Chapitre III. La simplicité d’une composition
p. 87-102
Texte intégral
1Observant ce qui existe de plus singulier dans la nature, Rembrandt met à l’épreuve le pouvoir de l’image. Vive et sensible, sa pointe s’adapte à l’unicité de chaque objet, comme pour saisir le kairos. L’adéquation de ses eaux-fortes est-elle un miracle à chaque fois renouvelé ou dépend-elle de techniques cachées ?
Illusion de l’improvisation et énergie
2Rembrandt prend de la distance vis-à-vis des conventions qui visent à dissimuler l’art dans le naturel. Van Hoogstraten évoque Fra Lippi qui « montrait si naturellement [la tristesse] que personne ne pouvait regarder ses œuvres sans quelque pitié1 ». L’art qui cache ses artifices touche universellement. Pour Van Hoogstraten comme pour Junius le naturel s’allie avec la mesure. S’inspirant de Quintilien et de Longin, Junius présente la vérité, la convenance (occasio) et le sublime (magnificentia, hupsos) comme les trois vertus essentielles à l’invention. Ces règles prescrivent la retenue : pour que l’effet de réel prime la beauté elle-même, l’artiste ne montre pas tout mais suggère. S’adaptant aux circonstances du sujet, il donne à ressentir des émotions justes. Le grand peintre vise la perfection d’un art qui s’inspire de la nature pour la parachever et qui efface toute trace de travail, pour donner à voir l’enargeia2. La condition essentielle est l’imagination. Puissance de vision, elle rend possible l’invention d’une idée picturale adaptée à son sujet, tout en se définissant par la clarté, la mesure et la bienséance3. En 1678, Van Hoogstraten se prononce lui aussi pour un sublime modéré. Cela revient à faire perdre sa puissance au kairos, en l’interprétant comme l’équivalent du « juste milieu4 ».
3Rembrandt s’éloigne de cette mesure. La vigueur du kairos paraît orienter sa recherche. Saisir le kairos, c’est donner l’illusion que l’impétuosité des passions commande la composition5. Cachant le secret de son élaboration, l’œuvre répond à la nécessité et paraît improvisée. De façon inhabituelle, Rembrandt représente aussi spontanément un sujet humble comme la Crêpière (ill. 15) et un sujet élevé tel Saint Paul en méditation (B. 1496). Les scènes sont comme croquées sur le vif. L’agitation des enfants et le trouble de Paul paraissent être à l’origine de la composition. L’effet d’improvisation concerne aussi la manière : les tailles précises et suggestives captent de façon synthétique les volumes et les expressions, tandis que l’arrière-plan n’est que suggéré.
4La simplicité devient l’absence apparente d’artifices, qui se présente comme une garantie d’authenticité. Loin de corriger l’imperfection de la nature, Rembrandt donne à ressentir l’énergie qui s’y manifeste : la force vitale des enfants impatients, la révélation qui bouleverse l’apôtre.
5Il semble ainsi comprendre le cœur de la pensée de Longin. Celui-ci affirme « le primat du mot propre sur le mot magnifique, car la trivialité est compatible avec le sublime, quand s’y manifeste l’adéquation parfaite de l’expression à la chose7 ». Rembrandt traite le sujet élevé avec la même négligence apparente que le sujet le plus modeste. Il renonce à la grandeur de l’expression pour sa justesse.
6La figure de Paul s’offre avec monumentalité sur une estampe presque aussi large que haute (24,2 × 20,3 cm). Entouré de nombreux livres entassés les uns sur les autres, auxquels les tailles profondément mordues donnent une forte densité, le saint s’accoude presque nonchalamment sur le livre sacré, ouvert devant lui. Il fait effort pour s’arracher à cette réalité comme s’il tentait de voir l’invisible. Les contrastes du clair-obscur soulignent ce mouvement. Le côté gauche de son corps, solide et puissant, est fortement mordu, alors que le côté droit a la légèreté d’une esquisse. Bien plus, des pages du livre aux cheveux du saint, tout est animé par un souffle invisible.
7D’un format beaucoup plus petit (109 × 78 mm), la Crêpière présente une manière plus minutieuse. Pourtant vêtue de sombre, la cuisinière paraît plus proche que les enfants qui l’entourent. Le travail des tailles fines et serrées, renforcé par l’absence de contour de la partie postérieure de son corps, lui donne un relief plus prononcé que les autres figures. Le spectateur saisit donc immédiatement la raison de l’agitation des enfants. Mais ce surgissement est modéré par les éclats lumineux et les ombres qui créent une continuité entre les différentes figures.
8La simplicité de l’œuvre de Rembrandt s’allie avec une diversité extrême. Unies dans une seule et même opération, les choses et leur expression artistique paraissent s’engendrer mutuellement. Magnifiée, la réalité n’émerge qu’à travers le travail pour la saisir. « La pensée reste une fois pour toutes attachée à son expression, qui n’est point l’enveloppe d’une pensée déjà conçue, mais quelque chose comme son corps glorieux8. » Le kairos prend un nouveau sens. Il devient l’à-propos qui se modèle sur la chose, sans que la règle de la bienséance ou l’idée de beauté n’ait à l’épurer. Transcendant le langage unifié de la manière, la pointe devient réceptive à l’objet et à l’émotion qu’elle évoque.
