L’Orchestre des émotions
p. 247-260
Texte intégral
« Nous avons observé déjà dans le premier volume de cet ouvrage que les symphonies étaient susceptibles, ainsi que le sont les chants musicaux composés sur des paroles, d’un caractère particulier qui rendent ces symphonies capables de nous affecter diversement, en nous inspirant tantôt de la gaieté, tantôt de la tristesse, tantôt une ardeur martiale, et tantôt des sentiments de dévotion : “Le son des instruments, écrit Quintilien, l’Auteur le plus capable de rendre compte du goût de l’Antiquité, nous affecte, et bien qu’il ne nous fasse pas entendre aucun mot, il ne laisse point de nous inspirer divers sentiments.” Cum organis, quibus sermo exprimi non potest, affici animos in diversum habitum sentiamus. »
Abbé Du Bos1.
1Ce texte de l’abbé Du Bos nous propose un double passage : de la musique vocale à la « symphonie » instrumentale, et de cette dernière aux sons même des instruments. Par « symphonie » il faut entendre toute sorte de musique instrumentale. Du Bos part d’un double constat, d’une double observation : la musique instrumentale, la « symphonie », peut nous affecter, et nous affecter diversement. La citation de Quintilien déplace en amont le point de réflexion : de la « symphonie » on passe aux « instruments » (organa). Faut-il entendre ce pluriel comme collectif (les instruments jouant ensemble) ou distributif (chaque instrument pris individuellement) ? Il est peut-être vain de poser à Quintilien une question aussi précise. Plus important est de souligner le point où le théoricien romain s’étonne : les instruments peuvent émouvoir les âmes de diverses façons, « bien qu’ils ne nous fassent pas entendre aucun mot », comme Du Bos traduit « quibus sermo exprimi non potest ». Dans l’instrument, l’émotion est séparée de ce qui, en principe, la porte, à savoir le langage (auquel est consacrée l’Institution oratoire). Dans un autre passage, Quintilien reprendra la même idée en termes à peine différents : « Neque enim aliter eveniret ut illi quoque organorum soni, quamquam verba non exprimunt, in alios tamen atque alios motus ducerent auditorem2. » Dans le contexte de ce chapitre iv du livre X, consacré à la composition rhétorique, il s’agit pour Quintilien de démontrer que le sentiment de l’harmonie est naturel à l’homme. L’argument organologique ici avancé peut donc être ainsi compris : même les instruments, « quamquam verba non exprimunt », bien qu’ils n’expriment aucun mot, peuvent émouvoir l’auditeur de diverses façons. Le son des instruments n’est ni sermo ni verbum ; mais, quoique dépourvu de sens, il est par lui-même capable de susciter diverses émotions. Bien avant les théoriciens de la musique absolue, Quintilien situe exactement l’énigme : un son dépourvu de sens peut émouvoir. Mais il faut tout de suite ajouter que ce n’est pas, pour Quintilien, une énigme ; c’est un fait ininterrogé, mais massif et irrécusable, qu’il convoque à l’appui de sa réflexion rhétorique sans l’examiner pour lui-même. C’est ce fait que je souhaite ici interroger.
2Les problématiques philosophiques de l’émotion musicale sont très rarement rapportées aux instruments en tant que tels. C’est la conséquence du faible intérêt que les philosophes, à de rares exceptions près, portent aux instruments. Je souhaite contribuer à réduire cette lacune, en proposant une approche organologique de l’émotion musicale.
L’instrument de musique, vecteur d’émotions disponibles
3J’appelle « émotions disponibles » les émotions existant hors de la musique, et que la musique peut éveiller en leur donnant sa coloration propre. Ce sont des émotions de la vie, qui existent sans la musique, et auxquelles la musique peut éventuellement apporter son concours. Les émotions martiales ou dévotes évoquées par l’abbé Du Bos relèvent de cette catégorie. La musique ne crée pas l’ardeur au combat ou les sentiments de piété, la gaieté ou la tristesse, mais elle peut les réveiller voire les renforcer. La musique est une puissance dont les ressorts sont assez mystérieux ; mais il n’est pas nécessaire de comprendre ces ressorts pour les utiliser, pas plus qu’on n’a besoin de connaître le pourquoi et le comment de l’eau et du vent pour construire des moulins ou des éoliennes3. C’est empiriquement que l’humanité a découvert le pouvoir martial des cuivres jouant des marches militaires ou des sonneries au rythme carré construites sur l’accord parfait ; c’est empiriquement qu’elle a découvert le pouvoir dévotionnel des musiques d’église, et notamment de la musique d’orgue. Certains instruments sonnent en eux-mêmes « religieux » en Europe, et notamment l’harmonium.
4Les arts utilisent souvent les instruments de musique comme vecteurs d’émotions disponibles, émotions mises en scène ou suscitées par l’œuvre concernée. Je parle bien des usages spécifiques d’instruments, ce qui est un autre niveau d’analyse que l’utilisation de la musique en général. Une chose est d’analyser le pouvoir émotionnel de telle musique, une autre d’examiner comment ce pouvoir se détermine finement dans les choix organologiques du compositeur.
