Justice seigneuriale et régulation sociale à Moyemont : le plaid et le contremand (1490-1790)
p. 75-91
Texte intégral
1En Lorraine du Sud, les archives ducales comme celles des grands chapitres sont particulièrement riches. Elles permettent d’aborder l’étude des sociétés rurales à partir de sources dont l’intérêt principal est de former des ensembles importants et fréquemment cohérents et ceci dès le xvie siècle. La plupart des dossiers sont des pièces comptables, souvent d’origine judiciaire, établies par les receveurs ducaux ou les gestionnaires des collégiales. Elles sont conservées, à la fois, dans les séries B et G des Archives de Meurthe-et-Moselle et dans la série G des Archives des Vosges1. Le classement en fonction d’une chronologie annuelle de la série B nancéienne pallie souvent les incertitudes de l’ordre alphabétique des communautés, adopté par la série G spinalienne et réciproquement2. Il devient alors possible de confronter des pièces de sources différentes qui permettent de suivre avec plus de certitude l’évolution des communautés d’habitants sur plusieurs décennies3. C’est le cas des archives de la mairie de Moyemont. Elles permettent d’observer sur trois siècles les comportements de groupes sociaux volontiers frondeurs, confrontés aux exigences du pouvoir capitulaire. Les habitants supportent difficilement que les contraintes seigneuriales viennent limiter leurs anciens droits forestiers, alors que la proximité du pouvoir ducal leur offre des opportunités. De 1490 à 1787, leur résistance a donné lieu à une succession de plaids annuels ou exceptionnels qui ont été l’occasion de nombreux tumultes et ont obligé les greffiers à une rédaction précise des actes. Le fonctionnement d’une justice seigneuriale est normalement abordé par le biais du discours institutionnel4. À Moyemont, il semble possible d’étudier l’impact sur les habitants d’une régulation sociale, menée avec constance par les chanoines déodatiens pendant trois siècles. L’exemple choisi porte sur un territoire et une population restreints, conditions qui permettent de suivre l’évolution des familles sur plusieurs siècles et avec suffisamment de précision.
La communauté d’habitants de Moyemont
2Moyemont est à la fois le chef-lieu et l’une des trois mairies de la prévôté du Chaumontois5. Cette seigneurie du chapitre de Saint-Dié regroupe un ensemble de communautés situées sur la rive droite de la Moselle6. Ce sont les possessions capitulaires les plus excentrées. La mairie de Moyemont est située 40 kilomètres à l’ouest de Saint-Dié, siège du pouvoir. Le domaine est géré depuis la maison franche de Moyemont où réside le chanoine, qui fait office de prévôt du Chaumontois, lorsqu’il se déplace dans sa juridiction.
3Il est difficile de donner une image satisfaisante d’une communauté d’habitants, quand il s’agit de définir son emprise aux niveaux géographique, économique et démographique7. La question se pose tout particulièrement pour Moyemont au xve siècle. En tant que siège d’une prévôté capitulaire, la mairie perçoit les revenus de 12 finages. Si on prend en compte le spirituel, la communauté paroissiale regroupe aussi les finages de Saint-Genest, Badménil et Ortoncourt8. Cet ensemble correspond également au ban, si on le réduit à l’espace contrôlé par les installations banales. Dans cette étude, on a opté pour le cadre juridictionnel, choisi par le pouvoir seigneurial pour régler les conflits qui l’opposent à sa communauté. Il coïncide avec la seule communauté d’habitants de Moyemont et son important finage forestier9.
4Cette limite définie, la population de Moyemont n’a jamais été très nombreuse10. Entre le début du xvie siècle et la fin du xviie, le nombre d’habitants oscille entre 17 et 25 laboureurs11. Elle est tombée à 10 en 1650 qui semble le point d’étiage. La population augmente ensuite jusqu’en 1760 avec 57 laboureurs, à comparer aux 52 citoyens actifs de 1790. La communauté est installée sur un axe particulièrement exposé12 et pourtant le finage de Moyemont attire.
Le donné juridique
5À partir du viiie siècle et l’émiettement de l’autorité du premier âge féodal, l’intégrité des possessions capitulaires est peu à peu affectée comme ailleurs13. Il faut attendre la fin du xe siècle (ou le début du xie) et la Littera antiqua rectidunum, premier censier, pour connaître « les cens et droitures » de l’atrium du chapitre de Saint-Dié, dévolus à l’entretien des chanoines et de leur Église14. À partir de cette date, le chapitre tente de retrouver puis de maintenir ses prébendes et ses droits initiaux. La tâche est d’autant plus nécessaire que l’incendie de 1065 a fait disparaître les documents fondateurs. Sans doute les « sonriers15 » y parviennent-ils difficilement, ce qui explique que la Littera antiqua soit très certainement un faux, fabriqué a posteriori.
6Quelques certitudes apparaissent au début du xiie siècle. Pour caractériser la terre de Moyemont en 1114, un diplôme de l’empereur Henri V utilise l’expression « Medium Montem cum appendiciis suis [avec ses appartenances] », qui est le plus souvent réservée à la description d’un ensemble de « ménanties16 ». On peut donc supposer que le finage de Moyemont a pour origine des tenures groupées autour d’une maison franche symbole du ban17. D’autres droits, qui se sont conservés, semblent aussi le confirmer : les droits de relief sur toute succession immobilière18, de corvée19 ou de prélèvement sur les forains nouvellement installés. Par ailleurs on peut ajouter que, bien loin d’avoir eu seulement cours dans le Val de Saint-Dié20, la mainmorte a concerné l’ensemble du temporel capitulaire. C’est la seule explication qui puisse justifier le recours au contremand dans le Chaumontois.
7Au début du xive siècle, le ban de Moyemont se constitue progressivement autour de la maison franche. Les terres, rattachées à l’établissement seigneurial, sont travaillées par des sujets corvéables21. En 1310, l’évêque de Toul confie aux chanoines le droit de patronage de l’église de Moyemont, ce qui leur permet de bénéficier des dîmes d’un certain nombre de communautés22. En 1323, Henri comte de Vaudémont vend au chapitre son droit de gîte et lui reconnaît le droit de régler la taille et d’exercer la haute justice sur l’ensemble du ban23. Le reste des droits est engagé en 1364 par un acte précisant que l’ensemble des biens est « franc-alleu sans être de fief ni de garde d’aucun seigneur24 ». Il s’agit bien de la définition d’une terre noble et franche à cause de son caractère seigneurial, présomption invincible qui n’a besoin d’aucun titre formel. Ceci suffirait à expliquer l’absence de charte de franchise qui, par ailleurs, ne s’appliquerait qu’aux taxes portant sur la possession de la terre25. On pourrait se satisfaire de ce constat qui a aussi l’avantage d’expliquer l’organisation féodale d’une justice banale, modelée sur l’ancienne curia, qui est rendue par un collège représentant l’ensemble du domaine rural. En réalité, il n’explique pas complètement les entreprises du chapitre ni la résistance des sujets.
8La justification des prétentions des habitants tient peut-être au fait que, sur le territoire de la communauté paroissiale de Moyemont, se trouve une chapelle vouée à Saint-Genest qui est le siège d’un important pèlerinage curatif. Comme en d’autres endroits26, les habitants de Moyemont peuvent avoir bénéficié de certaines franchises, liées à ce lieu de culte et faisant d’eux des « hommes le duc27 ». Pourtant en l’absence d’un Titre précis, le chapitre préfère privilégier l’hypothèse qui lui est la plus favorable28.
