Chapitre I. Le flou : un effet et un terme de peinture
p. 37-66
Texte intégral
Vocabulaire d’atelier de peinture
1Il ne sera possible de saisir les enjeux de la rencontre entre la photographie et le flou qu’à la condition de comprendre, en premier lieu, la manière dont la notion se forge et prend son sens au contact de la peinture. Comment le terme « flou » est-il compris, entendu, appréhendé et utilisé au moment de l’invention de la photographie ? Quelle couleur et quelles valeurs le mot véhicule-t-il ? Puisque, comme l’affirme Ludwig Wittgenstein, « la signification d’un mot est son usage dans le langage1 », parcourons quelques-unes des occurrences historiques du terme pour comprendre son évolution jusqu’au début du xixe siècle. Dès la fin du xviie siècle, époque à laquelle tous les dictionnaires postérieurs datent l’apparition du mot, « flou » appartient au seul vocabulaire pictural, dont il constitue un terme spécialisé pour décrire esthétiquement des œuvres aux caractéristiques multiples. Alors que « floup » apparaît dans le dictionnaire de Pierre Borel de 1655 sans référence à la peinture (comme le simple équivalent de « flouet2 »), André Félibien, en 1676, ancre le mot et son orthographe moderne dans le domaine pictural, « pour exprimer en termes de Peinture, la tendresse et la douceur d’un ouvrage3 ».
2Les dictionnaires généralistes et spécialisés des deux siècles suivants ne dérogent pas à cette règle, et classent le terme dans les vocabulaires critiques et techniques de la peinture. Au xviiie siècle, l’Encyclopédie de Denis Diderot et Jean Le Rond, dit d’Alembert, entame sa définition par « Flou (peinture)4… », et le dictionnaire de l’Académie française considère qu’il s’agit d’un « terme de peinture5 » tant en 1762 qu’en 1798. Au xviiie et au xixe siècle, la description de « flou » comme « terme de peinture » se retrouve dans la quasi-totalité des dictionnaires, qu’il s’agisse du Traité d’orthographe françoise de Charles Leroy qui se limite en 1755 à cette définition, du Dictionnaire universel de Maurice Lachâtre en 1865 ou de l’ouvrage d’Émile Littré en 18746. Dans cette unanimité lexicale, une définition de 1884 omet l’usage purement « pictural » du terme au profit d’une légère ouverture sur l’ensemble des arts graphiques : « Flou. – Effacé. Se dit d’œuvres dont les contours ou le modelé sont vaguement indiqués7. » Et ce n’est qu’en 1932 que l’Académie brise, mais de manière extrêmement discrète, cette exclusivité picturale, car elle stipule que le mot « est employé surtout en termes de Peinture8 » et mentionne également la sculpture, mais sans référence aucune à la photographie.
3Dans la première moitié du xixe siècle, le terme appartient pleinement au vocabulaire pictural, comme le confirment également quelques extraits de la littérature. Dans Une fille d’Ève notamment, Honoré de Balzac utilise le terme à deux reprises en précisant son emprunt au domaine de la peinture. « Un peu trop flou, dirait un peintre9 », s’exclame d’abord un personnage à propos d’un ensemble architectural qu’il admire. Quelques pages plus loin, le narrateur décrit une « charmante créature, si jolie dans sa parure de marabouts qui produisait ce flou délicieux des peintures de Lawrence10 ». La manière dont Balzac indique le déplacement lexical qu’il opère laisse entendre que le lecteur n’était habitué à trouver ce terme que dans la description de la peinture.
4Terme spécifique de critique artistique, « flou » appartient en outre, à l’époque, à un vocabulaire spécialisé utilisé par les connaisseurs. En 1842, un roman de Louis Reybaud, Jérôme Paturot à la recherche d’une position sociale, met en scène un sergent-major gradé de l’armée, nommé Oscar, dont le narrateur se moque parce qu’il s’estime grand peintre alors que ses talents sont plus que médiocres. Le texte ironise sur le personnage qui parvient finalement à faire admettre deux portraits dans une exposition du Louvre : « Oscar fut sublime. Il passait des journées entières en face de ses deux toiles, en multipliant les gestes d’un homme transporté d’admiration. — Dieu ! Comme c’est Rubens, se disait-il. — Quelles chairs à la Véronèse ! — Quels tons, quel flou11 ! » Le qualificatif, sortant de la bouche d’un homme qui souhaite mettre en avant son appartenance au monde de l’art, permet d’en saisir toute la résonance ronflante, peut-être prétentieuse. Le personnage gonflé d’ambition mondaine ajoute plus loin : « J’aime mieux le flou, le poncif et tout l’argot des ateliers : ça me connaît du moins12. » Pour ce faux connaisseur, « flou » s’annonce ainsi comme le must de la critique picturale, indiquant sa culture et sa connaissance dans ce domaine. Vingt ans plus tard, un dictionnaire des « argots parisiens » confirme encore que le terme se trouve, en particulier, « dans l’argot des artistes13 ».
5À la fin du xviiie siècle, le Dictionnaire des beaux-arts de Claude-Henri Watelet – considéré comme une référence par de nombreux artistes, jusqu’à Eugène Delacroix au moins qui s’en inspire pour rédiger le sien – affirme en effet que « flou est un terme qui ne sort pas des ateliers, et [qui] n’est guère entendu que des gens de l’art14 ». Et de mettre en garde contre l’emploi abusif et approximatif du terme, trop compliqué pour les simples amateurs : « On ne peut dire autre chose à ceux qui n’ont pas un grand usage de la peinture, et qui ne s’occupent pas de la pratique de cet art, sinon que, ce mot étant fort difficile à bien comprendre, il est à propos qu’ils n’en usent que bien rarement, pour ne pas l’employer mal à propos15. » C’est sans doute ce qui explique les précautions prises par les critiques d’art dans l’emploi du vocable, qui dénote un niveau lexical spécialisé. Non seulement terme de peinture, mais aussi de spécialiste, le mot se range alors dans la même catégorie que le « ragoût » et le « fouillis », que seuls les connaisseurs avertis savent utiliser16. Le soulignant parfois en italique, comme pour l’isoler dans le vocabulaire plus banal du reste du texte, certains auteurs explicitent également la particularité du terme pour adoucir le choc provoqué par ce mot de spécialiste : « Tout ce que nous pourrions reprocher à cette remarquable composition, c’est un peu trop de mollesse, d’indécision, de flou – pour nous servir d’un terme d’atelier –, dans le premier plan et dans l’arbre qui occupe la gauche du tableau17 », écrit un critique du Salon de Marseille de 1859.
6Se démarquant clairement du langage commun, « flou » caractérise a priori le discours dans lequel il s’insère comme celui d’un spécialiste. À tel point qu’on le soupçonne de n’être utilisé que pour se pavaner dans les discussions et les salons mondains, si l’on en croit du moins les auteurs qui dénoncent l’usage du terme par de « faux connaisseurs ». Car :
« Qu’est-ce qu’un vrai connoisseur ? Ce n’est pas, sans doute, celui qui, pour paroître initié dans les mystères de l’art, s’est farci la mémoire d’une foule de termes singuliers, dont il fait l’étalage et l’application à l’aventure ; qui parle de pinceau flou, de glaces, de couleur chaude et dorée, de couleur crue qui sent la palette, de contours ondoyants, et autres expressions dont il assomme les vulgaires amateurs. Je ne crois pas qu’on veuille attribuer des droits à une gasconnade si puérile. La science d’un connoisseur n’est point une science de mots18. »
7En 1771 déjà, le théoricien de l’architecture Marc-Antoine Laugier assimile le terme à des expressions sans doute spécialisées, mais dont on use plus pour indiquer son niveau de culture que pour véritablement signifier la qualité d’une œuvre.
8Cette caractéristique se prolonge au début du xixe siècle, à en croire le Traité complet de la peinture que le peintre Jacques-Nicolas Paillot de Montabert publie en neuf volumes en 1829. En introduction de son dictionnaire de peinture, qu’il place au début du premier tome de sa volumineuse étude, Paillot de Montabert explique la manière dont il a sélectionné les termes qui y figurent. S’indignant du « langage ou du jargon concentré exclusivement dans les ateliers de peinture », l’auteur décide de « passer sous silence plusieurs de ces mots d’atelier, parce qu’ils sont plus ou moins ridicules19 » :
« Nous ne dirons rien non plus de tant d’expressions qui ont obligé, pour ainsi dire, les auteurs des Dictionnaires à les reconnaître et à les admettre, ces auteurs croyant, à force d’entendre répéter ces expressions, qu’elles étaient ou techniques ou essentielles à l’art. Pour nous faire comprendre, nous allons citer quelques-unes de ces dernières. On lit donc dans les Vocabulaires, et surtout dans les Dictionnaires d’art, les mots flou, ragoût, large, gras, belle pâte, manœuvre, réveillons, fait avec amour, fouillis, etc. […] Certains auteurs de Dictionnaires croient donc devoir recueillir scrupuleusement tous ces mots, non parce qu’ils les reconnaissent pour utiles, mais parce qu’ils se figurent que ces mots sont consacrés par les artistes20. »
9Le mot « flou » donne ainsi l’impression d’une coquille vide, qui perdure dans les lexiques et les discours sur l’art, sans pour autant que l’on en connaisse la véritable signification. En 1845, pour le philologue François Guessard, professeur à l’École nationale des chartes, « flou est un terme technique que tout le monde a entendu prononcer, mais dont peu de personnes connaissent le sens précis21 ». S’exprime ici toute l’ambivalence que le terme porte avec lui pendant la première moitié du xixe siècle.
