Quand l’homme devient démiurge ou la prodigieuse histoire de la ville nouvelle d’Évry
p. 145-159
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Texte intégral
1C’est à un exercice quelque peu périlleux que je dois me livrer devant vous aujourd’hui puisque mon propos porte sur une création urbaine dont l’ancienneté ne dépasse même pas le demi-siècle. Chacun sait ici ce que toute mythologie doit à la longue durée qui en façonne la forme et s’enrichit progressivement avec le temps. À Evry, le temps se mesure à l’aune d’une génération et pourtant, j’ai souhaité relever ce défi d’inclure la naissance d’une ville nouvelle dans notre sujet au travers de ce qu’elle a pu représenter (et représente encore aujourd’hui) à la fois comme prodigieuse aventure créatrice, mais aussi comme concrétisation du rêve parfois utopique de l’homme de créer la ville à son image. Et c’est bien alors à l’émergence d’un mythe auquel nous assistons, c’est-à-dire, au sens étymologique du terme, d’une sorte de « fable », le « mythos » des grecs anciens, où l’aspect fabuleux, incroyable, pratiquement inaccessible au sens commun, devient tout à coup une réalité qui s’impose au quotidien de plusieurs milliers de personnes dont la vie est désormais rythmée non plus par la longue durée de l’histoire, mais par la courte durée que s’imposent les hommes pour répondre, sous forme de constructions tangibles, aux besoins que bouscule brusquement une tendance démographique accélérée.
2Ainsi, sur un site donné, dont le choix obéit prioritairement à la virginité du territoire et à l’absence de contraintes, l’homme se transforme, tel qu’on peut le lire dans le Timée de Platon, en véritable ordonnateur d’un cosmos dont il porte l’entière responsabilité puisqu’il en est pratiquement le seul maître. Créateur, il fixe pour des décennies ce qui deviendra la scène quotidienne du théâtre de la vie et indirectement des destins de ceux qui s’y installent.
3Je ne m’attarderai pas sur la genèse de la mise en place des villes nouvelles de la Région parisienne dans le cadre du Schéma directeur de 1966 pour en arriver d’emblée au sujet précis qui nous concerne ici plus directement, à savoir le cas spécifique d’Évry.
4Michel Boscher, ex-député-maire d’Évry, gaulliste convaincu et père de la loi sur les villes nouvelles, se plaît à raconter ce coup de téléphone surprenant de Roger Frey, ministre de l’Intérieur de l’époque, lui annonçant tout de go cette double promotion d’un petit village d’Île-de-France paisiblement niché sur les berges de la Seine : Évry, Évry-Petit-Bourg, allait devenir tout à la fois préfecture d’un nouveau département issu de l’éclatement de la Seine-et-Oise et site privilégié pour l’implantation d’une structure urbaine décentralisée destinée à contrebalancer l’irrésistible attraction parisienne. Fi de la glèbe et des récoltes abondantes de betteraves et de céréales ; fi des hectares précieusement accumulés par de riches propriétaires locaux, trop heureux souvent de profiter de l’aubaine pour céder à bas prix des terres dont la valeur risquait d’être fortement compromise dans le contexte d’agitation et de grève de 1961 ; fi de la vie au village. La création des villes nouvelles sonnait à tout jamais le glas de la quiétude de paisibles bourgades qui parfois ne comprennent pas encore ce qui leur est brutalement arrivé. De terrains vierges, à 30 kilomètres de Paris, il fallait faire sortir le cadre de vie de ce qu’on estimait alors pouvoir représenter à l’aube de l’an 2000 près de 300 000 habitants. Saisis d’une fièvre contagieuse, les urbanistes, premiers démiurges, ajustaient leurs talons à des starting-blocks imaginaires pour entamer, sur une génération, un marathon créatif comme jamais encore la France n’en avait véritablement connu. Et pourtant, pour cette œuvre de gigantesque envergure, à Évry, la mission d’études qui fut la première à s’installer, dès 1967, sur ce territoire aux futures et nobles destinées faisait piètre figure avec quelques baraquements préfabriqués déposés, comme par erreur, sur les bords de la Nationale 7. C’est là, dans ce qui deviendra bientôt l’Établissement public de la ville nouvelle d’Évry ou EPEVRY, que l’imagination des hommes allait lancer une œuvre d’une telle ampleur que l’on pouvait parfois se demander si elle était un tant soit peu maîtrisée, voire vraiment réalisable. C’est là que la puissance créatrice des concepteurs, urbanistes, architectes, bureaux d’études… allait donner libre cours à une imagination que rien ne venait entraver puisque tout était à faire.