Le donné économique
9Les terres du Chaumontois sont plus fertiles que les sables gréseux de la haute vallée de la Meurthe. Préservé de l’échaudage, le froment peut y être cultivé comme l’avoine. Taille et dîme sont assises sur ces deux céréales qui expliquent également une relative aisance des habitants29. La communauté de Moyemont occupe une zone de défrichement de la forêt ducale30. Les ressources forestières constituent une autre source d’enrichissement. Les habitants prétendent disposer d’une partie de la production de bois, ce que conteste le chapitre qui ne possède par ailleurs aucun titre de propriété :
« La forêt de Moyemont leur appartient en totalité ; ils en doivent avoir un titre qu’il seroit à propos d’examiner, quoy que la propriété ne leur soit pas contestée par la communauté de Moyemont ; nonobstant ce touts les plaids annaulx qui se sont tenus à la reserve de ceux de l’année dernière [1702] portent precisement que les habitans ont droit d’usage dans la forêt, tant pour bois de batttiments, reparations, qu’afouages ; outre ce la moitié du produit des ventes ce qu’ils assurent31. »
10Le contentieux entre les habitants et le pouvoir seigneurial est lourd. Tous les ans le chapitre procède à une coupe destinée principalement aux salines de Rozières. La communauté prétend y avoir un droit de prélèvement au prorata de la quantité de bois coupée :
« Tous les arbres de batiments et ceux propres à faire des esseaux pour la couverture des maisons et autres reparations ; elle pretend en oultre tout le reste pour luy tenir lieu d’affouage ; que si cependant elle venoit à en abbandonner moitié et que les seigneurs la vendissent, elle veux s’en reserver encore moitié du produit, fondée sur la teneur des plaids annaulx sur une possession constante et plus que suffisante pour établir son droit ; sur ce cisteme les seigneurs avoient une forêt considerable du produit de laquelle il ne leur reviendroit qu’un quart, ce qui parroit un peu dure. »
11La question des bois est réglée en 1787 par un partage de la forêt de Moyemont entre la communauté d’habitants et le chapitre32.
Le donné social
12Les situations les plus contraignantes pour les habitants concernent les menaces sur leurs biens et leur origine est le plus souvent une rivalité économique. Ce sont les intérêts de la production ou du négoce qui poussent aux débordements et d’abord la crainte de perdre les moyens d’existence. De petites tracasseries quotidiennes, insignifiantes en apparence, perturbent profondément les communautés rurales et permettent d’expliquer des réponses disproportionnées avec leurs causes.
13Il est indispensable de bien cerner le donné social pour comprendre le fonctionnement de la justice seigneuriale. Pour pérenniser les structures féodales d’un pouvoir fondé sur des relations individuelles, ses représentants s’appuient sur la violence latente qui structure les relations communautaires33, au même titre que les solidarités34. Ils exercent des contraintes destinées à isoler les individus de leur groupe35. L’institution du plaid banal joue un rôle fondamental à ce niveau en introduisant des rapports de force perturbants entre les habitants. Chaque sujet doit se soumettre au jugement du groupe, redouté quand l’honneur est une condition de l’insertion sociale36. L’information sur le tumulte de 1583 est tout à fait caractéristique des perturbations liées au plaid. À cette date, Howat, qui a été plusieurs fois maire, occupe l’office de forestier. La procédure l’oblige à obtenir la nomination d’un doyen pour pouvoir percevoir les amendes de trois habitants qui appartiennent au clan du maire en place. C’est ce dernier qui témoigne :
« Ledict commis Howat se vint représenter a luy et luy dit qu’il requerroit sans dire au nom de qui (fut de la commune en general ou de quelque particulier) de luy fournir ung doyen, autrement qu’il n’obeyroit plus a luy non plus qu’au simple enfant de la ville ; disant en oultre par le sang Dieu que ledict Sr prevost ne luy ledict maire deposant n’avoient rien à luy commander ny à dominer sur la commune ; sur ce survint Dieudonné Lhoillier qui s’adressa a luy deposant et luy dit : compere, vous nous faites tort ; ce pendant plusieurs dudict village assemblez commencearent a murmurer et parler par forme de mutinerie et ung nommé Demengeon Lhoillier (ne sçait il deposant pourquoy ne a quelle occasion) le print et le leva sur ses bras et l’emporta en sa maison37. »
14Les fondements du pouvoir seigneurial sont respectés. L’intervention de Howat a lieu juste après le départ du prévôt. Pour contraindre le maire, on le transporte dans sa maison afin de ne pas violer la franchise de la maison seigneuriale. Par contre, une fraction de la population fait passer ce pouvoir, symbolisé par le maire et le prévôt, après la volonté commune. Le témoignage reste suffisamment imprécis pour ne pas nuire aux habitants influents, comme les membres de la famille Lhuillier. En Lorraine du Sud surtout, de telles contraintes ont abouti à une vague de violence institutionnelle, officialisée entre autres par les procès de sorcellerie38. Bien entendu dans ce cas, on ose à peine parler de régulation sociale39.
15La vie collective est réglée par une socialité qui accepte l’emportement comme l’exclusion. Son équilibre tient à l’inscription dans la durée des relations que chaque habitant entretient avec sa communauté. Pour répondre à une rivalité économique ou pour venger un honneur menacé, les actes de violence s’imposent le plus souvent40. Choisir cette voie est préférable au risque de perdre ses moyens ou son honneur en étant repris par la justice. La dernière solution est la fuite qui revient à avouer l’inadaptation à une situation. Il ne peut s’agir que d’un ultime recours lorsque toutes les possibilités de réponse ont été épuisées car l’exclusion est toujours ressentie comme un statut inacceptable. La perte des références collectives en fait une mort sociale pour l’individu. C’est pourtant cette voie qu’offre le contremand aux sujets du temporel capitulaire.
Le plaid et le contremand : deux instruments destinés à la régulation sociale
16La justice seigneuriale emprunte ses méthodes au fonctionnement d’une communauté dont la cohésion est fondée par des gestes et des paroles admis collectivement. Ce sont, par exemple, les témoignages qui forment l’essentiel de la matière fondant une condamnation. La notion d’honneur est particulièrement mise en avant. C’est elle qui impose à chaque habitant de ne pas avoir été repris par la justice. Par exemple, un accusé ne peut nier des crimes s’ils sont « la pluspart verifiez par des gens de biens » mais surtout s’ils le sont par « ses plus grands amys41 ». Il n’échappe pas non plus à la question (interrogatoire sous la torture) s’il a été maintenu « jusques au feu » par un supplicié, « en presence d’une grande multitude de gens assistans à son supplice42 ». Un tel code de procédure apparaît bien comme un moyen de contrôle des communautés, dont il a la possibilité d’exploiter les dissensions claniques. En l’absence de toute enquête matérielle, à l’exception des affaires d’empoisonnement, la justice ne dispose que de la réputation de moralité d’un témoin pour valider ses dires. Or cette moralité ne peut que se trouver dans le clan soutenant le pouvoir seigneurial, celui dont les intérêts se confondent avec ceux du chapitre.
17Les justiciables ne sont pas dupes d’une procédure qui ne leur laisse aucune chance de défense. Il existe même une sorte d’entraide entre ceux qui, appartenant au même groupe, ont échappé à une condamnation. Ainsi l’un d’eux conseille à une femme de son entourage « que quant on luy confronteroit quelque tesmoings qu’elle dise qu’ils n’estoient gens de bien ; aultrement que l’on adjousteroit foid et creance a leurs deppositions43 ». L’impression dominante est bien celle d’une justice qui encourage la dissolution des liens de solidarité, en isolant l’accusé et en le chargeant de la vindicte communautaire.