10Embarrassés par ce mot ambigu, les commentateurs de l’époque annoncent à plusieurs reprises sa disparition prochaine de la langue. Paillot de Montabert affirme en 1829 qu’il est « tombé dans l’oubli22 » et l’Académie française, dans la sixième édition de son dictionnaire de 1835, estime que « le flou du pinceau » est une expression en voie de disparition, « maintenant peu usitée23 ». Les sources prouvent pourtant son emploi alors encore réel : Paillot de Montabert lui-même s’en sert et le terme apparaît dans plusieurs textes des années 1820 et 183024. Sans doute un peu délaissé au cours de ces deux décennies par les auteurs, il reprend par la suite de l’importance. Il faut par exemple noter que la citation de Balzac dans Une fille d’Ève – « un peu trop flou, dirait un peintre25 » – n’apparaît ainsi qu’en 1842, alors que la première édition du livre, en 1839, indiquait : « [U]n peu trop cotonneux, dirait un peintre26. » Dès les années 1840 et plus encore au cours de la décennie suivante, le mot « flou » est réactualisé et on le retrouve à une fréquence plus grande dans la critique de la peinture, comme en témoignent de nombreux écrits, dont ceux de Théophile Gautier27. On verra l’importance de la photographie et de sa première littérature critique dans ce regain d’intérêt pour le terme. En 1860, il est abondamment utilisé, au point qu’un article publié dans Le Journal amusant souligne : « On enrichit constamment le dictionnaire français de termes nouveaux. Nous avons “chic, poncif, flou, gandin, biche”, mots passés des argots spéciaux des ateliers et des ruelles modernes […] dans le langage commun28. »
Origines obscures du mot
11À la fois vieux mot en voie de disparition, mais néanmoins usité, issu des ateliers d’artistes, pourtant soupçonné d’inanité, transféré dans le jargon bienséant des critiques d’art et des « vrais » ou « faux » connaisseurs, accusés d’en user sans réel fondement, le mot laisse planer le doute sur sa réelle identité, qui ne parvient pas à se fixer en raison, d’abord, de l’incertitude sur son origine. André Félibien, qui fait connaître le terme au xviie siècle, l’ancre d’emblée dans un passé lointain et inconnu, qui teinte de mystère sa réelle provenance. « Vieux mot dont autrefois on se servoit29 » selon le théoricien, « flou » possède une histoire éternellement incertaine, que les auteurs de dictionnaires et les étymologistes ne parviennent pas à fixer. « Vieux mot », le terme l’est également pour Thomas Corneille en 1694 et pour l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert, qui n’arrivent pas à en situer l’exacte origine30. Paillot de Montabert, qui, malgré sa catégorisation du terme dans le vocabulaire inutile des ateliers, lui accorde dans son dictionnaire quelques lignes, estime qu’il s’agit d’un « ancien terme qui a embarrassé, comme beaucoup d’autres, les étymologistes31 ». Aujourd’hui, tant le dictionnaire de l’Académie française que le Dictionnaire historique de la langue française expliquent qu’on le comprenait au xiiie siècle au sens d’« inculte, désert », puis de « fatigué, épuisé32 » avant que le mot endosse sa définition artistique à partir du xviie siècle.
12Si, pour Félibien, « il vient peut-être de Fluidus, ou de Floüet, qui veut dire tendre, molet [sic], ou délicat33 » – explication qui sera reprise par la majorité des dictionnaires, puisant souvent leurs informations chez Félibien lui-même34 –, François Génin, en 1845, explique qu’il s’agit de « l’ancienne prononciation du mot fleur, qu’on écrivait flur35 ». Pour l’académicien Jean-Charles-Emmanuel Nodier, qui publie en 1828 un Dictionnaire raisonné des onomatopées françoises, le terme est directement lié à la technique picturale et à la touche du pinceau. Il s’agirait en effet d’une onomatopée venant de la similarité sonore entre la prononciation de « flou » et le bruit produit par la brosse que les artistes passent sur la toile pour fondre et noyer les couleurs, c’est-à-dire pour peindre flou : « Cette opération est accompagnée d’un petit bruit, qui est peut-être devenu par analogie le nom de cette manière de peindre36. » La définition comme onomatopée est encore reprise en 1878 dans le dictionnaire de Pierre Larousse37. Aujourd’hui, l’Académie française estime que le terme est « issu du latin flavus, “jaune”, puis “fané, flétri”38 ».
13D’un point de vue grammatical, « flou » semble être un adverbe, bien que le doute existe également sur la bonne manière de le catégoriser. À la fin du xviiie siècle, dans le dictionnaire de Claude-Henri Watelet, on considère en effet qu’« [à] considérer ce mot grammaticalement, on ne sait à quelle classe le rapporter. Il est adverbe dans cette façon de s’exprimer, il peint flou ; il semble être adjectif dans ces phrases, cela est flou, ce tableau est flou ; cependant il n’a pas de féminin et on ne peut dire, cette figure est floue39 ». Dans son Salon de 1765 pourtant, avant même la publication du dictionnaire de Watelet, Denis Diderot accorde le terme au féminin et au pluriel dans des critiques de tableaux qui seront discutées un peu plus loin40. Cet usage apparaît néanmoins comme une exception, et l’accord de « flou » ne commence réellement à se pratiquer qu’à partir de 1870, et de manière plus générale au tournant du siècle comme le démontrent les discussions sur le pictorialisme.
Les significations de « flou »
14De provenance indéterminée, le mot offre par contraste une définition extraordinairement stable. Celle qu’en donne Félibien en 1676 – « la tendresse et la douceur d’un ouvrage41 » – est reprise jusque dans la deuxième moitié du xixe siècle. On la retrouve notamment de 1762 à 1835 dans le dictionnaire de l’Académie française dans lequel le terme désigne une manière de peindre « tendre, légère » et « noyée42 » ou « fondue43 », puis dans différents dictionnaires en 175644, 177745, 178746, 180347, 183948, 184249 et 186550. De premier abord intelligible lorsqu’on se réfère aux dictionnaires, la signification du terme nécessite cependant quelques précisions, « tendre » et « doux » étant trop généraux pour en donner une idée claire. En outre, la diversité du vocabulaire critique de l’époque brouille parfois les pistes, et sème le doute sur la caractéristique particulière du « flou » par rapport à des qualificatifs aussi variés que « vaporeux », « moelleux », « large », « vague » ou « léger ». Il suffit de lire l’énumération des différents styles de peinture que Watelet passe en revue dans son dictionnaire pour se convaincre de cette complexité :
« un pinceau flatteur & amoureux, amoroso, comme celui du Corrège, du Parmesan, de l’Albane, etc. C’est par un pinceau large, franc & nerveux, que Guercino, Lanfranc, Jouvenet, ont rendu leurs sujets sérieux, & leurs formes ressenties. Bassan, Tintoret, Salvator Rosa, Benedetto Castiglione ont un pinceau empâté, vif, & pour ainsi dire vagabond. Le Guide, Van Dyck, Le Sueur se sont distingués par ce que le pinceau peut avoir de plus léger, de plus fin & de plus expressif. Le pinceau de Carlo Dolci, de Liberi, de Grimou, de Raoux est flou ou vaporeux51 ».
15Un pinceau « flou » n’est pas nécessairement l’équivalent d’une manière « empâtée », « large » ou « vague », raison pour laquelle il semble important d’en préciser la signification particulière pour l’époque.
16Dans un premier sens relativement général, « peindre flou » est le contraire de « faire sec52 », de « peindre durement & sèchement53 », l’opposé des « tons durs et secs54 ». Un pinceau flou permet en somme d’éviter « la dureté du passage de la lumière aux ombres » et les « contours tranchés durement ou trop fortement exprimés55 ». Il adoucit les contours des formes pour permettre une transition progressive d’un ton à un autre. Dans les textes critiques du xixe siècle, le mot est fréquemment employé dans ce sens. En 1855, Théophile Gautier explique par exemple : « Le faire de M. Poole est vague, large et flou ; M. Poole empâte et noie ses contours au lieu de les rendre coupants et de leur donner le fil, comme à des lames de rasoir56. » En 1860, les frères Goncourt empruntent le terme au domaine pictural pour décrire la langue française : « Notre langue est molle […] ; elle n’a pas de lignes, elle est flou [sic], comme dirait notre peintre Grancey57. » Le flou estompe, voire supprime les lignes.
17Outre cette première signification, le mot désigne plus précisément une manière de peindre, dont la technique est clairement définie. Dans l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert, Louis de Jaucourt explique que « pour peindre flou, ou, si on aime mieux que je me serve de la périphrase, pour noyer les teintes moëlleusement, on repasse soigneusement & délicatement sur les traits exécutés par le pinceau, avec une petite brosse de poils plus légers & plus unis que ceux du pinceau ordinaire58 ». En 1828, la technique n’a pas changé, Jean-Charles-Emmanuel Nodier stipulant dans sa définition de « flou », qu’« on se sert ordinairement pour fondre les couleurs, pour les noyer, les dépouiller de leur sécheresse, et amollir leurs nuances, d’une petite brosse de soies légères, qu’on passe délicatement sur ce que le pinceau a touché, et dont on effleure la toile avec tant de précaution, qu’il semble qu’on la caresse59 ». L’artiste, après avoir exécuté son œuvre, la balaye d’une brosse douce pour supprimer toutes les traces trop visibles que le pinceau a pu laisser, unissant les tons dans un ensemble uni et bien fondu.
18Le flou du début du xixe siècle, non seulement estompe les contours des formes pour les rendre moins tranchants, mais il noie surtout les touches du peintre dans un ensemble uniforme, évitant ainsi de faire ressortir les traces du pinceau sur la toile. De nombreux dictionnaires insistent en effet sur l’atténuation des touches, et expliquent que le flou s’oppose à la peinture touchée. La tendresse d’un ouvrage – selon la définition que donne Félibien du flou – rejoint ainsi la douceur et la légèreté de la touche, comme l’expliquent, tant Antoine-Joseph Pernety en 1757, que Louis-Nicolas Bescherelle un siècle plus tard60. En bref, le flou « rend la couleur lisse sans nulle touche61 ». Marc Simpson identifie cette même caractéristique dans l’art plus tardif de James McNeill Whistler – cette « painting soflty » –, lorsqu’il explique que « son trait presque invisible efface le travail plutôt qu’il en témoigne. C’est comme si, selon les normes de son époque, il voulait nier la possibilité de la touche de l’artiste62 ». Il est nécessaire ici d’insister sur cette caractéristique particulière du flou, tel qu’il se comprend à l’approche de l’invention de la photographie. Loin de regrouper toutes les œuvres aux contours instables, le « flou » de la première moitié du xixe siècle ne désigne généralement que celles dont les touches ne sont pas accentuées ni mises en valeur, mais au contraire fondues et masquées.
