Chapitre XVI. Peur et culte héroïque
p. 227-236
Texte intégral
1Dans la mythologie grecque, Phobos est le fils d’Arès et d’Aphrodite, frère de Deimos (et d’Harmonie, suivant les versions)1. Incarnation de la peur, Phobos accompagne déjà dans l’Iliade son père à la bataille ; son frère Deimos incarne, lui, la terreur2. Selon Ludwig Deubner et Bernard C. Dietrich, Phobos était une vraie divinité de la religion grecque et L. Deubner souligne qu’il était souvent représenté sur des boucliers et des objets similaires, probablement pour causer la peur aux ennemis3. Ainsi, Phobos fut représenté sur le bouclier d’Agamemnon sur le coffre de Cypsélos4. Chez Eschyle, les Sept jurèrent à Ares, à Enyo (« Horreur ») et à Phobos, tandis que les habitants de Sélinonte attribuèrent une victoire à Zeus et à Phobos5. Le culte de Phobos était important à Sparte et, selon Plutarque, son temple était fermé en période de paix6.
2Chez Hérodote, phobos est envoyé par une divinité et, au ive siècle, la peur panique est associée, selon William K. Pritchett, au dieu Pan7, alors que Philippe Borgeaud précise que Phobos participe directement au combat alors que Pan agit à distance8. Il semble que les Grecs voyaient dans la crainte et la peur un châtiment des dieux. C’est l’émotion de la peur9, « religieuse » et « politique/sociale », et non son incarnation, qui nous intéresse dans cette étude, en rapport avec le culte des héros grecs. Le héros en tant que figure de culte ne renvoyait pas à un dieu ou à une déesse, mais à un homme, une femme ou un enfant, qui tout en étant mort continuait d’avoir un effet sur la vie des hommes depuis son tombeau10. Il semble que dans certains cas, les mortels « craignent » les héros11.
3Les Grecs attribuaient souvent leurs victoires aux épiphanies des héros sur le champ de bataille, qui provoquaient la peur chez leurs ennemis12. À Marathon, un grand nombre de soldats virent Thésée, armé de pied en cap, se ruer contre les ennemis à la tête des Athéniens13. Son culte n’était pas directement associé à son apparition sur le champ de bataille, mais son mythe est bien lié à la victoire sur la mort. Thésée descendit avec Pirithoos dans le monde des morts et grâce à Héraclès, il a pu revenir au monde des vivants14. Il a fait alors un passage victorieux dans l’Hadès, comme l’avait fait le « héros dieu15 » de la mythologie grecque. Dans le tableau du frère de Phidias Panainos, qui se trouvait dans la Stoa Pœcile (le « portique bariolé16 ») d’Athènes17, on voyait au premier rang des combattants de Marathon Héraclès, bien que, selon Hérodote, il ne participa pas à la bataille de Marathon18. Pourtant, les habitants de Marathon honorèrent Héraclès, ainsi que Marathon, leur héros éponyme, jusqu’à l’époque de Pausanias19.
4On voyait également un héros du nom d’Échétlos et le héros éponyme de l’endroit, Marathon (ou Marathos), qui devint un prototype du mort à la bataille de Marathon, selon Emily Kearns20. Après la victoire des Grecs, les habitants de Marathon l’honorèrent jusqu’à l’époque de Pausanias21. Selon une tradition locale, un homme habillé en paysan aurait utilisé son araire comme arme contre les Perses. Après avoir tué de nombreux barbares, il disparut. En effet, son nom est associé étymologiquement au terme echetlê, qui signifie « charrue ». Pour son épiphanie, les Athéniens consultèrent l’oracle d’Apollon, lequel leur ordonna d’honorer le héros Échétlos22.
5Cependant, Hérodote ne mentionne qu’une apparition héroïque, celle d’un hoplite de taille gigantesque qui combattait pour les Perses. Selon l’athénien Epizelos, cette figure horrible, dont la barbe recouvrait le bouclier, l’aveugla et tua un de ses camarades23. Certains chercheurs ont supposé qu’Epizelos avait été terrifié par un géant perse standard, puisque les Perses sont souvent décrits dans les sources littéraires antiques comme des personnes énormes, à longue barbe, mais cela n’explique pas l’aveuglement d’Epizelos24. Evelyn B. Harrison a suggéré que cette figure énorme pouvait personnifier la peur, comme Phobos ou Deimos, mais de telles personnifications étaient aisément identifiées par les Grecs25. Je pense que l’interprétation héroïque est la plus satisfaisante, puisque les héros étaient souvent caractérisés par leur stature gigantesque, bien qu’on puisse également proposer que dans certains cas, les héros pouvaient fonctionner comme des « personnifications de la peur ou de la terreur26 ».
6De plus, dans la guerre contre Xerxès, Delphes fut défendu par deux héros locaux, et le matin de la bataille navale de Salamine, les Grecs adressèrent des prières aux dieux, mais demandèrent aux héros un secours immédiat : de Salamine, on appela à l’aide Ajax et Télamon, et l’on envoya à Égine un vaisseau chargé de ramener Éaque et les Éacides27. Selon Plutarque, pendant la bataille navale, des hommes armés, qui furent considérés comme les Éacides, ont été vus tendant leurs mains pour protéger le vaisseau grec28. Après la victoire, les Éacides en furent remerciés et une trière phénicienne fut dédiée à Ajax29. Enfin, la célébration des Aianteia a été réorganisée associant le héros à la célébration de la victoire à Salamine30.
7De même, Cychreus était toujours honoré dans son sanctuaire de Salamine31. Une légende locale rapporte que, pendant la bataille navale, opposant les Athéniens aux Perses, un serpent apparut au milieu des navires et aida les Grecs à vaincre : il s’agissait du roi Cychreus32. Après la bataille, on proclama que l’on était redevable de la victoire aux dieux et aux héros33.
