Effacer les ruines
La destruction des arènes de Poitiers
p. 157-170
Texte intégral
1Les vestiges de l’antiquité romaine suscitent depuis le xvie siècle un indéniable intérêt. Les voyageurs qui effectuaient le Grand Tour visitaient avec émotion les sites qui étaient dégagés à Rome, à Pompéi et en bien d’autres lieux de la péninsule italienne. Lors des dernières décennies du xviiie siècle1, cette passion prit la forme d’un fort engouement pour les restes des monuments antiques, que l’architecture néoclassique s’efforçait de remettre à l’honneur. La peinture, qui puisait des sujets dans le répertoire de l’antiquité, ne dédaignait pas de représenter les vestiges qui étaient alors mis à jour. Les tableaux d’Hubert Robert constituent un exemple éclatant de la célébration de la « poésie des ruines », qui caractérisa le monde artistique au cours des dernières décennies du xviiie siècle et au début du xixe siècle2. Quel étonnement de constater que, en ces mêmes années de passion pour le passé, Poitiers porta les derniers coups de pioche à son amphithéâtre et en détruisit les vestiges que les siècles lui avaient transmis. Pour comprendre cet événement paradoxal, nous examinerons l’évolution du regard que les autorités poitevines portaient sur les monuments antiques de la cité, ce qui nous permettra de comprendre le processus de démantèlement des arènes par décision de la municipalité.
De la négligence à la science : la redécouverte des arènes
2L’amphithéâtre de Poitiers, situé loin du centre animé de la cité, en allant vers sa sortie sud, fut longtemps délaissé. Comme le fit remarquer un érudit poitevin qui passait en revue les mentions de sa ville dans les ouvrages de l’époque moderne, les ruines de l’amphithéâtre de Poitiers ne semblaient pas avoir marqué les voyageurs de passage dans le Poitou3. Certes, étaient parfois signalés « les vestiges d’un magnifique amphithéâtre4 », tandis que Mercator se contentait de mentionner « l’amphithéâtre et le Palais de Gallien5 ». L’étude ajoute qu’un ouvrage d’un voyageur hollandais, écrit en vers latins, précisait avoir vu les « débris de ce grand cirque bâti par les Romains, que le temps a pu vaincre, mais dont il n’a pas encore entièrement détruit les ruines circulaires6 ». L’auteur concluait son article en faisant remarquer que les géographes et voyageurs des xvie et xviie siècles semblaient uniquement préoccupés de recueillir les traditions et se souciaient peu des monuments7.
3Au cours de la deuxième moitié du xviiie siècle se produisit une rupture : le spectacle des vestiges des monuments antiques toucha plus largement la société. Ce nouveau regard résultait de récits de voyages, comme le Grand Tour en Italie ou des expéditions plus lointaines, qui avaient été vécus comme des voyages dans le temps8 ou des tableaux des peintres en vogue, dont Hubert Robert est le plus connu et Alfred de Curzon l’un des représentants poitevins.
4L’ailleurs dans le temps est alors associé à un voyage et à la contemplation de paysages nouveaux, ce qui permet la rêverie. Au xixe siècle, les poètes et les savants découvrirent les ruines proches de chez eux. Un tel état d’esprit anima le président de la jeune Société des antiquaires de l’Ouest en introduction du premier article érudit consacré aux ruines de l’amphithéâtre de Poitiers :
« J’étais au milieu des ruines, et, pour la vingtième fois peut-être, je parcourais les restes imposants de l’amphithéâtre ; là, mille pensées agitaient mon imagination ! Cette enceinte, me disais-je, aujourd’hui muette et défigurée, a renfermé, il y a bien des siècles, une multitude vivante, une foule active ! Ces arcades encore debout, ces galeries écroulées ont retenti des cris d’allégresse et de fête ! et cette terre aujourd’hui couverte de verdure, de fruits et de fleurs, a été longtemps arrosée de sang humain pour le plaisir des hommes, pour la distraction du peuple et pour la politique d’une grande nation9. »
5Le contraste était grand entre le silence du monument10, jadis majestueux et désormais en ruine, et la vie intense qu’il avait connue. Le monument était l’instrument de puissance et de domination par la distraction que les jeux offraient au peuple, par l’exercice des armes et les exercices physiques qui s’y exerçaient. L’auteur ajoutait que la menace de destruction pesait encore sur de tels monuments, ce qui justifiait la démarche des savants soucieux de connaître mieux le monument initial.
6Le xixe siècle vit en effet l’avènement de l’archéologie scientifique11. Lors de l’occupation française de la péninsule italienne, de vastes chantiers de fouille furent engagés12. Dans un même élan, plusieurs initiatives en France entreprirent de dégager et étudier les vestiges antiques. À la demande du premier préfet de la Vienne, Charles Cochon de Lapparent, chargé de rassembler et transmettre au ministère toutes les données disponibles sur le département, fut réalisé un relevé précis du bâtiment. La description qu’il en donnait ne s’accompagnait d’aucun commentaire particulier13. En 1804, lors d’une séance de l’Athénée, le président Mazet souleva la question de la datation et souligna la difficulté de parvenir à quelque certitude, faute d’inscriptions ou d’ornements architecturaux. Il estimait que ce « morceau d’antiquité » aurait été édifié au début du iie siècle, sous les empereurs Adrien ou Antonin14.