Contremand et rachat
18Pour un accusé exclu de ses réseaux de solidarité, la tentation est grande de quitter les lieux. L’impression de richesse, que dégagent les seigneuries ultramontaines, attire les montagnards vivant sur les terres du chapitre. Leur départ est encouragé par une vieille coutume qui revient en usage au xvie siècle après être tombée en désuétude, celle de « se contremander44 ». Il s’agit d’une procédure archaïque autorisant sous certaines conditions un changement de seigneurie. La mention, implicite certes, apparaît au xie siècle dans les titres capitulaires45. Le chapitre s’oppose fermement à sa remise en vigueur, dès le début du xvie siècle46. La première apparition certaine du contremand à Moyemont concerne l’année 1549, date à laquelle une veuve demande justice pour son mari devant le tribunal ducal. À cette époque il semble que la procédure ne soit plus connue des échevins nancéiens47.
19Un ensemble de sources48 permet d’étudier le contremand dont la pratique est attestée dans la plupart des seigneuries du temporel capitulaire49. Les archives de la mairie de Moriviller50 et celles de la mairie de Meurthe51 présentent des analogies confirmant une institution ancienne, parfaitement codifiée et généralisée, qui mêle l’expression d’une culture somatique et des notions juridiques. La coutume de Moriviller précise que les habitants ont « contremand les uns sur les autres ». Le finage de cette mairie du Chaumontois comprend trois bans, ce qui donne à chaque sujet deux possibilités de se contremander. La coutume de la mairie de Meurthe autorise les hésitations dans la mesure où elle reflète la parcellisation de l’espace montagnard. Chaque sujet peut se « contremander neuf fois le jour, de l’un des seigneurs à l’autre, sans amende faisant et sans garder nul droit de contremand au maieur, que le neuvieme retourne au seigneur qu’il est party ». Son contremand accepté, le nouveau sujet doit payer au maire le droit d’entrée dans sa nouvelle seigneurie. À Moriviller, il doit 6 deniers, alors qu’à la mairie de Meurthe le montant semble avoir été oublié52. Ce droit est la contrepartie des services qui ne seront plus assurés dans la seigneurie d’origine.
20Le contremand ne peut se faire qu’en des lieux bien précis. En août 1499, les chanoines détiennent en prison un de leur sujet de Sainte-Marguerite et sa femme. Son cas est exemplaire car il n’hésite pas à adresser une supplique au duc René II53. Le souverain envoie la requête à son Conseil à Nancy et leur « mande expressement entendre bien la matiere y contenue ». La justification envoyée par les juristes du chapitre prouve la fermeté d’un buffet seigneurial qui, à la fin du xve siècle, n’entend pas céder aux exigences du pouvoir central :
« Au resgard de la prinse et detencion d’ung nommé Nicolas Viney de Saincte Marguerée dessus ledict Sainct Diey et de sa femme touchant l’abus par luy fait, commis et perpetré sur ung pretend contremand qu’il avoit au prejudice de ladicte Eglise nouvellement attempté faire en lieu non pertinement dehu ne accoustumé. [Le chapitre le détient en prison] pretendans et gardans et soubstenans les anciens drois et usages d’icelle Eglise ; que ad cause dudit abus il estoit a eulx encheu et confisqué de son corps et de tous ses biens54. »
21Le sujet qui n’a pas respecté l’ensemble des détails de la procédure retourne donc à la condition de serf. Il existe cependant une autre solution qui montre que le contremand peut être compris comme une forme de rachat, puisque…
« […] plutot que faire un contremand, si bon leur semble paier traict et taille ez deux seigneurs en an et jour durant ; au bout et jour de l’an il se peut tenir auquel seigneur bon luy semble, sans amende faisant ».
22Le même principe de rachat est retenu pour l’élection du maire lors du plaid banal, si celui qui est choisi en dernier recours par les représentants du seigneur refuse la charge55. Dans la première moitié du xvie siècle, l’amende exigée est importante puisqu’elle s’élève à 6 francs56. Une telle clause ne peut donc s’appliquer qu’à une fraction aisée de la communauté, celle des marchands et des laboureurs. Comme dans le cas de Nicolas Viney, la caution d’un ou plusieurs alliés est exigée dans le cas d’une procédure mal suivie57. Pour éviter la récidive, la justice capitulaire exige la comparution de l’individu concerné à la première requête, montrant par là l’intérêt qu’elle attache à conserver ces catégories sociales.
23Dès le début du xvie siècle, la multiplication des contremands illégaux contraint les chanoines à réaffirmer leurs droits sur la communauté de Sainte-Marguerite :
« Les Venerables doyen et chapitre de Sainct Diey disent qu’il est vray que adcause de leur Eglise sont seigneurs sonriers au lieu de Saincte Margueree, devant Sainct Diey, y creant la justice et renouvellent chacun an on mois de may et non aultres, y tenans leurs plaitz bannalz ondit mois et ont aultres droitz seigneuriaulz ; auquel lieu de Saincte Marguerée a une maison anciennement et modernement appellee la maison du blanc maire, laquelle appartient a monseigneur le duc ; et si tant est que les hommes de leurdite seigneurie se veullent contremander, ilz le doient faire en icelle maison et eulx contremander et advouer soubz mondit seigneur le duc et non soubz aultres ; avec ce doient observer les cerimonies pour ce accoustumee, le tout soubz peinne de confiscation des biens et le corps mis en perpetuelle servitude58. »
24La contrainte de lieu est d’autant plus importante que le ban est ici partagé entre deux seigneurs, le chapitre et le duc, mais que les sujets choisissent plutôt les évasions ultramontaines. La procédure, qui répond parfaitement aux mentalités locales, découle des difficultés du pouvoir seigneurial, liées à des bans partagés à l’extrême. Les différents pôles du pouvoir banal sont cités par ce document qui confirme aussi que la procédure du contremand est intégrée au plaid banal. En outre, l’expression employée à Moriviller pour marquer l’aboutissement chronologique du contremand confirme l’enracinement de la coutume dans le droit médiéval59.
25Les sources associent le mot « contremand » à celui de « cérémonie », ce qui le relie à un moment important de la vie sociale. Pour l’individu concerné, le contremand est une forme de réponse palliant son inadaptation à une situation difficile. Destiné à changer l’orientation d’une vie sans trop de heurts, c’est une liberté, certes, mais étroitement contrôlée. De là tout ce rituel où transparaît la culture somatique du groupe et dont certains des rites révèlent les concepts sociaux archaïques qui fondent l’inconscient communautaire. L’essentiel de la procédure est en effet fondé sur un ensemble de connotations liées au foyer et à la vie domestique. Ainsi, par exemple, la validité du contremand est reconnue par le maire de la seigneurie d’origine qui « doit aller veoir la maison, s’il a bien fait son contremand60 ».
26Le respect de l’intégralité de ce qu’il faut bien appeler un rituel autorise la famille à s’établir dans la seigneurie de son choix « sans amende faisant ». À l’origine, le contremand est liée à la condition serve qui impose le devoir de « tenir feu et lieu ». Le sujet doit rester sur sa tenure et il ne peut la quitter que les mains nues. La procédure de la mairie de Meurthe peut sans doute éclairer l’appellation de « levants et couchants » désignant les serfs dans certaines régions61. L’obligation de demeurer le visage contre le sol jusqu’au soleil levant serait liée à l’asservissement à la terre. Le droit pour la famille de se coucher et de manger dans la maison est la contrepartie du travail fourni sur la tenure au cours de la journée. Il est la conséquence directe de l’acceptation de la servitude :
« Un serf de cette nature ne peut rien avoir de propre, qui enim in potestate alterius est, nihil fuvor [sic] habere potest [celui qui de fait est sous la domination d’autrui ne peut jouir de rien] ; il acquiert d’ailleurs à son maitre et seigneur la propriété provenante de son labeur ; et c’est de cette servitude, quoe nihil aliud est quam constitutio juris gentium quoquis domino alieno subjicitur [qui n’est rien d’autre que la condition légale des sujets s’appliquant à quiconque se trouve sous la domination d’un seigneur autre que le sien], que la mainmorte a pris son origine qui n’etant autre chose qu’une subjection qui se contracte par la naissance et qui s’appelle vitium natalium [vice lié à la naissance] ; il résulte de là que le droit de poursuitte luy est inséparablement attaché ; pour plus grande confirmation de cette vérité, la mainmorte etant une servitude et un vice de naissance, comme dit est, c’est par conséquent une charge personnelle quod personam sequitur quocumque ierit [parce qu’elle accompagne la personne partout où elle sera allée] et sans qu’elle s’en puisse affranchir ny liberer par le changement d’habitation hors de la juridiction du seigneur qui a droit de mainmorte62. »
27Les statuts de l’église de Saint-Dié stipulent pourtant qu’il est…
« […] vray que les seigneurs qui ont droit de main morte dans le Val de St Diey peuvent suivre leurs sujets où ils se puissent etablir, pourveu que ce ne soit pas dans le même Val sous un seigneur qui ayt pareil droit de mainmorte63 ».
