Les femmes dans les émeutes frumentaires à Rome (ier siècle av. J.-C.-iie siècle apr. J.-C.)
p. 39-51
Texte intégral
1Le 5 octobre 1789, le petit peuple de Paris, excédé par les problèmes de ravitaillement, forme une longue colonne et marche sur Versailles pour obtenir le retour du « boulanger, de la boulangère et du petit mitron ». Les femmes dominent la manifestation et leur présence aux avant-postes du cortège a pour avantage d’attendrir les soldats et de rendre plus difficile la répression. Certains hommes se déguisent même en femme pour profiter des avantages liés à ce genre dans un tel contexte. En ces premiers mois de la Révolution, une telle conduite n’a rien de surprenant et perpétue au contraire les traditions de l’Ancien Régime, qui ont toujours conféré aux femmes un rôle de premier plan dans les émeutes frumentaires1. L’esprit est tenté de généraliser un tel constat et d’y voir une réalité valable en tous lieux et en tous temps.
2Dans l’Antiquité, Rome, à la fin de la République et au début de l’Empire, représentait une mégapole d’un million d’habitants, sujette à des crises périodiques de ravitaillement2. En dépit de la mise en place d’un service public destiné à cette tâche, la préfecture de l’annone, au début de l’Empire, elle ne put jamais résorber ces crises frumentaires, qui donnaient lieu régulièrement à des émeutes plus ou moins graves. De Cicéron, sénateur et orateur de la fin de la République (actif vers 80-40 av. J.-C.) à Dion Cassius, sénateur et historien de l’époque des Sévères (actif vers 190-230 apr. J.-C.), les mentions d’émeutes abondent dans les textes classiques, qu’ils soient grecs ou latins, qu’ils décrivent des faits contemporains ou rapportent des événements plus anciens, parfois situés aux origines mêmes de Rome. Ces « émotions » populaires ont fait l’objet de plusieurs études, mais aucune ne s’intéresse au rôle des femmes, même de la part des historiens anglo-saxons, pourtant pionniers dans l’histoire du genre3. C’est cette absence que nous nous proposons d’interroger.
La femme : une absente des récits d’émeutes
3Disons-le d’emblée : le silence des historiens modernes sur la question n’a rien que de très naturel car il reflète tout simplement le silence des sources antiques. L’analyse des émeutes à Rome n’est pas une tâche facile en raison du caractère lapidaire des mentions textuelles. Quelques mots, quelques phrases, quelques lignes suffisent le plus souvent à résumer plusieurs heures d’émeutes. Pire encore, les émeutiers sont présentés en termes vagues, plus ou moins péjoratifs, qui n’en facilitent pas l’identification. Les auteurs latins affectionnent surtout les mots populus (peuple), plebs (plèbe), multitudo (multitude) ou turba (foule) tandis que les mots demos (peuple), plethos et ochlos (foule) viennent sous le stylet des écrivains grecs4. On considère généralement qu’une hiérarchie claire guidait l’usage de ces termes, conférant une dimension respectable à populus et demos, car ils désignaient par ailleurs le corps des citoyens. En fait, l’opposition entre les désignations valorisantes (populus, demos) et les désignations méprisantes (les autres termes renvoyant à l’idée de foule) n’est pas toujours aussi nette dans les textes, surtout à l’époque impériale qui voit la réunion des assemblées civiques tomber en désuétude5. Rapportant les séditions populaires entraînées par une cherté de blé sous Tibère (32), Tacite note que l’empereur reproche aux magistrats et au Sénat de ne pas avoir réprimé le « peuple » avant d’indiquer qu’il rédige un sénatus-consulte réprimandant sévèrement la « plèbe ». De toute évidence, dans ce contexte, les termes populus et plebs se valent pour l’historien6.
4Une telle imprécision dans les termes s’accompagne naturellement d’une imprécision aussi grande dans la description de la « foule » en question. Aux yeux des écrivains issus de l’élite, les émeutiers constituent un groupe anonyme par essence. Il est frappant de constater que même les meneurs populaires du mouvement ne sont en général pas cités. Il faut que l’auteur soit directement impliqué dans l’affaire, comme Cicéron en 57 av. J.-C., pour que leurs noms soient mentionnés. Frémissant d’indignation, il rappelle alors que les chefs des émeutiers s’appelaient Lentidius, Lollius, Plaguleius, Sergius et Titius7. Parmi ceux-ci ressortent particulièrement M. Lollius, prêt à tuer Pompée, et L. Sergius, ancien partisan de Catilina, présenté comme le « porte-enseigne » (signifer) de la sédition8. Mais Cicéron ne nomme pas tous les meneurs, signe de son mépris, et ne s’intéresse à eux qu’en tant qu’ils sont les instruments d’un homme politique9. Ce qui lui importe réellement, c’est la personnalité du sénateur qui manipule l’émeute à l’arrière-plan car les Anciens sont prompts à voir des complots dans tous les mouvements politiques et sociaux10. En 57, il est évident pour lui qu’il s’agit de Clodius, trublion du parti populaire, son ennemi intime. Mais Clodius, noble et sénateur quoique démagogue, est de son monde.