8De tels exemples témoignent d’une divinisation des puissances qui apportent la victoire en effrayant les ennemis. Il existe aussi d’autres domaines de la peur liés au culte héroïque. Le premier est, sans doute, celui de la peur de mourir qui s’apaise par l’épiphanie des héros dans le champ de bataille. Il semble que l’« existence post-mortem » des figures héroïques apaisait la peur des mortels devant la mort. On craignait aussi les épidémies et la maladie (voir les divinités, dieux et héros, guérisseuses), l’inconnu de l’avenir (voir les divinités oraculaires), les guerres et les invasions ou des phénomènes qu’on ne pouvait pas expliquer (voir le trouble des chevaux lors des courses de chars).
9Dans la mythologie grecque, on rencontre souvent des épidémies comme résultat d’une insulte contre un héros. Par exemple, l’épidémie sur la petite ville arcadienne de Caphyai. Selon la tradition locale, des enfants qui jouaient autour du sanctuaire d’Artémis Condyleatis avaient trouvé une corde. Ils la passèrent autour du cou de la statue cultuelle de la déesse et ils dirent que la déesse était pendue. Quand les Caphyens découvrirent ce que les enfants avaient fait, ils les tuèrent en les lapidant. À peine les avaient-ils exécutés que leurs femmes commencèrent à tomber malades et les embryons mourir dans le ventre maternel34. Ils s’adressèrent alors à l’oracle de Delphes qui apporta encore une fois la solution à une crise civique, en établissant à la fois, le changement du surnom d’Artémis Condyleatis en Artémis Apagchoméné (« Pendue ») et un culte héroïque annuel en l’honneur des enfants injustement tués35. De même, la mort par lapidation des enfants de Médée a provoqué une épidémie terrible sur la ville de Corinthe36.
10En fait, les âmes des morts étaient très sensibles aux injustices commises dans le passé ou le présent. Des personnes mortes injustement pouvaient devenir des héros « furies » et la justice être appliquée au moyen de maux s’abattant sur une région – une croyance qui provoquait la peur de la communauté37. La mort par lapidation exigeait habituellement des propitiations, surtout quand elle avait été provoquée par des erreurs innocentes38. De même, la mort violente et l’absence d’inhumation étaient réparées par l’instauration d’un culte à cause de la peur que les héros défunts provoquaient à leurs descendants vivants39.
11Dans la version corinthienne du mythe de Médée, les enfants de Médée et de Jason ont été tués non par leur mère, mais par les Corinthiens en raison des présents meurtriers qu’ils avaient apporté à Glaucé et de la mort de Créon40. Les enfants ont été soit lapidés à mort soit massacrés sur l’autel du temple d’Héra Acraia où ils s’étaient « cachés41 ». En guise de punition, les enfants de Corinthe allaient périr jusqu’à l’institution de rites d’expiation. Même chez Euripide, où Médée est la meurtrière de ses enfants, Jason dit à Médée que les enfants, bien que morts, continuent leur existence en tant qu’esprits vengeurs (miastores42). En employant ce terme, Jason indique clairement, selon Corinne O. Pache, que les victimes d’un tel crime réclameront une vengeance violente contre leur meurtrier43. Selon la scholie à Euripide, après le meurtre des Médéides dans l’hieron d’Héra Acraia, un loimos frappa les enfants du pays, des victimes similaires aux victimes originelles, comme l’avait souligné Angelo Brelich44. Ainsi, selon cette scholie, les Corinthiennes, responsables de la mort des enfants de Médée, sont également devenues responsables de la mort de leurs enfants et ne pouvaient expier le crime originel qu’en « sacrifiant » sept garçons et sept filles du pays annuellement en l’honneur d’Héra Acraia45. Sur l’agora de Corinthe, près de l’Odéon, les Médéides étaient honorés sur leur tombeau à cause de la peur du loimos qui avait frappé la ville46. Après avoir consulté l’oracle de Delphes, les Corinthiens ont institué des sacrifices annuels du type thusia en l’honneur des Médéides et ont érigé une statue de Deima, la personnification de la peur, qui commémorait le deima originel jusqu’à l’époque de Pausanias47. Précisons qu’ici, on peut penser que le culte héroïque des enfants de Médée (« Anxiété » [Merméros] et « Porteur » [Phérès]48), symbolise la peur des Corinthiens, et surtout des Corinthiennes, pour la vie de leurs enfants, comme le soutient C. O. Pache à propos de tous les cultes des enfants héros49.
12Concernant la crainte de la maladie et de l’avenir, les dieux et les héros qui passaient pour les plus importants du panthéon grec étaient ceux qui fonctionnaient comme des auxiliaires à la faiblesse humaine, à la guérison de la maladie et à la prédiction de l’avenir50. Rappelons que les devins étaient des figures importantes, à l’exemple de Tirésias qui, après sa mort, menait une vie souterraine, déjà chez Homère51. Par exemple, le héros guérisseur et oraculaire Amphiaraos à Oropos et le héros oraculaire Trophonios à Lébadée52 recevaient des honneurs « héroïco-divins » dans leurs sanctuaires et accédèrent au rang de divinité, puisque, selon la version la plus célèbre de leur mythe, ils avaient été engloutis par la terre53. De même, le fils d’Amphiaraos, Amphilochos, qui avait hérité de l’art divinatoire de son père, passait pour habiter sous terre et pour y vivre encore, en Acarnanie et en Cilicie54. Sans oublier un autre devin épique, le thébain Tirésias, qui (dans la Nékyia) conserve la plénitude de sa conscience dans le monde des morts55. À Orchomène, il y avait un chréstérion de Tirésias qui (selon Plutarque) était un oracle d’incubation, comme celui d’Amphiaraos56. Les Grecs croyaient que la puissance d’un héros se manifestait sur le lieu de son enterrement57. La même croyance valait également pour le lieu de disparition d’un héros, puisque la disparition héroïque coïncidait avec la mort. La peur face à la manifestation de la puissance héroïque restait également la même. Ainsi, de même que Trophonios disparait/descend dans la terre, de même, ses pèlerins devaient descendre (katienai, katabainein) dans la terre pour le consulter58. Pausanias ne parle pas de ce qui se passait à l’intérieur de l’oracle. Il donne seulement deux informations : la consultation était rendue directement par Trophonios soit par la vision soit par l’ouïe (autrement dit, elle s’effectuait de plusieurs manières, sans l’intervention des prêtres) et le consultant était envahi par une peur si grande qu’après son retour de l’adyton, il n’avait plus conscience de lui-même ni de ses proches59.
