« Je suis votre meilleur ami »
Une amitié père-fils à travers la correspondance de Camille Desmoulins
p. 223-238
Texte intégral
1Prononcé à propos de Camille Desmoulins, le mot « amitié » ravive d’abord l’image d’une proximité de jeunesse avec Robespierre, que les deux hommes rappellent à plusieurs reprises : le premier dans son périodique, les Révolutions de France et de Brabant (1789-1791), quand il se réjouit des prises de position démocratiques de son « cher camarade » ou évoque leur « amitié de collège1 » ; le second, comme témoin au mariage de son ami (décembre 1790), ou lorsqu’il prend sa défense aux Jacobins dans l’hiver 1793-1794 – avant de s’en désolidariser2. D’autres amitiés de collège transparaissent, ou dans la correspondance de Camille Desmoulins, ou dans ses journaux, dans lesquels il relate parfois des souvenirs ou exprime ses sentiments ; elles concernent l’Auxerrois Grasset, devenu commissaire des poudres à Lyon, que l’avocat nomme son « meilleur ami » (1788), ou les confrères Braine et Cousin de Beaumesnil, le médecin de marine Vacherot, ou encore Stanislas Fréron et Beffroy de Reigny3. D’autres amitiés naissent pendant la Révolution, particulièrement avec Danton, dont Camille Desmoulins et sa jeune épouse fréquentent souvent l’appartement en 1792 et 17934. Ces relations, cependant, ne peuvent s’approcher que par de rares allusions et demeurent difficiles à analyser. Les sources manquent.
2À se pencher sur la correspondance de Camille Desmoulins, une autre amitié se laisse percevoir, qui le lie à son père. Ce dernier, installé à Guise, en Picardie, lui exprime son indestructible attachement et son amour par des expressions comme : « Je suis votre meilleur ami », « votre plus sincère et meilleur ami5 ». Les formules n’ont rien d’original et se retrouvent, peu auparavant, dans les lettres d’un subdélégué de Limoges à son fils : « Soyez persuadé que vous n’avez pas de meilleur ami au monde qu’un père prêt à se sacrifier pour votre bonheur6 » (1772). Une contemporaine, Rosalie Jullien, ne manque pas également d’appeler son enfant : « mon ami, mon cher fils7 » (1785). L’amitié ne se cantonne pas au dehors du cercle familial, où les historiens d’aujourd’hui la traquent prioritairement8. Dans son traité De l’amitié9, paru en 1761, Mme Thiroux-d’Arconville consacre des chapitres spécifiques à l’amitié entre les enfants et leurs père et mère (chap. i), entre frères et sœurs (chap. v), entre époux (chap. vii) ou avec la parenté (chap. vi). Pour les philosophes et moralistes, c’est avec ces « amis de famille & de parenté10 », pour reprendre une formule de l’Encyclopédie, que se nouent les liens les plus solides et les plus intimes11. C’est cette amitié familiale, et particulièrement les liens entre un père et son fils, que la correspondance de Camille Desmoulins permet d’approcher en temps de Révolution.
Quarante-sept traces d’amitié père-fils
3Si les correspondances de l’époque révolutionnaire, au même titre que les journaux personnels et les mémoires, ont dès le xixe siècle retenu l’attention des historiens, le regain d’intérêt pour les ego-documents a permis de sortir de l’ombre nombre de ces sources encore conservées dans les bibliothèques, les archives ou des collections privées12. A priori, les principaux révolutionnaires ne sont guère concernés par ce long oubli ; les correspondances des Brissot, Robespierre ou Marat ont depuis longtemps fait l’objet d’éditions. C’est également le cas pour Camille Desmoulins, dont le volume de Correspondance inédite publié par Matton aîné (1836) demeure une source fréquemment citée13. En son sein, le principal ensemble concerne 31 lettres échangées entre Camille Desmoulins (24) et son père (7) de 1789 à 1794. À qui veut approcher les relations entre les deux hommes, les ressorts de leur amitié, cette correspondance, cependant, déçoit ; elle se révèle essentiellement politique.
4Mais peut-on se fier à cette œuvre de 1836, particulièrement pour l’étude de relations filiales ? Lorsqu’il rend publiques les lettres qui lui ont été remises par la veuve Duplessis, la belle-mère du Conventionnel, l’avocat et républicain Marcellin Matton n’ambitionne pas une édition exhaustive et rigoureuse. Il est d’une époque où les exigences de la discipline historique demeurent incertaines et, surtout, entend élever à son parent un monument digne de l’admiration qu’il lui porte. Ainsi, sans le préciser à ses lecteurs, il renonce à publier certaines lettres en sa possession, souvent adressées par le père à son fils, de la même manière qu’il occulte les missives du jeune Desmoulins à Mme Duplessis, la mère de sa future épouse Lucile14. Plus encore, dans les lettres sélectionnées, il n’hésite pas à couper des passages qui concernent l’exercice de la profession d’avocat, les affaires de famille, ou desservent la mémoire du « grand homme ». Par moments, il reformule même certaines phrases ; dans une lettre du Conventionnel à son père, du 1er août 1793, il ajoute à une dénonciation de la guerre les mots « aucun de ces meurtres », qui transforment Desmoulins en contempteur précoce des lois d’exception et de la terreur15.
Tableau 1. – Lettres de Desmoulins publiées en 1836 par l’avocat Matton : une libre transcription…
Édition de Matton aîné | Document original |
Au moins, je n’ai aucun de ces meurtres à me reprocher, ni aucune de ces guerres contre lesquelles j’ai toujours opiné, ni cette multitude de maux, fruits de l’ignorance et de l’ambition aveugle assises ensemble au gouvernail. | Du moins, je n’ai à me reprocher ni aucune de ces guerres, contre lesquelles j’ai toujours opiné, ni cette multitude de maux, fruits de l’ignorance et de l’ambition aveugle assises ensemble au gouvernail. |
5Pour apprécier la richesse de la correspondance entre Camille Desmoulins et son père, un retour aux sources s’impose. Aux 31 lettres publiées en 1836, qu’il convient de confronter aux originaux, pour la plupart légués par la famille Matton à la Bibliothèque historique de la ville de Paris16, il est possible d’en ajouter seize autres, reproduites par Camille Desmoulins lui-même dans ses Révolutions de France et de Brabant (trois), éditées ultérieurement par Marcellin Matton (trois), reproduites dans un catalogue de vente (une) ou totalement inédites (neuf). Ces dernières sont conservées dans les collections de la Bibliothèque historique de la ville de Paris, de la bibliothèque municipale de Soissons, des archives départementales de l’Aisne et de l’ancien musée des Lettres et Manuscrits (Paris)17. Pour les quarante-sept courriers ainsi identifiés, trente-cinq originaux ont été retrouvés18.
