Chapitre IV. La fragmentation du syndicalisme maritime (1924-1932)
p. 97-123
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Texte intégral
1La victoire du cartel des gauches lors des élections législatives de mai 1924 et la formation, un mois plus tard, d’un gouvernement dirigé par Édouard Herriot1 sont accueillis favorablement par les fédérations syndicales maritimes modérées. Ils espèrent en effet que le nouveau sous-secrétaire d’État à la Marine marchande, le député de Seine-Inférieure Léon Meyer, sera à l’écoute de leurs revendications, notamment sur l’application de la loi des 8 heures de travail journalier. Des grèves dirigées par les unitaires se déroulent en effet au cours du mois d’août 1924 au Havre, à Saint-Nazaire et à Nantes2. Afin d’enrayer la montée du mécontentement au sein du personnel de la marine de commerce, et alors qu’il a rejeté le 9 février la demande de hausse des salaires faite par la FNSM, le CCAF annonce le 22 août le retour à la grille de salaires de 1920, ce qui équivaut à une hausse moyenne de 15 %3. Léon Meyer met en place une commission pour examiner l’application du décret Rio. Elle aboutit au décret du 31 mars 1925 qui définit la durée du travail effectif « comme celle pendant laquelle le personnel est à la disposition du capitaine » et instaure trois « quarts » pour le service au pont et à la machine pour limiter le service à 8 heures. C’est donc le retour à la loi du 2 août 1919 et au décret du 24 février 19204. La FNSM, dont le congrès fédéral de février 1925 a vu la confirmation du départ de Rivelli avec la réélection au poste de secrétaire général d’Ehlers, se félicite de cette décision gouvernementale et annonce qu’elle va désormais lutter pour la mise en place de conditions uniques d’engagement5. En mai 1925, Rivelli, Chachuat et Ehlers sont nommés pour trois ans membres du Conseil supérieur de la marine marchande, organisme consultatif fondé en 1896 et composé de représentants de l’administration, de personnes qualifiées des armateurs et des personnels navigants6. La FNSM est définitivement reconnue par l’État comme une organisation représentative des inscrits maritimes, et suffisamment réformiste pour être admise au sein de structures étatiques. Rivelli est d’ailleurs également membre de la Commission extraparlementaire de la marine marchande et du conseil d’administration de la Caisse des invalides.
2Mais, alors qu’elle a longtemps été la seule organisation syndicale du personnel subalterne de la marine de commerce, elle connaît dorénavant la concurrence non seulement de la Fédération unitaire de la marine marchande et des pêches fondée en juillet 1923, mais aussi d’un groupement autonome, l’Union syndicale des marins de France, issu des rangs unitaires et de nombreux syndicats indépendants. De plus, à partir de 1927, elle entre dans deux années de turbulences et de scissions, à la suite de la signature avec le CCAF d’un accord contesté sur les conditions d’engagement. La division du syndicalisme maritime devient donc très grande, avec de nombreuses fédérations ne regroupant souvent que quelques milliers d’inscrits.
3Mais avant d’étudier plus longuement ces années d’atomisation du syndicalisme du personnel subalterne de la marine marchande et des pêches maritimes, arrêtons-nous brièvement sur la situation des organisations syndicales des officiers au cours de cette période. Deux d’entre elles connaissent de fortes tensions internes. La Fédération des syndicats de capitaines au long cours, toujours dirigée par François Mas qui est également le président de la Fédération des syndicats de pilotes de France, voit le départ en 1928 du syndicat du Havre : celui-ci refuse toute négociation nationale des salaires et des contrats d’engagements que les officiers de la Compagnie générale transatlantique ont l’habitude de traiter directement avec leur direction7. La Fédération des officiers radiotélégraphistes de la marine marchande, officiellement déclarée en 1924, suspend en 1925 la section de Marseille, coupable d’avoir réintégré Casanova, signataire en 1921 d’un accord salarial jugé très mauvais avec la CRM8. En 1930, la section de Marseille, accompagnée par celle de Bordeaux, finit par quitter la fédération en raison de désaccords profonds sur l’attitude à avoir face à la CRM9. En dépit de ces difficultés internes, les différentes fédérations d’états-majors fondent en juin 1929 l’Union interprofessionnelle des états-majors, présidée par Mas10. Jusqu’au début des années 1930, les relations des fédérations de capitaines et d’officiers avec les organisations confédérées, unitaires et autonomes du personnel subalterne de la marine marchande sont quasiment inexistantes.
La nébuleuse des syndicats unitaires et autonomes (1924-1928)
4Après des débuts prometteurs, notamment au Havre, la Fédération unitaire de la marine marchande et des pêches ne parvient pas à s’implanter durablement et devient très vite squelettique. Elle connaît dès le printemps 1924 la concurrence de l’Union syndicale des marins de France, organisation autonome à vocation nationale fondée par Henri Julie, après son « exclusion » de la Fédération unitaire11. Cette exclusion semble être liée à l’utilisation que Julie a faite des fonds mis à disposition par la CGTU : en juin 1924, les dirigeants du syndicat CGT des marins du Havre l’accusent d’avoir touché, en 1923, 37 000 francs de la CGTU. Selon une note du ministère de l’Intérieur de novembre 1924, Julie a été exclu pour avoir dilapidé la somme de 35 000 francs destinée à la propagande.
5En dehors des organisations unitaires et autonomes, existent dans certains ports, comme Les Sables-d’Olonne ou Saint-Jean-de-Luz, des syndicats indépendants de toute structure nationale. Ils s’illustrent lors des incidents entre pêcheurs bretons, vendéens et basques pendant les campagnes de pêche de 1926 et 1927.
La faiblesse du syndicalisme unitaire chez les inscrits maritimes
6À peine un an après sa création, la Fédération unitaire de la marine marchande et des pêches est totalement désorganisée. Elle n’a plus de publication nationale, car Henri Julie a réussi après son exclusion à conserver le titre La Bataille du marin, qui était au départ l’organe des unitaires12. Dès la fin 1924, elle fusionne avec la Fédération unitaire des ports et docks13. Jean Cueff devient le nouveau délégué à la propagande de la CGTU auprès des inscrits maritimes.
7Les syndicats unitaires du Havre et de Rouen ne résistent pas à la création de l’Union syndicale des marins de France et disparaissent dès l’été 1924. Celui de Bordeaux périclite également et pas moins de six secrétaires se succèdent à sa tête en moins de trois ans. La propagande des unitaires reprend en 1927, mais sous une forme différente, avec l’ouverture d’un Cercle international des marins, qui jouit « d’une certaine autonomie pour garder l’apparence d’une organisation purement humanitaire ». Cueff échoue également dans sa tentative en 1926 de créer un syndicat unitaire à Marseille. À la même époque, le syndicat unitaire des inscrits de Saint-Nazaire, fondé en août 1924, ne donne plus de signe de vie14.
8Les unitaires rencontrent les mêmes difficultés auprès des pêcheurs. À l’automne 1924, Cueff a entrepris une tournée de propagande dans le Sud-Finistère. Il tient des réunions à Audierne, Pont-l’Abbé et Douarnenez. Dans cette ville, un syndicat est constitué début novembre. La longue grève victorieuse des ouvrières des conserveries de sardines de novembre et décembre 192415, dans laquelle la CGTU joue un grand rôle, laisse entrevoir des possibilités d’implantation durable. En mars 1925, La Vie ouvrière écrit que six syndicats d’inscrits du Finistère ont adhéré à la CGTU. Une tournée de propagande se déroule en avril dans le Morbihan. En mars, un syndicat unitaire des inscrits maritimes, pêcheurs et ostréiculteurs du quartier de Marennes et de l’île d’Oléron est constitué16.
9Mais peu de syndicats unitaires dépassent le stade de la première réunion. L’écart est souvent très grand entre les orientations de la CGTU et les revendications des pêcheurs : celles des inscrits du quartier de Marennes, par exemple, portent sur l’attribution des concessions, les prises d’eau, le fonctionnement de l’Office scientifique et technique des pêches maritimes, la destruction des étoiles de mer et la chasse aux marsouins, la Caisse d’invalidité et de prévoyance et la liberté de pêche. Même le syndicat de Douarnenez, sur lequel l’influence du maire communiste de la ville, Daniel Le Flanchec, est forte, n’est pas dans la ligne puisqu’il est dirigé par des patrons-pêcheurs, qui sont également conseillers municipaux comme le secrétaire général Joseph Pencalet. Charles Tillon critique cette alliance avec les patrons-pêcheurs, souvent à la tête de coopératives ou liés au Crédit maritime17. Les vues théoriques de la direction communiste de la CGTU sont bien éloignées de la réalité du monde des pêches maritimes. Pourtant, une des bases sociales des unitaires pourrait être les pêcheurs artisans, patrons ou non, menacés par l’industrialisation en cours de la pêche.
10À la fin de 1926, un bilan négatif des tentatives d’implantation de la CGTU chez les pêcheurs peut être tiré. Cela n’empêche pas la tenue d’un congrès des marins pêcheurs unitaires à Lesconil les 19 et 20 décembre. Sont présents des délégués de Douarnenez, Lesconil, Lechiagat et du Guilvinec, ce qui confirme que l’aire d’influence de la CGTU reste limitée à la côte sud du Finistère. « Dans l’idée des organisateurs, ce congrès doit marquer le début d’une campagne d’agitation, comme chaque hiver, au moment où le pêche ne donnant plus, le mécontentement est facile à provoquer et à exploiter chez les marins pêcheurs18. » Mais cette campagne d’agitation n’aura pas lieu. Quasiment à la même date, la Fédération unitaire de la marine marchande et des pêches est supprimée et les rares syndicats unitaires d’inscrits intégrés à la Fédération nationale des ports et docks, transports et manutention, marine marchande et pêche19. Ce constat d’échec n’entraîne pas pour autant l’arrêt de la propagande unitaire auprès des inscrits maritimes. Celle-ci reprend de plus belle à la fin de 1927, quelques mois après une grève des pêcheurs sardiniers bretons.
