Chapitre VI. Les ports de la Normandie occidentale
p. 111-131
Texte intégral
Les ports du Cotentin
1La qualité des littoraux variés du Cotentin a permis l’implantation, dès l’Antiquité1, de plusieurs petits ports, et ce en dépit de l’isolement conféré par sa situation péninsulaire. Si on excepte les espaces estuariens, nous en repérons une trentaine, la grande majorité n’apparaissant que de façon incidente dans les textes2. L’archéologie des hameaux et des villages littoraux n’a quant à elle – pour le moment tout du moins – pas permis de mettre en évidence des plages portuaires inconnues de la documentation écrite3. La cartographie des sites inventoriés révèle une certaine disparité de leur répartition le long des 345 km côtiers. Les façades occidentales et orientales, bordées par des marais et des cordons dunaires, furent les plus propices, au contraire du massif schisteux composant la partie nord-ouest du Cotentin. Il est probable que les exploitations salicoles que l’on devine dès le xie siècle, conjuguées aux diverses entreprises de poldérisation conduites au cours du siècle suivant, ont contribué au développement portuaire dans les zones humides4. Depuis le Couesnon, jusqu’à Carteret/Barneville, nous avons localisé 26 ports, à raison d’un tous les 8,5 km environ. Entre Barfleur et l’estuaire commun de la Vire et de la Douve, 13 autres sites s’égrainent tous les 5 km en moyenne. Quant aux 7 ports fondés entre ces deux secteurs, ils se succèdent à 18 km d’intervalle à peu près.
2En partant du sud-ouest, le premier bassin fluvial remarquable du Cotentin se jette dans la baie du Mont-Saint-Michel. Il est formé de la Sée – sur laquelle fut fixé le port d’Avranches – et de la Sélune. Au xixe siècle, ces deux cours n’étaient quasiment pas navigables depuis la mer. Seulement douze à quinze jours par mois, aux marées les plus vives, la Sélune permettait à de petites unités d’atteindre Ducey5. Ici aussi, les informations se font très parcimonieuses et il n’est pas toujours certain que les ports repérés aient fonctionné sans interruption. Du havre d’Avranches nous ne savons que très peu de chose. Le nom de la ville, dont l’étymologie a été très disputée, semble se rattacher au bas breton aber, de la famille du germanique hafen qui signifie havre6. Voilà tout ! Un peu en aval se trouvait le havre du Rivage figuré sur la carte de Cassini7. Sur le pourtour de l’embouchure conjointe des deux fleuves, on dénombre six ports supplémentaires, lovés dans des anses de sable et de tangue que la mer ne baigne qu’à marée haute : sur la côte nord, ceux de Gisors, de Saint-Léonard et de Genêts (c’est dans ce port d’origine gallo-romaine que s’embarqua saint Hélier au vie siècle pour passer à Jersey8) ; sur la côte sud, ceux de Flaget, de Céaux et de Courtils9. La proximité de salines avait permis à certains d’entre eux de connaître une certaine importance. D’après un relevé des assises d’Avranches du 15 octobre 1405, complété par une déclaration des revenus du prieuré de Saint-Étienne de Caen faite le 2 mai 1680, de part et d’autre de la péninsule de Saint-Léonard fonctionnaient plusieurs aires saunières desservies par deux sites portuaires : à l’est, le port de Gisors, et à l’ouest celui que l’on nommait le « grand port de Saint-Léonard ». Le long de ce dernier, les religieux avaient « droit de gravage sur chaque bâtiment ou bateau qui ancre, [à raison de] dix sols toutes fois qu’il y ancre10 ». L’existence du port de Genêts est attestée par six chartes royales octroyées en 1293, 1294 et 1301, et vidimées par les vicomtes d’Avranches en 1303 et 137711. Par ailleurs, l’abbaye du Mont-Saint-Michel faisait valoir ses droits sur ce rivage. En 1334, elle se fit restituer un bateau échoué près du port de Genêts et dont le vicomte d’Avranches s’était indûment emparé12. Il était une des principales fenêtres sur la mer dont jouissait l’abbé de Mont-Saint-Michel, ce dernier ne disposant pas sur sa propre île de véritable lieu d’accueil pour les navires13. Le dynamisme de ces sites perdura jusqu’à ce que le siège du Mont conduit par les Anglais en 1423 ne les ruinât gravement14.
3Ensuite, le long du littoral se trouve Granville. Les premières constructions sur le site de la Roque de Lihou datent du xiie siècle, une paroisse y ayant été fondée en 1113. À cette époque, l’endroit n’était encore qu’une « place et champ séant sur un roc presque tout environné de mer, auquel n’avait aucun édifice ou habitation ». Seule l’église dédiée à Notre-Dame attirait les pèlerins de la région15. Ce n’est qu’à partir du xve siècle que Granville paraît avoir connu un réel développement. Siméon Luce, dans sa publication de La chronique du Mont-Saint-Michel, mentionne qu’un « vaissel de Grantville portant XV tonneaux » faisait partie d’une flotte de 20 bâtiments commandés en 1425 par le capitaine anglais Laurens Hauden, ce qui signifie qu’un port existait déjà depuis quelque temps à cet endroit16. Ses qualités naturelles étaient évidentes puisqu’il se logeait dans l’anse que le promontoire rocheux protégeait des vents et des vagues17. Son intérêt allait bientôt croître aux yeux des autorités politiques et militaires.
4À la fin mai 1436, le seigneur anglais Thomas, sire de Scales, capitaine-général des basses marches et sénéchal de Normandie, reprit le rocher de Lihou, dont par un coup de main les Français avaient réussi à s’emparer un court moment. Trois ans plus tard, par contrat passé le 26 octobre, il obtint en fief de Jean d’Argouges la « roque de Granville, auquel lieu est assise l’église Notre-Dame de Granville, avec le droit de la grève et grevage, tant d’un côté que de l’autre, en tant que la roque se pourporte, et jusqu’au pont19 ». Son objectif était de faire de Granville une forteresse capable de résister à la garnison du Mont-Saint-Michel. Pour cela, il commença par faire édifier une enceinte et creuser une profonde tranchée au niveau de l’isthme qui reliait la presqu’île à la côte, de sorte que le rocher fut entièrement entouré par la mer. Les dimensions de ce fossé étaient conséquentes : 7 m de large sur 18 m de profondeur20. Puis, il déplaça les centres d’activité alentour, jusqu’alors situés plus au sud, le long de la côte comprise entre la Roche-Gautier, la Houle et Saint-Pair, pour les réunir au sein du promontoire fortifié de Granville. La cohue y fut notamment transférée. On employa aussi tous les matériaux de construction à disposition dans le voisinage, « ensemble les couvertures des maisons, pierres de taille, et généralament toutes les autres matières propres et choses propres et servant à édifier21 ». Mais Thomas de Scales n’eut pas le temps de voir son projet achevé puisqu’en septembre 1442, alors que la construction des remparts était bien engagée, la ville fut reconquise par les Français. Au mois de mars 1446, Charles VII, considérant l’importance stratégique et militaire du site de Granville, prolongea l’initiative anglaise en accordant aux habitants plusieurs privilèges fondateurs de la ville22 :
« En nostre pays et Duchié de Normandie, duquel nos anciens ennemiz et adversaires les Anglois détiennent et occupent grant partie, et lesquels par forme de nouvelle habitacion et créacion de ville, ayent, puis huit ans en çà ou environ, commencié à édiffier, fortiffier et emparer une place et champ séant sur ung roich presque tout environné de mer, ouquel n’avoit aucun édiffice ou habitacion, fors seulement une Eglize paroissiale très dévote, fondée en honneur et révérence de Nostre-Dame, ladicte place nommée Grantville que l’on dit être ung des plus anciens pélerinages de nostredit pays de Normandie, et où sont advenus et adviennent souvent de beaux et apparents miracles, en laquelle paroisse souloit avoir plusieurs villaiges, bourgades et hameaulx appartenans à ladite paroisse, ouquel champ nosditz ennemis firent lors ville et chastel, comme en la plus forte et avantaigeuse place et clef de pays par mer et par terre que l’on peust choisir et trouver, afin de tenir ledit pays de Normandie et les marches voisinnes en subgeccion.
