Chapitre VIII. Peur et divination : l’interprétation des songes
p. 117-130
Texte intégral
1La littérature divinatoire semble avoir été peu exploitée par les travaux portant sur l’histoire des émotions dans l’Antiquité1. Pourtant, pour ne parler que de l’émotion qui fait l’objet du présent volume, la divination a partie liée avec la peur, puisque c’est souvent par peur que l’on y recourt, que le signe observé peut inspirer la peur, que son interprétation peut la dissiper ou au contraire l’aggraver, et que, dans le cas d’une des techniques divinatoires – peut-être la plus intéressante en l’occurrence –, à savoir l’onirocritique, la peur peut même faire partie intégrante du signe à interpréter. On se propose, dans les pages qui suivent, d’explorer ces diverses manières dont l’émotion en question s’articule avec la pratique divinatoire. On se concentrera pour ce faire sur la littérature divinatoire, c’est-à-dire les textes – traités ou manuels – exposant la pratique, de façon plus ou moins théorique, bien qu’à proprement parler les manuels de cléromancie ne contiennent pas d’exposé, mais des séries de prédictions.
2Il convient ici de parler brièvement du vocabulaire2. Le principal moyen lexical d’expression de la peur dans les textes qui nous intéressent est la famille de φόβος et φοβοῦμαι3. Vient ensuite, en termes de fréquence, celle de δέος et δέδοικα4. Il faut adjoindre, de façon marginale, le verbe εὐλαβοῦμαι, dont le sens d’origine et le plus fréquent même à l’époque impériale est « faire attention, prendre garde, être prudent ». En effet, il est manifestement employé dans l’Interprétation des songes d’Artémidore de Daldis pour désigner le sentiment de la crainte et non l’action de se garder d’un objet de crainte5. Ces emplois correspondent à une évolution sémantique, au reste mal recensée dans les dictionnaires, dont nous avons quelques traces entre l’époque hellénistique et les premiers siècles de notre ère, dans la littérature et chez les lexicographes6, mais qui ne semble pas attestée après l’Antiquité, εὐλαβοῦμαι et sa famille évoluant vers l’idée de crainte révérencieuse et de piété7. Les relations entre ces familles n’ont pas paru devoir être explorées de façon détaillée, mais, chez Artémidore par exemple, δέος/δέδοικα et εὐλαβοῦμαι sont visiblement des variantes de φόβος/φοβοῦμαι, respectivement archaïsante8 et néologisante. Par ailleurs, le vocabulaire de l’anxiété (ἀγωνία et ἀγωνιῶ) et de l’inquiétude et de la préoccupation (φροντίς et sa famille) est souvent employé dans des contextes proches de celui de la peur à proprement parler9. La question des frontières sémantiques entre ces différents champs lexicaux n’a pas semblé mériter un examen à part dans le cadre de la présente étude, pas plus que celle des degrés de la peur (crainte légère, peur, terreur, etc.).
3Des diverses pratiques divinatoires qui ont fait l’objet d’un exposé écrit dans l’Antiquité – essentiellement l’astrologie, la physiognomonie, la palmomantique et la cléromancie –, c’est l’onirocritique qui paraît le champ d’étude le plus intéressant en la matière. Si l’on excepte l’onirocritique et la physiognomonie, en effet, c’est le caractère apparemment impersonnel et fortuit du signe, détaché de tout affect humain, qui en détermine la puissance divinatoire et en permet donc l’interprétation. Il suffira de penser aux configurations astrales pour l’astrologie, aux mouvements involontaires des parties du corps pour la palmomantique ou au choix d’un nombre au hasard pour la cléromancie. Dans ces techniques divinatoires, donc, la peur n’intervient que comme résultat de l’interprétation, événement correspondant au signe interprété. Ainsi, par exemple, selon Ptolémée, Saturne signifie dans telle configuration l’exil, l’impuissance, l’emprisonnement, le deuil, la peur et la mort10. Dans le corpus palmomantique, « si la partie droite du cou tressaute, (cela signifie) peur pour l’homme libre, maladie pour l’esclave ; pour tous les autres, c’est bon11 ». Dans les Sortes Astrampsychi, on a fréquemment l’impératif « aie peur » ou « n’aie pas peur12 ». La physiognomonie, quant à elle, est une technique divinatoire à part, puisqu’elle a avant tout pour objet de révéler le caractère ou les intentions d’un individu, et non un événement futur en général13. La peur y intervient donc souvent comme cause des expressions trahissant tel ou tel tempérament ou projet, et l’un des caractères récurrents est celui du lâche, δειλός14.
4Le signe onirique a pour particularité d’être une petite histoire, où les émotions peuvent jouer un rôle important pour l’interprétation comme nous le verrons. On rappellera que le témoin le plus important de cette technique divinatoire, l’Interprétation des songes d’Artémidore de Daldis déjà citée, consiste pour l’essentiel en un recueil de thèmes oniriques, c’est-à-dire de fragments de songe, pourvus d’une interprétation selon les diverses facettes de leur contenu, mais aussi selon le contexte du rêve, c’est-à-dire aussi bien la qualité du rêveur (homme/femme, marié/célibataire, riche/pauvre, jeune/vieux, homme libre/esclave, l’occupation, etc.) que les circonstances du rêve (rêveur en bonne santé/malade, endetté, en procès, en voyage ou dont un proche est en voyage, qui veut passer inaperçu, etc.). Les songes entiers, ou du moins présentés comme tels, se trouvent presque tous, accompagnés de leur accomplissement, dans le dernier livre du traité. Ces indications permettent de comprendre que, chez Artémidore, la peur intervient non seulement comme accomplissement, comme dans les autres traités de divination, mais aussi comme cause de l’accomplissement15 et comme explication de l’interprétation16, pour définir le consultant et les circonstances dans lesquelles il fait le rêve, y compris la réaction du rêveur au réveil, et pour décrire le contenu même du songe. Elle intervient aussi, comme nous le verrons, à propos de la distinction entre rêve non prédictif, ἐνύπνιον, et songe prédictif, ὄνειρος, le seul qui intéresse Artémidore. On ne sera donc pas surpris qu’Artémidore se taille la part du lion dans le présent exposé.
5Il est toutefois un aspect de la peur en contexte divinatoire qui est absent d’Artémidore – et pour cause : la peur qu’inspire parfois la consultation elle-même. L’exemple le plus connu est sans doute celui de l’oracle de Trophonios, à Lébadée17 : Pausanias dit ainsi qu’après la consultation, le consultant est « encore sous l’emprise de la crainte et incapable de se connaître lui-même ni les personnes proches », et incapable de rire18. Cet état était même devenu proverbial : « Il est allé consulter Trophonios : pour les personnes qui ne rient pas et gardent les sourcils froncés. On dit en effet que ceux qui descendaient dans le Trophonion en perdaient le rire19. »
6Dans le processus divinatoire, on peut distinguer schématiquement les dispositions psychologiques de l’individu concerné, le signe qui s’offre à l’interprétation, et l’accomplissement, c’est-à-dire l’événement ou fait indiqué ou annoncé par le signe. Nous étudierons d’abord deux cas touchant les dispositions psychologiques, à savoir la peur comme raison pour laquelle on recourt à la divination, et la peur comme circonstance du songe chez Artémidore. Puis nous nous intéresserons à l’accomplissement sous trois aspects : la peur comme accomplissement, la peur comme cause de l’accomplissement, et la peur comme explication de l’interprétation. Nous terminerons sur ce qui est le plus propre à l’onirocritique, à savoir la dramaturgie du songe et le rôle que peut y jouer la peur, donc la peur comme partie intégrante du songe.