6Dans ce corpus, trente lettres sont de Camille Desmoulins ; elles sont très inégalement réparties entre 1784 (une seule) et la période 1789-1793. Certes, il ne s’agit là que d’épaves d’une correspondance bien plus riche ; les pertes sont d’ailleurs plus importantes encore du côté du père, dont les dix-sept lettres se retrouvent parfois sous forme de minutes, écrites au dos des courriers du fils. Bien qu’incomplet, l’ensemble mérite pourtant attention, car il permet d’approcher l’action de l’un des principaux journalistes démocrates des débuts de la Révolution, mais aussi les relations complexes entre un père et son fils en un temps où la Révolution a divisé plus d’une famille, voire transformé les relations filiales19.
Tableau 2. – Correspondance entre Camille Desmoulins et son père pendant la Révolution : nombre de lettres conservées (1789-1794).
Lettres | 1789 | 1790 | 1791 | 1792 | 1793 | 1794 |
C. Desmoulins à son père | 12 | 7 | 3 | 4 | 3 | 0 |
Père de C. Desmoulins à son fils | 0 | 6 | 2 | 7 | 1 | 1 |
7Destinées à maintenir un lien fort entre un père et son fils aîné, âgé de 29 ans au printemps 1789, et plus largement entre une famille et l’un de ses membres, ces lettres permettent aux deux scripteurs d’échanger des nouvelles, de discuter politique et de se manifester leur estime réciproque. Dans ces échanges, où le vouvoiement est de rigueur, c’est le père qui se qualifie d’ami du fils. Camille Desmoulins, de son côté, demeure l’enfant respectueux qui, jusqu’en juillet 1789 encore, signe parfois : « Votre très humble et très obéissant fils, Desmoulins20 », puis, plus sobrement, « votre fils Desmoulins21 » ; chez lui, les mots d’affection sont plus rares, moins explicites, même s’il assure parfois « aimer » son père (1789), lui témoigne son « amour filial » (1792) ou l’embrasse en fin de courrier (1789)22. Bien que Camille Desmoulins n’hésite pas à s’exprimer très librement, le respect filial ne s’efface jamais. Par-delà les mots, cependant, l’amitié se manifeste par une attention aux sentiments de l’autre, par une confiante liberté d’expression et la conscience des obligations qu’entraînent les liens du sang ; par moments, la Révolution paraît cependant la modifier en partie.
L’estime et la fierté d’un père
8Entre le père et le fils, la correspondance relève d’une habitude qui remonte sans doute aux années de Camille Desmoulins au collège Louis-le-Grand, où il est entré en 1771. La seule trace de ces anciens échanges est une lettre de 1784 ; désormais étudiant en droit, le fils invite son père à venir dans la capitale défendre lui-même des droits qui mettent en jeu la fortune familiale : « Qu’est-ce que 25 louis dépensés s’ils vous procurent le gain de votre procès ? » De fait, ce n’est qu’à partir du printemps 1789 que les lettres de Camille Desmoulins sont en partie conservées ; après avoir suivi la convocation des États généraux à Guise, puis avoir participé à l’assemblée du bailliage de sa province, à Laon, il est retourné vivre l’événement à Paris et Versailles. L’exceptionnalité du moment, la précision des informations transmises, le rôle que le jeune avocat joue très vite dans la Révolution, ont alors conduit le père à conserver sa correspondance.
9À la manière des lettres de députés aux États généraux, les courriers de Camille Desmoulins sont ceux d’un observateur qui, mieux que la presse, peut informer des soubresauts politiques. Le 4 mai 1789, il est à Versailles pour suivre la procession des députés, des ducs, des pairs et du roi vers l’église Saint-Louis, où une messe du Saint-Esprit précède l’ouverture de l’assemblée, prévue le lendemain. Il décrit le cortège, l’enthousiasme de la foule au passage du roi et des élus du Tiers, ainsi que son silence réprobateur pour les nobles et les prélats : « Je crois que, quand je ne serois venu de Guise à Paris que pour voir cette procession des 3 ordres, et l’ouverture de nos états généraux, je n’aurois pas regret de ce pèlerinage23. » Dans les semaines suivantes, l’observateur se fait acteur ; il continue d’informer son père des événements, mais expose également le rôle qu’il tente d’y tenir. Le 3 juin, il prédit une prochaine naissance de l’Assemblée nationale (« D’ici quinze jours, le schisme éclatera, le tiers état se déclarera la nation ») et annonce être « occupé d’un ouvrage patriotique ». Bientôt, il relate la résistance des « Communes » (le Tiers) à la séance royale du 23 juin (lettre du 24 juin), la libération des gardes françaises enfermées à l’Abbaye (lettre du début juillet), les tensions dans les jardins du Palais Royal (lettre du 7 juillet), puis les événements du 12 au 15 juillet (lettre du 16 juillet).
10Convaincu de contribuer à l’événement, l’épistolier se met en scène ; dans sa lettre du 16 juillet, il évoque les tensions dans Paris, l’émoi à l’annonce du renvoi de Necker, puis son appel aux armes dans les jardins du Palais Royal (12 juillet). En quatre pages à l’écriture serrée, le lecteur apprend également la charge du Royal Allemand dans le jardin des Tuileries, la quête d’armes dans les armureries, puis la prise de la Bastille, à laquelle Desmoulins n’a cependant pas assisté. Il découvre aussi l’enthousiasme de l’avocat à la vue des députés venus apporter « la paix » à Paris, le 15 juillet au soir ; dans le cortège en marche vers l’hôtel de ville, Camille Desmoulins est aux côtés du député et avocat Target, qu’il connaît depuis déjà plusieurs années.