5Dans le cadre d’un tel discours, les émeutières ont peu de chance d’apparaître, si elles ont existé, et de fait, elles n’apparaissent pas. Cette absence fait fortement contraste avec la place des femmes dans les récits d’émeutes frumentaires de l’époque moderne. Pour estimer justement cette information, il convient d’ajouter que les hommes n’apparaissent pas plus en tant que représentants du genre masculin. Lorsque Cicéron définit les émeutiers qui lancent les troubles de 57 en se rassemblant devant le théâtre puis devant le Sénat, il utilise le terme homo, désignant tout membre de l’espèce humaine, et non pas vir, attaché à sa partie mâle11. Un tel choix sémantique laisse ouverte l’hypothèse d’une présence féminine mais il révèle surtout le caractère fondamentalement asexué de la foule. Les termes grecs et latins qualifiant les émeutiers appartiennent indifféremment au genre masculin (populus, demos, ochlos), féminin (plebs, multitudo, turba), ou neutre (plethos), mais la foule n’a en fait pas de sexe. Anonyme, elle est aussi, et de façon logique, asexuée.
6À cette étape de la réflexion, il serait donc hasardeux de considérer que le silence des sources prouve forcément l’absence des femmes mais il révèle à coup sûr que les questions de genre ne sont pas un enjeu mobilisé par les émeutes frumentaires. Elles auraient pu en être l’occasion, soit en permettant l’expression forte des rôles sexuels, soit en fournissant des exemples d’inversion des rôles traditionnels. Ainsi, les récits antiques sur les guerres civiles fourmillent d’anecdotes sur la conduite des femmes et livrent une gamme de situations très diverses, où les femmes illustrent les vertus féminines, les trahissent au contraire ou se conduisent comme des hommes12. Appien, historien grec du iie siècle apr. J.-C., a ainsi consacré toute une section de sa description des proscriptions de 43 av. J.-C. à la conduite des épouses, de celle qui ne peut abandonner la tête coupée de son mari à celle qui trahit le sien pour filer le parfait amour avec son amant13. La guerre civile est bien l’occasion pour les historiens et moralistes de délivrer un discours sur le genre : ce n’est pas le cas de l’émeute frumentaire.
7La brièveté des récits sur les émeutes n’interdisait pas pour autant toute analyse du phénomène. Les historiens aimaient à mettre en valeur des clivages fondamentaux de la cité romaine mais ces derniers étaient de nature sociale. Dans son histoire des origines de Rome, Denys d’Halicarnasse, historien grec de l’époque d’Auguste, articule son analyse des émeutes autour de la double opposition entre les patriciens et les plébéiens et entre les riches et les pauvres14. Au-delà de ses philippiques contre les brigands, esclaves et miséreux, censés fournir les gros bataillons des émeutiers de son temps, Cicéron livre, peut-être involontairement, des renseignements précieux sur le rôle des boutiquiers dans le mouvement15. On comprend ainsi que les émeutiers, loin d’être des misérables, appartenaient plutôt au « monde de l’échoppe et de la boutique », à une plèbe d’une pauvreté décente, voire aisée16. Les Anciens avaient donc bien conscience que les émeutes mettaient en œuvre des clivages essentiels de leur société mais le clivage sexuel ne leur venait pas à l’esprit.
8Dans ce désert documentaire, un texte fait toutefois exception mais sa signification est pour le moins ambiguë. Il s’agit du récit de la chute de Cléander, principal ministre de l’empereur Commode (189 ou 190), fait par le sénateur Dion Cassius, contemporain et sans doute témoin des faits17. Une disette, délibérément aggravée par le préfet de l’annone, Dionysius Papirius, qui conspirait contre Cléander, déboucha finalement sur une émeute. Elle éclata dans le cirque, lors des courses de chars, à la suite de l’invasion de la piste par une bande d’enfants. Ils étaient conduits par une vierge « d’une taille élevée et d’un aspect farouche », que les spectateurs prirent pour une déesse, sans doute Athéna/Minerve, le prototype de la déesse vierge et guerrière. Les enfants se répandirent en cris contre Cléander, poussant ainsi le peuple à la révolte contre le ministre. Quittant le cirque, les spectateurs marchèrent sur un faubourg de Rome, où l’empereur résidait alors, et obtinrent la tête de Cléander, lâché par un souverain terrorisé.
9Lancé par une « femme », le mouvement prend fin aussi grâce à une femme, puisque Commode abandonne son ministre sur les conseils de sa concubine, Marcia. On peut supposer que la jeune fille était manipulée par le préfet comploteur, Dionysius, et estimer que ce choix révèle une participation courante des femmes dans les émeutes, que des textes moins circonstanciés auraient tue18. Mais le rôle des femmes pendant l’émeute proprement dite n’est pas évident car Dion Cassius ne parle plus de la « déesse » après son apparition dans le cirque : il ne la mentionne pas à la tête du cortège lors du combat avec les prétoriens aux approches du palais impérial. Si l’on se réfère aux conceptions religieuses du temps, il doit penser qu’elle est remontée dans son Olympe après avoir donné l’impulsion initiale au mouvement. Quant aux spectatrices du cirque, il se montre muet sur leur éventuelle participation à l’émeute comme dans tous les récits de ce genre. Plus gênant, le statut féminin de la « meneuse » n’est pas certain puisqu’il s’agit d’une déesse. Or, la culture grecque, à laquelle appartenait Dion Cassius, sénateur romain mais originaire de Bithynie, prêtait aux déesses un genre ambigu, qui interdisait d’en faire une simple incarnation du féminin19. L’interprétation du passage révèle alors toute sa difficulté : dévoile-t-il un rôle féminin généralement tu ou confirme-t-il avec éclat l’absence des femmes ?
Les cadres de l’émeute : les facteurs explicatifs de l’absence féminine ?
