Pouvoir de police et pouvoir judiciaire des maires dans la seconde moitié du xixe siècle
L’exemple de l’Ille-et-Vilaine
p. 373-393
Texte intégral
1L’histoire des maires en France à l’époque contemporaine n’est plus terra incognita1. Reste qu’elle n’est pas non plus, pour l’instant, au centre d’une historiographie surabondante. Il faut reconnaître que l’étude « du maire » en France depuis la Révolution est à la fois facilitée par l’abondance des sources de toute nature (juridiques, officielles, professionnelles, politiques, sociales…) et difficile de par l’extrême diversité des fonctions et des individus concernés (quoi de commun entre un maire de Lyon ou plus récemment de Paris et celui d’un village de 50 habitants ?), les mutations profondes des rôles, du type d’influence, des groupes sociaux dont ils sortaient, des fonctions et des compétences subies par iceux depuis deux siècles, et sans doute encore plus de par leur étrange et double (au moins double) nature.
2Le maire post-révolutionnaire est à la fois, l’a toujours été mais plus ou moins selon les époques et les régimes, un agent du pouvoir central, un subordonné du préfet, un fonctionnaire disait-on au xixe siècle, et il est aussi devenu très tôt (un peu sous la Révolution, beaucoup sous la Monarchie de juillet, définitivement sous la Troisième République) un élu, le représentant de sa commune et de ses « chers administrés », un personnage-enjeu du débat politique, ceci à des degrés variables selon le type de commune, la région, l’époque et la taille de la « ville » dont il est le bourgmestre.
3La chose est encore compliquée par la situation française, unique au monde, qui divise le territoire en 36 à 38 000 communes selon les époques2, héritage révolutionnaire souvent critiqué mais jamais fondamentalement remis en cause, sauf un petit peu depuis trente ans par l’irruption des structures supra-communales qui sans supprimer les éléments de base tournent la difficulté en les délestant de certaines compétences.
4Dans cette optique, nous voudrions ici nous pencher sur un aspect de cette immense question : l’étude historique du pouvoir de police, entendu au sens large, du maire, principalement entre Napoléon III et 1914 et en nous appuyant sur des exemples bretons et ruraux – les problèmes se posant en ville étant concrètement très différents à compétence juridique égale. Par pouvoir de police, nous entendrons ce qu’on nomme ainsi d’ordinaire juridiquement, c’est-à-dire le pouvoir de police administrative, et aussi l’exercice éventuel par le maire d’une fonction en général négligée (par lui, par les observateurs, les juristes et les historiens) celle d’officier de police judiciaire qui en faisait un enquêteur de première ligne, avec le juge de paix.
Fondements des pouvoirs de police du maire
5Le pouvoir de police administrative du maire est fondé par la loi (ou le « décret » comme l’on dit à l’époque, sans faire de distinguo clair entre les deux termes) des 16-24 août 1790 « sur l’organisation judiciaire3 ». La rédaction est si nette et complète que les lois postérieures ne pourront que la recopier ou à peu près4, jusques et y compris l’actuel code général des collectivités territoriales.
6La loi de 1790 fut sur ce plan reprise par la grande loi municipale de la Monarchie de Juillet (18 juillet 1837), puis par celle de la République (5 avril 1884). Le Second Empire, entre temps, n’avait guère innové, sauf pour enlever aux maires des grandes villes (plus de 40 000 habitants) chefs-lieux de département (ce qui ne faisait pas beaucoup de cités), les pouvoirs relatifs au « bon ordre » pour les confier aux préfets (loi du 5 mai 1855), pouvoirs que leur restitua d’ailleurs l’empire libéral par la loi du 24 juillet 1867.
7Le maire disposait donc de pouvoirs importants, il n’est que de lire attentivement le texte de 1790 pour en convenir. Ce n’était pas tout : outre ses fonctions de police « municipale », le maire avait été, dès la Monarchie de Juillet, chargé d’attributions relatives à la « sûreté générale » en tant qu’agent de l’État. L’article 9 de la loi de 1837 énumérait exhaustivement ses prérogatives en matière de police :
« Art. 9 -Le maire est chargé, sous l’autorité de l’administration supérieure,
- 1°) De la publication et de l’exécution des lois et règlemens ;
- 2°) Des fonctions spéciales qui lui sont attribuées par les lois ;
- 3° ) De l’exécution des mesures de sûreté générale. »
8Le rapporteur de la loi, Vivien, reconnaissait que les députés avaient ajouté ces dernières fonctions d’une manière expresse qui n’était pas développée ainsi auparavant. Et il justifiait cet ajout :
« Lorsqu’une cité est en proie à la révolte, lorsque l’existence même du Gouvernement est attaquée à force ouverte, il ne s’agit plus de police municipale, d’intérêt purement local, c’est la sûreté générale qui est ébranlée ; le droit du Gouvernement, non moins que son devoir, lui prescrivent d’agir. Il intervient avec tous les moyens qui lui sont propres ; il recourt aux maires comme à ses délégués ; il leur donne des ordres ; il pèse sur eux de toute son autorité. […]. Lorsqu’il s’agit de l’exécution de ces mesures, le maire remplit les fonctions de délégué de l’administration supérieure5. »
9Quarante-sept ans plus tard, lors du débat de 1884, Waldeck-Rousseau, ministre de l’Intérieur, admettait toutefois que la distinction entre les deux fonctions n’allait pas de soi et que police municipale et police de sûreté générale se ressemblaient parfois.
10Pour exercer son pouvoir propre, le maire disposait d’un outil juridique, l’article 94 de la loi de 1884, repris au mot près de l’article 11 de la loi de 1837 :
« Le maire prend des arrêtés à l’effet,
- 1°) D’ordonner les mesures locales sur les objets confiés par les lois à sa vigilance et à son autorité ;
- 2°) De publier à nouveau les lois et règlements de police, et de rappeler les citoyens à leur observation. »
11Par le premier alinéa, le maire recevait le pouvoir de produire des arrêtés municipaux (soit isolés, soit sous forme de règlements d’ensemble) sur toute question comprise dans l’énumération de 1790 reprise à peu près par l’article 97 de la loi de 1884. Par le second, il pouvait à tout moment rappeler les citoyens à l’observation de la loi et de la réglementation, qu’une société encore peu familière de l’écrit (surtout à la campagne) pouvait oublier… À la limite, le maire pouvait toujours prendre un arrêté rappelant qu’il était interdit de tuer son voisin ou de violer sa voisine puisque le code pénal le disait ; il est probable que le préfet n’aurait pu l’infirmer pour défaut de légalité.
12Car tout arrêté municipal demeurait soumis à la sanction préfectorale. Dès 1837, l’article 11 de la loi municipale en disposait ainsi. La loi de 1884 reprit ces principes en les précisant par les articles 95 et 99 (ce dernier donnant au préfet le droit de prendre des arrêtés de police généraux au cas de défaillance d’un ou de plusieurs maires de son département). Lors du débat parlementaire de 1884, plusieurs députés ou sénateurs républicains accusèrent d’ailleurs le gouvernement de placer les maires, fraîchement libérés et devenus les élus de leurs concitoyens depuis 1882, sous la tutelle des préfets, débat très récurrent. Ainsi, le sénateur Oudet, fidèle soutien de Jules Ferry pourtant :
« Aujourd’hui, on nous demande d’accorder aux préfets un droit de participation dans les attributions de police et de sûreté générale qui appartiennent aux municipalités.