5Le cinéma offre de nombreux exemples d’instruments utilisés dans ce rôle de vecteurs d’émotions disponibles, sous forme diégétique ou non. Comme exemples d’instrument diégétique4, on peut proposer la trompette dans La strada de Fellini (1954, musique de Nino Rota) ou l’harmonica dans Le bon, la brute et le truand de Sergio Leone (1966, musique d’Ennio Morricone). Le cas de la viole de gambe dans Tous les matins du monde d’Alain Corneau (1991) est différent, puisqu’il s’agit d’un film musical dont la viole de gambe est au fond le personnage central. Comme exemple d’instrument non diégétique, on pensera à la trompette de Miles Davis dans Ascenseur pour l’échafaud de Louis Malle (1957). Ces différents instruments portent, expriment et font vivre des émotions disponibles, que l’on pourrait à chaque fois décrire précisément.
6L’opéra offre également de beaux exemples. Dans la « Pantomime » de l’acte I, scène VI (« Andromaque et son fils »), des Troyens, Berlioz fait de la clarinette le porteur d’une émotion subtilement mêlée de mélancolie, de douceur, de tendresse, de trompeuse quiétude. On pensera aussi au cor anglais utilisé par Wagner dans le Prélude de l’acte III de Tristan. Il s’agit dans ces deux cas d’instruments et de musiques non diégétiques. Mais on trouve aussi des exemples d’instrument diégétique, par exemple la harpe dans Tannhäuser de Wagner. Ce cas est particulièrement remarquable, puisque la harpe est dans cet opéra un instrument émotionnellement ambigu, elle porte aussi bien les émotions sensuelles de Tannhäuser que les émotions religieuses de Wolfram5.
7Il y a cependant une différence entre le cinéma et l’opéra, différence capitale pour notre propos. Le personnage cinématographique est entièrement constitué en dehors de la musique, ce n’est pas le cas du personnage d’opéra dont la substance fictionnelle est en partie ou totalement musicale. Kierkegaard soutenait que le personnage de Don Juan, dans Don Giovanni de Mozart, est purement musical : « La musique est l’essence de Don Juan6. » La notion d’émotion disponible me paraît donc parfaitement correcte pour la musique diégétique utilisée au cinéma, même si bien sûr le film le plus réaliste fictionnalise et reconfigure les émotions qu’il fait jouer ; mais cette notion est moins pertinente pour la musique non diégétique de l’opéra. Je veux dire que l’instrument, pour la musique non diégétique à l’opéra, c’est-à-dire la musique opératique proprement dite, peut difficilement passer pour un simple vecteur d’émotions disponibles. L’émotion portée par l’instrument est construite dans l’opéra, même quand elle ressemble à s’y méprendre à une émotion disponible dans la vie : par exemple, chez Beethoven, la sonnerie de la trompette annonçant l’arrivée du ministre libérateur au second acte de Fidelio.
8En nous éloignant encore d’un cran du pôle constitué par l’instrument au cinéma, on pourrait penser à certaines formes de musique instrumentale. C’est ainsi que le Posthorn de la Troisième Symphonie de Mahler (3e mouvement) relève presque de la musique à programme, et peut être entendu comme porteur d’une émotion disponible. Cela tient à vrai dire beaucoup au fait qu’il s’agit d’un Posthorn, spécifié comme tel dans la partition, et qu’un instrument aussi typé porte en lui-même comme une dimension de narrativité intrinsèque, liée à certaines formes émotionnelles du préromantisme allemand.
9Il resterait à se demander pourquoi tel instrument est plus apte à exprimer et à susciter telle ou telle émotion, tel ou tel complexe d’émotions. Que la trompette soit guerrière, et non le clavecin, va de soi – mais le fait est plus facile à constater qu’à expliquer. Les données matérielles (puissance sonore, transportabilité, etc.) ne suffisent pas à rendre entièrement compte du phénomène. Peut-on parler d’une « vocation émotionnelle » de l’instrument, au sens où Focillon, et Gilson à sa suite, parlaient d’une vocation formelle des matériaux7 ? Berlioz s’est essayé à élaborer des caractérisations de ce type dans son grand Traité d’instrumentation et d’orchestration (1843). On pourrait, dans un esprit un peu différent, essayer de dégager des éléments constitutifs de l’émotion organologique, un peu, toutes proportions gardées, comme le fait Aristote au livre II du De Generatione lorsqu’il constitue les quatre éléments traditionnels de la physique grecque (terre, feu, air, eau) à partir d’une combinatoire des qualités élémentaires (sec, humide, chaud, froid)8. On pourrait distinguer des qualités élémentaires à la fois émotionnelles et organologiques, comme « le sec », ou « le riche », et dire par exemple que le triangle est sec et pauvre, quand le violoncelle est riche et « gras ». Je ne suis pas sûr qu’une telle démarche pourrait aller très loin sans arbitraire, mais il n’est peut-être pas inutile d’en garder l’idée dans sa conscience.