5Des années soixante-dix au début des années quatre-vingt, les pionniers gardent ainsi le souvenir d’un gigantesque chantier et d’un impressionnant dédale d’édifices en cours de construction où les grues régnaient en maîtresses, sentinelles vigilantes d’une nouvelle Rome à l’omniprésence obsédante puisque continuellement démontées pour être remontées quelques centaines de mètres plus loin. L’homme démiurge est d’abord au départ l’homme de la boue, le maître des chantiers, l’homme des excavations monstrueuses qui défigurent le paysage telle une armée de taupes cyclopéennes. Les engins de travaux publics sont partout et l’atmosphère cataclysmique. Dans un article paru dans l’hebdomadaire Le Point en décembre 1975, le journaliste Jean Mahenc commente les résultats d’une enquête de l’IPSOS sous le titre optimiste : « Évry ou le bonheur d’être citadin ». Il conclut en ces termes :
« Est-ce rêver ? Il y a du défi dans tout cela. Mais le sondage d’Évry tend à prouver qu’au-delà de la boue ocre des chantiers, l’audace peut déboucher à terme sur un bonheur nouveau des habitants. Catherine Chatin a raison qui cite ces beaux vers d’Aragon : “Je t’offre, Elsa, ce bouquet, le Paris de l’avenir. Et tant pis pour qui n’en comprend pas la beauté !” Versailles aussi fut, en son temps, une ville nouvelle2. »
6Et comment ne pas adhérer non plus à la prose d’un quotidien de mars 1973 où l’on pouvait lire, sans doute en référence à la Genèse :
« Au milieu de ce branle-bas, de cette transformation énorme, il est difficile de nommer les choses. D’abord parce qu’elles sont trop vastes ou trop neuves et qu’on s’y perd. Ensuite parce qu’il y a un côté magique, un mélange bizarre du temps et de l’espace qui en fait un lieu où souffle l’esprit3. »
7Ainsi, le grand chambardement du paysage des confins du Hurepoix avait commencé. Dans une atmosphère pratiquement surréaliste, le tout premier bâtiment à sortir de terre fut la barre préfectorale. Avec une certaine forme d’incongruité, on vit en effet peu à peu s’édifier l’époustouflante structure de l’architecte Lagneau, toute brute de béton décoffré, comme la mode s’y prêtait alors, au milieu d’un paysage quasi-lunaire. Incongruité d’autant plus réelle que cet immense vaisseau, perché sur de véritables échasses, bouleversait la quiétude séculaire du petit cimetière local qui avait trouvé ici refuge, loin du monde des hommes, à la suite de la douloureuse épidémie de choléra de 1832. Ainsi, il n’est certainement pas faux de dire que le préfet fut le premier (et pendant quelques mois le seul) véritable habitant de la ville nouvelle d’Évry. Mais l’ambition de Lagneau ne se réduisait pas à la construction de la préfecture. C’est toute une cité administrative qu’il s’agissait de mettre en place de la façon la plus harmonieuse possible. Pour ce faire, il s’empara de l’idée ô combien séduisante d’un autre démiurge, Oscar Niemeyer qui, dans les années cinquante, en étroite collaboration avec Lucio Costa, avait imaginé le regroupement de l’ensemble des activités gouvernementales et administratives de la nouvelle capitale du Brésil autour d’un majestueux plan d’eau4. C’est ainsi qu’Évry, dès le début des années soixante-dix, eut à son tour sa place des « Trois Pouvoirs », regroupant autour d’un bassin le bâtiment préfectoral, la salle des séances de l’Assemblée départementale (qui n’en était pas encore à l’heure de la décentralisation) et le palais de Justice. L’originalité du concept valut à Évry le déplacement de Georges Pompidou, qui, en 1971, eut droit aux honneurs de la visite par le premier locataire des lieux, Michel Aurillac. Et c’est dans le même contexte qu’en 1975, Valéry Giscard d’Estaing choisit la préfecture de l’Essonne pour y réunir, après Lyon, son deuxième conseil des ministres hors de la capitale.