Si nous le votons, qu’est-ce que ce sera demain ? Demain, ce sera l’absorption du droit des municipalités ; car du moment où les préfets, par le premier paragraphe de l’article 99, ont les mêmes pouvoirs que les maires pour toutes les choses qui tiennent à la sûreté publique locale, du moment où les maires sans qu’on les ait avertis, sans qu’aucune nécessité se soit produite, sans résistance ni négligence de leur part, se trouveront exposés à chaque instant à recevoir des préfectures des ordres sous forme d’arrêtés ou de règlements provisoires ou permanents, leur autorité, comme leur initiative sans cesse contrariée, auront bientôt disparu. Le préfet sera le dispensateur de la police6. »
Les domaines d’intervention de la police municipale
13Ces craintes étaient à l’évidence exagérées – même si nombre de maires ont supporté impatiemment la tutelle préfectorale que les gouvernement opportunistes estimaient indispensable. Le maire donc arrête. Mais la police n’est nullement le seul domaine dans lequel il peut le faire.
Statistique et conservation des arrêtés
14À La Guerche, par exemple, gros bourg rural7, le registre des arrêtés du maire8, l’un des très rares qui soient conservés pour ces zones, montre que, de 1870 à 1879, 5 arrêtés seulement sur 37 réglementent en matière de police municipale, les autres concernant des affaires isolées, ponctuelles, des questions financières, de salaires d’employés municipaux, de nominations individuelles, de construction ou aménagement de bâtiments, etc. Pour la période 1880-1899, la proportion est de 14 sur 88 ; pour 1900-1914, de 11 sur 78. Toujours une minorité et même une faible minorité. De ces arrêtés « ruraux », nous savons en fait peu de choses : les petites communes conservaient très mal leurs archives et la transmission des documents aux services préfectoraux n’était pas non plus parfaite, loin de là. Que ce soit dans les papiers déposés aux archives départementales dans la série E par les petites communes ou dans la série O départementale qui contient les documents parvenus à la préfecture, nous ne possédons sûrement qu’une infime partie de ce qui a été édicté. Dans la série O, en Ille-et-Vilaine, nous avons recensé, pour la période 1870-1914, en laissant de côté les villes dotées d’un commissaire de police, 144 arrêtés portant règlement permanent9 (règlements généraux de police exclus). Il n’est pas vraisemblable qu’en 45 ans et sur 359 communes (dont il faut retirer une dizaine de villes), il n’y ait eu que 144 arrêtés de police de ce type : en comptant un arrêté par commune et par an (ce qui sans doute un peu trop), on devrait en trouver 15 750, 1575 si l’on compte un arrêté tous les dix ans… L’immense majorité a donc disparu. Il faut y ajouter une quinzaine de règlements permanents et complets comprenant au total 356 articles pour la même période.
15Il n’en demeure pas moins que cette littérature est fort instructive. Sous des dehors répétitifs et abstraits, arrêtés et règlements n’en dessinent pas moins une image de la société dont ils émanent. Le droit pénal10 constitue une figure, un miroir souvent mal exploité d’une configuration sociale donnée – y compris le plus mineur. Sauf à considérer les producteurs de textes normatifs (parlementaires, gouvernements, préfets, maires) comme fous, toute interdiction ou obligation suppose :
- 1°) que la société réprouve pour des raisons très variées un type d’agissements donné qui ne le serait pas dans une autre – ou qu’elle considère comme nécessaire l’accomplissement de certains actes ;
- 2°) qu’il existe des individus ou des groupes qui sont en permanence tentés de passer outre pour la satisfaction de leurs besoins ou pulsions.
Règlements complets et arrêtés isolés
16Analyser le contenu des arrêtés ou règlements nous semble donc un exercice non vain. Encore pourrait-on faire l’objection qu’ils pourraient, au niveau des maires, se présenter comme le simple décalque de prescriptions venus du niveau supérieur. Il apparaît qu’au xixe siècle ces « étalons » n’existaient guère. C’est plutôt à partir de 1900 que l’extension de l’appareil administratif normatif de l’État imposera peu à peu de tels modèles sans jamais que l’initiative de la « base » soit éliminée. Ainsi, en application de la loi du 15 février 1902 sur la santé publique, la circulaire du 30 mai 1903 proposera un modèle unique, pour les communes rurales, aux fins d’éviter au conseil municipal de se poser de graves problèmes de conscience.
17Il semblerait que jusque vers 1880, la production de règlements de police complets ait été un exercice assez courant. Dans notre échantillon, la série « règlements » se présente comme passablement antérieure à l’autre : 57 % (8 sur 14) ont été rédigés antérieurement à 1879 ! Dans la série « arrêtés », la médiane correspond à l’année 1886, et il faut attendre 1890 pour obtenir 57 % de l’effectif. Nous n’avons aucun règlement complet postérieur à 1896 (mais ils ont dû, bien sûr, exister). Idée confirmée par la présence dans les archives municipales subsistantes de nombreux règlements datant de la Monarchie de Juillet et du Second Empire – cette dernière période semblant de ce point de vue particulièrement riche. Cela n’est pas contradictoire avec la floraison d’arrêtés isolés pris postérieurement à 1870. À l’autre extrémité de la France, dans un pays de hautes terres, en pleine chaîne pyrénéenne, pays à tous points de vue très différent des cantons d’Ille-et-Vilaine, on constate un semblable phénomène :
« Ainsi entre 1880 et 1914, le développement du pouvoir communal s’accompagna d’un renforcement d’un cadre normatif. Les nouveaux services républicains gratuits (scolarisation, assistance médicale et sociale), parfois subventionnés (investissements en équipements publics) assurèrent aux mairies, réévaluées par la législation électorale de 1884, des domaines d’intervention et d’initiative beaucoup plus étendues et originales que les règles léguées par la coutume. Ainsi les mairies usèrent abondamment de leur pouvoir de police dont l’objet était le maintien de l’ordre public, à l’exception des affaires politiques11. »
18Risquons une hypothèse : jusque vers 1880, la commune demeure une entité relativement fermée dont les autorités (le maire étant nommé, fût-ce à certaines époques au sein du conseil) gardent l’illusion de pouvoir établir une sorte de code de bonne conduite complet analogue aux codes nationaux – ce à quoi les encouragent les autorités supérieures. Ensuite, l’ouverture rapide (chemins de fer d’intérêt locaux, routes, école, service militaire) rend caduque cette prétention et les sujets de préoccupation deviennent tellement divers et changeants que l’arrêté isolé devient seul justifiable. On retrouverait un processus similaire en ville : à Rennes, il a existé trois codes de police, ceux de l’an VIII, de 1837, de 188312 ; à Saint-Malo, au moins un, tardif, en 1892. Puis, plus rien. Le genre semble alors épuisé – ou devenu inutile.
Analyse des arrêtés
19L’analyse des champs embrassés par les arrêtés (isolés ou règlements) peut présenter quelque intérêt. On a le bilan suivant :
20Note13
21La première rubrique se subdivise ainsi :
22La seconde n’appelle pas de précisions spéciales. La troisième14 comprend (outre la circulation) :
23Les sous rubriques intéressant le « bon ordre » sont, elles, difficilement comparables entre elles. On a distingué les questions relatives aux saltimbanques, mendiants, etc. ; le tapage ; l’affichage ; les affaires liées aux cafés, cabarets, à l’ivresse publique, etc.
