 20 000 emplois sont menacés non seulement dans la marine marchande mais aussi dans les chantiers navals. De plus, de nombreuses lignes postales assurées par la Compagnie générale transatlantique risquent d’être interrompues. Dès juillet, un crédit de 160 millions de francs est accordé par le Trésor public. Une commission d’enquête parlementaire est constituée afin d’établir les raisons de ce naufrage économique : sont mis en cause des investissements trop forts entre 1927 et 1929, l’importance des dividendes distribués depuis 1919, des achats de filiales et des prises de participations hasardeuses comme dans un circuit de tourisme en Afrique du Nord, le manque de réserves, mais aussi le poids des conventions signées avec les pouvoirs publics. En octobre un nouveau conseil d’administration est nommé sur proposition du gouvernement.
10En février 1932 est voté un nouveau crédit de 110 millions en attendant l’adoption d’un texte définitif. Deux lois sont finalement adoptées le 20 juillet 1933. L’État devient l’actionnaire majoritaire de la Compagnie générale transatlantique. Le nouveau conseil d’administration est composé de 18 membres, 10 représentants de l’État, 6 des armateurs et 2 du personnel navigant et sédentaire. Le représentant du personnel navigant sera le commandant Lancelot, président du syndicat des capitaines au long cours de Bordeaux3. Le 23 novembre 1933, une convention concède à la Compagnie générale transatlantique les services maritimes postaux et d’intérêt général vers les États-Unis, le Mexique, les Antilles et l’Amérique centrale pour une durée de 14 ans4.
Tableau 5. – Évolution des effectifs de la flotte de commerce entre 1932 et 19335.

11L’action de l’État ne s’arrête pas à ce sauvetage : un nouveau système de primes à la navigation est mis sur pied afin d’enrayer la progression du nombre de navires désarmés et des inscrits maritimes sans embarquement.
Une aide directe de l’État aux armateurs
12La dernière grande loi d’aide à la navigation date de 1906. Prévue pour durer douze ans, les derniers règlements dus de son fait ont été effectués en 1930. Depuis, les armateurs réclament le vote d’une nouvelle loi, qui compléterait les mesures existantes, à savoir les conventions pour l’exploitation des services maritimes postaux et d’intérêt général existantes depuis le milieu du xixe siècle, les aides aux pétroliers instaurées en 1925, le dispositif de soutien à la construction de navires par le Crédit maritime créé en 1928 et le droit de préférence pour le transport des produits destinés à l’État ou lui appartenant depuis la loi du 9 août 1921.
13Une proposition de loi est déposée le 10 novembre 1932 par Henri Tasso, député socialiste des Bouches-du-Rhône. Elle vise à octroyer des allocations pendant quatre ans aux navires aux longs cours, au cabotage et aux grandes pêches, armés uniquement de marins français et sous pavillon français6. Ce projet reçoit non seulement le soutien des fédérations syndicales d’officiers, mais aussi celui de la FNSM. Celle-ci y voit une opportunité pour empêcher les baisses de salaires que tentent d’imposer les armateurs, comme en novembre et décembre 1933 au Havre où la Compagnie des chargeurs réunis tentera par deux fois de baisser les salaires de 10 %7. À l’opposé la FUMP rejette le projet Tasso. Elle justifie sa position par le fait que les marins français sont moins payés que les Anglais, les Italiens ou les Suédois. Les compagnies de navigation n’ont donc pas besoin d’être aidées8.
14En mars 1934 les syndicats confédérés ne s’opposent pas à la baisse de 10 % des salaires opérée par la Compagnie des chargeurs réunis, estimant que cette diminution serait retirée dès le vote du projet Tasso9. Celui-ci intervient le 13 juillet, ce qui permet l’ouverture de négociations salariales nationales entre le CCAF et la FNSM. Elles aboutissent le 18 octobre au maintien ou au rétablissement des salaires au niveau de l’accord conclu en 192910.
15La loi du 13 juillet 1934 institue pour deux années des allocations qui offrent un bol d’air aux compagnies de navigation et stoppent la progression du chômage. Mais en 1935 les effectifs embarqués sont encore inférieurs de 15 % à ceux de 1929 : 111 411 officiers, marins de pont et aux machines en 1935 contre 131 010 en 192911. La loi Tasso soulage également les organisations syndicales qui voient s’éloigner les perspectives de réduction des salaires. Les dirigeants de la FNSM, qui ont accepté des baisses au printemps, sont attaqués non seulement par les syndicats unitaires et autonomes, mais aussi par une partie importante des syndicats confédérés affiliés.
La difficile unité syndicale dans la marine marchande
16La décision de la FNSM de ne pas s’opposer aux baisses de salaires en mars 1934 entraîne un regain d’activité des organisations unitaires et autonomes alors moribondes. Si l’influence des premières reste très limitée, les secondes jouent un rôle déterminant dans la nouvelle crise de la fédération confédérée, qui connaît une nouvelle scission au moment où la CGT et la CGTU entament leur réunification. De leur côté, les fédérations de capitaines et d’officiers sont en pleine radicalisation.
De la relance de la propagande unitaire et autonome à la nouvelle crise de la FNSM
17Dès l’annonce de l’acceptation par la FNSM des diminutions de salaires, les syndicats unitaires alors squelettiques sont relancés. Au Havre et à Rouen, pour suppléer au Cri du Marin dont la publication est interrompue depuis septembre 1933, de nouvelles feuilles de propagande, L’Œil du bossoir et Le Cri des bords, sont éditées12. À la mi-juillet un congrès fédéral se tient à Paris. La FUMP élabore une contre-proposition réglementant les conditions de salaire et de travail et destinée à être présentée à la Chambre des députés par le groupe communiste. La reparution du Cri du marin est décidée, mais couplée avec Le Cri des dockers, organe de la Fédération unitaire des ports et docks13. Dans le même temps, les unitaires lancent un appel pour la création d’une fédération unique des marins et pêcheurs. Il reçoit des échos favorables au niveau local : Poumarat, secrétaire de la section pont et machine CGT du Havre, est « convaincu de la nécessité de l’unité syndicale ». À Marseille, Ferri-Pisani organise une réunion commune le 29 décembre entre inscrits et ADSG confédérés et unitaires. Il écrit également que « la question de l’unité syndicale est un problème qui devient inévitable ». Mais au niveau national, le refus de la FNSM est catégorique14.
18La relance de la FUMP est un échec. La parution du Cri du marin cesse de nouveau en avril 1935. Lors du congrès confédéral de la CGTU en septembre de la même année, la FUMP n’a plus que 1 300 adhérents. Les seuls ports où les unitaires sont réellement implantés sont ceux de Rouen et du Havre. Le syndicat unitaire de Marseille stagne, lui, autour de 200 membres, ce qui est très faible au regard du nombre d’inscrits dans ce port15. Ce sont en effet les autonomes qui ont bénéficié du mécontentement des marins du commerce après l’acceptation par la FNSM des baisses de salaires.
19En février 1934, Bassaler a reformé à Dunkerque le syndicat autonome qui avait disparu depuis le début de 1933. Il revendique très vite plus de 200 membres16. À Marseille, le « syndicat unique » dirigé par Susini regroupe plus de 1 000 marins et édite régulièrement La Bataille des marins. Les raisons de son succès sont à rechercher avec les liens de Susini avec Sabiani, devenu l’homme fort de la municipalité marseillaise depuis le décès du maire Flaissières en 1931. Susini a bénéficié de subventions pour mettre en place une caisse spéciale de chômage. Cette caisse est supprimée en 1934 après une enquête, réclamée par les confédérés, au cours de laquelle les enquêteurs ont découvert un trou de 60 000 francs. Grâce à l’intervention de Sabiani, le conseil municipal de Marseille passe l’éponge.
