Chapitre I. Des organisations des usagers de l’eau au système géolégal fluvial
p. 27-48
Texte intégral
1Dans ce chapitre, je propose la notion de système géolégal fluvial pour appréhender les rapports de pouvoir autour du partage de l’eau à l’échelle du bassin versant. Cette notion vise à prendre en considération le rôle des acteurs invisibles dans le bassin, comme les institutions étatiques ou les investisseurs étrangers, mais dont les décisions influencent l’accès à l’eau. Ainsi, ce chapitre vise à répondre à la question suivante : comment appréhender les rapports de pouvoir dans l’appropriation de l’eau à l’échelle d’un bassin versant tout en intégrant l’ensemble des acteurs qui ont une incidence sur son partage ? Pour répondre à cette question, je présenterai, dans un premier temps, les impasses de la littérature portant sur les organisations des usagers de l’eau. Je proposerai, dans un second temps, la notion de « système géolégal fluvial » pour appréhender la dimension spatiale de l’appropriation de l’eau à l’échelle d’un bassin versant. Enfin, je présenterai les principales caractéristiques du système géolégal du fleuve Elqui.
Les organisations des usagers de l’eau dans la littérature
2Les organisations chargées du partage de l’eau ont fait l’objet de nombreux travaux. Je présenterai successivement les trois principales approches existantes : celle des systèmes d’irrigation dans les sociétés paysannes, celle des communs et enfin, celle des territoires de l’eau.
Les systèmes d’irrigation des sociétés paysannes
3Les systèmes d’irrigation constituent un objet classique de la géographie. Dès 1894, Jean Bruhnes (1894 et 1902) s’intéresse à l’ensemble des faits de géographie humaine relatifs à l’irrigation (Brunhes, 1902, p. 9, cité par Vidal de la Blache, 1902, p. 457). Roland Courtot (1972, 1986 et 1994), quant à lui, étudie les répercussions des transformations économiques (1960-1980), et plus précisément, de l’urbanisation et de l’industrialisation, sur le système spatial, économique et social des périmètres irrigués des huertas de Valence et de Castellon de la plana. Plus récemment, Robert Hérin (1977), étudie les huertas de Murcia, Marrakech et d’Ispahan qu’il définit comme les « régions méditerranéennes de vieille irrigation » (Hérin, 1977, p. 177). Plus généralement, les géographes ont démontré l’interdépendance entre les systèmes hydrauliques, la transformation des paysages et les relations économiques (Ayeb, 2012 ; Récalt, 2012 ; Ruf, 2013).
4Ces premières réflexions ont été poursuivies par des anthropologues soucieux de mettre en lumière la dimension sociale de l’irrigation pour dépasser la théorie de Karl August Wittfogel (1964) selon laquelle les systèmes d’irrigation révèlent, et légitiment, l’existence d’un État despotique. Ils ont ainsi souligné « la variété des relations que l’on peut observer entre irrigation et structures sociopolitiques » (Riaux, 2006, p. 23). Ils ont minutieusement décrit la diversité des aménagements hydrauliques au sein des systèmes d’irrigation, les rapports de pouvoir qui les traversent (Bédoucha, 1987 et 2000), les règles et les techniques sur lesquels ils reposent (Aubriot et Jolly, 2002 ; Riaux, 2006 et 2011) et les savoirs et les liens de parenté qui les sous-tendent (Aubriot, 2004 ; Wateau, 2002).
5Partant du constat d’une dimension sociale de l’irrigation, Jean-Luc Sabatier et Thierry Ruf (1995) étudient les agricultures irriguées et les organisations d’usagers de l’eau depuis une approche pluridisciplinaire. Afin de dépasser les approches technicistes, ils fondent le groupe de travail portant sur la Gestion sociale de l’eau. Cette dernière se définit comme « l’ensemble des relations et règles contractuelles entre les communautés paysannes autour du partage de l’eau, en particulier les dispositions visant à la définition de la répartition théorique et juridique des ressources hydriques, à la distribution pratique de l’eau d’irrigation, à la récupération des eaux de drainage et à leur valorisation » (Sabatier et Ruf, 1995, p. 10). Les chercheurs de ce groupe adoptent une perspective historique pour souligner l’évolution des systèmes d’irrigation qui ne sont pas figés dans le temps (Ruf et Rivière-Honegger, 2004).
6En Amérique latine, Thierry Ruf a appliqué l’approche de la Gestion sociale de l’eau pour étudier les communautés indiennes et paysannes équatoriennes (1997). Au même moment dans le continent, un groupe de chercheurs latino-américains et européens1 étudie de manière empirique le « droit de l’eau collectif et en action » de ces communautés. Je retiens de leurs travaux l’existence d’un pluralisme juridique en matière hydrique (Gavick et Gupta, 2014) : les organisations utilisent une pluralité de normes d’origines différentes ce qui « suppose non seulement une critique de la prétendue validité pleine et universelle de la loi de l’État, mais également la reconnaissance du fait qu’il existe des groupes et des espaces sociaux semi-autonomes qui génèrent leurs propres systèmes de régulation et de sanction dans l’exercice de leurs activités » (Boelens et al., 2010a, p. 134). Cette coexistence normative provient des stratégies locales pour appliquer le droit et débouche sur des situations d’interlégalité. En outre, ce groupe s’est attaché à déceler les inégalités d’accès à l’eau en étudiant les rapports de pouvoir qui s’instaurent lors de la définition du droit d’eau localisé.
Les réflexions sur les communs
7L’une des approches les plus répandues pour saisir les organisations d’usagers de l’eau est la Common Pool Resource (CPR) et la réflexion sur les communs. Cette approche néoinstitutionnaliste propose un cadre d’analyse pour saisir l’action collective au sein des communautés d’eau et d’étudier la manière dont les droits de propriété influencent l’allocation des ressources. À l’origine se trouvent les recherches d’Elinor Ostrom, et particulièrement son ouvrage Governing the Commons: The Évolution of Institutions for Collective Action pour lequel elle reçoit en 2008 le prix Nobel d’économie. Les communs constituent un « système de ressources suffisamment important pour qu’il soit coûteux (mais pas impossible) d’exclure les bénéficiaires potentiels de l’accès aux bénéfices liés à son utilisation » (Ostrom, 2010, p. 44).
8Elinor Ostrom critique la thèse de Garett Hardin (1968) sur la « tragédie des communs », selon laquelle une ressource partagée est inévitablement surexploitée. Selon ce dernier, seuls une intervention étatique ou des mécanismes de marché éviteraient la surexploitation des ressources communes. Ostrom quant à elle souhaite contribuer « au développement d’une théorie valide au plan empirique des formes d’auto-organisation et d’autogouvernance de l’action collective » (Ostrom, 2010, p. 44). Dans le cadre du partage de la ressource, les membres des organisations redéfinissent continuellement les règles afin de résoudre les problèmes soulevés par l’action collective.
