Chapitre II. Terreur nommée ? Noms terrifiants ? Quelques réflexions préliminaires sur les épiclèses divines qui inspirent la peur
p. 39-56
Texte intégral
1Comme l’a fait remarquer A. Chaniotis, l’impératif θάρσει !, « (prends) courage ! » était la manière préférée des dieux grecs pour saluer les hommes1. Et en effet, les hommes avaient besoin de cet encouragement, car les dieux étaient effrayants : parfois par leurs actions impitoyables – pensons à la cruauté d’Artémis qui fait mettre Actéon en pièces par ses propres chiens, ou à celle d’Apollon qui frappe les enfants de Niobé un par un de ses flèches2 –, parfois par leur seule présence, bien suffisante pour terrifier les mortels. Une rencontre face-à-face avec un dieu restait toujours une possibilité réelle dans le monde polythéiste grec, un fait qui en soi-même peut-être ajoutait à la peur des dieux3. Même les épiphanies bienveillantes suffisaient pour terrifier les humains : songeons à Anchise face à Aphrodite, qui est pourtant amoureuse de lui, ou bien au sort malheureux de Tithônos ou Sémélé, bien qu’eux aussi aimés par des dieux4. En général, on considérait qu’il valait mieux que les humains se tiennent à distance de divinités qui exigeaient le respect tout en étant susceptibles de manifester des colères terribles.
2En même temps, pour garder l’équilibre de l’ordre cosmique, les deux groupes d’êtres ne pouvaient pas se séparer totalement. Il fallait bien un échange régulier entre mortels et immortels et dans ce cadre, les dieux tenaient à recevoir leur juste part : des sacrifices, des offrandes et d’autres honneurs qui leur étaient dus5. En réponse les dieux pouvaient, selon leur bon vouloir, soit manifester leur satisfaction en accordant leurs faveurs aux mortels, soit manifester leur mécontentement en les punissant6. Les communautés grecques, conscientes de la dernière possibilité, en étaient sans doute effrayées. Poséidon n’avait-il pas englouti la ville entière d’Hélikè dans un moment de colère7 ? Une peur latente des dieux et des punitions qu’ils pouvait infliger en cas de transgression religieuse ou d’autres inconduites peut donc se comprendre comme une partie intégrante de la religion grecque ancienne et même comme l’une des composantes de la réciprocité sur laquelle étaient basés les échanges entre les dieux et les hommes. Les sources ont gardé des voix anciennes, celle attribuée à Critias par excellence8, allant jusqu’à la suggestion que la religion aurait été inventée par quelqu’un justement pour installer la peur d’une punition des dieux chez les gens, dans le but de les manipuler9. De plus, Angelos Chaniotis a récemment présenté un dossier de documents montrant comment cette peur des dieux/du dieu a même été renforcée par certains à leurs propres fins10.
3Dans ce contexte, j’aimerais me pencher sur la peur à la lumière d’une composante importante du système de communication entre mortels et immortels : les épiclèses. Je souhaite tout particulièrement examiner si et comment l’aspect terrifiant des dieux est exprimé dans ce système de dénomination, où les épiclèses fonctionnent comme des outils fondamentaux pour rendre efficace la communication avec le monde divin. Il est néanmoins impossible de discuter de la peur dans ce contexte sans d’abord souligner le fait que la relation entre les Grecs et leurs dieux n’était pas seulement négative du point de vue des humains. Comme dirait Lucien, « la vie humaine est gouvernée par ces deux grands tyrans, l’espoir et la peur11 » et ce sont ces deux émotions qui gouvernent également les relations entre mortels et immortels. Bien que ces dernières n’étaient jamais basées sur un échange égalitaire, puisque les immortels avaient, bien sûr, toujours le dessus, ces derniers pouvaient très bien se montrer bienveillants. La réciprocité religieuse entre les honneurs reçus et les faveurs parfois accordées était le lieu de création d’un enchevêtrement dans lequel la peur et la déception côtoyaient les attentes positives, l’espoir d’une assistance et d’un soutien divins12. C’est pourquoi ma démarche, dans cette étude, présuppose que la peur inspirée par les dieux pouvait être à la fois terrifiante et rassurante. En effet, cette peur était parfois terrifiante pour tous les humains qui vénéraient les dieux, donc, comme nous en avons discuté plus haut, elle était, dans ce cas, uniquement terrifiante, mais, d’autres fois, la peur pouvait aussi se révéler utile et rassurante, si elle n’affectait, par exemple, que les autres : une autre communauté que la sienne, une autre cité, etc.13.
4Je vais d’abord me concentrer sur les épiclèses exprimant cette dernière perspective et dresser un tableau des possibles épiclèses invoquant un dieu dans le but de faire craindre ce dieu à quelqu’un d’autre, à un individu spécifique, en lui faisant redouter, par la même occasion, celui, le mortel, qui utilise l’épiclèse. De telles dénominations, qu’on pourrait appeler des épiclèses terrifiantes extraverties/tournées vers l’extérieur/destinées aux autres pouvaient potentiellement être utilisées pour effrayer un ennemi ou intimider un rival – dans les domaines de l’amour, de la guerre, du sport ou de la justice, par exemple. Je discuterai ensuite des épiclèses qui auraient pu inspirer la peur parmi les fidèles de manière plus générale, c’est-à-dire des épiclèses ambiguës, qui réclament des actions religieuses au nom de l’humanité dans sa totalité. Je tiens à préciser que dans le cadre de cet article, je me concentrerai principalement sur les témoignages épigraphiques et, pour cette discussion préliminaire, j’examinerai surtout Apollon, Arès et Pan pris comme études de cas14. Associés respectivement aux épidémies, la guerre et la violence, et la panique, il me semble pertinent de commencer une étude plus approfondie par ces trois dieux.
5Une pléthore d’épiclèses grecques, à savoir des désignations spécifiques par lesquelles les dieux étaient célébrés dans les rituels, nous est parvenue à travers les siècles : de Zeus Sotêr (Sauveur) et Athéna Nikêphoros (Qui apporte la victoire) à Artémis Lochia (De l’enfantement) et Aphrodite Euploia (De la bonne navigation)15. Ces surnoms représentent une source de connaissances très importante en ce qui concerne les dieux grecs : ils nous font connaître leurs lieux de culte et révèlent en effet les caractères et compétences variés des dieux – parfois contradictoires entre eux selon notre point de vue contemporain. Dans l’antiquité, les épiclèses n’étaient pourtant pas seulement descriptives mais constituaient des outils essentiels de communication dans le dialogue actif et constant entre les Grecs et leurs dieux. Les fidèles approchaient rarement, pour ne pas dire jamais, un dieu par la prière ou le sacrifice sans spécifier précisément, donc, par une épiclèse, le destinataire désiré – le dieu à qui ils s’adressaient, ou encore un aspect particulier du dieu16. Les épiclèses rendaient cette spécification simple et efficace, puisqu’on les utilisait pour accroître ses chances d’entrer en contact avec l’aspect désiré précis parmi tous ceux que revêtaient des déités polyvalentes17. Bien que certaines épiclèses à caractère général telles que Sotêr (Sauveur), Sôzôn (Qui sauve), ou Prostatêrios (Protecteur)18, pouvaient être utilisées à des fins variées, de nombreuses épiclèses avaient une valeur très spécifique et désignaient une origine particulière ou le lieu d’habitation d’un dieu, ou encore une fonction précise de celui-ci. La reconnaissante Mélinna, qui avait élevé ses enfants tout en s’adonnant à l’artisanat, dédie un échantillon de son travail à Athéna Erganê, Athéna « Artisane », une déesse qui s’intéressait tout particulièrement à l’artisanat des femmes19. Des particuliers et des communautés de Crète, Béotie et Thessalie s’adressaient à Déméter Megalartos, Déméter « aux Grands Pains20 », et le périégète Pausanias raconte que les Éléens sacrifiaient à Zeus Apomyios, « Chasseur de Mouches », afin de se débarrasser des mouches qui voletaient autour des autels sacrificiels d’Olympie21.