20Le syndicat unique de Marseille va être la cause d’une nouvelle division de la FNSM. Le 4 octobre, le secrétaire général, Durand, accepte de l’affilier, provoquant la fureur des syndicats des marins et des ADSG de Marseille. Par l’intermédiaire de Susini, Durand règle en fait ses comptes avec les dirigeants marseillais et en particulier Ferri-Pisani, avec lequel il a des divergences qui ne sont pas seulement syndicales. Les prémisses de la crise apparaissent lors du congrès fédéral d’octobre 1933 : le rapport moral de Durand est attaqué par les délégués de Marseille, Nantes, Saint-Nazaire et Dunkerque et est rejeté par 41 924 voix contre 44 009 et 601 abstentions. Mais Durand est néanmoins réélu dans ses fonctions de secrétaire général grâce à l’appui du délégué du syndicat d’Alger, Raoul Alquier, à qui il promet le poste de secrétaire administratif permanent. L’hostilité de plus de la moitié des membres de la FNSM envers Durand a peut-être également des raisons politiques : en effet, selon La Révolution prolétarienne d’avril 1935, il est proche du maire de Bordeaux, Adrien Marquet, un des leaders des néo-socialistes exclus en novembre 1933 de la SFIO, alors que Ferri-Pisani est un membre éminent de la SFIO marseillaise17.
21En dépit de la sentence de la Commission des conflits confédéraux de la CGT qui conclut le 8 novembre 1934 que « l’adhésion du syndicat unique [de Marseille] est en opposition formelle avec les statuts fédéraux », Durand refuse de revenir sur sa décision. Comme l’Union départementale CGT des Bouches-du-Rhône a refusé l’adhésion du syndicat unique et ne lui délivre pas en conséquence de timbres confédéraux, il lui fait parvenir des timbres de Bordeaux18. Le 5 janvier 1935, un congrès extraordinaire confirme l’adhésion du syndicat unique de Susini par un vote sur l’exercice en cours, ce qui exclut les deux syndicats de Marseille, alors que la coutume chez les inscrits est de voter sur l’exercice clos. Susini et Durand ont reçu le soutien de Rivelli, membre depuis décembre 1933 du Parti socialiste de France formé par les néo-socialistes. La commission administrative de la CGT décide de conserver aux deux syndicats exclus leur qualité de confédérés et de leur remettre directement les timbres et cartes confédéraux, ainsi qu’aux syndicats qui ont exprimé leur désaccord, ceux des marins de l’Estaque et des inscrits de Dunkerque. Le 15 janvier un grand meeting est organisé à Marseille par les deux syndicats exclus, avec la participation de Le Minter, secrétaire du syndicat unitaire des marins de Marseille qui prend la parole et lance un appel à l’unité. Le 18 mars le Comité confédéral national confirme cette position et donne deux mois à la FNSM pour réintégrer les deux organisations marseillaises. Durand refuse. En juin il essuie un revers au Havre avec la suspension par l’union locale CGT de François Cluzeau et Georges Cupillard, dirigeants du syndicat local des marins et agents du service général, qui lui étaient fidèles. Les timbres confédéraux ne sont plus délivrés qu’à Chedville, qui devient secrétaire provisoire des agents du service général. Le 25 juillet au siège de la CGT à Paris, les délégués de onze ports, qui représentent la majorité des effectifs de la FNSM, constituent la Fédération nationale maritime. Le bureau est constitué d’Ehlers, secrétaire général ; Chedville, Heitz et Pasquini, secrétaires adjoints. La CGT accepte l’adhésion de la fédération sans pour autant prendre des sanctions contre la FNSM afin de ne pas détruire toute possibilité d’accord19.
22Durand ne semble pas prêt à céder. Dans une circulaire adressée aux navigateurs du Havre, il réaffirme son soutien à Cluzeau. Mais il ne peut empêcher l’élection définitive de Chedville comme secrétaire de la section des agents du service général du Havre le 1er octobre. La situation semble donc bloquée alors que se profile au niveau confédéral la réunification entre la CGT et la CGTU et donc la fusion préalable de la FNSM et de la FUMP.
Les conséquences de la réunification CGT-CGTU sur le syndicalisme maritime
23Les discussions entre la CGT et la CGTU sur la question de la réunification ont été relancées après l’émeute antiparlementaire du 6 février 1934 et ses conséquences – ralliement de la CGTU à la grève générale de la CGT du 12 février 1934, tournant unitaire du PCF, constitution du Rassemblement populaire20. Après un premier échec en janvier 1935, le processus est relancé en juillet. Du 24 au 27 septembre, les deux centrales syndicales tiennent simultanément leur congrès à Paris et à Issy-les-Moulineaux. Un accord est trouvé sur un processus d’unification, avec des fusions progressives de la base au sommet et l’organisation d’un congrès d’unité au printemps 193621.
24Avant toute fusion entre la FNSM et la FUMP, une issue à la division en deux fédérations des syndicats maritimes confédérés doit être trouvée. Lors du congrès confédéral de septembre, une procédure a été définie : elle prévoit des assemblées générales dans les deux syndicats marseillais et dans celui des agents du service général du Havre, sous l’autorité d’un membre de la Commission des conflits confédéraux et en l’absence des deux fédérations en cause, puis un congrès extraordinaire de fusion, avec comme base de contrôle des pouvoirs, le nombre de timbres pris par chaque syndicat au cours de l’exercice 1933. Les assemblées générales aboutissent à la reconduction des dirigeants qui avaient été exclus de la FNSM au début de 1935. Le congrès de fusion se déroule à Paris le 8 novembre. Le nouveau bureau fédéral est composé uniquement des membres de celui de la Fédération nationale maritime, avec comme secrétaire général Ehlers, assisté de Pasquini, Chedville et Heitz. Ce congrès est une double défaite pour Auguste Durand qui perd son poste de secrétaire général et est remplacé par Ehlers, auquel il est opposé depuis 192722. L’unité avec la FUMP est dorénavant possible.
25Initialement prévu les 18 et 19 décembre 1935, le congrès de fusion se tient finalement les 8 et 9 janvier 1936 à Paris. Trente-trois syndicats sont représentés par une quarantaine de délégués. Les confédérés sont largement majoritaires au sein de la fédération réunifiée, qui renouvelle son affiliation à la Fédération internationale des ouvriers des transports que la FUMP a souvent attaquée dans les colonnes du Cri du marin. Seuls deux unitaires, Le Minter et Pencalet, sont élus au Conseil national fédéral contre sept titulaires et trois suppléants pour les confédérés : Ehlers, Chedville, Heitz, Pasquini, Ferri-Pisani, Ceccaldi et Aimé Guénédal pour les titulaires et Leseigle, Rochet et Fach pour les suppléants. Le nouveau bureau fédéral est composé d’Ehlers, secrétaire général et trésorier, et de Leseigle, Chedville et Pasquini, secrétaires adjoints. Ehlers, qui est le seul permanent de la FNSM, est parvenu à en reprendre la tête, lui qui en avait été écarté en 1929. Ce surprenant retour est en partie lié aux conséquences du vote du congrès fédéral qui prévoit que « les membres permanents du bureau ne devront être investis d’aucun mandat politique ». Or, à l’exception d’Ehlers, tous les confédérés qui auraient pu prétendre au poste de secrétaire général ont des mandats électifs locaux : Pasquini est conseiller d’arrondissement SFIO du premier canton de Marseille depuis 1934 et Eugène Heitz est conseiller municipal SFIO de Saint-Nazaire depuis 1929 et surtout Ferri-Pisani, est adjoint SFIO au maire de Marseille depuis la victoire d’Henri Tasso en 193523.