9Depuis les années 2000, un nombre croissant de recherches prolongent les réflexions sur les communs, ce qui amène à des définitions polysémiques. Les communs peuvent être compris à la fois comme des systèmes de ressources, des systèmes de valeurs ou comme principe d’action politique (Buchs et al., 2019 ; Baron et al., 2021). Dans le domaine de l’eau, de nombreux travaux étudient le fonctionnement des communautés d’irrigants (Allain, 2012 ; Ruf, 2011). D’autres interrogent la patrimonialisation des ressources en eau (Calvo-Mendieta et al., 2010 ; Petit, 2009 ; Petit et Romagny, 2009).
10Dans le cadre de cette recherche, je retiens de la CPR la critique de la dichotomie entre bien public et bien privé. Désormais, il ne s’agit plus de réfléchir en la qualité intrinsèque des biens « mais plutôt de se pencher sur le cadre institutionnel et réglementaire qui préside à leur érection en tant que commun » (Harribey, 2011, p. 103). En outre, cette approche souligne le caractère construit des communs dont l’existence reste éminemment politique (Dardot et Laval, 2015) et examine les changements institutionnels depuis une approche multi-niveaux. Néanmoins, elle présente un certain nombre de limites. Tout d’abord, la compréhension de l’action collective repose sur un nouveau modèle de la théorie des jeux (Ostrom, 2010). Elle se fonde sur l’individualisme méthodologique : les individus sont considérés comme des acteurs rationnels. Le respect des règles collectives par les individus s’explique in fine par la réalisation d’un calcul stratégique des coûts et des bénéfices escomptés.
11Pour dépasser cette perspective, Stéphane Nahrath (2012) intègre, depuis une approche constructiviste, l’évolution de la demande des ressources et les transformations du régime de propriété pour comprendre la régulation de l’accès et de l’usage des ressources communes. En outre, l’auteur souligne que les conflits au sein de ces organisations peuvent conduire à l’exclusion de certains de leurs membres. Selon Harribey (2011), l’approche des CPR oublie les rapports sociaux, alors que, souligne-t-il « les hypothèses de Marx et de Polanyi, selon lesquelles toute l’histoire du capitalisme est marquée par une lutte pour l’élargissement des droits de propriété privée, ou, au contraire, pour la préservation d’un espace commun, semblent confirmées » (Harribey, 2011, p. 115). Dardot et Laval (2010) signalent, quant à eux, que « s’il est une réalité historique dont les économistes doivent tenir compte, c’est bien que le mouvement des enclosures ne relève pas de la soudaine prise de conscience par les propriétaires fonciers de la nature et de la terre comme bien exclusif et rival, mais de la transformation, en Angleterre, des rapports sociaux à la campagne » (Dardot et Laval, 2010, p. 117). La dimension historique, et j’ajouterai spatiale, de l’expansion du capitalisme est sous-estimée par cette approche.
Les territoires de l’eau
12De nombreux géographes français ont intégré les organisations des usagers de l’eau dans leur réflexion sur les territoires de l’eau. Ils effectuent un changement d’échelle en interrogeant la diversité existante des territoires de l’eau. Une première entrée interroge la territorialisation des politiques de l’eau et ses effets sur les organisations des usagers de l’eau. Par exemple, Anne Rivière-Honegger (2010) étudie la modernisation des associations syndicales autorisées dans le Languedoc-Rousillon, des comités de rivières et des commissions locales de l’eau en France (Girard et Rivière-Honegger, 2014). Elle souligne la façon dont les formes innovantes de gestion, par exemple à travers le contrat de canal, ont des répercussions sur la répartition sectorielle et territoriale de l’eau (Ghiotti et Rivière-Honegger, 2012).
13Plusieurs chercheurs définissent les territoires de la gestion de l’eau dans leur dimension politique (Alexandre, 2005 ; Ghiotti, 2009 et 2011 ; Goeldner-Gianella et al., 2016 ; Grujard, 2003). Ils analysent la territorialisation de l’eau, définie comme une appropriation des espaces pour la gestion de l’eau. Ils interrogent la possibilité de définir un territoire pertinent de l’action publique qui deviendrait un espace géographique de projection des politiques publiques hydriques. Les auteurs étudient la recomposition de ces territoires par l’application de nouvelles politiques et instruments d’action publique et leurs retombées sur les systèmes de gouvernance, les réseaux d’acteurs, et les représentations associées aux cours d’eau (patrimonialisation, concertation, protection).
14Plusieurs chercheurs interrogent la construction des dispositifs de gouvernance dans un contexte, à la fois de décentralisation et d’importation de modèles globaux (Baron et Bonnassieux, 2013 ; Coing, 2002 ; Gouvello et Fournier, 2002 ; Trottier, 2015). L’étude de la portée de ces modèles suppose d’analyser, de manière inductive, la construction des territoires locaux de l’eau. Ces derniers sont définis comme des modes de gouvernance hybrides façonnés par les formes d’appropriation locales des modèles globaux, par les espaces vécus des habitants et par les réalités historiques régionales.
15Enfin, au Chili, de nombreux chercheurs tendent à adopter une vision du territoire de l’eau qui essentialise les populations qui y habitent (Neira Ceballos et al., 2012 ; Skewes, 2012 ; Yañez et Molina, 2011). Par exemple, ils définissent les « territorialités indigènes » de l’eau comme l’occupation ancestrale d’un espace par les communautés du fait de l’existence des eaux qu’elles ont utilisées pour leur reproduction sociale, économique et culturelle. Ces travaux tendent à essentialiser les communautés autochtones et à ethniciser l’écologie en cherchant à défendre juridiquement le droit d’eau des communautés rurales subalternes à partir des outils juridiques actuels (Boccara, 2011).
16Les questionnements que je développerai dans cet ouvrage intègrent les apports de ces trois approches. Ils se rapprochent particulièrement de la troisième par la dimension spatiale de l’analyse. Les deux premières sous-estiment les rapports de pouvoir entre les acteurs au sein des communautés lors de l’institutionnalisation des règles collectives. Les communautés, de petites tailles, supposées homogènes, sont par ailleurs souvent analysées de manière isolée, dissociée de la société globale et des rapports, notamment pluriscalaires, qui pourraient les façonner. Je retiens de la réflexion sur les territoires de l’eau l’amplification de l’échelle d’observation et la démarche transcalaire. Ces méthodes permettent d’interroger les rapports de pouvoir entre acteurs situés à des niveaux et des échelles différentes, sur le temps long. Néanmoins, aucune de ces trois approches ne se propose d’appréhender la dimension spatiale des règles institutionnelles de l’eau définies par les organisations des usagers.
Parcourir un système géolégal fluvial
17À partir des enseignements de la littérature présentée ci-dessus, je propose dans cette section une approche qui permet de se focaliser sur la dimension spatiale de l’élaboration des règles institutionnelles de l’eau, entendues comme l’ensemble des normes, transmises par voie écrite ou orale, relatives à la gestion de l’eau et produites par différents acteurs à plusieurs niveaux. En ce sens, trois questionnements principaux me conduisent à proposer la notion de système géolégal fluvial pour étudier les interactions entre l’espace et le droit, qui participent à l’appropriation de l’eau et à la production de l’espace.
18Le premier articule les organisations des usagers avec les acteurs situés au niveau régional, national et international. Comment les acteurs nationaux, régionaux et internationaux entrent-ils en relation avec les organisations des usagers de l’eau, ayant ainsi une incidence sur l’appropriation de l’eau et la production de l’espace ?