La peur comme motif de la consultation divinatoire
7La peur – peur de l’avenir avant tout – est l’une des raisons d’être, peut-être la principale, de la divination. La valeur négative attribuée à cette émotion a pour conséquence que ce fait n’est explicité, dans les textes antiques, que dans les critiques de la divination ou, du moins, d’une pratique irréfléchie de la divination. Ainsi sous la plume d’Arrien, dans le chapitre des Entretiens d’Épictète20 consacré à la question de savoir « Comment user de la divination », Πῶς μαντευτέον (II, 7) : Τί οὖν ἡμᾶς ἐπὶ τὸ οὕτω συνεχῶς μαντεύεσθαι ἄγει ; ἡ δειλία, τὸ φοβεῖσθαι τὰς ἐκβάσεις, « Qu’est-ce donc qui nous conduit à user de la divination si constamment ? La lâcheté, la crainte des accomplissements » (§ 9). Le consultant tremble en abordant le devin et s’adresse à lui, avec une déférence obséquieuse, comme κύριε, « maître21 ». L’objet de sa crainte est la mort, le danger, la maladie (§ 2), mais aussi la pauvreté (§ 6) ; inversement, l’objet de son désir22 est l’héritage (§ 9). C’est sur la crainte qu’insiste Épictète, lorsque le consultant prie le devin comme un dieu : κύριε, ἐλέησον· ἐπίτρεψόν μοι ἐξελθεῖν, « Maître, aie pitié : permets-moi de m’en sortir » (§ 12). On rapprochera un passage de l’Anabase du même Arrien où est mise en scène, dans le récit historique, la consultation d’un devin par son frère qui craint pour sa vie23.
8Autre passage explicite, dans un contexte philosophique épicurien et non plus stoïcien24, celui de l’Alexandre de Lucien où l’auteur explique comment le futur prophète et son comparse, après avoir acheté un beau serpent, ont l’idée de leur carrière oraculaire : « En effet, comme étaient associés de la sorte deux des pires individus, d’une audace superlative et tout prêts à commettre de mauvaises actions, ils avaient aisément compris que les hommes vivent sous la coupe de ces deux grands tyrans, l’espoir et la peur, et que celui qui est à même d’utiliser chacun d’eux comme il faut s’enrichirait fort rapidement. Ils voyaient en effet que l’homme qui craint et celui qui espère ont tous deux la plus grande nécessité et la plus grande soif de prédiction, et que c’est ainsi que jadis Delphes était devenue riche et renommée, comme Délos, Claros et les Branchides : les hommes se rendent sans cesse dans les sanctuaires à cause des tyrans dont j’ai parlé, l’espoir et la peur, pour demander à connaître l’avenir, sacrifient pour cela des hécatombes, et consacrent des briques d’or. Tournant et retournant ces idées entre eux, ils formèrent le projet de fonder un sanctuaire divinatoire et un oracle25. » Démonax, dans l’opuscule de ce nom, définit l’homme libre, et donc heureux, comme celui qui n’est pas l’esclave de l’espoir et de la crainte26, mais l’image précise de ces deux sentiments comme tyrans de l’âme humaine ne semble pas se trouver ailleurs.
9Chez Cicéron, au livre II du De diuinatione, c’est-à-dire dans la critique de la réalité de celle-ci, contre la défense présentée par son frère au livre I, la peur est même présentée comme créant une fiction divinatoire : c’est l’épisode du rameur rhodien, censé avoir prédit le désastre de Pharsale, mais qui avait en fait perdu la tête sous l’effet de la peur et prenait pour une vision de l’avenir les représentations suscitées par ses craintes incontrôlées27.
10On ne peut manquer, dans ce contexte, d’évoquer la superstition, δεισιδαιμονία, littéralement « peur du divin », précisément définie par Plutarque : « La superstition, comme son nom l’indique, est une opinion comportant un affect et une conception produisant une crainte qui avilit et écrase l’homme, lequel croit qu’il y a des dieux, mais qu’ils causent peines et dommages28. » Cette disposition psychique implique notamment un usage immodéré de la divination, bien illustré, par exemple, par le portrait du superstitieux chez Théophraste29. Il est cependant inutile de s’attarder ici sur elle, car elle fait l’objet d’une étude à part entière dans le présent volume30.
11Artémidore, quant à lui, dans le chapitre où il traite du thème onirique consulter un devin (μαντεύεσθαι), ne fait pas intervenir directement la peur, mais une émotion voisine et moins intense, l’inquiétude (φροντίς) : « Se rendre chez un devin et recourir à la divination au sujet de quelque chose signifie des soucis considérables pour le rêveur : en effet, ceux qui n’ont pas de soucis n’ont pas besoin de la divination31. » Le chapitre suivant, concernant le rêve où l’on exerce le métier de devin, évoque également l’inquiétude, car le devin s’occupe des malheurs d’autrui : « Le devin se préoccupe des malheurs qui ne le concernent en rien, ceux que lui apportent les consultants32. » L’inquiétude des clients est implicite. Cette émotion est peut-être préférée ici à la crainte par Artémidore parce qu’elle est moins négative que la peur et dévalorise donc moins la profession qu’il exerce. Il est néanmoins frappant que, comme dans les Entretiens d’Épictète, ce soit le sentiment négatif qui l’emporte, alors même que l’espoir, d’un héritage par exemple, motive le recours à la divination au même titre, en principe, que la peur, comme le dit bien le passage de Lucien cité plus haut.
La peur comme circonstance du songe
12La peur intervient d’abord chez Artémidore à propos de la distinction fondamentale entre rêve non prédictif, ἐνύπνιον, et songe prédictif, ὄνειρος, le seul qui intéresse Artémidore, puisque le premier n’est que le prolongement en rêve de l’affect qui agite le rêveur pendant la veille : « Par exemple, l’amant ne peut faire autrement que de croire, en rêve, être avec sa ou son partenaire, le craintif de voir ce qu’il craint, et de même l’affamé de manger et l’assoiffé de boire33. » Cette définition de l’ἐνύπνιον est reprise au livre IV, mais avec une complication supplémentaire, le cas où le rêveur est un habile interprète des songes34 : dans ce cas, dit Artémidore à son fils, l’âme, se jouant en quelque sorte du rêveur35, ne lui présentera pas des ἐνύπνια mettant en scène simplement ses affects, mais des sortes d’ὄνειροι non prédictifs, c’est-à-dire des visions allégoriques n’annonçant rien, à la différence des songes allégoriques habituels. En d’autres termes, là où un rêveur ordinaire rêve de l’objet de son désir s’il est amoureux, le rêveur habile rêvera d’un cheval, d’un navire, d’un miroir, etc., symbolisant la femme en question. De même, « s’il a peur de quelqu’un ou cherche à lui échapper, il ne verra pas l’individu en question lui-même, mais croira échapper à un fauve, défaire ses liens, tuer des brigands, sacrifier aux dieux, et tout ce dont la vision [en songe] met les hommes hors de crainte et de trouble36 ».
13S’agissant du songe allégorique, maintenant, qui seul intéresse Artémidore puisqu’il est seul prédictif et seul à avoir besoin d’être interprété, nous avons vu qu’Artémidore l’interprète en fonction des circonstances l’entourant. Cette circonstance peut être la peur, indiquée notamment par un syntagme prépositionnel ou un participe apposé : par exemple, les cigales, qui n’ont que leur chant, signifient entre autres, « quand on est dans la crainte (ἐν τοῖς φόβοις), les personnes qui se contentent de menacer, mais sont incapables de rien faire37 ». On trouve le plus souvent le participe substantivé οἱ φοβούμενοι (rarement ὁ δεδιώς ou ὁ εὐλαβούμενος), la plupart du temps au pluriel et sans complément : « ceux qui ont peur » en général. Ainsi : « Être ivre est bon pour ceux qui ont peur, car les gens ivres sont inconscients et n’ont pas peur38. » On a une fois « celui qui a peur au sujet du lendemain », ὁ περὶ τῆς αὔριον φοβούμενος39. Cette définition vague d’une catégorie de rêveur n’est pas isolée, mais prend place, par exemple, à côté de « ceux qui veulent passer inaperçus » (οἱ λανθάνειν βουλόμενοι). Elle correspond sans doute à la nécessité, pour l’interprète et auteur du traité, de disposer de catégories d’interprétation suffisamment générales pour couvrir un nombre de cas suffisants et ne pas s’épuiser dans la régression à l’infini. L’accomplissement annoncé à ces rêveurs dans la crainte est en principe générique, « bon » (ἀγαθόν vel sim.) ou « mauvais » (πονηρόν vel sim.), mais peut être plus précis, sous la forme de la sécurité, ἀσφάλεια40, ou de l’échappatoire, ἀποφυγεῖν41.
14Quand l’objet de la crainte est précisé, ce sont les suivants :
une escroquerie42 ;
des ennemis puissants (ἐχθροὶ δυνατοί)43 ;
une condamnation (καταδικασθῆναι)44 ;
être chassé d’une terre (ἐκβληθῆναι)45 ;
être retenu de force quelque part (κατασχεθῆναι)46 ;
être jeté en prison (δεθῆναι)47 ;
être percé à jour (ἐλεγχθῆναι).