19La description que Charles Blanc fait en 1861 de l’art d’Adriaen van de Velde (1636-1672) – déjà qualifié de flou en 1806, en 1821 et en 1848 – permet particulièrement bien de saisir cette nuance (fig. 3)63 :
« Le pinceau de Van de Velde est aussi fondu, aussi délicat, aussi flou, que la plume de Virgile est élégante et châtiée. La manière de Van de Velde, pleine de transitions savantes, de précieuses dégradations de ton, ne contribue pas médiocrement à l’effet doux et calme de ses paysages. Chez lui, point de fortes oppositions d’ombres et de lumières, point de ces luttes entre le jour et la nuit, que plusieurs peintres de la Hollande semblent avoir emprunté des antiques théogonies persanes : si des arbres touffus, des terrains plus élevés dérobent une partie de la lumière, il en reste assez pour que la transparence de ces larges demi-teintes s’harmonise avec les portions plus éclairées du tableau. Il ne procède point, comme Berghem, par ces coups de pinceau vifs et brillants que l’œil ne peut voir de trop près sans y trouver un peu de rudesse : une allure aussi gaillarde ne convient point à son humeur ; l’art des demi-teintes, le flou, le rendu de sa manière le distinguent au contraire parmi tous ces grands praticiens de la Hollande64. »
Fig. 3. – Adriaen van de Velde, Une chèvre et un enfant, 1655-1672.
Huile sur toile, 42,5 × 50,5 cm. Londres, The National Gallery, London, akg.
20L’absence de touches trop marquées et l’art de la demi-teinte – terme de peinture désignant les couleurs qui « servent dans l’harmonie du tableau de passage d’un ton à un autre65 » – constituent les conditions du flou pictural.
Le « flou » historique différent du flou optique
21S’y ajoute la nécessité, pour que le flou soit réussi, de l’associer à des détails. Le sens donné aujourd’hui au terme « flou » semble l’opposer à la minutie du détail. À l’époque, pourtant, les deux éléments sont non seulement conciliables, mais recommandés. En 1854, Joseph-Marie Callery, dans une critique de la Galerie royale de peinture de Turin, admire un tableau de Bernardino Luini (1481-1532) : « Il est partout, d’un fini merveilleux ; mais dans certaines parties, la minutie des détails entraîne une sécheresse et une raideur qu’on ne voit pas dans les autres. La tête coupée du saint est un chef-d’œuvre de modelé, de flou et de soyeux, ici dans les chairs, là dans les cheveux et la barbe66. » Plus loin, à propos d’une autre œuvre, il explique : « [L]a délicatesse des traits, le fini extrême du pinceau, le flou de la couleur, ne laissent pas d’en faire un ouvrage ravissant67. » Un peintre peut, selon son choix, peindre de manière très minutieuse certaines parties et ajouter du flou à d’autres.
22Surtout, il est possible de peindre simultanément « flou » et de manière détaillée. Il s’agit même d’un élément important à respecter pour produire un flou réussi. L’idée remonte à Diderot, pour qui la peinture a le pouvoir de résoudre visuellement cette contradiction : « On dit : “Que votre contour soit franc” ; on ajoute : “Soyez vaporeux dans vos contours.” Cela se contredit-il ? Non, mais cela ne se concilie que sur le tableau68. » À propos de L’Absence des père et mère mise à profit de Jean-Honoré Fragonard (1736-1802) [fig. 4], le critique écrit en 1765 : « Les chiens sont bien, mais mieux encore de caractère que de touche, ils sont flous, flous, du reste bonnes gens. Comparez ces chiens-là avec ceux de Loutherbourg ou de Greuze, et vous verrez que les derniers sont les vrais. Dans ce genre flou il faut être d’un fini précieux et enchanter par les détails69. » Reprise comme exemple dans plusieurs dictionnaires du xixe siècle pour expliquer le terme, la dernière phrase de la citation confirme l’adéquation totale entre le flou et les détails70. Dans le Portrait présumé de Mme de Porcin de Greuze (fig. 5), par exemple, le chien est à la fois flou et détaillé. Alors que celui de Fragonard est presque confus, l’animal de Greuze présente une touche lisse, harmonieuse – c’est-à-dire dans le « genre flou » – tout en donnant à voir la minutie du pelage. Pour Diderot, un pinceau flou peut facilement dégénérer en un style brouillé et sans forme, raison pour laquelle il faut, afin d’éviter une image confuse, associer le flou aux détails. L’enjeu pour l’artiste, en somme, est de peindre flou, sans rendre l’image indistincte et molle.
Fig. 4. – Jean-Honoré Fragonard, L’absence des père et mère mise à profit, 1765.
Huile sur toile, 50 × 60,5 cm. Saint-Pétersbourg, musée de l’Ermitage.
© The State Hermitage Museum, photo by Svetlana Suetova.
Fig. 5. – Jean-Baptiste Greuze, Portrait présumé de Mme de Porcin, seconde moitié du xviiie siècle.
Huile sur toile, 72 × 57 cm. Angers, musée des Beaux-Arts d’Angers, collection Eveillard de Livois.
23Pour bien comprendre cela, il est nécessaire de distinguer clairement la signification contemporaine de « flou » et celle du premier xixe siècle. Les dictionnaires actuels mentionnent en premier lieu le « manque de netteté71 » que le flou induit dans une image. À l’époque cependant, le terme « flou » ne s’oppose pas à la minutie, mais indique une manière de peindre. C’est un « pinceau », un genre, un style, qui ne produit pas nécessairement une image confuse, comme on pourrait le croire aujourd’hui, mais qui peut s’appliquer à toutes les parties du tableau, qu’il s’agisse de l’ensemble, de détails, de volumes ou de contours. Le flou pictural lisse les touches et estompent les contours ; il agit donc sur le rendu, propice à mettre en valeur l’ensemble de l’œuvre autant que les détails. Il est possible de peindre flou certains détails. Ce qui apparaît aujourd’hui comme une contradiction n’en est pas une pour l’époque, dans la mesure où le flou est une manière douce de peindre, mais qui n’implique pas nécessairement de rendre les éléments vagues. Il faut ici insister sur ce point, car les photographes hériteront de cette conception du flou – compatible avec les détails –, à laquelle ils chercheront, pendant de nombreuses années, à donner une réponse par la photographie.
24Cette cohabitation possible entre le flou et la minutie est importante à retenir. Elle indique que, dans sa conception historique, le flou ne peut être évalué sur la même échelle que la netteté. De même que peindre « sec » ne signifie alors pas peindre « net », peindre « flou » ne veut pas dire peindre sans netteté. On touche ici à la question du flou optique, et de l’usage contemporain du mot dans ce domaine – « sans lunettes, je vois flou72 », donne aujourd’hui comme exemple l’Académie française – qui n’existait pas avant l’apparition de la photographie. Aujourd’hui, l’Académie française estime que le flou est obtenu « en diminuant la netteté des images73 ». Au début du xixe siècle, cette conception n’est pas envisageable. Un pinceau excessivement « flou » – dans l’acception historique du terme – peut avoir pour résultat un tableau brouillé, parce qu’il noie et brouille les contours. Cependant, à l’époque, le qualificatif de « flou » ne s’applique pas tant à la confusion générale du tableau qu’à son style pictural. Pour le dire autrement, le « flou » ne porte pas sur le caractère ressemblant et net d’une représentation avec son objet, mais sur une manière de peindre. Un style haché, très touché, comme celui d’Eugène Delacroix ou des impressionnistes, produit des représentations confuses – floues dans le sens contemporain du mot. Elles ne sont pourtant pas caractérisées ainsi à l’époque. Le flou d’alors indique un style en soi – comme peuvent le faire, dans des registres différents, les expressions de peintures « délicate », « estompée » ou « harmonieuse ». Comme on le verra, la photographie apportera à la notion de « flou » l’idée d’une comparaison intrinsèque avec le réel. Afin de bien saisir le sens du début du xixe siècle, il s’agit de soustraire à la compréhension du flou la question de la netteté, quand bien même cela est difficile tant la photographie a imbriqué ces deux idées.
Le vague
25Le qualificatif n’est pas celui qui convient, à cette époque, pour décrire des images indistinctes et confuses. L’usage du terme « vague » convient alors mieux, comme le fait d’ailleurs le romancier et traducteur Amédée Pichot à propos du peintre Thomas Lawrence (1769-1830), qui représente l’archétype du courant anglais vague et noyé, déprécié par les écrivains et les critiques français acquis à la rigueur néoclassique : « Si j’étais artiste, je trouverais sans doute à blâmer ces mêmes teintes vaporeuses à travers lesquelles on découvre les portraits de Sir Lawrence ; je critiquerais, comme des traits vagues, indécis, sans force, ces mêmes figures74. » Pour l’Académie française, en 1835, le « vague […] se dit également, en termes de Peinture, de ce qui manque de précision, de netteté75 » et Pierre Larousse en 1877 explique qu’il désigne un « défaut de netteté » et un « dessin qui manque de fermeté, de vigueur, de netteté76 ». Les critiques d’art et les écrits d’artistes témoignent de l’usage fréquent, et dans des sens différents, du terme « vague ». Au xixe siècle, il désigne toutes les représentations peu nettes, sans détails, quelle que soit la manière de peindre77. Si l’art de Prud’hon est aussi vague que flou, de même que celui de Corot, tout ce qui apparaît de manière indistincte est en revanche vague, sans nécessairement être flou78. Au xviiie comme au xixe siècle, le terme s’emploie d’ailleurs pour qualifier l’incertain et l’indéterminé, bien au-delà du domaine pictural. Denis Diderot, décrivant la ligne confuse d’une sphère, estime que « l’endroit où vous cessez de voir est vague, indécis79 » ; il n’est cependant pour l’époque pas flou. On parle alors de raisonnements ou de promesses vagues, comme on le ferait aujourd’hui avec l’adjectif « flou80 ». Du regard des myopes, un Traité théorique et pratique des maladies des yeux dit qu’il est « vague81 ». Toute perte de netteté se caractérise ainsi par le vague, qui inclut par conséquent aussi les œuvres largement touchées laissant apparaître les traces du pinceau de l’artiste. Eugène Delacroix – qui n’est pour l’époque pas « flou » – affectionne particulièrement le « vague » dans la peinture, « un de ses plus grands charmes82 ».
Les peintres historiques du flou
26Pour avoir une idée de ce qui peut être qualifié de « flou » au xixe siècle, examinons quelques-uns des artistes emblématiques de cette manière, qui appartiennent le plus souvent à la tradition coloriste, puisque le flou résulte d’un fondu subtil des couleurs83. Dans Une histoire du flou publiée en 2016, Michel Makarius voit même un équivalent entre la couleur et le flou : « [O]n pourrait se demander si nous n’avons pas fait qu’échanger le mot couleur avec celui de flou. Pareille à la vision floue, la couleur tend à déstabiliser la structure linéaire de la composition qui ancre la représentation dans l’espace84. » Dans son étude, Makarius ne tient pas compte de la définition historique du terme « flou », qu’il comprend selon son acception contemporaine comme un équivalent de « vague ». Son « histoire du flou » donne une large place à toute la tradition de la touche picturale, car pour lui « [d’]une certaine manière, inachèvement et flou se confondent85 ». Il s’inscrit ainsi en faux par rapport à une pratique picturale du « flou » qui travaille au contraire à finir l’œuvre pour masquer le travail du peintre. On peut néanmoins admettre avec lui que c’est dans la tradition coloriste que le flou, tant dans sa compréhension historique, qu’actuelle, se réfléchit et se construit.