[…] Pour obvier aux dommaiges et inconvénients qui par la perdicion d’icelle peussent estre et pourroient ensuir à notredit Royaume et Seigneurie ; [et] nous ayent fait dire et remonstrer que en ladicte place de Grantville a petit nombre de marchans et gens de mestier, et que pour la garde et seurté d’icelle est expédient et nécessaire d’y en tenir et avoir plus grand quantité, et que autrement ladicte place ne pourroit longuement estre ne demourer en nostredicte obéissance ; […] voulons, ordonnons et Nous plaist que toutes manières de gens de quelque estat qu’ilz soient, qui vouldront venir demourer et faire résidence audit lieu de Grantville, soient doresnavant francs, quittes et exempts des aides ordonnés pour la guerre, ensemble de toutes tailles, empruntz et autres subvencions et redevances quelconques par Nous mises ou à mettre sus ; et que par noz Bailli, Vicomte, Procureur et autres officiers de Constantin, places vuides leur soient bailliées et délivrées pour édiffier et faire habitacions, et estre le propre héritage d’eulx et de leurs hoirs et successeurs, perpétuellement et à tousjours. »
5La même année, son amiral, Prigent de Coëtivy, se déplaça pour visiter la garnison locale. Il put alors mesurer le travail qu’il restait à accomplir. Selon un mémoire adressé au roi en 1447, il convenait réaliser des reparacions, c’est-à-dire de poursuivre les travaux engagés :
« Et premièrement parachever les foussez ja encommanciez à faire à l’entour d’icelle ville, qui ne sont pas faiz à demy.
Item, pareillement parachever la faulse braie encommancée de faire à l’entour de ladicte ville, de laquelle n’y a encore qu’environ XX brasses de faictes.
Item, parachever les deux boulevars des deux boutz d’icelle ville.
Item, parachever le havre pour la seurté duquel fauldra faire une grousse tour sur ung roc qui est ung grant traict d’arc dedans la mer.
Item, faire la chaussée de l’estang avec deux grousses tours aux deux boutz d’icellui estang et deux ausdites deux tours : lequel estang reffoulera l’eaue entre deux montaignes jusques à une lieue au-dessus, qui sera la salvacion de la place, et conviendra que la chaussée d’icellui estang soit faicte de forte muraille à creneaulx, et deffensable, tant devers l’eaue dudit estang que devers la mer.
Pour lesquelz ouvrages faire, semble à l’admiral que s’il plairoit au Roy bailler IIIIM l., avec l’assinacion qu’il fit derrenierement en may sur la commission de Maistre Girart le Boursier et ailleurs jusques à la somme d’autres IIIIM l., que jamais argent ne fut mieulx emploié et que par ce moien l’on mectroit ladicte place ceste année en telle seurté que le temps advenir elle seroit bien aisée à garder23. »
6Puis Louis XI, voulant indemniser les religieux du Mont-Saint-Michel qui dans cette affaire avaient perdu les droits dont ils disposaient sur le marché de Saint-Pair, suivant les recommandations d’une enquête rédigée le 11 novembre 1463, leur donna par lettres patentes du 29 du même mois ses droits sur le moulin de Pontorson, le moulin Huet et autres moulins de Gavray. En échange, ils lui concédèrent « tous lesd. noms, raisons et actions qu’ils ont ou peuvent avoir ès dits Roc et place et havre de Granville et environ, tant en mer qu’en terre, compris tout ledit roc devers ladite mer et du côté de la terre vers le midy jusques au pont d’une petite rivière qui est au-dessous et par-dessus lequel pont l’on passe ladite rivière pour aller de ladite place audit lieu de Saint-Pair24 ». Sous le règne de ce souverain, le port de Granville entra dans le dispositif de défense navale de la Manche. L’amiral de France y disposait d’un lieutenant dont les gages apparaissent dans des quittances de 1471, 1481 et 148325. D’autres documents comptables de 1467, 1479, révèlent des approvisionnements en vin et en sel commandés par l’amiral pour l’avitaillement de la place et de ses navires de guerre26.
7Plus au nord, Regnéville se signale par sa recette sur l’importation de vin27. Il servit plusieurs fois de point de communication entre l’Angleterre et le Cotentin au xive siècle28. Situé sur la rive droite de l’embouchure de la Sienne, il était peut-être, dès le Moyen Âge – avant que ne fût construite une série d’écluses sur l’affluent canalisé de la Soulle – relié à un port intérieur desservant Coutances. C’est ce que laisse supposer un acte du 10 octobre 1371 qui mentionne le « parquier et garde du port de Coustance29 ». Ajoutons qu’au xviiie siècle encore, le site portuaire de Regnéville était réputé pour l’abri qu’il offrait aux navires venant du nord. Chardon considérait à ce titre « qu’il seroit interessant au bien public de conserver ce havre dont l’utilité est précieuse, et de faire rétablir les digues à moitiè minées dans lesquels il est renfermé30 ». Peut-être que, comme bien souvent, ces aménagements protecteurs avaient été fondés pour partie au Moyen Âge. Quant aux ports de Blainville et Linverville, il est probable que leur naissance fut consécutive à la rupture du cordon littoral qui séparait la mer du bassin formé en arrière de la dune31.
8L’histoire de Portbail est marquée par une légende qui veut qu’en 747, les reliques de Saint-Georges s’y échouèrent dans un bateau en forme de tour32. Par une charte datée de 1026 et produite par le duc de Normandie Richard III, ce dernier donna entre autres biens à son épouse Adèle l’abbaye de Portbail, située à proximité de la rivière de Gerefleur, avec son port33. Le havre de Flamanville, encore appelé Diélette au xiiie siècle, aurait accueilli les reliques de Saint Floxel34. Omonville, site auquel on a attribué des origines gallo-romaines, aurait été, avec Carteret, un repère de Vikings et de pirates au ixe siècle, mais il ne réapparaît guère par la suite35. À propos de ce dernier, sa formation procéda vraisemblablement de la rupture du cordon dunaire qui survint entre 1026-1027 et 126436.
9Passons à Cherbourg. La ville dominait un havre spacieux, à l’embouchure de la Divette et du Trottebec, au fond d’une grande baie longée par une grève. Les qualités naturelles du site ne paraissent pas avoir nécessité d’aménagements complémentaires significatifs durant le Moyen Âge37. Il servait les intérêts de sa communauté marchande. On sait que cette dernière entretenait des relations spécifiques avec l’Irlande, ainsi que le prouvent les statuts communaux de Rouen, et le renouvellement de leur privilège accordé par Philippe Auguste en 120738. Dans une rémission du 1er janvier 1481 se signale un négociant de Cherbourg, Henry Guiffart, propriétaire de denrées et d’un navire stationnés dans son havre d’attache39. Le port remplissait aussi des fonctions militaires. Othon de Tocy, amiral de la mer, était à Cherbourg le 1er avril 1296. Il y reçut de Philippe IV le Bel la somme de 8852 livres pour faire réparer ses galères qui stationnaient dans ce port, ce qui laisse à penser que ses capacités logistiques étaient à l’époque significatives et ne se limitaient pas à un simple échouage40. D’ailleurs, même si cette contribution apparaît modeste au regard d’autres villes – les Cherbourgeois procurèrent quatre nefs de 80 à 120 tonneaux et portant 320 hommes à la flotte réunie pour la bataille de L’Écluse41. Comme Barfleur, la station servit enfin de port de liaison avec l’Angleterre, depuis le xe siècle jusqu’au début du xiiie siècle42. Le château de la ville était l’un des plus considérables de la presqu’île. Il fut habité par les rois Plantagenêt, et encore en 1451, on y engagea plusieurs travaux d’amélioration43. Cependant, même si les souverains anglais y logeaient, ils n’utilisaient pas systématiquement le port attenant. Ainsi, plus de vingt fois Henri II préféra s’embarquer au port voisin de Barfleur pour passer la Manche44. La guerre de Cent Ans eu des répercussions là aussi très néfastes sur la ville et, par conséquent, sur son havre. À l’issue de la reddition de Cherbourg le 12 août 1450, le sire de Briqueville, qui avait beaucoup contribué à la chute de la place, en fut nommé gouverneur. Il y fit bâtir la tour dite des Sarrasins, où l’on plaça 17 pièces d’artillerie d’un gros calibre pour défendre l’entrée du port45. Afin de mieux protéger encore la place, Jehan de Bueil, amiral de France et capitaine de Cherbourg, y établit 50 soldats dont la solde est consignée dans des quittances de 1451 et 145246. Et en 1464, Louis XI ordonna le financement de réparations supplémentaires des fortifications47.
10Depuis le xe siècle jusqu’à l’entrée de la Normandie dans le giron français, le port de Barfleur servit de tête de pont aux Anglais pour relier le continent48. Il jouissait de sa proximité de l’île de Wight et de Southampton. Par ailleurs la configuration de son port devait être très avantageuse. Si la mer s’est depuis avancée dans les terres, elle devait être arrêtée à cette époque par des roches qui formaient une sorte de ceinture de protection49. Une douzaine de témoignages historiques attestent sa fonction de port de liaison transmanche – de transfretatio regis – jusqu’à Henri II, les allers-retours se systématisant sous le règne de ce dernier50. À cet effet, un bâtiment nommé l’Esnecca Regis fut spécialement affecté au transport du roi, de la cour et du trésor royal51. Selon les occasions, il était complété par d’autres navires, comme par exemple la Blanche Nef qui appareilla de Barfleur le 25 novembre 1120 et fit naufrage avec à son bord Guillaume, le seul fils légitime d’Henri Ier Beauclerc52. Au xiiie siècle, la rupture avec l’Angleterre condamna cette activité substantielle du port. Le site disparaît presque de la documentation, pour ne réapparaître qu’au moment des combats de la guerre de Cent Ans. Au nombre des vicissitudes dont il fut affecté, notons qu’en 1346 Édouard III fit renverser les murailles de Barfleur et combler le port53. De ces six siècles médiévaux, la ville n’a conservé quasiment aucune trace, tout portant à croire que l’emplacement initial de l’espace portuaire a été depuis envahi par la mer54.