24On aura remarqué que le total, dans le premier tableau, n’atteint pas 100 %, et que, dans les autres, la somme des pourcentages ne correspond pas au chiffre global. Cela tient à l’existence de nombreux articles ou arrêtés difficilement classables : tels ceux relatifs aux quêtes, aux baignades, aux cimetières, etc.
25Les conclusions que l’on peut tirer d’un premier examen de ces chiffres ne sont pas forcément simples. Au niveau des agrégats les plus généraux, les deux séries présentent, malgré les distorsions, comme un « air de famille » qui, si l’on réfléchit bien, constitue rien moins qu’une évidence. En effet, si l’on conçoit que dans les règlements, les maires ont certes le souci d’observer un certain équilibre entre les grandes rubriques à eux confiées dans le cadre de leur pouvoir général de police, et qu’il n’y a donc pas lieu de s’étonner naïvement de la répartition constatée, il n’y a aucune raison, a priori, qu’il en soit de même pour une série de 144 arrêtés que seul le hasard aura livré à l’exercice de l’incertaine sagacité de l’auteur. Il est donc vraisemblable que ce dernier ensemble ne souffre pas de trop grosses distorsions, bref, est suffisamment représentatif, que nous pouvons faire fond sur lui.
26L’anormal serait d’ailleurs, ici, une trop grande ressemblance. Pour au moins deux raisons. Les types de source sont en fait de nature hétérogène : un règlement vise à établir des règles relatives à l’ensemble des problèmes concernant l’ordre public. Un arrêté de police est motivé par quelque besoin particulier, mais en général urgent, pressant. Ensuite, la série « règlements » se présente comme passablement antérieure à l’autre, on l’a vu. Les conséquences de ce phénomène sont multiples. Ainsi, ne paraît-il pas douteux – et tout le contexte social le confirme – que les questions de salubrité publique ne prennent peu à peu une place toujours plus considérable dans les préoccupations des municipalités15. Si l’on considère les articles de règlements relatifs à ces problèmes, on en trouvera 27 sur 65 postérieurs à 1879, soit 41 %, alors que le total de ceux qui proviennent de la même tranche chronologique représente 30 % de l’ensemble (108/356). Il en va de même de 6 articles sur 10 parmi ceux consacrés au maintien de la pureté des eaux (60 %), de 13 sur 19 lorsqu’il s’agit de l’enlèvement des ordures (68, 4 %), de 4 sur 9 si l’on considère les égouts et écoulements des eaux usées (44, 4 %).
27Quelle que soit la façon dont on considère les choses, il est évident qu’il y a, pour le moins, début de mutation des mentalités, avec un tournant particulièrement dessiné vers 1880 (correspondant aux changements politiques et institutionnels ? Ce n’est pas exclu). Le bond, très net, des prescriptions relatives aux eaux destinées aux usages domestiques, tout spécialement, ne peut manquer de frapper l’esprit : la diffusion des idées pastoriennes, à un niveau plus ou moins conscient, pourrait avoir là produit quelques effets.
Évolutions du champ d’intervention de la police municipale
28De même, l’évolution de la réglementation concernant la sûreté publique se marque vigoureusement : la divergence entre les deux séries est nette dans le domaine des risques d’incendie. L’explication de ce phénomène n’appelle pas de longues dissertations : l’écart chronologique moyen suffit à tout justifier. Les municipalités semblent s’attacher à cette question au début de notre période, beaucoup moins par la suite. Les articles de règlement postérieurs à 1879 représentent 25,5 % de l’ensemble (contre, on l’a vu, 30 % en général pour la tranche chronologique). Les arrêtés individuels relatifs à ce problème sont par ailleurs tous, sauf un, antérieurs à 1891. Les lacunes seraient-elles le fait du hasard ? Risquons une autre hypothèse : tout incendie, même accidentel, doit faire l’objet, comme un accident ou un suicide, d’une enquête du parquet. Or, en 1832, les parquets avaient, dans toute la France, classé sans suite 339 ( !) incendies par imprudence. La barre du millier est franchie vers 1840. Mais le milieu du siècle connaît une mutation proprement stupéfiante16 :
29L’évolution se poursuit rapidement, encore qu’à un rythme nettement plus lent qu’auparavant, vers la fin du Second Empire et les débuts de la Troisième République :
30Cette dernière date marque un pic qui ne sera plus dépassé. Jusqu’à la Première guerre mondiale, s’installe une phase en palier affectée d’un vague moutonnement de hauts et de bas peu significatifs. L’illusion statistique induite par le Compte général devient ici proprement caricaturale : quel phénomène objectif aurait multiplié les incendies non volontaires par huit en douze ans (1842-1854)17 ?
31Il n’y a évidemment d’autre explication que celle qui provient de l’évolution des mentalités et du perfectionnement de l’appareil d’État. Dans la seconde partie du siècle, la peur du feu devient générale, l’inévitable est ressenti comme insupportable. On réglemente et on édicte. Puis, se fait jour une plus saine appréciation des choses. Et les arrêtés antérieurs, auxquels s’ajoute de plus en plus une législation (et une réglementation) nationale contraignante, sembleront suffisants, et adaptés à la situation18.
32Le « Bon ordre » occupe une place non négligeable, dans les règlements comme dans les arrêtés, certes non prépondérante, mais cela n’est point anormal s’agissant d’une police « municipale », pour laquelle les encombrements de la voie publique, les dépôts de matières inflammables, et les exhalaisons nauséabondes constituent l’essentiel du souci quotidien19. Entre règlements et arrêtés, il ne semble pas exister de distorsion très considérable, par ailleurs. En fouillant plus profond, on se heurte toutefois à quelques objets qui posent question. Les règlements d’ensemble font une très large part aux prescriptions intéressant les cafés et cabarets. Or, on ne trouve presque aucun arrêté isolé pris dans ce but ! Le cabaret avait bien été dans les deux premiers tiers du siècle le lieu focal des désordres réels ou supposés au sein du village, et ceci bien avant que la lutte contre l’alcoolisme ne soit perçue comme une priorité. Plus encore, les années 1870 sont bien celles de l’Ordre moral, de la loi sur l’ivresse ; les maires (nommés !) qui publient des règlements de police suivent évidemment les instructions écrites ou orales de préfets ou de sous-préfets qui participent à l’esprit du temps. Par la suite, les maires élus ont estimé, sans doute, que ce domaine relevait de la compétence des préfets, d’autant plus qu’ils se trouvaient peu soucieux de s’attirer les foudres d’administrés qui ne voyaient rien de pendable à leur présence dans le cabaret à une heure que l’on prétendait, en haut lieu, indue.
33Par ailleurs, l’écart est aussi remarquable entre les deux sources, s’agissant des saltimbanques, mendiants, etc. Trop important pour ne pas correspondre à une modification radicale de la conception même du danger ; les règlements d’ensemble ne font que de très rapides allusions à ces questions et deux arrêtés seulement sur 16 sont, en ce domaine, antérieurs à 1880. Jusqu’en 1900, la progression apparaît constante : le vagabondage rural plus ou moins déguisé devient une véritable obsession, chaque année plus présente, et notamment à l’esprit des autorités locales. Le début du xxe siècle sera encore davantage le temps de la peur du nomade20.