7Comme toute la France, Poitiers fut dès lors saisie par la passion de l’histoire. En 1834 fut fondée la Société des antiquaires de l’Ouest qui réunissait les érudits locaux. Le président Mangon de La Lande entreprit de faire faire une étude méthodique de l’amphithéâtre, qu’il publia dans l’un des premiers numéros du bulletin de la société. Son étude souligne la magnificence du monument et s’étonne qu’il soit « tombé dans l’oubli, sans surveillance et dans un abandon presque total » depuis un siècle, à la différence de ceux d’Autun, Arles, Fréjus, Bordeaux, Saintes ou Nîmes alors que son étendue était remarquable. Il rapporte que l’on démolissait des pans de muraille pour utiliser les pierres et qu’un éboulement récent qui venait de se produire nécessitait une réparation. Il espérait que « la manie des destructions » fût passée et souhaitait que la SAO contribuât à le faire sortir de l’oubli.
8Pour commencer, la SAO a profité de la venue à Poitiers d’un des coopérateurs de la carte militaire de la France – une note de bas de page indique qu’il s’agit du propre fils du président – pour faire faire un relevé le plus précis possible du bâtiment, ainsi que de nombreux autres éléments, dont un dessin de la grande voûte d’entrée « qui a résisté au marteau des Vandales », afin qu’un architecte pût reconstituer l’allure initiale de l’édifice. Les comptes rendus faisaient remarquer que l’amphithéâtre surpassait celui de Pompéi comme celui de Nîmes15. Ces relevés furent remis au préfet pour le ministre.
9L’auteur s’appuyait sur ces éléments et sur les découvertes réalisées lors de fouilles pour dater le monument : il estimait qu’il avait été construit vers 250 et détruit au ve siècle. Comparant avec Arles et Nîmes, il estimait sa capacité à 22 000 places16. Il contestait que des naumachies eussent été possibles. Il signalait que de nombreux vestiges se trouvaient encore dans les maisons. La Société des antiquaires de l’Ouest fit faire des fouilles, qui lui permirent notamment de recueillir de nombreuses monnaies. Le baron Bourgnon de Layre examina attentivement les vestiges et publia en 1844 un mémoire détaillé dans la revue de la société savante17.
10Il convient de remarquer que cette opération était en phase avec un mouvement national de redécouverte des monuments du passé qui avait donné lieu d’une part aux descriptions pittoresques de voyageurs et d’autre part aux études savantes des érudits18. L’inventaire des monuments anciens, initiée par Arcisse de Caumont, le fondateur des antiquaires de Normandie, et voulu par l’État historien en résulta. Caumont avait en effet créé en 1834 la Société française pour la conservation et la description des monuments historiques dont le Bulletin monumental devint l’organe officiel. M. Foucart, doyen de l’École de droit et président de la Société des antiquaires de l’Ouest, rédigea une synthèse sur le patrimoine monumentale de Poitiers19 ; les lignes consacrées aux arènes s’appuyaient sur le mémoire de Mangon de la Lande pour identifier les vestiges, restituer l’allure ainsi que la capacité de l’édifice et évaluer la date de la construction. Tout en notant l’état de délabrement, il n’en relevait pas moins l’importance des restes.
« Cet édifice, exposé depuis quatorze siècles à toutes les causes de ruine, subsiste encore dans quelques-unes de ses parties, malgré les ravages de la guerre, l’action lente mais continue du temps, et les attaques sans cesse renaissantes de tant de générations, qui sont venues y chercher, comme dans une carrière, des matériaux pour construire de nouveaux édifices. Aujourd’hui encore, une partie de la population peu aisée de la rue des Arènes et du bourg Cani est logée sous des voûtes romaines bien conservées ; ces voûtes, situées à différents étages, servent à un grand nombre de maisons de caves, d’écuries, de chambres d’habitation et de greniers. Ainsi la civilisation romaine a laissé sur notre sol, comme dans nos lois, dans notre langue, dans nos mœurs, des traces non encore effacées20. »
11En 1843 se tint à Poitiers le congrès archéologique de la Société française pour la description et la conservation des monuments. Lors de la séance du 2 juin 1843, M. Bourgnon lit le mémoire relatif aux fouilles qu’il avait réalisées. Dans le Bulletin monumental, une notice résumait l’état de la connaissance de ce monument :
« Il ne reste plus guère de l’amphithéâtre de Poitiers, dont on fait remonter la construction au iiie siècle, que quelques ruines majestueuses encore, malgré les mesquines demeures qui se sont soudées à ses flancs comme des plantes parasites. La forme elliptique de l’arène, des précinctions et gradins est cependant retracée à l’œil par des ruines éparses et placées comme autant de jalons sur le vaste emplacement qu’occupaient autrefois, dans leurs jeux gigantesques, le peuple roi vainqueur et le peuple gaulois vaincu. L’amphithéâtre de Poitiers était remarquable par son étendue, et quoique des fouilles faites sous nos yeux nous aient autorisé dans le temps à réduire de quelques mètres le diamètre de l’arène, cette hypothèse justifiée depuis par les travaux consciencieux de M. le Baron Bourgnon de Layre, loin d’enlever au monument un degré d’importance en rétrécissant l’espace consacré au spectacle, augmente au contraire l’intérêt qu’il nous offre en donnant une plus juste idée du grand nombre de spectateurs qu’un étage de plus conviait aux jeux sanglants des gladiateurs21. Le grand vomitorium qui donnait entrée aux combattants et aux chars existe encore, et il a conservé, sinon toute sa splendeur primitive, du moins des traces nombreuses de l’ornementation sévère et grandiose des constructions de cette nature. Çà et là règnent encore la corniche sur laquelle reposait la retombée de la voûte et l’appareil en minuto lapide dont le placage solide a résisté aux siècles, au feu et à l’intempérie des saisons. Cependant à sa partie supérieure la voûte menacée par des infiltrations que ne prévenait point l’épaisse couche de terre compacte qui couvre les reins de la partie inférieure, pouvait faire redouter quelque éboulèrent. Chargé d’employer une assez faible somme pour prévenir ce résultat, nous avons fait enlever les terres sur une assez grande étendue et fait crépir à deux couches de ciment l’arceau les reins de la voûte et les deux jambages où des arrachements nombreux existaient depuis longtemps. Une teinte noire mêlée au ciment a coloré d’un vernis antique cette restauration de peu d’importance, mais qui atteindra le but qu’on s’était proposé, faute de pouvoir mieux faire. Espérons que lorsque le monument sera restitué à l’administration par suite de l’expiration du bail emphytéotique qui l’a fait passer en des mains étrangères, des mesures seront prises pour prolonger l’existence des ruines imposantes qui attestent la haute antiquité de notre ville et son importance historique dans les fastes du passé22. »
12Ainsi, les premières décennies du xixe siècle virent naître une véritable passion pour le passé, dont les Poitevins ne furent pas exempts. Les relevés qui furent réalisés constituent, avec les quelques fragments qui subsistent23, la source principale pour connaître l’édifice.