11Le port de la Hougue connut quant à lui une trajectoire inverse à celui de Barfleur. On le rencontre peu avant le xive siècle. Nous savons qu’Étienne de Blois l’emprunta en 1137. Édouard III y débarqua en 1346 avec son armée qui traversa la Normandie et la Picardie55. Les Anglais y descendirent encore en 1441, 149256. Il n’y aurait guère plus à dire si Louis XI, en mariant sa fille Jeanne au bâtard de Bourbon, n’avait donné entre autres terres à ce dernier celles de Valognes et de la Hougue-Saint-Vaast. L’amiral de Bourbon, devenu propriétaire de cette baronnie littorale restée en sommeil, envisagea pour elle un nouvel avenir57. Il faut dire que la topographie du site était particulièrement adaptée à l’installation d’une aire de stationnement naval. « Le port de la Hougue est formé par la nature et l’entretien lui en est encore confié » faisait remarquer Chardon58. En août 1474, l’amiral de Bourbon adressa une supplique à Louis XI pour l’enjoindre à autoriser le développement de son havre. L’argumentation reposait en grande partie sur le fait exagéré qu’il n’existait pas dans le duché de Normandie de port capable de « recuillir et mectre a seurté les navires de quelques pais et contrees qu’elles fussent ». Les sites portuaires alors en fonction étant à sec à marée basse, « les navires ne pouvoient venir ne demourer sans danger d’estre [chus] et les marchandises peries et perdues, par quoy en notredit pays n’affluoient que tres peu de marchans et marchandises en grant detour et discontinuacion de la traffique de la marchandise de notredit royaume ». Il fut rappelé que, sur la base de ce constat, plusieurs prospections avaient été réalisées au cours des décennies passées :
« pour visiter tous les pors, havres, ances de mer, entrees de rivieres, rades et autres lieus et convenables pour faire et construire ung hable seur et ouquel les navires peussent estre a seurté, entrer et issyr […]. Sur ce l’advis et oppinion de plusieurs pour ce assemblez en grant nombre en ce cognoissans trouverent que ledit lieu de Saint Vast estoit le plus propre meilleur et seur lieu à faire havre que autre lieu de notredit pais de Normandie. Et soit ainsi que [notre filz] et cousin ait naguieres acquis ladite terre et seigneurie de la Hogue, ouquel lieu est situé pres et joignant de la mer ung tres beau [hable de] bonne haulteur et enviroyné de troys pars de la mer faisant abry au hable dudit lieu pres et joignant icelluy. Parquoy, s’il [estoit] fortifié et emparé de ville et chastel, les marchans de notre royaume et autres marchans extranges y converseroient et heriteroient pour la seurté de leurs navires, biens, denrees et marchandises ».
12Cet expédient économique justifiait en réalité une ambition plus politique consistant à créer une véritable ville, avec ses fortifications, son château, ses institutions échevinales, son marché et ses foires, ainsi qu’une série de privilèges pour ses habitants et les marchands qui viendraient y commercer ou s’y établir. Cela leur fut en grande partie accordé59. Le monastère de la Sainte-Trinité de Caen, qui détenait la seigneurie voisine de Quettehou depuis 1082, était également partie prenante du succès de ce port. En effet, selon un règlement rendu par l’Échiquier de Rouen en 1330, puis l’aveu de son abbesse rédigé le 28 avril 1493, elle disposait d’un droit « de siège, posage et ancrage » des navires, détaillé selon les termes suivants :
« Prendre et avoir de tous les vesseaux et navires venans et arrivans audit gravage et hable de Sainct Vast, et illec environ, de chacun d’iceux qui illec arrivent, assechent et reposent, quatre deniers tournois pour coustume et aussi quatre deniers tournois pour chacune piece de vin et de tous autres boires quelconques60. »
13La péninsule du Cotentin est enserrée au sud-est par un ensemble de marais dans lesquels se jette la Vire. Au xixe siècle, sa section navigable de ce fleuve ne dépassait pas les 18 km, un barrage interrompant son cours. Et les embarcations qui s’y engageaient ne tiraient pas plus d’un mètre d’eau. Cependant, leur parcours se prolongeait originellement jusqu’à Saint-Lô. Peu de témoignages y font référence. Cette ville, ancienne bourgade gallo-romaine nommée Briovera (« le pont sur la Vire » en langue celtique), jouissait d’une position nodale, à la croisée de voies de communication fluviale et terrestre. C’est par la Vire que les Vikings l’assaillir en 889, détruisant ses remparts qui ne seront relevés, comme son siège épiscopal, qu’au xie siècle. La cité profitait également des services d’un autre cours d’eau, la Dollée, le long duquel s’installèrent en grand nombre (quelque 2 000) des tisserands dont les productions firent sa renommée et sa puissance économique durant la fin du Moyen Âge62. La navigabilité de la Vire jusqu’à cette ville au Moyen Âge pose question. Voici ce qu’en disait Henri-Caterin Davila, narrant les exploits du comte de Montgomery en 1574 :
« Saint Lo est une ville dans la basse Normandie, qui n’est pas bien grande, mais assez forte. Elle est proche de la mer, & sur la rivière de Vire, qui n’est pas loin de la ville, & qui s’engolphant dans l’océan par le moyen de son flux, se rend navigable jusques à ses portes, & reçoit comme en un havre asseuré, les vaisseaux qu’on y void aborder, qu’elle met à couvert des vents & des tempestes de la coste. En cette cale avoient mouillé les navires avec lesquels le Comte estoit venu d’Angleterre, & s’y tenoient à l’anchre, tout prests à sortir du port, & à faire voile, quand l’occasion s’en présenteroit63. »
14Toutefois, il y a lieu de douter de ces propos. Comme le faisait remarquer M. Perey, compte tenu de l’étroitesse du cours de la Vire, de sa pente et des obstacles qui l’entravaient, tout porte à croire que Davila a confondu le site de Saint-Lô, d’accès très difficile pour des bâtiments armés en guerre, avec l’estuaire au fond duquel se trouvait le petit port de rupture de charge de Saint-Lambert. Dans la plaine inondable comprise entre Montmartin et Saint-Fromond, le fleuve se ramifiait en deux bras, Grand-Cours-de-Vire à l’est qui n’actionnait que des moulins et Jambe-de-Vire à l’ouest capable de porter des bateaux via le passage de la Rosaye. Avant 1840 et la construction d’écluses, seules des unités à fond plat dont la jauge ne dépassait pas 20 tonneaux étaient en mesure de remonter la partie navigable après Saint-Lambert. Ces embarcations légères transportaient de la tangue pour amender les terres d’amont ou servaient de relais aux navires venus de la mer, obligés de leur confier leurs marchandises parce que les vaisseaux de charge ne pouvaient pas progresser davantage. Le transbordement effectué à Saint-Lambert, les gabarres et les petits caboteurs pouvaient encore gagner l’hinterland à la fin du Moyen Âge jusqu’à pont de Saint-Fromond. Selon une enquête du xviiie siècle, appuyée notamment sur des documents de 1423-1424, un treuil était en service à cet endroit « pour tirer les batteaux portant marchandises64 ». Et lorsqu’en hiver ou par forte marée le niveau de l’eau le permettait, les plus petites embarcations accédaient au port de Saint-Lô appelé Cauvelande65. Les grandes quantités de vin (quelque 1 000 tonneaux) trouvées dans la ville par les Anglais lorsqu’ils la pillèrent le 27 juillet 1346 laissent deviner une forte activité de la batellerie sur ce segment du fleuve au milieu du xive siècle66. Cependant, il n’est pas certain que Saint-Lô puisse être rangé parmi les ports directement liés au trafic maritime. D’ailleurs, lorsqu’en juillet 1346 Édouard III s’empara de la ville, il aurait projeté, au regard de la qualité de sa situation, de faire aménager le lit de la Vire pour qu’il devienne accessible aux navires de mer, preuve qu’il ne l’était pas encore à cette époque67.