28La restriction finale confirme à la fois le droit de changer de seigneurie et le lien
juridique existant entre la condition de mainmortable et la possibilité de recourir au contremand.
29Au cours de le seconde moitié du xve siècle et surtout au xvie, la procédure est remise en vigueur dans des finages menacés de sténochoria par la croissance démographique64. À cette époque, le chapitre semble avoir perdu le souvenir du contremand qu’il qualifie de « novelleté » ou peut-être feint-il seulement pour tirer parti de la disparition de ses anciens Titre65. En tout cas, il lui faut absolument éviter que ses sujets ne se réfugient dans la seigneurie alsacienne des Ribeaupierre. Il paraît certain que le pouvoir seigneurial se sent menacé par les possibilités offertes par le contremand, même si la procédure est détournée comme à Moyemont où les habitants l’utilisent pour se rapprocher du pouvoir ducal. Dans le Chaumontois, les juristes recueillent tout ce qui peut en compromettre la validité. Par contre dans les seigneuries de la montagne, ils tentent de détacher le contremand de la condition de mainmortable66.
Le plaid banal
30Toute communauté s’individualise par ses propres formes d’exclusion et de cohésion, ce qui revient à affirmer l’importance, mais aussi la spécificité des cadres qui structurent les groupes sociaux67. Il faut entendre par là aussi bien les événements qui ponctuent l’existence quotidienne que les modèles qui la normalisent et, partant, les hommes qui en assurent le contrôle. Il s’agit de règles stéréotypées, d’attitudes culturelles acquises par imprégnation ou par conditionnements physique ou mental. Ces modèles comportementaux jouent le rôle de soupapes de sécurité. Ils permettent d’extérioriser par la parole et le geste les tensions qui angoissent les habitants68. Si la fête annuelle est bien la première des manifestations calendaires cohésives, le plaid banal vient en seconde position69.
31Un pouvoir éloigné de ses sujets doit mettre périodiquement en œuvre un rituel pour affirmer sa présence et rappeler ses droits sur les finages qu’il contrôle. Ceci explique l’ancienneté du plaid banal et sa présence dans la plupart des provinces, sous d’autres appellations70. Sur le temporel du chapitre de Saint-Dié, cette assemblée est annuelle, généralement placée entre les semailles et les récoltes, en mai ou juin. Elle peut aussi être placée à la fin de l’année-récolte, en octobre par exemple, si les circonstances en exigent la réitération. La réunion se tient sur l’usoir [au devant] de la demeure du maire sortant ou devant la maison franche, siège de la juridiction capitulaire. L’assistance de chacun y est requise et l’abstention punissable d’une amende. Le plaid est donc d’abord une contrainte seigneuriale. À Moyemont, il se déroule en quatre phases. Premièrement, un rapport de police fait par l’ancien maire aux représentants du pouvoir seigneurial, ici dans le Chaumontois, le prévôt assisté d’un chanoine délégué : il s’agit d’apprécier le montant des amendes et confiscations que le chapitre percevra dans l’année en sa qualité de haut, moyen et bas justicier de Moyemont. Deuxièmement, l’élection des représentants de la communauté aux offices de maire, d’échevin, de doyen et de forestier : les candidats aux différentes fonctions sont présentés aux représentants du pouvoir à partir d’une établie par la communauté. Trois listes successives peuvent être proposées pour chaque office. La décision finale est réservée au prévôt. Il n’est cependant pas habilité à choisir quelqu’un qui ne serait pas désigné par les habitants. Troisièmement, l’exposé des différends opposant les habitants aux autres communautés : ce sont souvent des affaires de pâture, de paisson ou de vente illicite de bois. Il s’agit de requérir du prévôt qu’il assume la fonction de procureur de la communauté, tout en permettant un rappel des droits du chapitre si litige il y a71. Quatrièmement, l’affermage des différentes taxes et impôts.
32L’importance du plaid de 1560 tient à la situation particulière de Moyemont. Pour justifier la vente de bois sur pied à la verrerie de Hadigny, les habitants évoquent leur situation géographique particulière et leur ancienne coutume qui leur laissait la libre disposition des ressources forestières72. Pour le chapitre, c’est un grave mésus qui permet d’envisager l’influence d’un groupe d’enrichis désireux d’échapper au pouvoir seigneurial. Ce constat, encore implicite en 1560, devient tout à fait évident lors du plaid de 1583 où l’un des habitants déclare « où messeigneurs du chapitre vouldroient leur faire tort qu’il y avoit le souverain par dessus73 ». Les suites données à cette insubordination permettent de comprendre comment la communauté s’organise pour affronter les exigences seigneuriales.
33Au cours de la première phase du plaid de 1560, les deux représentants du pouvoir rapportent au maire :
« Que messieurs les Vénérables doyen et chapitre de Saint-Dié ont donné trois pieces de bois à monsieur de Heddegney et que l’on en avoit encore donné trois davantage. [Ils ont alors…] interrogué ledit maire s’il avoit fait cela de son auctorité ou autrement74. »
34Les décisions de la commune reposent sur un consensus, puisque le maire ne répond pas de son propre chef :
« Sur ce ledit maire a demandé conseil ; disant ledit maire, apres son conseil ehu qu’il fit sergeanter la plus saine partie de la commune pour a la requeste dudit sieur de Heddgney et que pour un certain respect ladite commune luy ait accordé trois pieces de boys davantage. »
35La solidarité s’affirme dans la mesure où la plus saine partie de Moyemont s’engage aux côtés de son maire. Il est autorisé par son conseil à préciser que :
« […] lesquelles trois pieces lesdits maire et doyen dudit lieu, avec d’autres habitants dudit Moyemont, luy furent designer lesdites pieces de boys75 ».
36Le plaid banal parvient à désorganiser le groupe en distinguant quelques-uns de ses membres, bien que les habitants s’efforcent d’opposer des décisions collégiales76. Les représentants de la communauté sont rapidement amenés à collaborer, craignant l’effet de publication et l’importance accordée aux notions d’irréprochabilité et d’honneur. Par ailleurs, l’obligation faite au maire « d’assurer les dépenses et charges de son office » est déstabilisante car elle provoque la crainte de perdre les moyens d’existence. Par conséquent, comme le contremand, l’institution du plaid banal favorise l’individu et non un groupe.