9L’improvisation cache un travail qui mêle imitation, étude de la nature et exercice de la gravure. Rembrandt réélabore le sujet traditionnel de la Crêpière9. Il donne une nouvelle vie au motif de la femme vue de profil : elle devient le centre de l’attention d’un groupe d’enfants qui jouent autour d’elle. Les dessins d’observation des années 1635-1645 que Rembrandt consacre aux mères et à leurs enfants aident à comprendre la variété et la vivacité des expressions10. Aidé par cette étude, Rembrandt nuance progressivement la gamme des valeurs. L’eau-forte ne prend sa pleine force qu’au deuxième état. La dynamique des reflets et des ombres fait passer insensiblement l’œil de la lumière à l’obscurité11.
10On découvre que l’estampe s’organise autour d’une spirale dont le cœur est constitué par les mains de la crêpière et qui se déploie, sans que le spectateur n’en ait une conscience claire. La construction est en effet masquée par le jeu du clair-obscur. Ne se réduisant pas au sens immédiat de l’image, à savoir l’agitation des enfants gourmands, la véritable source d’énergie est cachée. Le spectateur, déjà surpris de voir une petite surface contenir autant de vie, s’étonne d’être saisi par ce sujet trivial.
11Le burin de Jan Van de Velde II12 dont Rembrandt s’inspire surprend lui aussi. Mais cet effet est peu durable, car il repose sur des dispositifs conventionnels. Inséré en bas de l’estampe, un texte littéraire embellit la scène du quotidien. La citation latine de Martial incite à se lever, alors que le boulanger commence son travail et que les coqs chantent. D’autre part le clair-obscur dramatise la figure de la vieille femme. Dans la densité de la nuit, son profil se distingue nettement grâce à la source de lumière utilisée comme un projecteur. Tenant un couteau pour éplucher une pomme, elle est étrange et même sinistre13. L’étonnement se dissipe, dès qu’on découvre la gaieté des enfants qui se régalent, nullement effrayés par la femme à laquelle ils sont indifférents.
12Devenue diurne, la scène de la Crêpière est dépouillée de tout texte. Résistant aux explications, le mystère de cette estampe réside dans sa simplicité. Longin utilise la métaphore du clair-obscur pour expliquer que le sublime cache l’art dans le naturel. Il s’agit d’écarter le soupçon de « piégeage » que feraient suspecter des artifices trop visibles.
« La même chose à peu près arrive dans la peinture. Car, bien que les ombres et les jours, affectant les couleurs, soient distribués sur le même plan, c’est la lumière qui se présente d’abord à la vue : elle ne se contente pas de donner du relief mais semble également beaucoup plus proche. De même, les manifestations de la passion et le sublime dans le discours se rapprochent de nous par une affinité naturelle, comme par leur propre éclat, et se montrent toujours avant les figures, dont ils relèguent l’art dans une ombre qui le tient caché14. »
13L’ombre voile l’artifice, alors que la lumière manifeste l’évidence des visions dont la force émotive s’impose au regard15. De façon analogue, Rembrandt fait apparaître l’expressivité des gestes, mais dissimule la construction qui, en deçà de ces manifestations émotionnelles dispersées et éphémères, communique l’énergie au spectateur.
14Au centre de l’attention, la femme surgit et, en même temps, se fond dans la scène. Le cœur de la spirale est visible, sans que sa fonction n’apparaisse clairement.
15Bien que nocturne, l’espace de Van de Velde offre une plus grande maîtrise. Ayant conscience que la pièce a des dimensions déterminées, le spectateur peut l’explorer pour découvrir des objets éloignés. L’espace de Rembrandt est contracté : très rapprochées, toutes les figures ont quasiment la même taille. Alors que la scène a lieu en plein air, l’arrière-plan arrête le regard. Le jeu souple et varié des tailles esquisse un objet peu distinct, sans doute un auvent formé d’une bâche tendue sur des branchages16. Coupé par les limites de la représentation, son caractère mouvant suggère la légèreté aérienne d’un jour lumineux. Contracté et ouvert, clairement perceptible et sans limites définies, aspirant vers le haut et ramenant au sol, l’espace présente un ensemble de tensions.
16Van de Velde évoque le monde des repères perceptifs, dans lequel le sujet varie son point de vue en se déplaçant. L’espace indéterminé de Rembrandt fait entrer dans le monde de l’affect. Oscillant entre le rire, la peur ou la tristesse, le spectateur se sent transporté par une énergie transpersonnelle. Les passions les plus possessives deviennent réceptivité à l’altérité. Cette conversion des passions vitales s’apparente à l’effet du sublime qui parachève le dessaisissement et le saisissement : l’enthousiasme qui fait éclater les frontières entre moi et l’autre. L’œuvre représente la scène, non pas d’une manière impersonnelle complètement subordonnée au sujet, mais telle que le spectateur doit la ressentir pour en reconnaître la vérité. Sa sensibilité est transformée. Contraint de se mettre au point de vue d’un autre, il s’identifie à ce qu’il contemple dans un mouvement où action et passion ne se distinguent plus. Il croit être la cause de l’œuvre, tellement elle remodèle sa manière de sentir. « Grâce à sa nature, notre âme, sous l’action du véritable sublime, s’élève en quelque sorte, exulte et prend l’essor, remplie de joie et d’orgueil comme si c’était elle qui avait produit ce qu’elle avait entendue17 », écrit Longin.