8Il fallait maintenant pourvoir à l’accessibilité du site. Que les responsables de l’Équipement de cette période ne me tiennent pas grief de comparer ce qu’ils se mirent alors à réaliser sur Évry avec l’imagination délirante de jeunes enfants. Mais n’est-ce pas là, une fois de plus, un caractère propre au démiurge que de se lancer dans une aventure avec une telle fougue qu’il semble en perdre la raison ? Car c’est bien ainsi que fut perçue, dès le départ, la mise en place d’un réseau routier dont le gigantisme laissait à penser qu’on avait brûlé les étapes comme dans une sorte de boulimie stalinienne où le paraître l’aurait emporté sur le raisonnable. Ainsi, entre ces deux éléments de trame circulatoire que constituaient la respectueuse Nationale 7 et la toute jeune autoroute du Soleil, on vit bientôt s’entrecroiser une multitude de voies et de giratoires qui, vus d’avion, ressemblaient étrangement aux pistes d’un aéroport ou aux mystérieuses compositions du site de Nazca. Les détracteurs furent nombreux à souligner le pharaonisme d’une telle réalisation. Avec le recul, aujourd’hui, chacun fait amende honorable. Les démiurges avaient été visionnaires et ils avaient eu raison. Ils savaient combien l’automobile allait continuer à jouer, jusqu’à la fin du siècle, un rôle fondamental et combien il était important de lui laisser la place qu’elle allait réclamer. Pour autant, il fallait aussi contrebalancer l’omniprésence à venir des véhicules personnels. C’est ainsi qu’un maillage parallèle, sorti de l’imagination des urbanistes, donna naissance au « site propre », voie de circulation essentiellement réservée aux transports en commun, et entrecroisant, sans les couper, les zones de circulation traditionnelle. Ce fut un des arguments forts de la vente du produit « Ville Nouvelle » et c’était, reconnaissons-le, une nécessité. Le temps, sa gestion, sa maîtrise, faisaient en effet partie des préoccupations fortes de l’époque et bien des campagnes publicitaires utilisèrent cet argument pour « vendre » la ville. EPEVRY s’accordait ainsi, en 1973, le quart d’une page du quotidien Le Monde pour y comparer les mérites de la ville nouvelle par rapport à ceux de la capitale. On pouvait y lire ainsi : « 9 heures. Vous êtes bloqués place de la Concorde. À Évry, on va à pied à son travail. 19 heures. Vous serez chez vous dans une heure (au mieux !). À Évry, on habite à deux pas du bureau5. » L’argument reste encore d’actualité, même si la notion d’embouteillage n’est plus l’apanage de Paris et de la très proche banlieue.
9Est-il nécessaire de rappeler qu’à Évry, l’ambition des concepteurs ne s’arrête pas à la route. « Dessine-moi un mouton » répétait avec insistance le Petit Prince de Saint-Exupéry. Ici, les concepteurs de la ville veulent dessiner… une voie ferrée ! Et là encore, nous voici dans une conception presque surréaliste des urbanistes. Depuis 1946, la SNCF n’avait plus créé aucun tronçon ; la concurrence de l’automobile et des réseaux d’autobus, facilitant le porte à porte, avait sonné le glas des voies ferrées rurales devenues obsolètes. On ne cessait alors de fermer des lignes jugées désormais inadaptées. Évry, audacieuse, joue la carte du retour aux sources. Au prix de travaux gigantesques permettant d’accéder par une rampe abrupte au plateau de Grigny, c’est un tronçon agrémenté de quatre gares nouvelles qui va désormais irriguer le cœur de la ville nouvelle et doubler le réseau parallèle à la Seine qui fut structure pionnière lui aussi en son temps dans les années 1840. La démesure est partout : à la date de l’inauguration de la gare centrale d’Évry-Courcouronnes, en décembre 1975, un immense buffet de nappes blanches se déroule sur l’ensemble du quai et les serveurs, vestes blanches et nœuds papillons, officient au milieu d’une foule qui n’en croit pas ses yeux.
101975 avait d’ailleurs été pour les concepteurs de la ville l’année sans doute la plus fastueuse. Les plans élaborés dans les baraquements de l’EPEVRY aboutissaient désormais à la réalisation concrète de ce qui devait être un centre-ville. Fi de la rue traditionnelle, fi des longs alignements de commerces propices au lèche-vitrines : l’heure était à la mode des centres commerciaux régionaux, accompagnés d’équipements multiples susceptibles d’arracher la population à la redoutable attraction parisienne. Car, qu’on le veuille ou non, la capitale restait encore bien proche et le pari de Paul Delouvrier, de créer des centres urbains nouveaux destinés à fixer une partie de la population issue de la croissance des années 1950 et 1960, n’était pas encore gagné. Hélas, comme bien d’autres domaines, l’architecture obéit bien souvent à la mode. Il lui est certes difficile de l’anticiper ; il est regrettable toutefois qu’elle n’ait pas toujours compris qu’au moment de la réalisation d’un quartier, d’un