27Plus qu’Adriaen van de Velde, Le Corrège (1489-1534) constitue pour les critiques d’art le peintre du flou par excellence. Apprécié pour son pinceau flou en 1835, le peintre devient au fil du xixe siècle l’archétype du flou en peinture86. En 1859, pour Jean-Jacques Henner, grande figure du flou de la fin du xixe siècle, Le Corrège ne cherchait que « le flou du modelé87 ». Les frères Goncourt font du « corrégianisme » le synonyme du flou : « C’est merveilleux, le fondu, le flou, le corrégianisme de cette planche88 », s’exclament-ils à propos d’un portrait d’Alphonse Daudet par Eugène Carrière. Pour Théophile Gautier, quant à lui, une « manière vaporeuse et floue » correspond à une « grâce toute corrégienne89 ».
28Les écrits de Théophile Gautier, qui apprécie généralement le flou de la touche, permettent de repérer quelques-uns des peintres français actifs pendant la première moitié du xixe siècle qui peuvent alors être caractérisés par ce qualificatif particulier. Parmi eux, Pierre-Paul Prud’hon (1758-1823) fait figure de proue dès les critiques des années 184090, au point d’être nommé le « Corrège français91 ». En 1882, Théophile Gautier explique d’ailleurs aux visiteurs du musée du Louvre que Prud’hon « applique le flou du Corrège92 ». L’écrivain et critique d’art qualifie également de « flou[es] » les œuvres d’Ernest Hébert (1817-1908) et de Jean-Baptiste Camille Corot (1796-1875). Le critique s’arrête sur « le flou de couleur, le fondu de la touche, la transparence des reflets, l’immatérialité de l’exécution93 » du Portrait de Mme Céline Plastré de Hébert. Et s’exclame, à propos de Corot : « Une émotion secrète fait trembler son pinceau et donne un flou adorable à sa touche. Dès qu’il a devant lui des arbres, du ciel, de l’eau, du gazon, un bout de colline à l’horizon, l’artiste tressaille, se trouble et palpite comme un homme épris aux genoux de sa maîtresse94. » En 1901, encore à propos de Corot, on admire le « flou pour lequel le vieux peintre avait tant de prédilection95 » (fig. 6).
Fig. 6. – Camille Corot, Souvenir de Mortefontaine (Oise), 1850-1875.
Huile sur toile, 65 × 89 cm. Paris.
© 2011 RMN-Grand Palais (musée du Louvre), René-Gabriel Ojéda.
29À observer les peintures de près, le flou constitue pour l’époque un style très doux, qui ne brouille pas l’objet représenté par des à-coups de pinceaux intenses, mais qui noie les touches faites par la main du peintre pour unifier la représentation dans des tons qui évitent les contours trop nets autant que les traces de pinceau trop visibles. Il ne s’agit en effet pas de tracer des coups de pinceau rapides pour rendre les objets vagues, mais bien de travailler de manière très minutieuse, de sorte que seuls les artistes accomplis semblent pouvoir réussir à appliquer cette technique. Le flou apparaît ainsi comme un style très difficile à maîtriser, qui devient un défaut chez les peintres inaptes à s’en servir correctement. Celui du Corrège, maître incontesté en la matière, demeure inattaquable, même aux yeux du néoclassique Anton-Raphaël Mengs, qui déplore cependant les pâles imitateurs du peintre qui n’ont pas su user de cette forme subtile : « En agrandissant les masses des jours et des ombres, tel un fleuve qui franchit ses limites, il entraîna ses spectateurs dans la vaste mer du gracieux et en a conduit beaucoup, par le chant de ses sirènes, dans le pays de l’erreur96. » Les suiveurs de Prud’hon qui le copient maladroitement, n’ayant pas compris la finesse du flou de son pinceau, sont condamnés de la même façon : « Son pinceau suave et flou lui a gagné tous les suffrages, et a fait quelques victimes ; il drape largement, mais cette ampleur est un système, car on le retrouve partout. Prud’hon est un peintre original et gracieux, dont les imitateurs sont froids et maniérés97 », écrit Augustin Jal en 1824.
Un dosage délicat nécessaire
30Pour les peintres, tout l’enjeu est de parvenir à respecter la limite entre trop de sécheresse et l’excès de flou. On mesure, à lire les textes critiques de l’époque, l’importance du dosage que l’artiste doit finement équilibrer, afin de n’être ni trop sec, ni trop flou. Pour Watelet, le premier vice paraît aussi dommageable que le second :
« Un trait & des contours secs, une couleur sèche, sont des défauts. […] Les moyens souvent trop insuffisans [sic] de se corriger de la sécheresse sont de copier & d’observer beaucoup les ouvrages des grands maîtres qui, pour parler le langage de l’art, ont peint gras et fait de tableaux dont la touche est moëlleuse, & dont la couleur fondue n’a point cette aridité qui tient à la sécheresse98. »
31Une subtile harmonie entre un dessin correct et vigoureux et un fondu qui l’empêche de devenir sec constitue une difficulté majeure pour les peintres. Si l’équilibre varie selon les goûts et les critères esthétiques – les tenants du colorisme augmentant la part de flou, que les défenseurs de la ligne réduisent –, les deux parties s’accordent néanmoins pour rejeter les extrêmes. Le flou – même minime – est ainsi nécessaire à une peinture de qualité. Watelet lui-même le concède, le flou devant être considéré « comme une manière vicieuse toutes les fois qu’elle est générale & universellement employée dans un ouvrage99 ». À petites doses, partiellement, sur quelques motifs précis, le flou reste agréable à l’œil.
32Le danger d’en abuser est cependant toujours très présent, et de nombreux artistes tombent souvent dans un excès caractérisé de « mollesse ». Manque d’énergie en même temps que flou à outrance, la « mollesse » dont parlent de nombreux critiques montre qu’en matière de flou, la frontière entre ce qui est acceptable et ce qui est excessif est ténue. Lorsqu’elle est franchie, la critique est acerbe : « Sa peinture est molle et sans consistance : il a poussé le flou bien au-delà des limites permises100 », estime-t-on en 1857 à propos de Jean Raoux (1677-1734). Lorsqu’elle est respectée, l’artiste est applaudi. En 1810, Guizot félicite Prud’hon pour son « extrême suavité de pinceau, qui dégénère si facilement en mollesse101 ». Et Charles Blanc d’admirer le Portrait en pied de la marquise de Pompadour par Maurice-Quentin de La Tour, d’un « flou sans mollesse102 », et la peinture de Gerard Terburg (1608-1681), qui a su apprivoiser la limite respectable du flou : « C’est une touche caressée, fondue, d’une délicatesse vraiment exquise, allant jusqu’à cette limite indéfinissable où le flou deviendrait de la mollesse ; les formes y sont bien senties, et cependant ni la lumière ni l’ombre ne s’arrêtent nulle part103. »
33Pour certains auteurs, dès le xviiie siècle, le « flou » paraît cependant de toute façon exagéré, comprenant dans sa définition l’hyperbole qui le rend attaquable. Roger de Piles, qui reprend la définition de Félibien, y ajoute un adverbe – « fort » – qui intensifie le degré de douceur que désigne le terme : « Un tableau flou, c’est-à-dire, peint d’une manière fort adoucie & fort tendre104. » Pour ce défenseur des coloristes, l’emphase s’avère positive, la qualité d’une œuvre se mesurant selon lui à la fluidité de l’ensemble de la toile. Le dictionnaire de Watelet relève également l’hyperbole, mais la juge de manière négative afin de « montrer ce qu’elle a de vicieux » : « Flou […] n’est pas synonyme du mot fondu, quoiqu’il exprime un pinceau qui fond les couleurs & les noye les unes dans les autres. La différence entre ces deux mots est […] que le mot flou exprime l’excès du fondu105. »
34Au xviiie siècle, le « flou » est souvent convoqué par les critiques d’art – Diderot en tête – qui s’opposent au style rococo, et rejettent les effets maniérés et artificiels de la peinture contemporaine française, au profit d’un renouvellement des critères esthétiques et d’un retour du « vrai ». Exagérément relâché, le « flou » devient à leurs yeux l’expression d’une manière trop affectée. Le dessinateur et graveur Charles-Nicolas Cochin (1715-1790), passant en revue les œuvres italiennes des xvie et xviie siècles, observées au cours de son voyage en Italie, critique les pinceaux « flou et doucereux106 » et « flou et pesant107 » qu’il rencontre dans les églises. S’accordant avec l’avis de Cochin, parce que « les principes qu’il établit sont toujours vrais108 », Diderot rejette également le flou de manière catégorique. Dans son Salon de 1765, face à un paysage globalement bon, il juge la figure d’une femme « faible et floue109 ». Deux ans plus tôt, son verdict face au style de Jean-Marc Nattier (fig. 7) est sans appel : « Cet homme a été autrefois très bon portraitiste ; mais il n’est plus rien. Le Portrait de sa famille est flou : c’est-à-dire, faible et léché. Monsieur Nattier, vous ne connaissez pas les têtes de vos enfants ; certainement elles ne sont pas comme cela110. » Dès cette époque, le flou intègre le débat sur la « vérité » de la représentation ; et, dans la conception de Diderot, devient un potentiel obstacle à cette vérité imaginée.
Fig. 7. – Jean-Marc Nattier, Jean-Marc Nattier et sa famille, entre 1730 et 1762.
Huile sur toile, 149 × 162 cm. Versailles, musée national des châteaux de Versailles et du Trianon. Heritage Images, Fine Art Images, akg-images.
