Chapitre II. Une diffusion qui adopte les circuits de l’« économie des marchés »
p. 63-88
Texte intégral
1Depuis les années 1970, l’historiographie a mis au jour la diversité des pratiques d’échanges et de consommation des populations de la fin du Moyen Âge, ainsi que l’étroit maillage de marchés qui animent chaque semaine les bourgs les plus anodins1. Dépassant les limites matérialistes d’une histoire de la consommation, Massimo Montanari, puis Bruno Laurioux, ont insisté sur les dimensions sociales, culturelles et rituelles de l’acquisition de nourriture, de la cuisine et de la commensalité2. Ces orientations historiographiques ont entraîné l’abandon de l’expression anachronique « société de consommation » au profit de celle, plus nuancée, de « société des marchés ». Celle-ci ne signifie pas que la relation économique contractuelle et monétaire soit la principale relation sociale exprimée, mais que les marchés en tant qu’espaces se font les lieux privilégiés d’une vie socio-culturelle riche, où une large partie de la société médiévale se concentre, se met en scène et s’observe, par le jeu de relations sociales codifiées.
2Le pilori et sa peine associée se déploient dans le sillage de l’élaboration de ces réseaux commerciaux, tout en adoptant des circuits polarisés par les systèmes politiques établis. C’est-à-dire que ses modes de diffusion embrassent des chronologies et des formes différentes selon que le regard se porte sur l’Empire angevin, le domaine royal et ses terres environnantes, ou les principautés subalternes. Ainsi, si l’étude de la prolifération des bourgs marchands permet de dessiner un croquis assez semblable aux voies de propagation du pilori, équipement judiciaire du marché qui se transmet avec lui, il est nécessaire de prendre en compte les cultures juridiques et institutionnelles de chaque ensemble territorial pour appréhender plus finement ses modes et rythmes de transmission. Pour mener à bien cette étude, nous parcourrons les régions du royaume dans l’ordre chronologique d’apparition de l’institution : les fiefs appartenant à l’espace Plantagenêt du xiiie siècle d’abord ; la Champagne, le Parisis et la Bourgogne ensuite ; les territoires périphériques, mal intégrés au commerce international, qui n’adoptent le pilori qu’au xive siècle, enfin. Bon an mal an, le pilori devient un objet juridique commun à toute la France et ses territoires limitrophes au xve siècle.
De l’Empire Plantagenêt aux bourgs marchands du Midi
3La lente progression du pilori dans les pays de langue d’oc nous est connue précisément grâce aux nombreuses chartes de coutumes conservées pour cette région. Leur mise en série permet de distinguer les innovations locales des transferts culturels hérités de la tradition coutumière septentrionale. Les juges méridionaux s’efforcent en effet de réinterpréter, adapter, distordre l’objet juridique que le pouvoir Plantagenêt leur transmet, afin de le faire correspondre à leur propre conception des usages des peines infamantes. Nous verrons ainsi qu’après une période de simple reprise des dispositions des Établissements de Rouen, les coutumes du Midi se saisissent du pilori pour le faire dialoguer avec des institutions locales telles que la course infamante ou le « pal ». L’invention d’usages originaux du pilori au xive siècle prouve la parfaite appropriation par les justices méridionales de cette institution empruntée.
L’importation du pilori dans le Sud-Ouest par l’entremise de l’Empire Plantagenêt
4Le mouvement d’autonomisation urbaine gagne le duché d’Aquitaine durant la première moitié du xiie siècle. Au terme de décennies de maturation politique, la duchesse Aliénor et son mari le roi d’Angleterre Henri II répondent aux revendications des villes du comté de Poitou en leur octroyant des chartes de privilèges comparables à celles du nord du royaume. C’est ainsi qu’en 1199, les habitants de Poitiers reçoivent de leur duchesse une charte confirmant des libertés dont ils semblent jouir depuis quelques années déjà3. Après la conquête de la ville par Philippe Auguste en 1204, le roi de France s’empresse de confirmer la charte d’Aliénor. Aucun de ces deux actes ne révèle explicitement la teneur des statuts municipaux, ou la matrice dont ils s’inspirent. Pourtant, en même temps que Philippe Auguste confirme les droits des habitants de Poitiers, il leur fournit, à leur demande, une copie des Établissements de Rouen. En fait, tout comme La Rochelle reçoit ces statuts normands en 11994, Poitiers les appliquait probablement dès la première charte d’Aliénor, si ce n’est auparavant. Cette impression est renforcée par la propension des Plantagenêts à distribuer les Établissements de Rouen à toutes les grandes villes de leur Empire. Après l’avoir donnée aux principales places normandes, ils l’offrent, pour la seule année 1199, à Saintes, La Rochelle et, donc, Poitiers. Après 1204, Jean sans Terre poursuit l’œuvre législative de ses parents en accordant les Établissements à Niort, Saint-Jean-d’Angély, Angoulême, Oléron, Cognac, Bayonne, entre autres5. Les habitants de Bordeaux sont les seuls à refuser d’adopter in extenso la législation étrangère ; ils se contentent d’intégrer dix articles de Rouen à leurs coutumes locales, produisant ainsi un texte métis et singulier6.
5La peine du pilori apparaît dans trois articles de la version normande des Établissements7. L’article 10 la promet aux larrons et faussaires capturés dans Rouen. Les articles 15 et 36 fixent pour leur part des limites à l’infamie produite par le châtiment en rendant illégal de rappeler publiquement qu’une personne a été mise au pilori. Ils sont tous les trois conservés dans la version abrégée en 28 articles des statuts, rédigée par la Chancellerie après la conquête du duché de Normandie. Parallèlement, on les retrouve dans les copies conservées aux archives de Niort, Poitiers, Bayonne et Oléron8. Bordeaux est à nouveau la seule qui ne reprend pas les trois articles dans leur intégralité. Elle remplace le 10 par une coutume de son cru, conserve le 15 en le remaniant légèrement et abandonne le 36, certainement parce qu’il était redondant avec le précédent9. En fin de compte, ce sont toutes les chartes du Sud-Ouest influencées par la matrice rouennaise qui maintiennent le terme pilori. C’est ainsi par la volonté des princes Plantagenêts d’uniformiser les coutumes urbaines de leur Empire que le pilori entre, presque par effraction, dans l’espace méridional.
6Comme dans le cas des copies de la charte d’Abbeville, il est délicat de déterminer si les villes de Saintonge, du Poitou puis du Midi ont réellement pratiqué l’exposition infamante dès la période 1199-1215, ou si elles n’ont fait qu’hériter d’articles étrangers inapplicables, car évoquant une peine inconnue. Alors que l’état de la documentation incitait à défendre la première hypothèse pour la région du Ponthieu, les villes méridionales des années 1200 semblent plutôt correspondre à la seconde catégorie. La charte de Bayonne de 1215 paraît à cet égard suspecte. Elle nous a été transmise sous la forme d’une traduction provençale insérée dans un cartulaire de 133610. L’acte se présente comme une reprise littérale des Établissements de Rouen. On y retrouve les articles 10, 15 et 36, assez fidèlement retranscrits, sauf lorsque le copiste en vient à traduire pillorico, terme sur lequel il bute. Aussi propose-t-il, selon les passages, une transcription oscillant entre pidloric et pitloric.
7Tout dans ces termes renvoie à une difficulté de traduction. L’erreur de lecture du double l de pillorico entraîne une hésitation entre -dl et -tl, tandis que la terminaison -ico est étrangement rendue par un -ic. C’est par ailleurs un hapax : aucun autre texte, de quelque nature ou période que ce soit, ne reprend ces formes. Aussi doit-on en conclure que le traducteur de Bayonne a été mis face à un mot inconnu et qu’il s’est efforcé de le rendre littéralement. Il est impossible de dire qui, du traducteur de la charte ou du copiste qui l’a insérée dans le cartulaire de 1336, est l’inventeur de cet hapax. Néanmoins, si on peut attribuer l’unique pidloric à une erreur de copiste, il serait étonnant que la lettre de la charte n’ait pas été respectée pour les quatre autres pitloric qui parsèment le texte. Aussi peut-on croire que la traduction provençale, réalisée à une date indéterminée entre 1215 et 1336, avait bien employé un calque aveugle au sens du mot.
8Plusieurs propositions peuvent être extrapolées à partir du cas de Bayonne. Tout d’abord, le concept de pilori s’implante dans le Sud-Ouest moins sous l’effet d’une transmission empirique qui se serait nouée par les contacts commerciaux entre hanses du Nord et pourtour aquitain qu’au détour d’un don de charte par un pouvoir surplombant. En ce début de xiiie siècle, le mot qui désigne la peine infamante est encore mal connu, voire incompris. Sans l’interface politique créée entre la Normandie et le Sud-Ouest par l’Empire Plantagenêt, le pilori aurait sûrement mis plus de temps à atteindre ces contrées, et encore davantage pour y devenir une peine usuellement pratiquée. L’hypothèse que le pilori a été artificiellement transplanté dans le milieu méridional est renforcée par le constat de sa redondance avec la course, peine infamante locale. L’hégémonie de cette dernière dans le droit méridional limite l’adhésion des législateurs au pilori et continue de le concurrencer pendant plus d’un siècle après la transmission des statuts rouennais.