19Le second questionnement concerne les enjeux de pouvoir qui se déploient autour du partage de l’eau au sein du bassin versant. Analyser le rôle des organisations des usagers implique d’interroger la structuration des rapports de pouvoir dans le partage de l’eau. Ces derniers sont façonnés par les liens d’interdépendance entre l’amont et l’aval et plus amplement par la configuration géographique de la vallée (localisation des usagers, réseau hydrographique, aménagements hydriques).
20Le troisième questionnement porte sur les liens entre l’expansion historique du capitalisme et les transformations des règles de distribution locale de l’eau. Comment l’histoire contemporaine du Chili permet-elle de comprendre les appropriations actuelles de l’eau, le fonctionnement des organisations des usagers et l’espace observé dans la vallée ?
La notion du système géolégal fluvial
21Pour répondre à ces trois questionnements, je propose la notion de système géolégal fluvial. Le système géolégal fluvial constitue l’ensemble des interactions entre le droit, l’eau et l’espace qui font système et participent à la production de l’espace. Dans ce système, toutes modifications du droit produisent des altérations dans l’espace et inversement. J’emploie ici la notion de système en référence au concept de géosystème initialement développé par Georges Bertrand et Jean Tricard (1968) en France. Le système géolégal fluvial permet, de ce fait, de dépasser les séparations existantes entre nature et société et entre espace et droit. Il met en évidence les relations entre ces éléments qui s’agencent de manière unitaire et se transforment conjointement sur le temps long.
22À l’origine, en proposant le concept de géosystème, Georges Bertrand et Jean Tricard (1968) soumettent une nouvelle approche de la géographie des paysages. Le système géolégal fluvial peut être vu comme une notion permettant de comprendre la formation des paysages fluviaux et donc de la production de l’espace. Celle-ci me permet d’étudier les interactions nature-sociétés dans leur dimension spatiale et temporelle. Je l’étudie selon trois dimensions complémentaires : la configuration spatiale (horizontale et verticale), son fonctionnement (interactions entre les éléments), et ses changements d’état (perspective historique).
23La configuration spatiale du système géolégal fluvial est déterminée, dans un premier temps, par les interactions transcalaires (dimension verticale). Le système géolégal se compose des interactions entre les organisations et des acteurs situés aux échelles internationales, nationales, régionales et locales qui façonnent les règles du partage de l’eau. Les rapports transcalaires se caractérisent par leurs conflictualités et participent à la production des règles de l’eau et de l’espace (Swyngedouw et Heynen, 2003).
24La configuration spatiale du système géolégal fluvial est façonnée, en même temps, par les rapports de pouvoir existants dans le partage de l’eau du bassin (dimension horizontale). Ces derniers peuvent être étudiés par la notion de cycle hydrosocial. « Le cycle hydrosocial oriente l’analyse sur la manière dont les relations sociales et de pouvoir – en particulier liées au pouvoir et au capital – façonnent la nature et la dynamique de l’eau et de sa circulation, et comment l’eau est influencée par les processus sociaux se produisant à une grande variété d’échelles spatiales et temporelles au-delà de l’unité de bassin » (Linton et Budds, 2014, p. 168).
25Par ailleurs, cette notion met en avant les dimensions matérielles et politiques des changements environnementaux (perspective historique). Certes des faits de nature existent, néanmoins ils sont indissociables des rapports sociaux et de leur transformation : ils sont encastrés les uns dans les autres. En ce sens, la notion de système géolégal fluvial part de l’existence d’un hydrosystème fluvial (Bethemont, 1999 ; Bravard et Magny, 2002 ; Muxart et al., 2003) et le fonctionnement hydrologique de ce système reconfigure les rapports sociaux et par conséquent, le cycle hydrosocial.
26Pour finir, les interactions entre les différents éléments du système sont façonnées par les flux de l’eau et les rapports sociaux pour son partage (interaction entre les éléments). Ce système géolégal fluvial est, tout d’abord, composé du droit de l’eau étatique, entendu comme l’ensemble des règles de droit institutionnalisées émanant d’une structure étatique. Ensuite, les institutions mettent en place des dispositifs d’action publique définis par des politiques de l’eau et composés d’une diversité d’instruments et d’outils d’action publique. Ces dispositifs sont détournés par les acteurs qui élaborent des stratégies ou tactiques géolégales. Les acteurs sont multiples, allant des usagers des services d’eau, aux titulaires de droits d’eau, en passant par les organisations des usagers de l’eau. Les règles de partage de l’eau se définissent par des négociations constantes entre acteurs et par leur réappropriation et la production conjointe de l’espace et du droit.
27L’ensemble des éléments juridiques, sociaux et politiques que je viens de citer interagissent à différents niveaux et de manière interdépendante, pour construire les règles du partage de l’eau et participent in fine à la production de l’espace. Afin de comprendre la dimension spatiale de l’appropriation de l’eau, il est donc nécessaire de parcourir le système géolégal fluvial.
Figure 1. – Schéma illustrant la notion de système géolégal fluvial.
Les rapports sociaux autour du droit de l’eau dans le système géolégal fluvial
28Les rapports sociaux autour de la définition des règles institutionnelles de l’eau constituent les interactions principales du système géolégal fluvial. Dans de nombreuses régions arides, comme au nord du Chili, les organisations d’usagers de l’eau jouent un rôle fondamental dans la mise en valeur des périmètres irrigués. Ces organisations se caractérisent par leur capacité à édicter des règles à plusieurs échelons (Riaux, 2006 ; Hendriks et Boelens, 2016). Néanmoins, Jeanne Riaux (2006) dans sa thèse montre bien que l’État joue un rôle essentiel dans la gestion locale de l’eau puisque, du fait de son intervention, les communautés intègrent les règles qu’il impose.
29Pour appréhender ces règles au niveau local, je reprendrai les trois catégories que distingue Jeanne Riaux. Dans un premier temps, elle définit, les règles de partage de l’eau, comme les droits et les devoirs de chaque titulaire d’une organisation. Ces règles organisent la répartition de l’eau sous forme de tours d’eau entre les usagers d’un même canal ainsi que les tâches nécessaires au bon fonctionnement des systèmes d’irrigation, comme la maintenance des canaux.
30Dans un second temps, elle identifie les règles de fonctionnement. Elles concernent l’usage des ouvrages hydrauliques à l’échelle du bassin versant. Ces règles se réfèrent à la distribution de l’eau au sein du réseau d’irrigation du bassin, et donc entre l’ensemble des organisations d’usagers. Elles « sont produites et renouvelées en fonction de la configuration des ouvrages hydrauliques, de la quantité d’eau mobilisable pour l’irrigation et des relations qu’entretiennent entre eux les différents groupes d’irrigants » (Riaux, 2006, p. 454).
31La dernière catégorie regroupe les règles d’administration destinées à organiser les tâches collectives de l’ensemble des organisations et des titulaires. Elles définissent, par exemple « les modalités d’application et de renouvellement des règles, le contrôle de leur application ainsi que la définition et la mise en œuvre de mesures en cas d’infraction, les rôles destinés à organiser l’usage de l’eau et du réseau, etc. » (Riaux, 2006, p. 454). Celles-ci sont davantage liées à l’intervention de l’État et concernent l’ensemble des usagers du bassin.