11À Guise, alors que l’information se diffuse par les voyageurs et la correspondance autant, sinon plus, que par la presse, le père Desmoulins ressent la Révolution par les lettres de son fils. Il informe ses voisins et amis de leur contenu et, sans doute, les lit en public ou en fait circuler des copies24. Lorsque l’avocat quitte sa position de témoin pour celle d’acteur, lorsqu’il appelle aux armes puis, surtout, exprime ses convictions démocratiques dans de premiers libelles, la situation se complique. Dans une lettre parvenue à Guise le 20 septembre 1789, le jeune homme s’irrite de la réaction de certains Guisards et rappelle le caractère privé de sa correspondance : « quand je vous envoie, le témoignage des journaux, et que je vous raconte, comme je fais dans ma dernière lettre, les choses infiniment flatteuses que j’ai entendues au sujet de la France libre [son pamphlet de juillet], je vous fais part de tout cela pour vous seul, afin que vous ne rougissiez pas de moi, et non pour irriter l’envie en le redisant à mes compatriotes ».
12Cette revendication d’intimité épistolaire, cependant, ne correspond guère à l’esprit des lettres envoyées ; en janvier 1790, le journaliste reproduit d’ailleurs lui-même un courrier de son père dans ses Révolutions de France et de Brabant, et y répond dans la suite du numéro. En publiant une correspondance privée, il entend démontrer sa propre sincérité ou, pour le dire autrement, la pureté de son engagement, sa vertu civique. Dans les mois suivants, son journal évoque encore à plusieurs reprises les convictions ou les mésaventures de son père25… Cela dit, Camille Desmoulins entend d’abord obtenir l’approbation et l’estime de celui-ci. Il espère le rendre fier par l’évocation de ses repas en compagnie de députés (3 juin 1789), par le récit d’un long séjour chez Mirabeau (25 septembre) ou l’envoi de ses brochures : « Pensez qu’une grande partie de la capitale me nomme parmi les principaux auteurs de la révolution » (20 septembre). Il termine sa lettre du 29 septembre par la phrase : « Adieu. Portez-vous bien, et ne dites plus tant de mal de votre fils26. »
13L’avocat paraît d’autant plus désirer l’estime du père, qu’il est persuadé d’avoir été mal jugé au début de sa carrière. Alors que ses premières brochures rencontrent le succès, il connaît encore des problèmes d’argent, demande un secours ponctuel et se souvient, non sans amertume, des réticences de son père à lui venir en aide : « Ô la mauvaise politique que la vôtre, de m’avoir envoyé deux louis à deux louis, avec lesquels je n’ai jamais pu trouver le secret d’avoir des meubles et un domicile. […] Vous m’avez appelé éternellement un dissipateur, un prodigue, et je n’étois rien moins que tout cela » (8 octobre 1789). Dans les semaines suivantes, le lancement réussi de ses Révolutions de France et de Brabant lui offre cette fois une certaine aisance.
14Les relations entre les deux hommes demeurent cependant complexes. Les liens sont forts, mais le père ne peut toujours approuver les méthodes ou les idées du libelliste… Par moments, une interruption dans la correspondance laisse craindre une réprobation. Après avoir répondu à une lettre de son père dans son périodique27, le journaliste s’inquiète d’un long silence. Le 15 mars 1790, il se fait explicite :
« Je vois bien qu’il vous est plus facile de vous passer de mes nouvelles, qu’à moi des vôtres. Mes occupations devoient être auprès de vous l’excuse de mon silence, et je ne m’attendois pas que vous me puniriez, en ne m’écrivant plus, de la lettre que je vous ai adressée par la voie de mon journal. Je me trouve bien à plaindre d’avoir un père et une mère, comme si je n’en avois pas. J’imaginois que ma réputation m’auroit fait recouvrer leur tendresse ; mais ils ne me tiennent compte ni de ma célébrité, ni de mes veilles, ni de mes dangers. […] de grâce apprenez-moi du moins que vous n’êtes pas de mes ennemis et joignez-vous à ceux qui m’encouragent. »
15Trois jours plus tard, son père le rassure : « Non, mon fils, je ne suis point et ne puis jamais être de vos ennemis ; vous n’avez pu avoir ce soupçon que dans le délire de l’imagination ou du désespoir. Je suis et serai toujours votre ami et votre meilleur ami. Votre mère est de moitié dans ce sentiment […]. S’il ne manque à votre satisfaction que mon bravo, recevez-le28. »
16L’incident n’est pas isolé. Il révèle des désaccords ponctuels entre deux hommes que séparent l’âge, le tempérament et les choix politiques. Mais l’amitié est aussi dans ces discussions, souvent lancées par un père soucieux de tempérer les ardentes convictions du fils. Mêmes vives, elles ne paraissent guère altérer l’estime, l’admiration même, que le père entretient pour l’aîné de ses enfants ; évoquant son deuxième fils, que tous surnomment Dubucquoi, du nom d’une terre familiale, le père écrit en janvier 1791 : « Votre frère Dubucquoi a toujours la visière un peu bornée, il vient de vous en donner acte ; mais ce n’est point sa faute ; dans le partage de la nature et dans le lot de l’esprit, pourquoi avez-vous exercé si copieusement votre droit d’aînesse et avez-vous pris un si fort préciput, pour laisser à vos cadets leur part afférente si petite, de ce côté-là29 ? »
Conseils d’ami
17Au début de la Révolution, Jean Benoît Nicolas Desmoulins (1725-1795), le père de Camille, est un des premiers personnages de la ville de Guise, dont il a été maire (1760-1763). Lieutenant général du bailliage royal, il a été chargé, en 1789, de la réunion de l’assemblée du tiers état de sa circonscription ; pour des raisons d’âge et de santé, il a refusé d’aller siéger à l’assemblée de province, où ses concitoyens l’avaient porté. L’homme est reconnu comme « patriote » ; dans sa correspondance et ses écrits, et particulièrement dans son « Esprit des lois », un manuscrit dans lequel il analyse les institutions et le droit du nouveau régime30, il se montre cependant mesuré et prudent. Pour autant, le juge aime y faire apparaître les interventions de son fils ; implicitement, il laisse y transparaître une véritable fierté, pas toujours exprimée dans ses lettres, comme s’il réfrénait dans celles-ci l’expression de son admiration31.
