Chapitre XIII. Un amour pur ?
p. 265-280
Texte intégral
L’enlisement dans le sensible
1Rembrandt évoque crûment la nudité de la chair et le désir sexuel. L’absence de texte intensifie cette brutalité : aucune leçon de morale n’accompagne l’image. Il représente par ailleurs la Passion du Christ donc l’amour le plus pur. On peut se demander à quelles conditions le désir est sublimable : faut-il se détacher de la réalité sensible ou bien s’y confronter, quitte à s’y enliser ?
2La Chute de l’homme (ill. 51) opte de façon évidente pour la seconde solution. L’œuvre est proche du métier des burinistes par la netteté, la finesse et la régularité des tailles et des contretailles qui, variant en densité et direction, suggèrent le modelé des corps. Un tel soin est mis au service du naturalisme. Rembrandt s’oppose à la tradition iconographique qui permettait aux artistes de présenter leur idéal masculin et féminin1. Adam et Ève deviennent des figures laides, comparables à des faunes.
3Montrer une telle laideur ne revient pas à condamner l’humanité pécheresse. Rembrandt s’approprie l’idée de Dürer, qui interprète le péché comme un acte du libre arbitre2. Dürer confère à nos premiers parents la beauté harmonieuse des statues antiques, rappelant ainsi qu’ils ont été créés à l’image de Dieu. Mais leur pose, en léger contrapposto, manifeste la fierté d’individus conscients de leur liberté, qui prétendent se hisser au niveau du Créateur. Le péché devient un acte d’orgueil. Le premier couple de Rembrandt ne présente aucun signe de « la beauté préternaturelle, au-delà de la nature, qui leur vient de la proximité avec Dieu ». Imposée par les théologiens, cette beauté était une convention de représentation, qui concernait même les moments succédant à la Chute3. Au contraire, l’Adam et l’Ève de Rembrandt ont un aspect brut, comme inachevé.
4L’éclairage souligne la sensualité d’Ève. Vibrant de lumière, son corps apparaît à contre-jour. Trouant le centre de l’image, il trouble le regard, confronté à une nudité offerte, qui, pourtant, se dérobe sous le voile de l’ombre. Représenté plus subtilement, Adam est partagé entre des forces qu’il ne maîtrise pas. Le clair-obscur, ses mains qui, tout en caressant le fruit, en appellent au ciel, la torsion de son corps, tout évoque son « combat intérieur » « entre le Bien et le Mal, Dieu et Ève, sa conscience et ses sens4 ». Se montrant et se cachant en même temps, Ève reconnaît le désir qu’Adam éprouve pour elle, tandis qu’Adam s’interroge sur son devoir. Leur tort est de s’approprier ce qui ne leur revient pas. Leurs mains qui se joignent pour envelopper la pomme témoignent de cette avidité.
5Rien ne permet de déterminer si l’on est avant ou après le péché. Par son aspect, le premier couple est proche de l’animalité. Mais les mains d’Ève qui tiennent la pomme serrée à la hauteur de ses seins, ainsi que le geste d’Adam qui paraît caresser plutôt que saisir, évoquent l’ère du désir, après la faute. Situées à un endroit indéterminé, qui peut être le seuil de l’Éden, les deux figures incarnent le passage entre l’innocence et le péché, l’obéissance à Dieu et la découverte de son propre désir.
6Envahissant, voire proliférant, le sensible prolonge leur sensualité. En contrebas, l’arrière-plan donne à contempler les arbres du Paradis, lumineux et évanescents. Mais la végétation du premier plan est luxuriante. La représentation du tentateur comme un dragon griffu, à la fois monstrueux et comique, accentue le sentiment d’étrangeté. Rembrandt a emprunté la position et la forme de l’animal à une gravure de Dürer. La composition triomphale de ce burin contribue à rendre éclatante la victoire du Christ. La présence du dragon, qui garde les enfers, ne trouble pas la sérénité d’Adam et Ève, car sa résistance manifeste la domination du Ressuscité sur les forces mortifères5.
7L’estampe de Rembrandt est plus complexe. Devenu observateur, le dragon s’interpose entre le spectateur et les deux figures. Son ricanement inquiète, d’autant plus qu’Adam et Ève sont à peine conscients de sa présence. Aussi cette image étonne-t-elle. Elle révèle la vitalité du sensible, sans orienter le regard du spectateur On peut y découvrir les deux principes du grotesque : « A parte subjecti, un principe de saisissement qui laisse incertain sur l’attitude à adopter, et […] a parte objecti, un principe de révélation soudaine dans l’apparition des images6. »
8Créateur de visions à l’étrangeté fascinante, telles les figures imaginaires découvertes dans les ruines romaines à la Renaissance7, le grotesque trouble, si bien qu’il prête à rire. Mais ce rire est partagé. Faut-il réprouver le premier couple, ou bien compatir à sa faiblesse ? Doit-on avoir peur du tentateur, ou le mépriser ? Le grotesque correspond à « la manière soudaine et démesurée dont il [le sensible] prétend occuper la totalité du terrain », ce qui entraîne « une absence de signifié, qui donne l’impression d’une illimitation de la signifiance8 ». Le sensible s’impose comme une force monstrueuse, dont la créativité est instable, car elle engendre des êtres qui ne cessent de se transformer et qu’on ne peut catégoriser.
9On peut analyser de façon proche la perception que les hommes de la Renaissance eurent des motifs ornementaux présents dans la Domus Aurea de Néron. Comme l’espace où apparaissent les grottesques n’obéit pas aux lois de la perspective, ils paraissent insituables et même insaisissables. Cette labilité rencontre un sentiment théorisé par les penseurs de l’époque maniériste et mis en image par les artistes : « la certitude d’une réalité incertaine ». Définis par le mouvement et l’inconstance, le cosmos et la société offrent peu de prise à la compréhension9.