26Le secrétaire du syndicat des marins de Marseille a publié en 1933 un ouvrage dans lequel il présente ses conceptions du syndicalisme maritime24. Ce livre permet de saisir l’organisation et les méthodes d’action de la FNSM à la veille du Front populaire. Ferri-Pisani explique que le syndicalisme doit
« […] occuper les positions stratégiques indispensables pour que l’engagement des forces prolétariennes ne tourne point à l’aventure. Il faut s’installer dans le régime, provisoirement certes, mais s’installer quand même. Quand le provisoire dure longtemps – si longtemps que la plupart des travailleurs n’espèrent pas en sortir leur vie durant – rien n’empêchera jamais l’être humain de s’efforcer de modifier le détail de son installation pour qu’elle devienne plus commode, plus facile, moins étriquée. »
27En conséquence, « l’activité quotidienne du syndicalisme n’est pas toujours révolutionnaire ». Selon lui, le syndicalisme maritime confédéré est à la fois réformiste et révolutionnaire :
« Réformiste, il l’est sans doute autant que ce mot contient l’idée de transformations successives plus ou moins importantes, de modifications au régime existant en vue d’améliorer la condition des gens de mer. Révolutionnaire, il l’est aussi, non seulement par son affiliation à la CGT et par sa participation au mouvement de classe des travailleurs du monde entier, mais encore par l’usage qu’il sait faire, plus que tout autre mouvement corporatif, du moyen d’action le plus en honneur chez les syndicalistes révolutionnaires : la cessation concertée du travail. »
28Il est en accord avec la CGT sur sa « politique de présence systématique. Les discussions paritaires sont comme la voie normale de toutes les revendications syndicales ». Pour lui, les grèves sont « un moyen extrême » dont il ne faut pas « attendre de satisfaction immédiate ». Il les considère comme de « simples démonstrations » et affirme qu’il faut savoir « terminer le conflit avant qu’il ne soit trop tard, limiter les sacrifices, conserver intactes les forces corporatives et se déclarer prêt à recommencer l’action syndicale » et non pas « persister dans l’héroïque combat jusqu’au moment où l’on n’aura plus autour de soit que des chômeurs permanents, tous les navires ayant trouvé des “équipages capables d’assurer régulièrement les départs” ». Il condamne sans appel la grève générale :
« La Bataille sociale n’est pas contenue dans un seul épisode. Les organisations n’ont pas pris comme devise le “vaincre ou mourir” aussi glorieux que stupide. Elles doivent vaincre dans le temps. Être une menace toujours présente, une force toujours disciplinée voilà l’essentiel du syndicalisme qui ne peut se résoudre à disparaître dans un feu de paille si éclatant soit-il. »
29Pour Ferri-Pisani, les gens de mer doivent « apprendre à ne pas attendre d’une grève la satisfaction immédiate », ne pas se décourager et garder confiance car la lutte pour l’émancipation sera longue et toujours inachevée :
« Les travailleurs, esclaves ou serfs, ne s’éveilleront point un matin hommes libres. Ils seront allés insensiblement vers cette liberté de même que l’égalité économique aura été acquise parcelle par parcelle sans qu’aucun militant puisse jamais avoir l’impression d’avoir enfin terminé la tâche impartie au syndicalisme. Et dans cette lente progression vers ce qui nous semble être un plus grand bonheur pour l’humanité, il est improbable qu’une génération puisse marquer la halte pour goûter, sans nouveaux désirs insatisfaits, les joies d’un régime meilleur qui serait tout entier son œuvre. »
30Il termine son ouvrage en lançant un appel à l’union des gens de mer et au rapprochement avec les organisations syndicales des officiers.
La radicalisation des fédérations syndicales d’officiers
31Au début des années 1930, deux des trois fédérations d’officiers sont affaiblies du fait de divisions internes. L’intensité de la crise économique va rapprocher les positions, sans supprimer les divergences qui sont liées à la conception de l’action syndicale. Regroupées depuis 1929 dans l’Union interprofessionnelle des états-majors, les différentes fédérations reprennent leur liberté en 1934, alors que le CCAF se refuse à toute négociation nationale sur les conditions d’engagement, contrairement à ce que la loi d’aide à l’armement libre prévoit.
32Les syndicats d’officiers radiotélégraphistes restent divisés. En août 1930, les sections de Marseille et de Bordeaux ont quitté la fédération et ont lancé leur propre publication, L’Officier radiotélégraphiste, dans laquelle elles attaquent les dirigeants des syndicats du Nord25. Un congrès de réunification se tient à Marseille en juillet 1933. La fédération regroupe alors cinq syndicats et compte environ 260 adhérents. Le 23 novembre 1933 est promulguée une loi fixant le statut des opérateurs radiotélégraphistes à bord des navires de commerce, de pêche et de plaisance. La situation des officiers radiotélégraphistes, toujours majoritairement employés par la CRM se rapproche de celle des autres corporations d’inscrits26. À la même période, une nouvelle division voit le jour avec la fondation à Marseille le 8 septembre 1933 du syndicat fédéral des radiotélégraphistes, à côté de la section fédérale existante. Son président, Marcel Brochet, en expose le but dans le nouvel organe de la fédération L’Officier radiotélégraphiste de la marine marchande : « Marseille-Fédéral n’a qu’un but : permettre à chacun de nous d’exprimer librement son opinion dans une atmosphère de cordialité et de sincérité réciproque, avec la certitude que les décisions s’inspirant de cette opinion seront fidèlement rapportées par le bureau. » La fédération prend très vite partie pour Marseille-Fédéral contre le « vieux syndicat » Marseille-Joliette. Les deux organisations cohabitent pendant deux ans, jusqu’à la radiation à l’unanimité en janvier 1936 du syndicat de Marseille-Joliette lors du congrès de la Fédération à Paris27.
33Au sein de la Fédération des capitaines au long cours, la réintégration du syndicat de la Manche passée à l’autonomie en 1928 se déroule beaucoup plus facilement. En novembre 1932, lors du quatorzième congrès fédéral, le président du syndicat de la Manche, Jourdan, devient vice-président de la fédération28. L’activité syndicale se concentre alors sur un soutien au projet de loi d’aide à l’armement libre. François Mas, président de la fédération depuis 1917, décède le 27 janvier 1935. C’est Lancelot de Bordeaux qui lui succède. La mort de Mas entraîne la disparition de l’Union professionnelle des états-majors, dont il était l’instigateur et le président. Elle était déjà en sursis après le retrait de la Fédération des syndicats d’officiers mécaniciens dirigée par Eugène Vasset de Marseille, qui contestait le poids trop important en son sein des capitaines au long cours29. Pourtant les différentes fédérations d’officiers doivent faire face à l’application à la lettre par le CCAF de la loi Tasso et au refus de toute négociation collective.