15La Vire partage son embouchure avec un autre fleuve, la Douve, que la mer remontait au moins jusqu’à Picauville avant que ne furent construites des portes de retenue68. Plusieurs stations pour les navires séquençaient son cours : Carentan au confluent de la Taute, Saint-Côme et Beuzeville dont la foire est signalée dans les documents des xie-xiie siècles69. Il faudrait sans doute y ajouter les ports de Liesville et de Carquebut référencés dans la cartographie moderne, ainsi que celui de Picauville où les chanoines de la Sainte Chapelle à Paris détenaient des droits de pêche depuis au moins 139470. Le caractère pluriséculaire du port de Carentan est notamment attesté par la découverte au pied du quai, le 23 mai 1845, d’une pirogue monoxyle de 4 m de long enfouie dans la vase71. Deux espaces portuaires semblent avoir fonctionné à ses abords au Moyen Âge. De part et d’autre de la rivière de la Taute donnaient le port du Quay-aux-Vins sur la rive gauche et celui de Saint-Hilaire sur la rive droite72. Et sur le fleuve les navires s’arrêtaient en face de la paroisse de Saint-Côme, au port du Pont-d’Ouve, auprès duquel se tenaient des pêcheries, quatre moulins à marée ainsi qu’une forteresse plusieurs fois assiégée au cours des xive et xve siècles73. Là circulaient des gabarres employées pour transporter la tangue où pour assurer la liaison entre les navires de charge et l’amont du fleuve. L’exemple en est fourni par un acte de février 1373 selon lequel des navires emplis de vin d’Espagne et de Bourgogne furent expédiés par un certain Robert Bonami, marchand de Saint-Lô, à destination du château de Néhou74. Il est probable que dès la fin du Moyen Âge le port de Carentan commença à réellement souffrit de l’alluvionnement ambiant. Le port du Pont-d’Ouve, en position nodale, voyait en conséquence sa fonction de rupture de charge renforcée, ce qui était susceptible de menacer la prééminence commerciale des Carentanais. La tension grandissant, en 1455, un procès opposa à ce sujet Antoinette de Magnelais, dame de Saint-Sauveur-le-Vicomte, soutien des habitants de Saint-Côme, d’une part, le prévôt et les habitants de Carentan, d’autre part. À cette occasion, le fermier de la Coutume de Carentan prétendit que « par ordonnance, aucun ne devait sur peine de forfaiture, charger ou décharger, ne faire charger ou décharger, vendre ou transporter aucunes denrées ou marchandises estantes en aucuns vaisseaux ou navires arrivés en la viconté de Carentan, depuis qu’ils verraient entrez en la baie des rivières de Vire et Taute, sinon aux kays dudit lieu de Carentan75 ». Ajoutons que cette vaste embouchure, dans laquelle convergeaient les deux fleuves, était parsemée de bancs de sable et de vases qui nécessitèrent l’aménagement de plusieurs endiguements : pour exemple, le « Dicq du marais » est évoqué dans un fieffement de 142876. Ces alluvions limitaient la circulation navale et gênaient la fréquentation de gros bâtiments. Depuis l’Antiquité – on le suppose – l’embouchure pouvait d’ailleurs être franchie à marée basse au moyen d’un gué de 8 km – le « Grand Vey » – qui reliait le Cotentin au Bessin, via les paroisses de Sainte-Marie-du-Mont et de Saint-Clément. La Vire était aussi traversée dans sa vallée inférieure par deux autres chaussées dont les droits sont évoqués dans une reconnaissance ordonnée par Henri II Plantagenêt (vers 1165-118977). Selon plusieurs titres dont l’un remonte à 1409, le « Vei de Rupale » permettait de joindre, à cheval par basse mer et en bac par haute mer, la ferme du Port à l’ouest d’Isigny, aux Veys à l’est de Carentan. Et puis un peu plus en amont, un autre passage dénommé « Nef-du-Pas », signalé en 1374, raccordait Neuilly à Mont-Martin78. Bien entendu, ces gués limitaient davantage encore la navigabilité du fleuve.
Les ports du Bessin à l’estuaire de la Seine
16Au niveau de l’embouchure de la Vire, à la confluence avec l’Aure, fonctionnait aussi le port d’Isigny qui devait être connecté par cet affluent avec celui de Trevières79. Son responsable, un certain Hugues, portarius de Isigni et militum de Rupalai, est signalé dans deux actes de la seconde moitié du xiie siècle80. Ensuite, les anfractuosités de la côte accueillaient Saint-Laurent, Sainte-Honorine-des-Pertes, Port-en-Bessin et Asnelles.
17Des autorités de Bayeux dépendaient deux d’entre eux. Sainte-Honorine-des-Pertes, mentionné dès le xie siècle, appartenait au vicomte qui au moyen de diverses concessions chercha à développer son activité. Cependant, ses progrès furent anéantis par une succession d’effondrements de la falaise qui le comblèrent en partie81. Dans les années 1720, il est décrit comme étant « ruiné » et « inaccessible82 ». Port-en-Bessin était quant à lui un débouché maritime de l’évêque. Il abritait notamment des pêcheurs de cétacés83. Lors de la préparation de la conquête de l’Angleterre, Odon, évêque de Bayeux, y aurait fait construire quarante navires qu’il donna à son frère, Guillaume. Il est aussi fait mention de Port-en-Bessin dans une charte de 1096 qui désigne des droits « ad Portum, piscatores cum terra in qua manent, et navi sua, et consuctudinibus ejus84 » ; puis plus tard sous l’appellation Portus Bajocassinus. En 1475, l’évêque Louis d’Harcourt engagea des travaux d’envergure pour l’améliorer. En coupant le cordon de galets qui séparait les eaux de la Manche d’une dépression naturelle formée dans la falaise et surcreusée pour l’occasion, il avait créé un bassin de deux cents toises de long et quarante de large capable d’accueillir et d’abriter davantage de navires85. Dans un plan de 1675, les vestiges de cette entreprise sont toujours visibles, le poulier qui s’était reformé ayant fossilisé les digues édifiées pour le contenir (figure 41). D’ailleurs, dans son procès-verbal, François Le Masson du Parc indiquait en 1724 que « Port en Bessin serait un lieu convenable pour la pesche si l’abord était rendu par l’art accessible aux bateaux pescheurs. La côte y étant ferrée et sans abry, il faut que les pescheurs après leur pesche finie hâlent au haut de la côte au cabestan leurs bateaux86 ».
18Quant au port d’Asnelles, il nous est connu par l’entremise d’une enquête du xviiie siècle relative à plusieurs droits que son seigneur, Philippe de la Rivère, prétendait détenir. En vertu d’un aveu de 1523, il prélevait un « droit d’hotage » sur tous les bateaux pêchant le long du rivage de son domaine. Et, selon les registres des plaids de sa seigneurie datés de 1492, il percevait aussi 4 deniers sur chaque navire qui abordait Asnelles88. Ces deux taxes impliquaient nécessairement l’existence d’un espace naval spécifique pour abriter et décharger ces embarcations.
19Plus à l’est, sur l’embouchure initiale de la Seulles, avait été établi le bourg portuaire de Bernières (anciennement Grannona), cité à plusieurs reprises dans des documents des xiie et xiiie siècles. En 1610, une violente tempête obstrua son cours qui trouva une nouvelle issue vers la mer, entre les ports de Graye et de Courseulles89. Ces derniers sont mentionnés dans la documentation, avec celui de Meuvaines, dès le xiiie siècle. En amont, la Seulles ne paraît pas avoir été empruntée par les navires de mer au Moyen Âge ; et plus généralement, leur circulation dans cet estuaire devait être assez faible d’ailleurs90.
20La navigation sur l’Orne est plus aisée à cerner. Elle avait contribué à l’essor de sa ville principale, Caen, à laquelle elle fournissait un accès précieux à la Manche. Long de 170 km, son cours est parsemé de hauts fonds et bordé de parois rocheuses impressionnantes ce qui, au xixe siècle, ne permettait pas aux barques ni aux petits bâtiments supérieurs à 3 m de tirant d’eau de pénétrer l’arrière-pays au-delà de 17 km91. Et encore, cette portion praticable, méandreuse, souffrait d’un envasement latent si bien que le gabarit du fleuve était assez étroit92. On peut penser cependant qu’au Moyen Âge des embarcations plus légères étaient en mesure de progresser dans l’hinterland. Les navires de mer s’engageant dans l’embouchure rencontraient d’abord le havre d’Ouistreham. D’après le texte de la coutume caennaise, dont la version la plus ancienne remonte au tournant des xiie-xiiie siècles, cette localité et tout le cours de l’Orne relevaient de la prévôté de Caen. Le port d’Ouistreham lui-même est cité plusieurs fois dans des actes d’exemptions d’Henri II93. Les capacités d’accueil de ce site étaient appréciables. Selon un témoignage datant de mai-juin 1492, il pouvait recevoir « environ 80 navires petis et grans94 ». Il relevait de la juridiction prévôtale de Caen et remplissait pour la cité la fonction d’avant-port95. Les bâtiments les plus contenants y confiaient leurs marchandises à une flottille d’allèges qui prenaient le relais vers l’amont96. Selon la coutume Caennaise, « nulle neif puisque elle est venue a Oistreham dedens le port de Oulne [Orne], elle ne puet ne ne doit deschargier ses marchandises a Oistreham ne en nul lieu fors a Caen mais elle puet tant seulement allegier son fais pour venir plus legierement mais elle n’en puet encore riens faire sans le congieu du prévost97 ».