32Les règles de l’eau ne sont pas figées dans le temps. Elles sont perpétuellement négociées, ou redéfinies, pour s’adapter au contexte institutionnel local (Riaux, 2006) ou aux besoins locaux (Ostrom, 2010). La redéfinition de ces règles s’effectue de manière conflictuelle, par la confrontation d’intérêts divergents, à travers ce que Mathieu, Bénali et Aubriot (2001) ont appelé le « processus conflictuel de négociation ». Par ailleurs, la grille d’analyse des « échelons de droits » proposée par Boelens (2008) permet de distinguer, lors de la définition des règles, les différents niveaux de négociation, voire de confrontation. Malgré son utilité analytique, la proposition de Boelens (2008) ne rend pas compte de la dimension spatiale de l’élaboration du droit à chacun de ces échelons. Elle ne permet pas de mettre en lumière les enjeux spatiaux et matériels qui participent à la définition des règles. La notion de système géolégal fluvial propose d’analyser la dimension spatiale de l’appropriation de l’eau et donc les enjeux spatiaux autour de la négociation de ces règles locales et plus amplement, du droit de l’eau.
33Je m’appuie sur une définition large du droit de l’eau. Il comprend notamment les principes constitutionnels, les textes législatifs, mais également les instruments d’action publique comme ceux qui établissent une gestion intégrée de l’eau et les actes administratifs qui déterminent l’allocation des droits d’eau. J’intègre également les règles produites localement, que nous venons de distinguer, et les décisions des instances juridicaires. Je vais ainsi au-delà de la seule analyse des politiques publiques pour m’intéresser en parallèle aux pratiques qu’elles engendrent. La redéfinition du droit de l’eau est influencée par le contexte d’économie politique et de l’intervention des acteurs non étatiques, comme des entreprises ou d’autres organisations (Blomley, 1994). Pour reprendre les travaux de Jesse Ribot et Nancy Peluso, les répercussions de l’économie politique sur la définition de l’accès se manifestent, par exemple, par la volonté de contrôler une ressource et celle de maintenir l’accès aux ressources. Ainsi, le droit de l’eau, entendu au sens large, est influencé par l’économie politique. Il façonne donc le système géolégal dans son ensemble.
Le système géolégal du fleuve Elqui
34Dans cette section, je présenterai les principales caractéristiques du système géolégal du fleuve Elqui. Ensuite, j’exposerai le cadre juridique chilien de l’eau et les différentes catégories d’acteurs et d’usagers de la vallée. J’identifierai les organisations d’usagers de l’eau, puis, pour finir, je présenterai le cheminement qui m’a amené à me recentrer sur les deux conseils de surveillance.
Un système géolégal sous pression urbaine, extractive et climatique
35Le système géolégal du fleuve Elqui fait face à des transformations spatiales multiples qui exercent une pression sur les ressources en eau (Nicolas-Artero et al., 2018). Depuis les années 1990, les secteurs agricoles et miniers ont connu une expansion considérable. La superficie cultivée dans la région de Coquimbo a atteint le record en 2016 et 2017 de 46 215 hectares. Dans la province d’Elqui, la superficie totale cultivée a atteint 11 078 hectares, dont 37,3 % d’arbres fruitiers à feuillage persistant, 30,2 % d’arbres fruitiers à feuillage caduc, 25,1 % de cultures de cycle court et 7,4 % de pâturages2.
36Constituée à 82,1 % de cuivre et de fer, la production de minerais représente 23 % du PIB régional. Son exportation a augmenté de 27,4 % entre janvier 2016 et 20173. Dans la province, les entreprises minières d’Andacollo, de Marqueza Talcuna et d’El Indio ont été les principaux exportateurs de minerais. L’essor est illustré par l’ouverture du projet « Las Alturas » de Barrick Gold, qui avait fermé le Projet Indio en 2002, situé à 30 km du nouveau site. Ces matières premières sont principalement exportées vers l’Asie et les États-Unis depuis le port de Coquimbo.
37Depuis les années 2000, le développement touristique produit une mise en valeur du littoral et des espaces encore peu urbanisés (Aroca et Atienza, 2008 ; Rehner et al., 2018 ; Rehner et Rodríguez-Leiva, 2017). Entre 2007 et 2017, pendant la période estivale, l’occupation hôtelière a augmenté de 62 % à La Serena et à Coquimbo. La vallée représente ainsi le modèle de développement national extractiviste – associant à l’agro-industrie, les mines, le secteur immobilier et le tourisme – qui repose sur une forte consommation d’eau. Au cours de cet ouvrage, j’emploierai le terme de secteurs extractifs pour désigner ces quatre activités qui reposent sur une logique commune et produisent l’espace de l’extractivisme.
38Le système géolégal se situe dans une région semi-aride, caractérisé par un faible niveau de pluviométrie et des taux d’évapotranspiration élevés (Paskoff, 1970). En termes de stockage des eaux, la vallée possède un seul glacier, El Tapado et de nombreux glaciers rocheux. En matière de stockage des eaux de surface, il existe actuellement deux réservoirs artificiels. D’une part, celui de La Laguna, mis en fonctionnement en 1948, peut contenir 40 millions de mètres cubes. D’autre part, depuis 1999, le réservoir de Puclaro, situé dans le cours moyen de la rivière Elqui, peut retenir 200 millions de mètres cubes. La pente altitudinale de la vallée varie, sur une section d’environ 170 km, entre 0 m d’altitude au niveau de la plage de La Serena et 6 255 m d’altitude maximale au pic de la montagne Olivares. Le régime des cours d’eau est de type nival. Ces derniers connaissent une hausse de leur débit lors du dégel aux printemps, de novembre à janvier. Le niveau de pluviométrie annuel moyen est de 90 mm à La Serena. Les pluies se concentrent sur de courtes périodes entre les mois de mai et d’avril. Le bassin ne dispose pas d’apports d’eau externe comme des transferts d’eau provenant de bassins voisins ou des systèmes de dessalement.
39En ce qui concerne la circulation des eaux souterraines4, l’existence d’une très faible perméabilité est mise en évidence dans la partie supérieure du bassin en raison de l’existence de roches métamorphiques et sédimentaires, volcaniques et plutoniques. Le ruissellement souterrain se produit parallèlement aux canaux où la perméabilité augmente. Ces données expliquent pourquoi la maîtrise de l’eau dans la vallée est de la plus haute importance. De plus, la pression sur les ressources en eau par les secteurs extractifs s’est accentuée dans un contexte d’instabilité climatique.
Le cadre juridique chilien de l’eau
40Pour comprendre le fonctionnement du système géolégal fluvial, je dois prendre en considération le cadre juridique et institutionnel de l’eau, qui constitue l’une de ses composantes essentielles. La pierre angulaire actuelle de la gestion des ressources en eau est le Code de l’eau, promulgué en 19815. Il instaure les règles de l’administration des ressources et de la gestion de leur distribution. Sa particularité repose sur la non-reconnaissance d’une priorité d’usage pour la consommation humaine et dans le fait qu’il autorise la libre transférabilité des droits d’eau6. Celle-ci est permise par la reconnaissance, dans l’article 17 de la Constitution politique (1980), de la propriété privée sur l’eau.
