Genre, ethnicité, classe
Colonialisme et invisibilité des femmes dans la résistance transnationale en Algérie (1939-1942)
p. 155-173
Texte intégral
1La résistance antifasciste en Algérie pendant la Seconde Guerre mondiale se distingue par son peu de visibilité, aussi bien dans l’historiographie que dans la mémoire publique, ce qui peut sembler étonnant si l’on se souvient que la France, où la mémoire de la résistance a joué un rôle crucial, est probablement le pays où le nombre de publications sur ce sujet est le plus élevé. Pourquoi, dès lors, ce manque d’intérêt ? La réponse n’est pas simple, mais je considère qu’il existe trois raisons principales. Tout d’abord, l’historiographie officielle française de l’après-guerre n’a montré que peu d’intérêt pour la résistance en Algérie, parce que celle-ci avait été constituée en grande partie par le principal adversaire politique de de Gaulle : les communistes1. En outre, après la libération de l’Afrique du Nord par l’armée américaine, l’Algérie fut un terrain hostile pour de Gaulle. Il y livra un long combat contre François Darlan, Henri Giraud et les autorités américaines, ce qui compliqua pendant des mois son installation sur ce territoire2.
2Une deuxième raison réside dans le lien conflictuel, en Algérie, entre résistance et colonialisme, ce qui entraîna des paradoxes gênants dans les discours gaulliste et communiste. C’est le 8 mai 1945 qu’on trouve l’expression la plus flagrante de ces conflits. Ce jour-là, alors que la France continentale célébrait dans la joie la victoire sur le fascisme, en Algérie les représentants de la France libre massacrèrent – un massacre qui allait durer plusieurs jours – les nationalistes algériens qui étaient sortis célébrer la libération avec une pancarte qui disait : « A bas le fascisme et le colonialisme3. » Les deux principaux projets de l’antifascisme français implosèrent ce jour-là en Algérie, à cause de leurs contradictions internes : la rhétorique de la libération du peuple (français) conjuguée avec le colonialisme gaulliste et la critique virulente de l’impérialisme intégrée dans le discours de la nation algérienne « en formation » des communistes4.
3En troisième lieu, la République algérienne démocratique et populaire, après son indépendance en 1962, ne se montra pas non plus intéressée à commémorer ou développer les travaux sur la résistance antifasciste pendant la Seconde Guerre mondiale. La nouvelle république s’attacha à renverser l’invisibilité traditionnelle du peuple algérien sous la culture coloniale française dominante. En ce sens, la présence majoritaire des communistes dans la résistance et le grand nombre de Français d’Algérie et de réfugiés européens dans ses rangs ne cadraient pas avec le discours nationaliste et anticolonial qui promouvait le souvenir des luttes menées par les Algériens, en particulier celles qui s’étaient déroulées pendant la guerre d’indépendance (1954-1962). « L’homme colonisé qui écrit pour son peuple, quand il utilise le passé, doit le faire dans l’intention d’ouvrir l’avenir […] [il doit] s’engager corps et âme dans le combat national », faisait remarquer Frantz Fanon5.
4L’histoire de la résistance en Algérie pendant la Seconde Guerre mondiale présentait trop de conflits et de défis pour les récits légitimateurs des principales communautés de mémoire impliquées : gaullistes, communistes et nationalistes algériens. Pour ces dernières, pendant les décennies qui suivirent, la résistance antifasciste en Algérie représenta plus une embûche qu’un élément clef de la construction de leurs identités respectives. De fait, la guerre en Algérie entre 1954 et 1962 finit par envahir les discours et les identités, en phagocytant le passé autour de la question du colonialisme et de l’indépendance. De cette façon, l’absence d’une communauté de mémoire qui revendique la résistance communiste en Algérie a facilité son invisibilité. C’est la raison pour laquelle, presque quatre-vingts ans après, il n’existe que deux monographies sur la résistance antifasciste en Algérie, toutes deux écrites par d’anciens déportés communistes qui furent internés dans les camps algériens. La première a été rédigée par le Français André Moine, un ancien des Brigades internationales6, tandis que l’on doit la seconde à trois anciens combattants et réfugiés espagnols7. Des auteurs comme Emmanuel Sivan, Jacques Jurquet, J. Làszlo Nagy, Charles-Robert Ageron ou Allison Drew, plus récemment, ont mis au jour ce passé caché8, en plus des études du « pionnier de la mémoire de la guerre d’Algérie », Jean-Luc Einaudi, qui a publié deux biographies sur deux éminentes figures du Parti Communiste d’Algérie (PCA) de l’époque9.