17Dans un autre registre, Saint Paul en méditation offre un exemple frappant de cette spontanéité travaillée. Rembrandt réalise un dessin à la sanguine18, qu’il reporte partiellement sur la plaque de cuivre. L’estampe complète ce qui est inachevé dans ce dessin : la modulation du clair-obscur et l’expression du visage. Paradoxalement elle accentue aussi son caractère d’esquisse. Le raccourci audacieux du bras gauche s’appuyant sur le livre se retrouve sur l’eau-forte19. Son effet gagne en puissance, car la gravure supprime la suggestion de la profondeur d’un arrière-plan.
18Ce « mouvement dynamique suggèr[e] qu’il [Paul] vient d’être l’objet d’une révélation subite20 ». De façon inhabituelle, la lumière de la Parole ne donne pas à voir le contenu déterminé de la vision, mais son effet bouleversant sur Paul. Cette image s’apparente à la recherche du transcendantal. Mystérieuse, l’essence divine ne se donne à connaître que par la rupture qu’elle introduit dans l’expérience spatio-temporelle.
19La suppression de l’attribut, l’épée qui signifie le martyre21, contribue à modifier la représentation des saints22. L’image de dévotion présentant une figure isolée est remplacée par une scène narrative. Le saint autrefois lointain et presque intemporel devient incarné, partie prenante d’une scène dont l’actualité frappe. À la différence de ce que conseille Van Hoogstraten pour réaliser un récit pictural, Rembrandt ne choisit pas un épisode crucial23, pas plus qu’il ne condense plusieurs épisodes successifs24. Il privilégie un instant générique qui représente l’ensemble de la mission de Paul et même un présent indéterminé, qui n’est pas situé dans une séquence chronologique précise. Aussi Rembrandt détache-t-il l’effet de surgissement et de rupture, propre à l’image, de la continuité temporelle et logique, propre au discours.
20Cette estampe tient de la recherche exploratoire. La figure de Paul s’apparente en effet davantage au dessin qu’à l’estampe. Très codifié, le portrait gravé a alors pour but l’identification de la profession et du statut du modèle25. Mais dans le croquis fait d’après nature, le regard de la figure peut s’adresser au spectateur comme lors d’une relation directe, car la lecture de l’image n’est pas encore médiatisée par des attributs ou des allégories. L’effet produit par l’eau-forte Saint Paul en méditation est comparable. Elle présente la spontanéité de l’esquisse, comme si Paul avait sa révélation dans le présent du spectateur. En inventant le langage du graveur, Rembrandt prolonge le geste exploratoire du dessin. Ce faisant, il perfectionne l’image en lui apportant des nuances. En même temps, il la dépouille du superflu.
21Son œuvre gravé manifeste une recherche d’authenticité. L’image tend à se simplifier : rien ou presque ne s’interpose plus entre le spectateur et la force émotionnelle qui atteste la présence du divin. La difficulté tient à ce que le divin a besoin d’un témoin pour se révéler. Pourtant fortement incarné, Paul devient une présence presque indéterminée. À peine identifiable, la figure évoque un homme du Livre, mais comment savoir qu’il s’agit de l’évangélisateur des païens ? En ce sens, l’eau-forte répond aux exigences de la représentation des saints, telles que Luther les formule. Constatant que les fidèles ont besoin de médiations sensibles, le Réformateur conseille aux artistes de réinterpréter les thèmes de l’iconographie catholique de façon à les détacher du culte des saints. La Vierge à l’Enfant ne doit plus évoquer la sainteté de Marie, mais seulement la proximité aimante de Dieu envers l’homme26. Cependant dépersonnaliser les figures traditionnelles prive l’image de sa vivacité émotionnelle. Pour que se joue le processus d’identification nécessaire à l’expérience du sublime, le spectateur doit s’appuyer sur des signes de reconnaissance. Ni la figure de Paul ni les études d’expression n’en présentent de clairs. Aussi l’énergie de ces estampes tourne-t-elle à vide.
22Dans les années 1630, Rembrandt représente des actions spectaculaires qui correspondent à la péripétie tragique27. Il met aussi à l’épreuve l’effet de surgissement propre à l’image28. Dans les deux cas, l’estampe évoque un instant : celui de la compréhension ou de la rupture. Par ce travail, il met au point une composition plus simple où les figures sont traitées comme des apparitions. L’émotion vient désormais de la mise en suspens du drame29.
L’impossible unité de l’image
23La composition élaborée par Rembrandt, qui abrite des contrastes, voire des disjonctions, est d’une simplicité complexe. D’après son étymologie, le simple désigne un acte. Il s’agit de « la composition la moins composée, si l’on peut dire, la sunthesis originaire ». Le simple « renvoie non à une essence, mais à une fonction opératoire30 ».