34La loi d’aide à l’armement libre prévoit en effet le maintien des salaires et permet l’ouverture de négociations collectives. Si les armateurs acceptent la clause salariale, ils rejettent toutes les demandes d’accords collectifs. En ce qui concerne les soldes, ils font d’ailleurs signer aux officiers des lettres individuelles d’acceptation, ce qui provoque la colère de leurs fédérations30. Lors du seizième congrès fédéral des syndicats de capitaines aux longs cours tenu en décembre 1934, Mas a exprimé son désarroi :
« Alors que sous la pression des événements, du bouleversement profond de la structure économique mondiale, une poussée irrésistible se manifeste dans tous les pays, dans tous les milieux pour une organisation nouvelle de la production ayant pour base l’organisation professionnelle dont les forces syndicales, qu’elles soient patronales ou ouvrières, constituent les assises fondamentales, le geste du Comité central (refus de discuter l’article 5 de la loi Tasso et application à la lettre avec des conventions collectives sur les soldes seulement et n’intégrant pas les conditions d’engagement et notamment de stabilité) nous rejette brutalement dans une position de combat31. »
35En septembre 1935, suite à une demande de négociation sur les salaires faite par la Fédération des syndicats d’officiers mécaniciens, le CCAF rappelle que son refus de négocier est lié au choix de ses membres de gérer directement et individuellement les relations avec leurs salariés officiers : « Nos adhérents ont manifesté d’une manière constante leur désir d’examiner individuellement la situation des membres de leurs états-majors. Nous n’avons donc pas mandat de mettre à l’étude les questions posées par votre lettre et vous exprimons nos regrets de ne pouvoir lui donner une suite32. » La même réponse a été faite au mois d’août à un courrier similaire de la Fédération des capitaines au long cours. Celle-ci, lors de son dix-septième congrès fédéral en novembre 1935, se déclare prête par la voie de son secrétaire général Gervais, « à conjuguer les efforts de toutes les fédérations des états-majors en créant un organisme plus souple [que l’Union professionnelle] sans direction permanente » et à « une entente avec la fédération des inscrits maritimes et des agents du service général à bord33 ». Ce souhait marque un retournement puisque les relations entre les fédérations d’officiers et la FNSM CGT sont au point mort depuis la fin de 1922.
36Au début de l’année 1936, après presque dix années de crise, le paysage syndical dans la marine marchande a retrouvé sa physionomie du début des années 1920, avec une seule fédération pour le personnel subalterne et trois fédérations d’officiers de nouveau prêtes non seulement à collaborer entre elles mais aussi avec la FNSM CGT. Cette dernière n’est plus que faiblement implantée dans les pêches maritimes où existent toujours des syndicats indépendants et où sont également apparues trois fédérations qui ne regroupent que des pêcheurs.
Le développement de fédérations réformistes dans les pêches maritimes
37Les campagnes de pêche de début des années 1920 ont été très fructueuses, la réduction de la pêche durant la guerre ayant favorisé la prolifération du poisson. Le revenu annuel d’un homme d’équipage d’un navire côtier peut alors atteindre 10 000 à 12 000 francs. Le nombre de pêcheurs embarqués se stabilise autour de 85 000. La motorisation des bateaux se développe rapidement et illustre l’entrée des pêches maritimes dans l’industrialisation. Le tonnage global pêché connaît une hausse sans interruption de 1920 à 1930, hausse insuffisante au regard de l’augmentation encore plus importante de la consommation de poisson. À peu près équilibrée jusqu’en 1914, la balance commerciale des produits de la mer ne l’est plus après 1918. Les importations de poisson frais passent de 31 000 quintaux en 1913 à 239 000 quintaux en 193234. Les pêches maritimes ne sont pas épargnées par la crise économique. Au contraire, ce secteur, qui a déjà connu des crises dues à la raréfaction du poisson, est touché de plein fouet en raison de la conjugaison des trois facteurs : effondrement des cours, dépeuplement halieutique des fonds et hausse des frais d’armement. La situation économique et sociale devient catastrophique.
Tableau 6. – Gains moyens annuels des pêcheurs de 1927 à 1935 (en francs)35.

38Durant ces années de crise, les syndicats indépendants de la côte atlantique maintiennent leurs activités. À Saint-Jean-de-Luz, les usiniers ne parvenant pas à trouver des débouchés suffisants, des accords de limitation des apports de sardines et de maquereaux sont signés, sans pour autant stabiliser les prix d’achat qui restent très bas36. À côté de ces syndicats qui ne se préoccupent que de la défense des intérêts des pêcheurs locaux, trois fédérations réformistes sont apparues au début des années 1930.
39La première, la Fédération des syndicats de marins pêcheurs et propriétaires de bateaux de pêche à la part de l’Océan est fondée en 1929 à Lorient. Elle regroupe essentiellement des syndicats de pêcheurs thoniers. Elle est rapidement appelée la « fédération Tristan », du nom de son président, Firmin Tristan. Celui-ci, armateur et propriétaire d’une conserverie de poisson à Lorient, est maire de Groix depuis 1925 et conseiller général du Morbihan depuis 1928. Il est élu député sous l’étiquette « républicain de gauche » lors d’une élection partielle le 22 avril 193437. La fédération est composée de syndicats mixtes de pêcheurs thoniers ou sardiniers. De sensibilité laïque et réformiste, elle n’est affiliée à aucune structure confédérale et ne se préoccupe que de questions corporatives38. La seconde, la Fédération des armateurs, patrons et marins pêcheurs du Nord de la France rassemble depuis mai 1933 les patrons et marins pêcheurs de Dieppe à Dunkerque. Cette « Fédération du Nord » est animée par l’abbé Gerrebout, curé des Baraques, une paroisse populaire de Calais, et fondateur dans les années 1920 d’un petit syndicat de pêcheurs artisans39. La troisième, la Fédération française des syndicats professionnels de marins ou FFSPM, créée en janvier 1932, est implantée sur les côtes du nord de la Bretagne et de la Manche40. Cette dernière connaît un développement important sur lequel il convient de s’arrêter plus longuement.
Du syndicat professionnel des marins du Nord-Est Bretagne (SNEB) à la FFSPM
40En septembre 1929, lors du congrès d’apostolat maritime de Boulogne-sur-Mer, le père Louis-Marie-Nicolas Lebret, ancien officier de marine entré chez les Dominicains en 1923, prend conscience de la nécessité de s’occuper des marins pêcheurs41. L’année suivante, il reprend et dynamise la Jeunesse maritime chrétienne, créée sur le modèle de la Jeunesse ouvrière chrétienne42. Il entreprend une grande enquête, qui dure 22 mois, dans 400 ports de pêche, afin de saisir la situation matérielle, morale et spirituelle des pêcheurs43. Il découvre la dégradation des conditions d’existence des pêcheurs et se rend vite compte de la nécessité de dépasser le cadre apostolique et de fonder un syndicalisme maritime chrétien. Les résultats de cette enquête seront publiés en 1933 dans Aspects maritimes de la crise mondiale. Au cours de l’année 1930 il fait la rencontre d’Ernest Lamort, patron pêcheur de Saint-Servan-sur-Mer, devenu sous-directeur d’une sécherie de morues à Saint-Malo car la pêche ne permettait pas de faire vivre sa famille44. Chrétien fervent, celui-ci accepte la proposition de Lebret de constituer un syndicalisme maritime s’appuyant sur la doctrine sociale chrétienne. Le 29 janvier 1931 est fondé le syndicat professionnel des marins du Nord-Est Bretagne (SNEB), affilié à la CFTC45.
41Dès l’hiver 1931 des sections locales du SNEB sont créées dans la région de Saint-Malo46. L’implantation du SNEB est facilitée par la crise de confiance qui touche le syndicat des inscrits maritimes CGT de Saint-Malo. En effet, celui-ci a signé en janvier 1927 une charte-partie décevante. De plus, les armateurs ont décidé du supprimer cette année-là les deniers à Dieu donnés aux pêcheurs lors de leur engagement, compensant ainsi l’argent qu’ils allaient perdre au retour de la campagne de pêche du fait de la nouvelle charte-partie. Les pêcheurs rendent le syndicat des inscrits responsable de cette disparition car ce dernier ne cache pas son opposition à ce « favoritisme de cousins et de cousines ». Le nombre des adhérents chute alors à moins de 200. Affaibli durablement, le syndicat CGT n’est plus très offensif dans les années qui suivent et cherche principalement à sauvegarder les acquis de la charte-partie de 1927. Il ne compte que 165 membres en 1930 et ne peut donc s’opposer au développement du SNEB47.