11Fin mai 1927, les pêcheurs de Penmarch se mettent en grève pour demander la suppression du Comptoir français de l’industrie des conserves alimentaires, qui est le seul acheteur de poisson dans le port. Celui-ci refuse fréquemment les sardines, jugées soit trop grosses, soit trop petites, obligeant ainsi les pêcheurs à chômer plusieurs jours de suite. Le préfet du Finistère est d’ailleurs très critique vis-à-vis de l’attitude des usiniers :
« Les patrons conduisent la grève comme ils gèrent leurs usines, à une distance de plusieurs centaines de kilomètres ! S’ils habitaient dans le pays et étaient en contact journalier avec les pêcheurs et la population, ils auraient une mentalité moins fermée aux contingences et il est fort probable que leur attitude serait toute autre. On peut s’en rendre compte par ce simple fait, qu’actuellement, leur grande préoccupation est de savoir si le nombre des gendarmes est suffisant pour protéger leurs usines le cas échéant ! […] À Penmarch même, il n’est pas douteux que la population souffre de la faim, dans le sens physique du mot. »
12Abandonnant la question de la suppression du comptoir, les revendications se focalisent sur le prix d’achat du poisson. Fin juin, le mouvement s’élargit aux autres ports du Sud-Finistère, puis à ceux du Morbihan, de Loire-Inférieure et de Vendée. Le 6 juillet, les marins de La Rochelle, en grande partie originaires de Douarnenez, entrent en grève par solidarité. Un accord, valable seulement pour 15 jours, est conclu le lendemain à Nantes. Des prix d’achat du poisson sont fixés : 375 francs les 100 kg en Vendée, 400 francs dans le Morbihan et 450 francs dans le Finistère. Les unitaires qui ont tenté de prendre le contrôle du mouvement, tout en passant un accord avec les syndicats indépendants existants, ont été écartés des négociations conduites par des patrons pêcheurs et en particulier par le président du syndicat des Sables-d’Olonne, Emmanuel Garnier20.
13Malgré cet échec, les unitaires organisent les 3 et 4 décembre à Quimper un second congrès national des marins pêcheurs. Celui-ci prend position contre la rationalisation des pêches :
« L’industrialisation de la grande pêche est arrivée à un tel degré de développement que certains chalutiers du Nord dépassent en tonnage et en puissance un grand nombre de caboteurs. […] Le Maroc sera bientôt aménagé pour concurrencer les ports bretons. Chômage et bas salaires en perspectives21. »
14Le même mois paraît le premier numéro du Cri du marin. Cette publication est éditée par les Clubs internationaux de marins. De tels clubs, qui sont en fait des lieux de propagande communiste, existent alors à Marseille et Bordeaux. Les unitaires reconnaissent dans Le Cri du marin leur faiblesse chez les inscrits maritimes :
« Bien qu’elle n’ait jamais voulu, d’une façon formelle, porter atteinte à l’unité corporative des travailleurs de la mer et, de ce fait, bien qu’elle n’ait pas toujours eu dans ses rangs, les nombreux sympathisants ou actifs qu’elle possède maintenant, la CGTU s’est toujours préoccupée néanmoins de la défense de leurs intérêts22. »
15En 1928, la propagande unitaire s’intensifie dans tous les ports de France. Un congrès régional des pêcheurs méditerranéens a lieu en février à Marseille. Des syndicats sont relancés comme à Bordeaux ou créés comme à Rouen et Dunkerque. Un syndicat général national des pêcheurs de morue est même fondé en mars23. En juillet, Auguste Dumay, ancien responsable du Centre international des marins de Marseille, en charge des pays latins d’Europe au sein du Comité international de propagande et d’action des transports de l’Internationale syndicale rouge, lance une enquête sur la situation dans les différents ports afin d’étudier le lancement d’une nouvelle Fédération des marins. Mais, selon le ministère de l’Intérieur, la fondation d’une telle organisation sera difficile :
« Il semble que le “Comité international de propagande et d’action des transports” et le Parti communiste auront une tâche très difficile à accomplir lorsqu’il s’agira de créer et d’organiser une “Fédération Unitaire des Marins”, les groupements adverses étant décidés à lutter avec la plus grande énergie contre l’ingérence des communistes dans les questions syndicales maritimes. »
16En décembre, la commission exécutive de la CGTU s’interroge sur la nécessité de créer cette fédération. Les syndicats unitaires d’inscrits sont alors squelettiques : 20 à 30 adhérents à Dunkerque, 25 à 30 au Havre, 100 à Rouen, 40 à Marseille et 75 aux Salins-d’Hyères ; soit au total moins de 300 selon le ministère de l’Intérieur24.
17Cette faiblesse des organisations unitaires maritimes s’explique en partie par le succès rencontré dans les ports de commerce du Nord de la France par les autonomes de l’Union syndicale des marins de France.
Le syndicalisme autonome de l’Union syndicale des marins de France
18Dès son exclusion de la CGTU, Henri Julie s’emploie au lancement d’une nouvelle organisation, l’Union syndicale des marins de France. Après plusieurs réunions en juin et juillet, la section havraise de l’Union est formée. Elle revendique 3 500 membres. Julie en est le secrétaire général et André Bassaler, le trésorier25. Ce syndicat devient très vite la première organisation chez les inscrits du Havre, avant de créer en 1926 une section à Dunkerque.
19Le 2 août 1924, Julie déclenche une grève sur le navire Lafayette de la Compagnie générale transatlantique avec comme revendication une hausse des salaires de 5 francs par jour. Le mouvement s’étend rapidement à tous les navires de la compagnie. Pour tenter d’enrayer le conflit, il est procédé à l’arrestation de Julie. Mais celle-ci provoque la généralisation de la grève à tous les navires présents dans le port. Le 22 août, un accord est finalement trouvé avec la signature entre le CCAF et la FNSM d’une augmentation générale des salaires équivalente à 4 francs par jour. Même si le syndicat autonome a été exclu des négociations nationales, il connaît au Havre un afflux d’adhésions et devient plus puissant que le syndicat CGT, contre lequel il n’hésite pas à employer la force : le 13 août, Bassaler, accompagné d’une vingtaine de marins, investit le local de la CGT pour faire démissionner le secrétaire général, Joseph Le Gonidec, et récupérer la caisse. L’ancien secrétaire Montagne, qui passait par là, s’interpose armé d’un revolver. Quelques heures plus tard, il est roué de coups par des inconnus alors qu’il se trouve à la terrasse d’un café26.
20Durant tout l’automne, les incidents et arrêts de travail se multiplient dans le port du Havre. Face à cette offensive, la FNSM réagit et, en décembre, Durand et Ehlers viennent relancer le syndicat des marins en pleine déliquescence. L’Union syndicale des marins de France se définit comme un « groupement de marins partisans de la lutte de classes », « syndicaliste révolutionnaire » qui refuse l’adhésion des chefs de service27. Début 1925, Julie est remplacé au poste de secrétaire général par Marcel Huard. Une offensive est lancée sur le port de Dunkerque, où le syndicat CGT est dirigé par Ehlers, le secrétaire général de la FNSM.
21En janvier et février 1926, les autonomes organisent de nombreuses réunions à Dunkerque et perturbent celles des confédérés. Un syndicat affilié à l’Union syndicale des marins de France est finalement constitué à la mi-mars avec comme secrétaire général Georges Guérin et comme trésorier Pierre Audo. Il revendique 233 membres. En 1927, Guérin est remplacé par Albert Besserve. Le syndicat autonome, avec 600 adhérents en mai et près de 1 000, en décembre met en difficulté le syndicat membre de la FNSM, qui compte lui aussi un millier d’adhérents. L’enjeu est d’importance pour Ehlers qui n’hésite pas à se rendre à Dunkerque dès que le besoin s’en fait sentir. Mais son organisation ne regroupe plus que les inscrits naviguant sur certains bateaux de la Compagnie du Nord, ceux des services locaux des Ponts et Chaussées et des services portuaires – remorquage, lamanage et pilotage28.
22En décembre 1927, une section de l’Union syndicale des marins de France est fondée à Rouen. Ce groupement connaît trois secrétaires généraux en moins d’un an pour finalement être dirigé à partir de septembre 1928 par Alphonse Canonne, ancien mutin de la mer Noire29. En février de la même année, les représentants des trois syndicats autonomes ont fondé la Fédération nationale des syndicats autonomes de marins. Besserve en devient le secrétaire général et Bassaler le trésorier. La Fédération revendique 5 600 adhérents, 4 000 au Havre, 1 400 à Dunkerque et 200 à Rouen. La Bataille du marin devient l’organe mensuel de la fédération, qui se définit comme la « seule capable d’opposer à la rationalisation capitaliste de nos armateurs, une organisation de la production et de la répartition du travail, qui donnera aux travailleurs la place qui leur revient dans la Société30 ».
23Fin juillet, les autonomes déclenchent une grève au Havre et à Dunkerque suite au refus par les armateurs de la hausse des salaires demandée. Il s’agit également de faire pression sur les négociations nationales en cours, dont la fédération autonome est exclue. Bassaler parvient à assister le 8 août à titre consultatif au conseil d’arbitrage. L’arbitrage pour les conflits dans la marine marchande existe de nouveau depuis la loi du 25 septembre 1925. Il reste facultatif mais le gouvernement dispose d’un moyen de pression efficace sur les armateurs et les inscrits : la menace de la suppression du monopole du pavillon31. Dès le lendemain, Bassaler appelle à la reprise du travail, expliquant que l’indemnité de nourriture a été portée à 14 francs par jour grâce à l’action des autonomes. Or il n’en est rien, puisque la décision du conseil d’arbitrage n’est rendue que le 17 septembre. Elle porte l’indemnité de nourriture à 15 francs et rejette les autres revendications présentées. Les syndicats FNSM de Marseille et de Dunkerque dénoncent alors le « nouveau bluff », « le nouveau mensonge » et « l’éloquence ridicule » des autonomes32.
