Introduction à la deuxième partie
p. 157-158
Texte intégral
1Consolider la foi mais aussi la cohésion de la minorité protestante, telle est la volonté des dénominations protestantes. Pour ce faire, débute à la fin du xviiie siècle et au début du xixe siècle un vaste mouvement de restauration des pratiques collectives protestantes, dont la première manifestation est la reconstruction des espaces cultuels ou autres dédiés à la minorité : les temples, les cimetières, les écoles participent d’une démarche de réintégration des protestants à l’espace public. En effet, bien que le protestantisme désacralise ses territoires, ceux-ci n’en demeurent pas moins essentiels à la vie d’une minorité1.
2Dans la lignée de la théologie du Réveil, les œuvres protestantes sont également progressivement restaurées. En effet, au lendemain de la promulgation des Articles organiques du 18 germinal an X, les protestants ont investi massivement le domaine des œuvres, au point que lorsque Franck Puaux les évoque en 1893, son premier réflexe est de souligner leur multiplicité2. Dans le cadre du protestantisme, au contraire du catholicisme, celles-ci ne sont pas un gage de salut, mais il relève du devoir du chrétien de participer à la vie de la communauté. Selon Jean Baubérot, elles répondent, tout d’abord, à la nécessité de défendre les intérêts de la minorité protestante face à la prépondérance de l’Église catholique. Elles permettent ensuite d’« enraciner » auprès des fidèles un protestantisme renaissant et d’affirmer sa présence dans la sphère publique3.
3La participation des protestants à la vie politique est également un signe de leur réintégration dans la société civile. Celle-ci ne se réalise pas sans heurts et nombreux sont les débats sur la question religieuse au xixe siècle. Dans le pays de tradition catholique qu’est la France, les protestants, même libres de célébrer leur culte, suscitent la méfiance des pouvoirs publics de la Restauration au Second Empire, alors que la minorité protestante apparaît comme une base solide sur laquelle poser les fondements d’un nouveau régime politique à la fin du siècle4.
4Dans l’ensemble de ces domaines, diverses conceptions s’opposent, de sorte que le bâti religieux, les œuvres protestantes ou l’engagement politique sont autant l’expression d’une identité différenciée de la majorité catholique que la traduction dans l’espace public de « la concurrence fraternelle » à laquelle se livrent les dénominations protestantes.
Notes de bas de page
1 Reymond Bernard, L’architecture religieuse protestante, Genève, Labor et Fides, 1996.
2 Puaux Franck, Les œuvres du protestantisme français au xixe siècle : Exposition universelle de Chicago, Paris, Comité protestant français, 1893, p. vi.
3 Baubérot Jean, Le retour des Huguenots, op. cit., p. 47-50.
4 Encrevé André et Richard Michel (dir.), op. cit., 1979 ; Cabanel Patrick, Le Dieu de la République, op. cit., 2003 ; Cabanel Patrick, Les protestants et la République, Bruxelles, Éd. Complexes, 2000, p. 17-111.
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