42Avec la création de syndicats similaires dans les quartiers maritimes de Paimpol et de Lannion à la fin de l’année 193148, la mise en place d’une fédération devient nécessaire. C’est chose faite dès janvier 1932 avec la création de la FFSPM, dont Ernest Lamort devient naturellement le secrétaire général et Joseph Grossin, patron à la petite pêche de Cancale, le président. Elle se présente comme « une association d’organisation et de défense professionnelle » car « les marins doivent pouvoir faire entendre leur voix dans la préparation et l’application des lois qui les intéressent surtout dans la crise que traversent actuellement toutes les branches de l’activité maritime » et « le marin se trouve parfois embarrassé pour se faire attribuer son dû, qu’il s’agisse des pensions, d’indemnités ou de salaires ; nous l’aidons à sortir d’embarras et à obtenir satisfaction ». Elle se définit dès le départ comme n’étant pas un syndicat révolutionnaire : « Nous réprouvons la lutte de classes qui tourne finalement au détriment de tous les éléments de la profession ; nous présentons nos revendications avec énergie et fermeté, toujours avec correction. »
43Deux mois après sa fondation, la nouvelle organisation rencontre son premier succès, en participant le 15 mars à la signature à Saint-Servan de la charte-partie des voiliers à moteur armant à la grande pêche, aux côtés des représentants du syndicat CGT. À l’automne, dans une lettre aux évêques, Lebret tire un premier bilan de l’action menée :
« Il ne faut pas s’illusionner sur la portée de cet événement. Les effectifs de la nouvelle fédération, comparés aux effectifs de la Fédération cégétiste ou même de la fédération unitaire, sont peu importants ; mais ce qui compte, c’est que la doctrine sociale chrétienne commence à trouver dans le milieu maritime, par la voie syndicale, son expression. […] L’effet moral de nos formations syndicales est considérable ; elles habituent le marin à ne plus compter sur la seule CGT ou sur les seuls politiciens. »
44Plus loin, il se félicite de la victoire obtenue en mars par le SNEB : « Pour la première fois une charte-partie a été signée à la fois par les délégués cégétistes et le syndicat chrétien. Comme le syndicat chrétien groupe plus de grands pêcheurs que le syndicat cégétiste, il sera désormais difficile de se passer de lui. » Les effectifs du SNEB sont alors en augmentation rapide, 360 terre-neuvas et 50 à 100 pêcheurs côtiers à la fin 193249.
45En juillet, la FFSPM s’est dotée d’un organe : La Voix du marin. Le SNEB bénéficiait jusque-là de deux colonnes dans L’Effort, le journal de l’union régionale CFTC Bretagne et Maine. C’est le journal L’Ouest-Éclair qui prend à sa charge l’impression du journal et le déficit de la première année, estimé à 7 000 francs pour un budget de 17 000 francs50. La toute jeune fédération est également fortement aidée par la CFTC et l’Église : la première s’est engagée à prendre en charge le salaire de Lamort pendant trois années, la seconde par l’intermédiaire des diocèses de Rennes et de Saint-Brieuc assure l’équilibre du budget. Le clergé voit en effet d’un très bon œil le lancement chez les pêcheurs d’un syndicalisme chrétien, dont l’objectif est
« […] d’empêcher le groupement de nos marins chrétiens par des institutions anti-chrétiennes, de substituer aux syndicalismes de lutte des classes et de revendication, un syndicalisme d’organisation et de collaboration en vue du bien commun, d’arracher enfin aux hommes de gauche le monopole du bienfait rendu51 ».
46Cette aide financière de l’Église restera discrète car comme l’indique Lamort à Frédéric Lebaigue, permanent de la fédération et chargé du Finistère à partir de novembre 1934 : « Sur l’origine de cet argent qui, de fait, sortira, ou du secrétariat social ou du clergé, il vaut mieux, je crois, ne rien dire, car les marins sont défiants à l’égard du clergé52. » La FFSPM reçoit le soutien moral des milieux catholiques sociaux, notamment lors du congrès social maritime breton organisé à Quimper en novembre 1932. Consacré à l’étude de la situation des professions maritimes en Bretagne, il appelle à « la réorganisation d’ensemble des professions maritimes, quelque chose comme une reprise de l’œuvre de Colbert sur un nouveau pied, et aboutissant à des institutions corporatives sous un certain contrôle de l’État53 ». Ce programme ambitieux suppose que la FFSPM parvienne à s’implanter chez les pêcheurs artisans.
Une implantation inégale auprès des pêcheurs artisans
47Si le SNEB connaît un accroissement rapide et important de ses effectifs, déclarant compter 600 marins de la grande pêche et 50 à 100 pêcheurs côtiers en janvier 1934 et près de 900 membres en avril 193554, le développement des autres syndicats est plus difficile. En avril 1933, Lamort écrit à Bernard, responsable du syndicat du quartier de Paimpol, qu’il « n’entend plus beaucoup parler du syndicat de Paimpol ; mais cependant il existe et il faut qu’il tienne jusqu’au bout, même avec un nombre restreint de cotisants ». Il lui recommande de ne pas avoir « peur, ni honte d’avouer le faible nombre de vos cotisants ». Bernard lui répond que le syndicat ne regroupe que 26 syndiqués. Un plus tard les effectifs ne sont plus que de 23 personnes. Le syndicat du quartier de Lannion semble avoir disparu dès 1932. Il est remplacé par celui de Trégastel, fondé le 9 octobre. L’existence de celui-ci est également brève. En effet, fin 1934, aucune cotisation n’a été réglée. Lamort, nullement surpris, car il sait « par expérience que le marin ne s’intéresse qu’aux réalisations immédiates », demande néanmoins au secrétaire « de conserver les archives et les cachets du syndicat aussi longtemps que cela sera nécessaire ». Toujours dans les Côtes-du-Nord, la FFSPM a reçu le renfort en 1933 du syndicat jusque-là indépendant de Plérin-sous-la-Tour, qui existe depuis 192755.
48Après ses débuts mitigés, les dirigeants de la FFSPM décident de s’implanter sur les côtes du Finistère. Le 9 janvier 1933 un syndicat, présidé par Jules Ascouët, est fondé à Douarnenez. Moins d’un mois plus tard une organisation similaire se constitue à Tréboul avec à sa tête Emmanuel Marec. Jean Vigouroux devient le secrétaire salarié des deux organisations. Mais la FFSPM ne parvient pas à s’implanter : en août 1934, Lamort écrit à Vigouroux qu’il « doute de pouvoir organiser Douarnenez et Tréboul. Il nous restera d’avoir eu le mérite d’essayer de les sauver. Notre conseil va se réunir et décidera si nous devons continuer ou laisser se dissoudre ces deux syndicats ». C’est la seconde hypothèse qui est retenue et en octobre, Lamort indique à Vigouroux qu’il est licencié : « Nous ne pouvons actuellement avoir un libéré pour les sardiniers, qui ne veulent avoir aucun rapport avec nous56. » Cet échec est contrebalancé par la réussite que connaît Frédéric Lebaigue à Camaret. La constitution du syndicat des pêcheurs langoustiers de Camaret a lieu le 18 janvier 1934 en présence de 600 pêcheurs. Le 11 mai, 800 pêcheurs langoustiers, venant des ports de Camaret, Molène, Le Conquet, Ploubaslanec, Léchiagat-Guilvinec et de l’île de Sein, se réunissent à Camaret pour réclamer un contrôle plus strict des importations. En septembre, Lebaigue annonce à Lamort que les syndicats de Camaret, Molène et du Conquet comptent respectivement 887, 135 et 94 membres. En janvier suivant, il parvient même à constituer une section de pêcheurs langoustiers à Douarnenez. En mars est fondé un syndicat de pêcheurs sardiniers à Camaret, alors qu’un autre existe à l’île de Sein depuis le 24 septembre 193357.