10Rembrandt appartient à l’époque plus stable du baroque. Des équilibres religieux et politiques se sont mis en place. Le langage mathématisé de la science de Galilée et de Descartes a apporté de nouvelles certitudes. L’art baroque laisse se développer les dynamiques, en cherchant à résoudre leurs tensions à la gloire des pouvoirs, Dieu, pape ou roi10. Alors que Rubens utilise l’énergie des forces naturelles pour exalter les pouvoirs religieux et politiques, Rembrandt prolonge le sentiment d’incertitude du maniérisme11, ce qui permet de lire son œuvre selon le principe du grotesque. Son eau-forte explore les déséquilibres subtils qui rendent possible la continuité entre les états et entre les êtres.
11Elle évoque la condition qui rend possible la bascule de l’innocence au désir, de la foi à la mort. Selon la pensée calviniste, la nature humaine telle qu’elle a été créée par Dieu ne présente rien de mauvais. Alors l’homme n’a pas honte d’être nu12. La tentation du serpent corrompt cette nature. Avant même de commettre le péché, Ève a déjà en elle la « malice », l’inclination à faire le mal. Elle a perdu confiance en la Parole divine, ce qui éveille son désir de consommer le fruit. Cette corruption, qui a une source intérieure – le cœur d’Ève – se manifeste par le changement du regard, désormais empli de convoitise, qu’elle porte sur l’arbre de la connaissance13.
12Cette définition du péché est comparable à ce que les Évangiles synoptiques appellent le péché contre l’Esprit, le seul à être mortel selon Luther. Faisant perdre la foi, il conduit à la mort, sans pardon possible. Prisonnier de son aveuglement, l’individu confond ce qui vient de Dieu avec ce qui vient de Satan. Ne reconnaissant plus que la Parole est source de vie, il est condamné à mourir, séparé de la force de l’Esprit14. En ce sens Paul écrit que par le péché, Adam a introduit la mort en ce monde15.
13Pourtant l’eau-forte dément une interprétation univoque. La corruption n’est ni totale ni irrémédiable. Figure du passage, donc du dépassement, Ève porte en elle la promesse que Dieu a faite à l’homme dès sa création, au moment où il l’a béni : avoir une postérité nombreuse. Ses formes pleines et arrondies donnent une figuration visuelle de son nom, Ève, la « Vivante16 ». Après le péché, Adam appelle ainsi celle qui deviendra « la mère de tous les vivants ».
14Cette image exprime la complexité du sujet humain, habité par des aspirations contradictoires. Croyant choisir librement, le couple se méprend. Mais Dieu les sauvera, presque malgré eux, en inscrivant son Fils dans la lignée ouverte par la force de vie d’Adam et Ève. Par la nécessité qu’il impose aux individus de se transcender, le sensible contient la possibilité de la Rédemption.
15L’eau-forte diminue le risque d’enlisement, en témoignant que la force du désir est avidité et possessivité aussi bien que dynamisme fécond. Le spectateur est convié à devenir réceptif au sublime : à la générosité qui accueille l’altérité. Pourtant au-delà de son irrévérence, le grotesque engage un regard corrosif, voire destructeur.
Une ironie destructrice de l’Absolu
16Rembrandt joue sur le choc oxymorique au moins autant que sur la « fêlure ». Son œuvre relève plus des contrariétés du maniérisme que de l’apaisement du baroque. Ce grotesque incite le spectateur à douter. Rire aux dépens des premiers hommes, censés refléter la beauté et la sagesse du Créateur, ne pas hésiter à se moquer du Christ, tout cela risque de fragiliser l’adhésion religieuse, voire de vider de sa substance le contenu de la croyance. L’idée du Christ présuppose en effet une grandeur digne d’amour, qui exclut le ridicule. En pratiquant un humour qui exhibe la faiblesse et la laideur, Rembrandt participe à la dissolution critique de l’Absolu, notée par Hegel comme étant caractéristique de l’art du xviie siècle17.
17Cet art manifeste la primauté de la subjectivité, car il s’intéresse aux objets insignifiants et donne une importance centrale aux moyens de représentation. Le talent de l’artiste l’emporte sur la représentation de l’objet, si bien que « l’art tombe dans le domaine du caprice et de l’humour18 ».
18L’humour de Rembrandt se distingue par la dimension réflexive et ironique qu’il recèle. Une tension anime la peinture néerlandaise. N’ordonnant plus les compositions selon une idée religieuse, elle privilégie l’insignifiance d’une subjectivité. Elle exprime d’autre part un « comique réconciliateur », car elle donne une forme sensible à ce qui unit le peuple hollandais : la satisfaction d’avoir conquis sa liberté vis-vis du monde et des autres hommes. L’art néerlandais est « le dimanche de la vie », où se manifeste de manière « insouciante d’elle-même » la joie d’être au terme du procès, d’avoir surmonté le négatif19. Cette peinture exprime la gaieté « naïve » d’une nation qui exerce son indépendance religieuse et politique, tout en jouissant des fruits de son travail. Savourant le sentiment d’être en accord avec le monde, le peuple hollandais a peu conscience du risque de scission qui le guette sous la forme latente du conflit des intérêts privés.
19Rembrandt manifeste plus de lucidité20. Son grotesque peut être analysé comme de l’ironie. L’ironie est l’acte même de la pensée, que Socrate, figure de l’émergence de la subjectivité, exerce de façon critique, en exposant à ses interlocuteurs les contradictions de leurs thèses. La pensée tend à dissoudre les idées auxquelles elle s’attaque, sans apporter de résultats tangibles, sinon le suspens de toute certitude21.