13La crainte des dieux et des héros ou des oracles concerne une peur de nature religieuse60. Les héros semblaient plus proches des humains que les autres genres divins, mais les mortels devaient les honorer, afin de s’assurer leurs bienfaits, comme c’était le cas pour les dieux. Sinon, il y avait la peur de la punition.
14En ce qui concerne la peur de la manifestation d’une activité inhabituelle, elle pouvait conduire à la célébration d’un culte héroïque. Étant donné que les Grecs n’aimaient pas ignorer le nom de celui auquel ils s’adressaient, soit ils tentaient de l’identifier, soit ils lui donnaient un surnom explicitant sa fonction. Ces héros « fonctionnels » personnifiaient une fonction particulière, d’où leur importance considérable et la nécessité de se concilier leurs faveurs61. Sinon, il y avait la peur de l’inconnu62… Ainsi, entre autres héroïnes et héros honorés à Olympie, on célébrait Taraxippos dans la région sacrée de l’Altis, dont la présence se traduisait par la peur des chevaux lors des courses de chars, quand ils faisaient le tour de son autel : « En passant à côté, les chevaux sont immédiatement saisis, sans aucune raison apparente, d’une forte crainte, et cette crainte engendre le désordre ; les chars se brisent le plus souvent, et les cochers se blessent63. » En effet, dans l’Isthme, tout comme à Olympie, il y avait aussi, dans l’hippodrome, un autel dédié à Taraxippos ; ce dernier était identifié par les habitants à Glaucos, fils de Sisyphe, mort à la course de chars lors des Jeux isthmiques, lorsque ceux-ci furent établis par Acastos en l’honneur de son père64. À Némée, en revanche, il n’y avait pas de figure identifiée à Taraxippos, mais on signalait la présence de rochers rouges, près de l’hippodrome, dont l’éclat suscitait la panique chez les chevaux et la crainte chez les hommes65. Par ailleurs, la peur constitue une réaction normale face à un phénomène surnaturel.
15Enfin, il y avait une peur de nature politique et sociale. J.-P. Vernant a vu dans Phobos au ve siècle un instrument de la loi équivalent à celui de la Peitho athénienne et l’incarnation d’une puissance enracinée dans une politique de cohésion66. Dans le cas du culte héroïque, on peut parler d’une part, de la peur de la perte de l’identité locale et d’autre part, de la peur de la tyrannie. Ainsi, à Athènes, Harmodios et Aristogiton, qui ont libéré la cité de la tyrannie en tuant Hipparque, ont été honorés par un culte héroïque67. À Sicyone, Aratos recevait des honneurs héroïques pour avoir libéré la cité des tyrans et plus tard des Lacédémoniens68 : une fois de retour en compagnie d’autres exilés sicyoniens et de mercenaires argiens et après avoir libéré Sicyone du tyran Nicoclès, Aratos rétablit l’égalité civique dans la cité69 ; devenu général de l’armée achéenne, il libéra Corinthe des Macédoniens et battit les Lacédémoniens qui occupaient Pellène70 ; après son succès dans le Péloponnèse, il libéra des Macédoniens le Pirée, Mounichie, Salamine et Sounion, occupa Mantinée appartenant aux Lacédémoniens, et enfin rétablit la démocratie à Argos71. Mais ce grand homme commit une erreur fatale : pour affronter Cléomène et les Lacédémoniens, il s’allia aux Macédoniens et Philippe le fit assassiner72. Aratos mourut à Égion et Apollon ordonna de transférer ses restes de l’Achaïe à Sicyone et de l’inhumer dans le plus bel endroit de la ville en l’honorant comme fondateur et sauveur73. Plutarque nous apprend que les habitants de Sicyone procédaient à des sacrifices annuels sur son hérôon pour célébrer sa naissance et leur libération des tyrans74. La fête de la libération était appelée Sotéria (« Délivrance ») et elle était célébrée le jour-anniversaire du retour d’Aratos et des démocrates exilés ainsi que de l’expulsion de Nicoclés, le dernier tyran, en 251 av. J-C. La relation cultuelle d’Aratos et des Sotéria montre à l’évidence que le héros est devenu un symbole de la délivrance de Sicyone de la tyrannie. On comprend désormais mieux pourquoi, selon Plutarque, il était honoré en tant que fondateur et sauveur : fondateur de l’ordre socio-politique et sauveur de la démocratie, en tant que libérateur de la tyrannie et des Macédoniens. L’Arateion, situé (apparemment non par hasard) près de la maison de l’ancien tyran Cléon, est devenu un symbole important de l’histoire locale75.
16Par ailleurs, le culte héroïque était en relation étroite avec le développement de l’idée de l’identité locale et un mort au prestige exceptionnel faisait partie de l’histoire d’un endroit. Son sanctuaire était un témoignage de cette histoire et les honneurs héroïques étaient une coutume locale pour les habitants qui s’assuraient ainsi l’aide de leur ancêtre face aux dangers qui menaçaient la cité. Ce n’est pas un hasard si le culte héroïque commence à l’époque géométrique, c’est-à-dire au moment de la naissance de la cité grecque76. Il semble que le témoignage le plus ancien d’un culte héroïque en Attique se trouve dans l’Iliade ; Athènes est définie comme le démos d’Érechthée que les jeunes Athéniens honorent chaque année par des sacrifices d’animaux77. Le mythe et le culte central des héros autochtones, comme Érechthée honoré sur l’Acropole78, des héros éponymes, comme Arcas en Arcadie79 ou Lacédémon honoré sur son hérôon situé à proximité de Therapné80, des héros fondateurs d’une cité comme le fondateur de Mycènes Persée81 et Patreus honoré sur l’agora de la ville homonyme82, ou des héros fondateurs d’une colonie comme Phalanthos fondateur de Tarente83, des héros réformateurs comme Thésée84 ou Lycurgue85, ainsi que des rois légendaires comme Éaque en Égine86 ou Augias en Élide87, sont étroitement liés à l’identité locale de chaque cité grecque, rappelant la multitude ancestrale de cités à l’identité à la fois différente et commune suivant les circonstances. Il ne faut pas oublier que les Spartiates croyaient que Phobos était partie prenante de leur constitution88. Nicolas Richer a souligné le caractère politique des propos de Plutarque sur le Phobos spartiate et son association avec les éphores, alors que Marie-Madeleine Mactoux associe l’établissement de son culte avec la maîtrise des crises sociales89. On peut dire que mythe et culte des héros fonctionnaient également comme réponses aux besoins politiques et sociales de la cité grecque.