35Pour ces défenseurs de la rigueur morale, le flou est décadent, l’expression d’une facilité vulgaire que le peintre utilise pour masquer ses défauts et plaire aux amateurs mondains, comme en témoigne le dictionnaire de Watelet :
« Ce genre de peindre a beaucoup de partisans dans le public, parce qu’il rend la couleur lisse sans nulle touche, ni épaisseur de couleurs, qu’il produit (comme ce public s’exprime) une peinture bien douce. Mais cet éloge mal fondé ne doit pas empêcher d’apprécier cette manière […]. Ce flou si flatteur à l’œil n’est ordinairement que le fruit d’une pure habitude & jamais celui du savoir ni du sentiment. Il décele [sic] souvent au contraire l’ignorance qui l’adopte pour se cacher sous l’ombre d’une exécution aimable111. »
36Jusqu’au milieu du xixe siècle, on s’appuie sur le même argument pour décrier le flou qui, sans doute, est « léger et doux à l’œil, parce qu’il a quelque chose d’incertain, de vaporeux, de fuyant, parce qu’il n’arrête pas les formes, parce qu’il ne tranche rien ; mais le flou n’en est pas moins une imperfection112 ». Il est, en somme, une sorte de solution de facilité, qui permet de masquer les lacunes du peintre en matière de dessin : « Il est un certain moelleux qui vient quelquefois du peu de savoir ; celui qui n’est point parfaitement instruit du lieu où il faut arrêter le contour, et de la forme déterminée des objets, les laisse indécis et les noie dans le flou pour pallier son incertitude113. » Le flou comporte donc le risque d’un dessin incorrect et d’une touche molle qui finissent par confondre toutes les parties du tableau, brouillant l’ensemble dans une manière trop uniforme et sans contraste :
« Le flou ou le fondu excessif dispense de rendre par la touche, dans les chairs, le sens des muscles, leurs mouvemens [sic] & leur nature diverse ; celles des femmes, des hommes, des enfans [sic] sont toutes exprimées par un pinceau flou avec le même sentiment, ou plutôt la même absence de sentiment. La sécheresse naturelle des métaux & leur piquante lumière ; le cassé des plis du taffetas, le moëleux [sic] du velours, le fini du satin, la rondeur du drap, tout enfin est de la même exécution dans un tableau flou, & les objets n’y sont guère différenciés que par leurs couleurs & leurs formes encore mollement senties114. »
37À trop vouloir adoucir ses tons, le peintre s’expose au danger d’excessivement « fondre les contours, de ne rien arrêter, de ne présenter à l’œil que des formes indéterminées, [de tomber] dans un vague, une incertitude, qui mènent à l’incorrection115 », défaut particulièrement blâmé par les tenants du classicisme et de la ligne à laquelle l’école de David souhaite ramener la peinture française.
Au service de la mimêsis : technique à l’huile et sfumato
38Si d’un excès de flou résulte une représentation vague et indécise, il ne faut pas en conclure que le flou pictural serait d’emblée un élément de confusion visuelle. Au contraire, bien plus que de brouiller la vue, le flou pictural – s’il n’est pas exagéré – l’éclaircit et renforce généralement l’illusion du réel. Il faut ici insister sur la qualité mimétique du « flou », tel qu’il se conçoit dans la critique artistique ancienne. Il ne se limite pas à un effet romantique permettant à la toile d’exprimer une intériorité qui se couperait de la réalité ; il se rapproche au contraire du réel. Les touches visibles du pinceau, auxquelles le flou s’oppose, constituent l’empreinte du geste de l’artiste et de sa main qui a effleuré la toile. En ce sens, elles rappellent au spectateur le moment où le tableau a été créé, et, malgré son absence, rendent le peintre présent. Érika Wicky a montré que la touche visible sur l’œuvre « demeure essentiellement associée à l’échec » et que la présence trop affirmée du geste de l’artiste sur le tableau est peu valorisée, car il gêne l’illusion116. La touche montre la peinture, évoque l’existence de la toile, interdit au spectateur de croire à la réalité du paysage ou de la scène de la vie quotidienne. Elle rompt en somme la transparence de l’image et s’oppose à l’idéal d’un mimétisme absolu avec la réalité.
39Pour sa part, le flou, tel qu’il se conçoit dans la première moitié du xixe siècle, renforce la mimêsis. Il ne l’interrompt pas – comme le flou photographique pourrait le faire, limitant l’accès au sujet représenté –, mais consolide au contraire l’apparence « réaliste » de l’œuvre. En 1859, Théophile Gautier écrit, à propos des Bords de l’Oise de Charles-François Daubigny : « Nulle part la touche ne cherche à se faire voir : il semble que la toile exposée devant le site se soit peinte toute seule par quelque procédé magique et d’invention nouvelle117. » En annulant, en lissant les traces du pinceau sur la toile et les touches trop abruptes, le flou dissimule l’action du peintre. Il masque la technique picturale et cache la dépendance de l’œuvre à une subjectivité créatrice. Il favorise l’« autonomisation représentative » idéale du tableau – et pourtant jamais atteinte – et minimise les « ruptures, interruptions, syncopes », pour reprendre les termes de Louis Marin, que peuvent constituer les touches susceptibles de « troubler la transparence, rompre la quasi-identification du référent au représenté dans le représentant118 ». Il permet en quelque sorte à la peinture de s’approcher d’un idéal de représentation, indépendante de la main humaine – idéal que la photographie aura, pour certains, mission de remplir. Débarrassée de toute référence à l’action du peintre, c’est-à-dire au dispositif de représentation, l’œuvre peut donner l’illusion de montrer la réalité, plus qu’une toile et des formes de couleur : « L’écran représentatif est une fenêtre à travers laquelle l’homme spectateur contemple la scène représentée sur le tableau comme s’il voyait la scène “réelle” du monde. […] C’est l’invisibilité de la surface-support qui est la condition de possibilité de la visibilité du monde représenté119. » Or, en estompant les touches – empreintes révélatrices de l’illusion représentative – le flou rend la toile invisible, qui se fait oublier pour donner un accès plus direct à la scène représentée.
40Cette particularité rappelle celle du sfumato qui constitue pour le xixe siècle l’équivalent italien du flou. Il n’est pas ici inutile de rappeler quelques caractéristiques de l’innovation majeure de Léonard de Vinci, « inventeur de l’image délibérément brouillée, du sfumato120 » selon Ernst Gombrich, dans la mesure où le début du xixe siècle l’associe complètement au flou pictural. Des techniques différentes sont associées à ces deux esthétiques, le sfumato étant le résultat de l’accumulation de plusieurs couches de peinture, alors que le flou se fait grâce à un pinceau qui estompe le surplus de couleur. Mais elles désignent chacune la même particularité visuelle dans les écrits critiques de l’époque. En 1792, le dictionnaire de Watelet explique que « les Italiens rendent […] ce genre de pinceau par le mot sfumato ; telle est la signification bien déterminée de ce qu’on entend par le mot flou121 ». Un siècle plus tard, le flou correspond encore à « cette exécution que les Italiens appellent sfumata, effumée122 ». Comme l’explique Marc Wellmann, depuis son apparition dans le domaine pictural à la fin du xive siècle – Cennino Cennini parle en 1390 de « sfummando123 » – le terme désigne une façon de peindre estompée, faisant apparaître le modelé d’un objet dans une lumière régulière et unifiant suffisamment les couleurs pour que chaque trait de pinceau se fonde en un seul ensemble et se dissolve dans celui-ci. La première définition du « sfumato » dans le domaine artistique, au xviie siècle, correspond d’ailleurs à celle du flou français :
« Sfumare : unifier les couleurs. C’est ce que font les peintres, après avoir mis les couleurs à leur place sur la toile ou le panneau, afin de supprimer toute la crudité des coups de pinceau, mêlant doucement leurs lumières avec leurs demi-teintes ou leurs demi-teintes avec le sombre, de manière à ce que la transition de l’un à l’autre soit faite avec une gradation telle que même de près la peinture apparaisse douce et délicate sans coups de pinceau124. »
41L’invention de la peinture à l’huile, au xve siècle, est directement liée au développement du sfumato. Dès son apparition, l’huile est réputée pour fondre les couleurs de manière beaucoup plus harmonieuse que la détrempe à l’œuf. La technique permet en effet de travailler la pâte sur la toile pendant plus longtemps et de fondre les tons les uns dans les autres de manière à éviter des contours trop secs. En 1550, Vasari affirme que « l’huile possède en elle-même la propriété de rendre la couleur plus moelleuse, plus douce, plus délicate, plus facile à accorder et à estomper125 ». Félibien attribue également à la peinture à l’huile le fondu des couleurs qui fait la gloire de Rembrandt :
« Les excellens tableaux peints à huile, & qui sont faits il y a longtems, paroissent avec plus de force & de beauté, parce que toutes les couleurs dont ils ont été peints, ont eu plus de loisir de se mêler & se noyer ou fondre les unes avec les autres, à mesure que ce qu’il y avoit de plus acqueux & de plus humide dans l’huile, s’est séché [sic]126. »
42Au xixe siècle, bien que parfois critiquée, notamment par Paillot de Montabert en raison de sa mauvaise conservation, l’huile continue à plaire « parce qu’elle laisse au peintre le tems [sic] de parfondre ses couleurs127 ».
43Le flou pictural est ainsi intimement lié à une innovation technique, qui, de la Renaissance au xixe siècle, ne cesse de prendre de l’importance dans la pratique picturale. Présente dans la très grande majorité des ateliers dès le xvie siècle, l’huile s’impose comme la technique par excellence, au point que l’art pictural ne puisse plus se passer du léger flou qu’elle suppose. Par l’intermédiaire de l’huile, le flou, plus qu’un simple style parmi d’autres, devient presque une caractéristique inhérente à la technique picturale, comme le résume parfaitement l’abbé Chrétien Dehaisnes en 1860 :
« L’huile s’amalgame avec les couleurs plus vite, d’une manière plus égale et en les altérant bien moins que le blanc d’œuf ; elle les fait arriver à ce degré convenable de fluidité qui permet les retouches, facilite les empâtements et les plus grandes hardiesses, et rend possibles les glacis et les demi-teintes ; elle leur communique cette vigueur des tons et cette harmonie des nuances qui donnent la beauté, l’éclat, la vie, en un mot le flou à une peinture128. »
44Léonard de Vinci, qui développe largement la technique au xvie siècle, donne d’emblée au sfumato une fonction mimétique fondamentale129. Il conseille de peindre « sans traits ou marques, dans une manière de fumée130 », estimant que la main de l’artiste doit disparaître derrière l’œuvre qu’il crée. Le peintre rejette en effet toute trace, toute touche brisant la transparence de l’image, afin que le style propre à chaque artiste puisse se faire oublier et donne à l’œuvre une plus grande transitivité. Surtout, il met à profit cette technique dans ses recherches sur la représentation de la perception de la nature. Ses notes sur l’optique et la perception visuelle révèlent la conscience qu’il a des limites de la vision humaine. Selon lui, « l’œil ne connaît les limites d’aucun objet. L’œil ne sera jamais capable de [percevoir] la limite exacte d’un corps quelconque lorsqu’il se détache sur le lointain131 ». Estimant que « la faculté visuelle ne réside pas en un point […], mais tout entière dans toute la pupille où les images des objets s’intègrent132 », il explique – erronément – que les contours ne peuvent paraître nettement, car, selon lui, les rayons lumineux ne convergent pas vers un point précis, mais sur toute la surface de la pupille. Léonard de Vinci constate également que « dans une figure située au loin, les détails les plus petits s’effacent d’abord, et les grandes divisions subsistent plus longtemps, mais sans que l’on distingue les contours ; elles restent de forme ovale ou sphérique, aux limites imprécises133 », expliquant le phénomène par l’épaisseur atmosphérique qui s’accumule dans la distance. Outre le flou de lointain – qu’il traduit picturalement par la perspective aérienne134 –, le peintre remarque que les objets trop proches de l’œil perdent aussi en netteté, de même que ceux qui se trouvent dans l’ombre, parce que moins distincts135.