équipement ou d’une structure, les tendances qui ont prévalu à sa conception sont souvent passées de mode et donnent un sentiment d’inadaptation lorsque vient le temps de l’utilisation quotidienne. L’inspiration d’outre-Atlantique avait soufflé, dès les années soixante, l’idée du regroupement de l’ensemble des activités commerciales sur un site centralisateur qui devait porter le nom de « centre-ville » : c’est ainsi que naquit le Centre commercial régional d’Évry 2, avec ses deux grands magasins (à l’enseigne, pour l’époque, d’Euromarché et des Nouvelles Galeries) et une nébuleuse de cent quatre-vingts commerces dans un dédale d’allées susceptibles de recouvrir une zone de chalandise presqu’étendue à l’ensemble du département. Les Évryens croyaient rêver : l’ère du caddy prenait son envol et combien d’enfants connurent ainsi la surprenante ivresse d’être ballottés entre quatre roues au milieu des gondoles chaque sacro-saint samedi qui rythmait de façon récurrente la semaine des familles évryennes. Beaucoup d’ailleurs prirent très tôt l’habitude de dire qu’ils se rendaient à l’Agora ! Le centre commercial avait été en effet conçu en même temps que toute une série d’équipements qui tenaient à affirmer tout à la fois leur caractère culturel et leur centralité. Les Évryens du village, jusqu’ici, n’avaient guère de sources de distractions sur leur étroit territoire. L’urbaniste démiurge leur offrit d’un seul coup de multiples possibilités : outre des équipements sportifs ultra performants, on vit s’ouvrir deux salles de théâtre (aujourd’hui Scène nationale), une gigantesque salle polyvalente de 3 000 places destinée aux manifestations sportives et musicales et, de par sa structure elliptique, baptisée « Les Arènes » ; une bibliothèque centrale, bientôt étoffée d’annexes dans les quartiers et les communes voisines ; cinq salles de cinéma (enfin) à l’heure où les multiplexes n’étaient pas encore vraiment nés et où les cinémas de quartier ne faisaient plus recette. Pour sa naissance, Évry se trouvait bien gâtée et l’Agora, lors de son inauguration en mars 1975, connut une affluence exceptionnelle avec 10 jours de spectacles et de festivités tout comme lors des triomphes impériaux de la Rome antique.
11Bref, le décor était planté. La scène allait alors pouvoir s’animer au rythme de l’arrivée des habitants. Quelques premiers quartiers avaient vu le jour pour commencer à proximité du village : leurs noms bucoliques étaient rassurants. Le Parc aux Lièvres sortait ainsi de terre dès 1970, le Champtier du Coq dès 1972 ; écoles maternelles et primaires, collèges, lycée… croissaient à vue d’œil, argument de vente favori des promoteurs qui savaient combien la ville allait attirer de jeunes foyers, générateurs de futurs clients de la structure « Éducation nationale ». Mais c’est à proximité du Centre commercial d’Évry 2 que devait se concrétiser l’une des réalisations majeures des équipes d’urbanistes, à savoir le quartier des Pyramides d’Évry 1, issu d’un véritable concours international, et ayant abouti à la sélection de l’audacieux projet des architectes Michel Andrault et Pierre Parat. Une vision étriquée de l’histoire d’Évry réduit souvent l’image de la ville à cette tranche d’habitat dont l’évolution sociale a été et reste encore particulièrement douloureuse. Évry s’apparenterait tout entière aux Pyramides tout comme Corbeil aux Tarterêts, Grigny à la Grande Borne, Vénissieux aux Minguettes… C’est faire peu de cas du prodige architectural réalisé par l’équipe UCY qui concluait la présentation de son projet par ces lignes :
« L’idée générale, c’est essentiellement la prise de conscience que la ville doit être conçue comme un réseau de relations, ouvert sur l’environnement, dont l’aménagement physique doit être un facteur d’incitation aux relations humaines, comme un espace de grande complexité visuelle et sociale dont le jeu des formes offre à l’habitant une multiplicité de choix dans sa perception6… »
12Urbanisme sur dalle aidant (c’était alors la mode), les Pyramides donnaient à l’entrée de ville une allure monumentale aux couleurs exceptionnelles, nuançant les tons des matériaux de la glèbe jusqu’au ciel pour s’intégrer le mieux possible à l’environnement. Trente ans ont passé ; les pionniers ont souvent décidé d’aller faire racine ailleurs ; l’image du quartier est fortement négative. Pour autant, la conception en fait un véritable modèle d’architecture digne des structures du Front de Seine à Paris. On se surprend d’ailleurs parfois à penser ce qu’aurait pu être le même quartier si l’architecte Paul Chemetov, arrivé second au concours, avait réussi à imposer sa gigantesque barre de logements de près d’un kilomètre, sorte d’épine dorsale destinée à voir peu à peu se greffer les extensions éventuelles au rythme de l’évolution de la population.