10Il est en revanche indubitable que la portée émotionnelle des instruments tient beaucoup à la pratique effective qu’on en a, à leur répertoire, aux associations d’idées suscitées par cette pratique et ce répertoire. Le hautbois n’est pas né pastoral, il l’est devenu. Cette portée émotionnelle est aussi liée aux représentations populaires, littéraires, religieuses et mythologiques des instruments. Lorsque Chateaubriand décrit les émotions suscitées par les cloches9, c’est pour en montrer les « relations secrètes » et les « sympathies morales » avec les cœurs chrétiens. Ces émotions couvrent une gamme assez étendue, Chateaubriand évoque l’enthousiasme, l’effroi, l’allégresse, la terreur, la pitié : « Tels sont à peu près les sentiments que faisaient naître les sonneries de nos temples ; sentiments d’autant plus beaux, qu’il s’y mêlait un souvenir du ciel. Si les cloches eussent été attachées à tout autre monument qu’à des églises, elles auraient perdu leur sympathie morale avec nos cœurs10. » Mais ces émotions campanaires sont aussi une invention poétique de Chateaubriand, qui leur prête quelque peu de son propre génie et de sa propre sensibilité.
L’instrument de musique, créateur d’émotions neuves
11Les cas que nous venons d’évoquer ne sont pas les plus fréquents. Dans la plupart de ses usages, l’instrument de musique crée un type d’émotion qui n’existe pas en dehors de la musique. Ces émotions pourront ressembler à des émotions disponibles, mais une ressemblance ne fait pas une identité. Ce serait une grave erreur que de méconnaître l’originalité émotionnelle des sons instrumentaux. Bergson a très bien senti cela, et donne la clé de la confusion commune entre émotion de la vie et émotion musicale lorsqu’il écrit :
« À chaque musique nouvelle adhèrent des sentiments nouveaux, créés par cette musique et dans cette musique, définis et délimités par le dessin même, unique en son genre, de la mélodie ou de la symphonie. Il n’ont donc pas été extraits de la vie par l’art ; c’est nous qui, pour les traduire en mots, sommes bien obligés de rapprocher le sentiment créé par l’artiste de ce qui y ressemble le plus dans la vie11. »
12Cette analyse, qui porte sur l’émotion musicale en général, peut être transférée à l’émotion spécifique ou singulière créée par un instrument. De l’émotion créée par l’instrument on pourrait également dire qu’elle n’a pas été extraite de la vie par l’art. À côté des émotions que l’art extrait de la vie, pour les travailler et les transfigurer, il y a les émotions que l’art ajoute à la vie. Inventer un nouvel instrument, ce n’est pas (ou pas seulement) inventer un nouveau moyen d’exprimer et de susciter les émotions de la vie, les « émotions disponibles », c’est inventer une nouvelle émotion qui jusqu’à présent n’existait pas.
13Cette distinction entre émotion extraite de la vie et émotion ajoutée à la vie est fondamentale dans son principe, elle n’est cependant pas d’une application très aisée dans l’analyse des configurations singulières. Car ces émotions que l’art ajoute à la vie s’amalgament avec la substance de la vie ; et, le temps passant, on finit par croire que l’art les a extraites de la vie à laquelle pourtant il les avait préalablement ajoutées. Cette croyance relève de la logique d’une illusion inévitable, dont Bergson établit la genèse.
14Deux exemples éclaireront cette idée d’une émotion qui n’est pas extraite de la vie. Soit le triangle, instrument émotionnellement assez ingrat – sec et pauvre. Peter Eötvös, dans Triangel (1993), réussit à créer une émotion spécifique et pour ainsi dire à donner une âme au triangle. Soient encore les métronomes utilisés par Ligeti dans son Poème Symphonique pour Cent métronomes (1962) ; ces objets ne sont pas émotionnellement ingrats, ils sont rigoureusement anti-émotionnels ; en les transformant en ready-made organologiques12, en les insérant dans une construction inventive et surprenante, Ligeti parvient à leur conférer une puissance émotionnelle très forte. Écouté sérieusement, le Poème Symphonique pour Cent métronomes sonne comme une œuvre puissamment émotionnelle, énigmatique et troublante, mais immédiatement attractive pour peu qu’on lui prête l’oreille. Étant donné la nature des objets musicaux utilisés, ces deux exemples me paraissent illustrer sans contestation possible l’idée d’une émotion créée par l’instrument de musique. Des instruments très « humains », comme le violoncelle ou la flûte traversière, sont tout aussi susceptibles de créer des émotions ajoutées à la vie – simplement ces émotions auront davantage l’air d’en être extraites.