18À l’opposé, soucieux de son image et de celle de son fils à Guise, il n’hésite pas à lui prôner la modération ; l’amitié est également dans ces conseils, qui d’une certaine manière poursuivent une obligation éducative. Souvent, il reproche à Camille Desmoulins son impulsivité et l’audace de ses idées. Mais lorsqu’il qualifie de « modernes » et « bien hardis » les principes de son fils (janvier 1790), le journaliste lui répond qu’il s’est nourri de l’exemple du père et, plus encore, de l’impuissance de la seule vertu face aux abus des grands : « C’est en voyant dans votre personne l’inutilité, & des vertus, & des talens, & de l’intégrité incorruptible du magistrat & du caractère inébranlable du philosophe, que j’ai puisé contre l’ancien chaos & les oppresseurs, cette haine, inextinguible, jusqu’à ce qu’ils aient disparu32. » Le fils ne peut cependant convaincre ; deux ans plus tard, à la veille du 10 août, le père regrette une nouvelle fois sa radicalité : « Vous avez toujours été trop outré dans votre système, malgré le principe dont je suis pénétré, dont j’ai cherché à vous pénétrer et dont l’expérience m’a convaincu, que tout extrême est une erreur ou un danger dans l’état où nous avons trouvé les choses33. »
19Dans les lettres du père, l’invitation à la modération se développe essentiellement à trois moments. Le premier s’observe au cœur de l’été 1789, dans les semaines qui suivent l’édition de La France libre. Publié peu après le 14 juillet, le pamphlet n’était pas seulement un ardent soutien au vote par tête et à l’objectif constitutionnel, mais aussi un refus du veto royal, une impertinente dénonciation des prêtres et de l’austérité du catholicisme et, plus encore, un cri de colère contre les rois : « Ô rois, oui, je vous ai en horreur ! Comment ne vous haïrait-on pas, tigres que vous êtes34 ? » En septembre, le Discours de la lanterne aux Parisiens, puis la Réclamation pour le marquis de Saint-Huruge, approfondissent cette voie polémique et imposent Desmoulins comme un libelliste de premier plan. Cette fois, le père, comme ses concitoyens de Guise, refuse de le suivre. Entre les deux hommes, les relations ne semblent se rasséréner qu’au printemps 1790.
20Les craintes du père reprennent pendant l’été 1792, particulièrement après le 10 août, lorsque Camille Desmoulins devient secrétaire du sceau sous l’autorité du ministre de la Justice Danton. À la lettre qui annonce une entrée au « palais des Maupeou et des Lamoignon » par « la grâce du canon », le père répond par des mots de prudence, tant les départements lui paraissent indisposés par la prise des Tuileries. Il en profite pour lui dessiner une ligne de conduite : « puisque vous voilà en second au gouvernail remis à M. Danton, votre ami, pour la partie de la justice, distinguez-vous y par les grandes qualités qui sont propres à cette administration. Joignez à votre popularité connue cet esprit d’intégrité et de modération que vous aurez souvent occasion d’y développer. Dépouillez-vous de celui de parti qui vous y a peut-être élevé, mais qui pourrait ne pas vous y maintenir. Avec la droiture que je vous connais, et la modération que je vous prêche, on va loin, même dans le poste le plus scabreux35 ». Mais peut-il être entendu ? Dix jours plus tard, dans une autre réponse à son fils, il réprouve le ton martial de la circulaire envoyée par le ministre aux tribunaux le 19 août. « Au reste, précise-t-il, je ne vous dis cela, entre nous, que pour vous-mêmes, dans le cas où vous auriez travaillé à cette circulaire, où je crois reconnaître votre manière ; ce sont des réflexions d’ami, d’un père à son fils ami de Danton36. »
21Les conseils se font plus pressants lors d’un troisième enjeu majeur : le procès du roi. Dans les lettres de Desmoulins père, les seules conservées entre la fin août 1792 et le début février de l’année suivante, une vive inquiétude s’exprime pour le pays. De Guise, il rejette une possible condamnation du roi :
« Je serois inconsolable, mon fils, de trouver votre nom dans la liste de ceux qui voteront pour la mort de Louis xvi » (10 décembre 1792). Selon lui, ce jugement entraînerait des « suites funestes » pour le pays et pour les régicides. Il propose une solution, inspirée des règles judiciaires : « Vous avez un moyen juste et vrai, mon fils, de vous épargner cette tâche qui seroit une perplexité pour moi : c’est de vous récuser vous-même […]. Entraîné soit par votre propre opinion, soit par une prévention étrangère, vous avez dénoncé Louis XVI dans un grand nombre de vos écrits qui n’ont peut-être eu que trop d’influence, et vous l’avez traité en ennemi. Par cette double raison soit d’avoir été son dénonciateur, soit d’avoir par anticipation proclamé votre avis, relativement à Louis XVI, vous ne pouvez demeurer un de ses juges sans blesser l’impartialité, qui doit neutraliser quiconque est appelé à juger un autre homme capitalement37. »
22Le père envoie un dernier appel à la récusation le 10 janvier 1793 : « Mon fils, vous pouvez encore vous immortaliser, mais vous n’avez plus qu’un moment : c’est l’avis d’un père qui vous aime38. » En vain. Camille Desmoulins vote la mort, sans appel ni sursis.
23Les conseils du père, particulièrement dans les moments cruciaux de la « chute » de la monarchie et du procès du roi, paraissent reposer sur une « modération » dont il ne se départit jamais, mais aussi sur deux peurs entremêlées. Desmoulins père craint d’abord pour son fils car, très vite, il perçoit son engagement comme une mise en danger39, qui est loin de lui assurer une situation stable, notamment en août 179240. Mais le père ne peut dissocier son sort de celui de son fils, et ses réprimandes se nourrissent du jugement des Guisards, voire d’intérêts professionnels ou familiaux. Amer, il constate à la mi-juillet 1792, en parlant de son petit-fils Horace qui vient de naître : « Je ne sais trop si je dois désirer qu’il soit le successeur de votre popularité, qui vous a fait, et à moi par contre-coup, beaucoup d’ennemis et peu ou point d’amis. Car cette révolution n’a été, je crois, à personne plus funeste qu’à moi à tous égards, lorsque je devois en attendre plus que personne les plus heureux effets. » Cette ambivalence, ces intérêts du père et du fils perçus comme entrecroisés, rappelle l’un des éléments centraux de l’amitié « de famille » : la solidarité.