13Ainsi, en 1975, la ville était sortie de son stade embryonnaire. La volonté de la construire sous la forme d’un X entrecoupé sur ses quatre branches d’une trame verte mettait à mal toutes les contestations des défenseurs de l’environnement. Et là encore, le démiurge, paysagiste cette fois-ci, jongla avec les éléments et les modela : les pentes artificielles de cette trame verte ne furent-elles pas issues en partie du déchargement in situ des camions de terre parisiens évacuant le trop-plein du creusement du trou des Halles ? Juste retour des choses d’ailleurs : c’étaient les meulières d’Évry et des communes avoisinantes qui avaient été utilisées, au tout début du xxe siècle, pour la construction des tunnels et couloirs du métropolitain ! Ainsi, tout comme dans la Genèse, l’espace avait pris forme et l’on s’occupait désormais de son environnement. C’est par dizaines de milliers qu’on put compter les plantations destinées à agrémenter les coulées vertes de l’agglomération nouvelle pour constituer un gigantesque poumon chlorophyllien dont les vertus récréatives s’annonçaient prometteuses. Maigres tiges au départ, trente ans plus tard, l’agglomération est obligée d’élaguer aujourd’hui de façon drastique ce qui fait la fierté de la ville. Alphonse Allais l’avait dit avant tous les autres : « J’ai choisi d’habiter une ville construite à la campagne » ; Sofinco-La Hénin le plagiera dans ses arguments publicitaires de 1979 : « Nous avons transféré Paris à la campagne7. » Ici, comme par miracle, c’était donc chose faite dès les premiers balbutiements. EPEVRY, fier de son produit, s’enhardit, en 1987, à en vanter ainsi les mérites :
« Il y a des villes vertes et accueillantes où il fait bon vivre.
Il y a des villes en effervescence où se jouent les spectacles dont tout le monde parle.
Il y a des villes dynamiques où l’on peut apprendre un métier d’avenir et travailler dans des entreprises de pointe.
Mais combien de villes sont-elles comme Évry, à la fois accueillantes et en effervescence, vertes et dynamiques8 ? »
14Le tableau serait incomplet si l’on omettait de préciser que le grand maître d’œuvre qu’était EPEVRY avait décidé de conserver aux trois autres villages de l’agglomération nouvelle une forme de ruralité en y accordant un soin tout particulier à l’habitat pavillonnaire. Lovés autour de leur église, Bondoufle, Courcouronnes et Lisses connurent alors la fièvre de la construction tous azimuts. Les promoteurs s’étaient fort habilement engagés dans la brèche ouverte par l’Établissement public et les programmes de tous types se multipliaient à profusion. L’association « Mémoire de la Ville Nouvelle », fondée en 1982 s’est fait un devoir de conserver précieusement tous les dépliants publicitaires de ces programmes aux attraits flatteurs et accessibles, selon les prestations, à tous les budgets. Il y aurait là de quoi réaliser un travail de recherche passionnant. Peut-être est-ce ici le moment de faire le portrait de l’« homo evryanus », au moins aux origines. Il est jeune avant tout, récemment marié, voire père de famille en bas âge. Son installation primitive se satisfait d’un habitat social de qualité. Mais il aspire bientôt à plus de place et à une certaine forme d’appropriation de ses murs. Le voici devenant copropriétaire dans une petite résidence d’immeubles où il apporte sa participation à la gestion collective de la copropriété. En parallèle, parce que souvent déraciné, il investit dans cette vie associative qui fait la force et la richesse de nos communes de banlieue, et qui lui donne la possibilité de façonner modestement la ville à son image. Vient alors le rêve pavillonnaire, la famille s’étant agrandie, sorte de consécration permettant enfin, à l’abri des soucis financiers, de pratiquer l’art de cultiver son jardin… « D’abord on s’installe à Évry pour y trouver un logement, disait Jacques Guyard, député-maire d’Évry jusqu’en 2001, ensuite on choisit son quartier pour y vivre9. » Caricature diront d’aucuns ? Je n’en suis pas si sûr. Pour autant, l’« homo evryanus » n’a plus aujourd’hui ce profil uniforme. L’arrivée en nombre de populations d’origine étrangère, dont l’installation récente ne permet pas encore de réfléchir en terme d’enracinement, crée une diversité et une richesse culturelle qui ne se reconnaît pas toujours dans ce schéma européen et amène à réfléchir sur les notions d’intégration, de valorisation, mais aussi hélas de paupérisation sur lesquelles je conduis actuellement quelques travaux de recherche.