15Mais quels sont les éléments de la puissance émotionnelle des instruments ? Il serait erroné de réduire au timbre le potentiel émotionnel d’un instrument – sans même prendre ici en compte la critique de la notion de timbre formulée par Pierre Schaeffer et son école. Les autres « partiels émotionnels » de l’instrument sont : sa puissance sonore, sa vélocité, la diversité de ses registres, son homogénéité ou son hétérogénéité sonore, ses structures d’attaque, sa dispersion sonore, son ambitus, sa tessiture, ses capacités d’articulation et de tenue des notes, etc. Cette liste n’est nullement exhaustive, mais elle suffit à faire comprendre que certains instruments disposent d’une palette émotionnelle potentielle beaucoup plus riche que d’autres. On admettra, je suppose, qu’un tuba est émotionnellement moins riche qu’un violon, ou un piccolo moins qu’un violoncelle. Mais on ajoutera immédiatement que cette palette n’est pas fixée ne varietur. L’identité émotionnelle des instruments, pour paraphraser l’analyse d’Hervé Lacombe13, est travaillée par et dans l’histoire de la musique. L’histoire de cet instrument souvent sous-estimé qu’est l’alto serait à cet égard fort instructive : le potentiel émotionnel exceptionnel de l’alto est longtemps resté en friche, et même Berlioz, malgré sa bonne volonté et la demande instante de Paganini, resta en deçà du nécessaire dans son Harold en Italie. Les Sequenze de Luciano Berio sont autant de tentatives d’élargissement de la palette émotionnelle des instruments concernés. C’est dire aussi qu’émotionnellement parlant, l’instrument de musique est éminemment plastique. Nous retrouverons plus loin cette notion de plasticité.
16Mais il importe de ne pas réifier l’idée d’émotion musicale. Rémy Droz dénonce avec justesse « une conviction implicite, mais très présente dans de nombreuses recherches modernes : celles-ci postulent fréquemment la constance d’une humeur à travers le morceau, voire à travers des œuvres entières14 ». En opposition à ce postulat en effet infondé, Droz cite le Versuch einer Anleitung die Flöte traversiere zu spielen de Johann Joachim Quantz (1752), dans lequel le célèbre flûtiste écrit : « Et parce que dans la plupart des morceaux une passion alterne constamment avec une autre [“immer eine Leidenschaft mit der anderen abwechselt”], de même l’exécutant doit savoir juger chaque idée musicale et la passion qu’elle contient et toujours adapter à celle-ci son interprétation15. » L’émotion musicale (« passion » ici) est essentiellement mobile, beaucoup plus sans doute que les émotions réelles de la vie ; et la mécanique même du jeu instrumental se prête paradoxalement très bien à cette mobilité émotionnelle. C’est parce que la palette émotionnelle de l’instrument est large, et plastique, qu’il peut rendre la variabilité « passionnelle » contenue dans l’œuvre musicale.
Les quatre aspects de l’émotion instrumentale
17Nous avons jusqu’à présent envisagé l’émotion instrumentale principalement du point de vue de l’auditeur. Trois autres aspects doivent être pris en compte. L’émotion instrumentale est aussi celle de l’interprète, que nous venons brièvement d’évoquer, celle du compositeur (compositeur et interprète ne font qu’un dans l’improvisation), et enfin celle du luthier. Je passerai vite sur le compositeur et l’interprète – encore qu’il y aurait beaucoup à en dire. Le compositeur, s’il écrit sa partition avec un stylo ou un ordinateur, écrit son œuvre avec des instruments (et, éventuellement, des voix)16. L’émotion de l’interprète est en soi un objet digne du plus grand intérêt. Cette émotion est à la fois physique (gestuelle) et esthétique. Qu’est-ce qui, dans l’émotion suscitée par le son d’un instrument prenant, tient au jeu de l’interprète, à son investissement émotionnel dans l’exécution de l’œuvre ? Dans son Art du Violon (1834), le violoniste virtuose Pierre Baillot décrit de façon presque matérialiste ce qu’il appelle « le Matériel du violon », instrument formé de « deux planches et quatre points d’appui » ; puis il écrit : « Initié par de continuelles étreintes à tous les mystères du cœur, il [le violon] respire, il palpite avec lui. Son timbre est une Seconde voix humaine17. » Ce qui m’importe est l’étreinte entre le violoniste et son instrument, étreinte continue qui finit par transmettre à l’instrument de bois les « mystères du cœur ». Dans une lettre de jeunesse, Baillot décrivait de façon imagée son corps à corps avec son violon (un excellent violon du luthier François-Louis Pique) :
« Je travaille le plus souvent possible l’excellent instrument que je tiens de vous. Mais nous sommes perpétuellement en guerre ensemble. Semblable à un coursier fougueux qui s’aperçoit de l’inhabileté de la main qui le guide, il m’entraîne beaucoup plus loin que je ne croyais aller, c’est lui qui me dompte et me conduit, c’est lui qui me force à chercher à donner plus d’étendue à mon jeu, plus de force à mes nuances, plus de moelleux à mes sons18. »