5Dans ce contexte, la participation des femmes à la résistance communiste en Algérie pendant la Seconde Guerre mondiale a pâti d’une double invisibilité. Les références dans les travaux, mémoires et biographies sont rares et quand elles apparaissent, les activités de ces femmes sont généralement représentées comme auxiliaires ou secondaires. Victoriano Barroso, un réfugié communiste espagnol, décrivit les femmes de la résistance en Algérie comme « des soldats sans uniforme dans une armée invisible10 ». V. Barroso a sans doute repris cette métaphore chez Élisabeth Terrenoire, auteure de Combattantes sans uniforme : les femmes dans la Résistance, publié en 194611. Mais le commentaire de V. Barroso est problématique car il identifie le travail des femmes avec la résistance civile, par opposition à la résistance, en uniforme et armée, des hommes. Toutefois, la résistance en Algérie entre 1939 et 1942 – à laquelle participa Victoriano Barroso lui-même – fut fondamentalement civile et non armée. Par conséquent, alors qu’aussi bien les femmes que les hommes travaillèrent conjointement dans la résistance civile, il percevait et décrivait les premières comme radicalement différentes12.
6L’invisibilité des femmes dans la résistance antifasciste en Algérie contraste avec la visibilité des femmes qui participèrent au mouvement de libération de l’Algérie. Il est évident que, pendant des décennies, ces dernières étaient également demeurées cachées, mais depuis les années 1990, l’historiographie a commencé à récupérer leurs parcours et leurs expériences. Les études se sont focalisées sur le mouvement nationaliste algérien, même s’il existe aussi quelques travaux sur les femmes communistes. Le genre, l’ethnicité, la religion et la nation ont constitué les quatre axes fondamentaux d’analyse qui ont structuré ces études au cours des dernières décennies13. De la même façon, l’invisibilité des femmes dans les résistances antifascistes européennes fut dénoncée et palliée, au moins partiellement, à partir des années 199014.
7Néanmoins, le modèle d’invisibilité des femmes dans la résistance antifasciste européenne ne peut être transféré directement au cas algérien. La spécificité du contexte colonial suppose des formes différentes de stigmatisation et d’oppression qui jouèrent pendant et après le temps de la résistance. En ce sens, le travail d’Ingrid Strobl est primordial puisqu’il souligne que, pour les femmes juives communistes dans la résistance antifasciste en Europe, le genre, l’ethnicité et l’idéologie constituèrent un triple stigmate dont d’autres femmes ne souffrirent pas15. L’avocate Kimberle Crenshaw ne disait pas autre chose quand elle créa le concept d’intersectionnalité. Les concepts du féminisme blanc ne permettent pas d’expliquer les multiples formes d’oppression des femmes noires des classes populaires. Genre, ethnicité et classe sont les bases de l’oppression des femmes de couleur16.
8Ce texte se propose de dévoiler l’existence, dans le contexte colonial algérien, de différents degrés de stigmatisation et d’invisibilité des femmes dans la résistance communiste, en fonction de leur genre, leur ethnicité et leur classe. Toutes les femmes que nous allons étudier (des femmes françaises d’Algérie d’origine française, des femmes françaises d’Algérie d’origine espagnole et des femmes algériennes) furent partie prenante d’une idéologie communiste qui luttait pour la fin du capitalisme et du colonialisme (et, dans une plus ou moins grande mesure, du patriarcat)17. L’ethnicité, la classe et le genre devaient cesser de fonder l’asservissement d’une majorité et les privilèges de quelques-uns, selon leurs principes. Pourtant, malgré leur indéniable engagement, chacune d’elles appartenait à une classe sociale et à une « ethnie » juridiquement définie par l’État, ce qui s’avérait crucial aussi bien en termes de rapports de pouvoir, que de droits et de mentalités. Les études doivent prendre en compte ces circonstances quand elles reconstruisent les parcours de militantisme des femmes dans la résistance, puisque ces éléments conditionnèrent leurs comportements, expériences, opportunités, capacités de mobilisation et visibilité.