34Au total, le glissement est évident qui mène d’un type de préoccupations centré sur le village, ses habitants et leurs déviances plus ou moins graves (l’ivrognerie), à d’autres priorités, dans lesquelles le visage de l’étranger insaisissable prend une place prépondérante. Ce qui nous ramène à une question centrale : si la force coercitive de la communauté elle-même est suffisante, ou en tout cas appropriée, dans le premier cas, elle révèle ses lacunes lorsqu’il s’agit de faire face à une sorte d’invasion, sur laquelle elle ne possède que bien peu de prises.
Des difficultés d’exercer le pouvoir de police
35Mais comment exercer le pouvoir de police, comment passer du discours à la réalité ? Pour nous en tenir aux zones rurales, le gouffre béant existant entre les deux items va tout au long du siècle faire l’objet d’un débat sans fin chez les politiques, les magistrats, les policiers et parfois les maires. Le maire est fréquemment confronté à des problèmes multiples, ceux-là mêmes qu’à la ville, agents de police, commissaires du même nom, bureaux, secrétaire général, tentent de résoudre en ses lieu et place. L’aide éventuelle des adjoints, ou du secrétaire de mairie-instituteur, pas forcément plus compétent que lui-même, n’est sans doute pas toujours d’un précieux secours. Comme l’écrit le maire d’Antrain :
« À Antrain, le maire est seul chargé d’assurer l’ordre ; il n’a pour agent qu’un garde champêtre ; et pour employé qu’un secrétaire présent au bureau de huit heures du matin à quatre heures du soir21. »
36Or, force est de constater que les autorités supérieures ont de la compétence des maires ruraux, en ce domaine (et en d’autres ?), une bien piètre idée :
« D’après les enquêtes ouvertes et les renseignements particuliers recueillis par la commission extra-parlementaire, il parait établi qu’une des principales causes de l’insécurité des campagnes provient de l’inertie ou de la négligence des agents investis d’une fonction de police, et notamment des maires22 […]. Les maires, en effet, semblent avoir perdu de vue l’importance de leur mission et les devoirs rigoureux que leur impose la loi, soit comme représentants de la commune, soit comme agents de l’État. Vous [les préfets] aurez à leur rappeler que parmi les fonctions inhérentes au pouvoir municipal qu’ils détiennent, la plus essentielle est, comme l’exposait le décret du 14 décembre 1789 sur la constitution des municipalités, de faire jouir leurs mandants des avantages d’une bonne police et d’employer en conséquence toute leur vigilance à prendre les mesures nécessaires pour garantir la sécurité des personnes et des propriétés, et surtout à tenir la main à ce que ces mesures soient exactement appliquées. […] Il faut que les maires se pénètrent bien de cette idée, que l’inobservation d’une mesure de police générale ou de sûreté, quel que soit l’objet qu’elle concerne, est préjudiciable aux intérêts moraux et matériels non seulement de la localité où les règlements sont transgressés, mais encore des autres communes. L’ordre public exige impérieusement que l’autorité de la loi ne soit nulle part affaiblie, et le premier devoir du maire est d’y veiller avec la plus grande sollicitude23. »
37Ces lignes de Louis Barthou, ministre de l’Intérieur en juin 1898, étaient-elles inutilement sévères ? En fait, elles s’appuyaient sur les résultats de la grande enquête sur la police rurale, menée dans toute la France à la suite des « exploits » terrifiants de Vacher, le « tueur de bergers », qui avaient ému tout le pays, et dirigée par la commission extraparlementaire placée sous l’autorité du sénateur de Marcère. Les traces, incomplètes au demeurant, que nous en avons conservées pour l’Ille-et-Vilaine, montrent qu’elle fut menée avec minutie : fiches signalétiques détaillées du personnel (gardes champêtres, gardes particuliers), rapports du préfet qui supposent l’existence de rapports primaires des sous-préfets (disparus) et des maires eux-mêmes. Elle aboutit à l’établissement d’un rapport général, qui fut publié au Journal officiel le 29 mars 1898. Au sujet des maires, le jugement de la commission était empreint de la plus grande netteté :
« La presque unanimité des renseignements fournis à la commission sur ce point particulier de l’action des maires considérés comme agents de la sûreté publique, constate que cette action est nulle ou tout au moins insuffisante. La plupart attribuent cette négligence des maires à leur origine, qui est l’élection. La commission, de parti pris, ne s’est pas attachée à ce point de vue. Les maires peuvent d’ailleurs être stimulés, dans l’accomplissement de leurs devoirs de police, par des instructions précises et pressantes. C’est ce que le ministère de l’intérieur a déjà fait, notamment par la circulaire du 18 avril 1884. Mais il arrive trop souvent que les circulaires restent lettres mortes24. »
38Toutefois, on aura remarqué à quel point le ministre aggravait, dans le ton plus que dans le fond, les conclusions de la commission. Comme le laisse entendre clairement Marcère, les préfets et sous-préfets, aussi républicains qu’ils soient, n’ont pu se faire à l’idée que la nomination des maires ne dépendait plus d’eux. En 1913 encore, trente et un an après la loi qui donnait aux conseils municipaux le libre choix de leur maire, Gabriel Arché, attaché au cabinet du préfet de l’Hérault, ne maniait pas la litote en écrivant : « Or, qui dit “maire” dit homme politique, timoré, uniquement préoccupé de sa réélection, de ne pas se faire des ennemis, d’éviter des conflits, des responsabilités25. » Ces sentiments semblent avoir été très répandus : le 1er juin 1882, le sous-préfet de Redon écrivait au secrétaire général de la préfecture : « Notre illustre maire devient d’une arrogance rare depuis qu’il est l’élu du conseil municipal26. »
39Une autre cause de ces insuffisances était le manque de personnel qualifié, l’insuffisance numérique et personnelle des gardes champêtres et l’inadaptation de la gendarmerie à une police spécifique adaptée au maintien de l’ordre public campagnard27. Toutefois, l’unanimité est évidente sur le fond du problème, sans que l’on puisse vraiment décider en l’état actuel des connaissances si les défauts en cause se sont véritablement aggravés depuis les jours du Second Empire, et surtout depuis la démocratisation de l’élection. La question mériterait d’être approfondie.
Le maire, autorité de justice ?
40Si le maire du xixe siècle est autorité de police, il est aussi chargé de fonctions de justice. Celles-ci sont souvent plus complexes qu’on ne le dit ou le croit.
Le maire et le juge de paix
41D’abord, il possède jusqu’en 1873 le pouvoir de juger les contraventions de police, comme un juge de paix, bien que dans un champ réduit28. Le juge de paix connaissait seul des contraventions commises dans la commune chef-lieu de canton, de celles commises ailleurs par des étrangers à ladite commune, de celles pour lesquelles les victimes réclamaient plus de quinze francs de dommages et intérêts, etc. Pour toutes les autres, il existait concurremment au tribunal de paix, un tribunal du maire, organisé par les articles 166 à 171 du même code. Il ne semble pas que ces tribunaux municipaux aient beaucoup fonctionné. Les archives des justices de paix en Ille-et-Vilaine n’en conservent nulle trace, pas plus qu’en d’autres endroits29. Il est vraisemblable que, même avec des maires nommés, il y avait incompatibilité entre l’administration de la commune, la fonction politique du maire et l’exercice de la justice qui exige – en principe… – l’impartialité. La loi relativement libérale du 14 avril 187130 ayant confié aux conseils l’élection de la plupart des maires, l’existence du maire-juge devenait franchement anachronique. Elle fut supprimée par la loi du 27 janvier 1873 qui donnait au juge de paix connaissance de toutes les contraventions.