49La FFSPM parvient également à organiser les goémoniers du Nord-Finistère : dès 1933, des syndicats de goémoniers se constituent à Plouguerneau, Landéda, Lanildut, Portsall-Ploudalmézeau et Loctudy. Ils se regroupent dans le syndicat général des goémoniers bretons qui adhère à la FFSPM en février 1934. Les cours de l’iode sont alors en chute libre du fait de la suppression du contingentement. La Voix du marin estime que les 5 000 goémoniers n’ont en moyenne gagné que 3 200 francs pour l’année 1933. Le 13 mai, un accord sur les prix d’achat de l’iode est conclu entre le syndicat des fabricants d’iode et celui des goémoniers58.
50Le développement de la FFSPM ne se limite pas au Finistère. En octobre 1933 est fondé le syndicat chrétien des marins de Saint-Nazaire et en novembre 1934, l’amicale des inscrits maritimes du Pouliguen rejoint la fédération. Dans le Morbihan, le syndicat mixte des marins et patrons pêcheurs de Port-Louis dans le Morbihan s’affilie à l’été 1934. Se pose alors la question de l’aire de recrutement de la FFSPM et de ses relations avec les deux autres fédérations réformistes. Dès novembre 1933, Lamort écrit au président des syndicats chrétiens de Basse-Normandie pour l’inciter à créer des organisations chez les marins. Des tentatives sont faites, mais elles ne débouchent pas sur la constitution de syndicats. À l’inverse, dans le port de Grand-Fort-Philippe dans le Pas-de-Calais, s’est constitué un syndicat affilié à la FFSPM. Le syndicat des marins libres de Boulogne, fondé en 1931, a également rejoint la fédération. En 1934, d’autres syndicats du Nord de la France, comme celui de Dieppe, souhaitent adhérer, mais Lamort leur répond que cela est impossible en raison de l’existence depuis mai 1933 de la Fédération des armateurs, patrons et marins pêcheurs du Nord de la France, avec laquelle les relations sont assez difficiles59.
51En dépit d’un certain nombre d’échecs, la FFSPM connaît un fort développement. En septembre 1933, lors de son assemblée générale qui se tient à Sainte-Anne-d’Auray, elle déclare regrouper 2 838 adhérents dans vingt syndicats. Deux ans plus tard, lors de son assemblée générale de Brest, elle compte désormais 3 350 adhérents. Seulement deux sont extérieurs à la Bretagne : les syndicats de Grand-Fort-Philippe et de Bône en Algérie, qui regroupe uniquement des borneurs60. En trois ans d’existence, la FFSPM est devenue une fédération représentative dans le secteur de la pêche artisanale. Elle est de plus à l’origine de l’Entente interfédérale des pêcheurs de France.
La constitution de l’Entente interfédérale des pêcheurs de France
52En décembre 1934, Lamort se rend à Étel au congrès de la Fédération des pêcheurs à la part de l’Océan et propose la mise en place d’une inter-fédération entre la FFSPM, la « fédération Lamort » et la « fédération du Nord61 ». Dès le 15 décembre est constituée à Saint-Malo l’Entente interfédérale des pêcheurs de France entre les deux premières. De prime abord, cette entente surprend car la FFSPM se réfère à la doctrine sociale de l’Église et la « fédération Tristan » se proclame laïque. Mais cette alliance semble au départ se réaliser sans difficulté. À l’inverse, l’adhésion de la « Fédération du Nord » est plus difficile.
53Elle rejoint pourtant l’Entente dès le 21 février 1935. Mais Lamort critique fortement l’abbé Gerrebout et la manière dont il gère son organisation. Il fait un compte rendu très dur du congrès de Saint-Omer auquel il assiste en septembre 1935. À la suite de ce congrès, Georges Perdrault, président du syndicat des marins de Dunkerque, écrit une lettre pleine de reproches à Gerrebout :
« Le conseil fédéral qui gouverne l’association n’existe pas pour vous. Vous seul coupez, tranchez, et prenez sans le dire des décisions qui nous engagent tous. Or vous n’êtes ni marin ni professionnel. […] J’étais prêt à vous accorder ma confiance mais après le congrès du 8 je vous la refuse désormais. Je continuerai à combattre vos méthodes chaque fois que l’occasion se présentera62. »
54En réponse à une lettre de Lamort qui lui fait part de ses réserves au sujet du congrès, Gerrebout répond qu’il est prêt à collaborer et qu’il ne faut pas tenir compte des attaques de Perdrault :
« Vos critiques au congrès étaient bien inutiles. […] Collaborons, cela servira mieux que des réserves publiques et répétées même s’il y a des réserves à faire. Vous n’ignorez pas que le capitaine Perdrault s’est fait une spécialité de ces critiques, les archives de la fédération en ont un stock de ses lettres qui renferment un maximum de critiques, un vide absolu d’idées et tout cela va jusqu’à une violence et parfois une grossièreté qui ne lui font pas honneur. »
55Pourtant les critiques de Perdrault ne sont pas isolées puisque le syndicat des marins du Tréport a décidé de quitter la Fédération du Nord pour rejoindre la FFSPM. La situation se simplifie au début de 1936 : après une tournée de Lamort dans les ports du Nord en mars, un congrès extraordinaire de la Fédération du Nord se tient à Étaples le 5 avril. La dissolution de la fédération est votée, l’ensemble des syndicats présents souhaitant adhérer à la FFSPM. Une certaine autonomie est préservée avec la création d’un groupement du Nord. Il est présidé par Magniez de Calais, assistés de Pauchet, de Berck et Perrault, d’Étaples, comme vice-présidents. Perdrault devient secrétaire et trésorier. Gerrebout est nommé membre d’honneur63.
56Alors que le problème de la « fédération du Nord » est réglé, c’est avec la Fédération des pêcheurs à la part de l’Océan que les relations se dégradent. En effet, alors qu’elle a été créée fin 1934, l’Entente ne semble pas avoir d’existence alors qu’un congrès est prévu en décembre 1935 à Paris64. Le 8 novembre, le père Lebret adresse une longue lettre à Tristan pour lui faire part de ses inquiétudes :
« Le temps du syndicalisme facile des groupements autour de quelques revendications me semble passé. Si vous voulez réussir aussi bien dans la Fédération de l’Océan que dans l’Entente interfédérale, il me semble qu’il faut instituer un syndicalisme très solide et exigeant à doctrine précise et à forte armature. Pour gagner des adhérents, accepter la collaboration de syndicats fictifs, sans cotisation, qui n’envoient aux réunions que des observateurs sans mandat, c’est condamner indéfiniment votre effort – qui est un peu le mien par ricochet – à la stérilité. […] Tant que les usiniers ou les mareyeurs sentiront devant eux un syndicalisme des pêcheurs sans cohésion, vous ne saurez aboutir à des accords stables et pratiquement effectifs. […] La solution me semble donc de renforcer assez le centre interfédéral pour qu’il puisse suppléer aux fédérations, et cela exige que les fédérations aient assez de vie ; pour que les cotisations rentrent, cela exige à la base un syndicalisme solide, des gens convaincus. »
57Lebret n’est pas le seul à douter de la solidité de la Fédération des pêcheurs à la part de l’Océan. Dans une note libellée « Position vis-à-vis de Tristan, strictement personnelle », Andouard, permanent de la FFSPM, écrit qu’il doute de la conception qu’a Tristan du syndicalisme :
« S’il s’agit de faire un syndicalisme qui n’en a que le nom, où sont indistinctement convoqués les coopératives ou les syndicats ; que ces syndicats adhèrent, ou non, à la fédération ; que les syndicats paient ou non leurs cotisations, que les délégués font une réunion décisionnelle avec ou sans mandant, il est évident que tout ceci n’est pas sérieux et compromet gravement la cause syndicale elle-même65. »
58Le congrès de l’Entente interfédérale a finalement lieu. L’ouverture des travaux est faite par Alphonse Rio, sénateur du Morbihan, ancien ministre de la Marine marchande et président de la Commission de la Marine au Sénat66. Cette présence est contraire aux souhaits de la FFSPM qui souhaitait que la première journée, destinée à « préciser l’attitude corporative interne », soit réservée aux délégués des syndicats adhérents et à jour de leurs cotisations. Début 1936, l’Entente déclare alors regrouper 8 217 marins, 700 pour la Fédération du Nord, 4 167 pour celle des pêcheurs à la part de l’Océan et 3 350 pour la FFSPM. Mais les cotisations rentrent difficilement : si la FFSPM a alors payé l’ensemble de ses cotisations, soit 14 000 F pour 3 350 membres, seuls 200 adhérents de la Fédération des pêcheurs à la part de l’Océan sur plus de 4 000 ont réglé les leurs. Pour la Fédération du Nord, l’écart est moins grand : 270 adhérents sur 700 sont à jour67.