6Forts de ce contexte, intéressons-nous à présent aux épiclèses exprimant la peur. Si l’on considère la grande quantité d’épiclèses attestées dans le riche corpus d’épigraphie grecque, leur variété et l’attention portée au détail, il est surprenant de constater qu’il n’y a presque pas d’épiclèses évoquant la peur. Les épiclèses d’Apollon sont un exemple intéressant. En effet, Apollon, que l’on invoquait au moyen d’une riche variété d’épiclèses, était aussi potentiellement l’un des dieux les plus agressifs du panthéon ; il apparaîtrait donc comme un excellent candidat pour l’attribution de ce type d’épiclèses. Dans l’Hymne homérique à Apollon, les dieux eux-mêmes le craignent, « quand il marche dans la demeure de Zeus ; et, certes, tous se lèvent de leurs sièges à son approche, quand il tend son arc illustre22 ». Même la petite île de Délos hésite à devenir le lieu de naissance d’Apollon, redoutant un dieu qui pourrait devenir atasthalos, un mot traduit comme méchant, follement orgueilleux ou même excessivement violent23. Il est cependant intéressant de noter que ces traits arrogants et menaçants du dieu ne se reflètent pas dans ses épiclèses, du moins pas ouvertement. Une recherche dans la Banque de données des épiclèses grecques de l’université de Rennes n’offre presque pas de témoignages en ce sens : dans les 1 223 instances des surnoms donnés à Apollon24, très rares sont les dénominations qui auraient pu être utilisées par un fidèle pour menacer ou effrayer quelqu’un d’autre, comme un nom utilisé dans une prière destinée à attirer du malheur ou de la violence sur un ennemi. Apollon est souvent évoqué au moyen d’expressions potentiellement menaçantes, comme Hekatêbolos, Hekêbolos, Hekatêbeletês « celui qui décoche ses flèches de loin » ou « celui qui atteint sa cible25 », mais ses épiclèses ne sont en général pas plus explicitement terrifiantes que celles-ci26. À Chypre, on l’appelle Keraitas, « celui qui dévaste27 », et dans plusieurs cités grecques, un Apollon Oulios28, Funeste, a été identifié mais il pourrait bien sûr s’agir d’un dieu qu’il faut se concilier pour éviter qu’il ne détruise le mortel utilisant l’épiclèse ou qu’il ne lui porte malheur – plutôt que d’un dieu qui apporte le malheur sur les ennemis de celui qui l’invoque. Cela vaut naturellement aussi pour l’expression « celui qui décoche ses flèches de loin », qui est potentiellement menaçante à moins d’y apporter d’autres précisions. Je vais revenir sur cette ambiguïté sous peu. Pour le moment, notons qu’on s’adresse aussi à Apollon par un grand nombre d’épiclèses qui expriment des aspects bienveillants : Aguieus (Protecteur des rues et des chemins), Alexikakos (Qui écarte les maux), Apotropaios (Qui prévient le mal), Boasôn (Secourable), Eiêtêr kakôn (Guérisseur des maux), Kerdôios (Qui donne du profit), Sôtêr (Sauveur), Sôzôn (Qui sauve), par exemple29.
7Une image similaire, d’un dieu plus rassurant qu’effrayant se retrouve même dans les épiclèses du dieu guerrier Arès. En effet, Arès, qui compte dans son entourage ses fils Deimos (Terreur) et Phobos (Crainte), et que les épopées homérique et hésiodique30 qualifient de « Souillé d’un meurtre », « Meurtrier » ou « Tueur d’hommes », n’a pas autant de cultes qu’Apollon et reçoit moins d’épiclèses31. De ses vingt-quatre épiclèses cultuelles présentées dans les bases de données Packard Humanities Institute et Épiclèses grecques de Rennes, la plupart sont plutôt neutres32 ou même positives et rassurantes : Aphneios (Opulent), Epêkoos (Attentif, Qui écoute les prières), Anikêtos (Invaincu), Gynaikothoinas (Qui amuse les femmes, Hôte du banquet des femmes), Summachos (Allié), Euagros et Epêkoos (De la bonne chasse et Qui écoute les prières), Nikêphoros (Qui apporte la victoire) et Poliouchos (Qui protège la ville)33. Seuls Chalkeolongchos (À la lance de bronze), Hoploforos (Qui porte des armes), et Enyalios (le nom d’un dieu de la guerre devenu épiclèse)34, nous rappellent le violent Arès des mythes panhélleniques, comme peut-être aussi Thouros (Impétueux)35, mais ces épiclèses ne sont pas a priori menaçantes spécifiquement pour les ennemis.
8Il en va de même pour Pan. Ce dieu connu était honoré à Athènes depuis la bataille de Marathon, parce que comme il l’avait promis dans les montagnes de l’Arcadie, il a semé la panique dans l’armée des Perses, donc, dans l’armée des ennemis des Athéniens, envers lesquels il éprouvait de la bienveillance. Est-ce que cette peur ciblée est exprimée dans les épiclèses du dieu ? Il semble que non. En contexte cultuel, les épiclèses sont plus rassurantes qu’effrayantes : Huloskopos (Qui surveille les bois), Arôgos (Qui vient en aide, Auxiliaire, Défenseur)36, Euagros (De la bonne chasse), Chrusodotês (Qui donne de l’or), Prokathêgetês (Qui conduit, Qui dirige), Lutêrios (Celui qui délivre, Libérateur, Sauveur), Nomios (Pastoral), Euodos (De la bonne route), Sunstrateuomenos (Qui fait campagne avec)37. Les résultats d’une enquête préliminaire montrent qu’il va de même pour les autres dieux olympiens. Athéna et Artémis, toutes deux fatales et impitoyables lorsqu’elles le souhaitent, ne sont pas invoquées au travers d’épiclèses destinées à inspirer la peur à autrui ; une possible exception se trouvant dans le monde de la comédie, où, dans Les Cavaliers, Aristophane parle d’Athéna Phobesistratê (Qui fait peur à l’Armée, c’est-à-dire Qui met l’Armée en déroute)38. Le pouvoir de Poséidon, qui peut ébranler la terre, aurait normalement été effrayant, mais le but premier des épiclèses comme Ébranleur de la terre et ses variantes, ne semble pas être d’inspirer la peur mais plutôt de décrire la puissance du dieu39.
9Certaines épiclèses peuvent naturellement m’avoir échappé, et cet examen, qui repose principalement sur les sources épigraphiques, doit être complété par une étude minutieuse des sources littéraires. Mais à cette étape, il me semble néanmoins évident que l’aspect ouvertement effrayant d’une divinité était rarement exprimé explicitement à travers ses épiclèses cultuelles.
10Prenons encore un exemple. Zeus, le roi des dieux, semble à première vue constituer un cas qui réfute mon hypothèse. Zeus est un dieu riche en épiclèses40, et parmi celles qui nous sont parvenues, l’une en particulier peut être comprise comme particulièrement effrayante : Phonios (Sanglant, Meurtrier). Zeus Phonios est identifié sur un règlement de démarcation limitrophe provenant de Larissa en Thessalie et datant du iiie siècle avant notre ère41. Ce Zeus Meurtrier n’est cependant traditionnellement pas compris comme un meurtrier lui-même, mais plutôt comme un dieu justicier, qui venge la victime du meurtre, ou bien celui qui purifie les meurtriers. Mais s’il s’agissait en fait d’une épiclèse inspirant l’effroi, qui avait alors peur de Phonios ? L’épiclèse Phonios nous conduit à deux difficultés méthodologiques intéressantes. Tout d’abord, nous devons sans doute supposer que ce qui est généralement perçu comme effrayant dans le monde moderne ne l’était pas nécessairement dans le monde ancien, et vice versa. Une épiclèse comme Auantêr, Zeus de la Sècheresse, pouvait en effet être terrifiante pour une société qui dépendait bien plus que la nôtre des pluies ou de l’irrigation pour sa subsistance au quotidien42. Au contraire, des dénominations qui peuvent sembler terrifiantes aujourd’hui, comme Eleneitês (Fou, Celui qui rend fou), et Ômadios, Ômêstês (Mangeur de viande crue, Carnassier), utilisées pour désigner Dionysos, étaient probablement entendues sans ciller dans l’antiquité, car simplement acceptées comme composantes « normales » de la sphère rituelle de Dionysos43. L’épiclèse commune Epiphanês, Epiphanestatos, connue pour Apollon, Arès, Aphrodite, Dionysos et nombre d’autres divinités, et qui désigne un dieu qui fait une apparition, qui est visible et présent, inspirait peut-être une profonde terreur44 : en effet, peut-on être sûr que les humains voulaient que leurs dieux soient présents « en personne », de manière tangible ? De nombreuses leçons mythologiques nous ont prouvé que rencontrer un dieu en personne outrepassait souvent la limite du confortable et que de telles rencontres pouvaient avoir des dénouements tragiques : Sémélé, Anchise et Actéon ne l’ont que trop bien compris et Métaneira est si terrifiée par l’épiphanie de Déméter qu’elle en oublie de reprendre son bébé, jeté à terre par la déesse45. Peut-être aussi que l’épiclèse Meilichios, Meilichia, le plus souvent associée à Zeus mais aussi utilisée pour d’autres divinités, comme Héra et Aphrodite46, constituait-elle un euphémisme pour des aspects de Zeus trop effrayants que pour être nommés. La traduction donnée de Meilichios est souvent « le Bon », « Celui qui apaise », ou « le Bienveillant », mais si l’on creuse un peu, il semble aussi que la notion sous-jacente à cette dénomination était « Who can, but needs to, be propitiated47 ».