20L’ironie de Rembrandt met en péril la cohérence de l’idée du Christ, car elle l’humanise jusqu’à la laideur physique et morale. Non seulement cet art se moque du dénuement de Jésus, mais en caricaturant les prêtres dans le Christ chassant les marchands du Temple (ill. 50), il révèle la raillerie de ce dernier. Ce rire du Christ peut signifier qu’il est habité par le péché, au moins sous la forme de la tentation à laquelle la pensée commence à céder. Rembrandt remet en question un topos établi de longue date, encore rappelé par Baudelaire : la sagesse et la puissance du Christ excluent la possibilité qu’il n’ait jamais ri. « Le Sage, c’est-à-dire celui qui est animé de l’esprit du Seigneur […], ne s’abandonne au rire qu’en tremblant. […] Il s’arrête au bord du rire comme au bord de la tentation22. »
21Baudelaire suppose que le rire n’a pas pour origine la finitude, au contraire des larmes ou de la colère que le Christ a partagées avec les autres hommes. Le rire s’enracine dans l’orgueil. Exprimant un sentiment de puissance face au spectacle d’une faiblesse humaine ou naturelle23, il doit être différencié de la joie. Divine ou animale24, cette dernière a pour condition « l’unité » de l’acte pur ou de l’innocence sans réflexivité. Au contraire le rire est propre à l’homme et plus précisément au croyant, comme être contradictoire, déchiré entre l’expérience vécue de sa grandeur et la conscience blessée de sa faiblesse25.
22À moins d’avoir un regard détaché sur soi, nul ne rit de lui-même. Le sujet doit avoir un point de vue extérieur pour que se heurtent en lui le sentiment qu’il éprouve en usant de sa force et l’observation d’une faiblesse qu’il a conscience de partager mais qu’il méprise comme si elle ne lui appartenait pas. Le Christ se moque des marchands, car ils lui apparaissent ainsi comme un miroir des insuffisances humaines.
23Humanisé jusqu’au péché, le Christ de Rembrandt peut difficilement disposer de la bonté inhérente au divin. La représentation de Jésus qu’on peut construire à partir des différentes estampes correspond à une image contradictoire, proprement impensable. Souffrant jusqu’au doute, se contorsionnant de peur, ricanant de mépris, Jésus s’est approprié tous les défauts humains. Malgré cela, sa présence manifeste l’énergie du divin. Les deux natures sont dans une relation de fusion profonde et de séparation irréconciliable. Elles expriment un choc qui traduit l’impossibilité de l’union. Cette dernière est moins une réalité qu’un problème. Moniste dans sa vision de la transcendance devenue immanente, Rembrandt est en même temps dualiste. Penseur de l’unité du monde matériel et du monde spirituel, des affinités qui relient intimement l’humain et le divin, il révèle la distance qui les sépare, les contradictions qui les éloignent peut-être irrémédiablement26.
24Explorant la réalité de l’Homme-Dieu, Rembrandt découvre sa radicale impossibilité. Son œuvre relève de ce que Baudelaire qualifie de « comique absolu », lequel ébranle toute certitude par l’effet de vertige qu’il produit. Ce comique n’existe que chez les artistes qui pratiquent le dédoublement critique et réflexif27. Or dès 1632, Rembrandt exerce un tel dédoublement envers sa propre image, en réalisant des études d’expression inédites. Il met à l’épreuve le pouvoir de l’image gravée, mais aussi la capacité de son visage à rendre présents les affects, dépouillant l’individuel pour découvrir en lui l’universel. Il approfondit cette quête dans ses autoportraits, qui sont autant de tentatives de passer au crible la fragilité des belles apparences. Pratiquant une ascèse envers son image, il la simplifie peu à peu, renonçant à tout apprêt jusqu’à la laideur28.
25Loin de faire primer le subjectif, le travail de Rembrandt contribue à ruiner tout point d’appui. Cela peut être compris comme une manifestation du vide inhérent aux choses, qui sont comme rongées de l’intérieur par la mort. Ce thème, privilégié par certains penseurs et artistes de l’époque baroque, signifie qu’il n’est pas possible d’évoquer l’essence des choses, mais seulement l’universelle métamorphose qui conduit à la destruction29. On peut se demander s’il est encore possible d’être transporté par le sublime, et donc de connaître l’amour pur. Montrer le vide revient à disqualifier toute chose, à ruiner toute valeur. Or être disposé à rencontrer le sublime suppose de reconnaître une hiérarchie des objets estimables. Devenir sceptique risque de conduire à l’abandon mélancolique, au sens de l’acédie qui renonce à la foi.
26Rembrandt exerce un examen critique de l’image du Christ et de sa propre image. Il explore la mouvance des choses, en multipliant les états et les points de vue. Il plonge les êtres dans la mort, en les absorbant dans une nuit dense. Mais cette obscurité peut apporter la substantialité, dont l’absence fait le désespoir des penseurs baroques. Rembrandt ne se conforme pas à la représentation du sensible donnée par ses concitoyens. Celle-ci exprime un faux infini, qui n’a plus grand-chose de spirituel. S’intéressant aux accidents, « le reflet d’un métal, la trace de la lumière sur une grappe de raisin, l’éclat fugitif de la lune », la peinture néerlandaise disperse le spectateur dans des apparences dont il ne peut comprendre la raison30
27Au contraire Rembrandt élimine les détails. Il grave une ombre dense, animée de reflets lumineux, une « atmosphère » susceptible d’incarner « la forme même de l’intériorité31 ». À condition de s’aliéner dans ce qui lui est le plus étranger, le Christ peut devenir lui-même.