59La réalité de l’Entente interfédérale des pêcheurs de France ne correspond pas aux ambitions des responsables de la FFSPM. Pour eux, elle doit être une véritable interfédération, avec une doctrine, des moyens et des dirigeants compétents nommés par ceux de l’Entente. Or cette position n’est pas celle de Tristan, qui semble considérer l’Entente comme une structure souple permettant d’avoir plus de poids auprès des pouvoirs publics et des armateurs. Il n’envisage nullement une fusion à terme des deux fédérations, ce qui par contre ne déplairait pas à la FFSPM. N’y a-t-il pas dès le départ incompatibilité entre la Fédération des pêcheurs à la part de l’Océan dont le but n’est que « de coordonner et de diriger l’action des syndicats dans l’étude et la défense des intérêts professionnels et économiques des marins pêcheurs et propriétaires de parts » selon l’article 2 de ses statuts68 et la FFSPM qui défend une réorganisation corporative des pêches maritimes.
Le plaidoyer de la FFSPM en faveur d’une réorganisation des pêches maritimes
60Les dirigeants de la FFSPM considèrent que les pêcheurs ne sont pas des salariés mais des producteurs qui ont des intérêts communs avec l’armement. Influencés par les idées corporatistes qui reposent sur le principe d’une organisation de la profession avec la participation des différentes catégories sociales à la réglementation et à sa protection69, ils se prononcent pour la mise en place d’une véritable organisation corporative de la profession maritime, unie autour de l’idéologie du « bien commun » qui se substitue à l’intérêt général. En 1935, Lamort développe ces propositions dans un ouvrage intitulé Vers la réforme corporative de la Marine marchande70. Pour lui, « le salut ne saurait venir sans que les professionnels y contribuent. Dans l’état actuel des institutions, il est permis d’affirmer que seuls les professionnels unis peuvent arriver à enrayer le mal et sauver l’avenir ». Face à ce qu’il considère comme la « faillite des idées jusqu’ici régnantes », il défend l’idéologie du « bien commun » qu’il oppose à l’intérêt général :
« L’intérêt général, caprice de foule, ambition de financiers ou d’administrateurs, aspirations et revendications des masses : quelque chose de mal défini, d’impossible à fixer. En même temps principe de luttes incessantes, d’égoïsmes et de rancunes. Le bien commun, donnée précise, vitale, qui n’est pas à la merci des caprices de la foule, ni de l’oppression des puissants, mais affaire de raison et de morale ; affaire de stabilité et de sécurité, dans le jeu des contraintes nécessaires imposées d’abord par l’amour, avec la sanction des lois. »
61Il pose ensuite les principes d’une véritable organisation professionnelle regroupant l’ensemble des acteurs de la marine marchande. Elle comprendrait l’adhésion obligatoire à un syndicat, la remise aux syndicats d’une partie des fonctions de l’administration, la constitution de régions maritimes et de branches d’industrie, la représentation proportionnelle, la constitution d’un conseil économique et professionnel de la marine marchande composé des représentants des syndicats, l’avis obligatoire de ce conseil sur les projets de loi touchant la marine marchande. Le rôle de l’Inscription maritime est repensé : ses pouvoirs de juridiction et de protection dans l’assistance et l’assurance des marins seraient renforcés, le tout en étroite collaboration avec l’organisation professionnelle. Ce programme global de réorganisation corporative s’accompagne de propositions précises afin de résoudre la crise des pêches maritimes.
62Lamort se prononce contre les 8 heures de travail par jour et pour un long congé familial : congé du samedi soir au lundi matin pour la petite pêche, trois jours pleins par quinzaine avec un dimanche ou un congé total de deux mois une ou deux fois l’an pour la pêche industrielle, 25 à 35 jours de congés pour le cabotage et le long cours. Enfin, dans la grande pêche, huit mois de travail devrait suffire pour vivre les quatre mois qu’il reste. Il est également favorable au roulement des équipages pour limiter les périodes de chômage dans la marine de commerce, la substitution de l’embarquement par compagnie à l’embarquement par navire.
63La FFSPM plaide également pour l’organisation des marchés et la limitation « de la production à la consommation71 ». Elle réclame la mise en place de comités interprofessionnels par type de pêche, associant armateurs, pêcheurs et pouvoirs publics. Elle se félicite donc de la création en novembre 1935 du Comité interprofessionnel du hareng puis en janvier 1936 du Comité interprofessionnel des grandes pêches72. Au sein de ce comité, elle se voit attribuer un des deux sièges réservés aux pêcheurs. C’est la première fois que la FFSPM est reconnue comme une organisation syndicale représentative au niveau national. En effet, alors que le SNEB avait participé à l’accord signé en mars 1932 sur les chartes-parties des voiliers à moteur armant à la grande pêche, il n’a pas été invité aux négociations des chartes-parties des voiliers à moteurs et des chalutiers en 1933 et 1934. En avril 1935, une nouvelle demande de participation aux commissions paritaires a été rejetée par le ministre de la Marine marchande en avril 193573.
64En raison des divergences en matière d’analyse économique et sociale des pêches maritimes et la très faible participation de Lamort aux instances confédérales, les relations avec la CFTC se dégradent. En janvier 1936, la subvention à la FFSPM est réduite à 5 000 francs74.
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65À la veille de l’arrivée au pouvoir du Front populaire, le syndicalisme maritime semble avoir retrouvé une certaine vigueur. La FNSM CGT, qui ne regroupe qu’un peu plus de 10 000 inscrits lors du congrès confédéral d’unité de la CGT en mars 1936 contre 26 000 en 192175, doit faire face dans les pêches maritimes à la concurrence de l’Entente interfédérale des pêcheurs de France et plus précisément de la FFSPM qui est en passe d’être reconnue comme une organisation représentative. La syndicalisation des pêcheurs artisans va être l’un des enjeux de la période qui s’ouvre.