42Si le maire-juge ne fut jamais qu’une idée de papier, les tribunaux de paix virent très souvent les maires jouer un rôle de membres de ces tribunaux, soit comme suppléants du juge de paix, appelés à le remplacer lors de ses absences ou congés (ou lors d’une mutation), soit comme officiers du ministère public à défaut de commissaire de police (ce qui, mis à part la brève expérience des commissaires cantonaux du Second Empire, constitua la règle à la campagne). Or, dans ces deux fonctions, les conflits entre juge de paix et maire semblent avoir été nombreux, et les maires avoir souvent traité les règles juridiques avec quelque légèreté.
43Un seul exemple : François Bidet, maire de Blain, suppléant de paix, officier du ministère public près du tribunal de police refuse de poursuivre pour des raisons politiques.
« Je suis désarmé – dit le procureur de Saint-Nazaire – vis-à-vis du suppléant de paix comme du maire [c’est le même homme…]. Le second suppléant ne voudra plus suppléer le premier, et comme vous pouvez le voir, l’administration préfectorale se dérobe en la personne du sous-préfet. Je dois vous signaler cette situation et solliciter vos instructions. Il y a là un déni de justice flagrant, et je pense que la gendarmerie n’acceptera pas l’omnipotence du maire de Blain31. »
44Bidet, en effet, refuse de poursuivre les contrevenants à l’arrêté préfectoral concernant les heures où les véhicules doivent être pourvus de lanternes. Il a écrit au procureur : « Je ne permettrai point, moi, maire, à la gendarmerie de Blain de dresser des procès-verbaux pour défaut de lumières, tant que le crépuscule existera. » Ses raisons sont en fait purement électoralistes. Après avoir demandé le remplacement de Bidet, le procureur général change d’avis devant les « graves embarras que susciterait à l’administration la démission de M. Bidet en sa qualité de maire de Blain ». Sûr de l’impunité, Bidet n’hésitera pas à faire de l’opportunité des poursuites une arme personnelle, sans plus de conséquences…
Un conciliateur effectif quoique non-autorisé
45Par ailleurs, le maire semble bien avoir souvent exercé en toute illégalité des fonctions de conciliateur, y compris pour des affaires dépassant de loin les compétences du juge de paix, en principe seul compétent en ce domaine. Il semble que des procédures concernant des délits (des crimes ?) aient été arrêtés par un jugement informel du maire – ou plutôt que son arbitrage ait brisé toute procédure dans l’œuf. Nous possédons une circulaire assez alarmiste que le procureur général de Rennes envoya vers 1880-1890 à tous ses substituts ; elle n’est pas datée mais semble soulever un problème récurrent32. Bien plus tard, en 1913, le sous-préfet de Fougères reconnaissait33 que ce type de transaction était extrêmement fréquent en milieu rural, que les « victimes » n’hésitaient même pas, sans vergogne aucune, à retirer une plainte déjà déposée si l’arrangement était survenu postérieurement, plainte que souvent les maires évitaient de transmettre lorsqu’elle était d’abord venue entre leurs mains.
Le maire officier de police judiciaire
46Si le maire conciliateur se trouvait aux marges de la loi, celle-ci lui donnait, expressément, la fonction d’officier de police judiciaire. Dans une France rurale où la gendarmerie était tout à fait insuffisante, cette fonction n’était pas honorifique. Les articles 11, 49 et 50 du Code d’instruction criminelle lui conféraient la qualité d’officier auxiliaire (comme les commissaires de police) et la mission de rechercher les contraventions ainsi que de faire tous actes (rédaction des procès-verbaux, audition des témoins, visites) en cas de flagrant délit ou à la réquisition d’un « chef de maison » pour tout crime ou délit. Toutefois, l’instruction une fois déclenchée, le juge de même nom ne pouvait leur confier de commission rogatoire à la différence du juge de paix. Il n’empêche : au début du xixe siècle, les maires transmettent presque autant de plaintes et procès-verbaux pour crimes et délits que les gendarmes et les commissaires ; l’effondrement commence sous le Second Empire et s’achève sous la Troisième République. Si l’on se réfère aux chiffres du Compte général34 quant à l’origine des plaintes, on obtient les résultats suivants :
47Les conclusions ne sont guère difficiles à établir : sous la monarchie parlementaire, le maire (nommé au sein du conseil municipal) est un agent important de l’exercice de la justice dans les campagnes – de la police judiciaire en tout cas. Le Second Empire établit les commissaires cantonaux et « cantonne » les maires dans leur rôle politique et administratif, bien qu’ils soient nommés sans réserve de forme. Mais sous la Troisième République, le maire, entièrement élu sauf à Paris depuis 1882, perd pratiquement toute fonction de ce type : seule désormais la gendarmerie et accessoirement le parquet font office d’agent de la police judiciaire dans les campagnes, seuls elles mettent au jour les crimes et délits, à eux seuls s’adressent les plaignants. La professionnalisation du maintien de l’ordre est en marche. Si l’on veut juger de la proportion des plaintes émanées à la campagne de quatre sources locales, on examinera le graphique ci-dessous présenté :
48La cause semble entendue. Le maire rural depuis Napoléon III et encore plus depuis Jules Ferry s’occupe de son village, de ses routes, de son école, pour paraphraser Roger Thabault35, mais plus de faire la chasse aux filous. Ce ne fut pas toujours le cas. Avant 1850 (ou 1860), le magistrat municipal participait souvent (les chiffres indiqués ci-dessus le montrent) aux premières enquêtes, y compris en cas de crime. Dans une affaire criminelle que nous avons particulièrement étudiée36, c’est le maire de Bannalec, Adolphe Chardon, qui, de conserve avec le juge de paix, orientera l’enquête de manière fatale, envoyant deux innocents au bagne où ils mourront. Mais passé le mitan du siècle, il devient évident que la fonction de maire n’est pas principalement destinée à cela : la loi de janvier 1873 plus haut évoquée le confirmera.
49Il demeure que dans les campagnes, en l’absence d’une police rurale suffisante, la magistrature professionnelle elle-même ne dédaigne pas de recourir au maire en tant qu’intermédiaire de justice – pour autant que cette expression ait un sens – pendant très longtemps. Nous avons déjà signalé l’importante circulaire dont nous avons retrouvé un exemplaire un peu par hasard et qu’adressa à la fin du siècle le procureur général de Rennes à ses substituts pour « rappel à l’ordre » des maires. Il nous semble utile de la citer in extenso :
Circulaire du procureur général de Rennes, vers 1880-1890
« Aux termes de nombreuses dispositions du code d’instruction criminelle, et notamment des articles 50 et suivant, M.M. les maires & adjoints sont chargés des importantes fonctions d’officiers de police judiciaire ; j’ai eu souvent occasion de remarquer que leurs devoirs, en cette qualité, n’étaient pas toujours remplis avec le zèle et l’intelligence qui peuvent seuls assurer la répression des crimes et délits. Déjà mon prédécesseur, & moi-même, nous avons appelé votre attention sur cette partie si délicate du service judiciaire ; mais comme les omissions qui vous ont déjà été signalées se renouvellent sans cesse, je crois nécessaire insister [sic] aujourd’hui sur un point essentiel et trop négligé, à savoir la communication immédiate qui doit vous être donnée de tous les faits prévus par la loi pénale.