24Van Hoogstraten analyse ce qui fait la puissance d’une telle simplicité. Les œuvres de Rembrandt présentent une unité inhabituelle, car l’effet d’ensemble prime la finition des parties. De cette façon la Ronde de nuit « donne à toutes les œuvres près d’elle l’aspect de cartes à jouer31 ». Une et simple, l’image dévoile le principe qui l’anime en faisant apparaître un « mouvement instantané lequel exprime surtout l’action de l’histoire ». Cette dynamique s’incarne dans la progression de la jeune fille vivement éclairée, qui fait reculer et avancer les autres figures. Composer suppose de faire apparaître l’espace qui rend possible le mouvement. C’est organiser la représentation selon le principe de la « distinction » ou « perceptibilité32 ». Les premiers plans sont traités de façon irrégulière, par des accidents qui, en accrochant la lumière, permettent à l’œil de se fixer. Par différenciation, les lointains, traités de façon plus finie et lissée, donnent l’impression de s’échapper33.
25Dans les estampes de Rembrandt, la perceptibilité s’exprime par les contrastes du clair-obscur, qui vont de pair avec les différents degrés d’achèvement de l’image. Dans la Crêpière, la figure de la cuisinière est ainsi celle qui a le plus de corps et qui est la plus encrée, ce qui lui donne du relief. Au contraire l’auvent de l’arrière-plan apparaît impalpable.
26Pour Van Hoogstraten, l’intérêt de la « distinction » est en suscitant l’illusion de la profondeur d’intensifier l’effet de présence. L’œuvre produit alors l’évidence ou l’enargeia. Même de loin, l’essentiel apparaît clairement et s’impose comme s’il était réel34.
27Saint Jérôme lisant dans un paysage italien (cf. cahier couleur, ill. VI) exploite différemment ce principe. Organisée selon l’opposition entre la lumière du second plan et l’ombre du premier plan, cette estampe présente une grande unité tonale modulée par les ombres. Mais la « distinction » ne correspond pas à une différence de localisation spatiale. C’est un principe d’étonnement plus que de persuasion.
28Le clair-obscur révèle en effet des tensions, voire des anomalies. Elles concernent principalement la figure du saint. Apparemment intégrée dans le paysage, elle perturbe en réalité la logique du sensible. L’église de l’arrière-plan est ainsi représentée plus précisément que n’est le modelé de la figure du lion et surtout que le corps de Jérôme, seulement suggéré. Dans le cas du lion, cet inachèvement permet à la figure de se fondre dans le ton dominant, tandis que la pointe sèche lui donne un relief qui le rend plus distinct.
29Mais le cas de Jérôme est inexplicable : son visage est précisément évoqué, alors que son corps transparent se dématérialise. L’observant encore, on constate une deuxième anomalie. L’ombre protège Jérôme, mais sans le dissimuler au regard.
30Dans Saint Paul en méditation (B. 149), le principe de distinction n’est pas bien maîtrisé, car il n’y a quasiment qu’un plan où le divin fait irruption. Paul s’arrache à son activité d’écriture comme s’il ne s’appartenait plus à lui-même. Saint Jérôme présente au contraire un espace différencié où le principe d’animation est ténu. Au sein du paysage grandiose où le saint lit paisiblement, la Révélation a lieu, presque imperceptible. L’image s’est complètement séparée du modèle théâtral et rhétorique. Le clair-obscur suffit à l’évocation du surnaturel.
31La spatialité et la temporalité ne se réduisent ni au lieu ni à l’instant du surgissement. L’ensemble de l’image, même l’église dans sa massivité imposante, est soumis à la durée de la nature, où les choses semblent presque immobiles. L’un des seuls indices narratifs est l’attitude du lion qui, vigilant, tourne la tête vers Jérôme. Cette lenteur quasi figée dissimule l’événement, dont même Jérôme ne s’aperçoit pas : quelque chose en lui arrache son corps au sensible.
32L’espace lui aussi acquiert une plasticité, à l’image de la « matrice invisible et sans forme de toute forme, ce que Platon appelait la chôra35 », qui est comme façonnée par les formes qu’elle rend visibles. La représentation spatiale, disjointe et contradictoire, rend perceptible une telle matrice. La distance devient proximité et la proximité insaisissabilité. L’église semble proche, alors que l’arbre mort s’enfonce dans l’ombre et lance de nouvelles branches qui surgissent hors de l’image. En se modelant sur les figures, l’espace peut accueillir ce qui n’appartient pas à son ordre. Aussi l’ombre contient-elle la lumière dans sa pureté essentielle. Celle-ci rend visible la forme des corps en les séparant de leur matière, tel le corps de Jérôme qui ne semble plus être de chair.
33Cette plasticité a des conséquences sur la découverte de l’image qui devient progressive. Cela remet en cause les conventions de simplicité et de clarté, issues de la tradition de la mimésis d’Aristote. Tout en supposant la variété, l’harmonie du beau est saisie dans l’unité d’un regard, à l’image d’un corps vivant36. En jouant sur la discontinuité, Rembrandt offre l’expérience d’une désorientation. Le spectateur ne peut pénétrer l’ombre très dense du premier plan et est ébloui par la lumière qui dématérialise le corps du saint. Dessaisi de ses prétentions à un regard dominateur, il doit observer progressivement. Pour se laisser percevoir, l’unité spatiale demande une certaine durée.