15Mais la ville dans tout cela, et ses concepteurs, nous les avions presque oubliés. Au début des années quatre-vingt, les voilà tout à coup pris de panique. À vouloir trop bien faire, ils en ont oublié l’élément essentiel de la ville, celui qui crée l’ambiance, la convivialité, l’inter-relation. En fait, la réalité, brutale et irréversible, s’impose à EPEVRY : Évry ne connaît pas la rue ; la rue au sens strict du terme ; la rue dans sa banalité ; la rue où l’on flâne ; la rue où tout retrouve enfin sa place : l’habitant, le piéton et la voiture ; la « rue-corridor » qu’exécrait justement Le Corbusier. La dalle devient soudain objet de mépris ; fustigée par ceux qui la fréquentent, elle se déserte peu à peu. Il est grand temps de réagir : les années 1980, qui donnent naissance aux nouveaux quartiers des Épinettes et des Aunettes, redonnent à la rue son droit de cité, avec un système de maillage régulier. Le trottoir revient en force ; l’habitat se désuniformise ; chaque quartier revendique son originalité et ses dimensions humaines ; même les matériaux prennent conscience d’une réadaptation à l’homme : le béton n’est plus en cour ; la brique est désormais plébiscitée et la ville prend son caractère d’urbanité. Seul vestige des années antérieures : la mixité sociale reste le fil directeur des urbanistes dans une philosophie généreuse parfois quelque peu utopiste. Mais l’utopie n’est-elle pas le propre de toute création spontanée, affranchie de quelque contrainte que ce soit ?
16Au demeurant, il manquait encore quelque chose. Une ville ne se retrouve pas autour d’une cité administrative, fermée totalement en dehors des heures de bureaux. Une ville ne se retrouve pas dans un centre commercial fut-il particulièrement attractif et dynamique. Une ville a besoin d’un espace consensuel pour pouvoir résonner dans l’ensemble du paysage urbain, d’une certaine forme de centralité qui soit en même temps un lieu de reconnaissance pour les hommes. À défaut d’y avoir songé assez tôt, c’est la fin des années quatre-vingt et le début des années quatre-vingt-dix qui va faire germer l’idée de création d’un véritable centre-ville. Et tous les atouts sont en place : la Chambre de commerce et d’industrie du département de l’Essonne a besoin, pour une réelle reconnaissance, et en raison de la multiplication de ses services, de venir prendre pied dans la ville-préfecture ; la modeste mairie du village, inaugurée en 1961 par le Premier ministre Michel Debré, souffre de l’étroitesse de ses locaux : le député-maire Jacques Guyard, saisit alors l’occasion de doter la commune d’un magnifique hôtel de ville à façade en verrière signé Jacques Lévy et inauguré en 1991 par François Mitterrand. Quant à l’évêque du tout nouvel évêché d’Évry-Corbeil, Monseigneur Herbulot, il est persuadé que sa place est aussi au cœur de la ville et, après les années de frilosité qu’avait connues la communauté chrétienne, il s’engage dans l’un des plus beaux projets du siècle : celui de la cathédrale circulaire de la Résurrection, seul édifice de ce genre construit en France au xxe siècle, « Maison de Dieu, Maison des Hommes » sortie du génie créatif de l’architecte tessinnois Mario Botta10. Est-il besoin, à l’occasion, de répéter que tous les grands architectes de la fin du xxe siècle mirent leur patte personnelle sur l’architecture évryenne11 ?
17Ainsi, la face du théâtre vient à changer : autour de l’immense place des Droits de l’homme et du citoyen, la ville vient enfin de se doter d’un cœur et d’une âme. Il lui a fallu presque 30 ans pour en arriver là : c’est peu lorsqu’on pense à la durée du temps historique ; c’est beaucoup pour ceux qui attendaient qu’une ville de 50000 habitants se dote des structures indispensables à un bon niveau de fonctionnement. Mais ici, en réalité, l’Établissement public n’avait fait que copier sur l’organisation de la modeste place du village, avec la mairie, l’église et l’incontournable bistrot. À Évry, il s’appelle de façon plus ambitieuse « hôtel Mercure ». Mais la trilogie reste bien la même.
18Lorsque les villes nouvelles commencèrent à se mettre en place sur le territoire de l’agglomération parisienne, Évry eut la chance de se voir offrir un cadeau de baptême particulièrement généreux : celui de l’implantation, en 1966, des installations de la SNECMA, à cheval sur les limites d’Évry et de Corbeil-Essonnes. L’augure était d’importance pour les fondateurs de la ville, à défaut de vautours comme au temps de la Rome antique. C’est dans la même veine qu’Évry se trouvera dotée, 20 ans plus tard, comme ses sœurs, d’une structure universitaire à l’avenir prometteur. Très embryonnaire au départ, rattachée à l’origine à Paris, installée pour ses premiers pas dans d’anciens bâtiments administratifs, elle bénéficia très rapidement, de la part de nos concepteurs, d’un regard attentif. Une université, ce serait, à l’horizon 2010, près de 20 000 étudiants assurant un dynamisme intellectuel et un potentiel de consommation et d’animation exceptionnel. C’était la possibilité de réfléchir à une implantation au cœur même de la ville pour éviter l’isolement des campus qui n’était plus de mise. La cogitation intellectuelle fut longue ; le résultat spectaculaire : les années quatre-vingt-dix virent ainsi s’édifier en plein centre-ville, là où des terrains avaient été soigneusement conservés, un monumental bâtiment du premier cycle de style « paquebot », un gigantesque Institut des matériaux et une bibliothèque universitaire ô combien attendue totalement ouverte sur l’extérieur. S’il fallait faire vivre ce quartier, à proximité de la gare RER d’Évry-Courcouronnes, c’est bien avec une telle réalisation qui fourmille d’activités à toutes les heures de la journée et constitue un exceptionnel pôle d’attractivité pour l’ensemble du département12. Et pouvait-on rêver, lorsque l’on est démiurge, d’un nom plus adapté à une université que celui d’« EVE », autrement dit Évry-Val-d’Essonne ?