45Retenons surtout ici que le sfumato cristallise chez Léonard de Vinci plusieurs enjeux de la conquête de l’illusion mimétique136. Directement issu d’une innovation technique, il permet de parfaire la représentation du réel de deux manières complémentaires. D’abord, en favorisant l’autonomisation de la représentation et en évitant de rompre la transparence de la toile par les touches du pinceau ; ensuite en permettant, grâce à cette manière de peindre très douce et subtile, de s’approcher au plus près de la perception de la nature par l’œil humain, qui impliquerait nécessairement une certaine indécision, dans les contours et dans les lointains. Pleinement associé à ces deux caractéristiques du sfumato léonardien, le flou possède, pour le début du xixe siècle, ce pouvoir de représenter le réel tel qu’il est vu, paradoxalement de manière très précise.
Notes de bas de page
1 Wittgenstein Ludwig, Tractatus logico-philosophicus, suivi de Investigations philosophiques, op. cit., p. 135 (Investigations, § 43).
2 Borel Pierre, Dictionnaire des termes du vieux françois ou Trésor de recherches et antiquités gauloises et françoises, Paris, chez Briasson, 1750 (1655), p. 96. « “Flouet” veut dire : Tendre, molet [sic], délicat », selon Corneille Thomas, Le dictionnaire des arts et des sciences, t. 1, Paris, chez la Veuve de Jean-Baptiste Coignard, 1694, p. 445.
3 Félibien André, Des principes de l’architecture, de la sculpture, de la peinture, op. cit., p. 596.
4 Diderot Denis et Le Rond Jean dit d’Alembert (dir.), Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, t. 6, Paris, Briasson/David/Le Breton/S. Faulche, 1751, p. 880-881. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.
5 « Flou », Dictionnaire de l’Académie française, 1762 (4e éd.), [https://www.dictionnaire-academie.fr/article/A4F0627], consulté le 30 avril 2022 ; « Flou », Dictionnaire de l’Académie française, 1798 (5e éd.), [https://www.dictionnaire-academie.fr/article/A5F0591], consulté le 30 avril 2022.
6 « Flou. Terme de peinture » (Leroy Charles, Traité de l’orthographe françoise, Poitiers, Félix Faulcon, 1755, p. 232) ; Lachâtre Maurice, Nouveau dictionnaire universel, t. 1, Paris, Docks de la Librairie, 1865, p. 1584 ; Littré Émile, Dictionnaire de la langue française, t. 4, Paris, Hachette, 1873-1874, p. 1704.
7 Jules Adeline, Lexique des termes d’art, Paris, Maison Quantin, 1884, p. 209.
8 « Flou », Dictionnaire de l’Académie française, 1935 (8e éd.), [https://www.dictionnaire-academie.fr/article/A8F0729], consulté le 30 avril 2022. Nous soulignons.
9 Balzac Honoré de, Une fille d’Ève (1839), in La Comédie humaine. Études de mœurs : scènes de la vie privée, t. 2, Paris, Gallimard, coll. « La Pléiade », 1963, p. 61.
10 Ibid., p. 99.
11 Reybaud Louis, Jérôme Paturot à la recherche d’une position sociale, Paris, Paulin, 1844 (1842), p. 248.
12 Ibid., p. 362.
13 Delvau Alfred, Dictionnaire de la langue verte : argots parisiens comparés, Paris, E. Dentu, 1867 (2e éd.), p. 201.
14 Watelet Claude-Henri et Levesque Pierre-Charles, Dictionnaire des arts de peinture, sculpture et gravure, t. 2, Genève, Minkoff Reprint, 1972 (1792), p. 329.
15 Ibid.
16 En 1838, un critique s’exclame sur un tableau de Prud’hon, jurant que Diderot l’aurait admiré : « Il eût retrouvé sans doute dans quelques détails trop de flou, de ragoût, de fouillis, pour nous servir des termes qui couraient de son temps, et il eût dit à son ami Prud’hon de s’observer à cet égard » (Anon., « Pierre Godard, graveur sur bois », Le Magasin pittoresque, année 6, 1838, p. 352-355).
17 Chaumelin Marius, La peinture à Marseille. Salon marseillais de 1859, Marseille, Camoin frères, 1860, p. 12. À propos du tableau La Vue des montagnes de Montredon de Louis-Laurent-Auguste Aiguier.
18 Laugier Marc-Antoine, Manière de bien juger des ouvrages de peinture, Paris, chez Claude-Antoine Jombert, 1771, p. 8.
19 Paillot de Montabert Jacques-Nicolas, Traité complet de la peinture, t. 1, Paris, J.-F. Delion, 1829-1851, p. 114-115.
20 Ibid., p. 115.
21 Guessard François, « Examen critique de l’ouvrage intitulé Des variations du langage depuis le douzième siècle (2e article) », in Bibliothèque de l’École des chartes, Paris, J.-B. Dumoulin, 1845-1846, p. 289-556 (p. 327).
22 Paillot de Montabert Jacques-Nicolas, Traité complet de la peinture, t. 1, op. cit., p. 162.
23 « Flou », Dictionnaire de l’Académie française, 1835 (6e éd.), [https://www.dictionnaire-academie.fr/article/A6F0660], consulté le 30 avril 2022.
24 Paillot de Montabert Jacques-Nicolas, Traité complet de la peinture, t. 8, op. cit., p. 389 ; Lecarpentier Charles-Jacques-François, Galerie des peintres célèbres, t. 1, Paris, Treuttel et Würtz, 1821, p. 63, 94 et 279 : Lecarpentier parle à propos de Maria van Oosterwijk, d’Adriaen van de Velde et de Fragonard de « pinceau flou ». Gault de Saint-Germain Pierre-Marie, Guide des amateurs de peintures, Paris, M. Bon, 1835, p. 168 : Pierre-Marie Gault de Saint-Germain qualifie le pinceau du Corrège de « flou, gras et moelleux ».
25 Balzac Honoré de, Une fille d’Ève (1839), in Œuvres complètes de M. de Balzac. Scènes de la vie privée, vol. 2, t. 2, Paris, Furne/J. Hetzel et Paulin/J.-J. Dubochet et Cie, 1842, p. 196.
26 Id., Une fille d’Ève : scène de la vie privée, t. 1, Paris, Hippolyte Souverain, 1839, p. 54.
27 Gautier Théophile, Critique d’art, textes choisis, présentés et annotés par Marie-Hélène Girard, Paris, Éditions Séguier, 1994 (voir notamment p. 127 et p. 248) ; Déon Horsin, De la conservation et de la restauration des tableaux, Paris, Hector Bossange, 1851, p. 108 (« flou de la peinture flamande ») ; Dussieux Louis-Étienne, Mémoires inédits sur la vie et les ouvrages des membres de l’Académie royale de peinture et de sculpture, Paris, J.-B. Dumoulin, 1854, p. 329 ; Callery Joseph-Marie, La Galerie royale de peinture de Turin, Havre, Alph. Lemale, 1854, p. 10, 86, 88 et 141 ; Duckett William (dir.), Dictionnaire de la conversation et de la lecture, t. 15, Paris, Michel Lévy frères, 1857, p. 271 (à propos de Jean Raoux) ; Chaumelin Marius, La peinture à Marseille, op. cit., p. 12 ; Passavant Johann-David, Le peintre-graveur, Leipzig, Rudolph Weigel, 1860, p. 242. On retrouve également le terme à plusieurs reprises dans la Revue universelle des arts, par exemple en 1861 à propos de Jean-Baptiste Oudry (Villars, « Correspondance », Revue universelle des arts, t. 14, 1861, p. 132-136).
28 Guillot E., « To like et to love », Le Journal amusant : journal illustré, journal d’images, journal comique, critique, satirique, etc., Paris, Aubert et Cie, no 227, 5 mai 1860, p. 5-7.
29 Félibien André, Des principes de l’architecture, de la sculpture, de la peinture, op. cit., p. 596.
30 Corneille Thomas, Le dictionnaire des arts et des sciences, t. 1, op. cit., p. 445 ; Diderot Denis et Le Rond Jean dit d’Alembert (dir.), Encyclopédie, t. 6, op. cit., p. 880-881.
31 Paillot de Montabert Jacques-Nicolas, Traité complet de la peinture, t. 1, op. cit., p. 162.
32 « Flou », Dictionnaire de l’Académie française, 2005 (9e éd.), [https://www.dictionnaire-academie.fr/article/A9F1059], consulté le 30 avril 2022. Dans le Dictionnaire historique de la langue française, on peut lire que flou « est repris de l’ancien français flo, flou, qui signifiait “inculte, désert (lieu)” (1200), “fatigué, épuisé” (1874), “fané, flasque”, et était issu par évolution phonétique du latin flavus (“jaune”) » (Rey Alain [dir.], Dictionnaire historique de la langue française, Paris, Dictionnaires Le Robert, 1992, p. 806).