34La complexification de l’espace et du temps rend possible une évocation des conditions de possibilité du sublime plus aboutie que celle qu’en donne la figure du témoin. Mais cette évocation menace l’unité de l’image. Le surgissement du sublime apparaît en effet à travers une temporalité et une spatialité originaires. Celles-là ne correspondent pas à une perception constituée, mais aux conditions de la perception – telles que les présente Kant – avant même qu’elles ne soient synthétisées par l’entendement et l’imagination. Cette expérience est à la limite de l’impossible, car elle confronte non pas au temps sériel des conditions de détermination, mais à celui des ruptures, où le principe de succession est mis à mal. Apparaît alors non pas l’espace appréhendable par parties, mais « ce par quoi les formes se forment, se découpent, s’enlèvent » et qui n’a aucune forme déterminable37. Dans les ruptures de l’image apparemment la plus paisible, se donne à ressentir le risque d’une destruction de la synthèse du donné, qui livrerait le sujet au chaos du divers sensible.
35Pierre et Jean à la porte du Temple (ill. 17 et cahier couleur, ill. VII) présente également un suspens de l’action. L’enjeu est différent car il s’agit d’appeler à la compassion. Le principe de distinction est particulièrement visible. Les deux plans présentent un contraste entre l’ombre du seuil, lieu de l’Incarnation, où Pierre et Jean parlent au mendiant, et la vivacité aérienne de la cour du Temple, où les corps des fidèles en prière se transforment en lumière. L’unité de l’image s’exprime par l’harmonie du trait et de la tache. Les barbes de la pointe sèche ont une grande douceur à laquelle les épreuves sur papier japon donnent le plus d’intensité. Sous l’effet de la pointe devenue pinceau, la sensualité de l’ombre exalte la chaleur de la lumière orientale, évoquée par le ton doré du support. Or la laideur de Pierre perturbe cet équilibre : barbe hérissée, nez proéminent, yeux dissymétriques. Cela crée une rupture dans l’harmonie colorée que Rembrandt a réussi à imposer38. Heurtant à la fois le bon goût et la règle de la convenance, qui prescrit d’accorder la beauté physique à la vertu, cela est incompréhensible pour les collectionneurs et pour les croyants.
36Si l’on suit le regard de Pierre, se produit un deuxième choc. Dans la plénitude de l’ombre, le profil perdu du mendiant dont les yeux sont imperceptibles dérange par l’effet de vide qu’il produit. La rencontre entre le lépreux et les apôtres est une pure mise en présence. Aucun miracle n’a lieu, rien ne se passe, sinon un échange de regards. Dans sa théorie et sa pratique, Van Hoogstraten privilégie le moment de la péripétie pour sa complexité émotionnelle et sa valeur édifiante39. Rembrandt amplifie la puissance du choc. L’expression désapprobatrice des deux riches Juifs qui regardent le mendiant en face, alors que le spectateur ne peut le voir, renvoie comme un écho de cet étonnement.
37Cette estampe conteste la fonction d’agrément des arts visuels. Cette image qui déplaît mais réussit à toucher exerce une violence sur le spectateur.
« Assurément partout, accompagné du choc, le merveilleux toujours l’emporte sur ce qui vise à convaincre et à plaire, puisque aussi bien le fait d’être convaincu, la plupart du temps, nous en restons maîtres ; tandis que ce dont nous parlons ici, en apportant une emprise et une force irrésistibles, s’établit bien au-dessus de l’auditeur40. »
38Le sublime transporte en privant de résistance, alors que le beau se donne à contempler librement à ceux qui le désirent. La belle composition s’adapte à ce que la sensibilité peut supporter41. En perturbant celle-ci, Rembrandt l’ouvre à des forces qui ne sont pas à sa mesure. Le choc des contraires produit une disjonction. La douceur de l’ombre habite le vêtement de Pierre, devenant symbole de l’accueil d’un Dieu aimant42. Cette ombre produit de la lumière qui se projette sur le mendiant. Comment cette douceur tendre et sensuelle, qui illumine les êtres méprisés, est-elle conciliable avec l’austérité et la rudesse du visage de Pierre ?
39La composition incite à se mettre au point de vue du lépreux. Par sa position au seuil de l’image, celui-ci est une « figure de bord » qui suggère comment lire ce qui est donné à voir43. Sa présence troue pourtant l’image, comme si sa laideur échappait à toute représentation. Cela peut horrifier le spectateur et empêcher le processus d’identification. Rembrandt déjoue l’efficacité des dispositifs esthétiques habituels. Déstabilisé, le spectateur doit faire un effort. Accepter de prendre humblement la place d’un homme qui inspire le dégoût ne va pas de soi. On comprend alors l’intérêt d’une image qui ne se laisse pas immédiatement saisir. Imposant une certaine durée d’observation, elle donne du temps pour se défaire de ses préjugés. Le miroir de lui-même que l’expression du visage des deux riches Juifs renvoie favorise ce travail.
40Lever les yeux comme le fait le mendiant invite à se laisser porter par les lignes de force. La direction donnée par les colonnes monumentales, qui ne soutiennent rien et semblent être de purs index du ciel44, aide à découvrir que les deux plans sont reliés par la porte du Temple. Celle-ci forme un cadre qui relie architecturalement et spirituellement la première scène à la seconde, la cour où a lieu une cérémonie. Il s’agit du même Dieu, bien qu’il se présente de façon contrastée, majestueux et lointain pour les Juifs, intime et compatissant pour le mendiant. Cette complexité apporte l’indice que cette deuxième face du divin, douce et rude, a une unité. Associés, les contraires forment comme un tableau dont le cadre est la porte. La scène de la rencontre est ainsi magnifiée. Cela atteste l’existence du lien nouveau que la juxtaposition des opposés crée entre eux. Tout en permettant de comprendre l’unité du divin, l’estampe incite à la compassion, sans même montrer le visage du lépreux. Par le chemin qu’elle propose au regard, elle actualise la définition déjà découverte : l’humanité atteint le sublime dès lors qu’elle est unie et grandie par une même conscience de sa faiblesse.