19Les concepteurs se prirent enfin à rêver, puisqu’université il y avait, au statut de technopole que pourrait afficher l’agglomération pour en faire un lieu d’exception dans un domaine de pointe. Pendant quelques années, on cibla l’informatique qui semblait promise à un brillant avenir : Hewlett Packard, Digital… firent les beaux jours de projets ambitieux qui connurent hélas bientôt leurs limites avec moult restructurations et déménagements de sièges. L’idée d’une Silicon Valley au sud de la capitale avait du mal à s’implanter et souffrait d’un tiraillement d’influences venues du nord du département, autour des sites d’Orsay, de Palaiseau et de Saclay. C’est un projet d’une autre ambition qui, finalement fut mis sur les rails, de façon également embryonnaire au départ, puis propulsé par un élan médiatique généreux autour des opérations annuelles du Téléthon. Aujourd’hui, l’agglomération d’Évry est devenue incontestablement le centre mondial de la recherche sur la génétique avec le Génopôle et un nombre impressionnant de laboratoires ne cessent de se greffer sur les installations préexistantes et constituent une technopole du gêne dont l’avenir semble devoir être brillant. Le paysage s’en ressent et à défaut d’avoir réussi l’entrée de ville dite « Portes de Beauce », les concepteurs peuvent se féliciter d’une entrée de ville encore plus noble dans la partie sud là où se décryptent les mystères de la génétique et les mystères de la vie à une vitesse prodigieuse.
20Avec cette envolée scientifique, le cycle ne serait-il pas achevé ? Tout comme dans la Bible, les démiurges, ceux qu’Yves Damoiseau surnomme « les missionnaires » urbanistes13, décidèrent enfin de mettre fin à leur tâche. Il y eut ainsi des jours, il y eut ainsi des nuits, il y eut encore des matins et ils décidèrent enfin de se reposer. L’État, grand ordonnateur de l’ensemble du cosmos, leur assigna la fin de leur mission. En 2001, sonna le glas de l’Opération d’intérêt national : la Communauté d’agglomération reprenait le chemin du droit commun. EPEVRY fermait ses portes et ses baraquements, d’où émergea toute l’âme d’une ville, sont désormais réduits à néant. Orpheline de père, la Communauté d’agglomération cherche ses marques : affaiblie politiquement en raison des rivalités qui la marquent, elle tente vainement de solliciter de nouveaux partenaires pour poursuivre son chemin. L’industrieuse Corbeil-Essonnes lui tourne le dos, lui préférant les attraits de la rive droite de la Seine ; la voisine la plus proche, Ris-Orangis, se perd en hésitations14. Seule Grigny se sent prête à entrer dans l’arène, mais l’image médiatique négative de la ville de la Grande Borne ne séduit guère les élus. La paupérisation d’Évry est un fait indéniable. Autour du nouveau député-maire, Manuel Valls, le volontarisme est grand de vouloir redorer le blason de la ville. Les démiurges auraient-ils fait tout et n’importe quoi sans se soucier de ce qui deviendrait le cadre de vie de plus de 80 000 personnes ? Il y a pourtant dans ce travail mené sur trente années de réelles volontés constructrices, une foi évidente dans l’homme et dans sa façon de s’approprier l’environnement. Grands ensembles ou villes nouvelles ; banlieue ou zone de résidence ? Vaste débat. Le temps a passé trop vite pour laisser à chacun la possibilité de prendre la mesure de ce qu’était ce formidable défi que les hommes s’étaient lancé. « Capitale-éprouvette de l’Essonne, née d’un caprice de l’État15 »aux dires de la presse économique de 1993, est-il possible, pour une ville nouvelle d’amortir en une génération ce qu’une ville traditionnelle amortit en deux siècles ? Ce qui compte, affirmait avec conviction le préfet Maurice Doublet en 1973, c’est « offrir une ville où l’homme peut vivre, peut rire, peut aimer16 ». Sans optimiste aveugle et partial, je reste persuadé qu’il est possible de poursuivre avec sérénité l’œuvre