18Je viens d’évoquer le luthier François-Louis Pique. Les instruments sont des inventions humaines, et des inventions particulièrement libres. La musique est en effet le seul art qui doive produire son matériau. Les autres arts (architecture, peinture, sculpture, danse et poésie même) empruntent leur matériau à la nature (bois, métaux, marbre, argile…) ou à la culture (les mots, la langue, les mouvements du corps). La musique n’emprunte pas son matériau, le son, à la nature ou à la culture – la « musique concrète » est une exception très limitée qui ne modifie pas la situation générale. La musique ne se sert pas des sons du monde, elle produit elle-même les sons qu’elle souhaite, avant de les mettre en forme. Pour produire ces sons, elle doit inventer puis construire des objets techniques destinés à les fabriquer : ce sont les instruments de musique dits acoustiques, ou l’appareillage électro-acoustique et numérique des musiques contemporaines et actuelles. La musique comporte donc une étape supplémentaire par rapport aux autres arts. Ces derniers empruntent leurs matériaux à la nature ou à la culture, puis les préparent et les mettent en forme, les travaillent dans la forme d’une composition (plastique, poétique ou chorégraphique). La musique, elle, emprunte dans un premier temps à la nature des matériaux (bois, métal, et beaucoup de matières animales) pour fabriquer des objets techniques, les instruments, qui eux-mêmes produiront dans un second temps des matériaux, les sons, que le musicien enfin, dans un troisième temps, mettra en forme dans ses compositions ou ses improvisations. Hegel souligne cette singularité dans un passage bref mais puissant de son Esthétique :
« La sculpture et la peinture rencontrent plus ou moins déjà existants les matériaux physiques, le bois, la pierre, le métal, les couleurs ; ou alors elles n’ont à leur faire subir qu’une faible préparation pour les rendre propres à être employés pour les besoins de l’art. Mais la musique, qui se meut dans un élément créé par l’art et pour lui-même, doit traverser une préparation remarquablement plus difficile avant d’arriver à la production des sons. À part le mélange des métaux pour la fonte, le broiement des couleurs avec des sucs de plante, l’huile et la fusion de nouvelles nuances, etc., la sculpture et la peinture peuvent se passer de plus riches inventions. La musique, au contraire, si l’on excepte la voix humaine, qui est un don immédiat de la nature, doit se créer entièrement ses autres moyens pour former des sons réels, et cela avant qu’elle puisse seulement exister19. »
19Le très grand nombre de types d’instruments inventés par l’humanité (le Grove Dictionary of Musical Instruments recense deux mille types d’instruments européens et dix mille types d’instruments extra-européens) a une signification anthropologique et philosophique très profonde. Ce nombre presque incroyable est la conséquence de la sous-détermination fonctionnelle des instruments de musique. Les caractéristiques formelles et matérielles d’un marteau ou d’une voiture sont dictées par les fonctions spécifiques que ces objets doivent remplir. La fonction détermine étroitement l’objet, et limite donc la fantaisie de l’inventeur. Mais ce principe technique ne vaut pas pour l’instrument de musique, parce que l’instrument n’a pas de fonction rigoureusement déterminée. S’il y a tant de types d’instruments, et tant de variétés au sein de chaque type, s’il y a tant de sortes de luths, de flûtes, d’accordéons, de clavecins ou de cors, c’est parce que la fonction des instruments de musique est très peu déterminée. Sans doute a-t-on dans certains cas besoin d’un instrument répondant à certains critères : à la chasse ou à la guerre il faudra un instrument sonore et portant loin, mais bien des instruments différents peuvent posséder cette propriété et donc remplir cette fonction (un sifflet, un cor, une trompette, un clairon, un trombone…). C’est ce que j’appelle la sous-détermination fonctionnelle des instruments de musique. La plupart du temps, la fonction de l’instrument de musique est simplement de produire les sons que son inventeur et constructeur (le luthier) souhaite qu’il produise. Cette apparente tautologie est en fait pleine de sens : la fonction ne précède plus l’invention et ne la commande donc plus ; très souvent, la fonction suit l’invention et en dépend. C’est parce qu’on a inventé un nouvel instrument que les musiciens vont s’en saisir (parfois ils ne s’en saisissent pas, et l’instrument disparaît ou végète). Désir de trouver un son nouveau, de travailler un matériau différent, d’expérimenter un geste instrumental inhabituel : et voilà un nouvel instrument en passe d’être inventé et fabriqué. Le nombre colossal des instruments inventés par l’humanité est donc l’expression et la conséquence directe de leur sous-détermination fonctionnelle, ce qui n’est qu’une condition négative. La condition positive de l’invention est le désir du luthier, ou du musicien (Wagner commandant à Sax l’instrument aujourd’hui appelé Tuben ou tuba wagnérien).
20Le désir, l’émotion du luthier sont un élément essentiel. On sera peut-être surpris de l’expression « émotion du luthier », si l’on donne à émotion le sens d’une agitation irrationnelle et incontrôlée, mais ce sens est ici incorrect. J’évoquerai à nouveau Bergson, « Création signifie, avant tout, émotion20 » ; Bergson précise plus loin que l’émotion est « à la fois la curiosité, le désir et la joie anticipée de résoudre un problème déterminé21 ». L’invention d’un instrument nouveau, la transformation d’un instrument déjà existant, doivent beaucoup à la curiosité, à l’exploration d’un matériau ou d’un geste instrumental nouveau, au goût sensible pour l’innovation sonore. L’émotion, relayée par l’intelligence et l’habileté technique, est à la racine de l’invention organologique et instrumentale22.