Concurrences et complémentarités avec la course infamante (xiiie siècle)
9Comme l’a noté Jean-Marie Carbasse, la course est une peine endogène au Midi médiéval, connue dans toutes ses parties au xiie siècle et dont l’usage principal est d’humilier publiquement les amants adultères11. Il a été moins relevé que, par analogie, elle devient au xiiie siècle une peine des crimes de déloyauté en général. Ainsi, ses emplois contre le menu larcin se multiplient à partir de 125012. On comprend mieux pourquoi les coutumes de Bordeaux évoquent la course en ces termes : « ssy a corrut la villa am fempna o am autra maneura13 ». Si la relation sexuelle illicite est le moyen le plus banal de se retrouver à courir la ville, il existe d’« autres manières », c’est-à-dire d’autres raisons, de se voir infliger cette peine infamante. Ce faisant, le panel des délits châtiés par la course recouvre en partie les usages originels de l’exposition. Parallèlement à cette évolution propre à la course infamante, la peine du pilori s’autonomise du cadre des Établissements de Rouen, selon un processus d’assimilation avec sa sœur méridionale. Dans neuf coutumes du Midi datées de 1254 à 1337, l’exposition ne se rencontre en effet pas seule, mais est présentée comme une alternative à la course, ou un de ses prolongements. Ce corpus est lui-même divisible en trois traditions, classées selon la relation juridique qu’entretiennent les deux rituels.
10Dans quatre coutumes, les deux peines se substituent l’une à l’autre sans que leurs rôles soient différenciés. À Lafox (1254), le larron « aura panat correra la villa o estara a l’espingoli14 ». À Monségur (1305), les « malafeitas » qui ne paient pas leur amende doivent « corre la vila o que sia metut o metuda en l’espillori15 ». À Pujols en Agenais (début du xive siècle), le larron qui « lo gatge pagar no podia, correiria la ville, o poiaria en l’espilori16 ». Enfin, à Agen, le fait « de corre vila o de puiar en l’espilori » est une preuve d’infamie qui déchoit du droit d’être élu consul17. Dans tous ces cas, l’alternative ouverte par la conjonction o (ou) ne hiérarchise pas les deux peines. Le justicier est laissé libre de choisir le rituel infamant qui lui paraît le plus approprié. Mais malgré l’apparente équivalence, il reste que la course est systématiquement citée avant l’exposition, ce qui donne l’impression qu’elle a la faveur des législateurs. La primauté de la course est confirmée par une copie enluminée des coutumes d’Agen, réalisée au milieu du xiiie siècle. Son « de corre vila » est accompagné d’une enluminure représentant le rituel de la course, tandis que la mention « o de puiar en espilori » a été rajoutée en marge, comme si elle avait été oubliée par le copiste et n’était qu’une clause de piètre importance18.
11Le caractère auxiliaire, presque subordonné, de l’exposition par rapport à la course est plus évident dans la deuxième tradition documentaire identifiée. Les coutumes de Clermont-Dessus (1262) et de Tonneins-Dessous (1301) réservent à la course le statut de peine principale, tandis que le pilori n’y est qu’une peine de substitution, activée en cas d’amende impayée19. Les coutumes de Puymirol en Agenais (1286) et de Nomdieu en Brulhois20 (1305) présentent un mécanisme analogue, quoique légèrement différent. À la place d’imposer une amende, puis d’envoyer au pilori ceux qui ne s’en acquittent pas, ces documents menacent d’exposition, puis permettent au condamné de racheter la peine par une amende. Ainsi à Puymirol, les adultères « correran la vila tuhg nud, liat d’una corda e poi aran en l’espillori o s’acordaran del tot ab nostre baile, razonablament21 ». À vrai dire, toutes ces clauses reviennent au même d’un point de vue pratique. Dans toutes ces villes, il est théoriquement impossible d’échapper à la course, alors que l’exposition ne vient que dans un second temps et est monnayable. Ainsi, la peine exogène du pilori ne supplante pas immédiatement sa sœur indigène et paraît même avoir eu du mal à se constituer une place stable à ses côtés.
12Ce n’est qu’à partir du xive siècle qu’un troisième groupe de coutumes méridionales érige l’exposition en peine principale, à l’égal de la course. La confirmation par Philippe VI des coutumes de Bergerac en juin 1337 est l’une des plus anciennes sources à révéler cette consolidation juridique. Son article 92 fixe l’échelle pénale requise contre les voleurs : celui qui a dérobé un objet d’une valeur de 20 sous ou plus perd le poing ; entre 10 et 20 sous, il doit « courir la ville et être mis au pilori et être banni, mais sans être flétri » ; en dessous de 10 sous, le voleur « court la ville et est mis au pilori22 ». Peut-être l’influence du pouvoir royal a-t-elle donné l’impulsion finale qui a permis à l’exposition d’être promue au statut de peine principale dans le Midi. Mais que ce processus ait été le fruit d’une récupération locale ou d’une opinion extérieure qui aurait remanié la coutume à l’occasion de sa confirmation, force est de constater qu’il n’est pas antérieur au xive siècle.
13Pourquoi le greffon juridique du pilori prend-il plus de cent ans à être reconnu comme une peine à part entière par la tradition juridique méridionale ? On la voit en fait entretenir un dialogue culturel assez complexe, fait d’emprunts et de ruptures, avec la course infamante. Du point de vue fonctionnel, cette dernière est la copie conforme du pilori et lui fait donc concurrence. Jouissant d’une antériorité qui en fait la peine infamante de référence, elle conserve pendant tout le xiiie siècle l’adhésion des législateurs qui ne voient pas l’intérêt de la remplacer par un rituel équivalent mais plus onéreux. Nonobstant la réticence larvée des justiciers, le pilori finit par s’infiltrer dans tous les bourgs du Midi. Vers 1300, toutes les villes de l’ouest du Midi, de Bayonne à Agen en passant par les petits bourgs castraux comme Puymirol, semblent connaître cette peine nouvelle, même si c’est pour la reléguer à une place subalterne.
14L’implantation du pilori dans l’espace méridional n’est pas sans conséquence sur le devenir de la course. Il n’est pas anodin que les coutumes de Clermont-Dessus et de Goudourville notent que le larron condamné à la course portera l’objet de son délit autour du cou23, motif rituel directement emprunté à l’exposition. La tradition méridionale aurait plutôt voulu que le criminel ait une corde nouée autour du sexe, souvenir de l’usage premier de la course contre l’adultère. Le transfert d’une pratique propre à l’exposition soulève une question plus profonde : l’emploi, à partir du xiiie siècle, de la course pour sanctionner les larrons n’est-il pas tout autant un emprunt à l’exposition, dont c’est l’un des principaux rôles ? De même, les coutumes qui évoquent la peine du pilori aux côtés de la course pour punir les adultères peuvent être lues comme une assimilation fonctionnelle en sens inverse. La course distord l’exposition en même temps que celle-ci déteint sur elle. Si on adhère à ces hypothèses, alors il faut accepter l’idée selon laquelle les deux peines ne se contentent pas de se concurrencer et de s’entraver mutuellement, mais se complètent, entretiennent des échanges, forment un continuum plastique. Au lieu de les appréhender comme des silos étanches ou des « peines séparées », il serait plus heuristique de les aborder comme des objets dialectiques qui s’influencent d’autant plus facilement qu’ils sont relativement semblables.
Rencontre et fusion avec le « pal », monument local d’accaparation territoriale
15Les relations ambivalentes que l’exposition entretient avec la course ne suffisent pas à expliquer son extension, lente mais durable, toujours plus avant vers l’est du Midi. Une seconde hybridation institutionnelle joue le rôle de catalyseur de la propagation du pilori. À partir du xiie siècle, un rituel d’appropriation du territoire se développe chez les seigneurs méridionaux fondateurs de bourgs. D’après Mireille Mousnier, « le seigneur qui souhaite établir de manière officielle une nouvelle agglomération plante son pal et voici à nouveau l’axe du monde qui fait émerger le centre de la nouvelle communauté-agglomération24 ». Le pal est un haut poteau de bois qui symbolise le futur centre du village ainsi que l’autorité de son fondateur-protecteur sur les habitants. Son érection est le tout premier acte de fondation, avant même que le plan du bourg soit dessiné.
16Le xiiie siècle est peut-être la période la plus intense de dissémination des pals. Après le traité de Meaux-Paris de 1229 mettant fin à la croisade des Albigeois, le pouvoir royal se lance dans un mouvement de création de bastides méridionales qui reprend les codes locaux de fondation de bourgs castraux. C’est ainsi qu’en 1280 le sénéchal de Toulouse Eustache de Beaumarchais « plante le pal en signe de construction » de Pampelonne25. Ce sont cependant des sources étrangères au pouvoir royal, notamment des requêtes de consulats lésés par la fondation de nouvelles bastides, qui donnent aux nombreux poteaux du sénéchal le nom de « pal ». Eustache de Beaumarchais se conformait-il vraiment aux coutumes locales, ou pensait-il plutôt planter des piloris, comme le font à la même époque les seigneurs septentrionaux dont cet homme du Parisis partage la culture ? Les acteurs du Midi, eux, ont spontanément associé ce rituel de fondation à celui qu’ils connaissaient déjà.
17La confusion n’est pas étonnante, puisque les ressemblances entre le pilori et le pal sont flagrantes. Tous deux sont des poteaux de bois qui incarnent le pouvoir et les droits du seigneur sur l’espace qu’il a fondé – le premier, sur le marché ; le second, sur le bourg dans son entièreté. Plus encore, planter son poteau sur les terres d’un concurrent pour rogner sur sa juridiction est une arme employée au sud comme au nord. Du fait de ces similitudes, les deux institutions tendent à fusionner en une seule réalité. Les statuts de Pamiers, rénovés en 1420, imposent par exemple aux blasphémateurs d’« estar al pal ala plassa del Mercadal dus jorns del mercat26 ». Les « pals » cités par les documents du xve siècle ne peuvent ainsi plus être distingués des piloris.