Les effets de la régulation sociale à Moyemont
37L’analyse de l’évolution des groupes sociaux de Moyemont est centrée sur l’information ouverte à la suite du tumulte de 1583. Le chapitre a exigé la présence de tous puisque deux personnes, qui n’habitent plus Moyemont, sont également ajournées77. La liste des 22 familles peut donc être considérée comme fiable. Un examen des patronymes restreint encore leur nombre et souligne l’importance des liens de parentèle78. Ensuite chacune des familles a été suivie sur deux siècles, à partir de la composition des mairies successives et des sources disponibles. Le tableau ci-dessous récapitule, à partir de la fin du xve siècle, les antécédents des familles.
38Pourvoir les offices locaux revient à élire les titulaires d’une cour rurale, chargée d’appliquer une justice, mal ressentie car venue d’ailleurs. Cependant si les alternances dans la composition des mairies permettent d’éviter la pérennisation d’un pouvoir local, elles servent aussi certains clans familiaux comme les familles Vincent ou Howat. Par ailleurs, le plaid banal provoque de nouvelles dissensions ou en révèle d’anciennes. Autour du maire et de son échevin ou « lieutenant de maire » – le doyen est plutôt chargé de l’application des sentences – semblent se cristalliser les oppositions au pouvoir seigneurial. Les propos lancés par Nicolas Howat, lors du tumulte de 1583, prouvent que la communauté se partage entre partisans du maire en place et adversaires, composées des familles qui s’opposent au chapitre79. À partir de cette date, le maire représente plus un pouvoir qu’une communauté et sa famille devient rapidement la cible de ses adversaires. On en veut pour preuve l’assassinat, par un « jeune fils » de Moyemont, de Gaspard Howat habitant Badménil, en 1594. Le beau-père du meurtrier est Didier Thiery80.
39Même s’il est mal ressenti, le plaid n’est pas remis en question car il est bien intégré dans la vie communautaire. Par les possibilités qu’il offre, il sert l’ascension sociale de certaines familles de laboureurs. En 1499, par exemple, Jean Colin requiert l’assistance du procureur général du duché de Lorraine pour poursuivre le maire Poirel devant la justice capitulaire au motif suivant :
« Ledit maire Poirel avoit dit et publié en plusieurs lieux que Brabain tenoit la femme dudit Jean Colin ; laquelle chose reddondoit au grant deshonneur et diffame dudit Jehan Colin et de sadite femme81. »
40La famille Poirel ne fournira plus de notable à la communauté bien qu’elle reste dominante. Elle se marginalise au début du xvie siècle. En contrepartie, plus aucun membre de la famille Colin ne sera choisi par les représentants du chapitre, alors que Mengeon Colin figure sur la liste de la commune au plaid de 1560. De même la famille Thiery, alliée aux Colin par mariage, fait partie des exclus. Le chapitre craint un groupe dont le rang social et l’importance économique sont prouvés par ses possibilités de rechercher des appuis auprès du pouvoir nancéien. Le chapitre choisit par contre de favoriser Nicolas Vincent qui est pourtant sous le coup d’une plainte déposée par Jean Colin82.
41Le choix final des officiers locaux, réservé au chapitre, est sans doute une contrainte importante pour la communauté. Elle est cependant tempérée par le fait que les représentants du pouvoir seigneurial n’effectuent pas de choix en dehors de la liste proposée par les habitants ni ne changent les fonctions qui leur sont soumises en regard des noms. Cette condition laisse à la communauté ses propres possibilités d’exclusion. Le vol est un motif comme le montrent les déboires de la famille Lhuillier. Durant 14 ans aucun de ses membres n’a été inscrit sur les listes du plaid, depuis que Didier Lhuillier a été surpris en train de voler des poires en 1559. Son fils Dieudonné finit pourtant par se retrouver échevin en 1573. La participation de ce dernier à la révolte de 1583, aux côtés de son frère, confirme sa réinsertion sociale. Il est vrai que ce Dieudonné est le filleul de Nicolas Vincent dont le clan a toujours les faveurs du chapitre.
42La date de 1583 marque, pour une autre raison, une rupture importante dans les relations de la communauté et de l’ancien pouvoir seigneurial : les habitants s’opposent au chapitre en utilisant les ressources du tribunal ducal83. Pourtant les échevins nancéiens, qui constituaient l’ultime recours pour les habitants, ont prononcé une peine sévère contre eux84. À cette date le pouvoir central ne peut pas désavouer complètement le chapitre sans remettre en question les structures de la société féodale.
43La révolte de Moyemont correspond au moment où les procès de sorcellerie commencent à envahir les archives judiciaires85. À partir 1613, la communauté voit se développer un ensemble d’informations aux rebondissements multiples. Barbe, la femme de Jean Remy Colin est inquiétée. On l’accuse d’avoir fait mourir une vache appartenant au maire Jean Vincent mais surtout d’avoir empoisonné Nicole, la femme de Thomas Vincent. À cette date, la famille Colin est complètement marginalisée par les autres clans, particulièrement celui qui s’est constitué autour de la famille Vincent. Barbe Colin finit par avouer tout ce que veut la justice criminelle de la mairie, où elle a retrouvé le maire, son échevin et le doyen :
« A confessé que pour aller à la place qu’elle occupoit à l’eglise de la paroisse dudict Moyemont, elle debvoit passer au devant d’une nommée Nicolle femme à Thomas Vincent, laquelle pour sçavoir lire, portoit des heures ; sy qu’estante accupée à y regarder, l’empeschoit le plus souvent de passer librement ou failloit attendre qu’elle fut levée pour ce faire86. »
44À la rivalité économique, qui a débuté vers la fin du xve siècle, s’est ajouté un décalage culturel à l’origine d’une haine tenace. Pour preuve, tous les gens que Barbe Colin accuse d’aller au sabbat en sa compagnie sont des membres du clan qui s’oppose aux Vincent. Dans l’information, le Diable porte même le nom du maire en place. Par effet de concaténation, un arrêt de bannissement sera rendu contre Claudette Poirel, inculpée pour des motifs identiques87. La famille Poirel est toujours aisée puisque l’énoncé de la sentence mentionne que l’accusée demeurera libre de disposer des moyens qu’elle peut avoir à Moyemont. L’acharnement de ses adversaires a été aussi important que sa résistance physique, comme le montrent les trois informations pour sorcellerie qu’elle subit en 1613, 1618 et 1619. Ces affaires en disent long sur les déchirements de la communauté de Moyemont !
45Par ses jugements, le buffet du chapitre ne fait qu’entériner une situation de violence qu’il a provoquée en opposant les clans respectifs. Pour maintenir ses droits, au moment où ceux-ci sont menacés par l’emprise grandissante de l’État ducal, il divise les communautés et dresse les groupes les uns contre les autres. À partir de 1620, la hiérarchie de la communauté de Moyemont semble fixée autour de la famille Lhuillier. Au plaid de 1634, Gérard Lhuillier est maire88. Par contre lors du plaid de 1669, Claudon Colin est le seul à ne pas savoir signer, ce qui peut laisser croire à une régression sociale de la famille. En 1672, Goery Lhuillier prend à ferme les dîmes de la mairie. En 1790, les propriétés de deux émigrés de Moyemont sont confisquées en tant que biens nationaux. L’une d’elles appartient à un certain Jean-Dominique Lhuillier.
Conclusion
46De 1583 à 1787, tous les plaids banaux de Moyemont ont été sources de conflit entre la communauté et le pouvoir seigneurial. Les rapports des habitants de Moyemont entre eux sont aussi complexes et généralement aussi conflictuels que ceux qu’ils entretiennent avec le chapitre. On peut se demander si cette complexité constitue une particularité qui limiterait alors la portée de cette réflexion. En réalité elle paraît plutôt due à la richesse des archives de Moyemont. Dans d’autres mairies du Chaumontois, des sources lacunaires esquissent des situations semblables sans pouvoir les approfondir. En outre, la situation de Moyemont, mairie très excentrée par rapport au siège du pouvoir capitulaire, a certainement conduit les chanoines à maintenir une pression particulière sur des sujets non mainmortables.