Femmes françaises d’Algérie d’origine française dans la résistance communiste
9Le gouvernement colonial français divisa drastiquement la société algérienne entre un « nous », les Français d’Algérie, et un « eux », les Indigènes, les Musulmans. La religion, la langue et l’ethnicité traçaient une ligne qui se traduisait, en termes juridiques, en une distinction entre la nationalité et la citoyenneté : les Français d’Algérie jouissaient des deux, alors que les Algériens musulmans étaient exclus de la seconde18. Cette relation antagonique entre le colonisateur et le colonisé, basée sur le racisme et la domination, marqua de façon cruciale la répartition des richesses, l’obtention de droits civils et politiques, mais aussi la vie quotidienne de toutes les personnes qui vivaient en Algérie, y compris de celles qui voulaient renverser le système. Ce n’est pas un hasard si le PCA, jusqu’à la fin des années 1940, malgré ses efforts pour « arabiser » le parti en intégrant des cadres et des dirigeants algériens, fut formé majoritairement par des Français d’Algérie d’origine européenne qui ne connaissaient ni la langue arabe ni le kabyle et qui n’avaient pratiquement aucun contact avec des Algériens. Le Code de l’indigénat lui-même, en vigueur jusqu’en 1946, interdisait aux Algériens d’entrer au Parti communiste, ce qui rendit difficile l’expansion des communistes en dehors des marges françaises de l’Algérie. De fait, le PCA, dans une situation de concurrence évidente avec les mouvements nationalistes algériens, eut toujours les plus grandes difficultés à éliminer son image de parti « français19 ».
10Dans ce contexte, il n’est pas surprenant que la plupart des femmes qui s’engagèrent dans la résistance communiste entre 1939 et 1942 aient été des Françaises d’Algérie, dont le statut de citoyennes facilita la mobilisation. Néanmoins, il faudrait distinguer entre les femmes dont les familles venaient de France (le pays colonisateur) et les descendantes de familles non françaises (majoritairement espagnoles, italiennes, maltaises et juives). L’absence de statistiques sur les militants du PCA ne nous permet pas d’analyser les éventuelles différences dans la mobilisation féminine en fonction des origines. Toutefois, on peut confirmer que dans le contexte de la résistance communiste, les femmes d’origine française eurent plus de responsabilités au sein du PCA et une plus grande visibilité que leurs camarades d’origine non française.
11Au moins six femmes firent partie du Comité central du PCA entre 1940 et 1942 : Lisette Vincent, Yvonne Saillen, Odette Rossignol (également connue sous les noms d’Odette Laban et Odette Dei), Paulette Lenoir, Lise Oculi et Gaby Gimenez. Les cinq premières étaient d’origine française alors que Gaby Gimenez était d’origine espagnole. Les cinq femmes d’origine française appartenaient à la classe moyenne/supérieure des colons et avaient reçu une formation supérieure. Ce n’est pas non plus un hasard si Lisette Vincent, Yvonne Saillen, Paulette Lenoir et Lise Oculi ont été institutrices20. La Fédération algérienne du Syndicat des instituteurs, par ses propositions en faveur de l’Éducation nouvelle et de la pédagogie de Célestin Freinet, devint, dans les années 1930, un instrument essentiel de la politisation de nombreuses femmes françaises d’Algérie21.