18Comme aucune étude n’a encore été consacrée au pal méridional, les travaux manquent pour déterminer tous les tenants et aboutissants de sa rencontre avec le pilori. Plusieurs hypothèses restent ouvertes : le pal a-t-il, du fait de son antériorité, absorbé le rituel d’exposition ? Certains pals ont-ils été finalement renommés « piloris » par les populations locales ? En adoptant un nouveau nom, le même édifice a-t-il changé de sens ? S’il n’est pas possible de trancher ces questions, il nous paraît néanmoins probable que les deux institutions sont devenues si proches qu’elles ont atteint, au xve siècle, le stade de la fusion conceptuelle. Il est également probable que la présence du pal a facilité la propagation du pilori, par confusions et analogies. Les agents méridionaux accueillent alors la nouveauté comme si elle était une tradition déjà connue dont on aurait enrichi les usages.
19De fait, à partir du milieu du xive siècle, les législateurs méridionaux assignent au pilori des usages pénaux novateurs. À Marmande, l’exposition permet de défendre le droit exclusif de la porcherie communale (porquey cumenal) à parquer les cochons des habitants27. Les statuts accordés en 1380 à Saint-Sever la prévoient pour les pipeurs de dés28. Bordeaux pourrait enfin passer pour la capitale de l’innovation juridique. Ses coutumes réécrites au xive siècle promettent le pilori aux joueurs de cartes et aux bagarreurs qui blessent autrui jusqu’au sang29. Elles comportent également un article proche des coutumes d’Agen qui interdit à toute personne condamnée au pilori de briguer un office municipal30. Ces innovations sont la preuve d’une acculturation réussie de la peine du pilori, désormais suffisamment banale pour que les justiciers la réinterprètent.
20Il a ainsi fallu entre cent et cent cinquante ans pour que le pilori et l’exposition infamante s’ancrent réellement dans l’environnement judiciaire méridional. C’est grâce à ses interactions et sa proximité avec des institutions indigènes, la course et le pal, qu’il a pu être absorbé. Même si la greffe juridique est un succès, ses rythmes et modes de diffusion paraissent laborieux, lents et faits de tâtonnements, d’expérimentations ou de contingences. En regard, la progression de la peine du pilori dans l’autre grande région du commerce interrégional, qui s’étend de la Champagne au Berry en passant par la Brie et le Parisis, s’avère être plus précoce, directe et efficace.
La percée organique de l’institution dans la France centrale
21Alors que les piloris du Midi sont transplantés par un pouvoir princier, ceux du centre et de l’est de la France se développent par mimétisme anthropologique avec les pratiques des villes drapantes du Nord. Les aristocraties de tous ces espaces entretiennent en effet des liens étroits, par les circuits des foires pour les oligarchies marchandes, par le développement des sociabilités curiales pour la haute noblesse31. Comme en Flandre, c’est l’interaction entre ces deux élites sociales, tantôt alliées, tantôt concurrentes, qui impulse le développement du signe de justice. Mais alors qu’au Nord les bourgeoisies parviennent à revendiquer l’usage, voire la propriété, du pilori érigé dans leur ville, celles de Champagne et du domaine royal peinent à s’imposer face à des pouvoirs seigneuriaux jaloux de leurs prérogatives judiciaires. Si ces régions adoptent au xiiie siècle le pilori sans difficulté, leur particularité réside dans son maintien sous l’emprise directe des princes. La possession princière des piloris rend problématique la datation de leur entrée dans la France centrale, parce qu’elle implique que les chartes communales ne les mentionnent pas, à une époque où on les sait pourtant présents dans la région.
Sur les routes des foires de Champagne
22L’invisibilisation des piloris les plus anciens par la documentation est particulièrement patente dans le comté de Champagne. Territoire des foires les plus actives du royaume aux xiie et xiiie siècles, la Champagne voit émerger des élites marchandes tout aussi puissantes et anciennes qu’en Flandre. Mais alors que les bourgeoisies du Nord négocient des chartes communales, celles de Provins ou de Troyes préfèrent capter les offices comtaux à leur profit32. Devenus les principaux bénéficiaires des institutions seigneuriales, les bourgeois champenois n’ont aucune raison de souhaiter leur dissolution ou leur remplacement par des échevinages, sinon pour obtenir le privilège d’élire des représentants, qui leur manquent encore33. C’est pourquoi les principales villes du comté, à l’exception de Meaux, ne se dotent de chartes communales que tardivement34. Quand Thibaud IV leur octroie enfin des chartes en 1230, un détail de taille les distingue de celles du Nord. Même si « li forfait des homes et des fames de la communeté de Troies et de toz cez qui sont ou seront estagier en la jostise de la communeté de Troies sont as borjois de Troies », le comte « retaig lo murtre et lo rat et lo larrecin35 ». Thibaud IV avait émis la même limite lors de la confirmation de la charte de Meaux en 1222. Alors que la commune y existe depuis presque un demi-siècle – la première charte date de 1179 –, le comte n’y abandonne pas pour autant son monopole sur les quatre cas majeurs de justice : « De la joustice et dou forfait qui est estably de larrecin de murtre de rapt de arsion il sera en mon jugement et en ma ordonnance et cil qui ces forfaitz feroit seroit bailliez a mon prevost36. »
23En conservant pour lui le jugement des larrons, le comte se réserve aussi l’emploi des outils judiciaires nécessaires à leur répression, dont les fourches patibulaires et le pilori font partie. Il n’y a alors aucune chance de voir la peine du pilori citée dans ces chartes communales, même si elle existe, puisque les échevins n’en ont pas l’usage. L’hypothèse d’une invisibilisation de l’institution est entièrement validée pour Meaux, à la faveur d’un conflit qui oppose l’évêque de la ville à Thibaud IV. Vers 1220, le comte fonde un nouveau marché, en rive gauche de la Marne, pour en faire la vitrine de son pouvoir et concurrencer la nouvelle cathédrale gothique, symbole, encore inachevé, de la puissance épiscopale. Thibaud fait creuser des fossés, fortifie l’enceinte de la place et parachève son œuvre en y plantant un pilori frappé de ses armes. Les détails de ce conflit sont révélés à l’occasion de son règlement en 1227 par une charte d’arbitrage37. Incidemment, il s’agit du plus ancien document connu à évoquer l’érection d’un pilori dans le comté de Champagne. Cette charte montre également que, tout comme le comte garde la justice de sang, il se réserve le monopole de l’usage de ce signe de justice.
24Le comte de Champagne possédait-il, au milieu du xiiie siècle, d’autres piloris, par exemple à Troyes, Provins ou Châlons ? On peut a minima penser, à partir d’un filet de mentions éparses, que l’institution était très répandue vers 1300. Le cartulaire de la ville de Provins, composé dans les années 1330 pour défendre les droits de la commune, relate un conflit de juridiction qui a opposé les échevins au pouvoir comtal en 128338. Jean Raimond, prévôt du comte, avait fait abattre l’échelle élevée sur la place de l’Hôtel-Dieu qui représentait les droits de l’échevinage. Un micro-événement qui nous offre, en creux, une information capitale. À cette époque, assigner une symbolique juridictionnelle à une échelle est en effet la marque d’un pouvoir haut justicier infériorisé et privé de l’usage du pilori local. On peut en déduire qu’il existe à Provins un pilori détenu par un pouvoir comtal si jaloux de ce privilège qu’il va jusqu’à contester à la commune d’élever une échelle, forme pourtant avilie du signe de justice.
25À partir de 1284, l’entrée du comté dans l’orbite royale rend les recoupements plus aisés. Les comptes de la terre de Champagne pour l’année 1340-1341 nous apprennent que des réparations ont été effectuées cette année-là « ou pillory devant la halle » d’Ervy-le-Châtel, à celui de Meaux et « en l’eschiele de la ville et es lou de Saint Mart » (Saint-Mard-en-Othe)39. D’autres sources des années 1340 permettent de confirmer qu’Épernay, Troyes, Wassy, Boudet et Fismes employaient ordinairement la peine du pilori40. Au milieu du xive siècle, la peine infamante est donc connue dans au moins neuf villes du comté, grandes et petites. On peut extrapoler, à partir de cet échantillon, que l’exposition fait partie de l’arsenal ordinaire de tout haut justicier champenois du premier xive siècle.
26L’hypothèse qui se dégage de ce corpus est que le pilori est entré précocement en Champagne, au plus tard entre 1200 et 1230. Il était alors probablement connu dans les principales villes foraines. Mais, parce que le comte garde la main sur la protection des marchés et sur la justice de sang, l’institution pénale est longtemps restée en son pouvoir. Il jouit encore de cette exclusivité vers 1300, que ce soit à Provins ou à Meaux, ce qui fait de la Brie-Champagne une des rares régions, avec le Parisis, où les piloris ne passent pas sous contrôle municipal.
L’acclimatation au domaine royal, un transfert d’origine monarchique ?
27Déplaçons le regard vers l’ouest pour aller à la rencontre des piloris du domaine royal, qui se développent concomitamment à ceux de Champagne. Le pouvoir capétien entre au plus tard en contact avec l’institution lors des conquêtes normandes de Philippe Auguste. En 1204, le monarque profite de la prise de Rouen pour faire rédiger une leçon en 28 articles des coutumes de la ville41. L’institution est encore mal connue de la Chancellerie, puisqu’on la voit coller au terme normand pilloricum au lieu d’employer la forme parisienne pillorium, attestée quelques années plus tard. Cela étant, ce n’est pas parce que le législateur royal rencontre l’institution qu’on peut en déduire qu’il l’a immédiatement transplantée dans ses seigneuries du Parisis. Le pilori aurait pu passer pour un particularisme normand qui n’avait pas vocation à s’étendre au-delà du duché. De fait, comme le roi ne délègue pas sa haute justice à des communes au sein de son domaine, ce n’est qu’en consultant des sources de la pratique qu’on peut espérer dater l’entrée du pilori dans le bassin parisien. La tâche est rendue ardue par les destructions répétées des archives royales. L’habitude administrative de centraliser les anciens registres des baillis à Paris les a rendus vulnérables aux incendies qui ont ravagé le Palais en 1618 et 1776. Ne restent en conséquence que des bribes de la pratique judiciaire dans le domaine royal, soit issues des institutions centrales, soit dispersées dans les archives départementales.