21Aux abords de Caen, l’Orne se sépare en deux bras, le plus petit conduisant au bourg royal. La progression des navires était stoppée par le pont Saint-Pierre qui enjambait le fleuve et obligeait l’organisation à ses pieds d’une zone portuaire. Le premier témoignage attestant son existence est une charte du duc Richard III fixant le douaire de son épouse, souscrite en l’année 102698. Un acte de Guillaume le Conquérant de 1080-1082 y fait aussi référence99. Les marchandises étaient alors transbordées pour être vendues. Le duc disposait des cales situées sur la rive gauche, celles de la rive droite étant contemporaines de l’extension de la paroisse Saint-Pierre. L’endroit était assez vaste pour recevoir plusieurs dizaines de bateaux. Raoul Tortaire, décrivant le pays caennais, évoquait au début du xiie siècle un port assez large pour accueillir de gros navires de mer100. Et au siècle suivant, Guillaume le Breton dépeignait Caen comme une « ville puissante, opulente, embellie par des rivières et des prés et des champs fertiles ; [elle] reçoit dans son port de mer des navires qui y apportent toutes sortes de marchandises101 ». Autre information qui permet d’apprécier les capacités d’accueil du site : vers la moitié du xive siècle, les Anglais s’y emparèrent de 22 vaisseaux102. Cette partie originelle du port était défendue par deux tours, placées de part et d’autre de l’Orne. Celle de la rive gauche était appelée Tour Guillaume-le-Roi ; l’autre, édifiée au xive siècle, se dénommait Tour au Landois103. Il est probable qu’à la fin du Moyen Âge les nécessités du trafic avaient provoqué le prolongement de l’espace portuaire par une section plus en aval, le long de l’île Saint-Jean. À l’ouest du pont Saint-Pierre, un autre port existait, propriété de l’abbaye Saint-Étienne qui l’avait fait creuser avec l’accord ducal104. Au moyen de barques, on y accédait via la Petite Orne, l’Odon et un canal artificiel probablement aménagé par les moines105. Enfin, signalons aussi les efforts consentis pour améliorer la navigabilité du fleuve, en particulier en amont de Caen, au niveau du bourg de Fleury. Là, en 1458, le long du coteau d’Allemagne, furent réalisés des travaux d’élargissement106.
22La vallée de la Dives, récemment étudiée par Vincent Carpentier, était un pays de marais107. Dès le début du xie siècle, les communautés religieuses mirent en valeur ce vaste bassin long d’environ 25 km pour y prélever du sel, mais aussi du foin, des roseaux et du poisson108. Ils s’appuyaient sur une longue tradition saunière qui remonte aux temps protohistoriques. Au cours des xie-xiie siècles, plusieurs grands ensembles d’aires salicoles se constituèrent entre Varaville, Cabourg, Périers-en-Auge et Dives. Le Duc en partageait la propriété avec des abbayes caennaises, celle de Saint-Martin de Troarn, et secondairement d’autres établissements religieux normands. C’est un évènement militaire qui marque l’avènement portuaire du fleuve : l’estuaire fut en effet le point de départ de l’expédition victorieuse de Guillaume le Conquérant en 1066. Il en résulta la constitution d’une baronnie maritime que le duc confia au monastère Saint-Étienne de Caen dès les années 1066-1077. À cette époque, aucun port n’est encore explicitement mentionné dans les sources mais on sait que ce territoire englobait les villae de Dives et de Cabourg. Et l’évocation d’un franchissement – le pons Divae – dans un acte de Richard II de 1025, laisse deviner qu’à cet endroit un premier point de rupture de charge avait pu être établi109. À la fin du xiie siècle, confirmant les biens de l’abbaye, Richard Cœur de Lion spécifia que les religieux détenaient le fleuve, le port et le droit warec, ce qui devait être le cas dès la donation initiale110. Le site présentait des qualités qu’on retrouve dans d’autres vallées creusées dans le socle calcaire : il formait un golfe traversé par un fleuve et en partie fermé par un cordon de sable, par lequel la mer remontait et envahissait les marais. « La situation du lieu semble, en effet, destinée pour un port considérable, et en même temps des plus surs à l’embouchure de la rivière ; la mer mouille une vaste et riche prairie, en cotoyant une montagne fort escarpée qui offre aux vaisseaux un azile tranquile à l’abri des vents111. » Tel est le paysage avantageux qui prévalait encore au milieu du xviiie siècle.
23Deux foyers de peuplement se fixèrent assez tôt de part et d’autre de l’embouchure. Sur la rive gauche, Cabourg se trouvait à l’abri d’une dune qui continuait de s’étirer vers l’est. Selon un aveu du 14 juin 1542, les religieux de Saint-Étienne de Caen y détenaient plusieurs coutumes, parmi lesquelles un bac permettant de franchir la Dives, un droit de pêche ainsi qu’un droit de « gravage, tant à la mer qu’aux rives d’icelle paroisse112 ». Ce lieu souffrait toutefois d’une mauvaise desserte par les voies de communication terrestres. En revanche sur l’autre berge, l’agglomération de Dives – appelée aussi Saint-Sauveur de Dives du nom de son église – était implantée au pied du bâti rocheux et pouvait être reliée plus facilement aux autres villes de la région. C’est vraisemblablement ce qui détermina la primauté de cette dernière. Par ailleurs, la configuration naturelle du lieu l’abritait assez bien des vents et de la houle d’ouest. Elle offrait en même temps une protection appréciable aux bateaux venus y faire relâche113. Pour autant, la marée n’était pas entravée et demeurait puissante, remontant le cours du fleuve pour alimenter les salines et facilitant la circulation navale jusqu’au fond du golfe, au niveau de Corbon114. L’embouchure formait le havre commun aux deux ports qui ne furent longtemps que des échouages. Mais c’est à Dives que le trafic était le plus important. Un tonlieu y était appliqué sur la vente et la circulation des marchandises, et les maîtres devaient acquitter un droit pour stationner leurs navires, ce qui laisserait entendre que quelques aménagements existaient pour mieux les accueillir115. Pour le reste, c’est la pêche et l’activité saunière qui présidaient à la santé économique de la vallée. Cette dernière resta positive jusqu’au grand marasme du xive siècle qui eut raison successivement des salines ecclésiastiques d’abord, puis des exploitations ducales116. Mais la vie maritime ne s’éteignit pas tout à fait. Dans une rémission du 6 juin 1360, on suit les aventures d’une bande de pirates qui rapportèrent leur butin à Saint-Sauveur de Dives117. Chardon concluait à propos de l’histoire de ce site : « La destruction de ce port ne peut être attribuée qu’au peu de goût de ces siècles reculés pour le commerce maritime, au défaut de richesses du gouvernement ou aux calamités qui l’ont désolé118. »
24Si l’on poursuit vers l’est, se trouve le site de Benerville, sorte de cuvette enserrée dans le plateau rocheux. On trouve mention, dans une vérification de titres, d’un droit de balisage, ainsi que d’une coutume levée sur le poisson et les marchandises chargées et vendues sur le territoire voisin de Montcanisy. Tout indique donc qu’à l’époque où les deux aveux invoqués furent rédigés (1484 et 1530), un port fonctionnait à cet endroit119.
25Encore au début du xixe siècle, la Touques, longue d’une centaine de kilomètres, était navigable dans sa basse vallée sur une trentaine de kilomètres. L’estuaire, bien qu’encombré de bancs de sable, pouvait être remonté jusqu’au port de Touques par des bâtiments de mer de bonne taille, jaugeant quelque 80 tonneaux. Le site tirait une partie de son dynamisme de ses salines, celles appartenant à l’évêque de Lisieux figurant dans plusieurs actes à partir de 1200120. Au xve siècle, le site recevait les activités des pécheurs et des marchands locaux ; il était également fréquenté par des négociants étrangers auxquels il servait de station de rupture de charge pour les denrées destinées aux agglomérations de l’hinterland121. Voici la description qui en fut faite lors de l’examen d’un conflit survenu en 1403 entre l’amiral de France et le capitaine du château local, à propos du devoir de guet122 :
« ledit chastel de Touques et grant et noble et spatieuz et de grant garde assiz sur port de mer et sur la riviere de Touques portant navire, par laquelle la mer et grans basteaux viennent chacun jour par deux foiz jusque au port dudit chastel ».
26Un compte rendu rédigé le 5 mai 1436 permet d’ajouter que des ponts enjambaient le petit fleuve au niveau Touques. Là, les navires devaient s’arrêter pour décharger leurs marchandises le long des quais afin que, le cas échéant, elles poursuivent leur voyage par la route ou la batellerie. L’évêque de Lisieux possédait la coutume du péage qui était levé à cette occasion123.