S’aliéner pour devenir amour pur
28Le Christ de Rembrandt ne retrouve le sublime qu’en affrontant la mort. Il se soumet à un processus de négation, qui permet de donner du sens à celle-ci. Autrement dit il exerce un travail de la mort, au sens hégélien de l’expression32.
29La peinture exprime des sentiments profonds seulement quand elle donne une forme sensible à l’amour, entendu comme « mort à la nature ». Dépouillé des inclinations terrestres, cet amour est celui du « Dieu qui, dans sa manifestation humaine, a parcouru le chemin de la souffrance », qui a « séjourné » dans la mort. Les statues antiques, si belles soient-elles, ne peuvent exprimer une telle intériorité. À la différence de Marie, Niobé ou Laocoon restent raides et impassibles. L’émotion de la Vierge rend au contraire perceptible « la beauté vivante de l’âme ». Cet état d’âme paisible, désormais uni de façon dynamique à la douleur, exprime une grande vitalité33.
30Le thème de l’amour pur, médité par les Réformateurs, puis à la fin du xviie siècle par Fénelon, qui en fait une véritable mystique, mérite d’être rapproché de cette « mort à la nature ». Amour inconditionnel du Christ, le pur amour conduit à l’oubli de tout ce qui n’est pas la chose aimée, voire à sa propre perte. Cette thématique se fonde sur un texte de Paul qui exprime le désir d’être séparé du Christ par amour du Christ, d’être anathème pour sauver ses frères34. Ce texte est apparu scandaleux dès l’origine pour la théologie chrétienne, qui professe la doctrine de la rétribution et des récompenses éternelles35. À l’époque moderne, Luther et Calvin en donnent une interprétation radicale, proche de celle qu’auront les mystiques au xviie siècle, celle de la supposition impossible. Pour comprendre ce qu’est l’amour, il faut supposer qu’un Dieu qui damnerait un homme juste serait aimé plus parfaitement par cet homme que s’il lui offrait les joies du Paradis36.
31Vouloir être damné pour ses frères manifeste la pureté de l’amour de soi, qui dépend seulement de l’Esprit, écrit Luther. Accepter la damnation revient à s’aimer en s’aimant en Dieu37. L’individu se désapproprie de lui-même pour obéir à la volonté de Dieu, comme étant le seul bien. Le Christ en donne l’exemple. Il a connu la souffrance extrême que suppose la résignation à l’Enfer, celle de l’abandon de Dieu38 :
« Car le Christ aussi, plus que tous les saints, a été damné et abandonné. Et il n’a pas supporté aisément sa souffrance ainsi que certains l’imaginent39. C’est réellement et véridiquement qu’il s’est offert pour nous à Dieu le Père en vue de la damnation éternelle. »
32Rembrandt donne une figure proche de l’abandon de Jésus avec le Christ au jardin des oliviers40 (cf. cahier couleur, ill. XIII). Théologiquement, cette scène est la seconde tentation du Christ. Cette épreuve est plus puissante que celle que lui a fait subir Satan dans le désert, à savoir l’épreuve de la faim, de l’ambition ou de l’avarice. Jésus combat la peur de la souffrance et de la mort, inscrite dans la chair de tout homme. Il connaît « l’agonie » : proche de son étymologie grecque de « combat », ce terme signifie l’angoisse de celui qui, traversant une détresse extrême, se sent sur le point de succomber41.
33Deux esquisses, alliant la plume au lavis, précèdent cette eau-forte. Ces étapes incarnent les progrès d’une méditation : Rembrandt découvre l’expérience du consentement au sacrifice, du comble de la détresse à la quiétude encore douloureuse.
34On peut y lire le processus de scission de l’Absolu, qui quitte son abstraction, nie son identité à soi, afin de devenir lui-même. Il connaît l’expérience par laquelle l’individu « tremble dans les profondeurs de soi-même » et risque d’être « dissout42 ». Le Christ affronte l’épreuve la plus terrible et la plus absurde, la peur de mourir de l’innocent, abandonné de tous : « Père, si tu veux écarter de moi cette coupe… Pourtant, que ce ne soit pas ma volonté mais la tienne qui se réalise43 ! »
35La volonté humaine du Christ connaît un déchirement. La première demande témoigne de la peur la plus immédiate : se soustraire à l’épreuve44. Cédant à la tentation, Jésus exprime le comble de l’égoïsme. Il souhaite que la puissance divine soit au service de ses intérêts vitaux. Sa deuxième prière montre son adhésion à la décision du Père. Il devient un « serviteur » obéissant jusqu’à la mort45.
36« Tout Fils qu’il était, il apprit par ses souffrances l’obéissance46. » L’Absolu connaît l’aliénation : il se nie lui-même. Vivant la tension contradictoire de sa volonté humaine avec sa volonté divine, le Christ développe l’Esprit qui l’habite. L’agonie lui permet de purifier son désir de ses motivations les plus intéressées.
37Représentant deux anges, le premier dessin47 est le plus proche du texte de Luc : « Père, si tu veux écarter de moi cette coupe… » L’image fusionne deux moments : la prière de Jésus et la descente de l’ange. Le premier ange entoure de ses bras le Christ qui essaie de prier. La terreur et le doute l’assaillent, sans qu’il n’ait conscience de la présence de Dieu à ses côtés. Un peu à l’écart, le second ange, qui descend du ciel en portant le calice, paraît attendre. Le Christ doit reprendre possession de son corps qui l’abandonne. Alors il recevra l’aide spirituelle, qui suppose sa participation48. C’est en effet « la vie qui porte la mort, et se maintient dans la mort même, qui est la vie de l’esprit49. » Rembrandt met en lumière le long « séjour » dans la mort que l’agonie suppose.