⁂
17Pour conclure, le sentiment de la peur semble bien être lié à l’institution du culte héroïque dans la cité grecque. On craignait les guerres et les invasions, la tyrannie et la perte de l’identité locale. Autrement dit, on craignait la perte de la liberté et de l’indépendance, qui étaient associées à l’idée du passé ancestral représenté par les héros locaux90. Excepté cette peur de nature politique et sociale, bien liée à la peur collective pour la cohésion civique91, il y avait également la peur « religieuse ». La crainte des dieux et des héros, des oracles, des épidémies, de la maladie et de l’inconnu de l’avenir, ou de la manifestation d’une activité inhabituelle est une aire de la peur vécue tant au niveau individuel qu’au niveau social. Outre la honte et le respect (aidôs/sebas), sentiments bien liés à la crainte face aux êtres surnaturels92, la peur du châtiment pouvait donner naissance à un culte héroïque. Par ailleurs, respect et peur sont souvent stimulés simultanément, puisqu’ils étaient des sentiments étroitement liés au culte des héros. Bizarrement, ce dernier « fonctionnait » pour les Grecs comme un moyen de gérer ou encore mieux de vaincre le sentiment de la peur.
Notes de bas de page
1 Souda, s.v. Deimos ; voir Hésiode, Théogonie, 933-934 ; voir aussi Nonnos de Panopolis, Dionysiaques, II, 414-415 ; XX, 35 ; XXV, 150 ; XXVII, 335 ; Pausanias, IX, 36.
2 Homère, Iliade, IV, 436 ; V, 738 ; XI, 36 ; XIII, 298-300 ; XV, 119. Sur le vocabulaire de la crainte dans l’épopée homérique, voir J. Harkemanne, « Phobos dans la poésie homérique », RPLL, 1, 1967, p. 47-94 ; R. Zaborowski, La Crainte et le courage dans l’Iliade et l’Odyssée. Contribution lexicographique à la psychologie homérique des sentiments, Varsovie, Stakroos, 2002. Sur la personnification de la peur, voir H.A. Shapiro, Personifications in Greek Art: The Representation of Abstract Concepts, 600-400 B.C., Zurich, Akanthus, 1993, p. 208-215.
3 L. Deubner, « Phobos », MDAI(A), 27, 1902, p. 253-264 ; B. C. Dietrich, Death, Fate and the Gods, Londres, Athlone Press, 1965, p. 341-343.
4 Pausanias, V, 19, 1 ; voir aussi Pseudo-Hésiode, Le Bouclier, 139 ; 191 ; 216 ; 450. Pour le bouclier d’Achille, voir Quintus de Smyrne, Guerre de Troie, 10, 51. Sur la relation du phobos homérique avec la fuite, voir J. Gruber, Über einige abstrakte Begriffe des frühen Griechischen, Meisenheim am Glan, Anton Hain, 1963, p. 15-39.
5 Eschyle, Les Sept contre Thèbes, 41-42 ; 497 ; Syll.3 1122 (= IG XIV, 268).
6 Plutarque, Vie de Cléomène, 8-9 ; voir S. Wide, Lakonische Kulte, Leipzig, Teubner, 1893, p. 275-276 ; P. H. Epps, « Fear in Spartan Character », CP, 28, 1933, p. 12-29 ; H. Michell, Sparta, Cambridge, Cambridge University Press, 1964, p. 270-273. Sur le culte de Phobos, voir Stesichore, fr. 207 ; Plutarque, Vie de Thésée, 27.
7 Hérodote, IV, 203 ; VII, 43 ; VIII, 38 ; voir W. K. Pritchett, The Greek State at War, t. III : Religion, Berkeley/Los Angeles/Londres, University of California Press, 1979, p. 162-163 ; voir aussi A. Serghidou, « Les deux temps de la peur. Crainte immédiate et peur d’asservissement prospectif. Le cas d’Hérodote », dans A. Serghidou (dir.), Peur de l’esclave, peur de l’esclavage en Méditerranée ancienne : discours, représentations, pratiques/Fear of Slaves, Fear of Enslavement in the Ancient Mediterranean: Discourse, Representations, Practices, Besançon, Presses universitaires de Franche-Comté, 2007, p. 217-230.
8 P. Borgeaud, Recherches sur le dieu Pan (Bibliotheca Helvetica Romana, 17), Genève, Institut suisse de Rome, 1979, p. 52-53.
9 Pour cette émotion en général, voir M. Viegnes (dir.), La Peur et ses miroirs, Paris, Imago, 2009.
10 Le héros était apaisé par des offrandes et des sacrifices qui étaient généralement accomplis à intervalles réguliers, V. Pirenne-Delforge et E. Suárez de la Torre (dir.), Héros et héroïnes dans les mythes et les cultes grecs (Kernos, suppl. 10), Liège, Presses universitaires de Liège, 2000 (avec bibliographie) ; G. Ekroth, The Sacrificial Rituals of Greek Hero-Cults in the Archaic to the Early Hellenistic Periods (Kernos, suppl. 12), Liège, Presses universitaires de Liège, 2002.
11 Je précise que quand j’utilise le terme « héros », j’entends les figures héroïques des deux sexes, les héroïnes et les héros, ainsi que les enfants héros.
12 Sur les épiphanies des héros dans les batailles, voir F. Pfister, RE, suppl. 4, 1924, col. 277-323, s.v. Epiphanie ; E. Kearns, The Heroes of Attica (BICS, suppl. 57), Londres, University of London/Institute of Classical Studies, 1989, p. 3 et 44-47.