MM. les maires sont chargés tout à la fois de la police administrative et de la police judiciaire dans leur commune ; il en résulte pour eux deux ordres d’obligations qu’il faut soigneusement distinguer, les unes envers l’autorité administrative supérieure, les autres envers les magistrats du parquet ; la police administrative a pour objet de prévenir les délits et les crimes, c’est à dire d’empêcher qu’ils soient commis ; la police judiciaire, au contraire, a pour objet de les réprimer, c’est à dire de poursuivre et de faire punir les coupables ; à la première appartient [sic] les avis, les arrêtés et les règlements de police, actes qui demeurent tout à fait étrangers à l’autorité judiciaire ; à la seconde, les procès-verbaux de délit, les descentes sur les lieux, les visites domiciliaires ; les ordres d’arrestation qui nécessitent le concours ou la surveillance des magistrats ; pour l’exercice de la police administrative, les maires doivent obéir aux instructions de MM. les préfets et sous-préfets ; pour la police judiciaire, ils sont placés exclusivement sous la direction des officiers du ministère public ; ils doivent donc entretenir à cet égard des relations incessantes avec eux.
Ainsi, quand un crime ou un délit parvient à la connaissance du maire, ou le fait est encore flagrant, ou bien il ne l’est déjà plus ; en d’autres termes, il vient de se commettre, ou il y a quelque temps qu’il a été commis. Dans le premier cas, le maire doit se transporter immédiatement sur les lieux pour y procéder aux opérations les plus urgentes, telles que la constatation du délit, l’arrestation de l’inculpé, la saisie des instruments de crime & d’autres pièces de conviction [sic], & de faire, en même temps, avertir le juge de paix ou le procureur de la république, en choisissant de préférence celui de ces magistrats qui est le moins éloigné. Dans le second cas, il est tenu de consigner par écrit les faits qui lui sont dénoncés, de transmettre son procès-verbal ou son rapport au parquet du tribunal de l’arrondissement, mais toujours & dans tous les cas, son premier devoir, celui qu’il ne peut négliger sans engager gravement sa responsabilité, c’est de vous donner avis sur le champ de ce qui s’est passé, pour cela une simple lettre suffit. Si des gardes champêtres ou autres agents de la police municipale, lui remettent des procès-verbaux constatant des délits, il doit aussi vous les envoyer sans retard, car, à vous seul, appartient le droit de décider s’ils doivent donner lieu à des poursuites judiciaires.
En un mot, il faut que tous les faits punissables qui sont appris à MM. les maires, soient portés par eux à la connaissance du ministère public, indépendamment de l’avis qu’ils en auraient donné à leurs supérieurs dans l’ordre administratif, & cela lors même que ces faits auraient été suivis d’une transaction ou d’un arrangement entre les parties sur leurs intérêts civils, cette circonstance ne pouvant exercer aucune influence sur l’action de la vindicte publique. Un simple retard, & plus encore, un silence blâmable pourraient compromettre gravement les droits de la société et la protection du citoyen. Aucune considération d’intérêt, d’affection, de bon voisinage, de parenté même, ne doit empêcher un maire de remplir ce devoir ; il doit se rappeler qu’il est particulièrement institué pour veiller dans la commune au maintien de l’ordre public, à la sûreté des honnêtes gens, & à la punition des malfaiteurs.
Rappelez, je vous prie, aux maires de votre arrondissement ces règles qui sont bien simples, & qui ne les dispensent pas de leurs rapports ordinaires avec l’autorité administrative ; veuillez les inviter, en mon nom, à s’y conformer exactement à l’avenir & à vous apporter pour la répression des faits coupables, le concours empressé que la loi exige d’eux. »
L’exemple de Pléchâtel
50Nous possédons, épaves isolées au milieu d’un désert, quelques correspondances de maires avec les procureurs, ou quelquefois les sous-préfets : les tâches dont sont chargés les magistrats municipaux, ou dont on les prie de s’occuper, appartiennent à plusieurs catégories. On prendra l’exemple de Pléchâtel, commune rurale moyenne située à 30 kilomètres au sud de Rennes37.
51Le 3 juillet 1874, le procureur de la République demande au maire un rapport ; l’objet en est une affaire de coups et blessures : « Comment expliquer les trous de plombs constatés sur le chapeau de Cheminel ? Quelle est la gravité des coups portés à Perrault ? » Il s’agit là d’un travail d’enquête policière, mais on ignore quels hommes le maire en a chargés. Retenons simplement que le parquet le désigne comme principal responsable et interlocuteur essentiel en la matière alors que le code d’instruction criminelle ne prévoit rien de tel, hors le cas de flagrant délit.
52Le 21 juillet, le procureur répond à une demande émanée de la mairie : il s’agissait de faire preuve d’indulgence à l’égard d’un pauvre hère, en ne l’envoyant pas au dépôt de mendicité. Le chef du parquet répond qu’il a transmis la demande au sous-préfet, seul compétent en l’occurrence. Le magistrat municipal joue ici le rôle d’intercesseur, de protecteur de ses administrés. Cet aspect d’« assistant social » se retrouve le 17 août : le parquet renvoie au maire les pièces que celui-ci a transmises, aux fins d’obtenir pour un de ses concitoyens l’assistance judiciaire. La demande est rejetée.
53Par contre, le 22 juin 1875, le responsable de la commune apparaît sous un jour beaucoup plus répressif : c’est sur sa dénonciation que le parquet a poursuivi, dans une affaire de coups et blessures que le procureur juge pourtant sans gravité. Mais, apparemment soucieux de ne pas désavouer le maire, il a transmis le dossier au juge de paix de Bain, chef-lieu de canton.
54En septembre 1877, c’est le juge d’instruction de Redon qui prie le maire de bien vouloir enquêter sur un étrange incident : un nommé J. G., pour lors en prison à Redon, est soupçonné d’avoir en 1870, dans les bureaux de l’entreprise où il était employé, commis un attentat à la pudeur sur une enfant de six ans. Et le juge poursuit :
« D’après les renseignements qui me sont adressés, ce fait aurait été connu du public et aurait eu un certain retentissement dans le pays.
Je vous prie, si cela vous est possible, de me faire savoir ce que vous en savez personnellement. Ce G. avait-il mauvaise réputation, pourquoi ce crime n’at-il pas été dénoncé, quelle est la moralité de M., mère de la victime… »
55Voici donc le maire à nouveau chargé d’une enquête dont on ne sait trop par l’intermédiaire de quels bras séculiers il la mènera à bien. Remarquons au passage que l’on se trouve ici dans un cas de figure dont d’autres recherches nous ont montré le caractère courant en milieu rural : un crime particulièrement odieux, connu de nombreuses personnes, et qui vient aux (fines) oreilles de la justice sept ans après qu’il ait été commis ! Qu’ait joué, plutôt, la solidarité villageoise, la peur du criminel, ou l’indifférence, n’a, en l’espèce, que peu d’importance.