15Touchant le dernier motif de crainte, on remarquera que la catégorie de rêveur définie comme « celui qui craint d’être percé à jour », ὁ εὐλαβούμενος ἐλεγχθῆναι, est symétrique de « celui qui veut passer inaperçu » ὁ λανθάνειν βουλόμενος48, et d’autres passages d’Artémidore permettent de préciser que – on s’en doute – les actions que le rêveur veut garder secrètes sont probablement condamnables49, voire illégales50, si bien que la mise au jour dont il est question est probablement liée, dans certains cas au moins, à une procédure judiciaire. Or dans les autres cas aussi, même quand cela n’est pas explicité, le motif de crainte paraît souvent lié au contexte judiciaire. C’est sans doute le cas pour les « ennemis puissants51 », pour l’expulsion52 et pour la prison bien sûr53. De fait, être frappé d’une condamnation, c’est être frappé par la foudre54, et les autres peines mentionnées par Artémidore sont l’exil, l’esclavage, le puisage de l’eau (ἀντλία) et surtout la mort. Cela nous amène à une question évidente : pourquoi les motifs de crainte explicités par Artémidore n’incluent-ils pas la maladie ou la mort ? La réponse est peut-être simplement l’universalité de ces craintes.
16Ces rêveurs définis par leur crainte se distinguent d’autres, moins nombreux, définis par des sentiments plus positifs, la préoccupation (οἱ φροντίζοντες περί τινος vel sim.)55, le désir (d’enfants surtout, ὁ ἐπιθυμῶν παιδός vel sim.)56, ou, encore beaucoup moins fréquemment, l’espoir (ὁ ἐλπίζων)57, alors même que le couple crainte-espérance joue un rôle important, comme on l’a vu plus haut, ce qui confirme la prédominance de la crainte dans la perception du processus divinatoire. Il faut garder à l’esprit, toutefois, qu’Artémidore n’établit pas un système cohérent de catégories de rêveurs définis par leurs émotions.
17À côté de la peur comme circonstance du songe permettant à l’onirocrite de l’interpréter, il faut indiquer le cas particulier, qui est en fait un véritable lieu commun littéraire, de l’effroi qui peut s’emparer du rêveur au réveil, quand il repense à son rêve. On pense par exemple au premier rêve rapporté par Hérodote, celui de Crésus lui annonçant la mort de son fils : « Quand il se fut éveillé et qu’il eut réfléchi au songe, il fut pris de crainte58. » Artémidore a beau jeu, quant à lui, de citer un accomplissement contraire au sentiment éprouvé par le rêveur au réveil – la signification paradoxale est un élément essentiel de l’appareil divinatoire –, à propos d’un nauclère : « Je connais un nauclère qui rêva que les dieux établis sur le bateau avaient disparu, et, alors qu’il était plein de crainte et pensait que le songe signifiait son trépas, l’accomplissement fut tout au contraire bénéfique », car il remboursa ses créanciers et se débarrassa ainsi d’individus qui, comme des divinités tutélaires, avaient pouvoir sur son navire59. De même, Pline le Jeune rappelle à Suétone, dans la réponse à une lettre où celui-ci lui écrivait qu’un rêve effrayant lui faisait craindre l’échec, que l’accomplissement peut être contraire au contenu manifeste du rêve60. La peur ressentie par le rêveur au réveil peut être liée à une expérience onirique voisine, le cauchemar, dont nous parlerons plus bas, à propos de la peur comme élément du rêve.
Peur et accomplissement : l’accomplissement lui-même, sa cause et son explication
18L’élément du processus divinatoire qui atteste le plus fréquemment la peur dans les textes est l’accomplissement, c’est-à-dire les cas où la signification dévoilée par l’interprétation du signe est effrayante. Nous l’avons déjà abordé dans l’introduction. Il n’entre pas dans les limites de la présente étude d’étudier cet accomplissement en détail pour toutes les techniques divinatoires, et nous nous concentrerons donc sur Artémidore.
19L’accomplissement, chez Artémidore comme dans les autres manuels, peut donc être la peur61 ou son absence62. Dans le premier cas, il est le plus souvent associé à un autre accomplissement, surtout le danger (κίνδυνος63) ou les ennuis (ταραχαί64). Il peut aussi composer un accomplissement complexe avec un aspect positif et un autre négatif, comme dans le passage suivant, extrait du chapitre sur l’apprentissage de l’écriture, qui évoque la sévérité du maître : « Apprendre à lire et écrire quand on ne le sait pas annonce pour le rêveur un bien qui n’aura lieu qu’avec peine et crainte. En effet, ceux qui apprennent à lire et écrire sont dans la crainte et se donnent de la peine, mais le font dans leur propre intérêt. Si en revanche quelqu’un apprend à nouveau à lire et écrire alors qu’il le sait déjà, cela doit être considéré comme mauvais et inopportun, car apprendre est propre à l’enfant. C’est pourquoi cela annonce insuccès en même temps que craintes et peines65. » Dans le premier des deux cas, le caractère bénéfique du rêve est limité par la peur et la peine ; dans le second, cet accomplissement négatif s’ajoute à un autre.
20Il arrive que la peur soit décrite comme intense66, jamais comme légère. Évidemment, si l’émotion qu’est la peur est un accomplissement significatif, c’est par une métonymie : elle implique de bonnes raisons d’avoir peur, d’où sans doute l’association fréquente avec κίνδυνος. Ιl arrive néanmoins que cette peur soit sans fondement, vaine : c’est le κενὸς ou μάταιος φόβος dont Maria Patera a parlé dans un autre contexte67, et qui est parallèle aux vaines espérances68.
21Les thèmes oniriques qui intéressent Artémidore étant allégoriques, ils ne sont pas nécessairement associés à la peur dans la réalité : ainsi, les voyelles sont les sons les plus effrayants à cause de leur caractère sonore69. Cela dit, dans la plupart des thèmes oniriques dont l’accomplissement est la peur, l’élément effrayant est facile à identifier, quoique bien sûr culturellement déterminé : danser en hauteur70, voler sans ailes71, un lion menaçant72, un éléphant73, des statues en mouvement74, un paysage de montagne75, un boucher76, etc. Dans la plupart de ces cas, Artémidore ne formule pas explicitement l’explication de l’interprétation. C’est à nous de la déduire de ce qu’il écrit par ailleurs, de ce que nous savons ou de ce que nous pouvons imaginer.
22Dans un seul passage d’Artémidore, la peur est apparemment cause de l’accomplissement. C’est un des songes complets du livre V. Le texte est difficile et corrompu, surtout dans sa fin, mais le sens général et le rôle joué par la peur sont clairs : « Quelqu’un rêva qu’en se penchant il se rendait compte que la région de son anus et de son nombril puait. Il but volontairement un poison mortel, ne supportant plus la situation difficile où il se trouvait et la contrainte des dettes. En effet, par crainte que la contrainte qu’il subissait et qu’il gardait secrète ne pue et ne soit connue de tous, il mourut plus tôt qu’il ne fallait†77. » Chaque phrase de ce passage représente une étape différente du processus divinatoire : la première indique le contenu du songe, la seconde son accomplissement, la troisième l’explication symbolique de cet accomplissement. En l’occurrence, il faut manifestement comprendre que la puanteur des parties intimes78 signifiait que la situation financière désastreuse du rêveur allait être découverte79, et que la peur de l’humiliation publique a poussé le rêveur au suicide80.
23Enfin, la peur peut servir de diverses manières, chez Artémidore, à expliquer l’accomplissement indiqué par l’interprétation. Il ne s’agit pas à proprement parler de la cause effective des accomplissements concernés, mais de l’élément dans la réalité qui permet à l’onirocrite d’identifier tel accomplissement plutôt qu’un autre. On ne donnera que quelques exemples81. Ainsi, nous avons déjà vu que rêver que l’on apprend à lire et à écrire annonce un bien non sans mal ni sans peur si c’est un illettré qui fait ce rêve, parce que cet apprentissage, qui est évidemment un bien, ne se fait qu’avec effort et dans la peur du maître82. De même, rêver qu’on vole peut annoncer la cécité, car les aveugles comme ceux qui volent (en imagination…) ont toujours peur de tomber83. Inversement, si un mort vous dit quelque chose en rêve, il faut le croire, car on ment par espoir ou par crainte, et les morts n’espèrent ni ne craignent plus rien84. Enfin, rêver qu’on est ivre est bon pour ceux qui ont peur, car les gens ivres sont inconscients et n’ont peur de rien85.