41En ce qui concerne l’accès à l’eau potable, la loi sur les services sanitaires, promulguée en 1988, et la loi 18.885 de 1990, établissent le régime de concession des services d’eau potable et d’assainissement. Elles créent également la Superintendance des services sanitaires (SISS) : l’autorité indépendante chargée de contrôler les opérateurs et de fixer le prix de l’eau. Les opérateurs d’eau potable en milieu urbain sont principalement des concessionnaires privés ou bien des sociétés anonymes formées à partir de la privatisation graduelle des anciennes entreprises publiques.
42Toujours dans ce domaine, la loi sur l’eau potable rurale, promulguée en 2017, régule les opérateurs ruraux d’eau potable. Avant cette loi, le secteur l’était uniquement par le Programme d’eau potable, datant de 1964, et mis en œuvre au sein du ministère des Travaux publics (MTP). Cette loi régularise l’ensemble des organisations chargées du service de distribution. Les opérateurs pourront être des comités, des coopératives ou des entreprises privées.
43En ce qui concerne l’irrigation, la loi de développement des ouvrages hydrauliques privés pour l’irrigation et le drainage (que je nommerai désormais la loi sur l’irrigation) a été promulguée en 1985. Elle prévoit les conditions de l’octroi de financements indirects pour l’élaboration d’études ou la construction d’infrastructures d’irrigation inférieures à 50 000 unités d’investissements7. La Commission nationale d’irrigation est chargée d’orienter les financements, de sélectionner les bénéficiaires et de veiller à la mise en œuvre des projets par ces derniers. Ces aides sont octroyées à la fin de la réalisation des travaux de construction ou d’installation, ce qui oblige les bénéficiaires à avancer les frais et souvent à s’endetter auprès des banques.
44Dans le domaine des grands ouvrages hydrauliques, la loi sur les normes d’exécution par l’État des infrastructures d’irrigation a été promulguée en 1981. Elle concerne uniquement les travaux financés directement avec des fonds publics. Dans ce cas, l’État prend en charge l’ensemble des frais de construction, il fixe une nouvelle planification des droits d’eau et la dette de chaque titulaire pour rembourser une partie des coûts des travaux qui sont supérieurs à 50 000 unités d’investissements.
45Enfin, sur les questions écologiques, la loi sur l’environnement, promulguée en 1994, établit des instruments de gestion et d’évaluation pour reconnaître le « droit à vivre dans un environnement non pollué ». Son application repose principalement sur la mise en place du dispositif du « Système d’évaluation d’impacts environnementaux ».
46L’ensemble de ces lois définissent une architecture institutionnelle en matière hydrique (figure 2). À l’instar de nombreux pays en Amérique latine, cette architecture se caractérise par une grande fragmentation (Poupeau et al., 2019 ; Mayaux, 2017).
47À l’échelon national, le ministère des Travaux publics, concentre les institutions ayant les principales responsabilités dans le domaine hydrique. La Direction générale de l’eau (DGE) est chargée de promouvoir la gestion et l’administration des ressources en eau. Elle octroie les concessions de droits d’eau et produit des données hydrologiques. Depuis 2011, elle dispose, à l’échelle nationale, d’une Unité des organisations des usagers chargée d’établir des mesures pour leur encadrement. La Direction des travaux hydrauliques (DTH), quant à elle, fournit des aides pour améliorer l’accès à l’eau notamment par le financement d’aménagements et d’ouvrages hydrauliques de grande ampleur. Elle contient la Sous-direction de l’eau potable rurale (SDEPR), une unité chargée du financement et de l’accompagnement des comités et coopératives d’eau potable. Dans ce domaine, la SISS constitue l’autorité indépendante chargée de contrôler les activités des opérateurs du service de distribution de l’eau et de l’assainissement.
48Au sein du ministère de l’Agriculture (MA), l’Institut de développement agraire (IDA) encourage le développement économique, social et technologique des petits agriculteurs. Il octroie des financements pour promouvoir leur capacité entrepreneuriale, productive et commerciale. Ses aides concernent parfois les ouvrages hydrauliques. L’Institut national de recherches agraires (INRA), quant à lui, « génère et transfère des connaissances et des technologies stratégiques à l’échelle mondiale pour produire de l’innovation et améliorer la compétitivité du secteur agroalimentaire8 ». De nombreuses recherches évaluent les possibilités d’augmenter les rendements agricoles dans les régions arides. En outre, bien que très éloignée de l’eau en apparence, l’Unité des terres et de l’eau du Service agricole et de l’élevage (SAE) reconnaît les droits d’eau octroyés pendant les réformes agraires. Enfin, la Commission nationale d’irrigation (CNI) est chargée de l’application de la loi sur l’irrigation. Elle finance des ouvrages hydrauliques de petite et moyenne envergure dans l’ensemble du pays.
Figure 2. – Architecture institutionnelle chilienne de l’eau, 2018.
49Ensuite, le ministère de l’Environnement (ME) régule la qualité de l’eau. En son sein, la Direction du service d’évaluation environnementale (DSEE) évalue les répercussions environnementales des grands travaux ou des projets extractifs et mesure les compensations effectuées par les entreprises polluantes. Au sein du ministère de l’Intérieur et de Sécurité publique, le Bureau national des urgences (ONEMI) planifie et gère les ressources publiques et privées pour garantir, par le biais de camions-citernes, un accès à l’eau en cas d’urgence. En vertu de l’application du Code de l’eau de 1981, le président de la République, et à défaut, un de ses représentants directs, c’est-à-dire les préfets (intendentes) de région, décrète des états de pénurie d’eau. Les juges de la juridiction civile ont également le pouvoir de reconnaître la concession de droits d’eau en cas de litige ou en cas d’usages coutumiers, comme je le montrerai dans le chapitre iii.
50À l’échelon international, la Banque mondiale (BM) et la Banque interaméricaine de développement (BID) ont octroyé des prêts pour mettre en place des programmes de développement liés à l’agriculture ou à la gestion de l’eau. Ils ont principalement été gérés et mis en place par le MTP.
51Plusieurs organisations non gouvernementales jouent un rôle majeur dans le domaine de l’eau. La Fédération nationale d’eau potable rurale du Chili (FENAPRU) représente les intérêts des comités ruraux d’eau potable à l’échelle nationale, notamment lors de l’élaboration de la loi sur l’eau potable rurale. Le bureau de la Fondation Avina au Chili a également participé activement à l’élaboration de cette loi. Les représentants chiliens de l’AIDIS – Chili défendent les intérêts des industries impliquées dans les services urbains d’eau potable et d’assainissement. Pour finir, en matière de gestion des ressources en eau, la Confédération nationale des canaux du Chili (CONCA) constitue le principal groupe de pression dans le domaine de l’eau et de l’irrigation. La Société nationale d’agriculture, fondée en 1838, constitue celui du secteur agricole du pays.