13M. Bussière traduisit en vers enflammés les dissertations savantes pour célébrer les vestiges poitevins, qu’il considérait comme des archives du passé24.
Cet empereur25 mit près de son palais
Ce monument, au gradin circulaire,
Où tout un peuple, assis en rangs épais,
Venait chercher, sans se lasser jamais,
Le sang qu’on versait pour lui plaire.
Nous le voyons, seize siècles après,
Non plus complet, bruyant de cette joie
Qu’un jour de fête et provoque et déploie,
Mais fruste et triste, ombragé de cyprès,
A l’homme, au temps, échu comme une proie.
L’un a placé sous ses arcs entr’ouverts
L’autel obscur de ses dieux domestiques ;
L’autre, de fleurs, de gazons toujours verts,
Comme un ami, sur ses flancs découverts,
A jeté les voiles pudiques.
14Les arènes et le baptistère furent classés monuments historiques dès 1840. Néanmoins, l’attention se détourna des ruines monumentales de l’Antiquité26 pour se tourner vers les vestiges du Moyen Âge27.
Fig. 1. – A. Clément, « Vue des arènes de Poitiers », Mémoires de la Société des antiquaires de l’Ouest, 1840, planche V.

Poitiers ville emblématique d’un Moyen Âge fleuri et pittoresque
15Le souhait de valorisation des restes de l’antiquité romaine ne fut cependant pas entendu. Quelques années plus tard, la municipalité de Poitiers autorisa la destruction de ladite arène. Un tel dédain pour ces vestiges gallo-romains ne laisse cependant pas d’intriguer. Alors que l’inspection des monuments historiques avait été créée par Guizot pour faire l’inventaire des monuments du sol national et entreprendre de les protéger ou les restaurer, comment comprendre que Poitiers ait démoli ses arènes dont les historiens avaient entrepris de souligner l’importance ? Alors que le théâtre et l’arc d’Orange, les arènes de Nîmes ou le Pont du Gard étaient mis à l’honneur, Poitiers se détourna des restes de son amphithéâtre.
16Une première explication tient au déplacement de l’attention, de la période de l’Empire romain vers le Moyen Âge et de Rome vers la France. Après le classicisme qui puisait son inspiration dans l’Antiquité, le romantisme découvrit et exalta le Moyen Âge, son histoire, sa littérature, sa peinture, sa musique et son architecture. Chateaubriand avait chanté les mystères de la nature que lui inspiraient les églises gothiques.
« Ces voûtes ciselées en feuillages, ces jambages qui appuient les murs, et finissent brusquement comme des troncs brisés, la fraîcheur des voûtes, les ténèbres du sanctuaire, les ailes obscures, les chapelles comme des grottes, les passages secrets, les portes abaissées, tout retrace les labyrinthes des bois dans l’église gothique ; tout en fait sentir la religieuse horreur, les mystères et la divinité28. »
17À partir des années 1830, les cercles romantiques, autour de Charles Nodier ou Victor Hugo, manifestèrent un véritable enthousiasme pour les arts du Moyen Âge. Même Mérimée, qui ne faisait pas usage de termes empreints d’émotion dans les rapports consacrés aux voyages qu’il accomplissait dans les différentes régions du pays29, ne manqua pas de souligner la richesse monumentale de Poitiers. Les églises Notre-Dame-la-Grande, Saint-Hilaire-le-Grand et Saint-Jean-de-Montierneuf furent classées dès 1840, Saint-Porchaire en 1846, le Palais des comtes du Poitou en 1862. La cathédrale le fut quant à elle un peu plus tardivement, en 1875.
« Au Moyen Âge, c’est l’époque romane qui paraît avoir été la plus brillante dans le Poitou, car la plupart des églises, bien que restaurées, ont conservé les traits caractéristiques de l’architecture de ce temps. C’est au xie et au xiie siècle qu’ont été construites les principales églises de Poitiers, et la richesse de leur ornementation peut les faire classer parmi les plus remarquables de cette période. Après Saint-Gilles, Notre-Dame de Poitiers me semble le type le plus parfait et le plus gracieux du style roman fleuri30. »
18Le pittoresque des monuments offrait des sujets d’admiration et détournait quelque peu des ruines antiques lorsqu’elles étaient considérées comme trop dégradées. En 1846, un débat agita le monde érudit pour comparer les mérites respectifs de l’architecture classique, inspirées des modèles antiques, et ceux du Moyen Âge. À la différence des monuments comme les arènes, qui avaient été conçus et construits par le conquérant romain31, les édifices du Moyen Âge étaient célébrés comme des produits du génie national. Eugène Viollet le Duc, architecte des édifices religieux, défendit le gothique comme art national « logique et beau de forme32 ».