Émotion instrumentale et affinités organologiques
21Notre approche a jusqu’à présent concerné l’instrument isolé. Cela peut correspondre à la situation du concert de soliste – pas forcément le concert « bourgeois », un accordéoniste jouant seul par les rues peut, lui aussi, susciter une émotion liée à son instrument jouant seul. Mais le jeu en formation va démultiplier les types d’émotion musicale. Et cela, à deux niveaux. D’une part, l’instrument jouant en formation dispose d’un potentiel émotionnel différent de celui qu’il a quand il joue seul ; le piano des sonates de Mozart n’est musicalement pas celui de ses concertos (quand bien même il s’agirait du même instrument physique). D’autre part, les interactions entre différents instruments jouant ensemble créent des types singuliers d’émotion proprement musicale. Ces émotions spécifiques sont dues aux effets de masse (c’est l’idée du quantitatif en musique23), aux effets de texture, qui vont à l’infini tant les combinaisons possibles sont nombreuses, aux effets de contraste, qui eux-mêmes se ramifient en contrastes d’intensité ou de puissance (opposition du ripieno et du concertino, du soliste et de l’orchestre, d’un groupe d’instruments au tutti, etc.), aux contrastes de timbre (et par « timbre » il faut aussi entendre les attaques, les articulations, etc.), aux contrastes de registres (apparition de notes très graves aux trombones ou contrebasses, ou très aiguës aux violons ou au piccolo, comme dans le Hostias du Requiem de Berlioz, alliant trois flûtes dans l’aigu et le suraigu et huit trombones dans le grave et l’extrême grave) – cette liste n’est pas exhaustive. Il y a donc une dimension très fortement contextuelle dans l’émotion suscitée par l’accord des instruments – par « contexte » je n’entends nullement le contexte externe (social, politique, religieux, personnel) qui joue bien sûr son rôle, mais le contexte interne, le contexte musical et organologique, le contexte formé par l’ensemble des instruments jouant ensemble, et donc en interaction, telle ou telle partition.
22Ces interactions supposent la cohérence musicale de l’instrumentarium. On ne peut définir abstraitement, de manière formelle, ce qu’est la cohérence d’un instrumentarium : il y a différentes sortes de cohérence, la cohérence forte d’un quatuor à cordes n’est pas de même nature que la cohérence de l’orchestre de Haydn, pour rester dans le même univers musical ; si on prend la comparaison plus loin (l’orchestre de Mahler, une formation de jazz ou de musique contemporaine), la différence de nature des cohérences apparaîtra encore plus clairement. La cohérence d’un instrumentarium est parfois créée par l’œuvre elle-même, elle est parfois, au contraire, ancrée dans une tradition musicale (le quatuor à cordes, derechef). J’ai proposé ailleurs quelques réflexions sur les différents types d’instrumentarium, et sur les « affinités organologiques » permettant à des instruments différents de « bien sonner » ensemble24. Je rappelle ici la définition du concept d’affinité, définition que j’emprunte à Kant. Cette définition est certainement irrecevable pour les sciences physiques et chimiques d’aujourd’hui, mais elle se révèle en revanche très précise et féconde pour le sujet qui nous occupe :
« [L’affinité] est l’action réciproque de deux matières physiques spécifiquement différentes, en interaction intime et tendant à l’unité. L’unification détermine alors un troisième élément, doté de propriétés qui ne peuvent être engendrées que par l’unification de deux substances hétérogènes25. »
23Deux idées sont à retenir : l’affinité proprement dite suppose l’hétérogénéité des éléments concernés, et l’union de ces éléments hétérogènes produit un type de propriétés nouveau, indéductible de chacun des éléments pris séparément. Remplaçons « matières physiques » par « sons musicaux », en incluant bien dans les sons non seulement le timbre, mais tous les autres paramètres déjà évoqués (attaque, ambitus, vélocité, puissance, dispersion, etc.), et nous obtenons une description très satisfaisante du type d’union des sons qui se produit quand des instruments différents jouent ensemble. Or cette affinité organologique a aussi une dimension émotionnelle – elle a sans doute d’abord une dimension émotionnelle. Cette dimension est peut-être d’autant plus visible que l’instrumentarium opéral est plus rare, comme l’association d’une flûte, d’un alto et d’une harpe dans la Sonate de Debussy (1915). Mais les musiciens nous ont habitués, depuis le xixe siècle, aux associations instrumentales les plus étranges, qui créent autant d’émotions musicales spécifiques. Cette longue expérience instrumentale et orchestrale conduit à souligner deux points : la plasticité émotionnelle des instruments, et la dimension de « mixte » revêtue par l’émotion musicale.