12La visibilité d’Yvonne Saillen, Odette Rossignol, Paulette Lenoir et Lise Oculi dans les travaux sur la résistance est très réduite étant donné leur condition de femmes, mais elle reste supérieure à celle du reste de leurs camarades de résistance qui appartenaient aux classes populaires et d’une autre ethnicité. La seule exception, en termes de visibilité, concerne Lisette Vincent, la femme qui se détache le plus dans la résistance communiste en Algérie entre 1940 et 1942. Née à Oran en 1908, d’une famille de colons français, Lisette Vincent parvint à sortir de l’invisibilité dans les années 1990, en devenant la seule femme de la résistance antifasciste algérienne avec un certain rayonnement. Cependant, dans les années 1970 et 1980, la figure de Lisette Vincent était encore inconnue. Les deux monographies qui furent publiées à l’époque reproduisirent une image hyper-masculine de la résistance en Algérie, en ne prêtant aucune attention – ou si peu – à la participation des femmes. Par conséquent, Lisette Vincent n’apparaissait alors que dans une longue liste de personnes qui, en Algérie, avaient maintenu des contacts avec des organisations démocratiques françaises22 et comme appartenant à un groupe de communistes qui avaient aidé à faire évader un réfugié espagnol d’un camp de concentration dans le désert algérien23. Cette situation fut réparée grâce à la biographie écrite par Jean-Luc Einaudi en 1994 qui entraîna, trois ans plus tard, le tournage d’un documentaire sur sa vie24.
13Son invisibilité pendant des décennies est remarquable compte tenu du fait que Lisette n’était pas une militante quelconque de base, ni un cadre moyen du PCA, mais un des dirigeants communistes les plus importants entre 1940 et 1941. La politisation de Lisette Vincent débuta dans les années 1930, quand elle enseignait dans des écoles rurales en Algérie. Elle appartenait au groupe des professeurs progressistes qui appliquaient les nouvelles pédagogies de Célestin Freinet et qui, à l’encontre des lois coloniales, intégraient les élèves arabes dans les écoles françaises. En 1936, Lisette Vincent décida d’aller en France travailler avec Freinet à cause des menaces qu’elle recevait en Algérie. Cependant, un an après, elle revenait à Oran pour soutenir les campagnes en faveur de la Seconde République espagnole25. La guerre d’Espagne était devenue le symbole de l’antifascisme international, avec un impact particulier en Algérie où presque 500 volontaires se mobilisèrent pour lutter contre le fascisme26.
14Début 1938, Lisette Vincent décida de rejoindre les Brigades internationales. Elle admirait l’Union soviétique depuis des années mais son entrée définitive au parti communiste ne se produisit qu’une fois en Espagne. Là, elle travailla dans un hôpital militaire et dans une école maternelle de Barcelone pendant un an, tout en maintenant un contact épistolaire avec Freinet27. En arrivant en Espagne, elle connaissait quelques mots d’espagnol qu’elle avait appris enfant, de la bouche de servantes espagnoles. Un an plus tard, elle le parlait couramment, ce qui s’avéra fondamental dans le rôle qu’elle joua par la suite en Algérie. À la fin de la guerre d’Espagne, après un petit périple à travers l’Europe, elle regagna Oran et rejoignit le comité international d’aide à l’Espagne républicaine28. En avril 1939, entre 10000 et 12000 réfugiés espagnols qui fuyaient Franco arrivèrent en Afrique du Nord et 8000 d’entre eux, en Algérie29. Diverses organisations politiques algériennes aidèrent les réfugiés espagnols et les dizaines de brigadistes internationaux qui les accompagnaient. L’Internationale communiste fit un effort spécial qui se traduisit par une activité frénétique de solidarité de la part du PCF et du PCA30. Lisette Vincent se chargea de coordonner les réunions dans la Maison de l’Espagne afin d’organiser l’aide pour les réfugiés et, en même temps, elle devint la traductrice des dirigeants communistes espagnols en Algérie31.
15L’affluence massive de réfugiés espagnols eut une importance capitale dans la vie du PCA lors des années suivantes. En septembre 1939, les communistes algériens, aux côtés des communistes français déportés en Algérie, s’unirent aux réfugiés espagnols internés dans les camps de concentration, où ils se mirent immédiatement à travailler de concert. On ne connaît pas les chiffres totaux d’internés entre 1939 et 1942 en Afrique du Nord, mais en février 1943, de Gaulle révéla qu’on avait découvert 15000 dossiers de prisonniers politiques. Anthony Eden, alors secrétaire aux Affaires étrangères et membre de la Chambre des communes, affirma quelques jours plus tard qu’en novembre 1942, au moment du débarquement américain, ils avaient trouvé 7100 prisonniers politiques en Afrique du Nord : 900 Français, 3200 Espagnols et 3000 d’autres nationalités. La culture colonialiste avait rendu invisibles les internés algériens, qui ne furent pas comptabilisés dans les chiffres officiels32.