41L’unité disjonctive de Rembrandt s’éclaire, si on la confronte avec la cinquième source du sublime : la composition digne et élevée du discours, ou épisynthèse, qui intègre l’arrangement des mots, le rythme et l’harmonie45. En articulant les éléments qui s’opposent, le poète donne l’illusion que le langage des émotions détermine l’ordre formel du poème. Longin pense le principe de l’épisynthèse à travers le paradigme musical. Ce dernier concilie unité et multiplicité, forme et dynamisme. Alors que « les formes se font et se défont », le rythme « recueille ce divers épars, en perpétuel mouvement46 ». Le rythme est une organisation provisoire et improvisée, jaillissante et imprévisible, dont la mesure est « le kairos, la rupture décisive qu’il faut saisir pour s’adapter à l’occasion singulière47 ».
42En écrivant ses Discours de l’art poétique, publiés en 1587, et ses Discours du poème héroïque, publiés en 159448, le Tasse réactualise l’épisynthèse49. Il présente son style comme « un parler disjoint » – parlar disgiunuto. Supprimer les transitions et introduire des métaphores audacieuses créent un effet de rupture et d’irrégularité, qui simule l’enthousiasme des passions. Les contraires produisent le choc, nécessaire à l’émerveillement. Donnant forme à son récit à travers la dynamique d’une intrigue, le poète imite la nature qui unifie les éléments contraires pour composer les êtres vivants. L’unité est multiple, voire contradictoire car seule la cohésion des contraires leur apporte une structure50.
43Ce « parler disjoint » trouve son équivalent pictural dans l’œuvre de maturité du Titien telle que l’interprète Vasari51. Caractérisée par la technique de la tache – pittura di machia –, elle utilise de larges touches apparentes. Tout comme les vers de l’épopée adoptent la parataxe, le matériau pictural renonce au dispositif de modulation et de liaison du clair-obscur. La lumière et l’ombre se juxtaposent, voire s’éclipsent l’une l’autre. Or Titien a servi de modèle à la peinture de maturité de Rembrandt, qui différencie plus encore le matériau, comme le montre son usage du principe de la distinction52. À celui qui prend du recul, cette peinture donne une représentation du réel plus convaincante que ne le fait une manière très achevée53. Les eaux-fortes, en associant le trait le plus évanescent à la tache la plus informe, transforment cet effet en un pouvoir d’étonnement.
44L’évocation que Longin fait du clair-obscur aide à analyser sa fonction dans cet œuvre gravé. La profondeur de l’obscurité, jointe à la violence de l’éblouissement, produit une disjonction, à même de faire advenir un sublime : une force qui fait irruption dans l’ordre de la nature sans en dépendre totalement. Aussi la démarche de Rembrandt est-elle mue par une prise de risques. Élaborer une composition qui repose sur la simplicité du clair-obscur aide à explorer la puissance du sublime, mais met en danger l’unité de la représentation. C’est un tel risque que refusent d’assumer les conceptions de l’harmonie de la fin du xviie siècle, le « tout-ensemble » de Roger de Piles54 autant que le « bel effet » de Van Hoogstraten. L’unité du tableau tient au fait que, passant insensiblement d’un objet à un autre, le regard synthétise l’image en un seul coup d’œil. Si les parties prennent leur autonomie, cela menace le principe de constitution de l’image, mais aussi le sentiment de plaisir et de quiétude qu’elle apporte. Au contraire le sublime, évoqué par Longin et cultivé par le style magnifique du Tasse, laisse à chaque élément son irréductible différence, en associant sans moyen terme les extrêmes.
45Se laisser inspirer par le sublime, c’est créer les conditions de l’éblouissement et donc compromettre la vision. Pour le Tasse, l’émerveillement du sublime est pourtant une connaissance. Il relève de la phantasia, la capacité à transmettre les concetti, les images-idées du poète55. Relisant Aristote, le Tasse découvre que la phantasia est proche de la métaphore, qui est une disposition naturelle à la vision : « bien métaphoriser, c’est voir le semblable56 ». Capacité à saisir les ressemblances, cette disposition permet les rapprochements les plus inédits. Le Tasse la considère comme étant au fondement de la connaissance poétique. Le mode de pensée figurée rend possible une « bonne » confusion, c’est-à-dire un mode de composition qui ne fait pas perdre leur forme aux choses, mais leur en apporte une nouvelle, condensant ainsi tous les possibles57.
46Après avoir utilisé la métaphore comme disposition à la vision, le poète utilise la figure de la métaphore « qui expose les choses en acte58 ». Elle permet de transcrire le concetto dans la matière du discours. Le Tasse confond ainsi l’enargeia avec l’energeia, l’évidence avec l’énergie59. Unissant le « vraisemblable » et le « merveilleux60 », l’unité disjonctive fait voir ce qui est impossible selon la modalité du possible. Elle crée l’étonnement de la meraviglia : le plaisir de la découverte, qui consiste à comprendre intuitivement plus de choses que n’en dit explicitement le poète61.