Solidarité familiale
24Cimentée par l’estime et la confiance réciproques, l’amitié n’est pas sans obligations. Lorsque le succès des Révolutions de France et de Brabant renforce la renommée du journaliste, le rapproche de députés et de ministres, le père se félicite que son fils « sera un des premiers ouvriers de l’arche qui doit sauver ses frères & lui du naufrage de leur père commun. Je vous vois du petit nombre des élus, qui, avec les imprimeurs & les libraires, restez debout au milieu de la révolution, qui met tout par terre, & renverse votre famille41 » (janvier 1790). Par-delà l’allusion au nouveau régime, la phrase exprime l’attente d’un soutien en temps de crise, d’autant plus nécessaire que la création des départements et la révolution judiciaire vont priver le père du syndicat de l’assemblée d’élection de Guise et de son office de lieutenant général. Pour assurer son avenir et celui de ses autres enfants, il compte sur son aîné.
25À 65 ans, le père Desmoulins n’entend pas cesser toute activité. À l’automne 1790, il espère l’obtention d’une place de commissaire du roi près des nouveaux tribunaux. Dans un premier temps, le fils refuse de lui apporter son concours, par mépris envers le ministre de la Justice Champion de Cicé, explique-t-il42. Le mois suivant, peu après l’accès du patriote Duport-Dutertre au ministère, il se rend cependant place Vendôme pour appuyer la requête de son père : « Malgré ma répugnance à demander rien pour moi, comme pour les autres, écrit-il, je l’ai sollicité de redresser à votre égard les torts de Champion. Je lui ai dit que le commissaire du roi nommé à Guise ne tenoit pas à ce district et échangeroit volontiers, si on le plaçoit ailleurs43. » Le ministre accepte, à condition d’obtenir un vœu de la municipalité ou du district en faveur de cet arrangement. Que cette approbation ait ou non été envoyée, Desmoulins père n’est pas nommé commissaire du roi ; à l’automne 1792, cependant, il accède à la fonction de commissaire national près du tribunal de son district44.
26La dégradation de la situation financière du père entraîne également des paroles de solidarité. Certes, à l’automne 1789 encore, le libelliste a bien des difficultés à vivre de ses revenus et n’hésite pas à solliciter des aides ponctuelles de ses parents : « Je vous en supplie, aidez-moi, envoyez-moi 6 louis ou bien un lit » (8 octobre 1789)… Mais un an plus tard, son mariage avec Lucile Laridon-Duplessis, la fille d’un ancien premier commis des bureaux de la finance, assure au jeune couple une rente annuelle de quatre mille livres. À la fin d’une lettre empressée, sollicitant l’accord de ses parents à cette union, Camille Desmoulins conclut :
« Il tarde à ma chère Lucile autant qu’à moi, qu’on ne puisse plus nous séparer. N’attirez pas la haine de nos envieux par ces nouvelles, et comme moi renfermez votre joie dans votre cœur, ou épanchez la tout au plus dans le sein de ma chère mère, de mes frères et sœurs ; je suis maintenant en état de venir à votre secours, et c’est là une grande partie de ma joie45. »
27Le capital de la dot va cependant souffrir de la dépréciation de l’assignat. Lorsque Desmoulins père, en manque de liquidités, propose à son fils de racheter son domicile de Guise, celui-ci doit refuser (1792). « Votre maison, la maison natale m’est chère ; personne ne connoît mieux que moi, le plaisir qu’éprouve Ulysse en voyant de loin la fumée d’Ithaque, mais avec 4 mille livres qui dans la circonstance présente ne valent guère plus de 2 mille livres de rentes, comment pourrois-je acheter une maison de 30 mille livres, surtout quand je vais tout à l’heure avoir un enfant et que je sens déjà la charge de la paternité46. »
28Au-delà du père, Camille Desmoulins ressent des obligations envers ses frères et sœurs. Il entretient une correspondance épisodique avec son frère Dubucquoi, de cinq ans son cadet47 ; engagé dès 1785 dans le Royal-Roussillon cavalerie, Dubucquoi continue à servir sous la Révolution. À l’automne 1792, sachant son frère sur la frontière de l’Est, le Conventionnel l’a recommandé à son ami Fréron, également représentant du peuple, qui lui a promis « de ne point sortir de Metz sans avoir fait Dubucquoi officier » ; en octobre, le père confirme les bonnes dispositions de Fréron, et transmet à Camille la « reconnaissance » de son frère48. Dans cette même réponse, datée du 26 octobre, le père demande à Camille d’intervenir pour permettre à son autre frère, surnommé Sémery49, d’obtenir une sous-lieutenance dans la Légion du Nord en cours de formation. La nomination n’a pas lieu ; en février 1793, cependant, le Conventionnel n’a pas oublié la demande : « Quant à Sémery, écrit-il à son père, Danton en repartant pour la Belgique m’a dit lui écrire qu’il aille le voir ; il s’intéressera efficacement à lui, et si Sémery veut devenir officier, l’occasion est belle pour lui50. »
29Si ces recommandations peuvent relever de « l’amitié de famille », elles ne trahissent pas une simple prolongation de pratiques d’Ancien Régime. Ce soutien, comme celui accordé au père, est conditionné par une exigence d’esprit républicain. Elle transparaît dans deux passages d’une lettre de Camille Desmoulins à son père du 9 juillet 1793, occultés par Marcellin Matton. Le premier évoque la démission forcée de Dubucquoi, pour « ivrognerie » : « Il est tout à fait indigne que je m’intéresse à lui, et je suis bien fâché qu’il ait pris mon nom, qu’il tachait à l’armée. […] Sa conduite aurait pu vous donner du chagrin dans l’ancien régime, mais c’est une obligation qu’on a à celui-ci que les fautes y sont personnelles, et que la famille des républicains et des gens de bien ne se compose que de ceux qui sont républicains et gens de [bien]. » Dans la même lettre, il évoque son autre frère, qu’il croit (à tort) mort au combat : « Je suis bien fâché que Sémery ait été tué. Je n’aurais point eu à rougir de lui et je lui aurais procuré un avancement rapide dont il se montrait digne. » Pour le Conventionnel, l’amitié familiale n’est possible qu’au prix de la vertu républicaine.