28Un document permet tout de même d’avancer la date de l’adoption du pilori dans le Parisis aux années 1230, à tout le moins. En 1236, un procès oppose Saint Louis à Gui IV de Mauvoisin, seigneur de Rosny, à propos des droits de justice de la banlieue de Mantes. Pour départager les parties, une enquête est confiée à Pierre de Roucy et à Jean de Vignes, dont l’objet est de rassembler des souvenirs d’exploits de justice pratiqués par les officiers des deux juridictions42. Ce faisant, on apprend qu’un habitant de Mantes a vu, il y a plusieurs années, un criminel être mis au pilori détenu par le roi sur la place de la ville. Cette source est assez précoce, car il faut attendre les années 1260-1270 pour s’assurer que des piloris sont bien dressés dans les autres villes franciliennes, y compris Paris. Du fait des lacunes de la documentation, deux hypothèses s’affrontent. Soit Mantes a effectivement été une des premières villes du domaine à jouir d’un pilori, peut-être à cause de ses liens commerciaux et culturels étroits avec Rouen43, soit nous sommes en présence d’un effet de sources qui induit une chronologie factice.
29La seconde possibilité semble être la plus pertinente au vu des premiers textes évoquant le grand pilori de Paris. Étrangement, le monument des Halles est révélé par une preuve indirecte et tardive. D’après le Registre des droits de justice de l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés, le prévôt de Paris Renaud Barbou est venu en janvier 1273 pour voir si le pilori nouvellement dressé par l’abbaye « estoit assis en la terre le Roi44 ». Ce qui est en jeu derrière la visite du prévôt, c’est le respect du droit exclusif du roi à détenir un pilori dans la ville de Paris, ainsi qu’un désir plus général que son signe de justice ne soit pas symboliquement concurrencé. Il serait donc absurde de penser que Saint-Germain-des-Prés se serait doté d’un pilori avant la capitale du royaume. Jean Favier ne s’y trompe d’ailleurs pas en proposant de dater la fondation du pilori de Paris du règne de Saint Louis (1226-1270), sans qu’il soit possible d’être plus précis, faute de sources45. À partir des années 1280, les sources directes se multiplient. Nous l’avons vu, une ordonnance du prévôt de Paris datée de 1283 dispose que la foire annuelle de Saint-Ladre se tiendra « parmy les halles et pardevant le pillory46 ». Les rôles des tailles parisiennes des années 1290 indiquent également que l’édifice judiciaire trône au centre des Halles47. Dans toutes ces sources, l’édifice est présenté comme un repère familier du paysage, cité au détour d’une phrase, sans qu’il y ait besoin d’expliquer sa nature. C’est l’indice d’une institution usuelle pour les autorités parisiennes depuis au moins plusieurs décennies.
30L’enrichissement des archives du Parlement et de la Chancellerie au xive siècle révèle la banalité de l’exposition infamante dans la région parisienne. Les piloris alors attestés sont tous la propriété du roi, à l’instar de ceux de Pomponne48, Saint-Denis49, Villeneuve-le-Roi50 ou encore Melun51. Le pilori possédé par l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés fait figure d’exception : les autres hauts justiciers franciliens indépendants du pouvoir royal sont contraints par le prévôt de Paris de se contenter d’une échelle52. En définitive, que l’institution prenne la forme d’un poteau ou d’une échelle, elle est largement répandue dans le domaine vers 1300-1350, et peut-être dès la seconde moitié du xiiie siècle.
31Malgré leur caractère parcellaire, plusieurs tendances se dégagent des sources. L’exposition n’est a priori pas connue des justiciers franciliens avant 1200. Elle pénètre dans le domaine par la volonté du roi de France, qui trouve dans le pilori un moyen de se distinguer des autres hauts justiciers de la région. Le pouvoir royal maintient ces concurrents dans un état d’infériorité jusqu’à la fin du xve siècle, en leur refusant le droit d’élever des piloris dans son domaine. Mais si les juridictions non royales ne peuvent que rarement se munir d’un vrai pilori, elles adoptent tout de même l’exposition infamante, par le biais de l’échelle. Ainsi, comme en Champagne, l’exposition s’intègre à l’arsenal ordinaire des hauts justiciers franciliens sans mutation notable. Si l’adoption de l’édifice pilori par le pouvoir royal peut passer pour une tentative de se distinguer des autres justiciers du domaine, la peine elle-même semble récupérée pour ses vertus pénales réelles ou supposées.
Le sillon rhodanien, une diffusion dense mais tardive
32Le quart sud-est de l’espace français est la région la moins bien représentée dans le corpus rassemblé pour cette étude. Les études régionales sur l’organisation des justices de l’est du Midi53, de Manosque54 et du Lyonnais55, ou celles sur la société dijonnaise56, si elles nous informent sur les usages du pilori dans la région, ne citent aucune sentence d’exposition antérieure aux années 1310. On ne peut exclure que cette borne chronologique soit le reflet du désintérêt de l’historiographie pour les peines infamantes. Les recensions statistiques des peines médiévales les agglomèrent souvent aux peines afflictives, ou, au mieux, les confondent entre elles. Autant dire qu’il est impossible de dresser une synthèse satisfaisante de la propagation du pilori dans le Sud-Est des xiiie et xive siècles à partir de la seule historiographie. Dans l’absolu, la fréquentation des Archives départementales et municipales de la région permettrait de combler ces défauts. Les tendances et hypothèses qui suivent sont donc les moins assurées du modèle de diffusion que nous proposons. Une mosaïque de sources permet tout de même de poser quelques points de repère.
33Tout d’abord, le prolongement au Sud-Est des thèses proposées pour le Sud-Ouest incite à penser que le pilori y est une institution étrangère qui ne peut pas avoir été importée avant 1200, et difficilement avant 1250. De fait, l’avancée du pilori dans le Midi, selon un axe ouest-est, parvient aux limites orientales du royaume au milieu du xive siècle. On voit le pilori fonctionner à Manosque dès 131457. À Uzès, la charte de 1346 cite un pilori municipal. Il y est nommé costel58, terme commun dans le comté de Toulouse. Un transfert institutionnel s’est donc noué entre les environnements judiciaires voisins de l’est du Toulousain et de l’ouest de la Provence. Il nous semble plausible que, à une période pouvant s’étaler des années 1250 à 1320, le pilori ait été empiriquement transmis aux justices des comtés les plus orientaux du royaume par imitation, ou transfert, des pratiques judiciaires du comté de Toulouse.
34Remontons le Rhône jusqu’en Bourgogne pour déterminer si l’exposition était connue, à cette période, dans le grand duché. Au sein de notre corpus, les plus anciennes sources sont sujettes à caution, parce qu’elles sont étrangères à la Bourgogne. Dans un arrêt de 1339, le Parlement de Paris accuse le routier Pierre de La Ville et ses complices d’avoir malmené des officiers dans plusieurs villes du Mâconnais59. À Mâcon même, les hommes d’armes ont déboîté l’épaule d’un sergent de l’évêque, puis l’ont torturé au fond d’une geôle. Si le meneur n’est condamné qu’à une amende, un de ses hommes, Perronin Chevalier, doit être attaché aux piloris de Mâcon, Lyon et Quincieux. Est alors soulevée la question de la réalité de ces instruments de justice dans la région. Les conseillers du Parlement, pour qui le pilori est une évidence quotidienne, ont-ils hâtivement supposé qu’il l’était tout autant dans l’est du royaume ? Ou bien la peine d’exposition était-elle bel et bien connue dans la Bourgogne du premier xive siècle ?
35Une sentence de 1341 insérée dans le registre des délibérations du Conseil de Dijon prouve que les échevins jouissaient à cette époque de l’usage d’un pilori60. Il est donc certain que les grandes villes du duché ont adopté l’institution avant l’acquisition de la Bourgogne par le prince valois Philippe le Hardi, en 1363. De plus, un second acte du Parlement du 22 juin 1342 révèle un pilori bourguignon qui ne peut qu’être véritable61. Les conseillers y reprochent au sire de Dyo, petit châtelain du Mâconnais, d’avoir planté un pilori dans la juridiction du prieuré de Saint-Germain de Dyo, après avoir abattu tous les bœufs du prieur. Grâce à la voie de fait du sire de Dyo, on peut être certain que les seigneuries rurales du Mâconnais connaissaient le signe de justice au milieu du xive siècle. À cette époque et non loin de là, des piloris commencent à être attestés dans le Lyonnais. Ainsi, en 1344, Aymard, seigneur du Roussillon, obtient par le Parlement la reconnaissance de son droit d’élever un pilori sur la place de Saint-Laurent d’Agny62. En supposant que, comme c’est le cas en Ponthieu, Flandre ou Champagne, la diffusion de l’institution se fasse du milieu urbain vers le rural, on peut penser que sa présence dans des villages révèle qu’elle était déjà ancienne dans le Mâconnais et le Lyonnais vers 1340.
36De tout cela on tire que les justiciers de Bourgogne, du Lyonnais et de Provence se sont emparés du pilori au plus tard au début du xive siècle ; plus vraisemblablement durant la seconde moitié du xiiie siècle. La translation de l’institution vers ces régions semble par ailleurs être décorrélée de l’action politique des grands princes, contrairement à ce qui s’observait dans le domaine royal ou le comté de Champagne. L’innovation juridique se répand par un processus de mimétisme entre juridictions banales, mécanique proche du transfert culturel qui n’a pas besoin d’être stimulée, ni même soutenue, par des autorités princières pour être efficace.