24Le syndicat autonome de Dunkerque connaît alors une petite crise interne : le 21 septembre, les dénommés Boulet et Le Neindre sont exclus pour avoir pris la parole lors du congrès de l’union régionale des syndicats unitaires. Ils publient alors un tract dans lequel ils dénoncent les autonomes qui adoptent « la tactique des chefs réformistes, envers les ouvriers révolutionnaires » en décidant leur exclusion, et appellent à rejoindre la CGTU. Fin novembre, Joachim Boulet devient logiquement secrétaire général du tout jeune syndicat unitaire des marins de Dunkerque33.
25En quatre ans d’existence, les autonomes de l’Union syndicale des marins de France puis de la Fédération nationale des syndicats autonomes de marins sont parvenus à s’implanter fortement dans les ports du Havre, de Dunkerque et de Rouen. Cette organisation n’est pas la seule à n’être affiliée ni à la CGT, ni à la CGTU. Sur la côte atlantique, de nombreux syndicats indépendants de pêcheurs sont actifs.
Les syndicats indépendants de la côte atlantique
26Ces organisations sont les héritières des syndicats mixtes. En 1909, il en existe quatre en Vendée, aux Sables-d’Olonne, à Noirmoutier, à Saint-Gilles et à Croix-de-Vie. Celui de l’île d’Yeu apparaît en 1911. Au pays Basque, les pêcheurs de Saint-Jean-de-Luz s’organisent en 191934. Dans tous ces ports, ni la CGT ni la CGTU ne parviennent à s’implanter. Il existe aussi des syndicats indépendants dans des ports où les organisations confédérées sont présentes. C’est le cas à Douarnenez à partir de 1926, avec l’apparition d’un syndicat des patrons pêcheurs saisonniers, dont les membres du bureau sont clairement hostiles au communisme et à la CGTU35.
27Tous ont pour principale revendication de bons prix d’achat du poisson par les usiniers. Le recours à la grève n’est pas exclu, mais seulement lorsque les négociations ont échoué. Une autre préoccupation est la défense de la priorité d’achat du poisson des marins locaux. En effet, en Vendée, à partir du début des années 1920, les usiniers arment des bateaux à moteur montés par des marins bretons, prétextant le refus des pêcheurs locaux de se moderniser. Or, le nombre de ces bateaux ne cesse de croître dans la flottille vendéenne : aux Sables-d’Olonne, il passe de 5 en 1920 à 30 en 1923 et à 120 en 192436. À Saint-Jean-de-Luz, où les Bretons ont l’habitude de venir pêcher pour la saison, un accord est conclu en 1925 pour fixer le maximum de sardines que chaque bateau peut rapporter de la pêche. Mais le syndicat local a décidé début 1926 de ne plus admettre en son sein de marins étrangers au port, alors que, jusque-là, ceux-ci cotisaient au syndicat luzien tout au long de leur présence dans le port. De plus, les bateaux étrangers ne peuvent plus vendre leur pêche avant que celle des bateaux luziens n’ait été livrée. Le différend porte aussi sur les méthodes de pêche : les Luziens pêchent au filet droit et les Bretons à la bolinche. Enfin, les Basques ne peuvent pêcher au-dessus du phare de Contis dans les Landes selon un accord avec les pêcheurs d’Arcachon, de La Rochelle et Bordeaux37. Déjà très tendue, la situation finit par dégénérer à la fin de l’été et à l’automne 1926.
28Cette année-là, la pêche à la sardine, si capricieuse, est nulle en Bretagne. Les marins bretons descendent donc sur les côtes vendéennes et basques. Le 5 août, aux Sables-d’Olonne, un navire breton est empêché de débarquer et une partie de son chargement est jetée à l’eau. Le 11 septembre, les bateaux rentrent tard et beaucoup sont obligés de jeter une partie de leur pêche, car les usiniers ont déjà acheté ce qu’il leur fallait. Les esprits s’échauffent. Le 17, des échauffourées éclatent entre Sablais et Bretons. Le lendemain matin, des pinasses bretonnes sont endommagées. Dans l’après-midi, les marins bretons quittent le port des Sables. Ils n’y reviendront pas car les conserveries s’engagent à acheter d’abord aux pêcheurs des Sables, et pour le surplus seulement aux étrangers. Cet exemple fait tache d’huile dans les autres ports concernés. À Noirmoutier, les pêcheurs entrent en grève le 20 septembre pour protester contre les bateaux à moteur bretons qui pêchent avec des doris. Un accord est trouvé dès le 22, les Bretons se soumettant aux exigences du syndicat des pêcheurs : pas plus de deux doris par bateau38.
29À Saint-Jean-de-Luz, les navires bretons sont en nombre dès la fin octobre alors qu’ils arrivent normalement plus tard. La CGTU, qui a envoyé sur place Tillon et Berracochéa, dénonce la stratégie des usiniers et appelle les pêcheurs basques à la solidarité pour que chacun puisse travailler et exiger de meilleures conditions d’achat de la sardine :
« Les Bretons ne demandent qu’à travailler, ils seront toujours aux côtés des Basques pour les aider à défendre leurs droits, mais ils ne cesseront pas d’affirmer que les conditions du travail actuel ne profiteront ni aux Bretons, ni aux Basques, mais seulement à quelques exploiteurs qui construisent leurs fortunes sur la misère commune. Éliminer les marins bretons, c’est briser les espérances du petit commerce, résultat désastreux que toute la population citadine et rurale condamnera avec nous. »
30Le 3 novembre, des bagarres éclatent à la sortie d’une réunion organisée par les unitaires à Ciboure. Tillon et Berracochéa sont arrêtés pour outrage au commandant de gendarmerie. Les bateaux bretons ne sortent pas en mer, faute d’être certains de pouvoir vendre leur pêche. Le syndicat des pêcheurs luziens propose que le nombre de navires saisonniers soit limité à 12 et leur pêche à 20 000 sardines et 500 kg de maquereaux. Les Bretons refusent car ils estiment que les gains seront insuffisants. Finalement les bateaux bretons quittent un à un le port et le calme revient lentement39.
31En mars 1927, sous l’égide du ministère des Travaux publics, les pêcheurs des Sables-d’Olonne acceptent la venue en nombre illimité des bateaux saisonniers bretons, en échange de la possibilité offerte aux Sablais de vendre leur pêche à La Rochelle jusque-là approvisionnée seulement par les Bretons. Ceux de Saint-Jean-de-Luz refusent quant à eux tout accord, estimant la production locale suffisante pour alimenter les usines et le mareyage40. Afin d’éviter le renouvellement des incidents, Emmanuel Garnier, le président du syndicat des marins pêcheurs des Sables-d’Olonne, envisage de fédérer tous les marins de la côte atlantique41.
32À cette nébuleuse de syndicats indépendants, autonomes et unitaires, vient s’ajouter la division de la FNSM, suite à la signature en mai 1927, d’un accord avec le CCAF sur les conditions uniques d’engagement.
La crise interne de la FNSM (1927-1929)
33Le nouvel objectif de la Fédération des inscrits maritimes CGT est d’obtenir des conditions uniques d’engagement dans la marine marchande. Le 13 décembre 1926, après cinq années d’examen par le parlement, est votée la loi portant réforme du Code du travail maritime. Le contrat d’engagement est désormais davantage réglementé et protégé : l’armateur ne peut plus retenir à son profit tout ou partie de la solde du marin déserteur ; il ne peut plus charger le capitaine de nourrir à forfait ou d’exploiter un économat pour la vente des denrées aux marins ; il a la charge des objets de couchage ; le marin a dorénavant la liberté de se faire soigner par le médecin de son choix en cas de blessure ou de maladie en cours de voyage ; enfin la paie doit être faite en présence de l’autorité maritime42. La FNSM se félicite de toutes ces avancées. Tout en continuant de revendiquer des augmentations de salaires et la revalorisation des pensions qui font l’objet d’un congrès extraordinaire à Paris du 26 au 29 août 192643, elle juge que le moment est venu de conclure avec le CCAF un accord sur les conditions d’engagement. Jugé inacceptable par de nombreux syndicats, cet accord provoque l’explosion de la fédération réformiste, d’autant plus facilement que les tensions internes sont déjà très fortes.
L’accord du 15 mars 1927 sur les conditions uniques d’engagement et ses conséquences
34L’orientation du bureau fédéral de privilégier les négociations avec les armateurs – trois hausses générales des salaires, comprises entre 9,5 et 13 %, sont accordées par le CCAF en décembre 1925, juin et octobre 192644 –, ne fait pas l’unanimité au sein de la FNSM. Les syndicats de Bordeaux, La Rochelle et une partie des syndiqués marseillais considèrent qu’une grève bien menée permet de faire céder les armateurs et d’obtenir la satisfaction des revendications comme à La Rochelle lors de la longue grève du printemps et de l’été 1925. Les marins rochelais obtiennent un salaire fixe de 345 francs par mois, 23 francs garantis par jour de navigation et un salaire mensuel de maladie de 530 francs45. En septembre de la même année, le syndicat des marins de Lorient obtient sans cessation du travail l’application dans ce port de l’accord de La Rochelle46.
35De plus, certains syndicats n’hésitent pas à enfreindre la légalité quand cela leur semble nécessaire. Les marins marseillais qui pratiquent ce type d’actions sont d’ailleurs rappelés à l’ordre en juin 1926 par les dirigeants du syndicat :
« Nous ne voulons point contester aux camarades de manifester comme il leur convient ; mais nous nous faisons un devoir de rappeler à tous, que pour permettre de prendre la défense des intérêts corporatifs, il est indispensable que ces manifestations se produisent dans le cadre de la légalité, c’est-à-dire en prévenant le commandant du navire 24 heures avant l’expédition du rôle d’équipage. […] Ceux d’entre nous qui ne se conformeraient pas à ces recommandations se verraient de ce fait refuser le concours des dirigeants, la poursuite disciplinaire devant suivre son cours47. »
36Les divergences se manifestent lors du congrès de la FNSM de février 1927 : les syndicats de Bordeaux et de La Rochelle ne participent pas à l’élection du conseil national et Auguste Durand n’est pas réélu au conseil national et au bureau. Il est remplacé au poste de trésorier adjoint par Antoine Martres, secrétaire du syndicat de Marseille depuis décembre 192348.