27Plus en amont, on pouvait encore remonter le fleuve jusqu’à Pont-l’Évêque et Lisieux au xixe siècle, au moyen d’embarcations légères – des gabares tractées le long d’un chemin de halage établi sur la rive droite – ne tirant pas plus d’un mètre124. Il est raisonnable de penser, compte tenu de l’évolution du gabarit des autres cours côtiers, que les conditions naturelles de circulation sur la Touques étaient au moins aussi favorables au Moyen Âge. Des travaux furent même entrepris pour faciliter sa navigation. Ainsi Henri VI, sur la requête que lui présentèrent les habitants de Lisieux, fit élargir et canaliser le fleuve depuis la mer jusqu’à leur ville en 1446. L’exécution de ces travaux, confiée à un certain Étienne Joly, est rappelée dans plusieurs aveux ultérieurs125. Et pourtant, il n’existe pas de trace écrite attestant à cette époque le fonctionnement de ports au niveau de ces deux agglomérations. Selon Raymond Lantier, on savait que « jusque vers la fin du xviiie siècle un trafic fluvial s’exerçait sur ce fleuve, ce qui impliquait l’existence d’un port dont l’emplacement restait à déterminer ». En effet, jusqu’à la construction de la grande route de Lisieux à Honfleur, la Touques était l’axe majeur de communication dans cette région dont elle captait l’essentiel du trafic. À Lisieux, ville fondée dès l’Antiquité à la jonction de la Touques et d’un petit affluent, l’Orbiquet, des fouilles archéologiques conduites dans les années 1950 ont mis au jour au niveau de l’actuelle place Thiers – là où se rencontraient à l’origine les deux cours avant que les enceintes ne déplacent la confluence plus au sud – des vestiges interprétés comme ceux du port gallo-romain. Il s’agissait de cinq niveaux de poutrages de chênes entrecroisés, disposés en couches horizontales et reposant sur le sol marécageux126. En conséquence, on a peine à croire qu’entre la Basse-Antiquité et la période moderne, alors même que la cité connut de substantiels développements, aucun site portuaire n’ait subsisté, ne serait-ce que pour assurer une connexion entre la cité et la station d’embouchure. Dans cette dernière éventualité, Lisieux ne serait pas à ranger au nombre des ports de mer mais parmi les sites fluviaux ; le havre de Touques, donné par le duc Richard II à l’évêque de Lisieux sous l’épiscopat de Roger (980 et 1024) aurait alors servi d’unique interface entre la mer et l’arrière-pays127.
Notes de bas de page
1 Deniaux Élizabeth, « Les villes romaines et les origines des villes normandes », in Pierre Bouet et François Neveux (dir.), Les villes normandes au Moyen Âge ; renaissance, essor, crise, actes du colloque international de Cerisy-la-Salle (8-12 octobre 2003), Caen, Presses universitaires de Caen, 2006, p. 19-27.
2 Les travaux de Charles de Gerville, synthétisés dans ses Études géographiques et historiques sur le département de la Manche (Cherbourg, Feuardent, 1854), ont fourni la matière historique de base qui fut ensuite critiquée et complétée.
3 Voir par exemple la synthèse des fouilles réalisées au niveau de La Hague : Marcigny Cyril (dir.), La Hague dans tous ses états. Archéologie, histoire et anthropologie de la presqu’île de La Hague, s. l., Orep éditions, 2010, chapitre 8.
4 Casset Marie, « Des paysans contre la mer. Poldérisation et drainages des terres humides sur le littoral de la baie du Mont Saint-Michel au Moyen Âge (xie-xve siècles) », Annales de Normandie, n° 1, 2011, p. 75-106. Mollat Michel, « La seigneurie maritime du Mont Saint-Michel », in Raymonde Foreville (dir.), Millénaire monastique du Mont Saint-Michel, t. II : Vie montoise et rayonnement intellectuel, Paris, P. Lethielleux, 1967, p. 73-88.
5 Dutens Joseph, Histoire de la navigation intérieure de la France, avec une exposition des canaux à entreprendre pour en compléter le système, t. I, Paris, À Sautelet et Cie/A. Mesnier, 1829, p. 51.
6 Gerville C. de, Études géographiques et historiques…, op. cit., p. 82 ; Chesnel Paul, Le Cotentin et l’Avranchin depuis les origines jusqu’au xiie siècle, Coutances, E. Garlan, 1908, p. 28 ; Lecanu Auguste-François, Histoire du diocèse de Coutances et Avranches depuis les temps les plus reculés jusqu’à nos jours, t. II, Paris/Rouen, Champion/ Métérie, 1878, p. 263.
7 Le Héricher Édouard, Avranchin monumental et historique, t. I, Avranches, E. Tostain, 1846, p. 148.
8 Chesnel P., Le Cotentin et l’Avranchin…, op. cit., p. 7.
9 Le Héricher É., Avranchin monumental…, t. II, op. cit., p. 148, p. 624-628, p. 666.
10 AN, V7 73, amirauté de Caen, sans numéro.
11 Desroches Jean-Jacques, Annales civiles, militaires et généalogiques du pays d’Avranches ou de la toute Basse-Normandie, Caen, A. Hardel, 1856, p. 169-170.
12 Casset Marie, « Droit et droits sur le littoral de la baie du Mont-Saint-Michel au Moyen Âge (xie-xve siècles) », in Coutumes, doctrine et droit savant, actes du colloque organisé par l’Institut d’histoire du droit de l’université de Poitiers (20 et 21 octobre 2006), Poitiers, LGDJ, 2007, p. 89-104, loc. cit., p. 101.
13 Mollat M., « La seigneurie maritime du Mont-Saint-Michel », art. cité, p. 73-88.
14 Lecanu A.-F., Histoire du diocèse de Coutances…, t. II, op. cit., p. 295.
15 Guidelou M., Notice sur la ville de Granville, Granville, Noël Got, 1858, p. 12.
16 Chronique du Mont-Saint-Michel (1343-1468), t. I, publ. Siméon Luce, Paris, Firmin Didot, 1879, pièce n° LV, p. 185-194.
17 Les qualités du site ont été mises en évidence par les ingénieurs chargés d’étudier les moyens de développer ce port en 1686 puis 1738. SHD, 1 VH 817, n° 1, 8, 9.
18 Bnf, GE SH 18, Pf. 38, Div. 7, P. 8D. Carte particulière des environs de Granville representez de basse mer, Sainte Colombe, 1680.
19 SHD, 1 VH 817, n° 16. La Morandière Charles de, Histoire de Granville, Avallon, Éditions FERN, 1966 [2e édition augmentée], p. 42-43.
20 Deschamps du Manoir Joseph, Histoire du Mont-Saint-Michel au péril de la mer, et du Mont Tombelaine, Avranches, Auguste Thébault, 1869, p. 132 ; La Morandière C. de, Histoire de Granville, op. cit., p. 40-41. Guidelou M., Notice sur la ville de Granville…, op. cit., p. 10.
21 Guidelou M., Notice sur la ville de Granville…, op. cit., p. 13.
22 AN, JJ 177, fol. 110-111, n° 144, 145. SHD, 1 VH 817, n° 16. La Morandière C. de, Histoire de Granville, op. cit., p. 51-52.
23 La Trémoïlle Louis de, Prigent de Coëtivy, amiral et bibliophile, Paris, Honoté Champion, 1906, p. 61-62.
24 AN, JJ 199, fol. 070 v°-072, n° 120. Guidelou M., Notice sur la ville de Granville…, op. cit., p. 14 ; Lecanu A.-F., Histoire du diocèse de Coutances…, t. II, op. cit., p. 274 ; La Morandière C. de, Histoire de Granville, op. cit., p. 61-62.
25 BnF, P.O. 456, dossier Bourbon, n° 071, 306, 307 ; ms. fr. 26098, n° 1912.
26 BnF, P.O. 456, dossier Bourbon, n° 254, 255, 304.
27 Beaurepaire François de, « Le Cotentin sous Charles le Mauvais : les comptes de la vicomté de Coutances de Pâques 1356 et de Saint-Michel 1360 », in Henri Dubois, Philippe Manneville et Lise Wetzel-Dollfus (dir.), Recueil d’études normandes offert en hommage à Michel Nortier, Paris, Société parisienne d’histoire et d’archéologie normandes, 1995 [Cahiers Léopold Delisle, t. XLIV, n° unique, 1995], p. 255-277, loc. cit., p. 258.
28 Gerville C. de, Études géographiques et historiques…, op. cit., p. 180.
29 BnF, ms. fr. 26010, n° 1250. Ports maritimes de la France, t. III, op. cit., p. 126.
30 AN, MAR C4 174, amirauté de Coutances, p. 654.
31 Barré Éric, « À propos de digues, position d’un problème à partir de documents inédits concernant la baie de l’Ouve aux xive et xve siècles », in Bernard Bodinier (dir.), Eaux vives, eaux dormantes en Normandie, Louviers, Fédération des sociétés historiques et archéologiques, 2013, p. 71-77, loc. cit., p. 71.