38En 1657, le deuxième dessin50 adopte une disposition horizontale. Émergeant du fond de l’image, à côté de la tour de Jérusalem, Judas et les soldats annoncent la suite du récit. En contrebas, les disciples se sont endormis. L’agonie est la scène centrale d’une série d’actions qui mènent à la Crucifixion. On ressent la durée de la Passion ainsi que la succession rapide des différents événements51. Éliminant le second ange, ce dessin garde le calice, désormais déposé aux pieds du Christ. Le Christ s’est repris : agenouillé, se tenant droit, il prie en s’abandonnant à l’ange, qui le soutient spirituellement. Consentant à son sacrifice, Jésus demande au Père de l’aider à être ferme dans sa décision. L’évocation des deux autres scènes suggère que les événements s’enchaîneront irrévocablement, une fois que le Fiat aura été prononcé.
39L’eau-forte radicalise l’idée d’acceptation. Le Christ se dégage des bras de l’ange, comme pour s’engager à porter sa croix. Ce changement crée une relation plus directe avec le spectateur auquel Jésus offre sa face souffrante. La suppression du calice contribue à intensifier le sentiment d’actualité. L’eau-forte atteint la simplicité : une économie de moyens qui donne l’illusion de la spontanéité.
40Le format vertical densifie la composition. Les différents événements sont reliés de façon claire et lisible. Unifiée, la manière contribue au même effet, tout en comprenant des ruptures. Alors que les formes du paysage sont noyées dans l’obscurité, Judas et les soldats ne sont que des silhouettes. Au premier plan, les disciples endormis sont faiblement modelés. Pris entre ombre et lumière, seuls l’ange et le Christ ont un corps de chair, grâce aux barbes qui créent une ombre profonde. Cause suprême d’étonnement, ils paraissent être les seuls à connaître la souffrance. En refusant de « regarder le négatif en face52 », l’homme est en manque de lui-même, incomplètement réalisé. Comme en témoigne le mouvement de l’ange, qui, contrairement à l’iconographie et au texte de Luc, ne surplombe pas le Christ mais l’embrasse, le divin s’abaisse et s’incarne totalement. Participant à l’épreuve, il apporte sa plénitude à l’humanité.
41La logique du récit s’interrompt pour donner à contempler le Christ souffrant. Sans pathétique, l’eau-forte rend visible l’acte du Fiat. Les yeux fermés, le Christ n’implore pas le spectateur. Il incarne parfaitement l’amour pur, qui s’offre sans rien attendre en retour. La douceur de l’eau-forte exprime la joie de se donner. Sous une forme plus ou moins ténue, l’angoisse reste sensible. Manifestant le sentiment d’avoir surmonté une lutte, l’estampe contient le souvenir de « s’être trempé dans la peur absolue53 ».
42Déréalisant le paysage, les variations d’encrage et de papier créent autant d’atmosphères différentes. La sensibilité du Christ devient celle du spectateur, qui ressent les variations affectives. L’épaisseur de l’ombre protège et isole, créant un effet de sérénité mêlée d’inquiétude. L’épreuve sur papier oriental du Rijksmuseum (cf. cahier couleur, ill. XIV) présente une atmosphère chaleureuse. Elle est imprimée sur du papier japon, qui produit de belles barbes. La teinte jaune orangé du papier participe à la création d’un effet doux et nuancé. Rayonnant à travers le réseau serré des tailles, l’ambiance est lumineuse. L’autre épreuve retenue est imprimée sur papier européen (cf. cahier couleur, ill. XIII). Elle présente des contrastes plus violents entre le blanc du papier et le noir de l’encre. L’effet dominant est le sentiment d’abandon et de solitude.
43Par leur diversité, ces épreuves aident à partager l’expérience de l’Incarnation dans l’épaisseur de sa durée. Pour se désapproprier de sa volonté, le Christ se soumet aux conditions spatio-temporelles de la finitude. Il apprend la patience. Paradoxalement cette vertu implique de pâtir : la volonté renonce à ses pouvoirs. Apportant la quiétude, la patience s’accompagne pourtant de l’attente anxieuse de l’épreuve. L’individu ne peut ni accélérer ni ralentir le cours des événements, mais doit traverser leur densité temporelle. En se perdant lui-même, le Christ affirme alors la suprématie du sensible.
44La figure de Jésus gravée par Rembrandt permet de comprendre que l’amour le plus pur ne s’accomplit que dans et par la matérialité du monde. Cela différencie la démarche de Rembrandt de celle de Hegel. Hegel suppose qu’il y aura une fin de l’art, peut-être même une fin de l’histoire. L’histoire de l’art correspond au développement d’une beauté qui s’affranchit du sensible, ce qui est perceptible dans la peinture romantique, où l’idée devient inadéquate à son expression. L’idée rejette l’extériorité « jusqu’à se faire réflexion de l’esprit en lui-même : présence à soi dans la dissolution-liquidation du monde54 ».