10Unanimes quant aux représentations – les émeutes frumentaires ne mobilisaient pas d’enjeux de genre – les récits d’émeutes restent obstinément opaques lorsque l’historien cherche à interroger la réalité de la présence féminine. Il faut donc se tourner vers des indices indirects pour dépasser cette aporie, indices qui nous sont fournis par les cadres politiques ou spatiaux des émeutes. Ces cadres rendent-ils invraisemblable ou au contraire crédible la participation des femmes à ce genre de manifestations ?
11D’un point de vue politique, le cadre de l’émeute exclut clairement les femmes puisqu’il est étroitement associé aux structures civiques, uniquement réservées aux hommes. Il serait en effet erroné de croire que l’émeute frumentaire se déployait « librement » en dehors de tout encadrement politique. Bien au contraire, le lien avec les institutions civiques s’avérait étroit et l’émeutier n’était jamais éloigné du citoyen. Dans leur récit des troubles frumentaires des premiers temps de la République, Tite-Live et Denys d’Halicarnasse insistent sur le rôle des tribuns de la plèbe, authentiques magistrats de la République en dépit de leur caractère particulier, dans le soutien, direct ou indirect, apporté aux émeutes20. L’intervention des tribuns a souvent pour effet de relayer l’action des émeutiers afin de lui donner une issue officielle. Lors de l’épisode de Coriolan (486-485), la plèbe veut prendre les armes et assaillir le patricien arrogant, qui lui refuse une distribution de blé mais les tribuns désamorcent la crise en assignant Coriolan devant l’assemblée21. En 474, au cours d’une disette, la multitude envahit le forum, agresse les magistrats et pille les maisons des riches avant que les tribuns ne la convoquent à l’assemblée pour accuser les patriciens22. On peut estimer que l’action des tribuns contribue à apaiser les émeutes mais elle aide « objectivement » ou volontairement les émeutiers à réaliser leurs buts. De fait, Coriolan fut exilé par l’assemblée du peuple.
12L’assemblée populaire, les comices, n’est jamais éloignée de l’émeute et la simple convocation d’un magistrat suffit à transformer les dangereux émeutiers en honorables citoyens. En 440-439, le démagogue Spurius Maelius tente d’établir son pouvoir personnel par l’exploitation d’une famine mais le dictateur Servilius Ahala fait échec à ses projets subversifs23. Maelius appelle la foule, la multitudo, à son secours, mais Ahala la dompte et exécute l’apprenti tyran. Il parachève ensuite cette reprise en main en convoquant la « multitude » à une assemblée24. Corps civique en puissance, la foule émeutière retrouve ce caractère sur la simple initiative du dictateur. Inversement, des réunions civiques peuvent se transformer en foyer d’émeutes, non pas les séances des comices, bien encadrées par les magistrats, mais les contiones, assemblées préparatoires aux comices eux-mêmes. C’est lors d’une contio que la plèbe se dresse contre le consul Scipion Nasica qui s’oppose à l’envoi d’une mission chargée d’acheter du blé avant d’être calmée par un discours de ce même consul (138)25.
13Or, cette dimension civique condamnait les femmes puisque seuls les hommes participaient aux assemblées. À propos de l’émeute de 474, Denys d’Halicarnasse explique que la population citoyenne était triplée par une masse de non-citoyens, femmes et enfants, esclaves et étrangers, afflux qui aggravait les conséquences de la disette, puis il indique que cette multitude se lança à l’assaut du forum26. Doit-on en conclure que ces catégories, dont les femmes, participèrent à l’émeute ? On pourrait logiquement le penser mais l’historien grec précise aussitôt après que les tribuns convoquèrent les émeutiers à l’assemblée ce qui exclut automatiquement les femmes du mouvement27. Il faut noter que les deux interventions féminines mentionnées par Dion Cassius lors de l’émeute de 189-190 se situent hors des cadres civiques traditionnels. La « déesse » apparue dans le cirque renvoie au rôle religieux des femmes, incarnations ou interprètes de la divinité. Quant à l’action de Marcia, la concubine de Commode qui le convainquit de sacrifier Cléander, elle illustre la nouvelle influence des femmes dans le contexte de la Cour impériale, propice aux intrigues féminines et aux manœuvres occultes.
14Si le cadre politique est résolument masculin, il n’en est pas de même des cadres spatiaux des émeutes, dont la mixité n’est pas contestable. Cœur de la cité, le forum l’était aussi des émeutes et cette localisation est liée à la logique civique du phénomène. Sous la République, il abrite les autorités politiques, puisque la salle de réunion du Sénat y est située et que les magistrats y siègent pour remplir leur charge. Les émeutiers l’investissent donc autant pour faire entendre leurs revendications que pour paralyser le fonctionnement de la cité28. Ainsi font les émeutiers de 41 av. J.-C., à l’époque du second triumvirat, lorsque le blocus des côtes par Sextus Pompée entraîne une des pires crises frumentaires que Rome ait connue : ils occupent le forum pour chasser les magistrats de leurs tribunaux29. Sous l’Empire, en dépit de l’évolution monarchique du régime et du dépérissement de la vie civique, le forum demeure un lieu politique important et continue donc d’attirer les manifestations des émeutiers. C’est sur cette place que l’empereur Claude fut bombardé de croûtons de pain au cours d’une période de disette (51)30.