47Les habitants du Chaumontois, géographiquement trop proches du pouvoir central ou trop liés à lui par des intérêts économiques, ont exploité les ressources du contremand et du plaid à leur profit pour se rapprocher du pouvoir ducal. Les ressources en bois des forêts du finage de Moyemont étaient indispensables aux maîtres des salines ou des verreries bénéficiant de la protection ducale. Pourtant, le contremand et le plaid annuel sont bien, à l’origine, des instruments au service de la régulation sociale car ils offrent un espace de liberté aux sujets tout en favorisant le contrôle seigneurial. Ils ont aussi permis la fixation des populations sur des finages quelquefois peu propices à l’homme. Plus qu’ailleurs peut-être, le pouvoir seigneurial est responsable de l’occupation humaine des espaces montagneux. À Moyemont, il est cependant difficile d’associer l’idée de régulation sociale à l’action du pouvoir seigneurial. Il faudra attendre le début du xviiie siècle et l’instauration définitive de l’État de justice et de finances pour pouvoir envisager une société rurale mieux policée.
Notes de bas de page
1 Pour le chapitre de Saint-Dié : Arch. dép. Vosges, G464 à 802, auxquelles il faut ajouter les liasses G2716 à 2719 qui concernent des pièces de procédure, récemment classées, et couvrant la période 1571-1662 ; Inventaire sommaire des Archives départementales des Vosges, série G, par Francis de Chanteau, Gustave Guilmoto, et Paul Chevreux, Épinal, 1868-1896 (11 tomes). Le tome I concerne le chapitre de Saint-Dié.
2 Pour les comptes des receveurs ducaux de Saint-Dié : Arch. dép. Meurthe-et-Moselle, B8612 à 8764, 1494-1663. Manquent les seules années 1520, 1543, 1544, 1545 et 1551 ; Inventaire sommaire des Archives départementales antérieures à 1790, par Henri Lepage, Arch. dép. Meurthe-et-Moselle, Nancy, 1884-1891.
3 Pour la transcription, cf. Giraud Yves, « Protocole pour l’édition de textes imprimés en moyen français (1480-1620) », Bulletin de la Société française des études seiziémistes, n° 42, 1997, p. 37-40.
4 Bonvalot, Histoire du droit et des institutions de Lorraine et des Trois Évêchés…, 1889 ; Dumont, Justice criminelle des duchés de Lorraine, de Bar, du Bassigny et des Trois Évêchés…, Nancy, 1848 ; Cabourdin, Terre et hommes en Lorraine (1550-1635)…, 1977 ; et la contribution de Jean Gallet qui approfondit la question. Sur les difficultés liées à la compréhension du langage des xvie-xviie siècles : Matoré Georges, Le Vocabulaire et la société du xvie siècle, Paris, Puf, 1988, 379 p. (p. 13) ; Ronzeaud Pierre, Peuple et représentations sous le règne de Louis XIV. Les représentations du peuple dans la littérature politique en France sous le règne de Louis XIV, Aix-en-Provence, Publications de l’université de Provence, 1988, 420 p. (p. 40) ; Diedler, Violence et Société. La haute vallée de la Meurthe…, 1993, p. 204-224 et Démons et Sorcières en Lorraine…, 1996, « Le poids des mots » p. 70-81.
5 Vosges, ar. Épinal, c. Rambervillers. Moyemont est situé à 22 km au nord d’Épinal et à 8 km à l’ouest de Rambervillers.
6 Boudet Paul, « Le chapitre de Saint-Dié des origines au seizième siècle », Bulletin de la Société philomatique vosgienne, t. 40 et 41, 1924 et 1925, p. 25-109 et p. 62-274 (p. 263) ; Perrin Charles-Edmond, « Catalogue des chartes de franchise de la Lorraine antérieures à 1350 », Annales de la Société d’histoire et d’archéologie lorraine, n° 33, 1924, p. 269-413 (p. 322) ; Parmentier Damien, Église et Société en Lorraine médiévale, Paris, Messene, 1997, 238 p. (p. 92-101) : au xve siècle la mairie de Moyemont perçoit les revenus des finages de Frizon, Rehaincourt, Tontigny (Moriville), Rozelieures, Clézentaine, Ortoncourt, Dossoncourt, à Borville et Haillainville, à Verdenal, à Coincourt et Moyenvic (voir carte).
7 La communauté dans les mentalités : Chaunu Pierre, La Mémoire et le sacré, Paris, Calmann-Lévy, 1978, 288 p. (p. 211) ; Muchembled, Culture populaire et culture des élites dans la France moderne (xve-xviiie siècle)…, 1978, p. 54. Sur les hésitations de la terminologie désignant les communautés d’habitants : Jacquart, « Réflexions sur la communauté d’habitants », 1976, p. 157-182 ; Gutton, La Sociabilité villageoise…, 1978 ; Follain, « Les communautés rurales en France. Définitions et problèmes », 1999b, p. 14-15. Sur les nouveaux villages en Lorraine à partir de la seconde moitié du xvie siècle : Peltre Jean, « Du xvie au xviiie siècle : une génération de nouveaux villages en Lorraine », Revue géographique de l’Est, 1-2, 1966, p. 3-27. À noter que le mot commune est utilisé à Moyemont, dès le xvie siècle.
8 Saint-Genest : Vosges, ar. Épinal, c. Rambervillers. Badménil : ar. Épinal, c. Châtel-sur-Moselle. Ortoncourt : ar. Épinal, c. Rambervillers.
9 Les habitants des autres communautés de la paroisse sont souvent cités comme témoins mais ils sont rarement partie prenante.
10 Lorcin, Les Campagnes de la région lyonnaise aux xive et xve siècles…, 1974, p. 39.
11 Chevreux Paul, L’Histoire communale : Moyemont, Épinal, V. Collot, 1883, 28 p. (p. 25) ; Chevreux Paul et Louis Léon, Dictionnaire historique et statistique des communes, hameaux, écarts, fermes, du département des Vosges, Épinal, impr. de E. Busy, 1887-1889, 2 tomes, 384-420 p ; Cabourdin, Terre et hommes…, op. cit., p. 202 : la population peut être comprise entre 85 et 125 habitants.
12 Arch. dép. Vosges, G617, pc. 16, 1557, lettre du bailli ducal à Nancy : « Les habitans de Moyemont m’ont faict supplier qu’en consideration de ces dangers de guerre, je leur vueille permettre de faire planter en leur villaige les panonceaulx aux armes de monseigneur et pour ce que ledit villaige est situé en mon bailliage leurs ay accordé. »
13 Fossier, La Terre et les hommes en Picardie…, 1968, t. I, p. 510.
14 Parmentier, Église et Société…, op. cit., p. 93.
15 Le chapitre de Saint-Dié confie la gestion de son temporel à des chanoines portant ce titre.
16 Arch. dép. Vosges, G616, pc. 1 (copie du xviiie siècle) ; Perrin, « Catalogue des chartes de franchise… », op. cit., p. 298. Sur le temporel déodatien, la « ménantie » est une tenure paysanne au statut particulier car transmissible sous certaines conditions. Pour simplifier nous l’assimilerons au manse servile.
17 Chevreux, L’Histoire communale…, op. cit., p. 3 : la première cession de droits seigneuriaux à Moyemont est le fait de Thierry Roille Malle, chevalier de Romont, en 1228.
18 L’héritier est tenu de payer 2 quartes de vin dans les 40 jours qui suivent le décès. À défaut de paiement la succession est acquise au chapitre.
19 Il est exigé annuellement de chaque habitant qui doit 7 journées de travail sur les terres du chapitre. Voir aussi Arch. dép. Vosges, G615, pc. 1, 1399 : les dîmes portent le nom de « crowées ».