47Pierre et Jean à la porte du Temple tient de la métaphore. Rapprochant la laideur et la bonté, l’ombre et la lumière, de telle sorte qu’elles mêlent leurs significations, cette œuvre étonne. Inédite, l’iconographie reste proche du texte biblique. Le visage comme inachevé du mendiant est lumineux, alors que Pierre, au corps fortement modelé, lui parle au nom du Christ incarné, en l’enveloppant de son ombre62. Par contraste avec la Loi juive qui réprouve et exclut, cette ombre miraculeuse représente l’ordre du Verbe et de la charité. La lumière de l’arrière-plan, qui rend évanescents les sacrifices des Juifs, devient le signe d’une Loi inefficace, conformément à l’Épître aux Hébreux63 : « N’ayant, en effet que l’ombre des biens à venir, non la substance même des réalités, la Loi est impuissante avec ces sacrifices. »
48Seul le Christ qui a accompli le sacrifice parfait est « le grand prêtre céleste », « capable de sauver d’une manière définitive ceux qui par lui s’avancent vers Dieu, car il est toujours vivant pour intercéder en leur faveur64 ». Indice que l’image est métaphorique, Rembrandt confond ce qui est censé s’exclure : les tailles quasi immatérielles représentent l’ordre de la chair, alors que les corps fortement modelés évoquent celui de l’esprit. « Ainsi la gravure, par sa simplicité et sa netteté, nous place au passage même d’alertes inversions. Le rêveur devant une telle image est en état d’imagination ouverte65. »
49Abstraite mais créant un effet de réel, l’eau-forte donne à voir des images impossibles. La puissance de vision du spectateur est sollicitée. Incitée à donner des valeurs paradoxales à la lumière et à l’ombre, elle s’affranchit des symboles habituels pour devenir créative.
50Invitant à devenir visionnaire, les estampes de Rembrandt ont-elles un effet comparable à la meraviglia ? Celle-ci permet au lecteur de participer à « l’esprit de finesse » du poète, donc de cultiver « le vestige de la divinité dans l’âme humaine66 ».
Notes de bas de page
1 Van Hoogstraten Samuel, op. cit. [179].
2 Junius Franciscus, op. cit., III, 1, 15 et III, 4, 7 ; Longin, op. cit., III, 5 ; Quintilien, op. cit., IV, 2, 61f.
3 Junius Franciscus, op. cit., I, 1.
4 Van Hoogstraten Samuel, op. cit. [178-179].
5 Longin, op. cit., XVIII, 2.
6 Rembrandt, Saint Paul en méditation, B. 149, I (1) d’après le N. H. D., v. 1629. Eau-forte. Bibliothèque nationale de France, Paris.
7 Saint Girons Baldine, Fiat Lux, une philosophie du sublime, op. cit., p. 234.
8 Saint Girons Baldine, Fiat Lux, une philosophie du sublime, loc. cit.
9 Adriaen Brouwer peignit une scène proche, que Rembrandt possédait et qui a pu l’inspirer. White Christopher, op. cit., p. 176.
10 Renouard de Buissière Sophie, op. cit., p. 145.
11 Une telle dynamique caractérise le clair-obscur de Rembrandt, d’après Max Milner, L’envers du visible, essai sur l’ombre, Paris, Seuil, 2005, p. 134 sq.
12 Jan Van de Velde II, Vieille femme pelant une pomme, v. 1626. Burin et eau-forte. Rijksmuseum, Amsterdam
13 Ackley, Clifford. S., op. cit., p. 102.
14 Longin, op. cit., XVII, 2-3, trad. Baldine Saint Girons, Fiat Lux, une philosophie du sublime, op. cit., p. 171.
15 Dans ce même passage Baldine Saint Girons rapproche Du sublime, XVII, 3 de L’Institution oratoire, VI, 2, où Quintilien précise que l’éclat des visions « relègue dans l’ombre la discussion des faits ».
16 Renouard de Bussierre Sophie, op. cit., p. 145.
17 Longin, op. cit., VII, 2. Voir aussi Burke Edmund, op. cit., I, 17.
18 Rembrandt, Saint Paul en méditation, Ben.15, v. 1629. Sanguine, rehauts de blanc-gris et lavis d’encre de Chine. Musée du Louvre, Paris.
19 Renouard de Bussierre Sophie, op. cit., p. 81.
20 Renouard de Bussierre Sophie, loc. cit.
21 Seule la présence de l’épée sur le dessin préparatoire a permis d’identifier le sujet de cette estampe, ibid.
22 À tel point que cette transformation n’a pas été suivie par les contemporains de Rembrandt et est encore énigmatique pour les critiques. Tümpel Christian, Rembrandt, Études iconographiques, trad. Cécile Michaud, Marie Schirer, Roland Recht, Paris, Gérard Montfort Éditeur, p. 34.
23 Comme le fait le Caravage avec sa Conversion de Paul sur le chemin de Damas, 1601. Santa Maria del Popolo, Rome.
24 Rembrandt procède à une telle condensation dans la Décollation de Jean-Baptiste (ill. 33) où les épisodes précédents et suivants, la danse de Salomé et le transport de la tête du saint sur un plateau, sont évoqués par des indices. Van Hoogstraten Samuel, op. cit. [178-179].