Le xve siècle, temps de consolidation de l’institution
37Lorsqu’elle sort de son environnement d’origine, la peine du pilori s’enracine en priorité dans des régions où le négoce est florissant : bourgs marchands du Sud-Ouest, villes foraines de Champagne et du domaine, puis cités de Bourgogne et du Lyonnais. On peut penser qu’entre la fin du xiiie siècle et le milieu du xive, la plupart des centres commerciaux ont adopté cette institution initialement dédiée à la sécurité des transactions. Après un long siècle d’une diffusion polarisée par les centres urbains, l’exposition devient au xve siècle un objet juridique universel, commun à toutes les juridictions du royaume, qu’elles soient temporelles ou spirituelles, urbaines ou rurales. Le succès du pilori se produit alors que les autres peines infamantes amorcent une phase de déclin, ou, pour certaines, disparaissent tout à fait. À l’aube de l’époque moderne, l’exposition peut être considérée comme la peine infamante par excellence du royaume.
La propagation aux marges des routes commerciales
38Aucun territoire de l’espace français ne pourrait être présenté comme enclavé, imperméable aux influences culturelles extérieures, ou exclusivement tourné vers une économie domaniale coupée du commerce au long cours. Plusieurs régions restent tout de même en marge des circuits forains les plus dynamiques, soit parce que, comme l’Auvergne, elles sont intégrées à des systèmes commerciaux concurrents63, soit, comme l’intérieur de la péninsule bretonne, parce que leur géographie limite l’intensification des contacts avec le reste du royaume64. Il se trouve que ces deux « marches » du royaume sont représentatives du mouvement d’universalisation du pilori qui s’engage au xve siècle, puisque ce n’est qu’à cette époque que le signe de justice et sa peine s’y implantent durablement.
39Les hautes terres de l’Auvergne médiévale ne sont pas la contrée isolée et uniquement rurale qu’a voulu en faire l’historiographie traditionnelle. À partir des incursions de Louis VI en 1122 et 1125, les rois de France mènent une politique d’influence qui aboutit à la conquête du comté d’Auvergne en 1213. Dans le même temps, les comtes de Champagne sont présents dans le Bourbonnais : en 1230, Thibaud IV jouit d’une suzeraineté sur les forteresses d’Ainay, Hérisson et Huriel65. Au-delà des ingérences politiques, l’Auvergne est également partiellement intégrée aux circuits commerciaux du royaume. Ainsi les marchands d’Aurillac fréquentent les foires de Provins, où on sait qu’ils disposent d’un entrepôt en 120266. Toutefois, les relations avec les foires de Champagne sont ténues en regard de celles que l’Auvergne entretient avec l’Empire, par l’intermédiaire du royaume d’Arles. La configuration économique qui passait pour un « enclavement » vu de Paris s’avère plutôt être une orientation des échanges culturels et matériels vers des territoires étrangers au royaume67.
40Le tropisme impérial de l’Auvergne est sûrement une des principales causes de la lenteur de l’insertion du pilori, objet juridique français, dans la région. Le seul pilori d’Auvergne que nous connaissons pour le xive siècle est d’ailleurs planté par un seigneur étranger. Pierre de Maumont est un baron du Limousin qui a reçu en 1306 de Philippe le Bel la propriété du château de Tournoël, dans le Puy-de-Dôme68. Le Parlement de Paris lui reproche en 1339 d’avoir illégalement planté un pilori sur les terres du prieuré de Saint-Hilaire de la Croix, juridiction voisine69. Il est assez éclairant que ce soit justement un seigneur provenant de l’extérieur qui détienne un pilori bien avant que cet objet ne devienne un instrument banal dans la région. Si on ne peut pas exclure qu’une documentation plus fournie révélerait un tissu de piloris auvergnats dès le milieu du xive siècle, c’est surtout au xve que des sources cohérentes montrent leur implantation diffuse.
41Le premier de ces documents est problématique, parce que c’est le Parlement qui ordonne, en 1406, que deux faux témoins soient « publiquement mis au pilori ou à l’échelle, soit un samedi, soit un jour de marché, dans la ville de Poussanges70 ». L’hésitation des conseillers, qui ne semblent pas savoir quel équipement se trouve dans le bourg, ni quand se tient son marché hebdomadaire, fait qu’on ne peut utiliser l’arrêt comme preuve du déploiement de l’exposition dans l’Auvergne rurale. Cela étant, il est certain que Limoges, cité voisine de Poussanges, accueille un pilori en 141571. Plus tard, en 1464, une information menée par le Parlement montre que Jacques de Tourzel, seigneur d’Allègre, possède un « pilori incontestable en signe de sa haute justice sur ladite place » d’un village du Livradois que les conseillers appellent Montenello72. Le même Jacques de Tourzel prend une ordonnance en 1481 où on apprend qu’il possède un pilori planté dans le marché d’Ambert73. Bien qu’il soit difficile de dater l’entrée du pilori en Auvergne, le xve siècle semble être la période où il s’est généralisé.
42Tournons-nous vers le duché de Bretagne, second point aveugle de la propagation du pilori. Les sources juridiques ne manquent pourtant pas, car les ducs prennent l’habitude, à la fin du xiie siècle, de tirer de leurs assises des textes de jurisprudence coutumière, à l’image de l’Assise au comte Geffroy de 118574. Cette culture bretonne du droit écrit aboutit, au début du xive siècle, à la réalisation d’un recueil de procédure, ou livre de style, rédigé en moyen français et surnommé la Très Ancienne Coutume de Bretagne75. À la même époque, l’administration ducale produit des recueils d’un genre nouveau, les Constitutions de Bretagne. Ces compilations rassemblent surtout les ordonnances du duc, mais on peut aussi y trouver des Assises ou des sentences particulières. Bref, la Bretagne dispose d’une tradition de droit écrit ancienne, dynamique et bien conservée, qui permet d’entrevoir les évolutions du style et des normes des tribunaux ducaux.
43Or, il faut attendre 1462 pour qu’une ordonnance bretonne fasse allusion à l’exposition infamante. Par les Constitutions de Vannes, le duc François ii entend rénover les lois édictées dans les années 1450 par son oncle, le connétable Arthur de Richemont76. À forte portée politique, le texte prétend assurer le rétablissement d’une justice ferme contre une criminalité dont on nous dit qu’elle est endémique. Le long exposé des motifs qui ouvre l’article qui nous intéresse illustre parfaitement cette ambition :
« 19. Combien que es temps passez ayent esté faictes certaines constitutions et ordonnances pour la pugnition des faussonniers et des faux tesmoignz, par lesquelles ayent esté ordonnées certaines peines, attendu la multiplication desd. faussonneries qui de jour en autres sont commises […] est de necessité y trouver plus apres pugnitions et de plus grant crainte, à ce que l’en puisse lesd. faussonneries reprimer ; et pour ce est ordonné que ceux qui feront, fabriqueront et passeront aucun faux acte, lettre ou procès […] seront pugnis ainsi qu’il ensuite, c’est assavoir pour la premiere fois seront fustez à un jour de marché comme infames ; et s’il n’y a marché seront fustez en lieu public de la jurisdiction par laquelle ils seront reprins, et à la descente de l’eschelle ou pilori, ils auront le poing dextre coupé, et seront leurs biens meubles acquis et confisquez au seigneur de la cour duquel il en sera ainsi convaincu et atteint, sauf à faire provision à la femme et enfants ; et si secondement ils en sont repris, ils en seront pugniz, c’est assavoir penduz et estranglez au gibet77. »
44Alors que l’expression « seront fustez » signifie habituellement fustiger, battre de verges78, elle semble ici désigner la mise au pilori. Cette interprétation est validée par la précision apportée par l’article suivant : « Pour les faux tesmoignz est ordonné qu’ilz seront battuz par trois jours de marché ou autrement ainsi que dit est, et outre seront fustez, et à la descente de l’eschelle ou pilori auront une oreille coupée79. » La conjonction « et outre » supprime toute confusion : « seront fustez » est le verbe d’action du pilori et est clairement séparé de la fustigation – « seront battuz ». En fait, l’expression fait allusion à un passage de l’incipit de la Très Ancienne Coutume de Bretagne, en le détournant quelque peu. Après avoir exposé ce qu’était le « bien faire », l’auteur de la coutume du xive siècle liste les « folies » qui secouent le corps social :
« Car qui aprent à mauvès mestier chescun s’en devroit gaber, et les devroit l’en fuster, comme ceulx qui apprennent à mentir et à celer verité ou cas que besoign n’est, à renoier Dieu, la benoiste vierge Marie, les sainz et les saintes, et avoer le deable et à si donner, à moquer et à degenner autres80. »
45La proximité entre les crimes décrits – fausseté, blasphème, injure publique – et le cœur de métier du pilori saute aux yeux. Pourtant, la coutume ne fait pas référence à l’exposition infamante, ou du moins pas à sa forme institutionnalisée. Elle demande à chacun de se moquer (se gaber) des mauvaises gens et de les déshonorer (fuster81), mais plutôt sur le plan moral que pénal. Ainsi, « fuster au pilori » revient à plaquer une expression ancienne sur une réalité nouvelle. En reprenant ce verbe, François II s’accapare l’aura d’un texte célèbre et respecté, puisque la Très Ancienne Coutume a été maintes fois copiée au xve siècle et est brandie lors d’audiences en tant que source du droit82. Il repeint une peine récemment adoptée, et qui fait partie des « plus apres pugnitions », en coutume ancienne et rassurante pour le public breton.
46Il est délicat d’extrapoler, à partir de la seule législation du pouvoir ducal, la période d’entrée de l’exposition en Bretagne. Notons tout de même que nous ne sommes pas parvenu à documenter le pilori de Nantes avant l’année 1450, ce qui renforce l’impression de retard du duché sur le reste du royaume83. En tout état de cause et même s’il pouvait exister quelques piloris bretons avant 1400, ils ne rencontrent le succès qu’à l’époque où toutes les contrées du royaume finissent par adopter l’institution, y compris au détriment de peines infamantes locales.