11L’autre débat qui se forme autour d’épiclèses comme celle de Phonios se tourne vers leur ambiguïté inhérente, qui les oriente dans deux directions. Zeus Phonios est-il le patron des meurtriers qu’il purifie, ou protège-t-il plutôt les communautés contre les meurtriers en purifiant ces derniers ? Et si cette épiclèse devait être comprise dans le sens de Justicier, ce qui est le cas d’autres épiclèses de Zeus, comme Elasteros, Alastôr, Erinumenos, Hikesios, Palamnaios, Prostropaios, qui devrait alors craindre ce dieu48 ? Un fidèle cherchant à se le concilier ? Un criminel dont la victime fait appel à Zeus pour la venger ? Finalement, les deux hypothèses sont sans doute vraies puisque ces épiclèses sont à double-tranchant, tout comme les dieux qu’elles définissent49. Maria Patera a montré comment Zeus Elasteros ou Alastôr peut poursuivre ou/et purifier un criminel50, tout comme Artémis tue et protège les femmes en couches, Apollon infecte et guérit, Aphrodite peut rendre fertile ou stérile. Seul le contexte précis pouvait révéler la direction dans laquelle la peur frappait, mais ce contexte n’est malheureusement que rarement préservé par nos sources.
12L’étude d’épiclèses suscitant la peur donne donc un résultat plus ou moins négatif. Je pense cependant qu’un résultat négatif est, dans ce cas, enrichissant, puisque l’on peut connecter cette pénurie d’épiclèses terrifiantes à un autre aspect, fondamental, du fonctionnement des épiclèses. Plus haut, j’ai fait brièvement allusion au modus operandi des épiclèses, à leur fonction de désignation d’un aspect d’une divinité à la nature intrinsèquement polyvalente, afin d’établir une communication efficace entre l’homme et la divinité. On pourrait joindre à cela le fait que les épiclèses étaient choisies par un individu ou une communauté dans le cadre d’un contexte spécifique. Il n’y avait de plus pas de limite au nombre d’épiclèses qu’un dieu pouvait recevoir. On pouvait ajouter de nouveaux surnoms à ceux qui étaient déjà en usage si la situation l’exigeait, ou comme résultat d’un événement particulier : Hérodote nous raconte par exemple que les Grecs commencèrent à vénérer Poséidon comme Sôtêr après la destruction de la flotte perse au large du cap Artémision51. Les épiclèses sont donc intimement liées aux souhaits et aux plans du fidèle qui les utilise ; il n’est, de ce fait, pas rare de retrouver cette idée dans la nature même des épiclèses, puisqu’il existe des noms de culte qui font allusion au fondateur du culte en question, des épiclèses personnalisées, comme Héraklès Diomedonteios, de Diomède, ou Isis Aphrodite Dikaia, liée avec le dédicant Dikaios52. Ce lien étroit entre fidèle et épiclèse doit être mis en relation avec la pénurie d’épiclèses destinées à provoquer la peur chez les autres. Cela explique la pléthore de Sôtêres, Prostatêrioi et Epikouroi, mais aussi l’absence d’épiclèses signifiant « Qui anéantit les ennemis », ou « Destructeur de Doriens », pour inventer deux exemples. Les dieux étaient Nikêphoroi, Porteurs de Victoire, pour la personne ou la communauté qui utilisait l’épiclèse, plutôt que Porteurs de Défaite pour les ennemis. En fait, le seul exemple historique avéré d’une déité à laquelle on sacrifiait avant la bataille était Artémis Agrotera (Celle du monde sauvage, De la chasse) : les Spartiates s’adressaient à elle formellement avant de combattre53. Un autre exemple issu de sources historiques concerne la bataille des Platées. Dans le récit d’Hérodote, lorsque les Lacédémoniens ne reçoivent pas de présages favorables avant la bataille, leur chef Pausanias prie Héra des Platéens de ne pas laisser leurs espoirs sans suite. Selon Plutarque à propos du même épisode, Pausanias prie Héra du Cithéron et tous les autres dieux des Platées, les suppliant, même au cas où les Grecs n’emportent pas la victoire, de les laisser au moins accomplir de grands exploits54. Ces prières ne sont pas dirigées à l’encontre de l’ennemi, mais se tournent vers les Grecs eux-mêmes. Les dieux étaient Alexikakoi, Apotropaioi, c’est-à-dire que leurs épiclèses indiquaient qu’ils détournaient le mal du suppliant, pas qu’ils dirigeaient le mal vers quelqu’un d’autre. On peut sans doute demander à un dieu d’inspirer la crainte, à votre endroit ou à l’endroit de qui que ce soit d’autre, mais cela ne semble pas avoir été exprimé au moyen d’épiclèses.
13Il est aussi fort intéressant de constater que de telles épiclèses ne sont pas même d’usage commun dans les textes des tablettes de défixion, de malédiction et d’envoûtement contre les ennemis et les rivaux. Les dieux à qui l’on demandait de l’assistance pour ces affaires sombres sont parfois présentés ou invoqués par le biais d’épiclèses, mais, à la possible exception de Katochos, « Celui qui retient, Qui refoule », ces surnoms n’ont habituellement qu’une fonction de localisation, qui place les dieux invoqués dans le monde souterrain ; ils font ainsi appel à l’aspect chthonien des divinités55. Ainsi, en général, le lien entre dieu et fidèle établi au moyen d’une épiclèse servait en premier lieu à lier ces deux protagonistes et n’incluait ni n’impliquait directement de tierce partie.
14Martin P. Nilsson et Simon Pulleyn ont réfuté que, dans le contexte de la religion grecque, connaître le nom d’un dieu signifiait que l’on avait une forme de pouvoir, magique ou autre, sur cet être divin56. Je suis tout à fait d’accord avec eux et, bien que je me réfère aux épiclèses comme outils utilisés par les humains pour établir un contact avec le monde divin, je n’avance absolument pas que les épiclèses donnaient aux mortels un pouvoir sur les dieux ni qu’elles forçaient les dieux à négocier. Les dieux pouvaient toujours refuser de répondre ou de donner en retour, même si les épiclèses les plus flatteuses étaient utilisées. Je suggère cependant que les épiclèses donnaient un (sentiment d’un) certain pouvoir, non pas dans la relation aux dieux, mais pour le fidèle humain lui-(ou elle-) même. Tandis qu’un dieu dans toute sa puissance, sans l’utilisation d’une épiclèse pour en désigner un aspect, pouvait être écrasant, une déité plus précisément définie pouvait apparaître plus abordable et imaginable. Aphrodite, en elle-même, ne se serait sans doute pas intéressée à un simple marin parmi tant d’autres, mais Aphrodite Euploia, l’Aphrodite « De la Bonne Navigation », pouvait peut-être se montrer mieux disposée à son égard. Les épiclèses peuvent ainsi être vues comme offrant aux fidèles non seulement un outil de communication, mais aussi un instrument grâce auquel ils pouvaient s’adresser à un aspect réduit des dieux, et par ce biais, mieux gérer la peur ressentie face au divin. Le nom seul, sans qualificatif, d’une déité était bien plus terrifiant qu’une épiclèse ouvertement menaçante n’aurait jamais pu l’être57.
15En guise de conclusion, cette étude des épiclèses montre ainsi que, bien que les dieux inspirassent chez leurs fidèles une peur qui faisait partie intégrante de leur échange avec le monde divin, cette peur ne s’exprimait pas au travers des épiclèses des dieux. Les dieux n’ont que peu de surnoms effrayants, et ce manque doit être mis en relation avec le mode de fonctionnement des épiclèses. Les épiclèses se tournent vers et sont en lien étroit avec le fidèle qui les utilise ; elles sont donc principalement positives et rassurantes. Elles n’ont pas pour but de faire peur mais de rassurer ; c’est pour cela que l’on trouve des alliés et des protecteurs, summachoi et prostates, plutôt que des agresseurs. Même les épiclèses à l’aspect possiblement négatif, comme Zeus Auantêr, Zeus De la Sécheresse, qui semblent indiquer une qualité dangereuse du dieu afin de l’éviter, sont rares. Les noms divins bruts étaient en fait probablement plus terrifiants qu’une épiclèse destinée à faire peur ; par conséquent, le système des épiclèses peut être considéré comme une manière de réduire, de restreindre et de mieux gérer une déité prodigieusement redoutable si elle se présentait dans toute sa puissance et sa gloire. Nous connaissons tous le sort de Sémélé lorsqu’elle demanda à Zeus de se révéler à elle sous sa véritable apparence.
Tableau 1. – Épiclèses d’Apollon.