15Ce rôle civique n’en fait pas pour autant un lieu interdit aux femmes, précisément parce qu’il ne saurait résumer sa fonction urbaine. Centre polyvalent, le forum abrite aussi des boutiques, offre des œuvres d’art sous ses portiques, se présente comme un endroit de flânerie et de rencontres31. Cette fonction de loisirs est encore renforcée sous l’Empire par la construction de la série des forums impériaux au Nord du forum républicain. Les femmes romaines, qui ne sont en rien cloîtrées dans leurs maisons, s’y rendent donc comme les hommes. Dès le début du iie siècle av. J.-C., l’auteur comique Plaute mentionne les femmes mûrissantes, les « vieilles peaux fanées » (scorta exoleta), qui se promènent au pied de la basilique Porcia avec les maris prodigues et les maniaques des transactions 32. Deux siècles plus tard, sous le règne d’Auguste, le poète érotique Ovide signale « les forums » – les forums de César et d’Auguste se sont rajoutés au forum romain – comme des endroits propices aux rencontres amoureuses avec les femmes33. De son temple, qui décore le forum de César, la déesse Vénus se rit de l’avocat frappé par l’amour34.
16La mixité de l’autre cadre spatial, les monuments de spectacles, est encore plus marquée. Dès la fin de la République, le théâtre joue un rôle important dans les manifestations politiques en général et dans les émeutes en particulier35. Le peuple rassemblé peut s’y exprimer collectivement comme à l’assemblée, mais avec beaucoup plus de liberté. Dans son récit des émeutes de 57, Cicéron note que les manifestants se sont rassemblés devant le théâtre avant de marcher sur le Sénat36. Ce rôle est encore accru sous l’Empire puisque la disparition progressive des comices fait des spectacles la principale occasion d’expression populaire, dans le cadre d’un dialogue avec le prince37. Le théâtre conserve sa place mais le cirque acquiert une importance grandissante, comme le révèle l’émeute contre Cléander38. Au terme de l’évolution, à Byzance, l’Hippodrome s’imposera comme le foyer principal des émeutes urbaines39.
17Or, le public de ces spectacles est mixte car les Romaines, contrairement aux Grecques, ont accès à ce genre de distractions, sans doute en raison de l’héritage étrusque40. Sous la République, la mixité est totale puisque les deux sexes se mêlent sur les gradins mais certains débordements amenèrent l’empereur Auguste à cantonner les femmes dans la partie supérieure du monument41. Aux yeux d’Ovide, plus encore que le forum, les spectacles, théâtre et cirque, constituent le terrain idéal pour la chasse aux femmes42. N’est-ce point justifié, puisque les premiers jeux virent l’enlèvement des Sabines par Romulus ? Les femmes, de leur côté, se passionnaient pour les acteurs, cochers et gladiateurs, dont l’aura faisaient de véritables « stars » à la puissante attraction érotique43. Le jour de l’émeute contre Cléander, il y avait donc bien des femmes parmi les spectateurs. Lorsque le public poussa des clameurs en réponse aux cris des enfants entrés sur la piste, elles s’y associèrent très certainement. Mais, ensuite, descendirent-elles des gradins avec les hommes pour marcher sur le Palais impérial ?
Retour sur le genre : la nourriture en question
18La mixité des cadres spatiaux indique donc clairement que le rapport à l’extérieur ne saurait livrer la clef du problème. Contrairement à la femme grecque, la femme romaine n’était pas confinée dans sa maison et fréquentait les lieux qui voyaient l’éclatement et le déroulement des émeutes. Le cadre politique, marqué par la logique civique, rejetait en revanche les femmes. Ce bilan ambigu autant que contradictoire incite à se tourner vers une autre piste pour éclairer la question : le rapport des sexes à la nourriture, et plus particulièrement à sa collecte. L’implication différente des deux genres dans l’approvisionnement familial serait-elle à l’origine de « l’absence » féminine ?
19Pour se procurer sa nourriture quotidienne, l’habitant de Rome disposait de deux moyens à sa disposition, dont le premier constituait un privilège propre au peuple-roi. Depuis la fin du iie siècle av. J.-C., les citoyens romains avaient droit à une distribution de blé organisée par l’État, à bas prix tout d’abord puis gratuite à partir de 58 av. J.-C.44. Sous l’Empire, tous les mois, les bénéficiaires se rendaient au portique de Minucia, munis d’un jeton ou d’une tablette, la tessère, établissant leur droit, pour recevoir leur ration de blé. Équivalent à cinq modii, soit trente-cinq kilos, cette ration permettait de nourrir deux personnes pendant un mois. Il fallait être citoyen romain pour bénéficier de cette distribution, mais, à partir de César, tous les citoyens romains n’y eurent plus droit et l’État romain mit en place un numerus clausus. Les règles précises de ce numerus clausus nous échappent et l’identité des exclus a donné lieu à plusieurs interprétations, qu’il n’est pas opportun de développer ici.
20Pour notre propos, seule importe la question de l’intégration des femmes, issues de familles citoyennes, dans ce système. Les textes littéraires sont muets sur ce point mais quelques documents, de nature épigraphique ou iconographique, signalent des femmes à propos des distributions frumentaires. Dans une inscription, une certaine Mallia Aemiliana se vante d’être bénéficiaire des distributions « avec son fils » (cum filio suo) et un bas-relief de l’arc de Constantin, repris en fait d’un monument de Marc Aurèle, montre une femme présente lors d’une « libéralité » survenue en 17745. Toutefois, il est douteux que ces femmes aient figuré dans ces distributions en leur nom propre. Mallia Aemiliana devait toucher la ration « au nom de son fils » (c’est sans doute ainsi qu’il faut comprendre le texte) et la femme du bas-relief devait accompagner le véritable bénéficiaire, peut-être aussi son fils mineur46. Divisés par ailleurs sur beaucoup de points, les spécialistes de la question se retrouvent pour estimer que les femmes étaient exclues des distributions en tant que telles47.