37Le 15 mars, un accord sur les conditions uniques d’engagement est finalement conclu entre la FNSM et le CCAF. Il ne concerne que les navires de commerce au long cours et au cabotage, à l’exception des voiliers. Dès la signature de l’accord les syndicats de La Rochelle et de Bordeaux se retirent de la fédération : ils reprochent aux dirigeants fédéraux d’avoir
« […] signé avec le CCAF un accord relatif au contrat unique d’engagement des marins du commerce qui fera retourner nos camarades aux temps odieux où les marins n’avaient que des devoirs et pas de droits correspondants, qui supprime les conditions d’accessoires de salaires acquises et appliquées49 ».
38Certains articles marquent en effet des retours en arrière : l’article 1 indique que « le voyage est réputé commencer le jour de la revue d’armement ; si toutefois, cette formalité accomplie il se produit un événement fortuit ou de force majeure empêchant le navire d’effectuer le voyage prévu, l’équipage pourra être débarqué en totalité ou en partie sans qu’il y ait lieu à indemnité » ; l’article 6 autorise le capitaine à envoyer l’équipage sur un autre navire de la compagnie pour « l’assister, assurer sa manœuvre, ses travaux d’armement ou de désarmement », le tout sans indemnité particulière ; l’article 20 prévoit que le matériel fourni à chaque homme doit être maintenu par lui en bon état de conservation et que « si lors de la remise de ce matériel par les intéressés, il est constaté des détériorations ou des manquants, des déductions effectuées sur les salaires seront opérées ». Ces trois articles sont d’ailleurs jugés illégaux au regard du Code du travail maritime par le ministre des Travaux publics qui oblige armateurs et syndicalistes à revoir leur copie. Un accord modifié est signé le 12 août 1927 pour une durée d’un an50. Mais le mal est fait : les démissionnaires de la FNSM se sont regroupés dès le mois d’avril dans une nouvelle fédération et ne sont pas décidés à rentrer dans le rang.
39Du 6 au 9 avril 1927, se déroule à Paris le congrès fondateur de la Fédération nationale des laboureurs de la mer. Aux syndicats de Bordeaux et de La Rochelle se joignent ceux du Havre, de Rouen, Dieppe et Arcachon, ainsi que certains Marseillais. Rivelli est élu président de la nouvelle organisation et Durand secrétaire général, assisté de Le Gonidec et Brégent. Dans le journal qu’ils créent en même temps que la fédération, les scissionnistes déclarent que
« […] leur démission résulte de l’attitude malveillante prise par certains dirigeants fédéraux et sectionnaires à l’égard de leur ancien secrétaire et camarade Rivelli, dont le dévouement à la cause des travailleurs de la mer ne se démentit jamais pendant ses 22 ans de fonctions, de la constatation qu’il n’y avait plus au sein de la Fédération, d’unité morale, d’administration confiante, de collaboration loyale ; des abdications répétées du bureau fédéral devant une section et des manifestations prétentieuses de néophytes fédéralistes, dont les intentions et les projets sont insaisissables… »
40Rivelli estime quant à lui « la rupture pénible, mais nécessaire », rappelle son action pour la FNSM et règle ses comptes :
« Je l’ai créée de toutes pièces, dans une atmosphère de défiance générale corporative, patronale et gouvernementale ! […] Je lui avais voué une âme. Si elle ne m’a pas pris la vie, ce n’est que la faute à une constitution d’acier chromé. Je lui ai sacrifié liberté, loisirs, famille, tout ce qui fait la joie et la raison de vivre. J’ai été pour elle calomnié, vilipendé, torturé, mis en prison, exploité sans limite, traité comme un misérable coquin. […] En 1922, je me battis de toute l’énergie de mon désespoir pour empêcher la consommation du crime prémédité par le gouvernement contre la classe ouvrière. En septembre 1923, grièvement blessé par l’échec de notre mouvement de défense de la loi de 8 heures, meurtri par le spectacle des dissentiments sectionnaires, […] je résignais mes fonctions avec douleur. […] Depuis, j’eus à subir de nouvelles désillusions, de nouvelles grandes blessures. […] Elles prenaient, malheureusement, source dans les bas et mesquins sentiments d’orgueil d’anciens collaborateurs, dans la vile action de néophytes fédéralistes qui prétendaient assassiner mon passé. […] Je suis resté fidèle aux militants fédéralistes qui ne savent oublier leur vieux et fidèle serviteur51. »
41Fin avril la FNSM répond à ces accusations et dénonce les agissements des « félons » :
« Nous pensons qu’il nous suffira de dénoncer leur félonie à tous les marins du commerce, sans leur laisser ignorer que ces trois comparses (Le Gonidec, Durand, Sonnier52), n’ont cessé de placer leurs intérêts particuliers avant l’intérêt général, et que ce n’est que parce que le dernier congrès ne leur a pas permis de réaliser leurs desseins qu’aujourd’hui ils viennent de découvrir leur honteuse manœuvre. […] Nous déclarons publiquement que n’ayant rien à cacher, à nous reprocher, nous sommes prêts à répondre en tous temps et en tous lieux aux attaques perfides venant de la part de gens qui n’ont vu, dans le syndicalisme qu’un but de vivre et satisfaire des intérêts personnels ; la Fédération reste debout, resserrons nos rangs pour barrer la route aux démagogues et aux ambitieux53. »
42En dépit de ses dénégations, le coup est rude pour la FNSM qui a perdu en moins de deux mois la moitié de ses adhérents. Après plusieurs réunions et assemblées générales houleuses, et le remplacement de Martres par Pierre Ferri-Pisani, l’important syndicat des marins de Marseille décide de rester affilié à la FNSM : Martres est d’abord mis en minorité à la mi-mai 1927 à la suite d’un accord entre communistes et partisans de Rivelli, avant que Pierre Ferri-Pisani, le secrétaire de Simon Sabiani, conseiller général et chef du parti socialiste-communiste, ne soit élu secrétaire général début juin, « avec deux fois plus de voix que de votants » selon Jean-Baptiste Nicolaï54. Le syndicat des marins CGT de Marseille va être un des principaux acteurs de la difficile réunification.
Une réunification impossible ?
43Le 7 septembre, les laboureurs réunis à Paris déclarent qu’ils sont prêts à se dissoudre et à rejoindre la FNSM. Celle-ci, qui tient un congrès extraordinaire le lendemain, accepte55.
44Mais la fusion ne se fait pas. En effet, aucune remise en cause de l’accord conclu en mars avec le CCAF n’est prévue. Durand, qui n’avait accepté de revenir à la FNSM que pour renverser le bureau fédéral, décide donc de maintenir la Fédération des laboureurs. Le conseil national de la FNSM du 15 novembre prend acte de l’attitude de ceux qui refusent la fusion et réaffirme sa confiance au bureau fédéral56.
45En 1928, les laboureurs se rapprochent de la Fédération nationale des syndicats autonomes de marins fondée en février. En avril 1927, ces derniers avaient pourtant dénoncé les premiers et demandé « à tous les inscrits maritimes de laisser de côté tous ces “ARRIVISTES” qui ne pensent qu’à leur place et à la conserver à n’importe quel prix, et de rentrer avec nous au sein de nos syndicats révolutionnaires, où une fois solidement groupés, nous irons encore à la bataille pour faire rendre gorge à nos exploiteurs57 ». La fusion des deux fédérations se produit lors d’un congrès à Paris, les 23 et 24 décembre. Elle aboutit à la création de la Fédération nationale des travailleurs de la mer avec à sa tête deux secrétaires généraux, Besserve et Durand, et deux trésoriers, Le Gonidec et Tachat du Havre. Elle se dote d’un organe fédéral Le Maritime, fusion du Laboureur de la mer et de La Bataille du marin, dans lequel elle rappelle que « parmi nous, il n’y a aucun signataire de l’inique contrat d’engagement du 15 mars 1927, rien que des militants qui l’ont dénoncé, mis en échec… » et indique qu’il
« […] n’est plus question de suivre des personnalités, de se figer dans une tendance doctrinaire politico-syndicaliste, mais de rétablir l’harmonie de notre grande famille sous le signe de la solidarité, dans une fédération unique indépendante de tout clan politique, puissante par le nombre et la conscience de ses adhérents, respectée de ses adversaires, estimée, aimée de tous les gens de mer58 ».
46Début 1929, les dissidents de la FNSM sont en position de force. Le 4 mars le syndicat confédéré des inscrits de Rouen, dirigé par Jules Milox, successeur en 1927 de Sonnier qui a rejoint les Laboureurs de la mer, fusionne avec le syndicat local des travailleurs de la mer59. La FNSM est très affaiblie, d’autant plus que le syndicat des marins de Marseille est de plus en plus critique. Dès novembre 1927, il a déploré l’attitude du bureau fédéral, l’accusant d’une interprétation abusive des statuts :
« Il n’est dit nulle part dans ces statuts qu’on nous rétorque si souvent, que le rôle des secrétaires des sections soit d’encenser les membres du bureau fédéral pour lesquels l’infaillibilité n’est point encore décrétée, et nous avons la faiblesse de croire et de tenir à notre droit de contrôle et de critique, seul frein à vos passions autocratiques dont nous regrettons de ne vouloir supporter le poids. […] Prononcez vos exclusions, pétrifiez-vous en un geste de vendeurs de timbres, mais laissez à nos conseils d’administration la liberté de vous dire qu’ils vous désapprouvent et qu’ils déplorent amèrement les circonstances desquelles vous abusez au détriment des syndicats et de la corporation60. »
47En juillet 1928, Rivelli et Ferri-Pisani ont fondé un nouveau journal, Le Sifflet maritime, au sous-titre évocateur : Organe provisoire d’union syndicale et corporative des gens de mer61. En s’alliant avec Rivelli, Ferri-Pisani confirme son désaccord avec Ehlers. Le bureau fédéral de la FNSM propose alors « aux Laboureurs de réintégrer sans délai la FNSM pour qu’un congrès de toutes les sections puisse en septembre procéder à la désignation des nouveaux membres du bureau, émanation sincère de la majorité du Congrès ». La publication du Sifflet maritime est suspendue car l’unité est réalisée de fait. Mais le congrès prévu n’a pas lieu et les Laboureurs, comme nous l’avons évoqué plus haut, continuent leur action62.