16Le très grand nombre d’internés espagnols aide à comprendre l’importance que les communistes espagnols eurent en Algérie. La direction et les cadres du PCA entre 1939 et 1942 furent intégrés par des dizaines d’étrangers (Espagnols, Français, Allemands, Italiens, etc.), mais il s’agissait, pour la plupart, d’Espagnols ou de Français d’Algérie d’origine espagnole. L’influence des communistes espagnols sur le PCA atteignit de telles proportions qu’Emmanuel Sivan en vint à parler, pour cette période, de la « tutelle » espagnole et ce, jusqu’à la fin de 194133. Lisette Vincent reconnut que « sans l’appui et l’expérience des communistes espagnols réfugiés en Algérie depuis la guerre, nous n’aurions rien pu faire34 ».
17En septembre 1939, Lisette Vincent entra dans la clandestinité après l’interdiction du PCA. Le fils d’un commissaire de ses amis la prévint et elle réussit à s’échapper avant d’être arrêtée. En janvier 1940, le PCA constitua un nouveau Comité central dirigé par Amar Ouzegane avec l’aide du communiste espagnol Ramón Via35, un réfugié qui devint une figure clé du PCA pendant ces années de clandestinité36. Fin 1939, Lisette Vincent et d’autres membres du PCA avaient organisé son évasion du camp Morand et il était immédiatement entré dans le CC du PCA37. De fait, c’est lui qui, plusieurs fois entre 1940 et 1942, fut chargé de reconstruire la direction du PCA. C’est ce qui arriva en mai 1940, quand tous les membres du CC, sauf lui, furent arrêtés. Ramón Via organisa un nouveau CC avec Thomas (Tomás) Ibáñez, Espagnol selon certains auteurs, ou Français d’Algérie d’origine espagnole pour d’autres38, comme nouveau secrétaire général. Thomas Ibáñez demanda alors à trois anciens des Brigades internationales de se joindre au Comité : Maurice Laban, George Raffini et Lisette Vincent, les autoproclamés « Trois Mousquetaires39 ».
18Dès lors, Lisette Vincent fut une figure clé au sein du PCA et de la Résistance. Étant donné le grand nombre de militants espagnols qui travaillaient au Parti, sa connaissance de l’espagnol fut vitale pour la coordination des activistes. Elle obtint le matériel nécessaire pour que Ramón Via crée une imprimerie clandestine afin d’éditer Lutte Sociale, le journal du parti40. Dans le numéro de novembre 1940, la publication d’un manifeste où le PCA défendait ouvertement l’indépendance de l’Algérie eut une très grande répercussion41. Lisette Vincent rédigeait des consignes, écrivait des articles, cherchait des matériaux pour falsifier les papiers et faisait partie des réseaux d’évasion des camps de concentration. Selon un rapport de police, elle était alors le bras droit du secrétaire général du parti, Thomas Ibáñez42.
19Néanmoins, tout commença à se compliquer au début de 1941. Tous les membres du CC, sauf Ramón Via et Lisette Vincent, furent arrêtés entre janvier et mars. Pour cette raison, ces deux derniers devinrent les plus hauts responsables du PCA de février à août 1941. La répression frappait durement le parti. Il était de plus en plus difficile de trouver des cadres qualifiés et l’on eut donc plus fréquemment recours aux communistes espagnols. Cela provoqua, cependant, une crise au sein du parti. Ahmed Smaïli, lui-même ancien des Brigades internationales, était mécontent du manque d’algérisation du PCA et du pouvoir excessif des Espagnols43. D’anciens camarades des Brigades internationales comme Lisette Vincent ou Maurice Laban parlèrent avec Ahmed Smaïli pour trouver un terrain d’entente. Pour clore cette crise, Ramón Via et Lisette Vincent organisèrent clandestinement le 4e Congrès national du PCA en juin 1941. L’objectif était de préciser la ligne politique du parti et sa nouvelle direction. Sept personnes vinrent à la réunion : quatre communistes espagnols, deux Français d’Algérie (dont Lisette Vincent) et un Algérien (Ahmed Smaïli). La réunion n’eut lieu ni en français ni en arabe, mais en espagnol, avec une traduction française. Les Espagnols et Lisette Vincent tentèrent d’expliquer à Ahmed Smaïli que la forte présence des Espagnols dans le parti était due aux circonstances exceptionnelles de la guerre. Ils soulignèrent également qu’en tant que communistes, ils étaient anti-impérialistes, anticolonialistes et que le PCA n’avait jamais défendu de façon aussi catégorique qu’alors l’indépendance de l’Algérie. Toutefois, Ahmed Smaïli n’était pas convaincu à l’issue de la réunion44.