24Les instruments sont émotionnellement très plastiques. Cette plasticité s’étend aux connotations sexuelles ou « genrées » des instruments. La harpe, déjà citée à propos de Tannhäuser, en est un exemple frappant. Ce fut au Moyen Âge un instrument viril et guerrier, joué à ce titre par les Minnesänger et les chevaliers. Charles le Téméraire, en plein xve siècle, excellait à la harpe, entre deux combats. Puis la harpe devint un instrument pour jeunes filles blondes mélancoliques aux longs cheveux, comme dit à peu près Berio26 ; lequel Berio cassa délibérément cette identité languissante dans sa Sequenza II (1963) qu’il dédia à un harpiste de sexe masculin (Francis Pierre). La harpe est aujourd’hui un instrument uni-sexe, si on peut dire, comme les timbales, souvent jouées aujourd’hui par des femmes. Multiplier les exemples est inutile, tant ils sont nombreux. Tous illustrent la plasticité émotionnelle des instruments. En même temps, cette plasticité n’est pas non plus indétermination complète. Si tel était le cas, « l’invention créatrice n’aurait affaire à rien d’autre qu’elle-même », « elle s’exercerait dans le vide, sans être confrontée à aucun donné préalable », comme le remarque Jacques Dewitte à propos d’un problème voisin27. La plasticité suppose une détermination relative, une détermination ouverte, un matériau sonore suffisamment résistant et suffisamment souple pour qu’il puisse être travaillé, c’est-à-dire transformé.
25Cette plasticité ne signifie pas que les instruments peuvent se remplacer sans perte les uns les autres, ce qui est faux ; elle signifie que la gamme émotionnelle d’un instrument n’est pas fixe, et que de nouvelles émotions proprement musicales peuvent être créées par l’instrumentiste et le compositeur, notamment dans le contexte d’un instrumentarium original.
26L’émotion musicale apparaît donc comme un mixte, comme le sont sans doute toutes les émotions réelles, et un mixte organologiquement fondé et structuré. Ce mixte est lui-même formé d’autres mixtes, ou de composés28, et le détail des éléments intervenant dans une symphonie de Mahler donne le vertige. Pourtant, tous ces éléments jouent leur rôle, comme les « petites perceptions » de Leibniz dont aucune n’est consciemment perceptible en elle-même, mais qui toutes ensemble produisent un résultat singulier et parfaitement perceptible. L’émotion musicale, en tant que mixte, peut se simplifier ou s’anémier jusqu’à disparaître presque complètement ; elle peut au contraire se complexifier et s’intensifier, jusqu’à provoquer des phénomènes de transe ou, à l’opposé, d’extase. L’ambivalence du son de l’aulos dans la musique grecque antique est à cet égard très significative29.
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27Nous sommes arrivés au point où l’expérience musicale de l’humanité devient immaîtrisable. Ici s’arrête la philosophie. Combien de combinaisons instrumentales différentes ne sont-elles pas possibles, même en s’en tenant aux douze mille instruments recensés par le Grove, chiffre bas ? Combien d’inventions d’émotions, de combinaisons d’émotions encore inconnues ? La philosophie de l’art doit penser le réel, proposer des concepts nets et des thèses argumentées, établir les principes d’une approche rationnelle de l’expérience artistique. Nous avons montré que l’émotion musicale, dans sa dimension organologique, est un phénomène qui se construit, se travaille, et même s’invente. Nous avons distingué les émotions extraites de la vie, reprises et prolongées par la musique, des émotions neuves, créées par la musique et par ses instruments. Nous avons tâché de dégager quelques principes, quelques constantes, quelques « lois » de cette construction organologique des émotions musicales, dans les instruments isolés, très nombreux, dans les combinaisons d’instruments, infiniment plus nombreuses. Ces émotions sont éminemment contextuelles, et les contextes se ramifient à l’infini. Si la philosophie a le projet de penser l’expérience, elle ne prétend pas en épuiser la richesse empirique ni en anticiper les transformations. Cette richesse passée et présente, ces transformations à venir, sont l’affaire des musicologues, des musiciens, et des luthiers.
Notes de bas de page
1 Du Bos (abbé) J.-B., Réflexions critiques sur la poésie et la peinture, III, 3, « De la musique organique ou instrumentale », Paris, Éditions de l’ENSBA, 1993, p. 372 (cette édition supprime le « pas » de « ne nous fasse pas »). Du Bos donne comme référence Quintilien, Institution oratoire, livre I, chap. 12. En réalité il s’agit du livre I, chap. x, 25, dans l’édition de J. Cousin aux Belles-Lettres, collection Budé, 1975, p. 137. Cousin traduit : « Aussi bien ne voyons-nous pas même les instruments de musique, qui sont incapables de reproduire le langage, provoquer sur les esprits des impressions diverses ? » Sermo exprimi pourrait aussi être traduit par « former des mots », comme le fait l’éditeur de Du Bos à l’ENSBA.
2 Quintilien, Institution oratoire, IX, chap. iv, 10, édition et traduction J. Cousin, op. cit., 1978, p. 233-234 : « Autrement les sons même des instruments de musique, sans exprimer aucune parole, ne provoqueraient pas chez les auditeurs des mouvements divers. » Ces mouvements sont divers non à raison de la différence entre les auditeurs, mais à raison de la différence entre les sons.