13 Plutarque, Vie de Thésée, 35.
14 Dans la frise supérieure d’un cratère attique à figures rouges représentant le monde souterrain, Thésée et Pirithoos sont assis au centre, et Hadès, Héraclès et Hermès observent la scène : cratère en calice attique, datant de 440 av. n. è., New York, Metropolitan Museum 08.258.21 ; Beazley, ARV, p. 1228, no 12.
15 Pindare, Néméennes, III, 22.
16 Trad. J.-J. Maffre, L’Art grec, Paris, Presses universitaires de France, 2001 (1986), p. 98.
17 Pour la peinture de la Stoa Pœcile, voir N. Loraux, « “Marathon” ou l’histoire idéologique. À propos des paragraphes 20 à 26 de l’oraison funèbre en l’honneur des soldats qui allèrent au secours des Corinthiens (attribuée à Lysias) », REA, 75, 1973, p. 13-42.
18 Pausanias, I, 15, 3 ; 32, 4-5. Sa présence dans la peinture devait être une invention athénienne qui s’est certainement popularisée, puisqu’il recevait un culte très ancien dans une région dont le peuple affirmait avoir été le premier qui aurait offert des honneurs divins à Héraclès (ibid., I, 15, 3 ; 32, 4). Par ailleurs, d’après Hérodote, avant la bataille, les Athéniens campèrent dans l’Héracleion local, et après leur victoire (ils campèrent) dans l’Héracleion de Kynosarges, Hérodote, VI, 108, 1 ; VI, 116, 1.
19 Pausanias, I, 32, 4.
20 E. Kearns, op. cit., p. 45 ; voir encore M. H. Jameson, « Sacrifice before Battle », dans V. D. Hanson (dir.), Hoplites: The Classical Greek Battle Experience, Londres/New York, Routledge, 1991, p. 197-227, 214. D’après la Souda, il était fils d’Apollon et, d’après Eumélos, d’Épopée, descendant d’Hélios, alors que Philostrate désigne Héraclès et une femme locale comme ses parents, Eumélos, 451, fr. 1 (éd. F. Jacoby) = Pausanias, II, 1, 1 ; Philostrate, Vies des Sophistes, 238. E. Kearns suppose que la version selon laquelle le héros éponyme de Marathon donna sa vie pour la victoire de son armée serait une récupération de la bataille de Marathon. Mais U. Kron, « Patriotic Heroes », dans R. Hägg (dir.), Ancient Greek Hero Cult (Acta Instituti Atheniensis Regni Sueciae 8o, 16), Stockholm, Paul Åströms förlag, 1999, p. 61-83, 63, n’est pas satisfaite de cette proposition qui n’explique pas pourquoi, dans cette tradition, il reste un héros ennemi et étranger à Athènes. Selon elle, et dans la tradition des assistants héroïques et divins à Marathon, la présence du héros local éponyme de la plaine s’explique uniquement par ses liens au champ de bataille.
21 Ce dernier a vu également un trophée en l’honneur d’Échétlos, Pausanias, I, 32, 4-5 ; voir W. S. Ferguson, « The Attic Orgeones », HThR, 37, 1944, p. 61-140, 76.
22 Pausanias, I, 32, 4-5 ; voir H. W. Parke et D. E. W. Wormell, The Delphic Oracle, t. I. : The History, Oxford, Blackwell, 1956, p. 90. Pour Échétlos, voir M. H. Jameson, « The Hero Echetlaeus », TAPhA, 82, 1951, p. 49-64.
23 Hérodote, VI, 117 ; voir E. Kearns, op. cit., p. 44-46.
24 T. Holscher, Griechische Historienbilder des 5. und 4. Jahrhunderts v. Chr., Würzburg, Triltsch, 1973, p. 43, 58 et 65 ; W. Raeck, Zum Barbarenbild in der Kunst Athens im 6. und 5. Jahrhundert v. Chr., Bonn, Habelt, coll. « Habelts Dissertationsdrucke, Reihe Klassische Archaologie », 14, 1981, p. 103 ; contra, R. E. Whycherley, The Athenian Agora, t. III : Literary and Epigraphical Testimonia, Princeton (NJ), American School of Classical Studies at Athens, 1957, p. 31-47.
25 E. B. Harrison, « The South Frieze of the Nike Temple and the Marathon Painting in the Painted Stoa », AJA, 76, 1972, p. 353-378, 368 ; contra, U. Kron, art. cité, p. 65.
26 A. Jacquemin précise qu’habituellement l’épiphanie héroïque se laisse voir sans danger par ceux à qui elle est favorable : A. Jacquemin, Guerre et religion dans le monde grec (490-322 av. J.-C.), Paris, Société d’édition d’enseignement supérieur, 2000, p. 38, n. 7.
27 Hérodote, VIII, 38-39. D’après la tradition éginète, le vaisseau apportant les reliques d’Éaque fut le premier à engager la bataille, ibid., VIII, 64 et 83.
28 Plutarque, Vie de Thémistocle, 15. De plus, l’exilé athénien Dikaios qui accompagnait l’armée perse, vit un nuage de poussière venant d’Éleusis et reconnut les paroles de l’hymne chanté lors des Mystères : pour lui, ce fut le signe que les divinités éleusiniennes se portaient au secours des Grecs (Hérodote, VIII, 65). Au début de la bataille, une apparition féminine au milieu des navires fut identifiée par les Athéniens comme Athéna (ibid., VIII, 84). Il est intéressant de remarquer qu’après avoir relevé l’aide des fils d’Éaque, Hérodote (VIII, 81) mentionne la légende d’une héroïne intervenant dans la bataille : il parle d’un fantôme féminin qui apparaît et pousse les Grecs à attaquer. Il s’agit de la seule mention d’une figure guerrière féminine mythique participant aux guerres médiques et provoquant la peur aux ennemis.