19Ce qui se passait à Poitiers était en phase avec le mouvement national33. Lorsque Victor Hugo et Charles de Montalembert dénoncèrent les dégradations et destructions de monuments commises par des barbares contemporains, ils citaient principalement les édifices médiévaux. Hugo y voyait le reflet du génie français :
« Si les choses vont encore quelque temps de ce train, il ne restera bientôt plus à la France d’autre monument national que celui des Voyages pittoresques et romantiques […]. Le moment est venu où il n’est plus permis à qui que ce soit de garder le silence. Il faut qu’un cri universel appelle enfin la nouvelle France au secours de l’ancienne. Tous les genres de profanation, de dégradation et de ruine menacent à la fois le peu qui nous reste de ces admirables monuments du Moyen Âge, où s’est imprimée la vieille gloire nationale, auxquels s’attachent à la fois la mémoire des rois et la tradition du peuple. Tandis que l’on construit à grands frais je ne sais quels édifices bâtards, qui, avec la ridicule prétention d’être grecs ou romains en France, ne sont ni romains ni grecs, d’autres édifices, admirables et originaux, tombent sans qu’on daigne s’en informer, et leur seul tort, c’est d’être français par leur origine, par leur histoire et par leur but34. »
20Montalemenbert abondait dans le même sens en clamant sa « passion ancienne et profonde pour l’art du moyen-âge35 ». Les études réalisées sur les monuments médiévaux ne cachaient pas leur état souvent préoccupant, en particulier pour la collégiale Notre-Dame-la-Grande :
« Ce qui frappe tout d’abord, à la première vue du portail de Notre-Dame, c’est un air de vétusté indicible. Les fûts de colonnes rongés par le salpêtre et percés de mille trous, comme des éponges, les chapiteaux vermoulus, les voussoirs déjoints et sans ciment, et surtout une teinte d’un noir foncé qu’on croirait que le temps seul a imprimée sur les innombrables sculptures de cette façade, lui donnent un aspect antique que n’offre aucun des autres monuments religieux de Poitiers36. »
21Dans la première édition de son guide de Poitiers, l’historien Charles de Chergé, ancien président de la Société des antiquaires de l’Ouest, accorda une place importante à la description des arènes. Il soulignait l’étendue remarquable de l’édifice et émettait le vœu que lui fût accordée une meilleure protection :
« Serait-ce une pensée téméraire que d’espérer pour lui désormais une protection plus efficace qui servirait utilement les intérêts des pauvres. Conserver à la ville de Poitiers un de ses plus anciens titres de gloire, c’est lui conserver aussi le seul attrait qui puisse, ainsi que nous l’avons déjà dit, solliciter la curiosité de ces touristes intelligents, dont la présence est semblable aux pluies fécondantes qui laissent partout où elles tombent les traces de leur action bienfaisante37. »
22Les protestations des historiens et archéologues de la Société des antiquaires de l’Ouest conduisirent à la sauvegarde et au classement du baptistère, dit alors « temple saint Jean », que la municipalité avait envisagé de démolir38, permirent de valoriser l’église Notre-Dame-la-Grande en la dégageant des constructions qui l’enserraient, mais furent impuissantes à contrebalancer les projets édilitaires de modernisation de la ville de Poitiers. Ainsi, alors que les savants admiraient le fait que Poitiers possédait des monuments de toutes les époques, s’imposa l’image d’une « capitale romane39 ».
Fig. 2. – La démolition des arènes en 1857.

Photographie d’Achille (1808-1861) et Honoré (1812-1879) Hivonnait illustrant la destruction de l’amphithéâtre de Poitiers. Épreuves sur papier salé légèrement albuminé (?), 1857 (images conservées au sein du service Patrimoine et inventaire de Poitiers [Région Nouvelle-Aquitaine], inventaire général du patrimoine culturel. C. Rome [reproduction], 2022) ; 20228607003NUCA : démolition de l’amphithéâtre de Poitiers, vue de l’arène, 1857.
La marche inéluctable du progrès
23Par contraste avec ce Moyen Âge français, fleuri et pittoresque, l’empire romain est érigé en signe de l’orgueil humain et de la chute qui en découle. Nombre d’auteurs romantiques se saisirent de la thématique des ruines et en firent le point de départ d’une méditation associant le regard sur soi du poète à une réflexion philosophique sur la fragilité des civilisations. De la grandeur de Rome ne subsistaient que des pierres qui parlent au poète de charme, de mystère, de mélancolie40, qui lui inspirent une réflexion sur l’orgueil humain.
24Peu sensible à ce genre de considérations, Mérimée dans le rapport qu’il consacra aux régions de l’Ouest de la France, se lamentait de ce que l’indifférence avait conduit à la quasi-disparition du monument dont ne subsistaient, çà et là, que des restes sans grande valeur. Le cirque était seulement deviné. « Pour le déblayer, la dépense serait considérable, et probablement on n’obtiendrait pas aujourd’hui des résultats équivalens. Les arènes de Poitiers n’ont jamais été à comparer à celles d’Arles ou de Nîmes ; en outre, leur ruine est tellement avancée, qu’elles n’offrent plus qu’un sujet d’étude, un attrait de curiosité à l’antiquaire ; pour l’artiste, elles n’ont malheureusement presque aucun intérêt41. » L’inspecteur des monuments historiques était donc conduit à faire des choix ; il arbitrait entre les demandes de protection et de restauration, qui émanaient des historiens et les projets édilitaires de modernisation.
25Le 6 janvier 1857, les hospices de Poitiers, propriétaires du site, mettaient en vente le bâtiment de l’hôtel d’Évreux et sa dépendance, dont faisaient partie les terrains sur lesquels se trouvaient « les vestiges du vieil amphithéâtre romain, connu sous le nom d’Arènes ». Un projet d’urbanisme d’ampleur lui fut associé. Une commission municipale l’étudia. Son rapport fut examiné lors de la séance du conseil municipal du 2 mars 1857.