20L’atmosphère était tendue. Le PCA avait subi des arrestations successives, il était divisé et n’avait pas de direction politique. Selon Lisette Vincent, Ahmed Smaïli commença à répandre la rumeur selon laquelle les Espagnols étaient des traîtres et des indicateurs de la police. Pour calmer la situation et éviter la rupture, Lisette Vincent et Ramón Via demandèrent une nouvelle réunion avec Ahmed Smaïli. Finalement, après plusieurs semaines de négociations, ce dernier accepta une rencontre, en août 1941. Cependant, au lieu du rendez-vous prévu, c’est la police qui se présenta et non Ahmed Smaïli. Ramón Via parvint à s’échapper en se lançant sur un terre-plein, mais Lisette Vincent fut arrêtée. Elle a toujours maintenu qu’Ahmed Smaïli les avait vendus à la police45. Bien que les raisons de ces tensions internes aient été de diverse nature, incluant notamment celles qui sont propres à la clandestinité, il est évident que les tensions coloniales, d’ordre culturel et personnel, jouèrent un rôle. Les communistes espagnols et français d’Algérie, d’origine européenne, n’étaient pas imperméables aux rapports de pouvoir, aux stéréotypes et préjugés de la société coloniale algérienne.
21Après son arrestation, Lisette Vincent fut torturée, emprisonnée et, quelques mois plus tard, condamnée à mort. Toutefois, après la libération de l’Afrique du Nord, elle sortit de prison et assuma un secrétariat au sein du PCA. Jusqu’à la mi-1944, elle travailla avec André Marty, qui s’était rendu en Algérie pour organiser le PCF et superviser les activités du PCA. En juillet 1944, pourtant, Lisette Vincent fut expulsée du PCA sans aucune explication. Elle disparut alors immédiatement du récit officiel de la résistance antifasciste du PCA46. Mais, en 1947, elle y fut de nouveau acceptée et acclamée comme une « grande camarade » par Marty lui-même47. Cependant, ses relations avec le parti se détériorèrent jusqu’à ce que, en 1954, elle abandonne définitivement le PCA. Son implication dans les luttes syndicales et pour l’indépendance de l’Algérie l’obligea à s’exiler au Maroc en 1956, où elle entra au FLN et organisa l’aide aux réfugiés algériens. En 1962, après la libération, Lisette Vincent rentra en Algérie et rejoignit l’Union des femmes d’Algérie. Toutefois, son rêve d’une Algérie indépendante où cohabiteraient toutes les personnes, indépendamment de leur origine, prit fin avec le coup d’État militaire de 1965. Son organisation féministe fut interdite et, en 1972, elle partit finalement pour la France48.
22La biographie de Lisette Vincent est exceptionnelle à plus d’un titre : de par sa participation aux Brigades internationales en Espagne, à la résistance pendant la Seconde Guerre mondiale et à la libération de l’Algérie. Après la publication de sa biographie et le tournage du documentaire, en 1997 elle reçut enfin la première reconnaissance officielle publique quand la mairie de Fontaine, où elle résidait depuis les années 1970, la fit « citoyenne d’honneur », en présence du consul d’Algérie à Grenoble. Elle mourut deux ans plus tard, à l’âge de 91 ans49. L’année suivante, la création d’une organisation féministe à Fontaine, sous le nom de Femmes solidaires de Fontaine – Comité Lisette Vincent, constitua une nouvelle reconnaissance publique ; cette organisation continue à fonctionner aujourd’hui encore50. Il s’agit d’hommages modestes, mais il ne faut pas oublier que c’est la reconnaissance la plus importante qu’ait jamais reçue une femme de la résistance communiste en Algérie.