48En décembre, le conseil national de la FNSM vote une résolution sur l’unité corporative :
« Le conseil national de la FNSM, appelé à préciser sa pensée sur la question de l’unité corporative, […] tient tout d’abord à affirmer avec force son ardent désir, en même temps que sa ferme volonté, de la réaliser le plus rapidement possible dans la corporation, sans aucun autre but que celui de la défense des intérêts du prolétariat maritime. Considérant que les frictions des doctrines, loin de diminuer l’esprit combatif des organisations, développent en la concrétisant l’action à mener, mais que cette action, une fois définie par les Congrès, et cela après la confrontation des thèses qui s’y sont loyalement affrontées, doit pour porter ses fruits, être rigoureusement respectée par toutes les organisations adhérentes. Considérant que les statuts de la FNSM laissent à ses syndicats adhérents une autonomie pleine et entière en ce qui concerne leur action au point de vue local, de même que leur droit à critique et d’opinion, sans leur demander autre chose que le respect des décisions prises dans ses Congrès et Conseils nationaux. Confirmant ses résolutions antérieures, déclare que pour que l’unité se fasse saine et durable, elle doit être réalisée au sein de la FNSM et de la vieille CGT, comportant l’engagement du respect de la charte partie de l’indépendance du syndicalisme63. »
49Mais le processus de fusion reste au point mort. Seule la démission d’Ehlers semble pouvoir le débloquer. Elle se produit en février 1929 lors du congrès de la FNSM. Il quitte « la barre, pour prendre rang de simple matelot dans la barque fédérale » et est remplacé par Ferri-Pisani. Il ajoute qu’il « ne regrette rien, sinon, que ce geste n’a pas fait comprendre leur devoir aux dissidents, qui pourtant ne manquaient pas de laisser entendre que c’était [sa] présence au bureau fédéral qui les empêchait de revenir à la Fédération ». En mars, le nouveau bureau fédéral de la FNSM rend « hommage à l’esprit de sacrifice d’Ehlers » et
« […] déclare vouloir continuer à œuvrer dans le but de réaliser [l’unité corporative] ayant par ailleurs appris par expérience que c’est seulement dans le sein de l’organisation majoritaire que pourront s’amalgamer tous les désirs sincères et désintéressés d’unité. Faisant abstraction des personnes, il offre une place égale à tous les syndicats maritimes, ne leur demandant que le respect des décisions majoritaires64 ».
50Mais la Fédération nationale des travailleurs de la mer se refuse toujours à intégrer la FNSM. Ses dirigeants veulent une fusion dans une nouvelle fédération. La fusion a néanmoins lieu en mai 1929 mais elle est incomplète, certains dirigeants des travailleurs de la mer préférant rester dans l’autonomie, et d’autres rejoindre la Fédération unitaire des marins et pêcheurs.
Une fusion incomplète
51Un congrès extraordinaire des syndicats maritimes se tient le 14 mai. Il est présidé par le secrétaire général de la CGT, Léon Jouhaux. Tous les syndicats qui le souhaitent sont intégrés. La Fédération nationale des travailleurs de la mer est dissoute dès le 19 mai. Le congrès décide que la fédération unifiée sera dirigée par une commission administrative jusqu’au prochain congrès65.
52La crise de la FNSM semble donc terminée. Mais très vite des tensions réapparaissent. Le 18 mai un accord est signé avec le CCAF66. Il est contesté lors du conseil national de juillet. En effet, il prévoit l’application du contrat d’engagement du 12 août 1927 et la suppression de tous les avantages acquis après cette date. Les signataires se justifient par la nécessité d’aboutir vite et par la grève en cours à Saint-Nazaire. Les opposants les plus virulents sont les responsables du syndicat du Havre, Le Gonidec et Tachat, qui refusent de l’appliquer67.
53En septembre, se déroule un nouveau congrès de la FNSM. Après le refus d’Ehlers, à qui il est proposé de retrouver son poste, Cupillard du Havre devient secrétaire général, Piétroni trésorier et Eugène Heitz de Saint-Nazaire secrétaire adjoint. Ehlers est désigné comme représentant de la fédération au sein de l’Organisation internationale du travail (OIT) à Genève. Le calme est revenu au sein de la fédération confédérée, qui regroupe tout juste 10 000 adhérents68. La fusion reste toutefois incomplète car une partie des dirigeants de la Fédération des travailleurs de la mer, et notamment les anciens membres de la Fédération nationale des syndicats autonomes de marins, n’acceptent pas l’unité au sein de la CGT.
54Ce refus des anciens autonomes de fusionner dans une fédération affiliée à la CGT n’est guère surprenant, au regard de la virulence avec laquelle ils ont combattu ses orientations et celle de la FNSM depuis 1924. Dès le mois d’avril 1929, un syndicat autonome est relancé à Dunkerque : l’Union syndicale des travailleurs de la mer, dirigée par Audo et Bassaler69. En juillet, Le Gonidec, pourtant membre jusqu’en 1927 de la FNSM, fait de même au Havre. Il lance le journal L’Horizon maritime dont le premier numéro paraît en septembre. Chachuat, devenu secrétaire du syndicat CGT, met en cause dans un tract l’ego de Le Gonidec et sa gestion financière :
« L’amour de sa personnalité étant telle qu’il ne considère ceux qui collaborent avec lui que comme quantité négligeable et comme corvéables à sa merci, et c’est là camarades le vrai motif pour lequel il est impossible de collaborer avec lui ; c’est pour avoir eu l’audace de lui demander des comptes et ne pas vouloir subir son joug qu’il a usé envers un de vos représentants de moyens abjects mais dont je lui laisse l’entière responsabilité, et j’en appelle à vous tous camarades pour exiger des comptes et faire respecter vos statuts, faire voir à cet individu que vous seuls êtes les maîtres et pour exiger un contrôle expertise de ce qui vous appartient. »
55Le Gonidec a en effet refusé en juillet la compression des dépenses du syndicat, qui compte alors cinq permanents touchant chacun 1 400 francs par mois. L’Union syndicale des pêcheurs et marins du commerce réunis de France, nouveau nom du syndicat autonome, parvient à s’implanter au Havre puisqu’en décembre 1929 le nombre de ses adhérents est estimé à 3 000 contre 2 000 au syndicat confédéré et 700 au syndicat unitaire créé au début de l’année70. Une longue note du CCAF, datée du 2 décembre 1929, est consacrée aux agissements de Le Gonidec et aux risques de contagion :
« [Sa] propagande est d’autant plus grave que M. Le Gonidec n’hésite pas à recourir à des procédés d’action syndicale absolument intolérables. Le système employé est celui de la violence, préconisé par les adeptes de la CGTU : pour être certain de faire fléchir l’armement, M. Le Gonidec, après avoir soigneusement travaillé l’équipage qu’il exhorte à la lutte et à l’action directe pendant tout le séjour du navire dans le port, présente une réclamation au nom de cet équipage, au moment même où le navire est sur le point d’appareiller, et alors que les remorqueurs sont déjà le long du bord. […] Il est à craindre que si cette pratique continuait d’être tolérée l’exemple de M. Le Gonidec ne soit bientôt suivi, étant donné les résultats très fructueux qu’il a recueillis lors de la campagne engagée au Havre contre l’armement. »
56Cette note apporte également un éclairage intéressant sur le point de vue des armateurs sur les relations sociales dans la marine marchande :
« Désireux d’arriver à créer [une] atmosphère de paix sociale indispensable, les armateurs ont établi avec la Fédération nationale des syndicats maritimes, organisation la plus représentative des marins français et par l’intermédiaire du Comité central des armateurs de France, des relations suivies depuis 1926. Le régime de la collaboration et des accords collectifs qui en sont la conséquence, est en effet le seul dont on puisse légitimement attendre la suppression de tout conflit général ou même local. Les représentants qualifiés des marins souscrivent au nom de tous leurs camarades des engagements bilatéraux. Les difficultés résultant de l’application de ces engagements doivent, ainsi d’ailleurs qu’il était stipulé dans le texte du récent accord du 19 mai 1929, être résolues par les délégués de la Fédération et ceux du Comité, sans causer le moindre préjudice à l’exploitation : c’est-à-dire qu’en aucun cas le navire ne doit subir le moindre retard, en cas de litige. »
57Les armateurs sont donc devenus très favorables à la conclusion d’accords nationaux avec la FNSM, qui se voit clairement confié le soin de maintenir l’ordre et la discipline au sein du personnel subalterne de la marine marchande71.