La peur comme partie du songe
24La peur en rêve ne peut manquer de faire penser à une expérience onirique qui nous est très familière et d’autant mieux identifiée qu’elle est nommée : le cauchemar. Comme Danièle Auger l’a montré86, cependant, cette expérience onirique est moins clairement identifiée pour les Anciens qu’elle ne l’est pour nous et garde une place marginale dans les représentations du rêve. En particulier, le cauchemar ne joue aucun rôle dans la divination par les songes. Un de ses noms possibles, ἐφιάλτης87, n’est ainsi présent chez Artémidore, entre Pan et Asclépios, que pour la divinité homonyme réputée oppresser les rêveurs, avec des significations variées qui n’ont rien à voir avec la peur : « Éphialtès est identifié à Pan, mais il signifie des choses différentes : s’il oppresse et écrase le rêveur sans rien répondre, il signifie anxiété et détresse ; quoi qu’il réponde, si on l’interroge, il dit vrai. S’il donne quelque chose ou s’unit au rêveur, il annonce de grands avantages, surtout quand il ne l’écrase pas. Quoi qu’il fasse en s’approchant, il rétablit les malades : en effet, il ne s’approchera jamais d’un homme qui va mourir88. » De fait, la peur comme émotion éprouvée par le rêveur à l’intérieur du songe ne joue qu’un rôle marginal, quoiqu’intéressant, chez Artémidore, comme nous allons le voir.
25La peur est isolée comme thème onirique à part entière dans une brève notice du livre III, ce livre d’addenda ajouté par Artémidore à l’exposé systématique des deux premiers. Après deux sections sur la folie (μαίνεσθαι) et l’ivresse (μεθύειν), qui se terminent par l’indication, citée plus haut, selon laquelle rêver d’être ivre est bon quand on a peur, vient le passage suivant, sans doute amené par association d’idées : « Avoir peur n’est bon pour personne, puisque celui qui a peur n’est capable de résister à rien, mais se livre corps et âme pour se mettre à la disposition absolue d’autrui, si bien qu’il subit d’autant plus vite ce dont il a le plus peur89. » Cette interprétation manifeste bien le caractère profondément négatif de cette émotion aux yeux d’Artémidore qui n’a en la matière pas d’originalité.
26On laissera de côté le cas particulier des fils d’Arès, Deimos et Phobos, évoqués après Hécate dans la longue section sur les dieux, mais dont l’interprétation ne manifeste que le signifié mythologique, guerrier, sans rapport avec les émotions qu’ils personnifient90.
27La peur intervient à l’intérieur du songe de façon originale dans deux passages. Le premier est au livre II, dans le chapitre sur le vol : « Voler quand on est poursuivi par une bête sauvage, un homme ou un démon n’est pas bon, car cela amène de grandes peurs et de grands dangers. En effet, la peur éprouvée pendant le sommeil était si forte que le rêveur n’a pas estimé la terre suffisante pour la fuite et qu’il a rejoint le ciel91. » Il faut rappeler ici qu’Artémidore ne s’intéresse dans son traité qu’à ce qu’il nomme « songes allégoriques » (ὄνειροι ἀλληγορικοί), c’est-à-dire les rêves prédictifs dont le contenu ne se réalisera pas tel quel, mais doit être interprété92. Il faut donc un rapport symbolique entre contenu onirique et accomplissement. Ce rapport peut toutefois être assez élémentaire. Ici, le vol, associé au fait d’être poursuivi par un être dangereux, ne sert qu’à signifier l’intensité de la peur et du danger associé (μεγάλους), et l’explication de cette signification s’appuie sur l’émotion implicite du rêveur pendant le rêve.
28Le second passage, au livre IV, est plus complexe. Rappelons que les livres IV et V ne font pas partie du projet éditorial primitif d’Artémidore, mais ont été rédigés plus tard, peut-être longtemps après, et se présentent comme une réponse aux critiques adressées aux trois premiers, dont ils reprennent en partie la matière. Après avoir dit qu’il a déjà parlé de la mer et de tout ce qui la concerne93, Artémidore ajoute simplement l’exemple d’un rêve particulier : « Quelqu’un rêva qu’il était tombé dans la mer, descendait vers le fond et se sentait descendre pendant longtemps – pour finir la peur le réveilla. Il épousa une prostituée, partit avec elle et passa la plus grande partie de sa vie à l’étranger. Il est superflu de dire les causes de ces faits94. » La remarque finale est savoureuse, car Artémidore ne reprend précisément aucun des éléments interprétatifs du l. II auxquels il a fait allusion, allusion qui semble surtout servir de prétexte à ce récit de rêve. La mer signifie la prostituée95, et le fait d’y tomber, c’est-à-dire de s’unir à l’eau en quelque sorte, le mariage. La plongée, traversée verticale de l’eau comme la navigation en est une traversée horizontale, signifie le séjour loin de chez soi. Sa durée, sur laquelle insiste le récit, signifie quant à elle le caractère prolongé de cet éloignement.
29Quel rôle joue donc la peur parmi ces éléments d’interprétation ? La plongée dans les profondeurs de la mer, qui est un thème littéraire et iconographique96 en plus d’être une réalité certainement facilement observable pour le rêveur97, ne peut manquer d’évoquer la menace toujours présente de la noyade98. Elle cause donc une peur si intense qu’elle déchire le voile du sommeil et interrompt la fiction onirique. Or cette interruption du songe est essentielle à l’interprétation, puisqu’elle explique que le rêveur n’ait pas passé toute sa vie à l’étranger, mais ait – implicitement – fini par revenir chez lui99. Ailleurs chez Artémidore, l’interruption du songe est toujours négative, car elle signifie l’inachèvement de l’action onirique, qui, dans un cas, se trouve être la traversée d’une rivière ou d’un lac à la nage100. Ce dernier cas éclaire l’exception que constitue notre récit de plongée, puisque le terme de celle-ci est la mort et non le retour à la terre ferme et qu’il est donc vital qu’elle soit interrompue.
30C’est ici le seul passage chez Artémidore où la peur cause l’éveil, bien qu’on trouve d’autres lieux littéraires où ce soit le cas101. Ainsi l’épisode de Gélon de Syracuse protégé par son chien contre un mauvais rêve, raconté deux fois par Élien. Dans les Histoires variées, ce sont en fait les aboiements du chien effrayé par le cri de Gélon qui réveillent celui-ci : « Gélon de Syracuse avait rêvé qu’il était frappé par la foudre, et cela lui fit pousser un cri, non pas indistinct et faible comme en rêve, mais puissant, car il avait été saisi d’une peur violente. Son chien, qui se trouvait dormir à ses côtés, affolé par son cri, se plaça sur lui et se mit à pousser des aboiements très vigoureux et menaçants, qui tirèrent Gélon de son sommeil et le débarrassèrent de sa crainte102. » Dans les Caractéristiques des animaux, en revanche, la cause de l’éveil est d’abord la peur : « Gélon se réveilla donc, la crainte et les aboiements chassant un sommeil pourtant très profond103. »
⁂
31Pour récapituler, la peur est désignée par les critiques de la divination, ou de ses usages les moins respectables, comme motif de la consultation. Elle représente souvent aussi, dans toutes les techniques divinatoires, l’accomplissement signifié. Dans certains cas-limites comme celui du rameur rhodien, la peur peut être présentée comme productrice de (fausse) divination. Dans l’interprétation des songes, elle intervient néanmoins de façon beaucoup plus variée et complexe, puisqu’elle peut définir le rêveur, succéder au songe, causer l’accomplissement, expliquer l’interprétation, voire faire partie du songe lui-même dans le cas du cauchemar, dont il faut toutefois garder à l’esprit qu’il ne joue en tant que tel qu’un rôle marginal en onirocritique.
Notes de bas de page
1 Voir toutefois, pour l’onirocritique, G. Weber, « Emotionen in Artemidors Oneirokritika », dans G. Weber (dir.), Artemidor von Daldis und die antike Traumdeutung. Texte – Kontexte – Lektüren, Berlin, De Gruyter, 2015, p. 39-65, 41, n. 6, remarquant l’absence d’Artémidore chez E. Sanders, « Beyond the Usual Suspects: Literary Sources and the Historian of Emotions », dans A. Chaniotis (dir.), Unveiling Emotions. Sources and Methods for the Study of Emotions in the Greek World, Stuttgart, Franz Steiner, 2012, p. 151-173.