3 Sur cette problématique de l’usage de la musique comme d’une force naturelle, voir Sève B., « Pouvoirs de la musique : de l’emprise à l’altération », in Esprit, janvier 2003, p. 69-83.
4 Sur le modèle de la distinction usuelle entre musique diégétique et musique non diégétique, j’appelle instrument diégétique un instrument que l’on voit à l’écran et qui est joué par un personnage du film (et qui joue donc une musique elle-même diégétique), et non diégétique l’instrument que l’on ne voit pas à l’écran et qui n’appartient pas à l’univers de la diégèse. Il peut bien sûr arriver qu’un instrument diégétique reste hors-champ, mais il suffit que le spectateur sache qu’il est joué dans la diégèse.
5 Je me permets de renvoyer sur ce point à mon étude : « Ce qu’il advient de la musique quand Tannhäuser devient un peintre », in K. Beffa (dir.), Les nouveaux chemins de l’imaginaire musical, Éd. du Collège de France, 2016, généré le 15 décembre 2016, disponible en ligne sur http://0-books-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/cdf/4782, p. 57-69.
6 Kierkegaard S., L’alternative (1843), 1re partie, in Œuvres complètes, t. III, trad. P.-H. Tisseau et E.-M. Jacquet-Tisseau, Paris, Éditions de l’Orante, 1970, p. 47-128 ; la citation se trouve p. 128.
7 Focillon H., Vie des formes (1943), Paris, PUF, 1970 ; Gilson E., Introduction aux arts du beau, Qu’est-ce que philosopher sur l’art ? (1963), Paris, Vrin, 1998 ; Matières et formes, Poiétiques particulières des arts majeurs, Paris, Vrin, 1964.
8 Aristote, De la génération et de la corruption, notamment en 330 a. 330 b, trad. Ch. Mugler, Paris, Belles-Lettres/Budé, 1966, p. 49-50.
9 Chateaubriand F.-R. de, Génie du christianisme, 4e partie, livre premier, chap. i : « Des cloches », Paris, GF-Flammarion, t. II, 1966, p. 55-57.
10 Ibid., p. 56.
11 Bergson H., Les deux sources de la morale et de la religion (1932), Paris, PUF, 2003, p. 37.
12 Voir Sève B., L’instrument de musique, une étude philosophique, Paris, Seuil, 2013, p. 184-186.
13 Voir Lacombe H., « L’instrument de musique : identité et potentiel », Methodos, n° 11, 2011, http://methodos.revues.org/2552.
14 Droz R., « Musique et émotion », in Actualités psychologiques, Lausanne, Institut de psychologie, université de Lausanne, 2001.
15 Ibid.
16 Je ne prends pas ici en compte l’histoire complexe de la prescription instrumentale, ni le fait que durant de longs siècles le compositeur était relativement indifférent aux choix des instruments destinés à jouer son œuvre.
17 Baillot P., L’art du violon, Paris, Imprimerie du conservatoire de musique, 1834.
18 Baillot P., Lettre à Montbeillard, 27 octobre 1795, in François-Sappey B., « Baillot par lui-même », in Recherches sur la Musique française classique, n° 18, Paris, Éditions Picard, 1978, p. 175.
19 Hegel G. W. F., Esthétique, III, 3, chap. ii : « La musique », trad. Bénard (1840-1852), Paris, Livre de Poche, 1997, t. II, p. 354.
20 Bergson H., Les deux sources de la morale et de la religion, op. cit., p. 42.
21 Ibid., p. 43.
22 Sur la distinction entre invention organologique (invention d’un nouvel instrument ou transformation profonde d’un instrument existant) et invention instrumentale (utilisation nouvelle d’un instrument existant), voir Dewitte J., « L’invention instrumentale », in Methodos, n° 11, 2011, http://methodos.revues.org/2518.
23 Voir sur ce thème Kaltenecker M., La rumeur des batailles, Paris, Fayard, 2000.
24 Voir Sève B., L’instrument de musique, op. cit., p. 230-250.
25 Kant I., Anthropologie du point de vue pragmatique, I, 1, § 31, in Œuvres Philosophiques, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1986, t. III, p. 994-995. Traduction légèrement modifiée.
26 Berio L., Two Interviews, New York/Londres, Marion Boyars, 1985, p. 99.
27 Dewite J., « L’invention instrumentale », op. cit., point 9.
28 Le mixte est la synthèse de l’hétérogène (exemple : les paroles et la musique dans un Lied), le composé est la synthèse de l’homogène (exemple : les deux voix d’une Fantaisie à deux voix pour clavecin). Voir Sève B., « Paroles et musiques, dérivations, hétérogénéités et transactions artistiques », in C. Naugrette et D. Pistone (dir.), Paroles et musiques, Paris, L’Harmattan, 2012, p. 81-93.
29 Voir Rouget G., La musique et la transe, Paris, Gallimard, 1980 ; et Massin M., Les figures du ravissement, Enjeux philosophiques et esthétiques, Paris, Grasset/Le Monde, 2001.
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