29 Hérodote, VIII, 121.
30 E. Kearns, op. cit., p. 46.
31 Pausanias, I, 26, 1.
32 Fils de Poséidon et de l’héroïne locale de l’île. Il était même le héros éponyme le plus ancien de l’île, parce que Strabon nous apprend que l’île se nommait primitivement Cychreia (Strabon, IX, 393). Sur le lieu de l’apparition fut élevé un sanctuaire dédié à Artémis (Pausanias, I, 36, 1). Pour Cychreus en général, voir E. Kearns, « Saving the City », dans O. Murray et S. Price (dir.), The Greek City: From Homer to Alexander, Oxford/New York, Oxford University Press/Clarendon Press, 1990, p. 323-344, 323-326.
33 Thémistocle, dans Hérodote, VIII, 109.
34 Une telle punition semble très normale puisque, outre la relation qu’entretient Artémis avec la nature sauvage, une autre caractéristique de la déesse était sa fonction de courotrophos (voir Pausanias, III, 16, 9-11 ; 17, 1). Et elle aidait à la délivrance (ou pas) de la femme lors de l’accouchement.
35 Pausanias, VIII, 23, 7. Le motif de la pendaison était souvent associé à Artémis en relation avec le suicide d’une jeune fille (en réponse à un viol ou une volonté d’y échapper), N. Loraux, « Le corps étranglé. Quelques faits et beaucoup de représentations », dans Du châtiment dans la cite (Publications de l’École française de Rome, 79), Rome, École française de Rome, 1984, p. 195-224 ; J. Larson, Greek Heroine Cults, Wisconsin, Wisconsin Studies in Classics/University of Wisconsin Press, 1995, p. 118. Le lien d’Artémis avec les arbres est attesté dans tout le Péloponnèse : I. Chirassi, Miti e culti arcaici di Artemis nel Peloponneso e nella Grecia centrale, Trieste, Arti grafiche Smolars, 1964, p. 5-6.
36 Voir Diodore de Sicile, IV, 46, 1-3 ; 50, 6-7 ; 54, 1-6 ; Élien, Histoire variée, V, 21 ; Philostrate, Héroïque, LIII, 4 ; Pausanias, II, 3, 6-7.
37 Par exemple, voir Plutarque, Vie de Cimon, 19, 4.
38 Sur la lapidation, voir M. Gras, « Cité grecque et lapidation », dans Du châtiment dans la cité, op. cit., p. 75-89.
39 Par exemple, voir Pausanias, II, 32, 2.
40 Pausanias, II, 3, 6-7 ; voir Eumolpos, fr. 3 (éd. A. B. Drachmann) = Pausanias, II, 3, 8-10.
41 Voir Scholies à Pindare, Olympiques, XIII, 74 = Eumolpos, fr. 2 (éd. A. B. Drachmann).
42 Euripide, Médée, 1371.
43 Voir Lycophron, Alexandra, 1318 ; voir aussi C. O. Pache, Baby and Child Heroes in Ancient Greece, Urbana/Chicago, University of Illinois Press, 2004, p. 12-17.
44 A. Brelich, « I figli di Medeia », SMSR, 30, 1959, p. 213-254, 247-248. Fléau qui pouvait être identifié, selon M. Delcourt, à l’infertilité en général, stérilité de la terre et des mères, comme dans le cas du loimos au début d’Œdipe Roi : M. Delcourt, Stérilités mystérieuses et naissances maléfiques dans l’Antiquité classique, Liège, Faculté de philosophie et lettres, 1938, p. 10-16 ; voir Sophocle, Œdipe Roi, 26-27 ; Scholies à Euripide, Médée, 264 = Creophylos, 417, fr. 3 (éd. F. Jacoby).
45 Scholies à Euripide, Médée, 1382 ; voir aussi Diodore de Sicile, LV, 1-2.
46 Cf. supra, n. 36.
47 Pausanias, II, 3, 7. Pour un autre deima dans la Périégèse, voir ibid., II, 7, 7 (institution du culte de Peitho, la personnification de la Persuasion, à Sicyone). Pour le deima, voir M. Patera, Figures grecques de l’épouvante de l’antiquité au présent. Peurs enfantines et adultes (Mnemosyne, suppl. 376), Leyde/Boston, Brill, 2015, p. 125-127.
48 Scholies à Lycophron, Alexandra, 175 et 1318 ; Hygin, Fables, XXIII, 9 ; Apollodore, I, 9, 28.
49 C. O. Pache, op. cit., p. 46.
50 Pausanias, VIII, 2, 4 ; Origène, Contre Celse, VII, 35 ; voir A. Verbanck-Piérard, « Les héros guérisseurs : des dieux comme les autres ! À propos des cultes médicaux dans l’Attique classique », dans V. Pirenne-Delforge et E. Suárez de la Torre (éd.), Héros et héroïnes, op. cit., p. 281-332. Sur l’émotion de l’espoir pour la guérison de la maladie, voir P. Martzavou, « Dream, Narrative and the Construction of Hope in the Healing Miracles of Epidauros », dans A. Chaniotis (dir.), Unveiling Emotions. Sources and Methods for the Study of Emotions in the Greek World, Stuttgart, Franz Steiner, 2012, p. 177-204.
51 Homère, Odyssée, X, 492-495 ; XI, 29 et 90 ; XXIII, 323 ; voir J. Dumortier, « L’évocation des morts dans l’Odyssée », BAGB, 1954/3, p. 27-40.
52 Apollodore, III, 6, 8, 4 ; voir aussi Pindare, Néméennes, IX, 24 ; Eschyle, Les Sept contre Thèbes, 588 ; Sophocle, Électre, 839-841 ; Euripide, Les Suppliantes, 501 et 928 ; Pausanias, I, 34, 2. Sur la disparition de Trophonios dans la terre de Lébadée, voir Pausanias, IX, 37, 5-6 ; voir aussi Charax de Pergame, 103, fr. 5 (éd. F. Jacoby) ; J. Tzétzès, scholie à Aristophane, Les Nuées, 506a-508a (éd. D. Holwerda) ; Télégonie, apud Proclos, Chresthomathie, 309-312. Sur l’Amphiaraeion, voir A. Petropoulou, « The Eparche Documents and the Early Oracle at Oropus », GRBS, 22, 1981, p. 39-63.