⁂
30De l’amitié entre Camille Desmoulins et son père et, plus largement, de ses amitiés « de famille », la correspondance étudiée ne livre que des bribes. Des lettres ont été perdues, particulièrement pour les années 1780, qui auraient permis de comparer les sentiments exprimés avant et après 1789. De plus, la discrétion ou la pudeur ont probablement retenu plus d’une fois la plume des épistoliers51 ; certains messages, d’ailleurs, ont pu circuler de Guise à Paris lors des visites que certains parents ont rendu à Camille. Faut-il également rappeler que, pour les auteurs du xviiie siècle, l’amitié père-fils est d’autant plus rare, qu’elle demande de l’égalité et du désintéressement52 ? Celle qui attache Camille Desmoulins à son père est-elle de cette nature ?
31Il serait vain de prétendre mesurer la sincérité ou la profondeur des sentiments exprimés, souvent à mi-mots. Remarquons cependant que l’amitié qui lie les deux hommes paraît indéfectible, malgré les désaccords. Remarquons aussi que tout indique la proximité de cette amitié père-fils avec ce qu’en écrit Mme Thiroux-d’Arconville, trente ans auparavant53 ; les mots d’estime, de tendresse, d’attachement et de confiance réciproques peuvent la résumer, sans pour autant effacer le respect filial.
32Pour autant, par certains de ses traits, cette amitié ressemble à l’époque de son épanouissement. Dès 1789, les bouleversements institutionnels remettent en cause la position sociale du père et fragilisent sa fortune ; à l’inverse, elle offre des opportunités au fils aîné, sur la scène journalistique et politique, et aux cadets dans l’armée. C’est une amitié en période d’incertitude qui se laisse apercevoir, avec des marques d’estime et de soutien plus nécessaires que jamais ; de telles amitiés ont certes pu exister à d’autres moments sous l’Ancien Régime, mais les exigences patriotiques s’y expriment désormais avec force, et semblent nécessaires à sa préservation. De plus, la nature de cette amitié peut au besoin être affichée publiquement… Dans les années 1790, de la même manière qu’un Saint-Just considère l’amitié comme essentielle pour l’élaboration d’une république vertueuse54, Camille Desmoulins ne peut se penser républicain sans faire évoluer les contours de l’amitié « de famille ».
Annexe
La correspondance de Camille Desmoulins avec son père
Auteur | Datea | Originauxb | Édition (complète ou par extraits)c |
1784 | |||
CD | 4 juin | MLM, Ms 2834 | |
1789 | |||
CD | 5 mai | BHVP, Ms 985, fo 105-106 | Matton, p. 1-4 ; Claretie, II, p. 311-314 |
CD | 3 juin | Matton, p. 5-9 ; Claretie, II, p. 314-318 | |
CD | 24 juin | BHVP, Ms 985, fo 107-108 | Matton, p. 9-14 ; Claretie, II, p. 318-322 |
CD | Juillet [début] | BHVP, Ms 985, fo 109-110 | Matton, p. 14-16 ; Claretie, II, p. 322-325 |
CD | s.d. [7 juilletd] | BHVP, Ms 985, fo 111-112 | Matton, p. 17-21 ; Claretie, II, p. 325-329. |
CD | 16 juillet | BHVP, Ms 985, fo 113-114 | Matton, p. 21-29 ; Claretie, II, p. 329-338 ; Vervins, no 2305. |
CD | 20 septembre | BHVP, Ms 985, fo 115-116 | Matton, p. 32-37 ; Claretie, II, p. 338-342 ; Vervins, no 2307 |
CD | 25 septembre | BHVP, Ms 985, fo 117-118 | Matton, p. 38-39 ; Claretie, II, p. 343-344 |
CD | 29 septembre | BHVP, Ms 985, fo 119-120 | Matton, p. 40-41 ; Claretie, II, p. 344-345 |
CD | 8 octobre | BHVP, Ms 985, fo 121-122 | Matton, p. 42-46 ; Claretie, II, p. 345-349 ; Vervins, no 2306 |
CD | 4 décembre | MLM, Ms 41930 | Matton, p. 47 ; Claretie, II, p. 349-350 |
CD | 31 décembre | Matton, p. 49-51 ; Claretie, II, p. 350-351 ; Vervins, no 2307 | |
1790 | |||
Père | s.d. [début janv.] | RFB, no 7 (9 janv. 1790), p. 321 | |
CD | 14 janvier [sice] | RFB, no 7 (9 janv. 1790), p. 322-331 ; Vervins, no 2307 | |
CD | 15 mars | BHVP, Ms 985, fo 123-124 | Matton, p. 61-62 ; Claretie, II, p. 351-352. |
Père | 18 mars | Matton, p. 62-63 ; Vervins, no 2307 | |
CD | s.d. | BHVP, Ms 985, fo 125 ro (fragment) | |
Père | s. d. | BHVP, Ms 985, fo 125 vo-126 ro (fragment) | |
Père | s.d. [octobre] | RFB, no 49 (1er nov.), p. 450-452 | |
CD | 6 décembre | BHVP, Ms 985, fo 127-128 | Matton, p. 93-94 ; Claretie, II, p. 352. |
CD | 11 décembre | BHVP, Ms 985, fo 129-130 | Matton, p. 94-96 ; Claretie, II, p. 353-354 ; Vervins, no 2314 |
Père | 15 décembre | BM Soissons, Ms Périn 1864 | |
CD | 18 décembre | AD Aisne, 1 J 406 | |
CD | 20 décembre | BHVP, Ms 985, fo 131 ro | Matton, p. 96-97 ; Claretie, II, p. 354-355 |
Père | 23 décembre | BHVP, Ms 985, fo 131 vo-132 ro | |
1791 | |||
CD | 3 janvier | BHVP, Ms 985, fo 133-134 | Matton, p. 101-104 ; Claretie, II, p. 355-357 ; Vervins, no 2315 |
Père | 9 janvier | Matton, p. 104-106 ; Vervins, no 2315 | |
CD | 20 janvier | BHVP, Ms 985, fo 135 ro | Vervins, no 2318 |