45Le travail de Rembrandt se distingue de la peinture néerlandaise, qui est « romantique » car elle exprime le triomphe de la subjectivité. Rembrandt explore le séjour prolongé dans le sensible, comme en témoigne le Christ au jardin des oliviers. Réalisée en un seul état, l’estampe semble parachever les dessins. Pourtant Rembrandt varie les épreuves, comme si sa recherche ne pouvait aboutir. Loin d’améliorer le tracé des tailles, donc d’intellectualiser l’idée par le dessin, il diversifie le papier et les encrages. Autrement dit, il continue à exploiter les effets de son activité de creusement du métal. Or le fouissage est pour Hegel la métaphore de l’aliénation de l’Esprit dans le sensible. Dans son introduction aux Leçons sur la philosophie de l’histoire, il prend l’image de la taupe, qui s’immerge dans la terre, fouit à l’aveugle et continue à avancer, tel un « mineur » qui persévère afin de remonter à la lumière du jour, une fois sa tâche achevée55. Indice d’une plongée durable dans le sensible, l’activité de creusement de Rembrandt, qui joue sur les barbes de la pointe sèche, déplace le métal sans l’enlever complètement.
46Hegel insiste sur la nécessité de l’enfoncement dans l’opacité de la matière et donc du creusement. L’envol de la chouette, qui dépasse toutes les contradictions en les transformant en un mouvement fluide, n’est jamais gagné56. La quête de Rembrandt paraît obéir à un autre projet : donner à voir la matière modélisée dans une œuvre d’art, donc la transformer en matériau afin d’en renouveler les effets.
« Le goût de Dieu »
47Contempler le Christ au jardin des oliviers incite à s’éloigner de Dieu, afin de mieux se conformer à sa volonté. Cela différencie la recherche de Rembrandt du courant mystique de l’amour pur développé par Fénelon et Madame Guyon57. Selon ce dernier point de vue, le dépouillement de la volonté rend nécessaire le détachement progressif vis-à-vis du sensible. Le croyant doit passer de l’état de foi ou vie purgative, à l’état d’espérance ou vie illuminative, caractérisée par l’espérance intéressée de la récompense, pour aboutir à la vie unitive où l’amour est son propre motif. Cet itinéraire ressemble à une traversée de la nuit ou de la mort. Luther lui-même a été tenté par le modèle mystique, sous la forme de l’apophatisme, démarche de négation qui impose de faire le vide en soi, afin d’approcher la présence inconnaissable de la transcendance58. Mais le Dieu de la kénose, devenu faible et immanent, ne peut être atteint que par l’intermédiaire des images. Cela explique que Luther ait renoncé à cette théologie59.
48L’enjeu de cette distinction entre Rembrandt et les mystiques concerne la définition du « goût de Dieu » comme approche expérimentale du divin, qui se développe pendant douze siècles dans la pensée chrétienne. Cette notion d’origine augustinienne demande d’effectuer un travail sur ses sensations : de passer de la sensibilité la plus matérielle à la sensibilité imaginative, voire à « une sensibilité insensible » et spirituelle, telle que la dénomme Origène. Cette psychologie mystique rend possible une démarche méditative et même contemplative. Les croyants sentent et goûtent les choses comme de l’intérieur. À l’époque moderne, cette psychologie constitue, tout autant que la rhétorique antique avec laquelle elle a noué des liens étroits, un cadre de pensée commun aux artistes et aux spectateurs60.
49La théorie du « goût de Dieu » peut être interprétée selon deux voies. Une voie intellectualiste, issue d’Origène et de Bonaventure : le goût est une jouissance de l’intellect où le moi, ébloui, se perd dans une réalité qui le dépasse. Dépassant toute image distincte, l’âme accède à la contemplation mystique61. La voie sensualiste s’enracine dans l’idée du Verbe incarné, tel que la présente Jean62. Elle a été développée par le Pseudo-Bonaventure : le goût suppose l’exercice des sens imaginatifs. Grâce à la vivacité de l’hypotypose, ils mettent en présence de Dieu. Le but ultime devient alors l’imitation des vertus63. La tension entre ces deux voies est condensée dans la formule de Nadal : le chrétien est « contemplatif dans l’action ». Engagé dans le monde, il pratique la prière pour accéder au détachement64.
50Parmi les sens imaginatifs ou spirituels, le goût correspond à une première forme de connaissance, voire d’union avec le divin. Sa place privilégiée tient à trois raisons. Organe de la gustation et de l’élocution, le goût rend possible l’appréciation de la saveur de la Parole65. Il donne à ressentir la suavité infinie de la grâce divine, qui comble sans assouvir66. Enfin sa douceur le lie intimement à la charité, autrement dit à une relation incarnée qui fonde la vie en société67.
51Ces raisons aident à comprendre la douceur des estampes de Rembrandt qui évoquent la Parole grâce aux effets de la pointe sèche. La densité des barbes ainsi que les points lumineux du papier produisent une ombre épaisse et chatoyante. C’est le cas de la Pièce aux cent florins (cf. cahier couleur, ill. VIII) et de la Petite tombe (ill. 54).
52Ces eaux-fortes donnent à voir ce qui échappe à la vision : comment le Verbe résonne en chacun, la manière dont il retentit dans l’intériorité, renvoyé loin de soi puis retourné vers soi, sans appropriation possible68.
53Le lieu de la Petite Tombe est sombre et indéterminé. La lumière, venant d’une lucarne du toit, se projette sur la dalle centrale. Éclairé par cette source, le Christ paraît renvoyer la lumière sur ceux qui l’écoutent69 sans même le regarder. Ouverts à l’extériorité, ils sont plongés en eux-mêmes. Les paroles christiques se transforment en une énergie rayonnante, celle d’une Voix qui appelle une réponse de la part des auditeurs. Recueilli, Jésus prononce des paroles dont seul l’effet est perceptible à travers les réactions diversifiées des auditeurs. Les malades de la Pièce aux cent florins espèrent guérir. Dans la Petite tombe, les personnes rassemblées, de conditions et d’âges variés, courtisans et dignitaires aussi bien qu’une mère avec ses jeunes enfants, se contentent d’écouter, complètement disponibles. Elles sont individualisées dans leur accueil de la Parole, même l’enfant du premier plan. Allongé sur le sol, il dessine comme pour épeler ce qu’il entend70. Attentif, il tente de s’incorporer les paroles et laisse résonner en lui le Verbe. Cette résonance est découverte d’une altérité insaisissable, qui répond et résiste en même temps aux attentes71.