52L’ensemble des institutions publiques mentionnées ci-dessus disposent d’organes déconcentrés. Les ministères sont représentés par leur secrétaire régional ministériel de Coquimbo, comme le Seremi Coquimbo du ministère des Travaux publics. Les Directions mentionnées ci-dessus constituent des Directions régionales. Par exemple, la Direction régionale des eaux est chargée de la concession des droits d’eau à l’échelle régionale. Elle dispose d’une Unité de contrôle (UC) responsable de contrôler le respect du code par les usagers. Au sein de la Direction régionale des travaux hydrauliques (DRTH) se trouve l’Unité du programme rurales d’eau potable (UPREP), chargée de l’accompagnement des comités d’eau potable de la région.
53Les organisations non gouvernementales jouent également un rôle au niveau régional. Plusieurs regroupements de comités d’eau potable défendent le secteur auprès de la Direction régionale des travaux publics comme l’Association des comités ruraux d’eau potable de la Province d’Elqui dans la région de Coquimbo. Les agriculteurs, quant à eux, se regroupent depuis 1909 au sein de la Société de l’agriculture du Nord pour défendre leurs intérêts spécifiques du fait d’être situés au nord du pays, par exemple, celui de trouver des solutions pour faire face à l’aridité.
Les usagers de l’eau
54Les usagers de l’eau constituent des acteurs centraux du système géolégal fluvial dans la mesure où ils élaborent des stratégies ou des tactiques pour s’approprier l’eau. Selon les données de la Direction générale des eaux9, l’agriculture constitue le premier usage de l’eau dans le bassin, avec 54 % des droits d’eau. Les sources proviennent pour moitié des eaux de surface et de celles souterraines. Dans le secteur agricole, je fais la distinction entre les entreprises agricoles et les personnes physiques qui disposent de plus de 10 litres par seconde, et les petits usagers, à savoir des personnes physiques qui détiennent au maximum 10 litres par seconde. En 2017, la première catégorie représente 95 % des usagers agricoles. La demande en eau du secteur agricole est majoritaire dans les communes de l’amont, à Vicuña (78 %) et à Paihuano (86 %), où les ressources abondent. La demande dans la commune de Coquimbo s’explique par le périmètre irrigué de Pan de Azúcar, avec les transferts d’eau par le canal de Bellavista (59 %) et l’exploitation des nappes souterraines (88 %). Les petits usagers des eaux de surface, souvent de petits agriculteurs ou paysans, sont plus nombreux, en valeur absolue, dans les communes de Vicuña (153) et de Paihuano (618).
55La demande en eau du secteur agricole varie également en fonction de la localisation des agriculteurs dans le bassin (amont/aval) et selon les saisons. D’une manière générale la demande agricole s’accroît pendant l’été, c’est-à-dire entre les mois d’octobre et de janvier. Le secteur en aval connaît une plus forte demande en eau et s’étend sur une plus longue période. Cela s’explique par la production de cultures maraichères de rotation, contrairement à la monoculture de vigne de l’amont.
56Concentrant 21 % des droits d’eau totaux, le secteur industriel constitue le second usager de l’eau. Il regroupe tout type d’entreprises du secteur secondaire ou tertiaire. Cette demande se situe principalement dans la commune de La Serena (23 %) et repose sur l’utilisation d’eaux de surface. Ces entreprises sont souvent afférentes au secteur agricole et minier puisqu’elles sont liées aux activités de manutention et d’exportation.
57Les mines se situent en troisième position avec 10 % des droits d’eau totaux. Les eaux proviennent principalement des nappes souterraines. La demande se concentre principalement dans les communes de La Serena (25 %) et de Coquimbo (11 %). Néanmoins, il n’est pas possible de mesurer l’usage réel des mines puisqu’elles bénéficient du droit d’utiliser les eaux situées sur leur concession d’exploitation, comme je le développerai dans le chapitre iii. Cette possibilité, et leurs achats d’eau expliquent l’absence de droits d’eau dans la commune d’Andacollo qui constitue pourtant le principal site minier.
58Le secteur domestique concentre 9 % des droits et se situe en quatrième position dans la possession de droits d’eau totaux. Les captages de l’eau souterraine sont concentrés dans les communes de La Serena (30 %) et de Coquimbo (7 %), ce qui s’explique facilement par la forte concentration de population dans la conurbation. En 2017, l’opérateur privé Aguas del Valle a produit 42 839 000 m3 d’eau potable. Ses réseaux fournissent l’eau à 225 543 habitants dont 217 063 disposent d’un accès à l’assainissement10. L’opérateur possède 2 906 litres par seconde d’eau souterraine et 918 litres par seconde d’eau de surface11. La surface de la concession de l’opérateur correspond aux espaces urbanisés : elle s’étend du secteur de la Compañia au nord de La Serena, jusqu’à la ville de Coquimbo au sud, et du secteur de la Antena à l’ouest jusqu’au front de mer à l’ouest. Extraite par des captages sur le fleuve Elqui à Las Rojas et des forages, une partie de la distribution de l’eau potable se fait sous forme gravitaire puisque la ville a été construite sur des terrasses marines. Les eaux usées sont déversées dans la baie par deux émissaires sous-marins.
59En milieu rural, où il n’existe pas de plan de régulation de l’usage du sol, des comités d’eau potable sont chargés du service de distribution de l’eau et, très rarement, de son traitement12. L’État finance les ouvrages majeurs et leur maintenance est réalisée à l’aide du paiement du prix de l’eau13. Les comités et coopératives ruraux d’eau potable, quant à eux, ont produit 372 808 m3 en 2016 garantissant un accès à l’eau à 42 059 habitants14. Ces opérateurs disposent principalement de captages d’eaux souterraines.
Les organisations des usagers de l’eau
60Les organisations des usagers de l’eau constituent les acteurs centraux du système géolégal fluvial en ce qu’elles organisent quotidiennement le partage et la distribution de l’eau du fleuve Elqui et de ses affluents. En ce sens, la spécificité du système géolégal fluvial réside en un réseau dense de canaux d’irrigation pour arroser les terres. Ces ouvrages hydrauliques caractérisent les paysages du nord du Chili où l’agriculture repose uniquement sur ces systèmes d’irrigation collectifs, contrairement aux régions méridionales où l’eau de pluie abonde.
61Au Chili, les organisations des usagers de l’eau chargées du partage de la ressource entre ses membres datent de la fin du xviie siècle (Baeza, 2019). Ces organisations sont constituées par un ensemble d’irrigants qui utilisent collectivement un canal. Ces derniers instaurent des règles pour mettre en place des tours d’eau et l’entretien15 des canaux. Depuis la période coloniale, on fait une distinction entre l’assignation de la ressource en eau, réalisée par la Gobernación16 puis par l’État, et la gestion de sa distribution réalisée par les propres usagers (Martin, 2013). Alors que dans les pays de tradition juridique continentale, l’administration des ressources possède une structure nationale fortement hiérarchisée et centralisée qui repose sur la défense de l’eau comme un bien public, au Chili les principales attributions en matière de distribution et de gestion de l’eau reposent sur les usagers et non sur l’administration (Calderón, 2014).