53 H. von Ehrenheim, Greek Incubation Rituals in Classical and Hellenistic Times (Kernos, suppl. 29), Liège, Presses universitaires de Liège, 2015 ; A. Petsalis-Diomidis, « The Virtual and the Palimpsest: Space and Votives at the Hellenistic Amphiareion at Oropos », dans T. Myrup Kristensen et W. Friese (dir.), Excavating Pilgrimage: Archaeological Approaches to Sacred Travel and Movement in the Ancient World, Abingdon, Oxon/New York, Routledge, 2017, p. 106-129.
54 Aristide, I, p. 78 (éd. W. Dindorf) ; Scholie à Lycophron, 440, 23-25 ; sur la résidence souterraine d’Amphilochos en Acarnanie et de son concurrent Mopsos en Cilicie (Plutarque, Sur la disparition des oracles, 45, Œuvres morales, 434D-E), voir Origène, Contre Celse, III, 34 ; le même auteur dit d’Amphiaraos, de Mopsos et d’autres qu’ils étaient des hommes considérés comme des dieux (ibid., VII, 35).
55 Homère, Odyssée, X, 492.
56 Plutarque, Sur la disparition des oracles, 44, Œuvres morales, 434C. Calchas continuait à exercer ses activités prophétiques à travers son tombeau situé en Apulie (Strabon, VI, 284) ; le guerrier Protésilaos avait un sanctuaire comportant un oracle à Chersonèse, où les malades venaient pour obtenir son aide (Hérodote, VII, 33 ; IX, 116-118) ; à Eleus, il était honoré comme un dieu (Pausanias, I, 34, 2 ; III, 4, 6).
57 Voir G. Ekroth, op. cit. ; voir aussi G. Ekroth, « Pausanias and the Sacrificial Rituals of Greek Hero-Cults », dans R. Hägg (dir.), op. cit., p. 145-158 ; K. Stratiki, « Le culte des héros grecs chez Pausanias », BAGB, 2002/1, p. 70-93.
58 Pausanias, IX, 39, 9-11. Pour une autre description de l’oracle de Trophonios, voir Scholies à Aristophane, Les Nuées, 508 ; Lucien, Dialogues des morts, III, 2 ; voir aussi Strabon, IX, 414.
59 Sur la consultation de Trophonios, voir R. J. Clark, « Trophonios: The Manner of his Revelation », TAPhA, 99, 1986, p. 63-75 ; P. Bonnechere, Trophonios de Lébadée. Cultes et mythes d’une cité béotienne au miroir de la mentalité antique (Religions in the Graeco-Roman World, 150), Leyde/Boston, Brill, 2003.
60 Sur la crainte des dieux, voir A. Chaniotis, « Constructing the Fear of Gods: Epigraphic Evidence from Sanctuaries of Greece and Asia Minor », dans A. Chaniotis (dir.), Unveiling Emotions, op. cit., p. 205-234 ; voir aussi É. Matricon-Thomas, « La “peur des dieux” à Athènes pendant la guerre du Péloponnèse : superstition et scrupules religieux », dans S. Coin-Longeray et D. Vallat (dir.), Peurs antiques, Saint-Étienne, Publications de l’université de Saint-Étienne, 2015, p. 189-202 ; P. Borgeaud, « La crainte des dieux », dans P. Borgeaud, Exercices d’histoire des religions. Comparaison, rites, mythes et émotions (Jerusalem Studies in Religion and Culture, 20), éd. D. Barbu et P. Matthey, Leyde/Boston, Brill, 2016, p. 312-330.
61 L. R. Farnell, Greek Hero Cults and Ideas of Immortality, Oxford, Clarendon Press, 1970 (1921), p. 71-73 (Taraxippos comme « Sondergott ») ; M. Delcourt, Légendes et cultes des héros en Grèce, Paris, Presses universitaires de France, 1942, p. 62-66.
62 Il y avait aussi « Ceux qui attrapent les mouches », comme le Myiagros à Aliphera d’Arcadie, où les habitants prothuousin à lui lors de la panêguris en l’honneur d’Athéna (Pausanias, VIII, 26, 7) et le Mycores en Élide, ou le « Gardien » Phylacos à Delphes qui était, comme son nom le suggère, un héros qui gardait le sanctuaire près de l’entrée (Hérodote, VIII, 38 ; Pausanias, X, 8, 7 ; 23, 3).
63 Pausanias, VI, 20, 15 et 17 (trad. J. Pouilloux). Pour l’Isthme, voir ibid., VI, 20, 18.
64 Ibid., VI, 20, 18.
65 Ibid., VI, 20, 19. Pausanias s’était étonné de ne pas trouver de Taraxippos à Némée, puisque personne n’avait identifié le fait naturel avec l’autel ou la tombe d’un héros. Sur les autres références relatives à Taraxippos, voir M. Visintin, La vergine e l’eroe. Temesa e la leggenda di Euthymos di Locri, Bari, Edipuglia, 1992, p. 91, n. 52.
66 J.-P. Vernant, Les Origines de la pensée grecque, Paris, Presses universitaires de France, 1990 (1962), p. 63. Sur le deima et Peitho, voir supra, n. 47.
67 Hérodote, V, 55 ; VI, 109 ; Thucydide, I, 20 ; VI, 54 ; Aristote, Constitution d’Athènes, XVIII ; Démosthène, (XIX) Sur les forfaitures de l’ambassade, 280 ; Pollux, VIII, 91.
68 Plutarque, Vie d’Aratos, 2 et 34. Pour la participation d’Aratos à la libération de Sicyone du joug spartiate, voir ibid., 41 ; Pausanias, II, 8, 5.
69 Vers 251 av. n. è., Plutarque, Vie d’Aratos, 2.
70 Ibid., 18.
71 Mounichie et d’autres dépendances d’Athènes ont été libérées des Macédoniens en 229 av. n. è. ; pour Diogène et ses mercenaires, voir Pausanias, II, 8, 6 ; Plutarque, Vie d’Aratos, 34.