2 Pour un aperçu, cf. D. Cairns, « A Short History of Shudders », dans A. Chaniotis et P. Ducrey (dir.), Unveiling Emotions, t. II : Emotions in Greece and Rome: Texts, Images, Material Culture, Stuttgart, Franz Steiner, 2013, p. 85-107.
3 Voir les adjectifs φοβερός « effrayant », ἐπίφοβος de même sens, au contraire ἄφοβος « n’inspirant pas la peur ».
4 Le substantif δεῖμα et les adjectifs δειλός « craintif, lâche » et δεινός « effrayant, terrible » sont dans un rapport étymologique peu transparent, dans l’Antiquité, avec ces termes, tous dérivés d’une racine *dwey- signifiant « avoir peur », cf. P. Chantraine, DELG, s.v. δείδω, H. Rix (dir.), Lexikon der indogermanischen Verben. Die Wurzeln und ihre Primärstammbildungen, Wiesbaden, Reichert, 20012 (1998), s.v. *duei-, et R. Beekes, Etymological Dictionary of Greek, Leyde/Boston, Brill, 2010, s.v. δέος.
5 Deux fois dans le syntagme οἱ εὐλαβούμενοι ἐλεγχθῆναι, « ceux qui craignent d’être percés à jour » (Artémidore, II 3, éd. R. Pack [désormais P], p. 105, l. 15-16 et II 4, p. 106, l. 3), et une fois sans complément, associé au vocabulaire du souci et du chagrin, τοῖς δὲ εὐλαβουμένοις ἢ φροντίζουσιν ἢ λυπουμένοις, « ceux qui ont des appréhensions, des préoccupations ou du chagrin » (II 55, P 184, 7-8), rêveurs à rapprocher de τοῖς λυπουμένοις καὶ τοῖς φοβουμένοις, « ceux qui ont du chagrin et ceux qui ont peur » (II 49, P 182, 2).
6 Moiris ε 20 (D. U. Hansen, Das attizistische Lexikon des Moeris. Quellenkritische Untersuchung und Edition, Berlin/New York, De Gruyter, 1998), εὐλαβεῖσθαι ἀντὶ τοῦ φυλάττεσθαι, ὡς Δημοσθένης ἐν Φιλιππικοῖς, Ἀττικοί· εὐλαβεῖσθαι ἀντὶ τοῦ φοβεῖσθαι Ἕλληνες, « les auteurs attiques emploient εὐλαβεῖσθαι pour φυλάττεσθαι, comme Démosthène dans les Philippiques, mais les Grecs [c’est-à-dire les contemporains de Moiris] l’emploient pour φοβεῖσθαι ». Chez [Ammonios], Des termes semblables et différents, 80 (éd. K. Nickau), le verbe glose ὀρρωδεῖν. En littérature, cf. la version ancienne de Dn, 4, 5 dans la Septante, datant du milieu du iie s. av. n. è. ; Philon d’Alexandrie, Allégories des lois, III, 113 ; Maxime de Tyr, XXXVI, 2 ; Athénée, Deipnosophistes, VIII, 333e ; X, 435a ; Sextus Empiricus, Esquisses pyrrhoniennes, II, 62, etc.
7 La seule exception possible recensée par les principaux dictionnaires (outre le Kriaras, le Du Cange et le Lexikon zur byzantinischen Gräzität), à ma connaissance, est le passage de l’Histoire du mont Sinaï par Paisios de Rhodes (fin du xvie s.) cité par E. Kriaras, Λεξικό της μεσαιωνικής δημώδους γραμματείας 1100-1669, Thessalonique, s.n., 1968-, s.v. ευλαβούμαι, 3 (emploi glosé ανησυχώ).
8 Voir la redondance εἰς φόβον καὶ δέος chez Artémidore, I 76, P 82, 24 ; l’écho φόβος-δέος en II 68, P 193, 19 ; la reprise de φοβεῖσθαι par δέος en I 81, P 98, 21 et IV préf., P 240, 16 ; et le parallèle entre II 9, P 113, 2 τούς […] δεδιότας ἐκβληθῆναι et II 53, P 183, 18 τοὺς ἐκβληθῆναί ποθεν φοβουμένους. La famille de δέος est plus ancienne, dans le champ sémantique de la peur, que celle de φόβος, et moins claire morphologiquement pour les Anciens, comme on l’a dit plus haut.
9 Cf. Artémidore, I 64, P 68, 21 ; I 64, P 69, 15-18. Les Sortes Astrampsychi emploient de façon interchangeable dans les prédictions μὴ φοβοῦ « n’aie crainte » et μὴ ἀγωνία « ne t’inquiète pas ».
10 Ptolémée, Tétrabible, II, 9, 5 : φυγαδείας τε καὶ ἀπορίας καὶ συνοχὰς καὶ πένθη καὶ φόβους καὶ θανάτους.
11 Version A Costanza, 57 : Τραχήλου τὸ δεξιὸν μέρος ἐὰν ἅλληται, ἐλευθέρῳ φόβον, δούλῳ δὲ νόσον σημαίνει· τοῖς δὲ λοιποῖς πᾶσι καλόν.
12 Par exemple Sortes Astrampsychi, 47, 8 (éd. G. M. Browne) : βλαβῆναι ἔχεις. φοβοῦ, « Tu seras lésé. Aie peur », et 7, 9 οὐκ ἐκτιτρώσκει. μὴ φοβοῦ, « Elle ne fera pas fausse couche. N’aie pas peur ». Les Sortes Astrampsychi sont un manuel de cléromancie, c’est-à-dire de divination par tirage au sort d’une réponse oraculaire prédéfinie, remontant au iiie s. de n. è. Voir F. Naether, Die Sortes Astrampsychi. Problemlösungsstrategien durch Orakel im römischen Ägypten, Tubingue, Mohr Siebeck, 2010.
13 Voir par exemple Adamantios, I, 3 : ἤθη καὶ βουλεύματα τῶν ἀνθρώπων. Les prédictions dont se vante Polémon dans la version arabe de Leyde, à la fin du traité (chap. 68-70), sont en fait les déductions des intentions cachées des personnages observés, la seule exception étant le passage célèbre sur la femme de Samos (Anonyme latin, § 133, éd. J. André, et « Polémon de Leyde », chap. 69, éd. S. Swain).
14 Par exemple Adamantios, I, 3 ; 5 ; 16. En II, 38, c’est l’androgyne qui est trahi par un mouvement de crainte ou de contrariété.
15 Une seule fois, chez Artémidore, V 33, texte difficile.
16 Ce qui n’est pas la même chose : il ne faut pas confondre la chaîne de causalité conduisant à l’accomplissement dans la réalité et la signification symbolique permettant d’interpréter un thème onirique dans tel ou tel sens et donc de prédire tel ou tel accomplissement.
17 Cf. P. Bonnechere, Trophonios de Lébadée. Cultes et mythes d’une cité béotienne au miroir de la mentalité antique (Religions in the Graeco-Roman World, 150), Leyde/Boston, Brill, 2003, p. 145-147 et 262-269, et G. Renberg, Where Dreams May Come. Incubation Sanctuaries in the Greco-Roman World, Leyde/Boston, Brill, 2016, vol. 2, p. 567-574, en l’occurrence p. 571 et n. 15.
18 Pausanias, IX, 39, 13 : κάτοχόν τε ἔτι τῷ δείματι καὶ ἀγνῶτα ὁμοίως αὑτοῦ τε καὶ τῶν πέλας.
19 Zénobios, III, 61 (éd. E. Lelli) : Εἰς Τροφωνίου μεμάντευται : ἐπὶ τῶν ἀγελάστων καὶ συνωφρυωμένων. Φασὶ γὰρ τοὺς εἰς Τροφωνίου καταβαίνοντας ἀφαιρεῖσθαι τὸν γέλωτα.
20 Quelle que soit la sincérité d’Arrien dans sa lettre dédicatoire, il paraît inexact, comme on en a l’habitude (depuis le vivant d’Arrien d’ailleurs), de citer Épictète comme auteur des Entretiens. Voir les mises au point nuancées de P. Hadot, Arrien. Manuel d’Épictète, Paris, Le Livre de poche, 2000, p. 30-35, et A. A. Long, Epictetus. A Stoic and Socratic Guide to Life, Oxford, Oxford University Press, 2002, p. 39-41.