26La destruction était justifiée par des description dépréciatives de cette zone de la ville « la moins fréquentée et la plus ignorée », à l’exception de quelques visiteurs intéressés par les antiquités : les constructions y étaient « délabrées et fétides », les rues « sombres et insalubres ». Plus encore : il s’agissait d’un lieu de mauvaise vie : « La charité elle-même hésite à s’y égarer, dans la crainte d’y rencontrer le vice en cherchant la misère. » Rien à voir, donc, avec les descriptions emphatiques et chargées d’émotion des touristes qui avaient visité l’Italie.
27Déambulant dans le Colisée à la faveur d’une belle soirée de juillet 1803, méditant sur la fragilité des civilisations et des hommes, Chateaubriand s’était réjoui que les « cris de joie que des spectateurs féroces poussaient jadis dans cet amphithéâtre, en voyant déchirer des chrétiens par des lions » eussent été remplacés par « les aboiements des chiens de l’ermite qui garde ces ruines42 ». Cette représentation des arènes comme lieu de persécution des chrétiens par le paganisme décadent fut largement diffusée. Quelques décennies plus tard, alors que l’Église catholique était massivement devenue ultramontaine, le roman du cardinal Wiseman Fabiola, dans lequel le jeune soldat romain devenu chrétien Pancratius mourait dans l’arène du Colisée des griffes d’une panthère, abonda dans le même sens43. Le livre eut un immense succès ; il fut traduit, illustré, réécrit en version simplifiée pour les enfants, commenté44, adapté pour le théâtre45. Il contribua à associer le monument de spectacle romain au martyre des chrétiens. L’arène comme l’amphithéâtre étaient devenus sous la plume ou dans la bouche de bien des prédicateurs le symbole d’une antiquité païenne, inhumaine, féroce, orgueilleuse, persécutrice. Lorsque fut inauguré le marché qui fut érigé sur l’emplacement des arènes, le 28 mars 1859, l’évêque de Poitiers, Mgr Pie, abonda dans le même sens, suggérant le progrès qu’avait apporté aux hommes la victoire du christianisme sur le paganisme :
« Donc, Messieurs, tout en donnant à la civilisation matérielle ses justes développements, restons cependant ce que nous sommes, ce que les siècles nous ont faits ; et ne nous affligeons pas si, dans ce grand et universel effacement des cités provinciales sous le niveau moderne, la vieille cité de Poitiers a retenu jusqu’ici, dans l’aspect extérieur de ses murs comme dans le caractère moral de ses habitants, sa physionomie propre et son cachet à part. M’objectera-t-on, Messieurs, que la circonstance est mal choisie pour faire entendre ce langage, puisque la solennité de ce jour consacre précisément une défaite de l’art, et qu’une voix accusatrice semble s’échapper en ce moment de ces vieilles arènes romaines, disparues sous le marteau démolisseur de ce tyran des temps modernes qu’on appelle l’utilité publique ?
Il ne m’appartient pas, Messieurs, de me constituer juge d’un fait accompli. Mais, laissez-moi me souvenir qu’Hilaire s’éleva autrefois contre “ceux que captivait en ce lieu la passion des jeux de l’amphithéâtre et qu’une curiosité sans frein rendait esclaves de ces combats du cirque” : eos scilicet qui theatralibus ludis captivi incubant, eos qui circensium certaminibus serviunt. “Comme si, disait-il, le spectacle de la belle nature, par exemple, la contemplation du cours des astres, n’offrait pas plus de charmes que la vue des cochers du cirque et des évolutions de leurs chevaux ; comme si surtout la divine psalmodie de nos temples, la mélodie de ces saints cantiques qui expriment avec tant d’onction les espérances de la foi humaine, n’étaient pas mille fois préférables à ces représentations obscènes de spectacles honteux” : Nisi forte non magis equorum cursu astrorum cursus est gratior; et obscœnis illis spectaculorum turpium fabulis, non amœnius divina illa humanœ spei eloquiar cantantur? Messieurs, qu’aurait pensé le grand Hilaire, et quel conseil eût-il donné à vos pères, si la civilisation romaine, complètement affaissée sur elle-même, n’avait légué à son temps, comme au nôtre, que des ruines informes, des débris épars, ignoble réceptacle de toutes les dégradations morales tristement cramponnées à des murs démantelés et ne cachant qu’à demi leur nudité honteuse sous les lambeaux de ce suaire païen46 ? »
28Mgr Pie considérait en outre que la Révolution avait tenté d’effacer cet héritage en déchristianisant la société et qu’il convenait de revenir à une société pieuse et respectueuse de la divinité.
29L’interprétation de l’évêque ne doit pas nous induire en erreur. Les édiles poitevins avaient certes convié le clergé à bénir le nouveau marché, mais pour autant n’entendaient pas rétablir un monde qu’ils considéraient dépassé. La destruction des arènes ne fut pas le résultat d’une volonté d’éradiquer le paganisme mais du souci d’apporter une réponse adaptée aux besoins nouveaux de la société moderne. Moins forte sans aucun doute à Poitiers que dans les régions qui connaissaient le processus d’industrialisation, la pression démographique avait néanmoins touché la ville. Partout en France, les épidémies de choléra qui avaient sévi depuis les années 1830 avaient conduit les édiles à prendre des mesures préconisées par les savants pour assainir l’atmosphère en aérant le tissu urbain. En outre, pour éviter des révoltes populaires comme celle des canuts à Lyon, les autorités entendaient favoriser le bien-être des habitants. Dans de nombreuses cités, des travaux d’urbanisme furent engagés, dont ceux du baron Haussmann à Paris constituent un exemple accompli47.