32 Lecanu Auguste-François, Histoire des évêques de Coutances, depuis la fondation de l’évêché jusqu’à nos jours, Coutances, J.-V. Voisin, 1839, p. 75.
33 Ibid., p. 92.
34 Lecanu A.-F., Histoire des évêques de Coutances…, op. cit., p. 427.
35 Quenault Léopold, Recherches archéologiques, historiques et statistiques sur la ville de Coutances, Coutances, J.-J. Salettes, 1862, p. 8. Chesnel P., Le Cotentin et l’Avranchin…, op. cit., p. 178.
36 Barré Éric, « Et Carteret devint un havre », Le Viquet, n° 101, 1993, p. 2-3.
37 Asselin Auguste, Détails historiques sur l’ancien port de Cherbourg, pour servir de réponse à un mémoire de M. de Gerville ayant pour titre : Recherches sur l’état des ports de Cherbourg et de Barfleur pendant le Moyen Âge, Cherbourg, Boulanger, 1826, p. 15-16.
38 Fréville Ernest de, Mémoire sur le commerce maritime de Rouen depuis les temps les plus reculés jusqu’à la fin du xvie siècle, Rouen, Le Brument, 1857, t. I, p. 109-110 ; t. II, n° VII, p. 11.
39 AN, JJ 206, fol. 147 v°, n° 648.
40 Asselin A., Détails historiques sur l’ancien port de Cherbourg…, op. cit., p. 53.
41 Plaisse André, « Cherbourg durant la guerre de Cent Ans », in Jean-Yves Marin (dir.), La Normandie dans la guerre de Cent Ans, Mila, Skira, 1999, p. 22-25, loc. cit., p. 23.
42 Retau Dufresne Mme, Histoire de la ville de Cherbourg et de ses antiquités qui découvre des faits très importants sur l’histoire de Normandie, Paris, Ballard/Michel Lambert, 1760, p. v, p. vi, p. 20 ; Géhin Alexis, Histoire de la ville de Cherbourg de Voisin-la-Hougue, continuée depuis 1728 jusqu’à 1835 par Vérusmor, Cherbourg, Boulanger, 1835, p. 1-7, p. 30.
43 BnF, ms. fr. 26083, n° 6959.
44 Gerville C. de, Études géographiques et historiques…, op. cit., p. 101.
45 Houël du Hamel Gabriel, Notes sur l’histoire du département de la Manche, Caen, F. Poisson, 1825, p. 333 ; Retau Dufresne Mme, Histoire de la ville de Cherbourg…, op. cit., p. 85-86.
46 BnF, P.O. 549, dossier de Bueil, n° 111, 112, 115.
47 Asselin A., Détails historiques sur l’ancien port de Cherbourg…, op. cit., p. 60-62.
48 Dupont Gustave, Histoire du Cotentin et de ses îles, t. I, Caen, F. Le Blanc-Hardel, 1870, p. 311-312.
49 Dupont G., Histoire du Cotentin…, op. cit., p. 332.
50 Plusieurs exemples sont repris en particulier par : Musset Lucien, « Un empire à cheval sur la mer : les périls de mer dans l’État anglo-normand d’après les chartes, les chroniques et les miracles », in Les hommes et la mer dans l’Europe du Nord-Ouest de l’Antiquité à nos jours, éd. Alain Lottin, Jean-Claude Hocquet et Stéphane Lebecq, Revue du Nord, n° 1 spécial hors série, 1986, p. 413-424.
51 Neveux François, La Normandie des ducs aux rois, xe-xiie siècle, Rennes, Éditions Ouest-France, 1998, p. 216.
52 Lecanu A.-F., Histoire des évêques de Coutances…, op. cit., p. 143-144, p. 431.
53 Houël du Hamel G., Notes sur l’histoire du département de la Manche, op. cit., p. 252-253.
54 Bellot R.-P. et Drouet Louis, Notice historique sur la ville de Barfleur, Paris, Le Livre d’histoire, 2005, p. 19-43. Gerville C. de, Études géographiques et historiques…, op. cit., p. 84.
55 Retau Dufresne Mme, Histoire de la ville de Cherbourg…, op. cit., p. 51.
56 Gerville C. de, Études géographiques et historiques…, op. cit., p. 199.
57 Lecanu A.-F., Histoire des évêques de Coutances…, op. cit., p. 277.
58 AN, MAR C4 174, amirauté de la Hougue, p. 563.
59 AN, JJ 195, fol. 241 v°-242.
60 AN, V7 72, amirauté de Ouistreham.
61 BnF, GE DD 2987 (1070). Carte du grand et petit Vay, par Jean Magin (1670-1741), s. d.
62 Bernard R. P., Histoire de la ville de Saint-Lô et de ses environs, Saint-Lô, R. Jacqueline, 1953, p. 15-19.
63 Davila Henri-Caterin, Histoire des guerres civiles de France, contenant tout ce qui s’est passé de mémorable sous les règnes de François II, Charles IX, Henri III et Henri IV surnommé le Grand, t. I, trad. I. Baudouin, Paris, P. Rocolet, 1666 [4e éd.], p. 672-673.
64 AN, V7 71, amirauté de Caen.
65 Parey M., « De la navigation de la Vire au Moyen Âge », Notices, mémoires et documents publiés par la Société d’agriculture, d’archéologie et d’histoire naturelle du département de la Manche, vol. 1, 1re partie, 1851, p. 32-86 ; Descoqs André, « Étude sur la topographie du vieux Saint-Lô, des temps anciens à la fin du xve siècle », Notices, mémoires et documents publiés par la Société d’agriculture, d’archéologie et d’histoire naturelle du département de la Manche, vol. 35, 1923, p. 113-215, loc. cit., p. 178-179 ; Duruisseau Françoise, Saint-Lô, une histoire maritime et fluviale. La ville et la Vire des Gaulois à nos jours, s. l., s. n., 2003, p. 11-16.
66 Bernard R. P., Histoire de la ville de Saint-Lô…, op. cit., p. 18-19.
67 Flattet Louise, « Saint-Lô, port de mer et la Basse-Vire », Notices, mémoires et documents publiés par la Société d’agriculture, d’archéologie et d’histoire naturelle du département de la Manche, 61e vol, 1953, p. 5-18, loc. cit., p. 6.
68 AN, V7 71, amirauté de Barfleur, nos 408 et 499.
69 Musset Lucien, « Foires et marchés en Normandie à l’époque ducale », Annales de Normandie, 26e année, n° 1, 1976, p. 3-23, loc. cit., p. 7.
70 AN, V7 71, amirauté de Barfleur, nos 408 et 499.
71 Pontaumont Émile de, Histoire de la ville de Carentan et de ses notables d’après les monuments paléographiques, Paris, Dumoulin et E. Gouin, 1863, p. 238-239 ; Le Tenneur René, Carentan à travers les siècles. Histoire d’une petite ville normande, Coutances, Éditions OCEP, 1970, p. 299.
72 Gerville C. de, Études géographiques et historiques…, op. cit., p. 95-96 ; Le Tenneur R., Caretan à travers les siècles…, op. cit., p. 299.
73 Gerville C. de, Études géographiques et historiques…, op. cit., p. 182-183.
74 BnF, ms. fr. 26011, n° 1374.
75 Le Tenneur R., Carentan à travers les siècles…, op. cit., p. 316 ; Barre Éric, Les actes se rapportant à la vie maritime dans les registres de l’Échiquier de Normandie, conservés aux archives départementales de Seine-Maritime (Saint-Michel 1336 – Saint-Michel 1497), vol. 1, thèse de doctotat sous la direction de François Neveux, université de Caen, 17 juin 2004, dactyl., p. 168-169.
76 Huet Louis, Histoire civile, religieuse et commerciale d’Isigny (Calvados), Caen/Isigny, Brunet/Renouf, 1909, p. 7.
77 Antiquus cartularius ecclesiae Baiocensis (Livre noir), t. I, éd. Valentin-Victor-Arthur Bourrienne, Rouen/Paris, A. Lestringant/A. Picard, 1902, n° XLVI, p. 56-57 : « Passagium in transitu de Isigni et Nuilli. »
78 Huet L., Histoire civile, religieuse et commerciale d’Isigny…, op. cit., p. 4-6.
79 Ibid., p. 4.
80 Antiquus cartularius ecclesiae Baiocensis…, op. cit., t. I, n° XLVI, p. 56-57 ; n° LXXI, p. 89-90 ; Huet L., Histoire civile, religieuse et commerciale d’Isigny…, op. cit., p. 25.
81 Musset Lucien, « Les ports en Normandie du xie au xiiie siècle : esquisse d’histoire institutionnelle », Cahier des annales de Normandie, XVII, 1985, p. 113-128, loc. cit., p. 119.