Épiclèse | Traduction | Référence | Lieu | Date | Voir aussi |
Aguieus | Protecteur des rues et des chemins | IG V 1, 1441 | Messène, Messénie | iiie s. av. n. è. | LSJ, s.v. Ἀγυιεύς |
C. Tzouvara-Souli, « Common Cults in Epirus and Albania », dans P. Cabanes (dir.), L’Illyrie méridionale et l’Épire dans l’Antiquité, vol. II, Paris, De Boccard, 1993, p. 65-82 | Ambracie, Épire | iie s. de n. è. | |||
IScM III, 30 | Callatis, Scythie Mineure | ier s. av. n. è.-ier s. de n. è. | |||
IScM II, 116 | Tomis, Scythie Mineure | ii-iiie s. de n. è. | |||
IG II², 4852 | Athènes | iii-iie s. av. n. è. | |||
Pausanias, VIII, 32, 4 | |||||
Pausanias, VIII, 53, 1 | |||||
Akesios | Guérisseur | Pausanias, VI, 24, 6 | |||
Alexikakos | Qui écarte les maux | T. Ritti, C. Simsek et H. Yildiz, « Dediche e καταγραφαί nel sanctuario di Apollo Lairbenos », EA, 32, 2000, p. 1-88, no D3 = MAMA IV, 275 A | Dionysopolis, Phrygie | 174/175 de n. è. | Statue d’Apollon Alexikakos |
SEG XXI, 469 | Athènes | 129/128 av. n. è. | |||
Apotropaios | Qui prévient le mal | IScM III, 48b et 49 | Callatis, Scythie Mineure | iie s. av. n. è. | |
Tit.Cam. 119 | Rhodes | Non datée | |||
A. Laumonier, « Inscriptions de Carie », BCH, 58, 1934, p. 291-380, 345-376, no 39 | |||||
IErythrai 207 = LSAM 26 | Érythrées | 189-150 av. n. è. | |||
SEG XX, 719 | Cyrène | iie s. av. n. è. | |||
SEG XXXIX, 1083 | Massalia | ier s. av. n. è.-ier s. de n. è. | |||
LSAM 56 | Hyllarima, Carie | iie s. av. n. è. | |||
IG II², 4852 | Athènes | iii-iie s. av. n. è. | |||
SEG I, 26 | Pirée | Non datée | |||
Boasôn | Secourable | IG IV 1, 357 | Corinthe ? | cf. l’interprétation du terme Boasôn comme « Belliqueux » | |
Boêdromios | Qui accourt au secours | Pausanias, IX, 17, 2 | cf. l’interprétation du terme comme « Qui pousse un cri (de guerre) » | ||
Borystheneos medeôn | Protecteur de Borysthène | IGDOP 57 et 90 | Olbia du Pont | vie s. av. n. è. | Les mêmes textes qualifient aussi Apollon d’Iêtros (Médecin) |
Dôreios | Généreux | SEG XXXV, 542 et 657 | Pythion, Thessalie | Époque hellénistique | |
Eiêtêr kakôn | Guérisseur des maux | IGBulg III 1, 1475 | Philippopolis, Thrace | ie s. de n. è. | |
Epêkoos | Qui écoute, Attentif | I. Delemen, Anatolian Rider-Gods: A Study on Stone Finds from the Regions of Lycia, Pisidia, Isauria, Lycaonia, Phrygia, Lydia and Caria in the Late Roman Period (Asia Minor Studien, 35), Bonn, Habelt, 1999, p. 91-203, no 293 | Tralles ? | ii-iiie s. de n. è. | |
SEG XVII, 544 | Lycaonie | Période impériale | |||
SEG XXX, 818 | Nikopolis ad Istrum | Non datée | |||
IGBulg I2, 33 | Dionysopolis, Mésie | Non datée | |||
IGBulg II, 592 | Bezhanovo | Non datée | |||
IGBulg III, 1, 943, 1460 et 1467 | Philippopolis | Non datée | |||
IGBulg III, 2, 1859 | Byzyie | iie s. de n. è. | |||
IGBulg III, 2, 1807 et 1795 | Hadrianopolis | Période impériale | |||
IGBulg III, 2, 1746 | Augusta Traiana, Thrace | Période impériale | |||
SEG XXXIII, 589 | Ulpia Traiana, Dacie | iiie s. de n. è. | |||
ID 2365 et 2366 | Délos | Non datées | |||
IPerge 56 | Pergé, Pamphylie | ier s. de n. è. | Apollon aussi appelé Sotêr Pamphulos | ||
ICentral Pisidia 96 | Perminous, Pisidie | i-iie s. de n. è. | |||
A.-E. Contoléon, « Inscriptions inédites », REG, 13, 1900, p. 493-503, 503, n. 2 | Pisidie | Non datée | |||
SEG XVII, 544 | Lycaonie | Période romaine | |||
Epêkoos | Qui écoute, Attentif | G. Dagron, D. Feissel, Inscriptions de Cilicie, Paris, De Boccard, 1987, no 28 | Tarse, Cilicie | ier s. de n. è. | |
SEG XXVIII, 1336 | Nikopolis, Syrie | ii-iiie s. de n. è. | |||
J. Robert et L. Robert, « Bulletin Épigraphique », REG, 76, 1963, p. 121-192, no 150, 5 | Kabylè, Thrace | Non datée | |||
IPrusa ad Olympum 1018 | Pruse d’Olympe, Bithynie | 212 de n. è. | |||
J. Wagner et G. Petzl, « Eine neue Temenos-Stele des Königs Antiochos I. von Kommagene », ZPE, 20, 1976, p. 201-223, 213 | Besni, Commagène | ier s. av. n. è. | |||
RECAM II, 44 et 154 | Galatie | Période impériale | |||
Epikourios | Secourable | Pausanias, VIII, 30, 4 ; 38, 8 | Phigalie, Arcadie | iie s. de n. è. | |
Epimêlidios, Epimêlios | Protecteur des troupeaux | Tit.Cam. 135 | Cameiros, Rhodes | iiie s. av. n. è. | |
Eruthibios | Qui protège les blés de la rouille | Strabon, 13, 1, 64 | Rhodes | ie s. av. n. è. | cf. Apollon Sitalkas, Pausanias, X, 15, 2 (culte non attesté) |
Exêgêtês tôn agathôn | Qui dévoile les bonnes choses | SEG XXI, 469 | Athènes | 129/128 av. n. è. | |
Hagêtor | Conducteur | IG V 1, 977 | Laconie | iiie s. av. n. è. ? | |
Hêgemôn | Guide | O.D. Lordkipanidze, « Gods of the City of Phasis », Vestnik Drevnei Istorii, 220, 1997, p. 15-34 | Phasis, Colchis | ve s. av. n. è. | |
Fayoum 3, 162 | Narmouthis, Egypte | ii-ier s. av. n. è. | |||
Iatros | Médecin | IC II, xix 7 | Phalasarna, Crète | ive s. av. n. è. | |
IScM I, 18, 21, 34, 63, 64, 104, 144, 169, 314a | Istros, Scythie Mineure | v-iiie s. av. n. è. | |||
CIRB 6, 10, 25 | Pantikapaion | ive s. av. n. è. | |||
CIRB 974 | Phanagoria | 304-283 av. n. è. | |||
CIRB 1037 et 1044 | Hermonassa | ive et iie s. av. n. è. | |||
IScM I, 54 | Istropolis | ier s. av. n. è. | |||
Iatros | Médecin | IGDOP 54, 55, 56, 57, 58, 65, 99 | Olbia du Pont | vi-ve s. av. n. è. | |
SEG XXXII, 769 | Olbia du Pont | vi-iie s. av. n. è. | |||
Syll.3 211 | Theodosia | Non-datée | |||
IGBulg I2, 388 bis, 399, 400, 403 | Apollonia du Pont, Thrace | iie s. av. n. è.-époque impériale | |||
Istrô medeôn | Protecteur d’Istros | IGDOP 58 | Olbia du Pont | ve s. av. n. è. | |
Kalymnas medeôn | Qui protège Kalymna | Tit.Cal. 108, 109, 110 | Calymna | ier s. de n. è. | |
Kerdôios | Qui donne du profit | IG IX 2, 512, 517, 521 & IG VII, 4131 | Larissa, Thessalie | iii-iie s. av. n. è. | |
Maloeis | Protecteur des troupeaux | IG XII 2, 484 | Mytilène | ve s. av. n. è. | Pour l’interprétation « de Maloeis », lieu (port ?) à Mytilène, voir J. Robert et L. Robert, « Bulletin épigraphique », REG, 77, 1964, p. 127-259, 227 |
Medeôn Neileô Dêmou | Qui protège le peuple de Nélée | Callimaque, Iambes, I, 36-37 (éd. É. Cahen, CUF) | Milet | iiie s. av. n. è. | |
Nikaios | De la Victoire | R. Arena, Iscrizioni greche arcaiche di Sicilia e Magna Grecia, t. IV : Iscrizioni delle colonie achee, Alexandrie, Edizioni dell’Orso, 1996, no 60 | Métaponte | Époque archaïque | |
Paian, Paiôn | Guérisseur | TAM V/2, 1250 | Hierokaisareia, Lydie | Période impériale | |
IGDS 51 | Sélinonte, Sicile | ve s. av. n. è. | |||
B. Heinrich, « Prehistoric Hydraulic Constructions in the Copais », dans A. Bekiares (dir.), Α΄ Διεθνές Συνέδριο Βοιωτικών Μελετών, ΕΕΒΜ, 1, Athènes, Etaireia Boiotikon Meleton, 1988, p. 43-64, 49-50 | Kopais, Béotie | iii-iie s. av. n. è. | Cf. Pausanias, I, 34, 3 | ||
IScM II, 392 | Tomis, Scythie Mineure | ii-ier s. av. n. è. | |||