56En octobre et décembre 1878, le maire intervient encore en faveur de ses concitoyens : la première fois, afin de permettre au frère d’un condamné à trois mois de prison (pour vol de cidre !) de récupérer les meubles de ce dernier, de crainte qu’ils ne soient dérobés à leur tour ! La seconde, pour demander l’abandon des poursuites contre un jeune garçon coupable de délit de chasse avec armes prohibées. Avec succès. En juin 1885, à nouveau une demande visant à éviter la comparution du prévenu à l’audience correctionnelle. Elle se heurte, cette fois, à un refus du procureur. Refus également, le 27 juillet, d’accorder à un domestique de ferme condamné à la prison un nouveau délai avant incarcération.
57En mai 1891, le parquet formule une demande d’enquête sur un sujet fort délicat – comme l’on dit. Un garçon de vingt ans vient de passer quatre ans en détention, dans une maison de correction, pour attentat à la pudeur commis sur sa jeune sœur. Sa conduite est bonne. On pourrait envisager de le rendre à ses parents, mais la victime demeure toujours sous le toit familial. Y a-t-il accord complet de ce côté ? Qu’en penserait l’opinion publique ? Quel est l’avis des autorités locales, et donc le vôtre M. le maire ?
Conclusions
58Aussi partielle que soit la série, on peut tenter d’établir un bilan. Le maire rural apparaît, vis à vis des délits de tous ordres, comme chargé d’une triple fonction : on estimera que l’aspect répressif n’en constitue pas ici la composante principale. Bien rares semblent les cas où le magistrat municipal met lui-même la justice en action. Il est même certain (voir plus haut) que la situation est allée se dégradant au cours de la période qui nous occupe : les municipalités ont vraisemblablement délaissé de plus en plus ce service de police judiciaire qui, en principe, leur incombait.
59La seconde, celle qui transforme le maire en véritable enquêteur, est déjà beaucoup plus discutable au regard de la loi. On ne la lui attribuera d’ailleurs que marginalement : il s’agit surtout d’investigations sociales, plus que véritablement policières. En tout état de cause, le maire ne sera le plus souvent ici qu’une sorte de boite aux lettres, orientant l’action à mener vers les gendarmes ou le garde champêtre. Au total, que l’on invoque le manque de moyens, de volonté, le souci de ne mécontenter personne, comme l’écrit le procureur général, le peu d’intérêt pour la chose, un fait est patent : dans une commune rurale qui, apparemment, tient, sur ce point, ses archives en ordre, la municipalité s’occupe peu de ce type de police judiciaire – et d’ailleurs le texte de la loi ne l’exigeait nullement.
60En revanche, il existe un troisième type d’activités apparentées, que le code d’instruction criminelle n’évoque guère, et qui, en réalité, se trouve constituer, pour les administrés, la part essentielle de ce qu’ils attendent, en cette matière, de leur bourgmestre. C’est le rôle qu’il joue, non pour maintenir l’ordre contre les éléments de trouble, mais bien pour protéger les fautifs des rigueurs excessives de la justice, en présentant à celle-ci les « cas » humains, dont, dans sa naturelle rigidité, elle aurait pu ne pas apercevoir le côté pathétique, même et surtout s’il flanquait des condamnations justement prononcées.
61Il nous semble donc établi que les maires ruraux de la seconde moitié du xixe siècle sont à la fois en voie d’abandonner l’essentiel de leurs fonctions proprement judiciaires, incompatibles avec leur nouveau statut et leurs nouvelles missions ; mais conservent (ils ne peuvent pas faire autrement) leur fonction de police « administrative », mais la place de cette dernière est ambiguë et soumise à des impératifs contradictoires : la plus grande autonomie municipale conduit les maires à un surcroît d’activité mais le maintien d’une rude tutelle préfectorale et le sentiment que leurs administrés seront plus sensibles à d’autres types d’actions lui donnent des bornes assez étroites. L’évolution de la fonction de police du maire au xxe siècle, au-delà du discours juridique, reste à faire.
Notes de bas de page
1 Voir ainsi, Les Maires en France, du Consulat à nos jours, sous la direction de Maurice Agulhon, Paris, Publications de la Sorbonne, 1986, 462 p. ; François Burdeau, Libertés, libertés locales chéries, Paris, Cujas, 1983, 277 p. ; Yvan Combeau, Paris et les élections municipales sous la troisième République : la scène capitale dans la vie politique française, Paris-Montréal, L’Harmattan, 1998, 457 p. ; Jocelyne George, Histoire des maires de 1789 à 1939, Paris, Plon, 1989, 285 p. ; Patrick Le Lidec, Les maires dans la République : l’association des maires de France, élément constitutif des régimes politiques français depuis 1907, thèse, Paris-1, 2001, 658 p. sous la direction de Jacques Lagroye ; La République et ses maires : 1907-1997, 90 ans d’histoire de l’A. M. F., sous la direction de Tristan Gaston-Breton, avec Camille Bouvier, Patrick Le Lidec, publié par l’Association des maires de France, Paris, Foucher, 1997, 191 p. La littérature sur la commune et le gouvernement municipal est également de plus en plus abondante : à titre d’exemples, Jean-Marie Dréano, « Les discours sur la commune française : les voies d’un consensus. Le cas du Midi méditerranéen de 1884 à nos jours », Histoire et mesure, 1997, p. 337-360 ; Bruno Dumons et Gilles Pollet, « Espaces politiques et gouvernements municipaux dans la France de la IIIe République. Éclairage sur la sociogenèse de l’État contemporain », Politix, 2001, n° 53, p. 15-32 ; Jean-Pierre Machelon, « Pouvoir municipal et pouvoir central sous la Troisième République », La Revue administrative, 1996, n° 49, p. 150-156 ; Louis Fougère, Jean-Pierre Machelon et François Monnier, Les communes et le pouvoir de 1789 à nos jours, Paris, PUF, 2002, IX-661 p. ; Christine Guionnet, « La politique au village. Une révolution silencieuse », Revue d’Histoire moderne et contemporaine, 1998, n° 4, p. 775-789.
2 Statistiques de l’an II à 1837 dans Antoine Follain, « Les communautés rurales en France. Définitions et problèmes (xve-xixe siècle) », Histoire et Sociétés Rurales, n° 12, décembre 1999, p. 11-62 (p. 58-62).
3 Non séparable de la loi (« Décret ») du 14 décembre 1789 « relatif à la constitution des municipalités » ; de la loi (« Décret ») des 19 juillet 1791 « relatif à l’organisation d’une police municipale et correctionnelle » ; de la loi (« Décret ») des 28 septembre-6 octobre 1791, « concernant les biens et usages ruraux et la police rurale », notamment. S’agissant du texte de 1790, c’est le fameux article 3 du titre XI qui nous importe ici. L’importance de ce texte est telle qu’il est encore aujourd’hui invoqué dans nombre d’arrêtés municipaux belges ou luxembourgeois, deux cents après (« Vu le décret des 16-24 août 1790 sur l’organisation judiciaire, notamment le titre XI, article 3 ») comme un legs de la période française, alors qu’en France on se contente de faire plus sobrement allusion au CGCT, qui reprend banalement la législation antérieure.