L’hégémonie du pilori sur les autres peines infamantes
47Étudier les peines infamantes au xve siècle revient à inventorier leurs reflux. La course infamante subsiste et continue d’être utilisée par le Parlement de Toulouse dans les années 147084, mais Jean-Marie Carbasse remarque qu’elle disparaît des coutumes à partir des années 1350 et recule fortement dans la pratique des cours de première instance85. Quant au rituel de la hachée, il tombe en désuétude à la fin du xive siècle, au terme de quatre siècles d’existence86. Jeter le condamné dans le fleuve devient à la même époque exceptionnel au nord de la Loire, tandis qu’au sud, on lui préfère la peine de la cage immergée87. Même l’exposition connaît des replis ponctuels : après avoir été l’outil phare de la répression du blasphème dans l’ordonnance prise par Philippe VI en 134788, elle est peu à peu marginalisée dans celles du xve siècle jusqu’à ne plus être invoquée qu’en cas de quadruple récidive89.
48L’évolution de la législation sur le blasphème n’est cependant pas représentative de l’état de santé général de l’exposition à la toute fin du Moyen Âge. Il est encore fréquent de la croiser dans les textes normatifs locaux, qu’il s’agisse de statuts municipaux90 ou de métiers91, d’ouvrages de procédure ou de coutumiers92, de criées, ou encore d’ordonnances locales93. Outre sa résilience dans les diverses traditions juridiques du royaume, la peine du pilori ne s’efface pas non plus de la pratique judiciaire. On la voit même se maintenir à une fréquence d’usage comparable à celle qu’elle connaissait au xive siècle. Alors que les sentences connues ne dépassent pas la dizaine pour tout le xiiie siècle, le développement d’une habitude de l’écrit et de l’archivage chez les praticiens du début du xive siècle a permis de conserver 150 jugements comprenant une exposition pour la période 1301-1350. Par la suite, le rythme des sentences recensées se fixe à environ 100 par demi-siècle94. La période 1451-1500 fléchit légèrement en affichant 89 sentences recensées, mais cette donnée est le reflet du poids du Parlement de Paris dans la documentation exploitée. Le tribunal royal transfère en effet, au cours du xve siècle, plusieurs usages pénaux de l’exposition à l’amende honorable, ce qui fait drastiquement chuter le nombre de mises au pilori conservées dans ses archives.
49Comment expliquer qu’alors que la plupart des peines infamantes tombent en désuétude, l’exposition résiste assez pour maintenir des effectifs certes limités, mais constants ? Pour le comprendre, il faut d’abord identifier les causes de la désaffection des justiciers du xve siècle pour cette famille pénale. L’historiographie a proposé deux principaux modèles explicatifs. Le premier, hérité de l’histoire du droit, voit dans l’érosion des spectacles infamants la conséquence de la conjonction d’une concurrence juridique et d’un changement d’imaginaire judiciaire95. Les peines infamantes, parce qu’elles sont des sanctions d’intensité médiane, se voient prises en étau entre les amendes pécuniaires et les châtiments corporels. Elles parviennent à résister à cette concurrence jusqu’au xive siècle, parce qu’elles occupent efficacement des niches juridiques, comme la répression de l’adultère pour la course. Pourtant, elles finissent par s’éroder face à la polarisation croissante des systèmes pénaux médiévaux entre sanctions pécuniaires et corporelles. Leur affaissement est par ailleurs accéléré par le raidissement des justiciers du xve siècle, plus prompts que leurs prédécesseurs à infliger des châtiments afflictifs96. Par exemple, alors que la décapitation et la pendaison étaient les formes ordinaires de la peine capitale pour meurtre au Moyen Âge, la fin du xve siècle s’achemine vers le rituel dit des « mille morts ». Désormais, la mort du condamné est précédée d’une lente agonie : la découpe des membres et l’extirpation des entrailles, pratiques auparavant réservées aux coupables de lèse-majesté, se généralisent97. Dans ce contexte d’aggravation des sanctions pénales, les peines infamantes, rituels non sanglants, sont mal adaptées aux attentes nouvelles des justiciers.
50Le second modèle proposé pour expliquer le recul des peines infamantes s’appuie sur une méthode anthropologique plutôt qu’institutionnelle. Elle a l’avantage de ne pas analyser isolément l’imaginaire et les pratiques des justiciers, mais de les articuler aux représentations collectives dans lesquelles ils s’inscrivent. En analysant le déclin de la hachée, Jean-Marie Moeglin fait ainsi remarquer que l’usage d’un rituel aussi symbolique que le port d’une selle de cheval, d’un chien ou d’un livre, nécessite de la part de tous les agents présents, y compris du public, une compréhension fine et intuitive de ses sens et de ses buts98. Pour être efficace, le rituel infamant doit parvenir à transmettre aux contemporains des nuances de sens qui débordent la matérialité de son dispositif. Sans cela, le rituel est vidé de sa force évocatrice et devient une forme qu’on répète par habitude, jusqu’à sa « fossilisation » complète, c’est-à-dire son abandon pour incongruité ou absurdité.
51C’est cette seconde grille de lecture qui permet d’expliquer la divergence de devenir entre le pilori et les autres peines infamantes. Si on s’en tenait à la lecture institutionnelle, il n’y aurait aucune raison pour que l’exposition résiste davantage que ses semblables, puisqu’elle aussi est une peine de niche, intermédiaire et non sanglante. A contrario, la perspective anthropologique permet d’identifier une distinction majeure. Contrairement à la hachée ou à la course, qui manient des symboles hermétiques, la mise au pilori multiplie les efforts de transparence de sens. L’habitude prise de crier le crime du condamné avant de le désigner à la vindicte commune, et surtout de le munir d’un objet ou d’un écriteau expliquant son méfait, crée une sorte de pédagogie du rituel qui facilite sa réappropriation par les générations successives de publics. Surtout, le cœur du rituel lui-même, qui met en scène l’exclusion sociale par l’injure et le jet d’ordures à la figure, est d’une clarté telle que sa compréhension se maintient jusqu’à l’époque moderne.
52Ajoutons pour finir que le succès du pilori n’était pas inexorable. Les peines infamantes médiévales forment un champ des possibles buissonnant, où certaines expérimentations sont abandonnées et d’autres maintenues, sans qu’un axe téléologique ne puisse déterminer, et encore moins fixer par avance, le devenir de chacune. D’autres rituels infamants survivent aux déclins du xve siècle, à l’instar de l’hermétique port des pierres de justice99. L’intégralité des boulets grimaçants conservés datent des derniers siècles de l’époque moderne, preuve d’une vitalité continue de cette institution concurrente du pilori par-delà l’époque médiévale.
Conclusion
53Le pilori et sa peine associée sont universellement connus des justices du royaume à la fin du xve siècle, au terme de siècles de tâtonnements au cours desquels chaque région a développé ses propres méthodes de transmission. En se fondant dans ces environnements judiciaires, le pilori se distord, change de nom, absorbe de nouveaux usages ou s’hybride avec des objets juridiques indigènes. Malgré les lacunes de la documentation, des facteurs structurels affleurent et permettent de dégager des tendances récurrentes. Tous les espaces où le pilori s’implante avant 1230 sont urbanisés, intégrés aux réseaux du négoce interrégional et structurés par la compétition entre un pouvoir princier centralisateur et des oligarchies urbaines aspirant à une forme d’autonomie. Que ce soit dans les cités de la façade atlantique, de la Champagne ou, un peu plus tard, du domaine royal, l’initiative princière est décisive dans l’introduction du pilori. Dans le Midi, comme en Flandre et en Vermandois auparavant, l’institution est offerte aux consulats en gage d’autonomie. À l’inverse, les princes de la France centrale en conservent longtemps la propriété, comme pour rappeler leur supériorité sur les échevinages. Ces trajectoires, en apparence opposées, forment pourtant les deux versants d’un même compromis politique, selon que le partage empirique des droits seigneuriaux profite au pouvoir jeune ou ancien.
54Une fois implantée dans les principales places d’un territoire, l’institution se propage vers le plat pays. Ce transfert est favorisé par la densification des marchés de bourgs, espaces propices à l’érection de piloris, mais finit par gagner aussi les châtellenies rurales et les places de villages. La diffusion des villes vers les campagnes s’accompagne, à une échelle plus large, d’un mouvement allant du nord vers le sud, et de l’ouest vers l’est. Particulièrement visible dans le Midi, l’avancée progressive du pilori vers l’est aboutit à son introduction dans le royaume d’Arles au début du xive siècle, tandis qu’au même moment l’axe nord-sud gagne la Bourgogne en passant par la Champagne. Toutefois, plusieurs régions échappent à cette modélisation. Les piloris tardifs du Massif central, et surtout de Bretagne, rappellent que toute généralisation en sciences sociales se heurte à des quantités d’exceptions qui ne peuvent être comprises qu’après avoir affiné la masse des données.
55Au-delà des tribulations chronologiques qui complexifient l’élaboration d’un modèle de diffusion, il convient d’insister sur les mutations que le pilori subit à mesure qu’il accède à de nouveaux territoires. L’exposition est loin d’être une institution conquérante qui s’imposerait d’un seul coup aux praticiens locaux sur ordre d’une volonté extérieure. Ce n’est que parce que les justiciers de terrain se l’approprient lentement, ou plutôt la remodèlent selon leurs traditions et leurs besoins, qu’elle parvient à se fixer. Ainsi, le transfert culturel initialement impulsé par des princes débouche sur une acculturation prise en charge par les officiers de justice. C’est pourquoi l’institution se fragmente à mesure qu’elle s’étend : elle se confond avec le « pal » dans le Sud-Ouest, devient le « costel » plus à l’est tandis que les justiciers bretons « fustent » les condamnés. Chaque innovation lexicale est la trace de l’acclimatation d’un objet juridique adventice à son nouvel environnement judiciaire.