54Unis par une même énergie, les individus sont si proches qu’il n’est pas aisé de les distinguer. L’estampe suggère le pouvoir infini du Verbe, qui dépasse les limites spatio-temporelles pour toucher potentiellement tout homme. En dépit des apparences, le lieu est ouvert, comme le montre à l’arrière-plan l’arrivée de personnes montant de la ville. Au premier plan à droite, le détail incongru de la paire de chaussures est le signe que l’image ne peut contenir l’assemblée, appelée à s’agrandir. Le fil de la toupie, qui se déroule sous les yeux du spectateur, indique que l’énergie du Verbe se déploie dans l’actualité de celui qui se laisse toucher par la douceur de l’image.
55Abstraction qui se rapproche des visions intérieures, la gravure est le médium par lequel Rembrandt a représenté Jésus prêchant. Cette image de l’écoute peut évoquer l’expérience du goût de Dieu, qui purifie le désir pour le rendre disponible au Verbe. Plus simplement, l’eau-forte renvoie à l’expérience de la foi qui naît de la Parole, au dire de Luther, fides ex auditu72. La méditation personnelle du texte l’emporte sur l’expérience sacramentelle. C’est en lisant l’Épître aux Romains que Luther fit sa découverte fondamentale : le juste vit par la foi73.
56Le rayonnement du Verbe est proche de l’expérience du sublime. En s’abaissant, le divin prend forme. Celle-ci reste mouvante, tel le corps du Christ dont il est impossible de cerner les contours, mais dont la grâce rayonne. De façon comparable, l’énergie de la Parole se communique à ceux qui s’attardent et écoutent. Le Christ s’offre à ceux qui s’adressent à lui de façon sincère : « Demandez et l’on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ; frappez, on vous ouvrira74. »
57Si la présence du Verbe comble le croyant, y a-t-il une nécessité de souffrir comme le Christ l’a fait ? L’imiter jusque dans sa Passion risque de faire sombrer dans le désespoir. Liée à la voie des œuvres, une telle exigence prescrit des efforts difficiles et même impossibles75.
Notes de bas de page
1 Ibid., p. 72.
2 Renouard de Bussierre Sophie, op. cit., p. 116 sq. Albrecht Dürer, Adam et Ève, 1504. Burin. Bibliothèque nationale de France, Paris.
3 Boespflug François, « L’audace de Rembrandt », propos recueillis par Camille Sourisse, Grande Galerie, Le Journal du Louvre, mars-avril-mai 2011, p. 56.
4 Renouard de Bussierre Sophie, loc. cit.
5 Albrecht Dürer, Christ aux limbes, 1512. Burin. Bibliothèque nationale de France, Paris.
6 Saint Girons Baldine, « Du grotesque comme risque du sublime, combat, alliance, fusion intime », in Jan Miernowski (dir.), Actes du colloque de Madison, Champion, 2014, p. 41-63.
7 Les grottesques, rapidement imités par les artistes.
8 Saint Girons Baldine, art. cité.
9 Arasse Daniel et TÖnesmann Andreas, La Renaissance maniériste, Paris, Gallimard, 1997, p. 9 sq.
10 Arasse Daniel, L’homme en jeu. Les génies de la Renaissance, op. cit., p. 250.
11 E. Panofsky note que le baroque est un mouvement essentiellement italien. Les autres pays européens « eurent tendance à demeurer maniéristes (dans une certaine mesure) à l’intérieur du cadre baroque », Panofsky Erwin, « Qu’est-ce que le baroque ? », art. cité, p. 44.
12 Calvin Jean, Commentaires sur le premier livre de Moyse, dit Genèse, Genève, Jean Gérard, 1554, II, 24.
13 Ibid., III, 6.
14 Matthieu 12, 3-32 ; Marc, 3, 28-30 ; Luc, 12, 8. Pour Luther, voir Lacoste Jean-Yves et Lossky Nicolas, « Foi », in Jean-Yves Lacoste (dir.), op. cit., p. 574.
15 Paul, Épître aux Romains, 5, 12.
16 Genèse, III, 20, Voir Renouard de Bussière Sophie, op. cit., p. 116.
17 Hegel Georg Wilhelm Friedrich, Esthétique, trad. Vladimir Jankélévitch, Paris, Champs Flammarion, 1979, t. II, p. 325.
18 Ibid., p. 331.
19 Hegel Georg Wilhelm Friedrich, Esthétique, trad. Jean-Pierre Lefebvre et Veronika Von Schenck, Paris, Aubier, 1997, p. 119 et p. 118. Voir Bras Gérard, Hegel et l’art, Paris, PUF, 1989, p. 33 sq.
20 S’appuyant sur la Ronde de nuit, G. Bras évoque le tragique de sa peinture comme un moment d’équilibre déjà habité par son dépassement, ibid., p. 43.
21 Hegel Georg Wilhelm Friedrich, La phénoménologie de l’esprit, Paris, Aubier, t. II, 1977, p. 256.
22 Baudelaire Charles, « De l’essence du rire et généralement du comique dans les arts plastiques » (1855), Paris, Éditions René Kieffer, 1925, p. 23-24. Effectivement dans le Nouveau Testament, le rire est associé au manque de foi. Il exprime soit la satisfaction égoïste, soit l’incrédulité face à un miracle, soit la moquerie, voire l’insulte face au Christ souffrant. Voir Dufour Xavier-Léon Dictionnaire du Nouveau Testament, Paris, Seuil, 1996, p. 477.