grandiose des concepteurs. Il en va du bonheur de tous ceux qui nous suivront. Et finalement, comme l’écrit Jacques Fleury dans le quotidien Le Figaro en février 1999, « cette ville nouvelle est avant tout plus attrayante que détestable17 ». Je me suis rendu récemment dans ce cimetière d’Évry dont je mentionnais la présence un peu plus haut à proximité de la préfecture. J’y ai eu une pensée émue pour Paul Delouvrier qui se plaisait à répéter que les villes nouvelles auraient vraiment atteint leurs objectifs le jour où leurs cimetières seraient remplis ! À Évry, c’est presque chose faîte. Et pour conclure par une citation, je céderai volontiers la parole à Patrick Desavie qui, dans les colonnes du Monde de juin 1986, écrivait avec force : « C’est fantastique de construire sa ville. Ce n’est pas donné à tout le monde18. » Delouvrier aurait ajouté qu’il s’agissait d’un véritable combat. Dès 1983, il souhaitait que l’université et les intellectuels en écrivent un jour l’histoire. La récente création de la mission interministérielle d’histoire et d’évaluation des villes nouvelles françaises que préside Jean-Eudes Roullier est une réponse à ses sollicitations : avec elle, les villes nouvelles entrent désormais dans l’« Histoire » et le mythe des pionniers rejoint celui de tous les fondateurs. Il ne lui reste plus qu’à se peaufiner avec le temps.
ANNEXES

1. – Le quartier des Pyramides d’Évry (Ph. Dominique Planquette, EPEVRY).

2. – La place des Droits de l’homme et du citoyen, avec la cathédrale de Mario Botta (Ph. Dominique Planquette, EPEVRY).

3. – Habitat individuel : Bondoufle (Ph. Dominique Planquette, EPEVRY).

4. – Préfecture sortant de terre (Ph. Dominique Planquette, EPEVRY).

5. – Construction de la voie ferrée (Ph. Dominique Planquette, EPEVRY).
Notes de bas de page
1 La plus grande partie des terres agricoles de la région d’Évry appartenaient alors à la famille Pastré qui, dans le contexte tourmenté de mai 1968, sut saisir l’occasion des offres de l’État pour s’en défaire.
2 Catherine Chatin venait d’écrire un ouvrage consacré à la naissance des neuf villes nouvelles françaises : Chatin Catherine, 9 villes nouvelles. Une expérience française d’urbanisme, Paris, 1975 ; Le Point, n° 168, 8 décembre 1975, p. 94.
3 Le Journal du Dimanche, dimanche 18 mars 1973, supplément réalisé par Alain Buhler et Jean-Michel Petraru, Spécial Évry, p. A.
4 Merlin Pierre, Les villes nouvelles, « Villes à venir », Paris, 1972, p. 252-265.
5 Le Monde, plusieurs parutions en octobre-novembre 1973.
6 Évry 1, Concours d’aménagement urbain, IAURP, vol. 31, 1973, p. 61.
7 Publicité de Sofinco La Hénin dans Le Monde, 10 octobre 1979.
8 Dépliant publicitaire d’EPEVRY : Évry, ville d’action, 1987.
9 Le Monde, 6 juin 1986, « Évry, le béton prend de l’âge », article de Patrick Desavie.
10 Longuet Jacques, Autour d’une cathédrale, Paris, 1995.
11 Dessein de ville. Des architectes et urbanistes pour l’agglomération d’Évry, SAN Évry/EPEVRY, 1991.
12 C’est dans le cadre du département d’histoire de cette université, en liaison avec les sociologies, que sera assuré, à partir de 2003, un enseignement consacré à l’histoire et à l’évolution des villes nouvelles françaises.
13 Longuet Jacques (dir.), Évry, moments de vie, histoires, architectures, Lausanne, 1997, p. 68.
14 Depuis le 1er janvier, Ris-Orangis est entrée dans la Communauté devenue « Communauté d’agglomération Évry Centre Essonne ».
15 « Réussir en Essonne », Le magazine économique de l’Essonne, n° 13, novembre 1993.
16 Cité dans Le Journal du Dimanche, dimanche 18 mars 1973, op. cit. Propos de M. Doublet à l’occasion de la proclamation des résultats du concours d’Évry 1, 12 juillet 1972.
17 Le Figaro, vendredi 26 février 1999, « La ville nouvelle à l’heure des choix de l’âge adulte », article de Jacques Fleury.
18 Le Monde, 6 juin 1986, op. cit.
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