25 Brejon de Lavergnée Barbara, op. cit., p. 96.
26 Cottin Jérôme, Le regard et la parole, une théologie protestante de l’image, Genève, Labor et Fides, 1994, p. 273.
27 Dans la Grande résurrection de Lazare (B. 73), la Descente de Croix (B. 81) et l’Annonciation aux bergers (B. 44).
28 Dans Saint Paul en méditation, La Chute de l’homme (B. 28) ou Joseph racontant ses songes (B. 37).
29 Renouard de Bussierre Sophie, op. cit., p. 164.
30 Saint Girons Baldine, « La révolution longinienne : l’union du sublime et du simple » art. cité.
31 Van Hoogstraten Samuel, op. cit. [176-177] ; Blanc Jan, op. cit., p. 224-227.
32 Van Hoogstraten Samuel, op. cit. [307-308].
33 Selon Ernst van de Wetering, cette manière de faire propre à Rembrandt n’a sans doute jamais été utilisée par Van Hoogstraten, car elle heurtait les conventions qui prescrivaient d’adopter une manière lisse et idéalisée, The Painter at Work, Amsterdam, Amsterdam University Press, 1997, p. 181.
34 Van Hoogstraten Samuel, op. cit. [189].
35 Nau Clélia, op. cit., p. 89-90.
36 Van Hoogstraten Samuel, op. cit. [116].
37 Nau Clélia, op. cit., p. 89.
38 Voir supra, chap. i, p. 18-21.
39 Blanc Jan, op. cit., p. 182 ; Van Hoogstraten Samuel, op. cit. [119].
40 Longin, op. cit., I, 4.
41 Van Hoogstraten compare le tableau réussi à un plat qui éveille et séduit les sens. Il réussit à capter l’attention, sans jamais lasser. Seule une composition équilibrée, par le nombre mesuré d’informations qu’elle donne, par ses couleurs, variées mais non multiples, rend possible un tel plaisir. Blanc Jan, ibid., p. 262-266.
42 « L’Esprit Saint viendra sur toi et la puissance du Très-haut te couvrira de son ombre », annonce Gabriel à Marie, Luc, I, 35.
43 Arasse Daniel, On n’y voit rien, Paris, Denoël, 2000, p. 82. Robert. W. Baldwin observe que cette place du mendiant, qui en fait un substitut du spectateur dans l’image, est inédite dans l’iconographie, art. cité, p. 129.
44 Il s’agit des Yakhin er Boaz de bronze, seuls vestiges du premier Temple de Salomon, détruit en 587 av. J.-C., Renouard de Bussierre Sophie, op. cit., p. 335.
45 Longin, op. cit., XXXIX à XLIV.
46 Nau Clélia, op. cit., p. 85.
47 Ibid., p. 83-84.
48 Il élabore une synthèse entre la tradition du sublime issue de Longin et de Démétrios de Phalère et la réflexion d’Aristote sur la tragédie.
49 Nau Clélia, op. cit., p. 137, p. 178.
50 Graziani Françoise, « Introduction », in Tasse le, Discours de l’art poétique. Discours du poème héroïque (1587, 1594), Paris, Aubier, 1997, p. 36 et p. 28.
51 Dans sa Vie du Titien, incluse dans la seconde édition des Vies en 1568. Nau Clélia, op. cit., p. 145.
52 Van de Wetering Ernst, The Painter at Work, Amsterdam, Amsterdam University Press, 1997, p. 161-184.
53 Écrivant à Huygens, Rembrandt affirme à propos d’une de ses peintures de jeunesse qu’il est nécessaire de prendre du recul, « Lettre à Huygens du 27 janvier 1639 », in Walter L. Strauss et Marjon Van der Meulen, op. cit., p. 167.
54 Roger de Piles le définit ainsi : « C’est une subordination générale des objets les uns aux autres, qui les fait concourir tous ensemble à n’en faire qu’un », Cours de peinture par principes (1708), Paris, Gallimard, 1989, p. 66.
55 « Le poète est faiseur d’images à la manière d’un peintre parlant, en quoi il ressemble au divin théologien qui forme des images et prescrit de les faire » écrit le Tasse, op. cit., p. 175.
56 Aristote, Poétique, op. cit., 1459a4-8.
57 Graziani Françoise, op. cit., p. 43.
58 Tasse le, op. cit., p. 327.
59 Cette confusion se retrouve tout au long des Discours, voir par exemple, op. cit., p. 126.
60 Le Tasse forme le concept de « merveilleux vraisemblable », op. cit., p. 182-184.
61 Graziani Françoise, op. cit., p. 46.
62 « De l’or ou de l’argent, je n’en ai pas ; mais ce que j’ai, je te le donne, au nom de Jésus-Christ le Nazaréen, marche ! », Luc, Actes des apôtres, III, 1-10.
63 Paul, Épître aux Hébreux, 10, 1.
64 Ibid., 7, 27, 25.
65 Bachelard Gaston, Le droit de rêver, Paris, PUF, 1970, p. 90.
66 L’expression est de Tesauro, l’un des fondateurs du concettisme, influencé par le Tasse, voir « La Lunette d’Aristote », in Hersant Yves, La Métaphore baroque d’Aristote à Tesauro, extraits du Cannochiale aristotelico et autres textes, Paris, Seuil, 2001 p. 61.
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