23 Baudelaire Charles, op. cit., p. 29.
24 Ibid., p. 37-38.
25 Ibid., p. 33.
26 Le dualisme de Baudelaire éclaire la démarche de Rembrandt, voir Frangne Pierre-Henry, op. cit., p. 143-144.
27 Ibid.
28 Voir supra, chap. xvii, p. 309-314.
29 Rousset Jean, La Littérature de l’âge baroque en France, Paris, José Corti, 1985. Frangne Pierre-Henry, op. cit., p. 268.
30 Hegel Georg Wilhelm Friedrich, Esthétique, trad. Vladimir Jankélévitch, op. cit., t. II, p. 351 et t. III, p. 254.
31 Hegel qualifie ainsi l’art classique, par opposition à l’art romantique, loc. cit.
32 Pour ce travail de la mort, voir Hegel Georg Wilhelm Friedrich, La phénoménologie de l’esprit, op. cit., t. I, p. 29, p. 164-166 ; Frangne Pierre-Henry, op. cit., p. 287, p. 294-296.
33 Hegel Georg Wilhelm Friedrich, Esthétique, trad. Vladimir Jankélévitch, op. cit., t. III, p. 219, p. 230.
34 Paul, Épître aux Romains, 9, 3.
35 Le Brun Jacques, op. cit., p. 54.
36 Ibid. p. 10 et p. 56. Luther Martin, « Cours sur Romains », op. cit., p. 75.
37 Ibid., p. 76.
38 Ibid., p. 77.
39 Thomas d’Aquin pense ainsi que le Christ n’aurait souffert que dans son humanité. Somme Théologique, III, q. 46, art. 8.
40 Les textes évangéliques sont ceux de Matthieu, 26, 36-46, Marc, 14, 32-42, Luc, 22, 39-46.
41 Réau Louis, op. cit., t. II, p. 427-428.
42 Hegel Georg Wilhelm Friedrich, La phénoménologie de l’esprit, op. cit., t. I, p. 164.
43 Luc, 22, 42.
44 Hegel Georg Wilhelm Friedrich, La phénoménologie de l’esprit, op. cit., t. I, p. 29.
45 Paul, Épître aux Philippiens, 2.
46 Paul, Épître aux Hébreux, 5, 8.
47 Rembrandt, Christ au jardin des oliviers, Ben. 626, v. 1649. Plume et encre avec un lavis brun. Fitzwilliam Museum, Cambridge.
48 Réau Louis, loc. cit.
49 Hegel Georg Wilhelm Friedrich, loc. cit.
50 Rembrandt, Christ au jardin des oliviers, Ben. 899, v. 1657. Plume et encre brune avec aquarelle blanche. Kunsthalle, Hambourg.
51 White Christopher, op. cit., p. 110.
52 Hegel Georg Wilhelm Friedrich, loc. cit.
53 Ibid., p. 166.
54 Frangne Pierre-Henry, op. cit., p. 290.
55 La comparaison entre la taupe et le mineur est faite par Shakespeare en Hamlet, I, 5, que Hegel cite en ce même passage de La phénoménologie de l’esprit.
56 Frangne Pierre-Henry, op. cit., p. 295.
57 Le Brun Jacques, op. cit.
58 Luther Martin, « Cours sur Romains », op. cit., p. 77-78.
59 Luther Martin, Œuvres, t. I, op. cit., note 1 p. 38, p. 1225.
60 Saint Girons Baldine, Le sublime de l’Antiquité à nos jours, op. cit., p. 67.
61 Le Brun Jacques, op. cit., p. 74. Augustin, La Trinité, op. cit., VIII, II, 4. Dekoninck Ralph, Ad Imaginem. Statuts, fonctions et usages de l’image dans la littérature spirituelle jésuite du xviie siècle, op. cit., p. 169.
62 Jean, 1re Épître, 1, 1.
63 Dekoninck Ralph, op. cit., p. 169 sq.
64 Nadal Jérôme, Contemplatif dans l’action, écrits spirituels ignaciens (1535-1575), Paris, Desclée de Brouwer, Bellarmin, 1994, cité par Dekoninck Ralph, op. cit., p. 165.
65 Paul, Épître aux Hébreux, 5, 4.
66 Bernard de Clairvaux distingue ainsi l’absorption de l’opération gustatrice, P. L t. 183, col. 660A, cité par Saint Girons Baldine, Le sublime de l’Antiquité à nos jours, op. cit., p. 70.
67 Clairvaux Bernard de, P. L t. 183, col. 567-569, cité par Saint Girons Baldine, ibid., p. 70-71.
68 Définition de la résonance donnée par Reichler Claude, « Réverbération et résonance dans la sculpture, ou quand l’artiste est à la fois il et tu », Colloque international Les cordes vibrantes de l’art. La relation esthétique comme résonance, Fondation Singer-Polignac, 13-14 juin 2018, [https://vimeo.com/275988994].
69 Santiago Paez Elena, op. cit., p. 125.
70 White Christopher, op. cit., p. 67.
71 Nancy Jean-Luc, « Résonances. Dialogue avec Sarah Nancy », conférence citée.
72 Lacoste Jean-Yves et Lossky Nicolas, art. cité, p. 574 ; Luther se fonde sur Paul, Épître aux Romains, 10, 17.
73 Cottret Bernard, op. cit., p. 39-41.
74 Matthieu, 7, 7.
75 Luther Martin, « Sermon sur la contemplation de la sainte Passion du Christ », in Œuvres, t. I, op. cit., p. 221-229.
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