72 Pour la mort d’Aratos, voir Plutarque, Vie d’Aratos, 52. Pour le roi autoritaire de Sparte Cléomène, voir Plutarque, Vie de Cléomène, 11.
73 Pausanias, II, 8, 2-9, 4 ; Plutarque, Vie d’Aratos, 53.
74 Plutarque, Vie d’Aratos, 53 ; Polybe, VII, 14 ; voir aussi Pausanias, II, 9, 4. Les sacrifices en ces deux occasions étaient réalisés par le prêtre de Zeus Sotér avec la participation des enfants, des éphèbes et des bouleutai couronnés.
75 Pausanias, II, 8, 1. Pour son culte à Trézène, voir IG IV, 788.
76 Voir F. de Polignac, La Naissance de la cité grecque. Cultes, espace, et société, viiie-viie siècles avant J.-C., Paris, La Découverte, 1984.
77 Homère, Iliade, II, 546-551 ; voir aussi I, 100 ; 147 ; 386 et 444 ; VI, 380 et 385 : il s’agit d’une peur collective face à un héros rendu furieux par le manque de sacrifices en son honneur.
78 Pausanias, I, 26, 5.
79 Ibid., VIII, 9, 4 ; voir M. Jost, Sanctuaires et cultes d’Arcadie, Paris, Vrin, 1985, p. 449.
80 Pausanias, III, 20, 2.
81 Ibid., II, 15, 5. Sur son sanctuaire, voir M. H. Jameson, « Perseus, the Hero of Mycenae », dans R. Hägg et G. Nordquist (dir.), Celebrations of Death and Divinity in the Bronze Age Argolid (Acta Instituti Atheniensis Regni Sueciae 4o, 40), Stockholm, Paul Åströms förlag, 1990, p. 213-223.
82 Pausanias, VII, 20, 5 ; voir Y. Lafond, « Pausanias et le panthéon de Patras : l’identité religieuse d’une cité grecque devenue colonie romaine », dans V. Pirenne-Delforge (dir.), Les Panthéons des cités : des origines à la Périégèse de Pausanias (Kernos, suppl. 8), Liège, Presses universitaires de Liège, 1998, p. 195-208.
83 Phalanthos, exilé de Tarente, ne possédait pas de tombeau sur l’agora de la ville ; ses cendres furent répandues sur l’agora de Tarente, afin de garantir l’existence de la colonie qu’il avait fondée, Justin, III, 4 ; sur une autre version du mythe selon laquelle il fut enterré à Brindes, voir Strabon, VI, 282. Voir aussi M. Corsano, « Sparte et Tarente : le mythe de fondation d’une colonie », RHR, 196/2, 1979, p. 113-140.
84 L’image de Thésée comme souverain démocratique est donnée par Plutarque, mais il s’agit normalement d’une réflexion qui remonte au ve siècle, Plutarque, Vie de Thésée, 24, 25 et 35, 7 (voir aussi le commentaire de F. Jacoby, Die Fragmente der griechischen Historiker, vol. 1, Leyde, Brill, 1964, p. 309). Notons que Plutarque cite une Théséide (Vie de Thésée, 28, 1), que C. Calame date du dernier tiers du vie siècle, l’époque du grand mouvement de reprise de la tradition homérique par les rhapsodes (Thésée et l’imaginaire athénien. Légende et culte en Grèce antique, Lausanne, Payot, 1996, p. 405). D’après H. J. Walker, la promotion de la légende théséenne se situe après l’expulsion des tyrans (H. J. Walker, « The Early Development of the Theseus Myth », RhM, 138, 1995, p. 1-33). En revanche, la chronique du Marbre de Paros attribue à Thésée le synœcisme et la création de la constitution démocratique (Marbre de Paros, 239, A 20 [éd. F. Jacoby]).
85 Xénophon (Constitution des Lacédémoniens, X, 8) écrit que tout le monde admire Sparte, mais que personne ne serait prêt à imiter des institutions dues, selon lui, à Lycurgue. Déjà au ve siècle, selon Hérodote, la Pythie s’était demandée si Lycurgue était un dieu ou un homme en l’interpellant par un surnom divin, Hérodote, I, 65-66. Plutarque souligne aussi sa nature divine en faisant état d’un temple à Sparte et de sacrifices annuels en son honneur, Plutarque, Vie de Lycurgue, 31.
86 Pindare, Isthmiques, VIII, 22-24 ; Isocrate, Euagoras, 14-15 ; Pausanias, II, 29, 2.
87 Homère, Iliade, II, 624 et 629 ; XI, 300 ; Apollodore, II, 5, 5 ; Hygin, Fables, XXX ; voir aussi Diodore de Sicile, IV, 13, 3 ; Sénèque, Hércule furieux, 247 ; Scholies à Pindare, Olympiques, X, 32.
88 Plutarque, Vie de Cléomène, 9, 1.
89 N. Richer, Les Éphores. Études sur l’histoire et sur l’image de Sparte (viiie-iiie siècles avant Jésus-Christ), Paris, Publications de la Sorbonne, 1998, p. 226-232 ; M.-M. Mactoux, « Phobos à Sparte », RHR, 3, 1993, p. 259-304.
90 Pour les héros, l’idée de la liberté et celle de l’identité locale, voir K. Stratiki, « Les héros grecs comme personnification de la liberté dans la Périégèse de Pausanias », BAGB, 2003/2, p. 92-112 ; Eadem, « Religion et identité locale. Le culte héroïque dans la Périégèse de Pausanias », Bandue. Revista de la Sociedad Española de Ciencias de las Religiones, 8, « Identidad e identitades religiosas », 2014-2015, p. 9-15.
91 D. Rosenbloom, « Shouting “Fire” in a Crowded Theater: Phrynichus’ Capture of Miletos and the Politics of Fear in Early Attic Tragedy », Philologus, 137, 1993, p. 159-196.
92 Plutarque, Vie de Cléomène, 9, 5 ; Diogène Laërce, VII, 112-114 ; voir D. Cairns, The Psychology and Ethics of Honor and Shame in Ancient Greek Literature, Oxford/New York, Oxford University Press/Clarendon Press, 1993, p. 236-237.
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