Prophylax | Garde d’avant-poste | IG XII 7, 419 | Amorgos | Non datée | |
Prostatêrios, Prostatês | Protecteur | IG II², 702, 790, 848, 890, 902, 915, 916, 917, 920, 967 | Athènes | iii-iie s. av. n. è. | |
D. Knibbe, H. Engelmann et B. Iplikçioglun, « Neue Inschriften aus Ephesos XII », JöAI, 62, 1993, p. 113-150, no 26 | Éphèse | Non datée | |||
IG IV 1², 448 | Épidaure | Période impériale | |||
SEG XXXVI, 801 | Érétrie, Eubée | iiie s. av. n. è. | Voir aussi l’editio princeps avec bibliographie : P. Themelis, « Ερετριακές λατρείες », dans ΦΙΛΙΑ ΕΠΗ εις Γ.Ε. Μυλώναν, vol. II, Athènes, I en Athinais Archailogiki Etaireia, 1987, p. 106-125, 106-108 | ||
LSCG 180 | Paros | iiie s. av. n. è. | |||
G. Siebert, « Rapport sur les travaux de l’École française en Grèce en 1987. Délos, La Maison des sceaux », BCH, 112, 1988, p. 755-768, 765 | Délos | Non datée | |||
IG XII 5, 892 | Ténos | iie s. av. n. è. | |||
IG VII, 39 et 40 | Mégare | iiie s. av. n. è. | |||
Sôtêr | Sauveur | IG IV 1², 423, 449 | Épidaure | Période impériale | |
IPrusa ad Olympum 41 | Pruse d’Olympe, Bithynie | Période impériale | |||
IPerge 56 | Pergé, Pamphylie | ier s. de n. è. | |||
SEG XXI, 469 | Athènes | 129/128 av. n. è. | |||
ICos EV 14 | Cos | ier s. av. n. è. | |||
IMilet I, 7, 279, 280, 281 | Milet | Époque hellénistique | |||
IG XII 5, 11 | Ios | Non datée | |||
IPergamon III, 116 | Pergame | Non datée | |||
Sôzôn | Qui sauve | I. Delemen, op. cit., no 292 = SEG VI, 392 | Sizma, Lycaonie | ii-iiie s. de n. è. | |
SEG VI, 406 | Ikonion, Lycaonie | Période impériale | Voir aussi : W. H. Buckler, W. M. Calder, C. W. M. Cox, art. cité, no 6 | ||
IGAegThrace E459 | Thrace d’Égee | ii-iiie s. de n. è. | Kersênos Sôzôn | ||
SEG I, 463 | Philomelion, Phrygie | Non datée | Lêtoidês Sôzôn | ||
Summachos | Allié | IG XII 5, 134 | Paros | ive s. av. n. è. | |
Sungnômôn | Indulgent, Du même avis | IG IV 1², 432 | Épidaure | 306 de n. è. | |
Xenios | Hospitalier | IChios 45 | Chios | ier s. de n. è. |
Tableau 2. – Épiclèses de Poseidon.
Épiclèse | Traduction | Référence | Lieu | Date | Voir aussi |
Asphaleios | Qui met en sécurité | SEG XXII, 274 | Trézène | 300-265 av. n. è. | |
IG IV2 1, 411 | Épidaure | avant 231 de n. è. | |||
ID 440 | Délos | 198-180 av. n. è. | |||
IDidyma 132 | Didymes | Non datée | |||
Tit.Cam. 129 | Cameiros | Non datée | |||
IG V 1, 559 | Sparte | ii-iiie s. de n. è. | |||
IG V 2, 454 | Megalopolis, Arcadie | iie s. av. n. è. | |||
IG XII 5, 913 | Ténos | iie s. av. n. è. | |||
ICos 154 et 199 | Cos | Période impériale et iie s. de n. è. | |||
J. Marcillet-Jaubert, « Une nouvelle inscription grecque à Falaika », dans Y. Calvet et J. Gachet (dir.), Falaika. Fouilles françaises, 1986-1988, Lyon, Maison de l’Orient et de la Méditerranée Jean Pouilloux, 1990, p. 193-195 | Falaika | iiie s. av. n. è. | |||
Ennosigaios | Pausanias, X, 5, 6 | Delphes, Phokis ? | iie s. de n. è. | ||
Enosichthôn | IGR III, 1365 | Gerasa | 150-200 de n. è. | Dédicace pour Zeus Poséidon Enosichthôn Sôtêr | |
Homère, Iliade, VII, 445 | |||||
Gaiouchos | Qui protège ou tient la terre | IG XII 3, 1371 | Théra | Époque archaïque | |
Pausanias, III, 20, 2 | Phoibaion | iie s. de n. è. | |||
Pausanias, III, 21, 8 | Gutheion | iie s. de n. è. | |||
Phutalmios | Qui fait croître | LSAM 25 | Érythrées, Ionie | iiie s. av. n. è. | |
Pausanias II, 32, 8 | Trézène, Argolide | iie s. de n. è. | |||
IG IV, 797 | Trézène | Non datée | |||
IG XII 1, 905 | Lindos | iiie s. av. n. è. | |||
Tit.Cam. 137 | Cameiros | iiie s. av. n. è. | |||
Seisichthôn | Qui ébranle la terre | ITralleis 1 | Tralles | ii/iiie s. de n. è. | |
IDidyma 133 | Didymes | Période impériale | |||
Sôsineôs | Qui sauve les navires | IG XII, suppl. 280 | Andros | ive s. av. n. è. | |
CIRB 30 | Pantikapaion | 47-14 av. n. è. | |||
Sôtêr | Sauveur | Hérodote, VII, 192 | |||
IDidyma 132 | Didymes | iie s. av. n. è. | |||
IG II2, 1300 (largement restaurée) | Sounion | iiie s. av. n. è. | |||
Themeliouchos | Qui soutient les fondements de la Terre | SEG XXX, 93 | Éleusis | 20/19 av. n. è. |
Notes de bas de page
1 A. Chaniotis, « Constructing the Fear of Gods: Epigraphic Evidence from Sanctuaries of Greece and Asia Minor », dans A. Chaniotis (dir.), Unveiling Emotions. Sources and Methods for the Study of Emotions in the Greek World, Stuttgart, Franz Steiner, 2012, p. 205-234, 205-206.
2 Pour Actéon, voir par ex. Pseudo-Apollodore, III, 30 ; Callimaque, Hymnes, V, 106-115 ; Pausanias, IX, 2, 3 ; Diodore de Sicile, IV, 81, 3-5 ; L. R. Lacy, « Aktaion and a Lost Bath of Artemis », JHS, 110, 1990, p. 26-42. Pour Niobé, voir par ex. : Iliade, XXIV, 602 et suiv. ; Pseudo-Apollodore, III, 46.
3 L’épiphanie a été traitée récemment par V. Platt, Facing the Gods. Epiphany and Representation in Graeco-Roman Art and Literature, Cambridge, Cambridge University Press, 2011 ; V. Platt, « Epiphanies », dans E. Eidinow et J. Kindt (dir.), The Oxford Handbook of Ancient Greek Religion, Oxford, Oxford University Press, 2015, p. 491-504 ; G. Petridou, Divine Epiphany in Greek Literature and Culture, Oxford, Oxford University Press, 2015. Voir aussi l’article classique de H. S. Versnel, « What Did Ancient Man See When he Saw a God? Some Reflections on Greco-Roman Epiphany », dans D. van der Plas, Effigies Dei, Leyde, Brill, 1987, p. 35-41. La proximité imminente d’un danger ou d’un mal est une condition préalable pour avoir peur : Aristote, Rhétorique, II, 5, 1382a21-33 ; voir aussi M. Patera, « Reflections on the Discource of Fear in Greek Sources », dans A. Chaniotis et P. Ducrey (dir.), Unveiling Emotions, t. II : Emotions in Greece and Rome: Texts, Images, Material Culture, Stuttgart, Franz Steiner, 2013, p. 109-133, 117-119.
4 Anchise : Hymne homérique à Aphrodite, 180-190. Tithônos : Hésiode, Théogonie, 983 ; Hymne homérique à Aphrodite, 218-239. Sémélé : Euripide, Les Bacchantes, 288-289, 524-525 ; Pseudo-Apollodore, III, 4, 3.
5 Pour le besoin des dieux (ou non) de sacrifices et offrandes : J. Rudhardt, Du mythe, de la religion grecque et de la compréhension de l’autrui, RESS (CVP), t. 19, no 58, 1981, p. 5-284, 237-239 ; R. Parker, « Pleasing Thighs », dans C. Gill, N. Postlethwaite et R. Seaford (dir.), Reciprocity in Ancient Greece, Oxford, Oxford University Press 1998, p. 105-125 ; J. Wallensten, « Closing in on the Gods. Indirect Communication between Mortals and Immortals », dans N. Sojc, M. de Cesare et E. C. Portale (dir.), The Akragas Dialogue. New Investigations on Sanctuaries in Sicily, Berlin/Boston, De Gruyter, 2020, p. 9-26, 10.
6 Voir par ex. A. Chaniotis, art. cité, p. 205.
7 Pausanias, VII, 24, 5-6 et 25, 1.
8 Critias, 88 B 25 (éd. H. Diels et W. Kranz). Cf. Strabon, I, 2, 8. Sur une peur « utile », voir M. Patera, art. cité, p. 110-112, 119.