30Il existait, dans tout le pays, une réelle volonté de moderniser la ville. Les élites libérales ne considéraient pas que le temps s’était arrêté au Moyen Âge. La marche du progrès était inexorable. De fait, les travaux de modernisation de la ville ne manquèrent pas à Poitiers à partir des années 1840 : nivellement, élargissement et pavage des voies publiques, installation de trottoirs, constructions de fontaines publiques et de halles…
31Après la vente de l’hôtel d’Évreux par les hospices de Poitiers, un projet de transformation de ce quartier de la ville fut soumis par les adjudicataires au conseil municipal du 2 mars 1857. Un marché serait construit, auquel conduiraient des rues nouvelles. Les adjudicataires demandaient, en échange des travaux qu’ils entreprendraient, la perception du péage du marché à leur profit pendant soixante-dix années, délai au terme duquel la propriété du marché et du péage reviendraient à la commune. Le conseil municipal donna son accord à ce projet.
32Les érudits de la Société des antiquaires de l’Ouest avaient tenté une ultime démarche auprès des pouvoirs publics pour empêcher ce projet et sauver les vestiges romains. Le ministère intervint sans succès auprès de la municipalité. Le marché fut promptement construit et les rues furent tracées. Elles furent peu à peu bordées de bâtiments à usage d’habitation.
33Lors de l’inauguration du marché, à laquelle l’évêque et les curés de la ville avaient été invités, les orateurs s’employèrent à justifier ces travaux. Alors que le représentant de l’entreprise qui avait accompli les travaux avait invoqué la protection divine du projet, le préfet comme le maire mirent l’accent sur sa dimension humaine. Le préfet insista sur les « impérieux besoins » des villes. Tout en remerciant l’évêque d’avoir accepté de venir apporter « les bénédictions, sans lesquelles les populations n’ont foi ni en la durée, ni en la prospérité des créations humaines les plus imposantes », le maire loua l’action coordonnée de la municipalité, qui avait accepté et soutenu financièrement l’opération, de la préfecture, qui avait contribué à aplanir les difficultés, ainsi de la société qui avait démoli et créé. Il fit remarquer que le quartier nouveau bénéficiait désormais d’air, de lumière, de propreté et de salubrité. Il ajouta que la circulation serait désormais facilitée du centre à l’extrémité sud de la ville. Il admira le bâtiment du marché, qui associait l’utile à l’agréable. Il annonça que le corps municipal avait approuvé le projet de construction du marché Notre-Dame48.
Conclusion
34Nous gardant de condamner cette destruction en la qualifiant de barbare, comme le firent archéologues et historiens de l’époque, nous nous sommes efforcé de comprendre ce qui avait déterminé une telle action de la part d’hommes instruits exerçant des responsabilités dans la cité. Les arènes de Poitiers furent détruites avec l’accord des autorités municipales soucieuses de moderniser la ville en supprimant ces vieilles pierres, au cœur d’un quartier mal famé, pour y introduire de l’air, de la lumière, de l’hygiène. Le projet bénéficia de la bénédiction des autorités ecclésiastiques, qui voyaient dans le monument romain un héritage des persécutions subies aux chrétiens. Cette destruction eut lieu à un moment bien précis. Certes, les premiers classements de bâtiments au titre de monuments historiques et les travaux de restaurations étaient engagés, mais des choix étaient opérés en fonction de la représentativité des édifices, due parfois à la médiocre qualité de leur conservation. Les hommes ne faisaient qu’achever le travail des siècles. Par ailleurs, les villes étaient touchées par la croissance de leur population et les difficultés qu’elle pouvait entraîner49.
35Quelques années plus tard, de telles démolitions auraient-elles été impensables ? Lorsque l’ancien maire Bourbeau devint ministre de l’Instruction publique, une notice du Figaro fit état de ses services, rappelant la destruction de l’amphithéâtre et ironisant sur la démarche d’haussmannisation des villes50. Peu de temps après, lorsque les restes des arènes de Lutèce furent découvertes, la demande de leur sauvegarde fut immédiatement portée à la Chambre des députés et revint souvent dans les débats jusqu’au rachat par la ville de Paris du terrain. De même, lorsque les arènes de Besançon furent redécouvertes en 1886 à la suite de l’affaissement du talus d’une courtine des remparts, l’historien Castan intervint pour en souligner l’intérêt51, puis les urbanistes conçurent le projet d’un square, comme à Paris52. Notons enfin que, lorsque le Père de la Croix exhuma les vestiges du site de Sanxay, l’archéologue jésuite obtint le soutien inattendu de Paul Bert qui l’aida à obtenir le soutien des pouvoirs publics pour mener à bien ses travaux et protéger les ruines53.
36L’opposition entre ruine à caractère patrimonial et équipement modernité ne cessa pas définitivement avec cet événement. En 1973, des vestiges médiévaux furent détruits au grand dam des historiens pour laisser place à un magnifique parking souterrain54.
Notes de bas de page
1 Geneviève Cammagre, « Ruines et retraite, de Diderot à Volney », Dix-huitième siècle, no 48, 2016/1, p. 181-195. L’auteur considère que les ruines, favorisant la méditation, se substituèrent aux églises, contribuant ainsi à la création d’une sacralité profane.
2 Le critique P. Hédouin considère que Hubert Robert était le seul peintre qui avait réussi dans le genre des ruines monumentales en raison de son habilité à animer ces restes mélancoliques et à leur donner une valeur morale, évoquant « la grandeur déchue et la puissance vaincue par les révolutions et le temps ». P. Hédouin, « Peintres du xviiie siècle. Hubert Robert », L’artiste. Revue de Paris. Beaux-arts et Belles Lettres, IVe série, t. X, 1847, p. 72.