20 Parmentier, Église et Société…, op. cit., p. 108. La condition de serf est évoquée, en ces termes, par les juristes du chapitre et ceci jusqu’en août 1711, date de l’édit du duc Léopold portant suppression du droit de main morte. Ce n’est pas une particularité lorraine, cf. Bressan, « La mainmorte dans la France du xviiie siècle… », 1996, p. 58-59.
21 Arch. dép. Vosges, G623, pc. 4, copie du xviiie siècle : en 1366, le chapitre amodie la maison franche. Il laisse au preneur la moitié des menues dîmes de Moyemont, Saint-Genest, Ortoncourt et Badménil, avec un sixième des menues dîmes de Saint-Maurice. S’y ajoutent 5 réseaux d’avoine et les corvées trois fois dans l’année. Le chapitre reçoit 40 réseaux de froment et le droit d’hébergement des chanoines venant à Moyemont. L’hôpital de Saint-Dié perçoit 14 réseaux de blé.
22 Arch. dép. Vosges, G613, pc. 1, 1310.
23 Arch. dép. Vosges, G616, pc. 3.
24 Arch. dép. Vosges, G623, pc. 9, 1703, f° 2 : Henri, sire de Joinville et sénéchal de Champagne engage au chapitre pour 300 florins d’or ses revenus à Moyemont en se réservant le droit de rachat (Ces actes seront soigneusement recopiés jusqu’au xviiie siècle).
25 Guyot Charles, Histoire d’un domaine rural en Lorraine, Nancy, Berger-Levrault, 1887, 126 p. (p. 42).
26 Il est possible de se faire une idée plus précise en comparant avec le domaine de Grimauvillers, appartenant au couvent de Muraut (Damvillers : Meuse, ar. Verdun, ch.-l. c.). Une charte de 1217 le transforme en terre franche, en considération d’une chapelle élevée en l’honneur de Saint-Pancrace ; voir Guyot, ibid., p. 7.
27 Le domaine de Moyemont reproduit la configuration retenue pour la cense de Saint-Pancrace : maison franche, terres non morcelées, plaine de Lorraine (Guyot, ibid., p. 4).
28 L’incertitude des pouvoirs explique que les habitants de Moyemont fassent systématiquement appel à la justice ducale de leur propre chef au moins jusqu’en 1557, date où la communauté est rattachée au bailliage de Nancy ; voir aussi une liasse de documents non datés qui servent trop les intérêts du chapitre pour correspondre à une réalité : « L’an 1323, Henry comte de Vaudémont reconnoit qu’il n’a aucun droit d’empescher que le chapitre regle la taille de Moyemont à leur volonté et qu’il n’y peut rien demander ; que si quelque habitant dudit lieu quittoit le village pour aller demeurer ailleurs, le chapitre pourroit se saisir de ses meubles et heritages sans que ledit Henry ny ses heritiers le puissent empescher » (Arch. dép. Vosges, G616, pc. 1, s. d. [xviiie ?], f° 1).
29 Au plaid de 1672, par exemple, les 22 chefs de conduit de Moyemont déclarent posséder 109 bovins et avoir engraissé 4 porcs chacun dans l’année. Arch. dép. Vosges, G622, pc. 46, 1672, f° 2 et 3.
30 Actuellement forêt domaniale de Rambervillers.
31 Arch. dép. Vosges, G623, pc. 9, 1703, f° 2. Le chapitre est parfois même obligé de s’appuyer sur la toponymie pour justifier ses droits : « Les Grands Bois de Moyemont sont qualifiez par nos anciens tiltres de Bois St Diey. En 1315, le chapitre fit l’acquest du bois de Fay, lequel bois mouvoit deja du fief appartenant à nostre chapitre. » De telles affaires paraissent fréquentes : Follain, « Une comptabilité villageoise normande du xvie siècle », 1996, p. 128-129.
32 Les chanoines conservent 1 275 arpents de bois.
33 Zemon-Davis, Les Cultures du Peuple. Rituels, savoirs et résistances au xvie siècle…, 1979, p. 253-254.
34 Mandrou, Introduction à la France moderne. Essai de psychologie collective…, 1961, p. 111 ; Stauffenegger Roger, Église et Société. Genève au xviie siècle, Paris-Genève, Droz, 1983-1984, 2 tomes, 1077 p. (p. 96) : « L’irrépressible solidarité, le genre obligé, la note quasi tautologique de toute vie sociale » ; Durand, Les Solidarités dans les sociétés humaines…, 1987, p. 269 ; Follain, Les Solidarités rurales…, 1993 ; Diedler, Démons et Sorcières en Lorraine…, op. cit., p. 132-133.
35 « Violence » et « société » sont deux termes qui paraissent s’opposer. « Société » vient de socius, « celui qui fait cause commune », c’est-à-dire « celui qui a suivi de lui-même » pour se fondre en une societas, véritable communauté d’intérêts. Au contraire, le sémantème de violentia est vis désignant la force, la puissance aux influences individualisantes ; Mesnard, « Introduction » au colloque La Tolérance…, 1986, p. 5 : « La tolérance desserre le lien qui unit l’individu au groupe » ; Diedler, Violence et Société…, op. cit., p. 100.
36 Poitrineau, « Le paysan et l’adversité. Des calamités, des mentalités, des comportements », 1989, p. 115-116 : « Avec tous les gens qui se situent dans son cercle d’interconnaissance, chaque paysan sait à quoi s’en tenir et, en conséquence, comment se comporter. »
37 Arch. dép. Vosges, G618, pc. 12, février 1584 ; Dumont, Justice criminelle des duchés Lorraine…, 1848, t. II, p. 15.
38 Diedler, « Un procès de sorcellerie… », op. cit., p. 134.
39 Diedler, Démons et Sorcières…, op. cit., p. 108-115.
40 Diedler, Violence et Société…, op. cit., p. 176.
41 Arch. dép. Vosges, G707, pc. 1, 1585.
42 Arch. dép. Vosges, pc. 12, 1608, f° 4 v°.
43 Arch. dép. Vosges, G709, pc. 1, 1610, f° 10.
44 Lepage Henri et Charton Charles, Le Département des Vosges, statistique historique et administrative, Nancy, Peiffer, 1845, 2 tomes, 1056 p. et 560 p. (t. II, p. 519) ; Bonvalot, Histoire du droit et des institutions…, op. cit., p. 12.
45 Voir en section « Pièces justificatives ».
46 Arch. dép. Vosges, G761, justice de Sainte-Marguerite, pc. 6, 1523 : supplique de Dyon Raguey au chapitre « de ma donner grace de servitude et me vendre mes biens, affin que je vous puisse bonnement servir ma femme, mes enffans et vivre paisiblement soub vous, comme un bon subject, manans et residans ».
47 Arch. dép. Vosges, G617, pc. 9, 1549 : « Tort avoir esté faict à son mary par ceux de la justice [du chapitre] par ce que la coustume du lieu n’auroit esté observée comme du passé. »
48 Voir en section « Pièces justificatives ».
49 Mairie de Moriviller, ar. Lunéville, c. de Gerbéviller ; mairie de Sainte-Marguerite, ar. de Saint-Dié, c. Est ; mairie de Meurthe, ar. de Saint-Dié, c. de Fraize (actuellement Ban-sur-Meurthe-Clefcy).
50 Arch. dép. Vosges, G232, 1550, f° 172 et 173 et G233, f° 284.
51 Arch. dép. Vosges, G233, 1553, f° 282.
52 « Si tant estoit qu’il voulut garder son contremand il faudroit qu’il aille à l’officier de là où il veult venir et luy donner le droit accoustumé. »
53 Arch. dép. Vosges, G761, pc. 2 du 15 avril 1499.
54 Ibid., pc. 1 du 2 août 1499. Le détenu et sa femme finiront par être libérés, un de leurs alliés ayant payé une importante caution.