Père | 23 janvier | BHVP, Ms 985, fo 135 vo-136 | Vervins, no 2318 |
CD | 6 décembre | BHVP, Ms 985, fo 137-138 | Matton, p. 115-119 ; Claretie, II, p. 360-363 ; Vervins, no 2319 |
1792 | |||
CD | 3 avril | BHVP, Ms 985, fo 139-140 | Matton, p. 121-124 ; Claretie, II, p. 363-365 ; Vervins, no 2320 |
CD | 12 juillet | BHVP, Ms 985, fo 141-142 | Matton, p. 128-130 ; Claretie, II, p. 365-367 ; Vervins, no 2322 |
Père | 16 juillet | Matton, p. 131-132 ; Vervins, no 2322 | |
CD | 15 août | BHVP, Ms 985, fo 143 | Matton, p. 138-140 ; Claretie, II, p. 367-369 ; Vervins, no 2324 |
Père | 17 août | BHVP, Ms 985, fo 143 vo-144 | Matton, p. 140-142 ; Vervins, no 2324 |
CD | 26 août | BHVP, Ms 985, fo 145 ro | Matton, p. 147-148 ; Claretie, II, p. 369-370 |
Père | 27 août | BHVP, Ms 985, fo 145 vo-146 | Vervins, no 2326 |
Père | 26 octobre | BHVP, Ms 985, fo 12 | |
Père | 29 octobre | BNF, NAF 28061 (59), fo 316 ro | |
Père | 23 novembre | MLM, Ms 2834 | |
Père | 10 décembre | Matton, p. 160-162 ; Vervins, no 2332 | |
1793 | |||
Père | 10 janvier | Matton, p. 162-163 ; Vervins, no 2332 | |
CD | s.d. [févrierf] | BHVP, Ms 985, fo 152-153 | |
CD | 9 juillet | BHVP, Ms 985, fo 147-148 | Matton, p. 170-172 ; Claretie, II, p. 370-372 ; Vervins, no 2333 |
CD | 1er août | BHVP, Ms 985, fo 149 | Matton, p. 175-178 ; Claretie, II, p. 372-374 ; Vervins, no 2297 |
1794 | |||
Père | 13 germ. an II [2 avril – sic. Prob. le 9 germinal] | Matton, p. 212 |
a. Sur les manuscrits, il arrive que les dates inscrites sur les lettres de Camille Desmoulins ne soient pas de lui ; dans ce cas, elles correspondent parfois à la date de réception, ou de la main de son père (« R. le […] »), ou d’une autre main.
b. BHVP : Bibliothèque historique de la ville de Paris. RFB : Révolutions de France et de Brabant. MLM : musée des Lettres et Manuscrits, Paris (les collections du musée ont récemment fait l’objet d’une dispersion par ventes publiques).
c. « Matton » renvoie à Matton aîné, Correspondance…, op. cit. (M. Matton a réédité ces lettres dans les Œuvres de Camille Desmoulins, t. II, Paris, Ébrard, 1838 ; précisons que dans l’exemplaire de ce dernier ouvrage conservé à la bibliothèque Thiers [Paris], sous la cote TLC 285, Édouard Carteron a corrigé plusieurs des lettres à partir des originaux qu’il a pu consulter). « Claretie » fait référence à Claretie Jules, Œuvres de Camille Desmoulins, t. II, Paris, Charpentier, 1874. « Vervins » renvoie au Journal de Vervins. Organe républicain du département de l’Aisne, pour l’année 1884.
d. La lettre est rédigée le surlendemain de l’agression d’un supposé « espion de la police » au Palais Royal, qui date du 5 juillet.
e. D’après Matton aîné (Journal de Vervins, 1884, no 2307), qui a pu consulter la lettre originale.
f. Dans cette lettre, Camille Desmoulins annonce l’accès de Beurnonville au ministère de la Guerre, qui intervient le 4 février 1793.
Notes de bas de page
1 Révolutions de France et de Brabant, no 4, 19 décembre 1789, p. 163, et ibid., no 30, 21 juin 1790, p. 300. Voir aussi, ibid., no 15, 8 mars 1790, p. 65.
2 Leuwers Hervé, Camille et Lucile Desmoulins, un rêve de république, Paris, Fayard, 2018, p. 173-174 et 292 ; Linton Marisa, « Fatal Friendschips: The Politics of Jacobin Friendship », French Historical Studies, no 1-2008, p. 51-76.
3 Leuwers Hervé, Camille et Lucile Desmoulins…, op. cit., p. 26-27.
4 Voir le témoignage de Lucile Desmoulins dans son journal : Journal, 1788-1793. Texte établi et présenté par Philippe Lejeune, Paris, Éditions des Cendres, 1995, p. 87-104.
5 Lettres de Desmoulins père à son fils, des 10 janvier 1793 (Matton) et 27 août 1792 (BHVP). À la suite des lettres, j’indique la version retranscrite ; pour les lieux de conservation, je renvoie à l’annexe de fin d’article.
6 Delépine Martial, Mon cher fils. Lettres du subdélégué de Limoges à son fils garde du corps à Versailles, 1770-1780, éd. Michel C. Kiener et Marthe Moreau, Limoges, PULIM, 2014, p. 10.
7 Duprat Annie, « Les affaires d’État sont mes affaires de cœur. » Lettres de Rosalie Jullien, une femme dans la Révolution, 1775-1810, Paris, Belin, 2016, p. 43.
8 Vincent-Buffault Anne écrit : « L’amitié, aux xviiie et xixe siècles, est acceptée, valorisée, mais ne tient pas la vedette. L’amour, le couple conjugal et la famille occupent le devant de la scène. Les pratiques amicales s’y ajoutent, tenant souvent ces seconds rôles qui ouvrent la porte côté jardin » (L’exercice de l’amitié. Pour une histoire des pratiques amicales aux xviiie et xixe siècles, Paris, Seuil, 1995, p. 9).
9 Thiroux-d’Arconville Marie Geneviève Charlotte, De l’amitié, Paris/Amsterdam, Desaint et Saillant, 1761.
10 Encyclopédie ou dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers…, t. 1, Paris, 1751, p. 362 (article « Amitié »).