58Afin de ne pas rester isolés, les dirigeants qui ont refusé de rejoindre la FNSM, à l’exception de Le Gonidec, rejoignent la Fédération unitaire des marins et pêcheurs, dont le congrès de fondation se tient en effet les 23 et 24 mai 1929. Deux anciens autonomes, Bassaler et Audo, et un ancien confédéré, Milox, se retrouvent au sein du bureau fédéral en compagnie des communistes Dumay, Jean Philippe et H. Guérin. Sadou, lui aussi ancien autonome, devient secrétaire général du syndicat unitaire des marins du Havre. Ce ralliement à la fédération unitaire ne signifie pas pour autant alignement sur les positions des communistes. Dès le début, les autonomes proclament leur opposition à la soumission de l’action syndicale à l’action politique communiste72. La situation s’envenime après le troisième congrès confédéral de la CGTU car Bassaler a alors voté avec la minorité contre le rapport d’activité. En compagnie d’Audo, il démissionne du bureau fédéral. Le Cri du marin d’octobre 1929 leur consacre un article peu élogieux :
« Nous disons à nos camarades Audo, Bassaler et Sadou : il y a un syndicalisme plus dangereux que le syndicalisme de secte que vous semblez craindre. C’est le syndicalisme de secrétaires. Vous avez insisté souvent, camarades, sur l’importance des individus dans le mouvement. Vous savez ce que les marins ont souffert de s’être donnés à certains hommes qui avaient su conquérir leur sympathie comme Rivelli. Grouper les marins autour d’une vague idéologie anarchiste serait les tromper et se tromper soi-même. »
59Fin décembre, Bassaler démissionne du secrétariat du syndicat unitaire de Dunkerque et est remplacé par Toussaint Susini. Il décide de relancer un syndicat autonome73.
60Début 1930, le monde syndical maritime semble donc quelque peu simplifié : deux fédérations d’influences inégales, la FNSM et la FUMP, dominent le paysage. La première sort de deux années de crise, dont les causes réelles semblent être au final à rechercher dans des querelles entre dirigeants attachés au prestige et aux avantages de leur fonction, puisque ceux-là mêmes qui ont dénoncé l’accord de mars 1927 avec le CCAF se sont empressés d’en conclure un très proche en mai 1929. La seconde, très récente, connaît déjà des débats internes importants qui portent sur la conception et l’orientation du syndicalisme unitaire. Une myriade de syndicats autonomes et indépendants continue à exister non seulement dans les ports de pêche, mais aussi dans ceux de commerce. Un syndicat général des pêcheurs de la côte atlantique, dirigé par Emmanuel Garnier des Sables-d’Olonne, est apparu lors du conflit qui touche le secteur de la pêche à la sardine en août 1929. Les pêcheurs réclament à nouveau des prix minimaux d’achat. Le syndicat national des fabricants de conserves alimentaires refuse tout accord national. La reprise de travail est rapide, sauf à SaintJean-de-Luz, où les bateaux ne reprennent la mer que le 7 octobre. Le syndicat général des pêcheurs de la côte atlantique ne survit pas à l’échec du mouvement74. À Marseille, trois organisations regroupant des marins du commerce voient le jour en 1930 : l’Union professionnelle des travailleurs de la mer, dirigée par l’ancien secrétaire général du syndicat CGT Martres, qui est soupçonné d’avoir touché de l’argent de la Compagnie générale transatlantique pour créer un syndicat concurrent à celui de Ferri-Pisani ; l’Union nationale des travailleurs de la mer, financée par le parfumeur Coty, qui fait du placement de main-d’œuvre, et le syndicat indépendant des agents du service général de Marcantetti75.
61Les multiples scissions ont affaibli le syndicalisme maritime. Le nombre total de syndiqués, d’environ 15 000 en 1925, est tombé à un peu plus de 12 000 en 192976. Les fédérations CGT et CGTU, dirigées par des marins du commerce, sont peu implantées dans le secteur des pêches maritimes. L’heure de la resyndicalisation des inscrits maritimes a-t-elle sonné alors que les premiers effets de la crise économique se font sentir tant dans la marine marchande que dans les pêches maritimes ?
L’affaiblissement du syndicalisme maritime au début des années trente
62En juillet 1930, le projet de loi Baudoin de réforme du régime des pensions des gens de mer est enfin adopté. Les deux caisses de retraite et de prévoyance des inscrits maritimes fusionnent dans l’Établissement national des invalides de la marine. La pension des marins est désormais calculée sur le salaire moyen et à 50 ans, avec 180 mois de service, une pension proportionnelle peut être servie. La vieille revendication syndicale de retraite proportionnelle est donc satisfaite77. Si la FNSM se félicite de l’action du gouvernement, la FUMP rejette, elle, toute collaboration avec celui-ci. Les unitaires tentent une nouvelle fois de s’implanter auprès des pêcheurs et des marins du commerce. En dépit d’une intense propagande, l’influence des syndicats affiliés à la FUMP reste marginale et ne remet pas en cause la suprématie de la FNSM qui, de son côté, doit s’opposer aux tentatives du CCAF d’opérer des baisses de salaire pour faire face à une situation économique difficile. Dans les pêches maritimes, les prix de vente du poisson s’effondrent sous l’effet de la concurrence étrangère et de la crise économique. La situation des pêcheurs devient très difficile.
Un syndicalisme unitaire inadapté à la réalité des professions maritimes
63Concurrencée dans la marine marchande à la fois par la FNSM et les syndicats autonomes, la FUMP concentre tous ses efforts auprès des pêcheurs artisans et décide d’organiser un congrès des pêcheurs bretons, les 23 et 24 mars 1930, à Douarnenez. Cette priorité donnée par les unitaires à l’organisation des pêcheurs bretons ne signifie pas qu’ils délaissent les autres. À Boulogne, où Yves Le Cavorzin a fondé un syndicat en février 1929, de nombreuses réunions ont notamment eu lieu durant l’automne, sans déboucher sur l’augmentation des effectifs, qui restent très faibles. À Fécamp, le syndicat unitaire vivote78.
64Dans les textes préparatoires au congrès de Douarnenez, la FUMP explique que
« […] la crise sardinière est le prélude d’un véritable drame du progrès. L’exploitation, dans le sens horizontal, s’opère à un rythme rapide, les usiniers de la conserve accaparent les bateaux, la rogue qui sert à amorcer est trustée et vendue aux pêcheurs à des prix scandaleux, de nouveaux bateaux à moteur, les pinasses automobiles amènent sur les lieux de pêche des dizaines de filets ; l’abondance du poisson même devient un cataclysme pour le petit pêcheur obligé à vendre à des prix tellement inférieurs que, parfois, il préfère rejeter sa capture en mer ».
65C’est donc l’industrialisation en cours des pêches maritimes et « les capitalistes de la conserve » qui sont mis en accusation. « Le congrès [de Douarnenez] devra marquer la création d’un puissant syndicat régional des pêcheurs, arme indispensable pour pouvoir lutter contre les usiniers de la conserve. » Mais les perspectives de réussite d’un tel projet sont minces. Les unitaires notent d’ailleurs que « les pêcheurs ont beaucoup trop confiance dans les solutions qui peuvent intervenir par les compromis du ministère des Travaux publics ou de la Marine ». Le congrès est un échec : il se transforme d’ailleurs en « conférence ». Seulement huit ports sont représentés. Le secrétaire du syndicat unitaire local, Joseph Pencalet, est absent, il est en mer. Et lorsque les prix de la sardine s’effondrent de nouveau en juin 1930, les unitaires sont incapables de lancer le moindre mouvement d’ampleur79.
66Pourtant le choix de la défense des pêcheurs artisans et des ouvriers face aux industriels de la conserve apparaît comme une orientation judicieuse. Mais cette orientation reste secondaire et la FUMP continue de relayer principalement les thèses de la CGTU, appelant par exemple les pêcheurs et les ouvriers à réaliser un « front unique de classe » ou les marins à se mobiliser à la fois « pour la défense de [leurs] intérêts immédiats », « contre les dangers de la guerre » et « pour la défense de la Russie soviétique80 ».
67Fin 1930 la fédération unitaire a échoué dans sa nouvelle tentative d’implantation chez les pêcheurs bretons. De plus, ses dirigeants communistes doivent faire face à la contestation des anciens autonomes qui tiennent les syndicats du Havre et de Dunkerque. La FUMP ne regroupe alors guère plus de 2 000 adhérents81, en métropole mais aussi à Alger et Oran82.
68En janvier 1931, une réorganisation de la fédération « aux syndicats et clubs de marins squelettiques, et n’ayant pour certains jamais existé que sur le papier », est décidée par la CGTU. Lors de la conférence nationale qui se tient en juin, les délégués reconnaissent qu’une certaine effervescence règne chez les marins, notamment sur la question des salaires, mais que, comme dans la plupart des autres corporations, la CGTU ne possède là aucune influence réelle. Il est décidé d’intensifier la propagande en direction des marins originaires des colonies. En décembre, un tract en langue quoc ngu destiné aux Annamites est distribué et des réunions en direction des marins des colonies se déroulent à Dunkerque et au Havre83.
69Un rapport ministériel de novembre 1931 confirme l’extrême faiblesse de la FUMP. Selon celui-ci, « les effectifs de la FUMP sont insignifiants en égard au nombre total des inscrits maritimes et même comparativement à ceux des confédérés ». Seulement quatre sections locales sont répertoriées : Dunkerque (100 adhérents), Boulogne (50), Rouen (300) et Marseille (200). La fédération est toujours divisée entre une majorité dirigée par Dumay, qui admet le rôle dirigeant du Parti communiste, et une minorité qui repousse toute ingérence des partis politiques dans le mouvement syndical et qui est favorable à des actions communes avec les confédérés. En mars 1932, le secrétariat fédéral fait son autocritique dans Le Cri du marin qui reparaît après six mois d’interruption : « Des 200 000 marins pêcheurs français, très peu sont organisés dans notre fédération. […] Chez les pêcheurs, nous avons affaire à des milliers de camarades révoltés. Notre action est des plus faibles. […] Notre influence est encore très petite parmi les 50 000 chômeurs de la navigation. » Après l’échec des unitaires dans la grève des pêcheurs sardiniers bretons de l’été 1932, Dumay est mis en cause et son remplacement décidé. Un congrès fédéral se tient le 11 décembre au Havre. Seulement quatre syndicats et onze délégués y participent. Un nouveau secrétariat fédéral, composé de Baudin, Garan Kouyaté et François Le Minter, est élu. Le siège de la Fédération est transféré à Rouen. Ce changement de direction ne provoque pas de sursaut. La FUMP est exsangue. Les minoritaires autonomes l’ont pour la plupart quittée. À Marseille, Susini a pris la tête du syndicat unique des marins fondé par Simon Sabiani à Marseille pour concurrencer le syndicat CGT dirigé par Pierre Ferri-Pisani, avec qui il s’est brouillé84.