21Plus curieusement pour notre mentalité actuelle, il n’est pas certain qu’elles aient joué un rôle important dans l’autre moyen de ravitaillement, les courses sur le marché libre. Les distributions frumentaires ne suffisaient évidemment pas à assurer la subsistance d’une famille, aussi bien du point de vue de la quantité que de la diversité, surtout si tous les habitants de Rome n’en étaient pas bénéficiaires. Le marché libre assurait donc une fonction importante dans l’approvisionnement de la Ville. La pratique sociale des achats a peu retenu l’attention des chercheurs jusqu’ici mais les rares études sur le sujet estiment que « faire les courses » comptait parmi les activités masculines48. Les témoignages littéraires en la matière nous montrent en effet des hommes se livrant à cette activité. Absentes des courses alimentaires, les femmes n’apparaissent qu’à propos des achats de vêtements et de chaussures. Dans la description de sa journée idéale, le poète augustéen Horace – client des puissants comme Mécène mais aussi chevalier romain – commence par la flânerie au marché où il s’enquiert du prix des légumes et du blé49. Par la suite, il se promène au Cirque et sur le forum avant de rentrer chez lui prendre le repas léger de la mi-journée.
22Un siècle et demi plus tard, Apulée, dans son roman Les Métamorphoses, montre aussi son héros Lucius faire le marché50. Arrivé dans la cité grecque d’Hypata, en Thessalie, il se rend au marché dans le but de préparer le repas du soir, le plus important pour un Romain, et achète un lot de poissons après marchandage. Il obtient pour « vingt deniers » ces poissons proposés au départ à « cent sesterces ». Très fier de son achat, il rencontre alors un ancien condisciple d’Athènes, Pythias, qui est devenu l’édile, magistrat chargé de la surveillance du marché, de cette cité. Mis au courant du prix, Pythias le trouve scandaleusement élevé, tance vertement le poissonnier et finit par piétiner les poissons sans exiger aucun remboursement. Grâce à cette amicale intervention, Lucius se retrouve sans argent ni souper. L’anecdote révèle clairement le fonctionnement des achats au marché, qui reposent sur le marchandage et flattent la sensibilité agonistique de l’aristocrate qu’est Lucius (il est fils de notable local). Le marchandage se présente comme une lutte dont il faut sortir vainqueur. Par un procédé stylistique amusant autant que révélateur, Lucius gonfle sa victoire en changeant l’unité de compte : cent sesterces correspondent en fait à vingt-cinq deniers et la réduction arrachée péniblement se monte à un cinquième, non à 80 %. Hélas, son ami Pythias ruine sa victoire en dénonçant l’escroquerie du pêcheur51.
23Cette logique agonistique est portée à son paroxysme lors des ventes aux enchères qui concernent les produits de prix. Ainsi, l’empereur Tibère (14-37) mit aux enchères sur le marché de Rome un énorme surmulet qui lui avait été offert. Les enchères opposèrent deux gastronomes de l’époque, également aristocrates, Octavius et Apicius. Le second est resté dans l’histoire comme le prince des gastronomes romains, auteur présumé d’un célèbre livre de recettes, mais c’est le premier qui enleva le poisson pour cinq mille sesterces52. Le philosophe Sénèque rapporte l’histoire pour fustiger la futilité et la vanité des hommes mais les deux enchérisseurs ne faisaient que suivre la logique agonistique qui présidait à ces duels. Modelés par une culture de la compétition, les aristocrates romains – quel que soit leur niveau – l’appliquaient aux achats du marché comme à la carrière politique53. Aristocratique, cette culture était aussi et d’abord masculine : cette culture virile des courses trahit-elle l’absence des femmes ?
24Toutefois, la logique agonistique, caractéristique de cette culture aristocratique masculine, ne se déployait pas forcément à l’occasion de tous les achats mais devait se focaliser sur les aliments d’une certaine valeur. À cet égard, les anecdotes présentes dans les sources revêtent parfois un caractère exceptionnel, par la nature du produit comme par la qualité des acheteurs. Tous les produits n’étaient pas des poissons de luxe ni les acquéreurs des aristocrates54. Si l’histoire de Lucius s’inscrit dans un contexte quotidien, la vente du surmulet représente évidemment un cas rare, propre à attirer des gastronomes de rang, venus exprès pour l’occasion. En l’absence d’étude systématique – qui excède le cadre de cet article –, on ne peut exclure l’hypothèse que les femmes aient pu se livrer à des achats modestes, dépourvus de tout enjeu agonistique. Les bas-reliefs ou peintures représentant des scènes de boutiques mêlent les femmes aux hommes mais celles-là peuvent être des vendeuses et non des clientes55. Il est en effet certain que les femmes tenaient des commerces à Rome. Les textes juridiques prouvent que les propriétaires pouvaient préposer des esclaves aussi bien masculins que féminins à la gestion de leurs boutiques et l’iconographie livre maints exemples de vendeuses, de la marchande de quatre saisons à la bouchère tenant les comptes de son mari56. Seule une étude à la fois sérielle et fine de ces représentations permettrait de distinguer marchandes et acheteuses potentielles57.