3 Nicias Gaillard, « De quelques descriptions de Poitiers et du Poitou qu’on rencontre dans des ouvrages de géographie et d’histoire publiés au xvie et xviie siècle », in Mémoires de la Société des antiquaires de l’Ouest, 1re série, t. II, 1836, p. 120-174.
4 Georges Brun, Théâtre des principales villes du monde, 1572, cité par N. Gaillard, art. cité, p. 127.
5 Gérard Mercator, Atlas, 1595, cité par N. Gaillard, art. cité, p. 129.
6 Jean-Isaac Pontanus, Itineraire en Gaule Narbonnaise, Leyde, 1606, cité par N. Gaillard, art. cité, p. 135.
7 N. Gaillard, art. cité, p. 173.
8 Volney, Les Ruines ou Méditation sur les Révolutions des Empires, 1791.
9 Mangon de la Lande, « Les arènes de Poitiers », in Mémoires de la Société des antiquaires de l’Ouest, t. III, Poitiers, Chez Fradet et chez Barbier, Paris, Darache, 1837, p. 124.
10 « Ces réflexions, j’avais été conduit à les faire en contemplant tant de débris, tant d’antiques témoins d’une grandeur passée », ibid., p. 125.
11 Pierre Salmon, « Réflexions sur l’Archéologie. Les mobiles des fouilles », Bulletin de l’Association Guillaume Budé, no 3, septembre 1954, p. 19-26.
12 Claude Moatti, À la recherche de la Rome antique, Paris, Gallimard, 1989.
13 Charles Cochon de Lapparent, Description générale du département de la Vienne, rééd. Poitiers, Geste Édition/faculté de droit et des sciences sociales de Poitiers, 2000 (1810).
14 Étienne-Pierre-Julien Catineau, Septième séance publique de l’Athénée de Poitiers, 7 fructidor an XI, Poitiers, an XI, 1803, p. 4-14.
15 M. Foucart, « Poitiers et ses monuments », in Mémoires de la Société des antiquaires de l’Ouest, 1840, p. 123.
16 Cette question de la datation de l’édifice continuait de préoccuper les antiquisants à la fin du xxe siècle. Voir Jean-Claude Golvin et Jean Hiérnard. « D’un “Palais Galien” à l’autre. Nouvelles recherches sur l’amphithéâtre de Poitiers (Limonum Pictonum) », Revue des études anciennes, t. 88, 1986, p. 77-108.
17 Bourgnon de Layre, « L’amphithéâtre ou les arènes de Poitiers », in Mémoires de la Société des antiquaires de l’Ouest, 1843 (1844), p. 137-273.
18 Odile Parsis-Barubé, La province antiquaire. L’invention de l’histoire locale en France (1800-1870), Paris, Éditions du CTHS, 2011.
19 M. Foucart, « Poitiers et ses monuments », in Mémoires de la Société des antiquaires de l’Ouest, 1840, p. 103-202 et planches III-XVIII.
20 M. Foucart, « Poitiers et ses monuments », in Mémoires de la Société des antiquaires de l’Ouest, 1840, p. 124.
21 Une note de bas de page précise que « ce nombre pouvait s’élever, d’après les calculs positifs, à 40 000 ».
22 Bulletin monumental, 1843, p. 387-388.
23 René crozet, « L’empreinte de l’amphithéâtre de Poitiers dans le plan de la ville », Bulletin de la Société des antiquaires de l’Ouest et des Musées de Poitiers, 4e série, t. X, 2e trimestre 1969, p. 158-161.
24 « Monuments et souvenirs historiques de Poitiers », ode par M. Bussière, Mémoires de la Société des antiquaires de l’Ouest, t. V, Poitiers/Paris, Fradet et Barbier/Derache, 1839 (1838), p. 52-67.
25 Gallien, auquel sont consacrés les vers précédents.
26 P. Hédouin considère que ce genre est totalement abandonné. P. Hédouin, in « Peintres du xviiie siècle. Hubert Robert », art. cité, p. 72.
27 J. Nayrolles, op. cit., p. 156 sq.
28 François René de Chateaubriand, Le Génie du christianisme, ou Beautés de la religion chrétienne, IIIe partie, livre I, chapitre viii, 1802.
29 Odile Gannier, « Des ruines aux monuments historiques : les notes de voyages de l’inspecteur Mérimée », in Alain Guyot et Chantal Massol (dir.), Voyager en France au temps du romantisme. Poétique, esthétique, idéologie, Grenoble, UGA Éditions, coll. « Bibliothèque stendhalienne et romantique », 2003, p. 181-199.
30 Prosper Mérimée, Notes d’un voyage dans l’Ouest. Extrait d’un rapport adressé à M. le ministre de l’Intérieur, Paris, Librairie de Fournier, 1836, p. 375.
31 La notion de culture, société ou institution gallo-romaine ne s’imposa qu’à la fin du xixe siècle. Certes, le terme composé fut utilisé par Michelet (Jules Michelet, Histoire de France, t. 1, Paris, Hachette, 1835, p. 89), mais uniquement pour désigner la tentative de séparer la Gaule de l’Empire romain qui s’écroulait au IIIe siècle en établissant un « Empire gallo-romain ». Le questionnaire envoyé aux correspondants du Comité historique des arts et monuments en 1845 proposait trois rubriques : monuments gaulois, monuments romains, monuments du Moyen Âge. Les instructions de 1857 portant sur « l’architecture gallo-romaine » distinguaient trois périodes, en des termes significatifs : l’indépendance gauloise, la colonisation grecque, la conquête romaine. (Instructions du Comité historique des arts et monuments : architecture gallo-romaine et architecture du Moyen Âge, Paris, Imprimerie impériale, 1857).