21 Cf. E. Dickey, Greek Forms of Address. From Herodotus to Lucian, Oxford, Oxford University Press, 1996, p. 100-101.
22 Cf. Arrien, Entretiens, § 10 : il faut consulter le devin « sans désir […] ni aversion », δίχα ὀρέξεως […] καὶ ἐκκλίσεως. Cf. aussi Arrien, Manuel, XXXII, 2.
23 Arrien, Anabase, VII, 18, 2 : Peithagoras répond à Apollodoros « en lui demandant qui il craignait au juste, pour vouloir recourir ainsi à la divination », πυνθανόμενον τίνα μάλιστα φοβούμενος χρήσασθαι ἐθέλοι τῇ μαντείᾳ.
24 Cf. par exemple Lucien, Alexandre ou le faux prophète, 47.
25 Lucien, Alexandre ou le faux prophète, 8 : Ὡς γὰρ ἂν δύο κάκιστοι καὶ μεγαλότολμοι καὶ πρὸς τὸ κακουργεῖν προχειρότατοι εἰς τὸ αὐτὸ συνελθόντες, ῥᾳδίως κατενόησαν τὸν τῶν ἀνθρώπων βίον ὑπὸ δυοῖν τούτοιν μεγίστοιν τυραννούμενον, ἐλπίδος καὶ φόβου, καὶ ὅτι ὁ τούτων ἑκατέρῳ εἰς δέον χρήσασθαι δυνάμενος τάχιστα πλουτήσειεν ἄν· ἀμφοτέροις γάρ, τῷ τε δεδιότι καὶ τῷ ἐλπίζοντι, ἑώρων τὴν πρόγνωσιν ἀναγκαιοτάτην τε καὶ ποθεινοτάτην οὖσαν, καὶ Δελφοὺς οὕτω πάλαι πλουτῆσαι καὶ ἀοιδίμους γενέσθαι καὶ Δῆλον καὶ Κλάρον καὶ Βραγχίδας, τῶν ἀνθρώπων ἀεὶ δι’ οὓς προεῖπον τυράννους, τὴν ἐλπίδα καὶ τὸν φόβον, φοιτώντων εἰς τὰ ἱερὰ καὶ προμαθεῖν τὰ μέλλοντα δεομένων, καὶ δι’ αὐτὸ ἑκατόμβας θυόντων καὶ χρυσᾶς πλίνθους ἀνατιθέντων. Tαῦτα πρὸς ἀλλήλους στρέφοντες καὶ κυκῶντες μαντεῖον συστήσασθαι καὶ χρηστήριον ἐβουλεύοντο.
26 Lucien, Vie de Démonax, 20 : τὸν μήτε ἐλπίζοντά τι μήτε δεδιότα […] ἅπαντες γὰρ ὡς τὸ πολὺ τούτοις δεδουλώμεθα.
27 Cicéron, De diuinatione, II, 114 : « magnitudine timoris […] quae, sanus cum esset, timebat ne euenirent, ea demens euentura esse dicebat ».
28 Plutarque, De la superstition, Œuvres morales, 165B : τὴν δεισιδαιμονίαν δὲ μηνύει καὶ τοὔνομα δόξαν ἐμπαθῆ καὶ δέους ποιητικὴν ὑπόληψιν οὖσαν ἐκ ταπεινοῦντος καὶ συντρίβοντος τὸν ἄνθρωπον, οἰόμενον μὲν εἶναι θεούς, εἶναι δὲ λυπηροὺς καὶ βλαβερούς. Voir aussi la définition stoïcienne transmise par Stobée, SVF, III, 408 (= Stobée, II, 7, 10c) δεισιδαιμονία δὲ φόβος θεῶν ἢ δαιμόνων, et SVF, III, 394 (= Stobée, II, 7, 10b).
29 Théophraste, Caractères, 16, 6 et 11. Voir aussi Plutarque, De la superstition, 165E-F. Dans l’Alexandre de Lucien, les aspirants-prophètes choisissent Abonouteichos en raison du caractère à la fois superstitieux et fortuné de la plupart de ses citoyens, δεισιδαίμονας τοὺς πολλοὺς καὶ πλουσίους (§ 9).
30 Cf. l’article de M. Patera dans ce volume.
31 Artémidore, III 20, P 212, 4-6 : Εἰς μάντεως δὲ φοιτᾶν καὶ μαντεύεσθαι περί τινος φροντίδας οὐ τὰς τυχούσας τῷ ἰδόντι σημαίνει· οὐ γὰρ δεῖ μαντικῆς τοῖς μὴ φροντίζουσιν.
32 Artémidore, III 21, P 212, 16-17 : καὶ γὰρ τῷ μάντει μέλει καὶ τῶν οὐδὲν αὐτῷ προσηκόντων κακῶν, ἃ ἂν οἱ μαντευόμενοι φέρωσι.
33 Artémidore, I 1, P 3, 18-20 : Οἷον ἀνάγκη τὸν ἐρῶντα ὄναρ ἅμα τοῖς παιδικοῖς εἶναι δοκεῖν καὶ τὸν δεδιότα ὁρᾶν ἃ δέδιε, καὶ πάλιν αὖ τὸν πεινῶντα ἐσθίειν καὶ τὸν διψῶντα πίνειν. Voir aussi un peu plus loin, en I 1, P 4, 9 (opposé à ἐλπίς), et dans la préface du livre IV, qui reprend la matière théorique de celle-ci (IV préf., P 239, 3, où φόβος est opposé à ἐπιθυμία). Cette idée que le sommeil ne délivre pas toujours des préoccupations de la veille n’est évidemment pas isolée, cf. Philémon, fr. 146 (éd. R. Kassel et C. Austin) : οὕτως, ὅταν ἐμπέσῃ τις εἰς τὸν νοῦν φόβος, | κἀκτοῦ καθεύδειν οὗτος οὐκ ἐξέρχεται. « Ainsi, lorsque quelque crainte s’abat sur l’esprit, celle-ci ne sort pas même du sommeil » (je remercie M. Patera pour cette référence).
34 Artémidore, IV préf., P 239, 20-240, 28.
35 Cf. Artémidore, IV préf., P 240, 22-23 : τεχνικώτερον αὐτῷ προσέπαιζεν ἡ ψυχή.
36 Artémidore, IV préf., P 240, 13-16 : καὶ εἰ φοβοῖ τό τινα ἢ φεύγοι, οὐκ αὐτὸν ἐκεῖνον ὄψεται, ἀλλὰ θηρίον ἐκφεύγειν νομίσει καὶ δεσμὰ διαρρήσσειν καὶ λῃστὰς ἀναιρεῖν καὶ θεοῖς θύειν καὶ ὅσα ἰδόντες οἱ ἄλλοι ἄνθρωποι ἔξω δέους καὶ ταραχῆς γίνονται.
37 Artémidore, III 49, P 225, 6 : ἐν δὲ τοῖς φόβοις τοὺς αὐτὸ μόνον ἀπειλοῦντας, οὐδὲν δὲ δυναμένους δρᾶσαι. Voir aussi II 12, P 121, 5 : πρὸς τοὺς φόβους ; III 65, P 232, 19 : πρὸς τοὺς φόβους ; IV 70, P 292, 1 φοβούμενος.
38 Artémidore, III 42, P 222, 20-22 : Ἀγαθὸν δὲ τὸ μεθύειν τοῖς φοβουμένοις· ἀνεπιστρεπτοῦσι γὰρ καὶ οὐ φοβοῦνται οἱ μεθύοντες.
39 Ibid., IV 83, P 300, 5-6. C’est dans la conclusion du livre IV, à propos de la question spécifique du temps que prend un songe pour s’accomplir.
40 Ibid., II 24, P 143, 13-14.
41 Ibid., II 28, P 150, 23.
42 Ibid., IV 70, P 292, 1 : le rêveur est un certain Dioclès le Grammairien, qui « craignait de perdre de l’argent à la suite d’une machination », φοβούμενος ἐξ ἐπηρείας ἀργύριον ἀπολέσαι (pour cet emploi d’ἐπηρεία, cf. Dion Cassius, LVII, 10, 5 Auguste refusant de se procurer de l’argent de manière abusive, οὐδὲ ἐξ ἐπηρείας τι ἠργυρολόγησεν).