70L’échec de la FUMP ne profite pas à la FNSM. Elle ne parvient pas à augmenter le nombre de ses adhérents et doit faire face aux velléités des armateurs qui souhaitent diminuer les salaires en raison de difficultés économiques croissantes.
Une fédération nationale des syndicats maritimes en difficulté
71Par un courrier du 6 mai 1930, la FNSM résilie les accords signés les 18 mai 1927 et 14 juin 1929 avec le CCAF et demande la modification des conditions générales d’embarquement et le relèvement du taux des heures supplémentaires. Le 23 juin, les armateurs refusent de discuter de ces revendications. Le 4 septembre, une demande de hausse des salaires est déposée. Avant de répondre par la négative en octobre, le CCAF se renseigne sur l’écho de ces revendications dans les ports. Une note de synthèse estime que les syndicats confédérés sont en « déliquescence aiguë85 ».
72Selon l’enquête du CCAF, le bureau fédéral a déposé les revendications évoquées plus haut sous la pression de certains secrétaires de syndicats, qui pensent qu’une agitation autour des questions de salaires peut ramener les marins qui se sont éloignés de leur organisation respective. Il est remarqué qu’aucune assemblée générale de syndicat local n’a été convoquée sur ce thème quatre mois après le dépôt des deux premières revendications. Le risque de mouvement national est donc jugé quasiment nul, et seuls des arrêts du travail de 24 heures sont possibles dans un nombre limité de ports. Au vu de ces données, le CCAF décide courant octobre de rejeter l’ensemble des demandes de la FNSM. Comme prévu, ce rejet ne déclenche aucun mouvement en réaction.
73Un an plus tard, en novembre 1931, un rapport ministériel sur la situation et l’activité des fédérations syndicales de marins nous renseigne sur le « peu d’allant de la fédération confédérée86 ». Dix-sept sections locales sont recensées, principalement dans les ports de commerce : elles sont qualifiées de « dociles aux ordres » (Dunkerque et Calais), « peu actives » (Le Havre, Arcachon), « pondérées » (Saint-Nazaire, Cherbourg). Les effectifs stagnent avec un peu moins de 12 000 adhérents, dont 4 500 à Bordeaux, port d’origine de Durand, secrétaire général depuis le congrès fédéral tenu en septembre87. Afin de relancer la fédération, une tournée des dirigeants de la fédération s’est déroulée en octobre. Il en ressort que les syndiqués ont « confiance surtout dans l’action personnelle des dirigeants, dans leur habilité, dans leur autorité en face des représentants des compagnies ; confiance dans la tactique des grèves limitées de protestation qui suffira à faire reculer les compagnies ». Le rapport se conclut sur le fait que l’on peut « s’attendre dans les ports à une agitation destinée à “freiner” les tentatives des compagnies pour réduire les salaires ou diminuer les frais généraux en désarmant les navires ». C’est ce qui se produit en 1932.
74Les armateurs font en effet part de leur intention d’imposer des réductions de 10 % à compter du 1er janvier 1932. Cette mesure ne sera en fait appliquer qu’au cas par cas et essentiellement dans les ports où les syndicats sont faibles. À Dunkerque par exemple, un vapeur pétrolier prend la mer le 28 décembre 1931 avec des salaires amputés. À l’inverse, les navires des ports de Bordeaux, du Havre ou de Marseille sont épargnés. Mais une autre menace plus grave pèse sur les marins : le désarmement des bateaux. À Bordeaux, la Compagnie des chargeurs réunis supprime le départ du Massilia prévu le 21 janvier 1932. Les inscrits et agents du service général sont donc sans embarquement jusqu’au 3 mars, date du prochain départ. Au Havre, 800 marins sont chômeurs fin 1931. Le 12 novembre, une grande manifestation contre les menaces de diminution des salaires et le désarmement éventuel des navires a lieu à Marseille. Les officiers et les marins défilent ensemble pour la première fois depuis 192288.
75Dans ces conditions, l’action syndicale devient très difficile et les grèves deviennent uniquement défensives. À Marseille, les équipages des Messageries maritimes s’opposent en octobre 1932 à la suppression de la prime d’abondement, prime afférente à certaines lignes au long cours. Ils n’obtiennent son maintien que jusqu’en février 1933, date à laquelle elle sera remplacée par un supplément de salaire, inférieur de moitié à la valeur de la prime89.
76Si les effets de la crise économique commencent à se manifester dans la marine marchande, la situation des pêches maritimes est déjà très difficile avec la chute des prix de vente du poisson et le durcissement des positions des armateurs et des usiniers.
Des pêches maritimes touchées de plein fouet par la crise
77En novembre 1929, après plus d’un mois de grève, les équipages des chalutiers de Lorient ont obtenu une augmentation des salaires de 50 francs par mois90. Ce mouvement marque la fin d’une période. Les pêcheurs vont désormais lutter soit contre la baisse des salaires dans la pêche industrielle, soit pour le maintien des prix de vente dans la pêche artisanale. C’est le secteur de la sardine qui est le plus affecté par la chute des prix.
78Aux Sables-d’Olonne, l’Union fraternelle dirigée par Emmanuel Garnier parvient en juin 1931 à empêcher la baisse des prix d’achat opéré par les usiniers. Ceux-ci se défendent dans une affiche de « vouloir faire crever les marins ». Mais la situation économique devient de plus en plus difficile : en février 1932, les élus de Noirmoutier demandent à l’État des secours pour les marins. En Gironde, les pêcheurs sardiniers de Gujan-Mestras et d’Arcachon sont relativement épargnés car ils sont souvent propriétaires d’une part de bateau et d’un parc à huître, ce qui permet de limiter les effets de la faiblesse des prix de vente des sardines. En décembre 1931, les usiniers de Saint-Jean-de-Luz, ne parvenant pas à écouler leur production, brandissent la menace de fermeture de tous leurs établissements ce qui mettraient au chômage 1 500 ouvriers et ouvrières et 450 pêcheurs à quai91.
79Durant l’été 1932, la chute vertigineuse des cours de la sardine enflamme toute la côte sud de la Bretagne. Comme l’indique le 25 juillet le commissaire spécial de Lorient, « la cause déterminante du conflit ne réside pas dans le différend qui semble apparaître entre les fabricants de conserves et les marins pêcheurs, mais bien dans l’impossibilité qu’éprouve l’usinier à offrir un prix supérieur d’achat de la sardine en raison de la concurrence étrangère ». Après avoir débuté à Douarnenez, le mouvement s’étend très vite à tous les ports sardiniers bretons. Le 24 juillet un congrès réunissant des délégués de dix-huit ports se déroule à Lorient. L’ordre du jour voté demande « l’achat par l’État de sardines fraîches et l’organisation de trains rapides sur les villes de l’intérieur pour la consommation par les chômeurs ». De leur côté les usiniers réclament le maintien du contingentement des sardines étrangères. Après la signature d’accords sur des tarifs avoisinant les 200 francs les 100 kilos contre 150 francs avant la grève – à comparer avec la moyenne de 400 francs obtenue en 1927 – les pêcheurs reprennent la mer à partir du 9 août. À Douarnenez où le mouvement est dirigé par les unitaires, la grève ne cesse que le 11 août. Ce conflit est d’ailleurs un échec pour la FUMP qui n’est pas parvenue à rallier les pêcheurs à ses revendications. C’est d’ailleurs une des causes du remplacement de Dumay évoqué précédemment92.
80La situation très délicate des pêcheurs sardiniers n’est pas un cas isolé. Toutes les pêches sont peu à peu touchées par l’effondrement des cours et les tentatives de baisse des salaires se multiplient dans la pêche industrielle. À Boulogne, en novembre 1931, les prix de vente du hareng salé sont inférieurs à ceux de 1913. La crise est telle que de nombreux armateurs sont contraints de désarmer leurs navires. À Lorient, les équipages des chalutiers parviennent courant 1932 à empêcher la mise en place d’un abattement de 10 % sur le salaire minimum93.
81À partir de 1932, toutes les professions maritimes sont touchées par la crise économique. Dans la marine marchande, alors qu’au 1er janvier 1931 seulement 6,5 % du tonnage immatriculé est immobilisé, c’est 35 % de flotte française qui est désarmée en septembre 1932, soit 270 navires, dont 143 dans le seul port du Havre. 13 000 inscrits, dont 2 000 officiers sont au chômage94. Les différents acteurs du monde maritime réclament une intervention de l’État afin d’éviter que la situation ne devienne catastrophique, tant au plan économique qu’au plan social.
Notes de bas de page
1 Jean-Jacques Becker et Serge Berstein, op. cit., p. 242-250.
2 AN F7 13888, grèves des inscrits maritimes, 1924.
3 AN 52AS502, correspondance avec la FNSM, 1924.
4 AN 52AS542, réglementation du travail à bord, 1925.
5 La Voix du peuple, mars-avril 1925.
6 L’Humanité, 23 mai 1925. Sur le Conseil supérieur de la marine marchande, voir Pierre Léonard, « Le Conseil supérieur de la marine marchande a 90 ans », La Nouvelle Revue maritime, n° 402, décembre 1986, p. 32-41.