33 Félibien André, Des principes de l’architecture, de la sculpture, de la peinture, op. cit., p. 596.
34 Voir notamment Corneille Thomas, Le dictionnaire des arts et des sciences, t. 1, op. cit., p. 445 ; Diderot Denis et Le Rond Jean dit d’Alembert (dir.), Encyclopédie, op. cit., p. 880-881 ; Landais Napoléon, Dictionnaire classique français, Paris, Didier Libraire-Éditeur, 1839, p. 259 ; Bescherelle Louis-Nicolas, Dictionnaire national ou dictionnaire universel de la langue française, t. 1, Paris, Garnier frères, 1856, p. 1270 ; Lachâtre Maurice, Nouveau dictionnaire universel, t. 1, op. cit., p. 1584 ; Littré Émile, Dictionnaire de la langue française, t. 4, op. cit., p. 1704.
35 Génin François, Des variations du langage français depuis le xiie siècle, ou Recherche des principes qui devraient régler l’orthographe et la prononciation, Paris, Librairie de Firmin Didot frères, 1845, p. 381.
36 Nodier Jean-Charles-Emmanuel, Dictionnaire raisonné des onomatopées françoises, Paris, Delangle frères, 1828, p. 132.
37 Larousse Pierre, Nouveau dictionnaire de la langue française, Paris, A. Boyer et Cie, 1878, p. 267.
38 « Flou », Dictionnaire de l’Académie française, 2005 (9e éd.), [https://www.dictionnaire-academie.fr/article/A9F1059], consulté le 30 avril 2022.
39 Watelet Claude-Henri, Vicq-d’Azyr Félix et Levesque Pierre-Charles, Encyclopédie méthodique. Beaux-Arts, t. 1, Paris/Liège, chez Panckoucke/chez Plomteux, 1788-1791, p. 306.
40 Diderot Denis, Œuvres complètes de Diderot, t. 10, Paris, Garnier frères, 1875-1877, p. 407 et 409.
41 Félibien André, Des principes de l’architecture, de la sculpture, de la peinture, op. cit., p. 596.
42 « Flou », Dictionnaire de l’Académie française, 1762 (4e éd.), [https://www.dictionnaire-academie.fr/article/A4F0627], consulté le 30 avril 2022.
43 « Flou », Dictionnaire de l’Académie française, 1798 (5e éd.), [https://www.dictionnaire-academie.fr/article/A5F0591], consulté le 30 avril 2022 ; « Flou », Dictionnaire de l’Académie française, 1835 (6e éd.), [https://www.dictionnaire-academie.fr/article/A6F0660], consulté le 30 avril 2022.
44 « Flou. (à) adv. (Peint.) Peindre à flou c’est peindre d’une manière tendre, légère, noyée & opposée à cette autre manière qu’on appelle dure & sèche » (Nouveau dictionnaire universel des arts et des sciences, françois, latin et anglois, t. 1, Avignon, chez la Veuve de Fr. Girard, 1756, p. 462).
45 « Flou, (peindre) peindre d’une manière tendre & légère » (François Jean, Dictionnaire roman, walon, celtique et tudesque, Bouillon, Imprimerie de la société typographique, 1777, p. 120).
46 « Flou, adv. [Monosyllabe] Peindre flou, d’une manière tendre, légère. Il se dit par opposition à la peinture dure et sèche » (Féraud Jean-François, Dictionnaire critique de la langue française, t. 2, Marseille, Mossy, 1787, p. 259).
47 « Flou, adv. Fluidus (vieux), t. de peinture, d’une manière tendre et légère » (Boiste Pierre-Claude-Victor, Dictionnaire universel de la langue françoise, Paris, chez Desray, 1803 [2e éd.], p. 182).
48 « Flou. Adj. M. (flou) (fluidus, coulant), se dit d’une manière de peindre tendre, légère, fondue » (Landais Napoléon, Dictionnaire classique français, op. cit., p. 259).
49 « Flou, s. m., t. de peint. Peindre flou, d’une manière tendre et légère » (Wailly François de, Nouveau vocabulaire français, d’après l’académie, Wailly, et Noel et Chapsal, avec la prononciation figurée à coté de chaque mot, Carpentras, L. Devillario, 1842, p. 389).
50 « Flou. s. m. (du lat. fluidus, fluide). Terme de peinture exprimant la douceur, le goût moelleux, tendre et suave qu’un peintre habile met dans son ouvrage » (Lachâtre Maurice, Nouveau dictionnaire universel, t. 1, op. cit., p. 1584).
51 Watelet Claude-Henri et Levesque Pierre-Charles, Dictionnaire des arts de peinture, sculpture et gravure, t. 5 (1792), op. cit., p. 66.
52 Pernety Antoine-Joseph, Dictionnaire portatif de peinture, sculpture et gravure, Genève, Minkoff Reprint, 1972 (1757), p. 324.
53 Diderot Denis et Le Rond Jean dit d’Alembert (dir.), Encyclopédie, t. 6, op. cit., p. 880-881. Nous soulignons.
54 Littré Émile, Dictionnaire de la langue française, t. 4, op. cit., p. 1704.
55 Définition de « sec » in Pernety Antoine-Joseph, Dictionnaire portatif de peinture, sculpture et gravure, op. cit., p. 513.
56 Gautier Théophile, Les beaux-arts en Europe, Paris, Michel Lévy frères, 1855, p. 82.
57 Goncourt Edmond et Jules de, Charles Demailly, Paris, Charpentier & Cie, 1876 (1860), p. 142.
58 Diderot Denis et Le Rond Jean dit d’Alembert (dir.), Encyclopédie, t. 6, op. cit., p. 880-881.
59 Nodier Jean-Charles-Emmanuel, Dictionnaire raisonné des onomatopées françoises, op. cit., p. 132.
60 Pernety Antoine-Joseph, Dictionnaire portatif de peinture, sculpture et gravure, op. cit., p. 324 : « La tendresse, la douceur, et le moëlleux de la touche d’un tableau » ; Bescherelle Louis-Nicolas, Dictionnaire national, t. 1, op. cit., p. 1270 : « Grâce et légèreté des touches. »
61 Watelet Claude-Henri et Levesque Pierre-Charles, Dictionnaire des arts de peinture, sculpture et gravure, t. 2, op. cit., p. 330.
62 « [H]is almost invisible stroke effaces rather than testifies to labor. It is as if, by the standards of his day, he wanted to deny the possibility of the artist’s touch » (Simpson Marc [dir.], Like Breath on Glass, op. cit., p. 9. Nous traduisons).
63 « Dans les paysages d’Adriaen van de Velde, il règne un flou et une chaleur rares » (Millin Aubin-Louis, Dictionnaire des beaux-arts, t. 3, Paris, Desray, 1806, p. 130) ; « Il est difficile de donner une idée du charme que l’on éprouve à la vue des ouvrages de Vanden-Velde [sic]. Il règne dans ses tableaux une couleur forte, dorée, un flou, une touche fondue, qui n’appartiennent qu’à lui seul » (Lecarpentier Charles-Jacques-François, Galerie des peintres célèbres, t. 1, op. cit., p. 94) ; « Pinceau flou » à propos d’Adriaen van de Velde (Siret Adolphe, Dictionnaire historique des peintres de toutes les écoles depuis les temps les plus reculés jusqu’à nos jours, Bruxelles, Librairie encyclopédique de Périchon, 1848, p. 132).
64 Blanc Charles, Histoire des peintres de toutes les écoles : École hollandaise, t. 2 (1861-1876), Paris, Librairie Renouard, 1883-1884, p. 12.
65 Watelet Claude-Henri et Levesque Pierre-Charles, Dictionnaire des arts de peinture, sculpture et gravure, t. 1, op. cit., p. 598. Dans Vocabulaire d’esthétique, en 1990, Étienne Souriau donne une définition similaire : « [C]ouleur de transition, liant deux couleurs différentes par un passage continu, évitant leur juxtaposition directe » (Souriau Étienne, Vocabulaire d’esthétique, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Grands Dictionnaires », 2010 [1990], p. 590).
66 Callery Joseph-Marie, La Galerie royale de peinture de Turin, op. cit., p. 86.
67 Ibid., p. 88.
68 Diderot Denis, Œuvres complètes de Diderot, t. 12, op. cit., p. 124.
69 Ibid., t. 10, p. 409. Charles-Jacques-François Lecarpentier – « Son pinceau flou, léger et délicat n’effleure que la toile et semble se jouer d’un art si difficile » – et les frères Goncourt – « Des bistres, – Fragonard en sème, en répand, il en laisse aller au papier de toutes les sortes, quelques-uns d’un tel flou, si noyés, qu’ils semblent tremper dans l’eau ; d’autres puissants, d’accusation vigoureuse et violentée » – qualifient également Fragonard de flou (Lecarpentier Charles-Jacques-François, Galerie des peintres célèbres, t. 1, op. cit., p. 279 ; Goncourt Edmond et Jules de, L’art du dix-huitième siècle et autres textes sur l’art, présenté et réuni par Jean-Paul Bouillon, Paris, Hermann, 1967, p. 177).
70 Lachâtre Maurice, Nouveau dictionnaire universel, t. 1, op. cit., p. 1584 ; Littré Émile, Dictionnaire de la langue française, t. 4, op. cit., p. 1704.
71 Le Petit Larousse, Paris, Larousse, 1996, p. 445.
72 « Flou », Dictionnaire de l’Académie française, 2005 (9e éd.), [https://www.dictionnaire-academie.fr/article/A9F1059], consulté le 30 avril 2022.
73 Ibid.
74 Pichot Amédée, Voyage historique et littéraire en Angleterre et en Écosse, t. 1, Paris, chez les Libraires-Éditeurs Ladvocat et Charles Gosselin, 1825, p. 177.
75 « Vague », Dictionnaire de l’Académie française, 1835 (6e éd.), [https://www.dictionnaire-academie.fr/article/A6V0029], consulté le 30 avril 2022.
76 Larousse Pierre, Grand dictionnaire universel du xixe siècle, t. 15, Paris, Administration du grand Dictionnaire universel, 1866-1877 (1876), p. 724.
77 Sur la différence de sens entre « vague » et « flou » à l’époque actuelle, voir Gaviano Marie-Pierre, « Adam vague et Adam flou », in Bertrand Rougé (dir.), Vagues figures, op. cit., p. 59-71.
78 Sur Prud’hon, voir notamment Siret Adolphe, Dictionnaire historique des peintres de toutes les écoles, op. cit., p. 266 ; Clément Charles, Prud’hon, sa vie, ses œuvres et sa correspondance, Paris, Didier et Cie, 1872, p. 285 et 349. Sur Corot, voir Fromentin Eugène, « Salon de 1845 », in Gérard-Georges Lemaire, Esquisses en vue d’une histoire du salon, Paris, Henri Veyrier, 1986, p. 147-157.