43 Artémidore, IV 13, P 251, 10.
44 Ibid., I 13, P 22, 17.
45 Ibid., II 9, P 113, 2 ; II 53, P 183, 18.
46 Ibid., I 21, P 28, 19. La séquestration dont il s’agit est plusieurs fois distinguée de l’arrestation et de la mise en prison (cf. I 26, P 32, 22-33, 1 ; II 55, P 184, 19-21 ; III 60). Il faut donc sans doute avoir en tête des voies de fait comme celle évoquée par un papyrus du ier s. de n. è., où un créancier a séquestré son débiteur et sa femme (M. Chr. 80 [= P. Flor. I, 61], l. 59-61).
47 La prison est très présente chez Artémidore, pour définir une catégorie de rêveur (par exemple οἱ δεδεμένοι/ἐν δεσμοῖς ὄντες vel sim. en Ι 16, P 24, 15 ; Ι 26, P 32, 22 ; I 40, P 46, 22-23 ; II 3, P 105, 7 ; II 33, P 157, 1 ; II 68, P 194, 16 ; III 13, P 209, 16 ; III 22, P 212, 21 ; III 35, P 219, 4) ou comme accomplissement (δεσμά, δεσμωτήριον, εἱρκτή en I 5, P 15, 5 et 7 ; I 42, P 49, 24 ; I 76, P 83, 14 ; II 3, P 103, 18 ; II 6, P 107, 25 ; II 49, P 182, 11 ; II 55, P 184, 20 ; III 7, P 207, 12 ; III 15, P 210, 16 ; III 60, P 230, 23, etc.). Pour la peur de la prison en général, cf. C. Bertrand-Dagenbach, « La prison, lieu d’effroi », dans C. Bertrand-Dagenbach et al. (dir.), Carcer. Prison et privation de liberté dans l’Antiquité classique, Paris, De Boccard, 1999, p. 211-219.
48 Cf. Artémidore, I 33, P 42, 15-16 : αἷμα φερόμενον ἰδεῖν ἄτοπον τῷ λανθάνειν βουλομένῳ· ἐλεγχθήσεται γάρ, et l’accomplissement fréquent τὰ κρυπτὰ ἐλέγχει.
49 Ibid., II 3, P 102, 21 : κακῶς πράσσοντας.
50 Ibid., I 54, P 61, 18 : παρανομοῦντας.
51 Cf. ibid., II 12, P 125, 7.
52 Cf. la catégorie fréquente de rêveur « celui qui est en procès pour une terre », ὁ περὶ γῆς δίκην ἔχων vel sim. (ibid., Ι 35, P 44, 8, etc.). La référence est peut-être aussi à l’exil, cf. ibid., I 80, P 98, 11-12.
53 La décision de justice est mentionnée explicitement en ibid., I 76, P 83, 14 : εἰς δεσμὰ κατεκρίθησαν.
54 Cf. ibid., II 9, P 113, 1.
55 Préoccupation qui peut être une relation amoureuse, un départ, l’avancement de la carrière ou la présélection à une épreuve gymnique. Cf. ibid., I 6, P 15, 19 ; Ι 73, P 78, 18 ; II 55, P 184, 7-8 ; III 34, P 218, 21 ; IV 2, P 247, 5 ; V 13, P 305, 4-5.
56 Des enfants : ibid., I 53, P 60, 12 ; I 54, P 61, 15 ; IV 47, P 272, 21 ; IV 80, P 297, 2 ; une femme : I 78, P 88, 14 et 16.
57 Un héritage : ibid., III 1, P 205, 12-13, un avantage indéterminé : ΙΙ 65, P 189, 3, en général : IV 83, P 300, 6.
58 Hérodote, I, 34, 3 : ἐπεί τε ἐξηγέρθη καὶ ἑωυτῷ λόγον ἔδωκε, καταρρωδήσας τὸν ὄνειρον κτλ.
59 Artémidore, II 23, P 141, 19-20 : σφόδρα φοβουμένῳ καὶ ὄλεθρον ἡγουμένῳ σημαίνειν τὸ ὄναρ πᾶν τοὐναντίον εἰς ἀγαθὸν ἀπέβη.
60 Pline le Jeune, Lettres, I, 18, 1 : perterritum somnio et 2 refert tamen euentura soleas an contraria somniare.
61 Φόβος, au singulier ou au pluriel, ainsi que les adjectifs φοβερός et ἐπίφοβος. On trouve aussi δέος, seulement au singulier, et δεῖμα, singulier ou pluriel, ainsi que l’adjectif δεινός.
62 L’adjectif ἄφοβος, toujours dans le cas d’un rêveur qui a peur.
63 Artémidore, II 12, P 123, 4 ; II 37, P 167, 3 ; II 39, P 174, 23 ; II 68, P 192, 12 et 193, 18 ; III 63, P 232, 4.
64 Ibid., I 80, P 97, 20 ; II 28, P 150, 11 ; II 33, P 156, 25 ; III 34, P 218, 12.
65 Ibid., I 53, P 60, 6-12 : Γράμματα μανθάνειν μὴ εἰδότα ἀγαθόν τι μετὰ πόνου καὶ φόβου τῷ ἰδόντι ἐσόμενον προαγορεύει· φοβοῦνται γὰρ ἅμα καὶ πονοῦσιν οἱ μανθάνοντες, πλὴν ἐπὶ τῷ συμφέροντι μανθάνουσιν. Εἰ δέ τις εἰδὼς γράμματα πάλιν μανθάνοι, πονηρὸν καὶ ἄτοπον νομίζειν χρή· παιδαριῶδες γὰρ τὸ μανθάνειν. Διὸ ἀπραξίας ἅμα τοῖς φόβοις καὶ πόνοις σημαίνει. Voir aussi II 39, P 174, 21-25.
66 « Grande » μέγας (ibid., II 68, P 193, 18), « peu commune » οὐ τὸν τυχόντα (II 12, P 122, 20), et une intensification de la peur dans le cas de rêveurs qui ont peur : « plus forte » στερρότερον (III 56, P 229, 1), et même « plus forte et plus oppressante » στερρότερον καὶ φορτικώτερον (III 59, P 229, 22).
67 M. Patera, « Reflections on the Discourse of Fear in Greek Sources », dans A. Chaniotis et P. Ducrey (dir.), op. cit., p. 109-134, 110-112. Chez Artémidore, I 56, P 63, 4-5 (κενός) ; II 8, P 109, 16 (μάταιος) et 19 (ἀτέλεστος).
68 Μάταιαι, ψευδεῖς ou κεναὶ ἐλπίδες : ibid., I 67, P 74, 2 ; I 70, P 77, 26 ; II 18, P 134, 4 ; ΙΙ 44, P 178, 10 ; II 69, P 196, 14 ; III 26, P 215, 1 ; IV 47, P 274, 20.
69 Ibid., III 34, P 218, 12-14.
70 Ibid., I 76, P 82, 24.
71 Ibid., II 68, P 192, 12.
72 Ibid., II 12, P 122, 6.
73 Ibid., II 12, P 123, 4.
74 Ibid., II 33, P 156, 25.
75 Ibid., II 28, P 150, 11.
76 Ibid., III 56, P 229, 1.
77 Ibid., V 33, P 309, 9-14 : Ἔδοξέ τις ἐπικύψας πονηρὸν ὄζοντας τοὺς περὶ τὸν ἀρχὸν καὶ ὀμφαλὸν τόπους καταλαβεῖν. Φάρμακον θανάσιμον ἑκὼν ἔπιεν οὐχ ὑπομένων περίστασιν ἀνάγκην τε χρεῶν· φόβῳ γὰρ τοῦ μὴ τὰ ἀναγκαῖα καὶ ἀπόκρυφα αὐτοῦ ἐξοζῆσαι καὶ γνωσθῆναι, παρὰ τὸ δέον καὶ ἐκαύθη θᾶττον† καὶ ἀπέθανεν. C’est une version du texte différente de celle de Pack, qu’il serait trop long de justifier ici. La dernière tentative en date de corriger le texte est celle de H. Schwabl, « Weitere Kleinigkeiten zu Artemidor », WS, 101, 1988, p. 127-180, 176-177.
78 On notera le jeu de mots autour d’ἀναγκαῖον, qui évoque à la fois la contrainte des dettes et les parties intimes (cf. Artémidore, I 45, P 52, 15).