9 Pour une discussion sur l’évhémérisme, des dieux éternels et cosmiques, « originaux », et des dieux terrestres ajoutés au panthéon plus tard par la divinisation des mortels, voir P. Borgeaud, « Variations évhéméristes », RHR, 234, 2017, p. 593-612, et dans ce volume.
10 A. Chaniotis, art. cité, passim ; P. Borgeaud, dans ce volume, aussi avec des références à des époques plus récentes. Notons aussi l’étude brillante du même auteur sur la crainte des dieux chez les Grecs et dans d’autres cultures/religions : P. Borgeaud, « La crainte des dieux », Asdiwal, 3, 2008, p. 23-39 (aussi paru dans P. Borgeaud, Exercices d’histoire des religions. Comparaison, rites, mythes et émotions [Jerusalem Studies in Religion and Culture, 20], éd. D. Barbu et P. Matthey, Leyde/Boston, Brill, 2016, p. 312-330).
11 Lucien, Alexandre ou le faux prophète, 8.
12 Pour une discussion de la réciprocité entre hommes et dieux de différents points des vues, cf. R. Parker, « Pleasing Thighs », art. cité, passim.
13 Cf. P. Borgeaud, op. cit., p. 315, n. 3, pour un contexte chrétien.
14 Notons aussi qu’Apollon est en général très riche en épiclèses, au contraire d’Arès et Pan.
15 Zeus Sôtêr, voir par ex. IG II², 2869 ; SEG XV, 332 ; SEG XXVI, 718. Athéna Nikêphoros : par ex. G. Seure, « Inscriptions de Thrace », BCH, 24, 1900, p. 147-169, 165, no 8 ; IPergamon I, 60 et 64 ; IKition 2003. Artemis Lochia : par ex. IG IX 2, 142 ; IThespies 249 ; SEG XLVII, 902. Aphrodite Euploia : IG II2, 2872 ; IosPE I2, 168 ; IGR III, 921.
16 Sur la fonction des épiclèses, voir par ex. P. Brulé, « Le langage des épiclèses dans le polythéisme hellénique », Kernos, 11, 1998, p. 13-34 ; R. Parker, « The Problem of the Greek Cult Epithet », Opuscula Atheniensia, 28, 2003, p. 173-183 ; N. Belayche et al. (dir.), Nommer les dieux. Théonymes, épithètes, épiclèses dans l’Antiquité, Turnhout/Rennes, Brepols/Presses universitaires de Rennes, 2005 ; J. Wallensten, « Personal Protection and Tailor-made Deities: The Use of Individual Epithets », Kernos, 21, 2008, p. 81-95 ; J. Wallensten, « Dedications to Double Deities. Syncretism or Simply Syntax? », Kernos, 27, 2014, p. 159-176 ; S. Lebreton et C. Bonnet, « Mettre les polythéismes en formules ? À propos de la base de données Mapping Ancient Polytheism », Kernos, 32, 2019, p. 267-296 ; C. Bonnet et al., « Mapping Ancient Gods : Naming and Embodiment Beyond “Anthropomorphism”. A Survey of the Field in Echo to the Books of M. S. Smith and R. Parker », Mediterr. Hist. Rev., 34/2, 2019, p. 207-220.
17 Sur la complexité des dieux grecs, la bibliographie est, évidemment, très large. Voir récemment : R. Parker, On Greek Religion, Ithaca (NY), Cornell University Press, 2011 ; H. S. Versnel, Coping With the Gods. Wayward Readings in Greek Theology, Leyde, Brill, 2011 ; V. Pirenne-Delforge et G. Pironti, « Many vs. One », dans E. Eidinow et J. Kindt (dir.), op. cit., p. 39-47 ; V. Pirenne-Delforge, Le Polythéisme grec comme objet d’histoire (Leçons inaugurales du Collège de France, 274), Paris, Collège de France/Fayard, 2018.
18 Sôzôn : W. H. Buckler, W. M. Calder, C. W. M. Cox, « I. Monuments from Iconium, Lycaonia and Isauria », JRS, 14, 1924, p. 24-50, no 6 (SEG VI, 406). Sur les épiclèses Sôtêr, Soteira, voir aussi les publications récentes de T. Jim, « Can Soteira Be Named? The Problem of the Bare Trans-divine Epithet », ZPE, 195, 2016, p. 63-74, et F. Graf, « Theoi Soteres », ARG, 18-19, 2017, p. 239-253. Apollon Prostatêrios (comme Zeus Sôtêr et Athena Sôteira) était l’un des protecteurs de la Boulé athénienne (voir par ex. IG II², 674 et 790, et J. Mikalson Religion in Hellenistic Athens, Berkeley/Los Angeles, University of California Press, 1998, p. 115-116), mais il était aussi considéré comme protecteur contre les maladies et spécifiquement en ce qui concerne l’épidémie qui a frappé Athènes au ve s. av. n. è. : C. Marconi, Temple Decoration and Cultural Identity in the Archaic Greek World. The Metopes of Selinus, Cambridge, Cambridge University Press, 2007, p. 197.
19 IG II2, 4334. Pour Erganê, voir par ex. R. Parker, op. cit., p. 409, 464-465 ; A. Villing, Athena as Ergane and Promachos: The Iconography of Athena in Archaic Greek East, Londres, Duckworth, 1998 ; J. Mikalson, Athenian Popular Religion, Chapel Hill, UNC Press Books, 1983, p. 141, n. 21.
20 IG IX 2, 418 (Pherai, Thessalie, non datée) ; SEG XLI, 744 (Eleutherna, Crète, iie s. av. n. è., restaurée) ; A. Schachter, Cults of Boiotia, vol. 1, Oxford, Oxford University Press, 1981, p. 160 ; M. P. Nilsson, Geschichte der griechischen Religion, Munich, C. H. Beck, 19743 (1941-1950), p. 468-469.
21 Clément d’Alexandrie, Protreptique, II, 38, 4 ; Pausanias, V, 14, 1.
22 Hymne homérique à Apollon, 1-5.
23 Bailly, s.v. ἀτάσθαλος : follement orgueilleux, présomptueux jusqu’à la démence ; s.v. atasthalia : folle présomption, orgueil insensé, méchanceté. LSJ, s.v. : reckless, presumptuous, wicked. Excessivement violent : voir la traduction de S. Shelmerdine, The Homeric Hymns, Newbury (MA), Duckworth, 1995, Hymne homérique à Apollon, 67. Pour Apollon, voir par ex. F. Graf, Apollo, Londres/New York, Routledge, 2009.
24 Voir : [https://epiclesesgrecques.univ-rennes1.fr/infos.php] (consulté le 19 juillet 2020). Notons que certaines sources sont littéraires et qu’il n’y a pas de vérification de l’usage cultuel pour toutes les épiclèses.
25 Hekatêbolos, Hekêbolos, Hekatêbeletês : D. Knoepfler, « Haltère de bronze dédié à Apollon Hékabolos dans la collection G. Oritz (Genève) », CRAI, 138/2, 1994, p. 337-379 (Thessalie, ve s. av. n. è.). Notons que cette inscription se trouve sur un haltère de sauteur ; IG IV, 1014-1015 = IG IV 1², 426-427 (Épidaure, 297 de n. è.) ; IG XII 5, 42 (Naxos), 147 et 148 (Paros). Voir LSJ, s.v. Ἑκήβολος pour « Celui qui atteint sa cible » compris comme « Celui qui décoche ses flèches de loin » par les anciens.
26 La dénomination Loimios, « De la peste », peut-être même « Celui qui apporte la peste » n’est connue qu’au iv-ve s. de notre ère, et un culte n’est pas attesté : Macrobe, Saturnales, I, 17, 15.
27 V. Karagheorgis, « Chronique des fouilles et découvertes archéologiques à Chypre en 1987 », BCH, 112, 1988, p. 793-855, 812 (Chypre, époque hellénistique).
28 Déjà Strabon était intrigué par cette épiclèse mais a compris autre chose, une signification relative à oulein, « être en bonne santé » : Strabon, XIV, 1, 6. Pour le culte d’Apollon Oulios et l’épiclèse encore interprétée comme « Guérisseur », voir O. Masson, « Le culte ionien d’Apollon Oulios d’après des données onomastiques nouvelles », JS, 1988, p. 173-183. Autres exemples : ILindos 131e, 228, 282, 294, 299c, 308, 317, 347, 349, 350, 378 (Lindos, ii-ier s. av. n. è.) ; voir aussi J.-P. Morel, « Observations sur les cultes de Velia », dans A. Hermary et H. Tréziny (dir.), Les Cultes des cités phocéennes, Aix-en-Provence, Édisud/Centre Camille-Jullian, 2000, p. 33-49 (Élée, non datée).