79 Diderot Denis, Œuvres complètes de Diderot, t. 12, op. cit., p. 125.
80 « Vague », Dictionnaire de l’Académie française, 1835 (6e éd.), [https://www.dictionnaire-academie.fr/article/A6V0029], consulté le 30 avril 2022.
81 Desmarres Louis-Auguste, Traité théorique et pratique des maladies des yeux, t. 3, Paris, Germer Baillière, 1858, p. 631.
82 Delacroix Eugène, Dictionnaire des Beaux-Arts, reconstitution et édition par Anne Larue, Paris, Hermann, 1996, p. 209 (13 janvier 1857).
83 Dans son Vocabulaire d’esthétique, Étienne Souriau attache le flou, dans la définition qu’il en donne, à la tradition coloriste : « Le terme se réfère à un effet esthétique caractérisé par l’effacement des lignes et contours, et plus généralement par un estompage des formes clairement délimitées, en faveur d’une impression de voile. Le flou a été diversement apprécié selon les époques. D’après la classification de Wölfflin, il constitue un des aspects du “style pictural”, et s’oppose nettement au “style linéaire” promu par l’art classique » (Souriau Étienne, Vocabulaire d’esthétique, op. cit., p. 791). Dans la traduction française de Renaissance et Baroque d’Heinrich Wölfflin, on peut en effet lire : « Là [dans le style de la Renaissance], tout est ligne, tout est délimité et de contours précis, l’expression principale réside dans le contour ; ici [dans le pittoresque, le baroque], il n’y a que des masses, tout est large, noyé dans le flou, en traits incertains et répétés, ou fait totalement défaut » (Wölfflin Heinrich, Renaissance et Baroque, trad. de Guy Ballangé, Paris, Gérard Monfort, 1988 [1888], p. 51).
84 Makarius Michel, Une histoire du flou, op. cit., p. 21.
85 Ibid., p. 47.
86 Gault de Saint-Germain Pierre-Marie, Guide des amateurs de peintures, op. cit., p. 168.
87 Andry A., Henner sa correspondance avec Charles Goutzwiller, Château-Thierry, Imprimerie commerciale, 1928 (lettre de septembre 1859).
88 Goncourt Edmond et Jules de, Journal : mémoires de la vie littéraire, t. 3 (1887-1896), texte intégral établi et annoté par Robert Ricatte, Paris, Robert Laffont, 1956, p. 899 (31 décembre 1893).
89 Gautier Théophile, « Salon de 1870 », Journal officiel de l’Empire français, année 2, no 163, 16 juin 1870, p. 1017-1018.
90 Pour Charles Blanc, Prud’hon « est aussi correct que Nanteuil et il a plus de flou que Latour » (Blanc Charles, Histoire des peintres français au dix-neuvième siècle, Paris, Cauville frères, 1845, p. 224). Voir aussi Siret Adolphe, Dictionnaire historique des peintres de toutes les écoles, op. cit., p. 266.
91 Gauthiez Pierre, Prud’hon, Paris, Librairie de l’Art J. Rouam, 1886, p. 56.
92 Gautier Théophile, Guide de l’amateur au musée du Louvre, Paris, G. Charpentier & Cie, 1898, p. 17.
93 Id., Critique d’art, op. cit., p. 248 (La Presse, 27 mai 1852).
94 Ibid., p. 127 (Le Moniteur Universel, 25 août 1859).
95 Klingsor Tristan, « Un précurseur de l’impressionnisme. Eugène Boudin », La Nouvelle revue, janvier 1901, p. 261-270.
96 Mengs Anton-Raphaël, Réflexions sur la beauté et sur le goût dans la Peinture, in Œuvres complètes, t. 1, trad. de l’Italien (sic), Paris, Hôtel de Thou, 1786, p. 137.
97 Jal Augustin, L’artiste et le philosophe, entretiens critiques sur le salon de 1824, Paris, Ponthieu, 1824, p. 221.
98 Watelet Claude-Henri et Levesque Pierre-Charles, Dictionnaire des arts de peinture, sculpture et gravure, t. 5, op. cit., p. 736-738.
99 Ibid., t. 2, p. 331. Nous soulignons.
100 Duckett William (dir.), Dictionnaire de la conversation et de la lecture, t. 15, op. cit., p. 271.
101 Guizot François, De l’état des beaux-arts en France et du salon de 1810, Paris, Maradan, 1810, p. 123.
102 Blanc Charles, Histoire des peintres de toutes les écoles : École française, t. 7 (1861-1876), Paris, Librairie Renouard, 1883-1884, p. 4.
103 Id., Histoire des peintres de toutes les écoles. École hollandaise, t. 1, Paris, Librairie Renouard, 1883-1884, p. 12.
104 Piles Roger de, Œuvres diverses, Amsterdam/Leipzig, Arkstée & Merkus, 1767, p. 335. Roger de Piles reprend cette expression d’un autre ouvrage paru en 1708 : Boutet Claude, Traité de la peinture en miniature, La Haye, Chez Loüis & Henry van Dole, 1708, p. 238.
105 Watelet Claude-Henri et Levesque Pierre-Charles, Dictionnaire des arts de peinture, sculpture et gravure, t. 2, op. cit., p. 329-330.
106 Cochin Charles-Nicolas, Voyage d’Italie, t. 1, Paris, chez Ch. Ant. Jombert, 1758, p. 165.
107 Ibid., t. 3, p. 100. Notons cependant qu’il emploie parfois également le terme de façon positive, en particulier à propos d’un tableau de Pietro da Cortona qui est « fort beau, très moëlleux, et même un peu flou », t. 3, p. 427. Pour Cochin, « flou » est également hyperbolique.
108 Diderot Denis et Grimm Friedrich Melchior, Correspondance littéraire, philosophique et critique de Grimm et de Diderot depuis 1753 jusqu’en 1790, t. 2, Paris, Furne, 1829-1831, p. 252 (lettre du 1er juillet 1758 à propos du Voyage d’Italie de Cochin).
109 Diderot Denis, Œuvres complètes de Diderot, t. 10, op. cit., p. 407.
110 Ibid., p. 174.
111 Watelet Claude-Henri et Levesque Pierre-Charles, Dictionnaire des arts de peinture, sculpture et gravure, t. 2, op. cit., p. 330.
112 Guessard François, « Examen critique de l’ouvrage intitulé Des variations du langage depuis le douzième siècle (2e article) », in Bibliothèque de l’École des chartes, op. cit., p. 289-556.
113 Dussieux Louis-Étienne, Mémoires inédits sur la vie et les ouvrage des membres de l’Académie royale de peinture et de sculpture, op. cit., p. 329.
114 Watelet Claude-Henri et Levesque Pierre-Charles, Dictionnaire des arts de peinture, sculpture et gravure, t. 2, op. cit., p. 330-331.
115 Guizot François, De l’état des beaux-arts en France et du salon de 1810, op. cit., p. 123.
116 Wicky Érika, Les paradoxes du détail, op. cit., p. 216.
117 Gautier Théophile, Critique d’art, op. cit., p. 149 (Le Moniteur universel, 4 septembre 1859).
118 Marin Louis, De la représentation, Paris, Le Seuil/Gallimard, coll. « Hautes Études », 1994, p. 369-370.
119 Ibid., p. 305.
120 Gombrich Ernst, L’Art et l’illusion, trad. de l’anglais par Guy Durand, Paris, Gallimard, 1996 (1960), p. 185.
121 Watelet Claude-Henri et Levesque Pierre-Charles, Dictionnaire des arts de peinture, sculpture et gravure, t. 2, op. cit., p. 330.
122 Berthelot, Derenbourg Hartwig, Dreyfus F.-Camille et al. (dir.), La grande encyclopédie : inventaire raisonné des sciences, des lettres et des arts par une société de savants et de gens de lettres, t. 17, Paris, H. Lamirault, 1885-1902, p. 659.
123 Wellmann Marc, Die Entdeckung der Unschärfe in Optik und Malerei, op. cit., p. 76.
124 « Sfumare. Venire I colori; ed è quello che fanno I Pittori, doppo auer posato il colore a suo luogo nella tela o tauola, per leuare tutte le crudezze de’colpi, confondendo dolcemente fra di loro chiaro con mezza tinta, o mezza tinta con lo scuro, a fine che il passaggio dall’v no all’altro venga fatto con vn tale digradamento, che la pittura anche a vista vicina apparisca morbida e delicata lenza colpi di pennello » (Baldinucci Filippo, Vocabolario toscano dell’ arte del disegno, Florence, SPES, 1976 [1681], p. 151. Nous traduisons).
125 Vasari Giorgio, Les Vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes, t. 1, trad. et édition critique sous la direction d’André Chastel, Paris, Berger-Levrault, 1981, p. 175.
126 Félibien André, Entretiens sur la vie et les ouvrages des plus excellens peintres anciens et modernes, t. 3, Trevoux, de l’Imprimerie de S.A.S., 1725, p. 460-461.
127 Paillot de Montabert Jacques-Nicolas, Traité complet de la peinture, t. 9, op. cit., p. 28.
128 Dehaisnes Chrétien, De l’art chrétien en Flandres, Douai, Adam, 1860, p. 121.
129 Nagel Alexander, « Leonardo and Sfumato », Res, no 24, automne 1993, p. 7-20.
130 « Senza tratti o segni, a uso di fumo. » Cité in ibid.
131 Vinci Léonard de, Les Carnets de Léonard de Vinci, présentés par Edward Mac Curdy, trad. par Louise Servicen, Paris, Gallimard, 1942, p. 212.
132 Ibid.
133 Id., Traité de la peinture, trad. et présenté par André Chastel, Paris, Éditions Berger-Levrault, 1987, p. 198.
134 Freedman Luba, « The “Blurred” Horizon in Leonardo’s Paintings », Gazette des beaux-arts, t. 129, nos 1540-1541, 1997, p. 181-194.
135 Wellmann Marc, Die Entdeckung der Unschärfe in Optik und Malerei, op. cit., p. 77-94.
136 À son époque, Léonard de Vinci est relativement isolé dans ses préoccupations sur la perception visuelle que ses contemporains ne partagent généralement pas. Comme le rappelle Michel Makarius : « [L]es aléas de la vision n’intéressent pas ses contemporains qui restent en cela fidèles à la tradition antique et médiévale » (Makarius Michel, Une histoire du flou, op. cit., p. 30).
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