25Les enjeux financiers des enchères ne mettaient pas non plus obligatoirement les femmes hors jeu. Pour les suivre, les participants avaient besoin de mobiliser rapidement des fonds et faisaient alors appel à des banquiers, les argentarii, qui siégeaient sur le forum lors des marchés et pratiquaient des prêts à court terme58. Autant dire que les courses, conditionnées par la culture agonistique précédemment décrite, pouvaient occasionner des dépenses impromptues et l’engagement d’emprunts. Une telle dimension financière peut sembler favoriser la prédominance masculine mais les femmes romaines pouvaient aussi prêter ou emprunter de l’argent. Elles le faisaient en toute liberté, sans avoir besoin de l’autorisation de leur tuteur59. Des tablettes retrouvées à Pompéi, les tablettes de Murecine, échelonnées entre les règnes de Tibère et de Néron, livrant les comptes d’une famille de banquiers, les Sulpicii, font ainsi connaître une débitrice, Euplia de Milo, et sa créancière, Titinia Anthracis (ou Bacchis)60. On ne sait à quel type de banquiers appartenaient les Sulpicii et s’ils étaient des argentarii61. Il n’est donc pas certain que la dette ait été contractée à l’occasion d’enchères mais ce constat indique qu’il n’existait pas d’obstacle technique à la participation des femmes à ces opérations. Les obstacles – puisqu’ils semblent avoir existé – seraient donc de nature anthropologique et culturelle.
26En dépit de ces nuances, la piste du rapport à la nourriture se révèle donc éclairante. La discrétion de la présence féminine – pour ne pas parler d’absence – dans l’approvisionnement est exactement parallèle à la discrétion de la présence féminine – pour ne pas parler d’absence – dans les émeutes frumentaires. En ce sens, le problème soulève bien un enjeu de genre, le rapport des deux sexes à la nourriture, plus précisément à sa collecte. Une telle constatation n’invalide pas pour autant les conclusions formulées, dans un premier temps, sur le rôle du cadre civique. Si l’on veut analyser le phénomène dans toute sa complexité, il faut en fait croiser les deux approches. Les émeutes frumentaires éclataient normalement en cas de disette de blé, ce blé distribué par l’État romain à un groupe privilégié de citoyens romains de sexe masculin. Rapport à l’approvisionnement et logique civique conjuguaient leurs effets pour marginaliser les femmes.
27Certes, on ne peut assurer de façon certaine que les femmes aient été totalement absentes des émeutes frumentaires. Mais le silence des sources prouve que leur place était, au mieux, mineure, et ne peut se comparer au rôle moteur joué ultérieurement dans les émeutes de l’époque moderne. Il serait erroné de considérer que ce mutisme des auteurs romains conduit notre enquête à une impasse. Au contraire, il permet de comprendre en quoi l’émeute frumentaire, moment de crise, révélait un trait profond des conceptions romaines sur les rapports de genre : la collecte de la nourriture était une chose trop sérieuse pour la laisser aux femmes.
Notes de bas de page
1 Godineau (D.), Les femmes dans la société française (xvie-xviie siècle), Paris, 2003, p. 76-79.
2 Sur la notion de mégapole dans l’Antiquité : Nicolet (C.), Ilbert (R.), Depaule (J.-C.) (éd.), Mégapoles méditerranéennes. Géographie urbaine rétrospective, Rome/Paris, CEFR 261, 2000.
3 Études d’ensemble : Virlouvet (C.), Famines et émeutes à Rome des origines de la République à la mort de Néron, Rome, CEFR 87, 1985 ; Millar (F.), The Crowd in Rome in the Late Republic, Ann Arbor, 1998 ; Ménard (H.), Maintenir l’ordre à Rome (iie-ive siècle apr. J.-C.), Paris, 2004.
4 Virlouvet (C.), Famines et émeutes, op. cit., p. 55.
5 Constat fait par Yavetz (Z.), « Plebs sordida », Athenaeum, NS, 43, 1965, p. 295-311 ; id., La plèbe et le prince : foule et vie politique sous le Haut-Empire romain, Paris, 1984 (éd. anglaise, 1969), p. 191-209.
6 Tacite, Annales, VI, 13. On peut citer aussi le récit du coup d’État de Spurius Maelius (441-440) par Tite-Live dans un contexte de famine (IV, 12-15). Les partisans séditieux de Maelius sont tour à tour qualifiés de « plèbe » et de « multitude » avant d’être convoqués en assemblée, ce qui en fait l’équivalent du « peuple » civique (certes implicitement).
7 Sur sa Maison, 13 ; 14 ; 21 ; 89.
8 Sur sa Maison, 13.
9 Lorsqu’il cite Lollius et Sergius, il indique que les émeutiers ont aussi d’autres chefs, qu’il néglige de nommer (Sur sa Maison, 13-14). Le but n’est pas de faire une analyse de l’état-major de l’émeute mais seulement de lui donner un visage humain par quelques noms.
10 Virlouvet (C.), Famines et émeutes, op. cit., p. 39-54 ; Garnsey (P.), Famine et approvisionnement dans le monde gréco-romain, Paris, 1996 (éd. anglaise, 1988), p. 271.
11 À Atticus, IV, 1, 6.
12 Analyse dans Hinard (F.), « Solidarités familiales et ruptures à l’époque des guerres civiles et de la proscription », dans Andreau (J.) et Bruhns (H.) (éd.), Parenté et stratégies familiales dans l’Antiquité romaine, Rome, 1990, p. 555-570.
13 Guerre Civile, IV, 23-24.
14 VII, 13, 3 ; 14, 4 ; 17, 1 ; 18, 2. IX, 25, 1-3. XII, 1-2.
15 Sur sa Maison, 13, 89.
16 Virlouvet (C.), Famines et émeutes, op. cit., p. 59-63.
17 Dion Cassius, LXXII, 13.
18 Analyse de l’épisode : Whittaker (C. R.), « The Revolt of Papirius Dionysius, A.D. 190 », Historia, 1964, p. 348-369 ; Alföldy (G.), « Cleanders Sturz und die antike Uberlieferung », Die Krise des römischen Reiches, Stuttgart, 1989, p. 81-126 ; Garnsey (P.), Famine et approvisionnement, op. cit., p. 296 et 314-315 ; Ménard (H.), Maintenir l’ordre, op. cit., p. 43-51.