79 Pour le lien entre puanteur et révélation, cf. par exemple ibid., I 51, P 59, 5 ; I 67, P 73, 9-10.
80 Il est peu probable que le rêveur ait lui-même interprété son rêve (et ainsi pris peur) : comme souvent, le lien entre songe et accomplissement est certainement établi a posteriori. L’élément de l’interprétation obscurci par la corruption du texte est sans doute le suicide.
81 Les passages que je ne citerai pas ici sont les suivants : ibid., I 30, P 36, 17 ; I 81, P 98, 21 ; II 12, P 123, 5 ; II 49, P 182, 2 ; III 43, P 222, 23-223, 2 ; III 63, P 232, 5.
82 Ibid., I 53, P 60, 6-9.
83 Ibid., II 68, P 194, 18-19.
84 Ibid., II 69, P 196, 1-4.
85 Ibid., III 42, P 222, 20-22.
86 D. Auger, « Le cauchemar en Grèce d’Homère à l’âge classique : la revanche du corps et le retour des morts », dans J.-M. Husser et A. Mouton (dir.), Le cauchemar dans les sociétés antiques, Paris, De Boccard, 2010, p. 73-92.
87 En plus des diverses variantes de ce théonyme qui semble avoir été aussi appellatif dès l’origine, voir aussi πνιγαλίων chez le médecin Thémison de Laodicée (sous Auguste) selon Caelius Aurelianus, Maladies chroniques, I, 3, 54, et Paul d’Égine, Abrégé de médecine, III, 15, ou bien τῖφυς selon Moiris τ 29 (éd. D. U. Hansen) τῖφυν Ἀττικοί, ἐφιάλτην ἢ ἐπιάλτην Ἕλληνες. On a ἐνύπνιον φοβερόν dans le corpus hippocratique (Maladie sacrée, 15, 4 ; Affections internes, 48). Le cauchemar semble d’ailleurs avoir davantage intéressé les médecins que les devins, cf. Rufus d’Éphèse (ier s. de n. è.), Des médicaments purgatifs = Oribase, Collections médicales, VII, 26, 177.
88 Artémidore, II 37, P 167, 24-168, 6.
89 Ibid., III 43, P 222, 23-223, 2 : Φοβεῖσθαι οὐδενὶ ἀγαθόν, ἐπειδὴ ὁ φοβούμενος ἀντέχειν μὲν πρὸς οὐδὲ ἓν δύναται, καταπροδοὺς δὲ καὶ τὴν ψυχὴν καὶ τὸ σῶμα πρὸς πάντα ἐπιτηδειότερον ἑαυτὸν παρέχει, ὥστε θᾶττον παθεῖν ὃ ἂν μάλιστα φοβῆται.
90 Ibid., II 39, P 175, 26-29. On rappellera que φόβος et sa famille sont étymologiquement dérivés d’une racine signifiant « fuir » et désignant donc un fait de guerre.
91 Ibid., II 68, P 193, 16-21 : Διωκόμενον δὲ ὑπὸ θηρίου ἢ ὑπὸ ἀνθρώπου ἢ ὑπὸ δαίμονος ἵπτασθαι οὐκ ἀγαθόν· φόβους γὰρ μεγάλους καὶ κινδύνους ἐπάγει· καὶ γὰρ ἐν τοῖς ὕπνοις τοσοῦτον ἦν τὸ δέος, ὥστε μὴ ἱκανὴν ἡγήσασθαι εἰς τὸ φυγεῖν τὴν γῆν ἀλλὰ τοῦ οὐρανοῦ ἐπιλαβέσθαι.
92 Les rêves prédictifs dont le contenu se réalise tel quel (par exemple on rêve qu’on fait naufrage et on fait effectivement naufrage le lendemain) sont dits « songes théorématiques », ὄνειροι θεωρηματικοί, cf. notamment ibid., I 2, P 4, 22-5, 11.
93 Référence au chap. 23 du livre II, en fait plutôt centré sur la navigation et le navire, la nage intervenant à propos des bains (ibid., I 64, P 70, 15-17) et des rivières et des lacs (II 27, P 148, 17-21).
94 Ibid., IV 53, P 277, 15-19 : Ἔδοξέ τις εἰς θάλασσαν πεσὼν καταφέρεσθαι εἰς τὸν βυθὸν καὶ δι’ αἰσθήσεως ἔχειν ἐπὶ πολὺ καταφερόμενος, καὶ τέλος ὑπὸ αὐτοῦ τοῦ δέους ἀφυπνίσθη. Γήμας ἑταίραν ἅμα αὐτῇ μετανέστη καὶ τὸ πολὺ τοῦ βίου διέτριψεν ἐπὶ ξένης. Τούτων τὰς αἰτίας περισσὸν λέγειν.
95 Cf. ibid., III 16, P 211, 2-6.
96 Cf. la plongée miraculeuse de Thésée chez Bacchylide, Dithyrambes, III, 81-129 (et Pausanias, I, 17, 3 pour la fresque de Micon), la métaphore ironique chez Porphyre, De l’abstinence, I, 42, 4, et Diogène Laërce, II, 22, selon qui Socrate aurait dit à propos du livre d’Héraclite qu’il fallait être un plongeur de Délos, c’est-à-dire hors pair, pour ne pas s’y noyer (le même bon mot est attribué par une autre source à un certain Cratès en IX, 12).
97 Cf. notamment les pêcheurs d’éponges, σπογγεῖς ou κατακολυμβηταί, chez Aristote, Histoire des animaux, IX, 620b34 ; Plutarque, Questions naturelles, Œuvres morales, 915A ; Intelligence des animaux, Œuvres morales, 981E, etc.
98 Dans les trois passages littéraires cités plus haut, la noyade est présente : évitée miraculeusement par Thésée, mais imminente chez Porphyre et Diogène Laërce.
99 Le thème du retour dans sa patrie après un séjour à l’étranger est fréquent chez Artémidore : I 13, P 22, 3-4 ; I 35, P 44, 8-9 et 45, 18-19, etc. Mourir à l’étranger est manifestement considéré comme un malheur : II 55, P 184, 14-17 à propos de la descente aux Enfers, « si l’on rêve que l’on remonte des Enfers, on retournera chez soi depuis l’étranger ; sinon, on finira ses jours à l’étranger » ; cf. aussi IV 34 avec V 27 et 28.
100 Artémidore, I 73, P 79, 1 ; II 27, P 148, 21 (traversée d’une rivière ou d’un lac) ; II 28, P 150, 16 ; II 68, P 193, 13 ; III 7, P 207, 15-16 ; IV 51, P 276, 23.
101 Voir par exemple Agathias, Histoire ecclésiastique, II, 31, 8 (ἀφυπνισθεὶς δὲ ἀθρόον ὑπὸ τοῦ δέους ἀπήγγελλε τοῖς ἄλλοις τὸν ὄνειρον) et Zosime de Panopolis, Mémoires authentiques, XI, Deuxième leçon, § 1 et 2, l. 18 et 46 (éd. M. Mertens) (Ἰδὼν ἐγὼ ἐξέστην καὶ ἐτρόμαξα ἀπὸ τοῦ φόβου καὶ διυπνίσθην, et Καὶ οὕτως ἐκ πολλοῦ φόβου διυπνίσθην).
102 Élien, Histoire variée, I, 13 : Ὁ Συρακόσιος Γέλων ὄναρ ἐβέβλητο κεραυνῷ, καὶ διὰ τοῦτο ἐβόα οὐκ ἀμυδρὸν οὐδ’ ἀσθενές ὡς ἐν ὀνείρῳ, ἀλλ’ ἀνδρικῶς ἅτε δεινῶς ἐκπλαγεὶς ὑπὸ τοῦ δέους. Ὁ δὲ κύων, ὅσπερ οὖν αὐτῷ παρεκάθευδεν, ἐκ τῆς βοῆς διεταράχθη, καὶ περιβὰς αὐτὸν ὑλάκτει πάνυ σφόδρα ἀπειλητικὸν καὶ σύντονον, καὶ ἐκ τούτων ὁ Γέλων ἅμα τε ἀφυπνίσθη καὶ τοῦ δέους ἀφείθη.
103 Élien, Les Caractéristiques des animaux, VI, 62 : ἐξήγρετο τοίνυν ὁ Γέλων καὶ ὑπὸ τοῦ δέους καὶ ὑπὸ τῆς ὑλακῆς ἐκβαλὼν τὸν ὕπνον καίτοι βαθύτατον ὄντα.
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