7 Les Annales maritimes, janvier 1928 à janvier 1929.
8 L’Officier radiotélégraphiste, juillet-août 1925.
9 Le Radiotélégraphiste, décembre 1927, avril 1928 et août 1930.
10 Le Radiotélégraphiste, juillet 1929.
11 AN F7 13764, activités des syndicats d’inscrits maritimes, 1924.
12 La Bataille du marin, décembre 1923.
13 AN F7 13764, activités des syndicats d’inscrits maritimes, 1924.
14 AN F 7 13764-13765, activités des syndicats d’inscrits maritimes, 1925-1926 ; AD G 1M609, inscrits maritimes de Bordeaux, 1926-1927 et AD BDR 1M929, syndicats confédérés et unitaires d’inscrits, 1926.
15 Sur la grève des ouvrières sardinières de Douarnenez, voir notamment Daniel Renoult et Maurice Simonin, La grève de Douarnenez, ses enseignements, son histoire, Paris, Librairie de L’Humanité, 1925 ; Anne-Denes Martin, Les ouvrières de la mer, Paris, L’Harmattan, 1994; Charles Tillon, On chantait rouge. Mémoire pour l’histoire d’un ouvrier breton devenu révolutionnaire professionnel, chef de guerre et ministre, Paris, Robert Laffont, 1977, p. 64-82 ; Jean-Michel Le Boulanger, Ni dieu, ni maître?, Flanchec 1881-1944 ou l’étrange parcours d’un insoumis, Douarnenez, Mémoire de la Ville, 1997, p. 87-102.
16 AN F7 13765, activités des syndicats d’inscrits maritimes, 1926; La Vie ouvrière, mars 1925 et mars 1926 et Caroline Le Clanche, op. cit., p. 38.
17 AN F 7 13766, activités des syndicats d’inscrits maritimes, 1927 et Jean-Michel Le Boulanger, op. cit., p. 142.
18 AN F7 13765, activités des syndicats d’inscrits maritimes, 1926.
19 AN F7 13767, syndicats confédérés, unitaires et autonomes de marins, 1928.
20 AN F7 13766, incidents de Saint-Jean-de-Luz, 1927 et 13889, conflit des marins pêcheurs sardiniers, 1927.
21 La Vie ouvrière, 9 décembre 1927 et Le Cri du marin, décembre 1927.
22 Le Cri du marin, décembre 1927.
23 Le Cri du marin, mars 1928.
24 AN F7 13767, syndicats confédérés, unitaires et autonomes de marins, 1928.
25 AN F7 13764, activités des syndicats d’inscrits maritimes, 1924.
26 AD SM 10M364, grèves des inscrits maritimes, 1924.
27 La Bataille du marin, octobre 1924 et février 1925.
28 AN F7 13765 et 13766, activités des syndicats d’inscrits maritimes, 1926-1928 et archives du syndicat CGT de Dunkerque.
29 AD SM 4M3246, Union syndicale des marins de France – Groupe autonome de Rouen (1927-1928).
30 AN F7 13767, syndicats confédérés, unitaires et autonomes de marins, 1928.
31 J.-P. Bompeix, Le syndicalisme français et l’arbitrage obligatoire, Institut d’études politiques de Paris, 1955, p. 24-29.
32 AN F7 13890, grèves des inscrits de Dunkerque et du Havre, 1928.
33 AN F 7 13767, syndicats confédérés, unitaires et autonomes de marins, 1928 et 13890, grèves des inscrits maritimes, 1928.
34 Constant Friconneau, op. cit., p. 94-95 et Jo GARAT, op. cit., p. 87.
35 AN F7 13765, activités des syndicats d’inscrits maritimes, 1926.
36 Constant Friconneau, op. cit., p. 112.
37 AN F7 13766, incidents de Saint-Jean-de-Luz, 1926.
38 AN F7 13765, activités des syndicats d’inscrits maritimes, 1926.
39 AN F 7 13766, incidents de Saint-Jean-de-Luz, 1926 ; Charles Tillon, op. cit., p. 96-99; La Vie ouvrière, 10 novembre 1926.
40 AN F7 13766, commission ministérielle des incidents sardiniers, 1927 et collectif, Les marins de La Rochelle…, op. cit., p. 83-88.
41 Constant Friconneau, op. cit., p. 128.
42 AN 52AS418, loi du 13 décembre 1926.
43 La Voix du peuple, septembre 1926.
44 AN 52AS327, 474 et 502, salaires du personnel subalterne (1925-1926).
45 AN F7 13764, activités des syndicats d’inscrits maritimes, 1925 et AN F7 13789, grève des inscrits de La Rochelle, 1925.
46 AD MM4155, grèves, 1925.
47 AN F7 13765, activités des syndicats d’inscrits maritimes, 1926.
48 La Voix du peuple, n° 78, février 1927.
49 Le Laboureur de la mer, avril 1927.
50 AN 52AS418, accords sur les conditions générales d’armement, mars et août1927.
51 Le Laboureur de la mer, avril 1927.
52 Amédée Sonnier est le trésorier adjoint de la Fédération des laboureurs de la mer.
53 AN F7 13766, activités des syndicats d’inscrits maritimes, 1927.
54 AD BDR 1M918, activités syndicales, 1927 et Jean-Baptiste Nicolaï, Simon Sabiani. Un chef à Marseille (1919-1944), Olivier Orban, 1991, p. 94-96.
55 Le Travailleur de la mer, septembre-octobre 1927.
56 La Voix du peuple, novembre 1927 et Le Laboureur de la mer, février 1928.
57 AN F7 13767, activités des syndicats d’inscrits maritimes, 1927.
58 Le Maritime, mars 1929.
59 AD SM 4M3246, Fédération nationale des travailleurs de la mer, 1929.
60 Le Laboureur de la mer, avril 1928.
61 AN F7 13767, activités des syndicats d’inscrits maritimes, 1928.
62 Le Laboureur de la mer, novembre 1928.
63 La Voix du peuple, décembre 1929.
64 Le Travailleur de la mer, février-mars 1929 et Le Peuple, mars 1929.
65 La Voix du peuple, mai 1929 et AN F7 13767, Fédération nationale des travailleurs de la mer (1928-1929).
66 AN 52AS502, accord sur les conditions générales d’engagement et les salaires, mai 1929.
67 Le Travailleur de la mer, juillet et août 1929.
68 Le Travailleur de la mer, septembre 1929 et Antoine Prost, op. cit., p. 183.
69 AN F7 13767, syndicats confédérés, unitaires et autonomes de marins, 1929.
70 AN F7 13767, syndicats confédérés, unitaires et autonomes de marins, 1929; Le Travailleur de la mer, juillet-août 1929 et L’Horizon maritime, septembre 1929.
71 AN 52AS418, engagement des équipages, 1929.
72 Le Cri du marin, juin 1929.
73 AN F7 13767 et 13770, syndicats confédérés, unitaires et autonomes de marins, 1929 et 1934 et Le Cri du marin, octobre 1929.
74 AN F7 13890, conflit entre pêcheurs sardiniers et usiniers, 1929.
75 AN F7 13767, syndicats confédérés, unitaires et autonomes de marins, 1930.
76 Antoine Prost, La CGT à l’époque du Front populaire…, op. cit., p. 180-188.
77 AN 52AS455-456, projet de loi Baudoin sur les pensions des gens de mer et Jean Randier, op. cit., p. 414.
78 AN F7 13767, syndicats confédérés, unitaires et autonomes de marins, 1929 et AD 76 4M515, syndicat unitaire des marins de Fécamp, 1926-1930.
79 Le Cri du marin, février-avril 1930 et La Vie ouvrière, avril et juin 1930.
80 AN F7 13768, syndicats confédérés, unitaires et autonomes de marins, 1931.
81 Antoine Prost, La CGT à l’époque du Front populaire…, op. cit., p. 188-189.
82 Sur le syndicalisme des inscrits maritimes en Algérie, voir Antoine Léon, « Marins de commerce et pêcheurs d’Alger en 1930 », Revue française d’histoire d’outre-mer, n° 313, 1996, p. 53-75; Albert Ayache, « Essai sur la vie syndicale en Algérie en 1930 », Le Mouvement social, n° 78, janvier-mars 1972, p. 95-114 et Henri Schiavo, « La grève des inscrits d’Alger », La Révolution prolétarienne, n° 64, septembre 1928.
83 AN F7 13768, syndicats confédérés, unitaires et autonomes de marins, 1931.
84 Le Cri du marin, mars et septembre 1932 et janvier-février 1933 et Robert Mencherini, Midi Rouge, ombres et lumières. Une histoire politique et sociale de Marseille et Bouches-du-Rhône de 1930 à 1950, t. 1 : Les années de crise, 1930-1940, Paris, Syllepse, 2004, p. 64-65.
85 AN 52AS502 et 473, correspondance avec la FNSM et salaires des équipages, 1930.
86 AN F7 13768, syndicats confédérés, unitaires et autonomes de marins, 1931.
87 Antoine Prost, op. cit., p. 183 et La Voix du peuple, septembre 1931.
88 AN F7 13768, syndicats confédérés, unitaires et autonomes de marins, 1931 et Le Petit Provençal, 13 novembre 1931.
89 AN F 7 13890, grève des inscrits maritimes des Messageries maritimes de Marseille, 1932 et La Révolution prolétarienne, octobre 1932.
90 AN F7 13890 et AD M M 4415, grève des équipages des chalutiers de Lorient, 1929.
91 AN F 7 13768, syndicats confédérés, unitaires et autonomes de marins, 1931 ; Constant Friconneau, op. cit., p. 128-134 et Jo Garat, op. cit., p. 88.
92 AN F7 13890, conflit sardinier de la côte bretonne, 1932.
93 Thierry Capiller, « Le pêche boulonnaise et la crise des années trente », Christian Pfister et Patrick Villiers, op. cit., p. 201-213 et La Voix du marin, septembre 1932.
94 Marie-Pierre Delaban, Administration, législation et politique maritime en France de 1932 à 1960. Du Normandie au France, Toulouse, université Toulouse I, thèse de droit, 1999, p. 39-41.
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