Notes de bas de page
1 AN 52AS444, préparation de la loi d’aide à l’armement libre, 1931 et Le Radiotélégraphiste, oct. 1931.
2 Marie-Pierre Delaban, op. cit., p. 41 et 54.
3 Les Annales maritimes, mars-juin 1934.
4 AN 52AS445, rapport de J. H. Ricard sur l’intervention de l’État dans la gestion des compagnies maritimes, 1933.
5 Ministère de la marine marchande, Notre marine marchande, Paris, 1932 et 1933.
6 Marie-Pierre Delaban, op. cit., p. 166-183.
7 AN F 7 13769, syndicats confédérés, unitaires et autonomes de marins, 1933.
8 La Vie ouvrière, 5 janvier 1934.
9 AN F 7 13770, syndicats confédérés, unitaires et autonomes de marins, 1934.
10 AN 52AS474, accord du 18octobre 1934 sur les salaires.
11 AN 52AS447, effectifs embarqués dans la marine marchande.
12 AN F7 13770 et AD SM 1M566, activité des syndicats des inscrits et des agents du service général du Havre et de Rouen, 1934.
13 La Vie ouvrière, 20 juillet 1934.
14 Le Cri du marin, décembre 1934 et janvier 1935.
15 Antoine Prost, op. cit., p. 190 et Jean-Jacques Doré, op. cit., t. 2, p. 96.
16 AN F7 13770, syndicats confédérés, unitaires et autonomes de marins, 1934.
17 AN F 7 13769, syndicats confédérés, unitaires et autonomes de marins, 1933 ; Émile Temime, Histoire de Marseille de la Révolution à nos jours, Paris, Perrin, p. 237-238 et Collectif, Les néo-socialistes girondins, Bordeaux, Institut aquitain d’études sociales, 1988, p. 50.
18 La Voix du peuple, janvier 1935.
19 AD SM 1M566, syndicats des inscrits et des agents du service général duHavre, 1935; Le Cri du marin, février-mars 1935 et La Voix du peuple, janvier-septembre 1935.
20 Dominique Borne et Henri Dubief, op. cit., p. 104-113.
21 Georges Lefranc, Le mouvement syndical sous la Troisième République, Paris, Payot, 1967, p. 326.
22 La Voix du peuple, octobre-novembre 1935.
23 La Voix du peuple, janvier 1936 ; notices de Pierre Ferri-Pisani, de Charles Pasquini et d’Eugène Heitz dans le Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français.
24 Pierre Ferri-Pisani, Sur le syndicalisme maritime, Marseille, Union syndicale des marins de commerce, 1933.
25 Le Radiotélégraphiste, août 1930 et mars 1931.
26 AD SM 4M515, Fédération nationale des officiers radiotélégraphistes de la marine marchande.
27 L’Officier radiotélégraphiste de la marine marchande, avril 1934 à janvier 1936.
28 Les Annales maritimes, avril-décembre 1932.
29 Les Annales maritimes, mars 1935 à janvier 1936.
30 AN 52AS474, salaires des états-majors, 1934.
31 Les Annales maritimes, janvier 1935.
32 AN 52AS474, salaires des états-majors, 1935.
33 Les Annales maritimes, novembre-décembre 1935.
34 Claude Vauclare, op. cit., p. 278-282.
35 La Voix du marin, juin 1936.
36 AN F7 13890, crise sardinière à Saint-Jean-de-Luz, 1934.
37 Jean Jolly (dir.), Dictionnaire des parlementaires français. Notices biographiques sur les ministres, députés et sénateurs de 1889 à 1940, Paris, PUF, 1980, t. 8.
38 AD M10M102, statuts de la Fédération des syndicats de marins pêcheurs et propriétaires de bateaux de pêche à la part de l’Océan.
39 Bruno Béthouart, op. cit., p. 167.
40 La Voix du marin, juillet 1932.
41 AN 45AS11, dossier « Dix années de vie militantes ».
42 André Chomel, « Des débuts du mouvement de Saint-Malo à la Fondation d’Économie et Humanisme, 1930-1942 », Les Amis du père Lebret, n° 1, mai 1981, p. 2.
43 Secrétariat social maritime, Aspects maritimes de la crise mondiale, Juvisy, Éditions du Cerf, 1933.
44 Geneviève Oberthur, « L’ami des marins : Ernest Lamort », Les cahiers de la vie à Cancale, n° 11, 1987, p. 53-57.
45 AN 50AS1, création de la Fédération française des syndicats professionnels de marins, 1931.
46 AN 50AS25, 33 à 35, relations avec les sections de Cancale, Plouër, Saint-Jacut-de-la-Mer, Saint-Cast.
47 Pascal Roger, Le syndicalisme chez les inscrits maritimes du quartier de Saint-Malo des origines à 1939, mémoire de maîtrise, université Rennes 2, 1995, p. 58-64.
48 AN 50AS33, relations avec le syndicat de Paimpol et de Lannion.
49 AN 45AS11, correspondance, 1932 et La Voix du marin, décembre 1932.
50 AN 50AS 2, relations avec la CFTC, 1932 et 50AS6, La Voix du marin.
51 AN 45AS11, correspondance, 1931.
52 AN 50AS24, relations avec le syndicat de Camaret.
53 Premier congrès social maritime breton, La Bretagne maritime – sa structure économique, sa détresse, comment la sauver, Paris, Société d’éditions géographiques, maritimes et coloniales, 1933.
54 La Voix du marin, janvier 1934 et avril 1935.
55 AN 50AS33 et 38, relations avec les syndicats du quartier de Paimpol, Trégastel et Plérin-sous-la-Tour.
56 AN 50AS27, relations avec le syndicat de Douarnenez.
57 AN 50AS24, relations avec le syndicat de Camaret et La Voix du marin, octobre 1933.
58 La Voix du marin, mars-juillet 1934. Sur le goémon, voir François Pellennec et Jean-Charles Trédunit, Au temps de la voile dans la rade de Brest, Spézet, Coop Breizh, 1998, p. 124-126.
59 La Voix du marin, relations avec les syndicats de Normandie, septembre 1934 et AN 50AS26, 27, 30 et 34, relations avec les syndicats de Cherbourg, Dieppe, Grand-Fort-Philippe, du Pouliguen et de Saint-Nazaire.
60 AN 50AS1, bilan financier de l’année 1935 ; 50AS13, assemblées générales, 1933 et 1935.
61 L’Ouest-Éclair, 10 décembre 1935.
62 AN 50AS13, congrès de la Fédération du Nord à Saint-Omer le 8 septembre 1935.
63 AN 45AS10 et 50AS20, relations avec la Fédération du Nord, 1936 et La Voix du marin, mai 1936.
64 AN 50AS41, budget prévisionnel 1935 de l’Entente interfédérale des pêcheurs de France.
65 AN 50AS20, relations avec les syndicats régionaux affiliés et 50AS41, Entente interfédérale des pêcheurs de France.
66 La Voix du marin, décembre 1935.
67 AN 50AS1, effectifs et état des cotisations réglées à l’Entente interfédérale des pêcheurs de France début 1936.
68 ADM 10M102, statuts de la Fédération des syndicats de marins pêcheurs et propriétaires de bateaux de pêche à la part de l’Océan.
69 Sur l’influence des idées corporatistes dans les milieux politiques et syndicaux français dans les années 1930, voir Isabel Boussard, « Les corporatistes français du premier xxe siècle. Leurs doctrines, leurs jugements », Revue d’histoire moderne et contemporaine, n° 40, octobre-décembre 1993, p. 643-665 et Georges Lefranc, « Le courant planiste dans le mouvement ouvrier français de 1933 à 1936 », Le Mouvement social, n° 54, janvier-mars 1966.
70 Ernest Lamort, Vers la Réforme corporative de la Marine marchande, Saint-Servan, FFSPM, 1935.
71 La Voix du marin, juillet 1932.
72 La Voix du marin, décembre 1935 à février 1936.
73 La Voix du marin, juin 1935.
74 AN 50AS2, relations avec la CFTC.
75 Antoine Prost, op. cit., p. 193.
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