29 Pour une liste, non exhaustive, mais qui montre bien la gamme des épiclèses rassurantes utilisées, voir tableau 1. Notons aussi les épiclèses relatives aux groupes de professionnels, fonctionnaires, etc., qui expriment certainement un aspect de protecteur : Stratêgios (Des Stratèges) : IG XII 1, 161. Magirios, Megeirios (Des Bouchers ?) : SEG XXIII, 622 ; O. Masson, « Kypriaka II-III », BCH, 90, 1966, p. 1-31. Kition, Chypre, hellénistique). Nefelideôn (Des Oiseleurs ?, Érythrées, ive s. av. n. è.). Thearios (Des Théores) : IG IV, 748, l. 15-16 et 755, l. 10-11 (Trézène, iv-iiie s. av. n. è., cf. Pausanias II, 31, 6).
30 Pseudo-Hésiode, Le Bouclier, 192, 441 : Oulios (Funeste). Iliade, V, 31, 455, 844 : Miaiphonos (Souillé d’un meurtre, Homicide, Meurtrier). Iliade, V, 31, 455, 518 ; Odyssée, VIII, 115 : Brotoloigos (Funeste aux mortels, Qui détruit les mortels). Iliade XV, 127 : Thouros (Qui s’élance, Impétueux). Iliade, II, 651 ; IV, 441 ; VII, 166 ; VIII, 264 ; XVII, 259 : Andreiphontês, Androphonos (Tueur d’hommes). Cf. A. T. Millington, War and the Warrior: Functions of Ares in Literature and Cult, thèse de doctorat, University College, Londres, 2013, p. 21-72.
31 Pour les cultes d’Arès, plus répandus qu’on ne l’a pensé jusqu’ici, voir par ex. M. Gonzalez, « The Oracle and Cult of Ares in Asia Minor », GRBS, 45, 2005, p. 261-283 ; P. Bruneau, « Ares », LIMC, II/1, Zürich, Artemis Verlag, 1986, p. 479-492. Susan Deacy discute le caractère complexe d’Arès en comparaison avec l’Athéna guerrière dans S. Deacy, « Athena and Ares: War, Violence and Warlike Deities », dans H. van Wees (dir.), War and Violence in Ancient Greece, Londres, The Classical Press of Wales, 2000, p. 285-298. F. Jouan, « Le dieu Arès : figure rituelle et image littéraire », dans A. Caquot et P. Canivet (dir.), Ritualisme et vie intérieure : religion et culture, Paris, Beauchesne, 1989, p. 125-140 ; A. T. Millington, op. cit.
32 Megistos Theos (Le plus grand dieu) : F. Schindler, Die Inschriften von Bubon (Nordlykien), Vienne, Austrian Academy of Sciences Press, 1972, no 4 (Bubon, Lycie, après 211 de n. è.). Patrôios (Ancestral) : SEG XXXVIII, 1578 et 1579 (Palmyre, non datée et iiie s. de n. è., respectivement) ; IG XIV, 962 (Rome, iie s. de n. è.). Hippios (Des chevaux) : Pausanias, V, 15, 6 (Olympie, Élide, iie s. de n. è. ?). Knosos (De Knossos ?, culte non attesté) : IC I, viii 4 (Knossos, ve s. av. n. è.). Theos Epiphanestatos (Très visible, présent) : ISide 377 (Sidè, Pamphylie, impériale. L’inscription est très restaurée). Le sens de Halos (IG VII, 2808, Hyettos, Béotie, iiie s. de n. è.) n’est pas clair, comme pour Blêkouros (SEG LIII, 802bis, Sosnovka, Thrace, ii-iiie s. de n. è.). Kiddeudas (SEG XXXIII, 1159, Burdur, non datée) renvoie probablement à un lieu de culte. Polupalamas (Aux nombreuses mains), est un autre hapax intéressant pour Arès (G. Oliverio, G. Pugliese Carratelli et D. Morelli, « Supplemento epigrafico cirenaico », ASAA, 39-40, 1961-1962, p. 219-375, no 156, Cyrène, non datée). Neos n’est pas strictement une épiclèse d’Arès, mais en combinaison avec le théonyme, une épiclèse de la personne honorée, Gaius Caesar, fils de Drusus, Neos Arês (IMylasa 135, Mylasa, 5 av. n. è.-2 de n. è.) ; cf. J. Wallensten, « New Gods for a New World: Observations on an Epigraphic Interplay between Greeks and Romans (part 1-3) », CAES, 3/4, 2017, p. 25-40 ; 4/1, 2018, p. 37-48 ; 4/2, 2018, p. 2-17. La dénomination Kurios Suregethes (Maître, Suregethes) montre une association avec un dieu local de ce nom : V. Najdenova, « A Shrine of Ares Suregethes in Thrace », dans A. Fol, V. Zhivkov et N. Nedjalkov (dir.), Acta Centri Historiae Terra Antiqua Balcanica, vol. 2, Sofia, Académie bulgare des sciences, Comité de la culture/université de Sofia « Kliment Ohridski »/Association internationale d’épigraphie grecque et latine, 1987, p. 252-258, Prilepsi, Thrace, ii-iiie s. de n. è. Thêritas est une appellation qui vient du nom de la nourrice du dieu, Thêrô, ou, d’après Pausanias, parce qu’un guerrier doit apparaître aussi terrible qu’une bête sauvage (thêr) dans la bataille : Pausanias, III, 19, 8 (Amyclées, Laconie, iie s. de n. è.). Un cas possible de Megistos Arès Ouranios (Le plus grand du ciel) : ID 2312 (Délos, non datée).
33 Aphneios : Pausanias, VIII, 44, 7-8 (Tégée, Arcadie, iie s. de n. è.) ; Epêkoos : IPerge 234 (Pergé, Pamphylie, ii-iiie s. de n. è.) ; IG XIV, 962 (Rome, iie s. de n. è.). Summachos : A. Bernand, Pan du désert, Leyde, Brill, 1977, no 3 (Wadi Bir el-Aïn, Égypte, époque ptolémaïque). Euagros et Nikêphoros : ibid., no 85 (Égypte, 210-204 av. n. è.). Poliouchos : IAnazarbos 52 (Anazarbos, Cilicie, 153 de n. è.).
34 Arès est toujours identifié à Enyalios dans l’Iliade : A. T. Millington, op. cit., p. 72, n. 389.
35 Enyalios : IG II2, 1072 (Athènes, 116/117 de n. è.) ; IG IV 1, 717 (Hermione, iie s. de n. è.) ; SEG VI, 597 (Pisidie, ier s. de n. è.). Epêkoos (Attentif, Qui écoute les prières) : IPerge 234-235 (ii-iiie s. de n. è.) ; IG XIV, 962 (Rome 134 de n. è.) ; SEG XV, 817 (Savatra, Lycaonie, impériale, cf. SEG VI, 455). Chalkeolongchos : SEG XXXV, 503 (Atrax, Thessalie, non datée). Hoplophoros : SEG VIII, 32 (Nysa-Skythopolis, Palestine, iiie s. de n. è.). Thourios : ce surnom se trouve dans le contexte d’une divination aux dés, d’un oracle sous la protection d’Arès, et n’a peut-être pas été utilisé en contexte cultuel, voir par ex. ILaodikeia am Lykos 69 et TAM III/1, 34 (Laodicée du Lykos, Phrygie, ii-iiie s. de n. è.) ; SEG XXXI, 1285 ; ICentral Pisidia 5 (Kremna, Pisidie, iie s. de n. è.). Le sens du terme Thouros qualifiant Arès dans l’Iliade est peut-être parfois « fidèle » : l’adjectif « appears to have more to do with stubborn defence than with rushing impetuous, furious attack » dans l’Iliade, et à Athènes à l’époque classique le mot est utilisé plutôt pour dire la « force/puissance martiale » (« martial power ») : A. T. Millington, op. cit., p. 53-54, 141. Pour Thêritas, voir supra, n. 32.
36 Notons aussi un deuxième sens : « Vengeur » (Bailly, s.v. Arôgos).
37 Huloskopos, Kupharissitas (Des cyprès [ou de Kyparissa ?]) : IC I, xvi 7 (Lato, Crète, ii-ier s. av. n. è.). Arôgos : IPriene 108 (Priène, Ionie, après 129 av. n. è.). Euagros : E. Bernand, Inscriptions métriques de l’Égypte gréco-romaine. Recherches sur la poésie épigrammatique des Grecs en Égypte (Annales littéraires de l’université de Besançon, 98), Paris, Les Belles Lettres, 1969, no 164 (El-Kanaïs, Paneion, Égypte, fin iiie s. av. n. è.). Euodos : A. Bernand, De Koptos à Kosseir, Leyde, Brill, 1972, nos 141 (el-Boueib, iiie s. av. n. è.), 149, 158, 159, 170 (el-Boueib, non-datées). Lutêrios : Pausanias, II, 32, 6 (Trézène, Argolide, iie s. de n. è.). Nomios/Nomaios/Naios : K. Tsantanoglou, « Πὰν Νάϊος », Hellenika, 51, 2001, p. 153-155 = EBGR 2000 (2003), no 218 (Pydna, Piérie, ve s. av. n. è.). Sunstrateuomenos : A. Bernand, Pan du désert, op. cit., no 3 (Wadi Bir el-Aïn, Égypte, ptolémaïque), cf. R. Parker, Greek Gods Abroad. Names, Natures, and Transformation, Oakland, University of California Press, 2017, p. 109. Chrusodotês : A. Bernand, De Koptos à Kosseir, op. cit., nos 158, 163, 166 (el-Boueib, non-datées). Prokathêgetês : IG V 2, 93 (Tégée, iie s. de n. è.). Aussi Sinoeis (de la nymphe Sinoé) : IG V 2, 429 = IPArk 27 (Phigalie, Arcadie, non datée) ; Pausanias, VIII, 30, 2-3. Oreios (Des montagnes) : A. Bernand, De Koptos à Kosseir, op. cit., no 150 (el-Boueib, non datée).