4 En modernisant le vocabulaire et l’orthographe, bien sûr.
5 Voir Collection complète des lois, décrets, ordonnances, règlements et avis du conseil d’État, de 1788 à 1836 inclusivement par ordre chronologique… continuée depuis 1836, et formant un volume chaque année, par Jean-Baptiste Duvergier, Paris, 1837, p. 233 sqq.
6 Journal Officiel de la République Française, Débats parlementaires, Sénat, séances des 3, 4 et 6 mars 1884 (comptes rendus datés 5, 6 et 7).
7 Aujourd’hui La Guerche-de-Bretagne Ille-et-Vilaine, ar. Rennes, ch.-l. c.
8 Archives municipales de La Guerche, 20 D, déposé aux Arch. dép. Ille-et-Vilaine, série E.
9 C’est-à-dire en laissant de côté les arrêtés ponctuels, liés à un jour précis, une fête, etc.
10 Le droit en général comme l’avait montré Durkheim. « Mais la solidarité sociale est un phénomène tout moral qui, par lui-même, ne se prête pas à l’observation exacte ni surtout à la mesure. Pour procéder tant à cette classification qu’à cette comparaison, il faut donc substituer au fait interne qui nous échappe un fait extérieur qui le symbolise et étudier le premier à travers le second. Ce symbole visible, c’est le droit », Émile Durkheim, De la division du travail social, Paris, Félix Alcan, 1893, rééd. Paris, PUF, 1986, XLIV-416 p. (p. 28).
11 Christian Thibon, « L’ordre public villageois : le cas du pays de Sault (1848-1914) », dans Maintien de l’ordre et polices en France et en Europe au xixe siècle. Actes du colloque de Paris et Nanterre, 810 décembre 1983, organisé par la Société d’histoire de la révolution de 1848 et des révolutions du xixe siècle, Paris, Éditions Créaphis, 1987, p. 309-328. (p. 320).
12 Cette dernière édition est une énorme somme de 496 pages, Code de police de la ville de Rennes, contenant en outre les lois, décrets et règlements les plus usuels, Rennes, Imprimerie rennaise, 1883.
13 Si l’on y inclut les prescriptions relatives aux foires et marchés, ce total est nettement dépassé : il faut ajouter 10, 95 % à la première ligne, 9, 72 % à la seconde. Mais la rubrique en question, si elle se rattache au « bon ordre », intéresse aussi la sûreté et la salubrité publiques.
14 Distinguée en raison de son importance, mais qu’au sens général, il faut évidemment inclure dans la rubrique « sécurité » (ou sûreté) publique.
15 Voir (avec précautions) Lion Murard et Patrick Zylberman, L’hygiène dans la République, Paris, Fayard, 1996, 805 p.
16 Tableaux dressés d’après le CGAJC, op. cit.
17 On ne peut développer longuement ce point, mais on signalera que la courbe des accidents mortels et celle des suicides, fortement ascendantes elles aussi d’après le Compte Général de l’Administration de la Justice Criminelle dans la première partie du xixe siècle, doivent, pour le moins, se voir affectées d’un fort coefficient critique.
18 Nous renvoyons à notre article, Jean-François Tanguy, « Les autorités municipales et la lutte contre l’incendie en Ille-et-Vilaine au xixe siècle », Revue d’Histoire du xixe siècle, n° 12, 1996, p. 31-53.
19 Bien entendu, si l’on inclut les foires et marchés dans cette rubrique, le « bon ordre » devient le souci premier. Mais, comme on l’a vu, il s’agit là de foyers de troubles quelque peu spéciaux, les plus liés à la vie et aux activités normales, et indispensables, des gens « ordinaires ».
20 Voir Jean-François Wagniart, Le vagabond à la fin du xixe siècle, Paris, Belin, 1999, 348 p. ; Guy Haudebourg, Mendiants et vagabonds en Bretagne au xixe siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 1998, 435 p.
21 Ille-et-Vilaine, ar. Fougères, ch.-l. c. Arch. dép. 2 O (Antrain, mai 1895).
22 C’est nous qui soulignons. De même pour la citation suivante.
23 Journal des Parquets, 1898, partie 3, p. 114.
24 Journal Officiel du 29 mars 1898, p. 1940 à 1945.
25 Gabriel Arché, La Police rurale, thèse de droit, université de Montpellier, 1913, 125 p. (p. 68).
26 Arch. dép. Ille-et-Vilaine, 4 M 24 (Grand-Fougeray ; ar. Redon, ch.-l. c.).
27 Voir Gendarmerie, État et société au XIXe siècle, actes du colloque organisé les 10 et 11 mars 2000 par le Centre de recherches en histoire du XIXe siècle (Universités de Paris I et de Paris IV-UMR CNRS) avec le concours du Service historique de la Gendarmerie nationale, sous la direction de Jean-Noël Luc, Paris, Publications de la Sorbonne, 2002, 510 p.
28 Articles 139 et 140 du Code d’instruction criminelle napoléonien.
29 Voir Fabien Gaveau, « De la sûreté des campagnes. Police rurale et demande d’ordre en France dans la première moitié du xixe siècle », Crimes, Histoire et Sociétés, 2000, n° 2, p. 53-76. Appel à témoins ! Si quelque lecteur voulait bien me démentir, preuves à l’appui, j’en serais le premier satisfait !
30 Elle fut suivie par une brève réaction sous l’Ordre moral par la loi du 20 janvier 1874 – avant la grande libération de 1882.
31 Arch. dép. Ille-et-Vilaine, 1 U, 1re série, dossiers des magistrats, dossier François Bidet. La lettre du procureur au procureur général est du 18 juin 1888, la réponse du procureur général du 2 juillet de la même année. Blain : Loire Atlantique, ar. Châteaubriant, ch.-l. c.
32 Archives Municipales, La Baussaine, n° 24, déposé aux Arch. dép. Ille-et-Vilaine, (série E). Voir ci-dessous.
33 Arch. dép. Ille-et-Vilaine, 4 M 26, Tremblay, le sous-préfet au préfet, 4 octobre 1913.
34 Compte Général de l’Administration de la Justice Criminelle, Paris, un volume par an depuis 1826. Annuaires rétrospectifs de 1880 et 1900.
35 Roger Thabault, Mon village. Ses hommes, ses routes, son école, Paris, Delagrave, 1943, rééd. Presses de la Fondation Nationale des Sciences Politiques, 1982. Ce chef-d’œuvre ne fait nulle place (sauf incidemment et jamais en tant que problématique) à la police municipale.
36 Jean-François Tanguy, « Louarn et Baffet : une erreur judiciaire sous le Second empire », dans L’Erreur judiciaire, de Jeanne d’Arc à Roland Agret, sous la direction de Benoît Garnot, Paris, Imago, 2004, p. 193-228. Bannalec : Finistère, ar. Quimper ch.-l. c.
37 Archives municipales Pléchâtel, n° 38, déposé aux Arch. dép. Ille-et-Vilaine, série E. On ne détaille pas – loin de là – toutes les affaires citées dans le document. Pléchâtel : ar. Redon, c. Bain-de-Bretagne.
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