Notes de bas de page
1 Braudel Fernand, « Vie matérielle et comportements biologiques », Annales. Économies, Sociétés, Civilisations, 1961, no 16, p. 545-574 ; Bennassar Bartolomé et Goy Joseph, « Histoire de la consommation », Annales. Économies, Sociétés, Civilisations, 1975, no 30, p. 402-631.
2 Petrowiste Judicaël (dir.), Faire son marché au Moyen Âge : Méditerranée occidentale, xiiie-xvie siècle, op. cit., p. 2-5.
3 Audouin Édouard, « Les chartes communales de Poitiers et les Établissements de Rouen », art. cité, p. 125-158.
4 Favreau Robert, « Les débuts de la ville de la Rochelle », Cahiers de civilisation médiévale, 1987, no 117, p. 16.
5 Giry Arthur, Histoire de la ville de Saint-Omer et de ses institutions jusqu’au xive siècle, op. cit., t. 1, p. 54.
6 Barckhausen Henri, Le livre des coutumes de Bordeaux, Bordeaux, Imprimerie G. Gounouilhou, coll. « Archives municipales de Bordeaux », 1890, p. xxxvii.
7 Berger Élie, Recueil des actes de Philippe Auguste, roi de France, op. cit., t. 1, p. 365.
8 Giry Arthur, Les Établissements de Rouen…, op. cit., t. 2, p. 1, 22.
9 Barckhausen Henri, Le livre des coutumes de Bordeaux, op. cit., p. 32, art. 17, p. 283, art. 24.
10 AM Bayonne, AA 1, fo 55. Giry Arthur, Les Établissements de Rouen…, op. cit., t. 2, p. 2.
11 Carbasse Jean-Marie, « “Currant nudi”… », art. cité, p. 83-102.
12 Quatre exemples : Cabié Edmond, Coutumes de Lafox…, op. cit., p. 13, art. 10 ; Rébouis Hippolyte-Émile, Coutumes de Clermont-Dessus en Agenais 1262, op. cit., p. 36, art. 54 ; Rébouis Hippolyte-Émile, Coutumes de Goudourville en Agenais (1278), Paris, Librairie du recueil général des lois et des arrêts, 1892, p. 18, art. 24 ; Lagarde Alphonse, « Coutumes de Tonneins-Dessous », art. cité, p. 126.
13 Barckhausen Henri, Le livre des coutumes de Bordeaux, op. cit., p. 38, art. 29.
14 Cabié Edmond, Coutumes de Lafox…, op. cit., p. 13, art. 10.
15 « L’esclapot, ou Cartulaire de Monségur », art. cité, p. 50.
16 « Anciennes coutumes de Pujols, extraites des Archives de la Gironde », in Gerbeau Jean-Baptiste, Essai historique sur la baronnie de Pujols en Agenais, op. cit., p. 433, art. 13.
17 Tropamer Henry, La coutume d’Agen, thèse de doctorat soutenue devant la faculté de droit de Bordeaux, Bordeaux, Y. Cadoret, imprimeur de l’université, 1911, p. 132.
18 BM Agen, ms. 42, Livre des coutumes d’Agen (milieu du xiiie siècle), fo 95 et 185.
19 Rébouis Hippolyte-Émile, Coutumes de Clermont-Dessus en Agenais 1262, op. cit., p. 36, art. 54 ; Lagarde Alphonse, « Coutumes de Tonneins-Dessous », art. cité, p. 126.
20 Rébouis Hippolyte-Émile, Les coutumes de l’Agenais : Nomdieu – Sauvagnas, op. cit., p. 19, art. 53.
21 Rébouis Hippolyte-Émile, Coutumes de Puymirol en Agenais, op. cit., p. 38, art. 17.
22 Ordonnances des roys de France de la troisième race, op. cit., t. 12, p. 542, art. 92.
23 « Corra la vila ab lo panadis al col », Rébouis Hippolyte-Émile, Coutumes de Clermont-Dessus en Agenais 1262, op. cit., p. 36, art. 54. ; « corra la vila ab lo layroneci al col pendant », Rébouis Hippolyte-Émile, Coutumes de Goudourville en Agenais (1278), op. cit., p. 18, art. 24.
24 Mousnier Mireille, « L’appropriation de l’espace dans les campagnes toulousaines aux xiie et xiiie siècle », Annales du Midi : revue archéologique, historique et philologique de la France méridionale, 1990, no 102, p. 139.
25 Compayré Clément, Études historiques et documents inédits sur l’Albigeois, le Castrais et l’ancien diocèse de Lavaur, Albi, Imprimerie de Maurice Papailhiau, 1841, p. 324.
26 AC Pamiers, BB 11, fo 12 vo-13, Statuts de Pamiers (1420). Lahondès Jules de, Annales de Pamiers, Toulouse, E. Privat, 1882, t. 1, p. 473.
27 « Statuts et établissements de la ville de Marmande », art. cité, art. 79.
28 Hemptinne Thérèse de et Verhulst Adriaan, De oorkonden der graven van Vlaanderen…, op. cit., p. 230, art. 43.
29 Barckhausen Henri, Le livre des coutumes de Bordeaux, op. cit., respectivement : p. 46, art. 39 ; p. 35, art. 22 et 23.
30 Ibid., p. 38, art. 29.
31 Bove Boris, Gaude-Ferragu Murielle et Michon Cédric, Paris, ville de cour (xiiie-xviiie siècle), Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2017.
32 Bur Michel, La formation du comté de Champagne (v. 950-v. 1150), Nancy, université Nancy II, 1977, p. 460, n. 125.
33 Charbonnier Pierre, « Les chartes urbaines dans la France centrale : un mouvement seigneurial ? », in Les origines des libertés urbaines. Actes des congrès de la Société des historiens médiévistes de l’enseignement supérieur public, 16e congrès, Rouen, 1985, p. 265-280.
34 Wilmart Mickaël, « Les débuts de la commune de Meaux (1179-1184) », Bulletin de la Société littéraire et historique de la Brie, 2000, no 55, p. 108.
35 Tardif Jules, « Charte française de 1230 conservée aux archives municipales de Troyes », Bibliothèque de l’École des chartes, no 16, 1855, p. 143, art. 6.
36 Gassies Georges, Les chartes de la commune de Meaux, 1179-1222, Meaux, Publication de la Société historique et littéraire de la Brie, 1900, p. 38-39.
37 ANF J 203, Champagne XI, no 19, charte originale de mai 1227, arbitrage de mai 1227 contenu dans le cartulaire de l’évêché de Meaux. Teulet Alexandre, Layettes du Trésor des chartes, op. cit., t. 2, p. 123-124, no 1929.
38 Bourquelot Félix, « Notice sur le manuscrit intitulé Cartulaire de la ville de Provins, xiiie et xive siècles », Bibliothèque de l’École des chartes, no 17, 1856, p. 210.
39 BNF, nouv. acq., fr. 341, Comptes de la terre de Champagne (1340-1341). Longnon Auguste, Documents relatifs au comté de Champagne et de Brie 1172-1361, Paris, Imprimerie nationale, 1901-1914, t. 3, p. 289, 297 et 326.
40 ANF X2A 5, fo 160 vo, mandement du 23 février 1349, Labat-Poussin Brigitte et Lanhers Yvonne, Actes du parlement de Paris. Parlement criminel, règne de Philippe de Valois. Inventaire analytique des registres X2A 2 à 5, op. cit., no 5160B.
41 Berger Élie, Recueil des actes de Philippe Auguste, roi de France, op. cit., t. 2, p. 362, no 789.
42 ANF J 1033, no 25, enquête royale à Mantes, 1236. Teulet Alexandre, Layettes du Trésor des chartes, op. cit., t. 5, p. 130, no 395.
43 Lardin Philippe, « Les relations des ports du littoral de la Basse-Seine et de Rouen avec leurs hinterlands à la fin du Moyen Âge », Revue belge de philologie et d’histoire, 2016, no 94, p. 52.
44 Tanon Louis, Histoire des justices des anciennes églises…, op. cit., p. 413.
45 Favier Jean, Le Bourgeois de Paris au Moyen Âge, Paris, Tallandier, 2015, p. 649.
46 Ordonnances du prévôt de Paris sur les droits de la foire de Saint-Ladre, 1283. Depping Georges Bernard, Réglements sur les arts et métiers de Paris…, op. cit., p. 438-439.
47 Guerout Jean, « Fiscalité, topographie et démographie à Paris au Moyen Âge », Bibliothèque de l’École des chartes, no 130, 1972, p. 383-465.
48 ANF X2A 9, fo 170 vo-171, arrêt du 23 décembre 1378 contre Jean de Pomponne, complice de coups et blessures graves. Il est condamné à être tourné au pilori des Halles de Paris, puis à celui de Pomponne.
49 Jacques d’Ableiges, Le Grand Coutumier de France, Paris, Auguste Durand et Pédone-Lauriel, libraires, 1808, p. 670.
50 ANF JJ 159, no 289, lettre de rémission au profit de Jehan Nardouin, avril 1405. Porée Charles, « Inventaire de la collection de Chastellux », Bulletin de la Société des sciences historiques et naturelles de l’Yonne, 1903, no 57, p. 132.
51 Gauvard Claude, « De grace especial »…, op. cit., p. 136.
52 Par exemple Saint-Martin-des-Champs : Tanon Louis, Histoire des justices des anciennes églises…, op. cit., p. 550. Ou Marolles-en-Hurepoix : AD Essonne A 1146, no 6, enquête de 1478 du Châtelet sur les droits du prieur de Marolles à détenir une échelle de justice.