38 Aristophane, Les Cavaliers, 1177.
39 Pour une liste, non exhaustive, des épiclèses rassurantes de Poséidon, voir tableau 2. Pour Poséidon et les séismes, voir J. Mylonopoulos, « Poseidon, der Erdschütterer. Religiöse Interpretationen von Erd-und Seebeben », dans E. Olshausen et H. Sonnabend (dir.), Naturkatastrophen in der antiken Welt, Stuttgart, Franz Steiner, 1998, p. 82-89.
40 Pour Zeus et ses épiclèses, voir par ex. S. Lebreton, « Zeus Polieus à Athènes. Les Bouphonies et au-delà », Kernos, 28, 2015, p. 85-110 ; K. Dowden, Zeus, Londres/New York, Routledge, Taylor & Francis Group, 2006 ; A. B. Cook, Zeus: A Study in Ancient Religion, t. II : Zeus of the Dark Sky (Thunder and Lightning), Cambridge, Cambridge University Press, 1925.
41 Zeus Phonios : B. Helly, « À Larisa : bouleversements et remise en ordre de sanctuaires », Mnemosyne, 23, 1970, p. 249-296 ; F. Salviat et C. Vatin, Inscriptions de Grèce centrale, Paris, De Boccard, p. 9-34 ; cf. M. Mili, Religion and Society in Ancient Thessaly, Oxford, Oxford University Press, 2015, p. 111-112 pour Zeus Thaulios comparé à Phonios. Zeus Palamnaios, ou Palamnios (IG IX 2, 291, Gomphoi, Thessalie, non datée), traduit comme « coupable de violence, donc meurtrier » par le LSJ, s.v., et comme « qu’invoquent les meurtriers » par P. Ellinger, est aussi utilisé dans les rites purificatoires des meurtriers : voir P. Ellinger, « Zeus et les limites de la répression », dans J.-M. Bertrand (dir.), La Violence dans les mondes grec et romain, Paris, Publications de la Sorbonne, 2019, p. 349-363.
42 IG II², 2606, horos provenant probablement de Thorikos, marqueur de frontière, ive s. av. n. è.
43 Eleneitês : IByzantion S6. Ômadios : Euelpis de Carystos, FHG IV, p. 408. Ômêstês : Alcée, fr. 306Ea ; Plutarque, Vie de Thémistocle, 13 ; Vie de Pélopidas, 21 ; Vie d’Aristide, 9. Pour la discussion autour des possibles sacrifices humains offerts à Dionysos Ômestês, voir par ex. A. Henrichs, « Human Sacrifice in Greek Religion: Three Case Studies », dans H. Yunis (dir.), Myth and Religion. Collected Papers, t. II, Boston (MA), De Gruyter, 2019 ; S. Lebreton, « Dionysos Ômèstès (Plutarque, Vie de Thémistocle, 13 ; Vie d’Antoine, 24) », dans L. Bodiou et al. (dir.), Chemin faisant. Mythes, cultes et société en Grèce ancienne. Mélanges en l’honneur de Pierre Brulé, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2009, p. 193-203 ; P. Bonnechere, Le Sacrifice humain en Grèce ancienne (Kernos, suppl. 3), Athènes/Liège, Presses universitaires de Liège, 1994, p. 288-291 ; D. D. Hughes, Human Sacrifice in Ancient Greece, Londres/New York, Routledge, 1991, p. 111-115.
44 Apollon : MAMA IV, 277 A I (Dionysopolis, iie s. de n. è.). Pour Dionysos, voir par ex. : IG XII 3, 420 (Théra, non datée) ; SEG XX, 37 (Dorylée, Phrygie, ii-iiie s. de n. è.) ; IG XIV, 716, 717 (Naples, Campanie, ii-iiie s. de n. è.). Ares : ISide II, 377 (Sidè, Pamphylie, impériale). Aphrodite : SEG XIII, 458 (Lampsaque, Mysie, ii-ier s. av. n. è.). Au sujet des épiphanies, voir H. S. Versnel, op. cit ; V. Platt, op. cit. ; G. Petridou, op. cit.
45 Pour Sémélé et Anchise, voir les références en supra, n. 4. Pour Actéon, voir les références, supra, n. 2. Métaneira : Hymne homérique à Déméter, 281-284.
46 Aphrodite Milichia : IG IV2 1, 282 (Épidaure, iv-iiie s. av. n. è.) ; Héra Meilichia : IC III, iii 14 (Hierapytna, ier s. de n. è.) ; Meilichioi : IG IX 2, 1329 (Thèbes de Phthiotide, iie s. av. n. è.).
47 Interprétation de l’épiclèse par R. Parker, s.v. Meilichios, dans Oxford Classical Dictionary ; cf. M. H. Jameson, D. R. Jordan et R. D. Kotansky, A Lex Sacra from Selinous (GRBS Monographs, 11), Durham (NC), Duke University, 1993, p. 81-102, 91-92. Voir aussi N. Cusumano, « Zeus Meilichios », Mythos, 3, 1991, p. 19-47. R. Parker, Polytheism and Society at Athens, Oxford, Oxford University Press, 2005, p. 424-425 ; G. V. Lalonde, Horos Dios: An Athenian Shrine and Cult of Zeus, Leyde/Boston, Brill, 2006 ; M. Mili, s.v. Meilichios, Theoi Meilichioi, dans The Encyclopedia of Ancient History, [https://0-onlinelibrary-wiley-com.catalogue.libraries.london.ac.uk/doi/10.1002/9781444338386.wbeah17267]. Cf. M. Mili, op. cit., p. 112-114, n. 36 : Zeus Thaulios comme similaire à Meilichios. Cependant, même s’il fallait se le concilier, Zeus Meilichios aurait pu être avant tout en charge de la protection de petits groupes de personnes apparentées, et en particulier du noyau familial : M. Mili, op. cit., p. 113.
48 M. Mili, op. cit., p. 112. Pour une excellente discussion sur ces termes, épiclèses de Zeus inclues, et leur bibliographie, voir M. Patera, « Alastores et Elasteroi : à propos de la loi sacrée de Sélinonte », Mètis, N.S. 8, 2010, p. 277-308. Hikesios : H. J. Stukey, « The Cretan Hikesioi », CP, 32, 1937, p. 32-43 ; H. Jameson, D. R. Jordan et R. D. Kotansky, op. cit., p. 55.
49 Tout comme Alastôr et Elasteros : les termes désignent la personne coupable d’un crime et les êtres vengeurs qui la chassent : M. Patera, « Alastores et Elasteroi », art. cité, p. 281, 297 ; M. H. Jameson, D. R. Jordan et R. D. Kotansky, op. cit., p. 54, 116-120.
50 M. Patera, « Alastores et Elasteroi », art. cité, p. 290 ; M. H. Jameson, D. R. Jordan et R. D. Kotansky, op. cit., p. 116-120 ; A. B. Cook, op. cit.
51 Hérodote, VII, 192.
52 J. Wallensten, « Personal Protection and Tailor-made Deities », art. cité ; J.-M. Carbon et V. Pirenne-Delforge, « Priests and Cult Personnel in Three Hellenistic Families », dans M. Horster et A. Klöckner (dir.), Cities and Priests. Cult Personnel in Asia Minor and the Aegean Islands from the Hellenistic to the Imperial Period (RGVV, 64), Berlin/Boston, De Gruyter, 2013, p. 65-120.
53 M. H. Jameson, Cults and Rites in Ancient Greece. Essays on Religion and Society, Cambridge, Cambridge University Press, 2014, p. 112, avec bibliographie.
54 Hérodote, IX, 61, 3-62, 2 ; Plutarque, Vie d’Aristide, 17-18.
55 Pour Κάτοχος, voir par ex., A. M. H. Audollent, Defixionum tabellae quotquot innotuerunt, tam in Graecis Orientis quam in totius Occidentis partibus praeter Atticas in Corpore Inscriptionum Atticarum editas, Paris, Fontemoing, 1904, no 50 ; Chthonios : voir par ex. ibid., no 52 ; Katachthonios : voir par ex. ibid. nos 51, 74, 75.
56 S. Pulleyn, « The Power of Names in Greek Religion », CQ, 44, 1994, p. 17-25 ; M. P. Nilsson, op. cit., p. 81.
57 Cf. Platon, Philèbe, 12c, avec la discussion pertinente de S. Pulleyn, art. cité, p. 21.
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