19 Loraux (N.), « Qu’est-ce qu’une déesse ? », dans Duby (G.), Perrot (M.), Histoire des femmes en Occident, I, Paris, 1991, p. 31-62. Les Grecs connaissaient le masculin theos (dieu) et le féminin thea (déesse) mais appelaient souvent les déesses he theos, « la » dieu, indiquant qu’il s’agissait d’abord d’un être divin affecté secondairement d’un signe féminin.
20 Virlouvet (C.), Famines et émeutes, op. cit., p. 63-66 ; Garnsey (P.), Famine et approvisionnement, op. cit., p. 271.
21 Tite-Live, II, 35. Analyse historique de l’épisode : Salmon (E. T.), « Historical Elements in the Story of Coriolanus », Classical Quaterly, 24, 1930, p. 96-101 ; De Sanctis (G.), Storia dei Romani, II, Florence, 1960 (2e éd.), p. 103-107 ; Briquel (D.), « La nuit du ve siècle », dans Hinard (F.) (dir.), Histoire romaine, I, Paris, 2000, p. 179.
22 Denys, IX, 25, 1-3.
23 Tite-Live, IV, 12-15.
24 Sur cet épisode : Garnsey (P.), Famine et approvisionnement, op. cit., p. 227-228, 235, 237 ; Briquel (D.), Histoire romaine, op. cit., p. 182.
25 Valère Maxime, III, 7, 3.
26 Denys, IX, 25, 1-3.
27 Virlouvet (C.), Famines et émeutes, op. cit., p. 58-59, pense que les non-citoyens, dont les femmes, participaient à l’émeute. On peut estimer aussi que Denys évoque la masse des non-citoyens pour expliquer la gravité de la disette.
28 Virlouvet (C.), Famines et émeutes, op. cit., p. 67-68 ; Millar (F.), The Crowd, op. cit., p. 136.
29 Appien, Guerre Civile, V, 19. Voir aussi Cicéron, À Atticus, IV, 1, 6 ; Sur sa Maison, 13. Tite-Live, II, 35. Denys, IX, 25, 1-3. Dion Cassius, XXXIX, 9, 2 ; XLVIII, 31.
30 Suétone, Claude, 18, 3. Tacite, Annales, XII, 43.
31 Barthélemy (S.) et Gourevitch (D.), Les loisirs des Romains, Paris, 1975, p. xxviii ; Robert (J.-N.), Les plaisirs à Rome, Paris, 1983, p. 50-51.
32 Plaute, Le Charançon, 473. La comédie date de 193 av. J.-C. environ.
33 Ovide, L’Art d’aimer, I, 79-88.
34 Les commentateurs débattent depuis longtemps du statut social de ces femmes : aristocrates ou courtisanes, ingénues ou affranchies ? Pour notre propos, l’important est que ce soient des femmes.
35 Virlouvet (C.), Famines et émeutes, op. cit., p. 67, note 81.
36 Cicéron, À Atticus, IV, 1, 6. Voir aussi Dion Cassius, XLVIII, 31, à l’époque du blocus de Rome par Sextus Pompée.
37 Yavetz (Z.), La plèbe et le prince, op. cit., p. 44-51 ; Ménard (H.), op. cit., Maintenir l’ordre, p. 47-48.
38 Sur le théâtre : Tacite, Annales, VI, 13, 7 ; Ménard (H.), op. cit., p. 48, avance aussi l’hypothèse que l’émeute contre Cléander s’est cristallisée au théâtre avant d’éclater au Cirque car plusieurs acteurs furent victimes de la répression.
39 Cameron (A.), Circus Factions. Blues and Greens at Rome and Byzantium, Oxford, 1976, p. 271-296.
40 Thuillier (J.-P.), Le sport dans la Rome antique, Paris, 1996, p. 32 et 176.
41 Suétone, Auguste, 44.
42 L’Art d’aimer, I, 89-229.
43 Juvénal, Satires, VI, 71-82, 379-397.
44 Études synthétiques : Van Berchem (D.), Les distributions de blé et d’agent à la plèbe romaine sous l’Empire, Genève, 1939 ; Rickmann (G. E.), The Corn Supply of Ancient Rome, Oxford, 1980, p. 156-197 ; Sirks (B.), Food for Rome. The Legal Structure of the Transportation and Processing of Supplies for the Imperial Distributions in Rome and Constantinople, Amsterdam, 1991, p. 307-354 ; Virlouvet (C.), Tessera frumentaria. Les procédures de la distribution du blé public à Rome, BEFAR 286, Rome, 1995.
45 Mallia Aemiliana : ILS 9275. Arc de Constantin : Beccati (G.), « Il rilievo della liberalitas di M. Aurelio », Arch. Class., 24, 1972, p. 59-74 ; Virlouvet (C.), Tessera frumentaria, op. cit., planche VII, fig. 8.
46 Virlouvet (C.), Tessera frumentaria, op. cit., p. 199 et 299.
47 Van Berchem (D.), Les distributions de blé, op. cit., p. 42-43 ; Rickmann (G. E.), The Corn Supply of Ancient Rome, op. cit., p. 182-184 ; Virlouvet (C.), Tessera frumentaria, op. cit., p. 299.