53 Otis-Cour Leah, « Réflexions sur l’application de la peine dans le Midi de la France à la fin du Moyen Âge », in Hoareau-Dodinau Jacqueline et Texier Pascal (dir.), La peine. Discours, pratiques, représentations, Limoges, Pulim, coll. « Cahiers de l’Institut d’anthropologie juridique », no 12, 2005, p. 99-109.
54 MacCaughan Patricia, La justice à Manosque au xiiie siècle. Évolution et représentation, Paris, Honoré Champion, coll. « Histoire et archives », 2005.
55 Gonthier Nicole, Délinquance, justice et société dans le Lyonnais médiéval, de la fin du xiiie siècle au début du xvie siècle, Paris, Éditions Arguments, 1993.
56 Dutour Thierry, Une société de l’honneur. Les notables et leur monde à Dijon à la fin du Moyen Âge, op. cit.
57 MacCaughan Pascale, La justice à Manosque au xiiie siècle…, op. cit., p. 218.
58 Rozière Eugène de, Charte du consulat d’Uzès…, op. cit., p. 11.
59 ANF X1A 8, fo 22 vo, arrêt du 1er décembre 1339, Furgeot Henri, Actes du parlement de Paris – Deuxième série – De l’an 1328 à l’an 1350, Paris, Plon-Nourrit imprimeurs-éditeurs, 1920, t. 1, p. 227.
60 AM Dijon B 128, fo 113, n. 8, Lebel Paul, Extraits du registre de l’échevinage de Dijon pour l’année 1341-1342, Dijon, imprimerie Bernigaud et Privat, 1963, p. 3.
61 ANF X1A 9, fo 317 vo, arrêt du 22 juin 1342 en faveur du prieur de Saint-Germain-de-Dyo pour vider une querelle juridictionnelle, Furgeot Henri, Actes du parlement de Paris…, op. cit., t. 1, p. 439.
62 ANF X1A 10, fo 158, 17 juillet 1344. Ibid., t. 2, p. 93.
63 Fray Jean-Luc, « Auvergne, Velay et Royaume d’Arles : éléments pour une révision de la géographie relationnelle auvergnate au Moyen Âge », Marges et « marches » médiévales. Siècles, Cahiers du Centre d’histoire « Espaces et Cultures », 2002, no 15, p. 75-87.
64 Tranchant Mathias, « Les ports maritimes en France au Moyen Âge », in Boucheron Patrick, Ports maritimes et ports fluviaux au Moyen Âge. Actes des congrès de la Société des historiens médiévistes de l’enseignement supérieur public, La Rochelle, Publications de la Sorbonne, 2004, p. 24.
65 Fray Jean-Luc, « Auvergne, Velay et Royaume d’Arles », art. cité, p. 3.
66 BM Provins, m. 92, fo 256 vo-258 vo, cité par Boudet Marcellin, « Les marchands d’Aurillac et de Saint-Flour aux foires de Champagne et de Montpellier », Revue de la Haute-Auvergne, 1913, no 15, p. 327-341.
67 Fray Jean-Luc, « Auvergne, Velay et Royaume d’Arles », art. cité, p. 8.
68 Teyssot Josiane, Riom 1212-1557, capitale et bonne ville d’Auvergne, Nonette, Éditions Créer, 1999, p. 85.
69 ANF X1A 8, fo 30 vo, arrêt du 13 février 1339 rendu contre Pierre de Maumont, Bernard Tranchelion et leurs complices. Furgeot Henri, Actes du parlement de Paris…, op. cit., t. 1, p. 233.
70 ANF X2A 15, fo 122, arrêt du 15 mai 1406 rendu contre Jehan Novisson et Agnes Savane, faux témoins.
71 AD Haute-Vienne, B 106, n. 3, 1415. Leroux Alfred, Inventaire-sommaire des archives départementales antérieures à 1790 : Haute-Vienne – Série H supplément (archives hospitalières) : Hospices et hôpitaux de Limoges, Bellac, Le Dorat, Magnac-Laval et Saint-Yrieix, Limoges, Imprimerie typographique D. Gely, 1884, p. 24.
72 ANF X2A 30, fo 327-328 vo, arrêt du Parlement daté du 7 août 1464.
73 AD Puy-de-Dôme, B 754, 1481, ordonnance de Jacques de Tourzel pour la police du marché dit du Pontel, à Ambert.
74 BM Rennes, ms. 72, catal. Maillet, no 70. Planiol Marcel, La Très Ancienne Coutume de Bretagne : avec les assises, constitutions de Parlement et ordonnances ducales, Rennes, J. Plihon et L. Hervé libraires-éditeurs, 1896, p. 321.
75 Ibid., p. 51.
76 Constitutions de Vannes, 14 juin 1462. Ibid., p. 441, n. 87.
77 Ibid., p. 443, n. 87, art. 19.
78 « Fuster, verbe – Frapper quelqu’un de coups de bâton », Dictionnaire du moyen français (1330-1500), Paris, CNRS/université de Lorraine, 2015, [http://zeus.atilf.fr/dmf/].
79 Planiol Marcel, La Très Ancienne Coutume de Bretagne…, op. cit., p. 443, no 87, art. 20.
80 Ibid., p. 52.
81 L’emploi de fuster comme synonyme de déshonorer est connu dans la littérature bretonne médiévale. Voir Godefroy Frédéric, Dictionnaire de l’ancienne langue française et de tous ses dialectes du ixe au xve siècle, Paris, F. Vieweg, 1881, p. 188.
82 Planiol Marcel, La Très Ancienne Coutume de Bretagne…, op. cit., p. 1-20.
83 AM Nantes, CC 243, Comptes de l’échevinage pour l’année 1450. Nicollière-Teijeiro Stéphane de la, Inventaire-sommaire des archives communales antérieures à 1790 : ville de Nantes, Nantes, Imprimerie du commerce G. Schwob et Fils, 1888, p. 184-185.
84 AD Haute-Garonne B 4, Registre de sentences du Parlement de Toulouse, fo 307, sentence du 7 mai 1477 contre Antoine Carrier, parjure et faux témoins ; idem, fo 410-411, arrêt du 22 avril 1478 contre Bernard Escudier, Pierre Clavaire et Raymond Clavaire pour fausses dépositions et parjures. Roques Charles, Inventaire-sommaire des archives départementales antérieures à 1790 : Haute-Garonne – Série B, Toulouse, Imprimerie Édouard Privat, 1903, t. 1, p. 37 et 39.
85 Carbasse Jean-Marie, « “Currant nudi”… », art. cité, p. 102.
86 Moeglin Jean-Marie, « Harmiscara – Harmschar – Hachée… », art. cité, p. 11.
87 Otis-Cour Leah, « La répression des infractions contre l’ordre moral à Pamiers à la fin du Moyen Âge », art. cité, p. 273-286.
88 Ordonnances des roys de France de la troisième race, op. cit., t. 2, p. 282.
89 Ibid., respectivement t. 14, p. 499 ; t. 18, p. 453 ; t. 20, p. 46 ; t. 21, p. 448.
90 AC Pamiers BB 11, fo 12 vo-13. Lahondès Jules de, Annales de Pamiers, op. cit., p. 473.
91 Statut des fourbisseurs d’Amiens de 1482. Thierry Augustin, Recueil des monuments inédits de l’histoire du Tiers-État, op. cit., t. 2, p. 392, art. 4.
92 ANF P 1334(4), coutumier de l’Anjou du xve siècle. Beautemps-Beaupré Charles-Jean, Coutumes et institutions de l’Anjou et du Maine antérieures au xvie siècle, Paris, Auguste Durand et Pédone-Lauriel éditeurs, 1877, t. 2-4, p. 111.
93 ANF Y 4, Livre vert vieil, fo 72 vo, ordonnance de 1416 du prévôt de Paris qui menace de mise au pilori ceux qui traversent la Seine durant la nuit, Tuetey Alexandre, Inventaire analytique des livres de couleur et bannières du Châtelet de Paris, op. cit., p. 112.
94 1301-1350 : 150 cas ; 1351-1400 : 103 ; 1401-1450 : 101 ; 1451-1500 : 89. Les 68 cas restants datent soit du xiiie siècle (8 cas), soit de la période 1501-1530 (60 cas).
95 Schnapper Bernard, Voies nouvelles en histoire du droit. La justice, la famille, la répression pénale (xvie-xxe siècles), Paris, Presses universitaires de France, 1994, introduction.
96 Ibid., p. 96.
97 Ibid., p. 141.
98 Moeglin Jean-Marie, « Harmiscara – Harmschar – Hachée… », art. cité, p. 43-44.
99 Gessler Jean, « Le port des pierres de justice », art. cité, p. 113-139.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Un constructeur de la France du xxe siècle
La Société Auxiliaire d'Entreprises (SAE) et la naissance de la grande entreprise française de bâtiment (1924-1974)
Pierre Jambard
2008
Ouvriers bretons
Conflits d'usines, conflits identitaires en Bretagne dans les années 1968
Vincent Porhel
2008
L'intrusion balnéaire
Les populations littorales bretonnes et vendéennes face au tourisme (1800-1945)
Johan Vincent
2008
L'individu dans la famille à Rome au ive siècle
D'après l'œuvre d'Ambroise de Milan
Dominique Lhuillier-Martinetti
2008
L'éveil politique de la Savoie
Conflits ordinaires et rivalités nouvelles (1848-1853)
Sylvain Milbach
2008
L'évangélisation des Indiens du Mexique
Impact et réalité de la conquête spirituelle (xvie siècle)
Éric Roulet
2008
Les miroirs du silence
L'éducation des jeunes sourds dans l'Ouest, 1800-1934
Patrick Bourgalais
2008