32 Eugène Viollet-le-Duc, Du style gothique au xixe siècle, Paris, Librairie archéologique de Victor Didron, 1846, p. 27-29.
33 Jean Nayrolles, L’invention de l’art roman à l’époque moderne (xviiie-xixe siècles), Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2005.
34 Victor Hugo, Guerre aux démolisseurs (1825-1833), Œuvres complètes de Victor Hugo, vol. 2, Adolphe Wahlen et Cie, 1837, vol. 2, p. 643. Suivait une liste de monuments en ruine, démolis ou dont les pierres étaient vendues aux Anglais.
35 Charles de Montalembert, Du vandalisme et du catholicisme dans l’art, Paris, Debécourt, 1839, p. 2. Les arènes de Nîmes « transformées en écuries de cavalerie » constituent l’unique monument antique qu’il cite à l’appui de sa lamentation. Ibid., p. 3.
36 M. Lecointre-Dupont, « Rapport descriptif présenté au nom de la commission chargée d’examiner la façade de l’église Notre-Dame de Poitiers », Mémoires de la Société des antiquaires de l’ouest, Poitiers/Paris, Fradet et Barbier/Deacahe, 1840 (1839), p. 129-130.
37 Charles de Chergé, Guide du voyageur à Poitiers et aux environs contenant le plan de la ville, la description et l’histoire de ses monuments, une notice sur les lieux célèbres des environs ; suivi de L’itinéraire de Tours à Poitiers avec tous les renseignements utiles aux étrangers, Poitiers, Henri Oudin/Victor Létang, p. 23-24.
38 Charles de Chergé, Guide du voyageur à Poitiers et aux environs, Poitiers, Victor Létang, 1872 (3e éd.), p. 89-91. Ancien président de la Société des antiquaires de l’Ouest, l’auteur connaissait bien les actions qu’avait entreprises la SAO pour sauver le baptistère puis les arènes de la destruction.
39 Cette représentation est encore usitée à des fins touristiques. Voir l’onglet « Patrimoine et tourisme » du site de la ville de Poitiers, [https://www.poitiers.fr/c__256_788__Poitiers_capitale_romane.html] ou encore le site de l’Office de tourisme de Poitiers :[http://www.ot-poitiers.fr/accueil/decouvrir/patrimoineetcentrehistorique.aspx], sites consultés le 16 mars 2020.
40 Roland Mortier, La poétique des ruines en France. Ses origines, ses variations de la Renaissance à Victor Hugo, Genève, Droz, 1974 ; Alphonse de Lamartine, « Le Lézard », Méditations poétiques inédites, « XIII, Sur les ruines de Rome », 1846.
41 Prosper Mérimée, Notes d’un voyage dans l’Ouest. Extrait d’un rapport adressé à M. le ministre de l’Intérieur, Paris, Librairie de Fournier, 1836, p. 370.
42 François-René de Chateaubriand, « Lettre à M. de Fontanes sur la campagne romaine, 10 janvier 1804 », rééditée in Voyage en Italie, Œuvres complètes, 1828, p. 313.
43 Nicholas Patrick Wiseman, Fabiola o the church of the catacombs, 1857 (trad. fr. Fabiola ou l’Église des catacombes 1861).
44 Compte rendu critique d’Édouard Laboulaye, Journal des débats, 5 décembre 1855, p. 2, col. 4 et 5 et p. 3, col. 1-4.
45 Frédérick Oakeley, Les Jeunes martyrs de Rome. Scènes dramatiques tirées de « Fabiola ou l’Église des catacombes » de S.É. le cardinal Wiseman. Traduit de l’anglais par J.-B. Dillies, Paris/Tournai, Casterman/Lethielleux, 1859.
46 Mgr Pie, « Discours prononcé à la cérémonie de bénédiction du marché Saint Hilaire, 28 mars 1859 », in Œuvre de Monseigneur l’évêque de Poitiers, t. 3, Paris, Oudin, 1883, p. 381-382.
47 En 1831-1832, le jeune Haussmann commença sa carrière administrative comme secrétaire général de la préfecture de la Vienne. Cependant, il ne mentionne pas dans ses mémoires avoir commencé de penser la modernisation du tissu urbain de Poitiers.
48 « Inauguration et bénédiction du marché saint Hilaire », Le Courrier de la Vienne et des Deux-Sèvres, 28 mars 1857, p. 2, col. 1-6.
49 Les épidémies de choléra inquiétèrent particulièrement les édiles.
50 « M. Bourbeau a été maire de Poitiers. La vieille ville romaine n’avait gardé de l’antiquité que deux débris des fragments d’un aqueduc et des restes d’un cirque. Cependant il fallait haussmanniser Poitiers ; une rue nouvelle a renversé les ruines de l’amphithéâtre. Nous serions heureux d’apprendre que cette destruction insolite n’a pas eu lieu sous l’administration de M. Bourbeau ; il serait fâcheux que le futur ministre de l’instruction publique eut préludé à ses fonctions, en livrant à la pioche un monument qui était un chapitre d’histoire. » Le Temps, 19 juillet 1869, p. 2, col. 2.
51 L’historien intervint lors d’une séance à l’Académie des inscriptions et belles lettres, le 21 avril 1886.
52 Journal des débats, 24 avril 1886, p. 3, col. 5.
53 « Séance du 15 février 1881 », Bulletin de la société nationale des antiquaires de France, 1882, p. 169-171.
54 Dominique Bordier, « Notre Dame : un parking né dans la douleur », La Nouvelle République, 16 février 2012 [https://www.lanouvellerepublique.fr/poitiers/notre-dame-un-parking-ne-dans-la-douleur].
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