48 Carcopino (J.), La vie quotidienne à Rome à l’apogée de l’Empire, Paris, 1939, p. 214-215 ; De Ruyt (C.), Macellum, Marché alimentaire des Romains, Louvain-La-Neuve, 1983, p. 368-372.
49 Horace, Satires, I, 6, 112.
50 Apulée, Métamorphoses, I, 24-25.
51 Cet épisode du roman semble s’inspirer des scènes de mime. Par ailleurs, les commentateurs estiment que l’histoire dissimule une signification religieuse car le piétinement de poisson fait partie des rites de la religion égyptienne et le nom de l’édile Pythias rappelle le surnom d’Apollon Pythien (Fick-Michel [N.], Art et Mystique dans les Métamorphoses d’Apulée, Besançon/Paris, 1991, p. 117, 225, 242, 320). Mais de telles interprétations n’excluent pas la peinture de la vie quotidienne, puisqu’un texte permet toujours plusieurs niveaux de lecture.
52 Sénèque, Lettres à Lucilius, 95, 42. Sur Apicius : Flower (B.) et Rosenbaum (E.), The roman cookery Book. A critical translation of the Art of cookery by Apicius for use in the study and the kitchen, Londres, 1958 ; André (J.), Apicius. L’Art culinaire, Paris, 1974, p. vii-xxiii ; Alföldi-Rosenbaum (E.), Das Kochbuch der Römer, Zürich-Munich, 1988, p. 9-15 ; Blanc (N.) et Nercessian (A.), La cuisine romaine antique, Grenoble, 1992, p. 10-12.
53 Sur cette culture agonistique présente dans les mœurs culinaires en général : Blanc (N.) et Nercessian (A.), La cuisine romaine antique, op. cit., p. 200-206.
54 Le poisson semble avoir figuré dans les aliments chers : Blanc (N.) et Nercessian (A.), La cuisine romaine antique, ibid., p. 176.
55 Choix iconographique proposé dans : Zimmer (G.), Römische Berufsdarstellungen, Berlin, 1982, p. 94 (n° 2), 99 (n° 7), 220 (n° 180), 222 (n° 182) ; Dosi (A.) et Schnell (F.), Le abitudini alimentari dei Romani, Rome, 1986, p. 50, 74, 77, 81 ; Blanc (N.) et Nercessian (A.), La cuisine romaine antique, op. cit., p. 128, 146. Il faut reconnaître que Carcopino (J.), La vie quotidienne, op. cit., p. 214, évoque aussi l’iconographie dans sa documentation.
56 Esclaves « préposés » : Gaius, Digeste, XIV, 3, 8. Sur ces esclaves : Andreau (J.), « Les esclaves ‘hommes d’affaires’ et la gestion des ateliers et commerces », dans Andreau (J.), France (J.), Pittia (S.) (éd.), Mentalités et choix économiques des Romains, Bordeaux, 2004, p. 111-126 (spéc. 122). Scène de boucherie : Zimmer (G.), Römische Berufsdarstellungen, p. 94 n° 2 ; Carcopino (J.), La vie quotidienne, op. cit., p. 213-214, minore le rôle des femmes dans le commerce.
57 Sur des scènes de vente de tissus, on distingue clairement des femmes parmi les clients (Zimmer [G.], Römische Berufsdarstellungen, op. cit., p. 124-125, n° 38, 125-126, n° 40) mais la chose est moins claire pour les commerces d’alimentation. Cette distinction recoupe les conclusions de Carcopino (J.) et De Ruyt (C.).
58 Andreau (J.), La vie financière dans le monde romain. Les métiers de manieurs d’argent (ive siècle av. J.-C.-iiie siècle apr. J.-C.), BEFAR 265, Rome, 1987, p. 61-137 ; id., Banques et affaires dans le monde romain (ive siècle av. J.-C.-iiie siècle apr. J.-C.), Paris, 2001 (éd. angl. 1999), p. 65-71.
59 Gardner (J.-F.), Women in Roman Law and Society, Londres/Sydney, 1986, p. 18.
60 TPSulp. 61. Commentaire par Camodeca (G.), L’Archivio puteolano dei Sulpicii, 1, Naples, 1992, p. 213-214 ; id., Tabulae Pompeianae Sulpiciorum. Edizione critica dell’archivio puteolano dei Sulpicii, Rome, 1999, p. 154-155.
61 C’est l’avis de Camodeca (G.), L’Archivio puteolano, op. cit., p. 29-36, 196-197, 207, 213-214 ; Tabulae Pompeianae, p. 148-149, 187-188, 205-206. Mais Andreau (J.) se montre très réservé : Banques et affaires, op. cit., p. 146-152.
Auteur
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Un constructeur de la France du xxe siècle
La Société Auxiliaire d'Entreprises (SAE) et la naissance de la grande entreprise française de bâtiment (1924-1974)
Pierre Jambard
2008
Ouvriers bretons
Conflits d'usines, conflits identitaires en Bretagne dans les années 1968
Vincent Porhel
2008
L'intrusion balnéaire
Les populations littorales bretonnes et vendéennes face au tourisme (1800-1945)
Johan Vincent
2008
L'individu dans la famille à Rome au ive siècle
D'après l'œuvre d'Ambroise de Milan
Dominique Lhuillier-Martinetti
2008
L'éveil politique de la Savoie
Conflits ordinaires et rivalités nouvelles (1848-1853)
Sylvain Milbach
2008
L'évangélisation des Indiens du Mexique
Impact et réalité de la conquête spirituelle (xvie siècle)
Éric Roulet
2008
Les miroirs du silence
L'éducation des jeunes sourds dans l'Ouest, 1800-1934
Patrick Bourgalais
2008