55 Boudet, « Le Chapitre de Saint-Dié… », op. cit., p. 188.
56 Arch. dép. Vosges, G761, pc. 6, juin 1523 ; Diedler, Violence et Société…, op. cit. : le coût journalier moyen de la vie est d’un demi-franc en 1558.
57 Ibid. pc. 3, septembre 1514.
58 Arch. dép. Vosges, G761, pc. 4, avril 1515.
59 Le « gaif » ou « guef » est un mot d’origine germanique qui désigne une chose perdue que personne ne réclame. Au xive siècle, « gaiver » signifie « céder au seigneur la jouissance d’une maison mouvante de la censive pour une année ». Cette cession a lieu durant le plaid qui correspond au moment où les « gais ont changé ». C’est le renouvellement des droits qui fixe le terme du contremand.
60 Voir en section « Pièces justificatives ».
61 Lorcin, Les Campagnes de la région lyonnaise…, op. cit., p. 144.
62 Arch. dép, Vosges, G233, f° 459.
63 Arch. dép. Vosges, G363, pc. 2, xviiie siècle, f° 3.
64 Fossier, La Terre et les hommes en Picardie…, op. cit., t. I, p. 207 ; Lorcin, Les Campagnes de la région lyonnaise…, op. cit., p. 146 ; Laperche-Fournel Marie-José, La Population du duché de Lorraine de 1580 à 1720, Nancy, Presses universitaires de Nancy, 1982, 236 p. (p. 16 et p. 74).
65 Arch. dép. Vosges, G323, milieu du xviie siècle, f° 55 ; Dumont, Justice criminelle…, op. cit., t. I, p. 55 : la question semble réglée par l’ordonnance ducale du 1er juin 1595 sur l’homologation des coutumes générale, qui abroge toutes les coutumes particulières et locales. On constate cependant qu’après chaque période de conflit, le chapitre est obligé de réaffirmer cette abrogation. C’est le cas, par exemple, en 1662.
66 Arch. dép. Vosges, G233, 1660, f° 472 : « Le lieu fortuit ou momentané de la naissance ne change pas la condition du fruit qui la prend du ventre car l’état de liberté ou de servitude vient de la mère et la dignité ou noblesse du père » ; Gallet, Le Bon plaisir du baron de Fenestrange…, 1990, p. 177 et 190.
67 Durand, Les Solidarités…, op. cit., p. 69.
68 Poitrineau, « Le paysan et l’adversité… », op. cit., p. 110-111.
69 Bercé, Fête et révolte. Des mentalités populaires…, 1976, p. 13.
70 Cette présentation s’appuie sur le plaid de 1560 (Arch. dép. Vosges, G617, pc. 20). Le document très complet semble être passé inaperçu car il est archivé sous la rubrique « rapport de police ».
71 Certains prévôts n’ont pas hésité à prendre le parti des habitants contre le chapitre. Voir Arch. dép. Vosges, G623, pc. 9, 1703, f° 2 : « Vous pouvez juger sy le chapitre peut souffrir de la complaisance de quelques prevots du Chaumontois quy ont laissez prendre quelque portion des ventes des bois faittes à Moyemont quand elles ont esté considerables. »
72 Arch. dép. Meurthe-et-Moselle, G339, prévôté du Chaumontois, coutume de Moyemont. Voir aussi Arch. dép. Vosges, G233, 1662, f° 465 : « Ce seroit rendre les habitans de chaque village souverains s’ils pouvoient faire des coutumes qui sont des loix contraires aux generales. »
73 Arch. dép. Vosges, 1583, pc. 1, f° 1.
74 Arch. dép. Vosges, G617, 1560, f° 1.
75 L’amende devient de droit. Elle doit être payée par le maire « dedans le lendemain de l’encheutte des dismes que se fera le diemanche apres la Sainct Piere et Sainct Paul ». Le prévôt précise « que quiconque sera maire soustiendra la despense des charges de son office ». La collectivité doit aussi acquitter une amende.
76 Lorcin, Les Campagnes de la région lyonnaise…, op. cit., p. 161 : « Les seigneurs s’efforcent de maintenir en face d’eux des individus et ils évitent tout ce qui pourrait cimenter les communautés de paysans, causa monopoli vitandi. »
77 Arch. dép. Vosges, G618, pc. 12, 1584, f° 1.
78 Ainsi sur le rôle de 1583 comportant 18 noms, 10 familles seulement ne semblent pas apparentées, ce qui ne permet pas non plus d’exclure des liens plus éloignés voire des relations de clientélisme. Voir aussi Gallet, Le Bon plaisir…, op. cit., p. 102.
Antécédents des familles qui ont participé au tumulte de 1583.
79 Arch. dép. Vosges, G618, pc. 12, 1584, f° 18. Howat répond à un membre de la famille Vincent qui essaie de défendre son frère, le maire en place « qu’il eust à se taire, qu’il empireroit plustot sa besogne que de l’amender ; car du temps que mon frere a esté maire je ne me suis guiere advancé pour le deffendre ».
80 Arch. dép. Vosges, G618, pc. 18, 1594.
81 Arch. dép. Vosges, G617, mai 1499 ; Dumont, Justice criminelle…, op. cit., t. I, p. 198.
82 Arch. dép. Vosges, G617, pc. 20, f° 1. En octobre 1560, lors du siège de justice tenu sur l’affaire des bois, c’est Jean Colin qui s’oppose au prévôt.
83 Depuis l’arrêt de 1557, Moyemont fait partie du bailliage de Nancy.
84 Une amende de 50 francs pour chacun des trois principaux responsables, plus s’ils ont la faculté de payer et les dépens pour un tiers chacun. La communauté est condamnée solidairement à une amende de 100 francs.
85 Diedler, Violence et Société…, op. cit., p. 399, et Démons et Sorcières…, op. cit., p. 134.
86 Arch. dép. Meurthe-et-Moselle, B4077, procès de Barbe Colin, 1613 ; Duhamel Louis, Documents rares ou inédits de l’histoire des Vosges, rassemblés et publiés au nom du Comité d’histoire vosgienne, Épinal, Vve Gley, 1868, t. I, XX-388 p. (p. 146) 1er volume, consulté parmi les 11 tomes en 4 volumes de l’édition reliée de la Bibliothèque municipale d’Épinal, 1868-1896.
87 Arch. dép. Vosges, G2719, pc. 1, 1619.
88 Arch. dép. Vosges, G622, pc. 1, 1634.
Auteur
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Un constructeur de la France du xxe siècle
La Société Auxiliaire d'Entreprises (SAE) et la naissance de la grande entreprise française de bâtiment (1924-1974)
Pierre Jambard
2008
Ouvriers bretons
Conflits d'usines, conflits identitaires en Bretagne dans les années 1968
Vincent Porhel
2008
L'intrusion balnéaire
Les populations littorales bretonnes et vendéennes face au tourisme (1800-1945)
Johan Vincent
2008
L'individu dans la famille à Rome au ive siècle
D'après l'œuvre d'Ambroise de Milan
Dominique Lhuillier-Martinetti
2008
L'éveil politique de la Savoie
Conflits ordinaires et rivalités nouvelles (1848-1853)
Sylvain Milbach
2008
L'évangélisation des Indiens du Mexique
Impact et réalité de la conquête spirituelle (xvie siècle)
Éric Roulet
2008
Les miroirs du silence
L'éducation des jeunes sourds dans l'Ouest, 1800-1934
Patrick Bourgalais
2008