82 Zysberg André, « Le Masson du Parc inspecte la côte du Bessin en juillet 1724 », Cahier des annales de Normandie, n° 35, 2009, p. 211-225, loc. cit., p. 221.
83 Musset Lucien, « Quelques notes sur les baleiniers normands du xe au xiiie siècle », Revue d’histoire économique et sociale, XLII, 1964, p. 147-161, loc. cit., p. 152.
84 Antiquus cartularius ecclesiae Baiocensis…, t. II, op. cit., n° CCCLXXV, p. 96-98.
85 Aubourg L., Notice sur Port-en-Bessin, Caen, E. Lanier, 1894, 16 p. ; Ports maritimes de la France, t. II : Du Havre au Becquet, op. cit., p. 495-503 ; Oblet Philippe, L’histoire de Port-en-Bessin, port de Bayeux, de l’époque celtique à 1971, Bayeux, La Renaissance du Bessin, 1974, p. 37-39.
86 Zysberg A., « Le Masson du Parc inspecte la côte du Bessin… », art. cité, p. 221.
87 Bnf, GE SH 18, Pf. 37, Div. 6, P 6D, Plan du Port-en-Bessin, s. n., 1675.
88 AN, V7 71, amirauté de Bayeux, n° 490.
89 La Rue Gervais de, Nouveaux essais historiques sur la ville de Caen et son arrondissement, contenant mémoires d’antiquités locales et annales militaires, politiques et religieuses, t. I, Caen, Mancel, 1842, p. 49-50. Recueil des actes de Henri II, roi d’Angleterre et duc de Normandie, concernant les provinces françaises et les affaires de France, t. II, éd. Léopold Delisle, Paris, Imprimerie nationale, n° DLXX, 1816, p. 149-155.
90 Jean-Marie Laurence, Le prince, la Normandie et la mer (milieu du xiie-1204), mémoire inédit de l’habilitation à diriger des recherches, université de Caen-Normandie, 9 décembre 2016, p. 299.
91 Dutens J., Histoire de la navigation intérieure…, op. cit., p. 48.
92 Désert Gabriel (dir.), Histoire de Caen, Toulouse, Privat, 1981, p. 86.
93 Jean-Marie Laurence, « Un espace de prélèvement des coutumes sur le commerce : ville, banlieue et prévôté de Caen », Le Moyen Âge, t. CXX, n° 1, 2014, p. 95-122.
94 BnF, ms. fr. 15541, fol. 158. Spont Alfred, La marine française sous le règne de Charles VIII, 1483-1493, Paris, Bureaux de la Revue, 1894, p. 45. La Rue Gervais de, Essais historiques sur la ville de Caen et son arrondissement, t. II, Caen, F. Poison, 1820, p. 325.
95 Pont Barthélemy, Histoire de la ville de Caen. Ses origines. Caen sous les ducs de Normandie, 2e vol., Caen, É. Alliot et Cie, 1866, p. 378.
96 Jean-Marie L., « Un espace de prélèvement des coutumes sur le commerce… », op. cit.
97 Texte français de la coutume de la prévôté de Caen (milieu xive siècle ?), publié par : Jean-Marie Laurence, « La coutume de la prévôté de Caen. Une définition des règles de prélèvement des taxes sur le commerce », Histoire urbaine, n° 30, 2011, p. 147-179, loc. cit., p. 170-171.
98 Mancel Georges et Woinez Charles-Ferdinand, Histoire de la ville de Caen et de ses progrès, Caen, Clérisse, 1836, p. 91 ; La Rue G. de, Nouveaux essais historiques…, op. cit., t. I, p. 134 ; t. II, p. 29.
99 Histoire de Caen, op. cit., p. 41.
100 Certain Eugène de, « Raoul Tortaire », in Bibliothèque de l’École des Chartes, t. XVI, 1855, p. 514. « Per tria ducta fere milia, lata parum, Portus habet grandes sibi quas mittat mare naves. »
101 Le Breton Guillaume, La Philippide, éd. François Guizot, Paris, J.-L.-J. Brière, coll. « Mémoires relatifs à l’histoire de France », 1825, p. 213.
102 La Rue G. de, Essais historiques sur la ville de Caen…, op. cit., p. 325.
103 Vaultier Frédéric, Histoire de la ville de Caen, depuis son origine jusqu’à nos jours, Caen, B. Mancel, 1843, p. 199-200.
104 Trebutien Guillaume-Stanislas, Caen, son histoire, ses monuments, son commerce et ses environs, Caen, F. Le Blanc-Hardel, 3e éd., s. d., p. 279.
105 Jean-Marie Laurence, Caen aux xie et xiie siècles. Espace urbain, pouvoirs et société, Caen, La Mandragore, 2000, p. 66-67, p. 205-206.
106 Vaultier F., Histoire de la ville de Caen…, op. cit., p. 257.
107 Carpentier Vincent, « Les Pieds dans l’Eau… ». La basse Dives et ses riverains, des origines aux temps modernes.
Contribution à l’histoire environnementale des zones humides et littorales de Normandie, thèse de doctorat sous la direction du professeur Claude Lorren, université de Caen – Basse-Normandie, 28 novembre 2007, dactyl., 7 vol., 2186 p., 265 pl. de fig.
108 Carpentier Vincent, « Les “seigneurs du marais”. Regard sur l’encadrement des hommes au bord des marais de la Dives (Calvados) : châteaux, maisons fortes, manoirs et prieurés, xie-xviiie siècle », in Des châteaux et des sources. Archéologie et histoire dans la Normandie médiévale, mélanges en l’honneur d’Anne-Marie Flambard Héricher, Mont-Saint-Aignan, Publications des universités de Rouen et du Havre, 2008, p. 221-253, loc. cit., p. 253.
109 Recueil des actes des ducs de Normandie de 911 à 1066, éd. Marie Fauroux, Caen, Caron et Cie, 1961, n° 34.
110 Musset L., « Les ports en Normandie… », art. cité, p. 118.
111 AN, MAR C4 174, amirauté de Dives, p. 400.
112 AN, V7 71, amirauté de Caen.
113 Boreux M., « Port de Dives », in Ports maritimes de la France, t. II : Du Havre au Becquet, op. cit., p. 385-402.
114 Dutens J., Histoire de la navigation intérieure…, op. cit., p. 48-49.
115 Carpentier Vincent, « Le portus de Dives-sur-Mer, Calvados. Naissance et physionomie d’un port ducal autour de 1066 », in A.-L. Piétri-Lévy, J. Barzman et É. Barré (dir.), Environnements portuaires, actes du colloque international et pluridisciplinaire du Havre-Rouen (24-25 mai 2001), Publications de l’université du Havre, n° 15/Publications de l’université de Rouen, n° 346, 2003, p. 83-95.
116 Carpentier Vincent, « Trois documents inédits sur les salines de la Dives (xiie-xive siècle) », Tabularia « Documents », n° 10, 2010, p. 1-36, loc. cit., p. 6-7.
117 AN, JJ 87, fol. 200, n° 314.
118 AN, MAR C4 174, amirauté de Dives.
119 AN, V7 71, amirauté de Touques, n° 479.
120 Gilbert André, « Les salines de Touques », Bulletin de la Société des antiquaires de Normandie, années 1888-1891, t. XV, 1891, p. 563-583, loc. cit., p. 564-565.
121 AN, X1A 0050, fol. 029 v°-030 v°, 28 mai 1403. « Pro parte dicte appellantis propositum extitisset quod jam dictum castrum de Touque notabile et antiquivi erat et fuerat et ad pontem ipsius ville de Touque mercatores, piscum, marinorum suos pisces et mercaturas descendem et ad portum trahere consueverant. »
122 AF, X1A 8300 B, fol. 66 v°-067, 7 juin 1403.
123 AN, V7 71, amirauté de Touques, n° 493.
124 Dutens J., Histoire de la navigation intérieure…, op. cit., p. 49 ; Seguin Richard, Histoire du pays d’Auge et des évêques, comtes de Lisieux, Vire, Adam, 1832, p. 295-296 ; Renard Jacques, Pont-l’Évêque et ses campagnes aux xviiie et xixe siècles, Paris, Éditions SPM, 2011, p. 22-23.
125 Gilbert A., « Les salines de Touques », art. cité, p. 566.
126 Cottin François, « Noviomagus Lexoviorum des temps les plus lointains à la fin de l’occupation romaine.
Notes de topographie, d’archéologie et d’histoire d’après les dernières découvertes », Bulletin de la Société des antiquaires de Normandie, LIII, 1955-1956, p. 169-196. Lantier Raymond, « Découvertes archéologiques à Lisieux (Calvados) », Comptes rendus des séances de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, 103e année, n° 2, 1959, p. 338-346.
127 Formeville Henri de, Histoire de l’ancien évêché-comté de Lisieux, t. I, Lisieux, E. Piel, 1873, p. ccccxlii.
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