11 Sur les liens entre les notions de famille et d’amitié : Prévost Aurélie, L’Amitié aux xvie et xviie siècles en France. Normes, réalités et représentations, thèse, université Lyon 2, dir. Ph. Martin, 2011, p. 60-66.
12 Voir, notamment, l’inventaire des « témoignages individuels » consultés par Tackett Timothy, Par la volonté du peuple. Comment les députés de 1789 sont devenus révolutionnaires, Paris, Albin Michel, 1997, p. 334-346.
13 Matton aîné, Correspondance inédite de Camille Desmoulins, Paris, Ébrard, 1836.
14 Leuwers Hervé, « Sources. La correspondance privée de Camille Desmoulins. Huit lettres à Mme Duplessis », Revue du Nord, no 420, 2017, p. 435-446.
15 Voir Matton aîné, Correspondance…, op. cit., p. 177 (la lettre y est par erreur datée du 10 août) et BHVP, Ms 985, fo 149 vo.
16 Sur les 31 lettres de Camille Desmoulins et de son père éditées par Marcellin Matton, il m’a été possible d’en retrouver 22 à la BHVP et une à l’ancien musée des Lettres et Manuscrits – voir infra, annexe.
17 Voir infra, annexe.
18 27 lettres autographes de Camille Desmoulins à son père, et 8 lettres autographes du père à son fils. Voir infra, annexe.
19 Voir, par exemple, le changement de statut des « fils de famille », ces jeunes majeurs non encore émancipés : Verjus Anne, Le Bon Mari. Une histoire politique des hommes et des femmes à l’époque révolutionnaire, Paris, Fayard, 2010, p. 99-120.
20 Par exemple, les 3 juin et 1er juillet 1789.
21 Par exemple, les 16 juillet, 22 septembre ou 4 décembre 1789.
22 Lettres de Camille Desmoulins à son père des 3 juin 1789, 15 août 1792 et 4 décembre 1789.
23 Lettre du 5 mai 1789 (BHVP).
24 Le Ms 985 de la BHVP conserve ainsi une lettre de Camille Desmoulins du 6 décembre 1790, retranscrite par son père, au dos du texte original, avec cette mention : « Copie de la lettre illisible de l’autre part, aux personnes qui ne sont pas faites à ce caractère. »
25 Révolutions de France et de Brabant, no 7 (9 janvier 1790), p. 321-333 ; no 42 (13 septembre 1790), p. 110 ; no 49 (1er novembre), p. 451-461 ; no 58 (3 janvier 1791), p. 260.
26 Lettre du 29 septembre 1789 (BHVP).
27 Révolutions de France et de Brabant, no 7 (9 janvier 1790), p. 321-331.
28 18 mars 1790 (Matton). Précisons que le père s’inquiète aussi parfois des silences de son fils, dans lesquels il craint une réprobation. À la lettre tardive par laquelle Camille Desmoulins annonce son mariage, le père répond : « Votre silence si long-temps gardé depuis la réception d’un consentement [au mariage] pour lequel vous aviez marqué une si pétillante impatience, me laissoit quelque inquiétude : car la tendresse des pères est soucieuse comme celle des amans » (lettre de Desmoulins père à son fils, 9 janvier 1791 – Matton).
29 23 janvier 1791 (BHVP).
30 AD Aisne, L 1598*, voir Leuwers Hervé, Camille et Lucile Desmoulins…, op. cit., p. 270.
31 Cette expression réfrénée de l’affection paraît courante : Verjus Anne et Davidson Denise, Le roman conjugal. Chroniques de la vie familiale à l’époque de la Révolution et de l’Empire, Seyssel, Champ Vallon, 2011, p. 102-103.
32 Révolutions de France et de Brabant, no 7 (9 janvier 1790), p. 322 et 324.
33 Lettre du 16 juillet 1792 (Matton).
34 Hervé Leuwers, Camille et Lucile Desmoulins…, op. cit., p. 108-113.
35 Lettre de Desmoulins père à son fils, 17 août 1792 (BHVP).
36 Lettre de Desmoulins père à son fils, 27 août 1792 (BHVP).
37 Lettre de Desmoulins père à son fils, du 10 décembre 1792 (Matton).
38 Lettre de Desmoulins père à son fils, du 10 janvier 1793 (Matton).
39 « On me parle de vos succès, & je n’y suis pas insensible ; mais les dangers que vous courez m’affectent encore davantage. » Lettre de Desmoulins père à son fils, Révolutions de France et de Brabant, no 7 (9 janvier 1790), p. 322.
40 Lettre de Desmoulins père à son fils, du 17 août 1792 (BHVP).
41 Révolutions de France et de Brabant, no 7 (9 janvier 1790), p. 322.
42 La lettre de Desmoulins père à son fils, en octobre 1790, et la réaction du fils sont évoqués dans les Révolutions de France et de Brabant, no 49 (1er novembre 1790), p. 450-454.
43 Lettre de Camille Desmoulins à son père, le 6 décembre 1790 (BHVP).
44 Voir les lettres de Desmoulins père à son fils, des 29 octobre et 23 novembre 1792.
45 Lettre de Camille Desmoulins à son père, 11 décembre 1790 (BHVP).
46 Lettre de Camille Desmoulins à son père, 3 avril 1792 (BHVP).
47 Armand Jean Louis Domitille Desmoulins, dit Dubucquoi (1765-1793). Sur cette correspondance, voir notamment les lettres de Camille Desmoulins à son père des 15 mars 1790, 20 janvier 1791 et février 1793, ainsi que la lettre de Desmoulins père à son fils, du 18 mars 1790.
48 Lettre de Desmoulins père à son fils, du 26 octobre 1793 (BHVP).
49 Lazare Nicolas Norbert Félicité Desmoulins (1769-1811), dit Sémery.
50 Lettre de Camille Desmoulins à son père, février 1793 (BHVP).
51 Sur cette retenue de l’épistolier : Verjus A. et Davidson D., Le roman conjugal…, op. cit., p. 300-303.
52 Thiroux-d’Arconville M.-G., De l’amitié, op. cit., p. 29.
53 Ibid., p. 21-37.
54 Linton M., « Fatal Friendships: The Politics of Jacobin Friendship », French Historical Studies, 2008, vol. 31-1, p. 51-76, notamment p. 55-57.
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