62Les années 1960 ont vu se multiplier en milieu rural les organisations des usagers de l’eau. Ces dernières accomplissent différentes fonctions et leurs compétences sont consacrées dans le Code de l’eau et par la législation en vigueur. Le Code de 1981 reconnaît ainsi les organisations des usagers de l’eau :
« Deux personnes ou plus qui ont des droits d’eau sur un même canal, un même réservoir ou utilisent les eaux du même aquifère pourront formaliser la communauté qui résulte de ce fait et devenir une association de canaux ou tout type de société afin de capter les eaux qui s’écoulent, se les répartir entre les détenteurs de droits, construire, exploiter, conserver et améliorer les ouvrages de captage, les aqueducs et autres ouvrages nécessaires à leur utilisation. Dans le cas des cours naturels, ils pourront s’organiser en tant que conseil de surveillance » (article 186, livre II, titre iii du Code de l’eau).
63Ces organisations existaient bien avant la création du premier Code de l’eau en 195117. En effet, la loi 2.139 promulguée en 1908 a défini pour la première fois un cadre juridique pour réguler les associations de canaux. Ensuite, le Code de l’eau de 1951 adopte le système de distribution collective des eaux commencé en 1908 en le perfectionnant. Il crée les conseils de surveillance chargés de la distribution et l’administration des eaux de surface à l’échelle du bassin. En 1967, un nouveau Code de l’eau octroie à l’État de nombreuses prérogatives de contrôle et de régulation, mais maintient le rôle des organisations des usagers chargées de la distribution locale des ressources (Stewart, 1970 ; Bauer, 2002). Le Code de l’eau actuellement en vigueur limite les fonctions de la Direction générale des eaux. En consacrant le principe de subsidiarité, il institue plusieurs organisations d’usagers pour la gestion des eaux aussi bien de surface que souterraines (Bauer, 2002 ; Dourojeanni et Jouravlev, 1999 ; Rojas in Guevara Gil et al., 2014). Il distingue trois types d’organisation : les conseils de surveillance, les associations de canaux, et les communautés d’eau.
64Tout d’abord, les conseils de surveillance sont formés par
« les personnes physiques ou morales et les organisations d’usagers qui utilisent de quelque manière que ce soit les eaux de surface ou les eaux souterraines du même bassin hydrographique […] ou dans une section d’un cours naturel d’eau […] et ayant pour but de gérer et de distribuer les eaux auxquelles ses membres ont droit sur les sources naturelles, d’exploiter et de conserver les ouvrages communs et d’accomplir les autres tâches déterminées par la loi » (articles 264, 265 et 266, livre II, titre iii, du Code de l’eau).
65Ils constituent, de droit, des entités chargées de la gestion de l’eau à l’échelle du bassin dont les membres se coordonnent pour distribuer l’eau (Rojas in Guevara, 2014 ; Vergara Blanco, 2014). Les conseils de surveillance sont chargés de la distribution des eaux entre les titulaires de droits d’eau. Les associations de canaux, les communautés d’eau et les communautés de drainage sont chargées du partage de l’eau entre leurs membres et de l’entretien des ouvrages hydrauliques communs. En tant qu’organisations d’usagers, elles appartiennent à un conseil de surveillance. Leur espace de compétence, autour d’un canal, est plus restreint que celui du conseil.
66Les communautés d’eau et les associations de canaux18 constituent :
« une situation de fait qui se produit lorsque deux personnes, physiques ou morales, disposent de droits d’eau sur les eaux d’un même canal ou réservoir, ou utilisent les eaux d’un même aquifère » (Vergara Blanco, 2014).
67Selon le Code de l’eau de 1981, ces organisations se constituent autour de cours d’eau non artificiels. D’autre part, il stipule que dans des aquifères déclarés en restriction par la Direction générale des eaux, une communauté d’eau peut être formée par les titulaires des droits d’appropriation sur les eaux souterraines pour gérer la pénurie. Mais ces communautés restent rares, tout comme les communautés de drainage.
68Les organisations les plus fréquentes sont les conseils de surveillance, les associations de canaux et les communautés d’eau. Selon le Code, elles reposent sur une organisation démocratique : l’assemblée générale annuelle des membres élit son directoire. Cependant, la formation de ces organisations d’usagers reste facultative. Dans l’ensemble du pays, l’on compte 4 000 organisations d’usagers de ce type. Mais ce chiffre est sous-évalué, car certaines sont informelles. Elles existent de fait, mais non de droit, et elles ne sont donc pas comptabilisées.
69Le système géolégal du fleuve Elqui compte deux conseils de surveillance, trois associations de canaux et 122 communautés d’eau. À ce titre, les rapports de pouvoir au sein de celui-ci se structurent, d’une part, depuis les représentants des institutions internationales et de l’État jusqu’aux usagers, en passant par les organisations des usagers de l’eau. Il importe de distinguer et de décrire les relations entre les différentes organisations des usagers de l’eau existantes : les conseils de surveillance, les associations de canaux et les communautés d’eau.
70Les rapports de pouvoir entre les différentes organisations des usagers de l’eau se caractérisent par des liens hiérarchiques. Les conseils édictent des règles que doivent appliquer les associations de canaux et les communautés d’eau. La contrainte s’exerce par la menace d’une sanction. De plus, chaque titulaire de droits d’eau doit verser une cotisation mensuelle aux organisations auxquelles il appartient – au minimum une communauté d’eau et le conseil de surveillance – afin de financer les coûts de distribution de l’eau et du maintien des ouvrages hydrauliques partagés. Si le conseil concentre le pouvoir, il est toutefois subordonné aux institutions gouvernementales, comme la Direction générale des eaux, chargée de la concession des droits d’eau au sein du MTP, ou la Commission nationale d’irrigation, institution interministérielle responsable de l’application de la loi sur l’irrigation.
71Ces rapports de pouvoir au sein du système géolégal forment le cycle-hydrosocial. Puisque ces organisations se coordonnent pour se partager l’eau de l’amont à l’aval du fleuve, étudier leur position permet de mettre en lumière les rapports de pouvoir autour de l’appropriation de l’eau à l’échelle du bassin versant. Une des illustrations de ces rapports est la constitution, en 1948, d’un nouveau Conseil indépendant du Conseil de surveillance du fleuve Elqui19 autour de la rivière Derecho. Cette séparation a lieu peu de temps après la construction du barrage de La Lagune (1945). Selon son président, cette séparation s’explique pour deux raisons : d’une part, le refus des habitants de rembourser à l’État cette infrastructure dont ils ne bénéficieraient pas ; de l’autre, l’existence de pratiques agropastorales instituées autour de la Communauté agricole de la rivière Derecho.
Figure 3. – Les rapports hiérarchiques entre les organisations d’usagers de l’eau du fleuve Elqui au Chili.
Une entrée par les conseils de surveillance
72Dans le système géolégal fluvial, les deux conseils de surveillance jouent un rôle majeur dans la définition des règles de partage et de distribution de l’eau. Entre 2016 et 2018, les deux conseils de la vallée sont dirigés par de grands producteurs agricoles. De fait, leur directoire se compose par les plus grands titulaires de droits du bassin. En effet, depuis l’application du Code de l’eau de 1981, lors des élections des dirigeants de toutes les organisations, le suffrage est censitaire proportionnel aux nombres de voix. Ainsi, le directoire des conseils, composé de sept membres, est élu par les principaux titulaires de droits d’eau, qui concentrent la majorité des voix. Au vu de l’économie politique du bassin, ces derniers appartiennent au secteur agricole ou minier. En fonction du profil des dirigeants élus, les prises de décision des conseils favorisent l’un des deux secteurs.
73Les deux conseils se distinguent par plusieurs aspects. Créé en 1994, le Conseil de surveillance du fleuve Elqui gère le réservoir du Puclaro et de La Lagune (figures 4 et 5).
Figure 4. – Le Conseil de surveillance du fleuve Elqui.
Figure 5. – Le Conseil de surveillance de la rivière Derecho.
74Il gère 27 232 droits d’eau et compte trois associations de canaux et cent-vingt-deux communautés d’eau. Au pied du mur du barrage se trouve une centrale hydroélectrique. Lors de mon travail de terrain, le Conseil était présidé par une agricultrice descendante d’une famille de producteurs locaux. Les membres du directoire élus sont des exploitants agricoles. Deux salariés du Conseil détiennent les postes influents de gérant et de gérant adjoint. Le Conseil est financé, en partie, par la vente de l’électricité produite par la centrale hydroélectrique dont elle est actionnaire.
75Le Conseil de surveillance de la rivière Derecho a été créé en 1948. Pendant la période de l’enquête, il est dirigé par des agriculteurs originaires de la vallée et de nouveaux habitants, salariés du secteur public ou membres de profession libérale. Plusieurs turneros, salariés de l’organisation, surveillent les tours d’eau entre les canaux et au sein des principales communautés d’eau. Le Conseil gère 3 023 droits d’eau de surface distribuées par 20 communautés d’eau. Il ne dispose pas de réservoirs, mais, aux côtés de la Communauté agricole, il contrôle l’espace de haute montagne où naissent les eaux de la rivière Derecho (figure 5).
76Une des particularités du système géolégal du fleuve Elqui est l’existence de la Communauté agricole de la rivière Derecho, particulièrement impliquée dans la gestion de l’eau dans la vallée. Au Chili, ces communautés agricoles sont propriétaires des terres non irriguées situées en haute montagne (Castro, 1997 ; Livenais et al., 2003). Leurs modes d’existence agropastoraux subissent une forte pression depuis l’exploitation des terres de secano par les entreprises agricoles à l’aide de nouvelles techniques de puisage, de pompage et d’irrigation (Gallardo Fernández, 1998). Dans celles où les règles anciennes sont encore respectées, chaque comunero, dispose du droit d’usage des terres communes. Bien que juridiquement, les communautés agricoles ne disposent pas de droits d’eau, le directoire et les membres de la Communauté agricole de la rivière Derecho sont très impliqués dans la gestion de l’eau de la vallée. En effet, le Conseil et la Communauté se confondent : les dirigeants sont quasiment les mêmes personnes et échangent leurs fonctions à chaque élection. Tous les membres du Conseil, propriétaires de terrains dans la vallée, appartiennent à la Communauté agricole. Ses 323 membres administrent collectivement 31 680 hectares de terres situées en amont de la vallée.
Conclusion
77Dans ce chapitre, j’ai présenté le cadre d’analyse et l’échelle d’observation déployée pour étudier les liens entre l’appropriation de l’eau et la production de l’espace. Ils me permettent d’appréhender les rapports de pouvoir entre tous les acteurs du processus décisionnel établi pour définir des règles institutionnelles de l’eau. À partir des principaux apports de la littérature sur les systèmes irrigués, les communs et les territoires de l’eau, je propose la notion de « système géolégal fluvial ». Cette dernière permet d’appréhender la dimension spatiale de l’appropriation de l’eau et la production de l’espace, depuis l’étude des organisations des usagers situés à l’échelle d’un bassin versant. Le système géolégal fluvial permet d’étudier les rapports à l’espace et au droit de l’eau des acteurs, dans une perspective transcalaire, et qui participent à la production de l’espace. Le système géolégal du fleuve Elqui se caractérise par un essor des activités extractives (minières, agricoles, immobilières et touristiques) dans un contexte climatique changeant.
Notes de bas de page
1 Ils fondent le groupe de recherche « WALIR » qui deviendra le réseau « Justicia Hídrica ».
2 Sources : [http://prommra.cl/elqui/], consulté le 26 mars 2022.
3 Sources : données fournies par le fonctionnaire de la Seremi des Mines de la Région de Coquimbo, La Serena, 2018.
4 Source : DGA (1990) Mapa hidrogeológico, DGA, MTP, Santiago cité dans « Hidrología de la cuenca del río Elqui », in P. J. Cepeda (éd.), 2008, Los sistemas naturales de la cuenca del rio Elqui, Ediciones Universidad de La Serena, p. 66-164.
5 Il a été modifié considérablement en 2005 (Bauer, 2015).
6 Ces principes sont remis en question par la réforme du Code de l’eau en 2022, postérieure à la rédaction de ce manuscrit.
7 Unité de compte qui est ajustée à l’inflation. En juillet 2019, une unité d’investissement est égale à 35,83 euros. La limite établie par la loi est de 1 700 000 euros.
8 [http://www.indap.gob.cl/], consulté le 7 août 2018.
9 Les données indiquent la distribution de concessions de droits sur les eaux de surface et souterraines par la Direction générale des eaux, les juges ou d’autres institutions publiques, depuis 1900 jusqu’à 2017. Les statistiques reposent donc sur des données cumulées dans le temps qui ne tiennent pas compte des transferts d’eau ayant eu lieu au cours de l’histoire comme l’acquisition de droits sur le marché. En effet, les ventes de droits d’eau impliquent parfois une modification du point de captage et de l’usage qui en sera fait. D’autre part, certains droits d’eau concédés par la DGE ne sont pas utilisés par les usagers, ce qu’on appelle les « droits de papier ».
10 Source : rapport annuel de la SISS, 2018.
11 Ibid.
12 Dans la vallée, deux comités gèrent une usine de traitement de l’eau.
13 Ces comités ont été constitués dans le cadre du Programme rural d’eau potable, créé à la suite de la signature de la Charte de la Punta del Este en 1964 dans le but de réduire la morbidité infantile. Les ouvrages plus coûteux, comme les forages et les réseaux, sont financées par la Direction des travaux hydrauliques du MTP. Je traiterai ce sujet plus en détail dans le chapitre iii.
14 Source : base de données de la Direction des travaux publics, 2017.
15 Activité annuelle d’entretien des canaux. Elle consiste à nettoyer l’intérieur des canaux et à élaguer les arbres aux alentours afin de faciliter non seulement la circulation de l’eau, mais encore le passage de la personne responsable des tours d’eau.
16 Traduction non officielle : gouvernorat. Il s’agit d’une entité administrative sous-nationale mise en place pendant la période coloniale.
17 Les travaux de recherches des archéologues et des anthropologues remontent à la période précolombienne et montrent l’antériorité des formes de coordination humaine pour la distribution et la préservation de la ressource (Yañez et Molina, 2011).
18 Depuis la modification du Code de l’eau en 2007, qui dote les associations de canaux et les communautés d’eau, de la personnalité juridique, il n’existe aucune différence entre ces deux organisations.
19 Elle s’appelait alors l’Association des canaux du fleuve Coquimbo dont la date précise de création reste inconnue. La première archive que j’ai consultée la mentionnant date de 1927.
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