Femmes françaises d’Algérie d’origine espagnole dans la résistance communiste
23Les premiers processus de naturalisation d’étrangers en Algérie datent de la moitié du xixe siècle, mais deux lois eurent un énorme impact : le Décret Crémieux, de 1870, par lequel on donna la citoyenneté française à des milliers de Juifs en Algérie, et la loi de 1889, avec les mêmes effets pour la population européenne non française. Dans les deux cas, il s’agissait d’un octroi juridique, de la nationalité et de la citoyenneté, entraînant donc la reconnaissance de tous les droits civils et politiques afférents51. Ainsi, ils faisaient leur entrée dans la communauté des Français d’Algérie, ce qu’on appelait aussi, au début du xxe siècle, le « peuple algérien », dont les Algériens musulmans étaient exclus52.
24Cependant, il serait erroné de conclure que la reconnaissance de l’égalité en termes juridiques entre les Français d’Algérie d’origine française et le reste des nouveaux Français élimina les rapports de pouvoir et de distinction sociale. La plupart des Français naturalisés étaient arrivés en Algérie comme main-d’œuvre immigrée bon marché (majoritairement espagnole, italienne et maltaise) importée pour le développement capitaliste du système colonial français. Par-delà leur claire subalternité en termes de classe, depuis la fin du xixe siècle, s’était propagée parmi les classes moyennes et une partie des classes populaires françaises en Algérie la peur du « péril étranger », « provoquant chez ces dernières une vive hostilité à l’égard des étrangers “qui viennent voler notre travail et notre pain”53 ». Le racisme, l’antisémitisme et les conflits de classes rendent problématique, dès lors, l’idée d’une communauté égalitaire et unitaire de Français européens en Algérie.
25Dans le cas des immigrés et fils d’immigrés espagnols (la plus grande communauté étrangère en Algérie dans les années 1930), la situation empira après le début de la guerre en Espagne (1936-1939). Une vague de xénophobie parcourut toute la France avec l’arrivée des premiers réfugiés espagnols. Dans le cas de l’Algérie, la presse colonialiste et, en particulier, le maire d’Oran et l’abbé Gabriel Lambert lancèrent une campagne au vitriol contre eux, les qualifiant de « racaille » et de « pègre internationale54 ». Des milliers de réfugiés furent immédiatement conduits dans des camps de concentration dans le désert, où le système colonial français, entre 1939 et 1943 (c’est-à-dire avant et après le régime de Vichy en Algérie) les soumit à des tortures, des vexations, à la faim et aux travaux forcés55.
26Ce contexte de répression et de subalternité n’entraîna pas la démobilisation des Français d’Algérie d’origine espagnole ni des réfugiés espagnols, bien au contraire, au point qu’ils jouèrent un rôle de premier ordre dans la résistance communiste. En réalité, les travaux sur la résistance en Algérie furent pionniers pour donner de la visibilité au caractère transnational de la résistance antifasciste56. Néanmoins, cette visibilité se limita aux hommes, la participation des femmes françaises d’Algérie d’origine espagnole et des réfugiées espagnoles demeurant totalement cachée.
27La grande exception fut Gabrielle (Gaby) Gimenez, la seule femme d’origine espagnole dont la participation à la résistance antifasciste en Algérie ait obtenu, récemment, une certaine visibilité. Les grands-parents de Gaby Gimenez étaient des paysans espagnols qui émigrèrent à la fin du xixe siècle, à la recherche d’un travail. Son père, naturalisé français grâce à la loi de 1889, fit la Première Guerre mondiale dans l’armée française57. Quand Gabrielle naquit à Oran en 1920, elle obtint la nationalité française et le registre civil modifia son nom espagnol (Jiménez) pour une graphie plus proche du français : Gimenez58.
28Gaby Gimenez fut la seule femme d’origine non française à faire partie du CC du PCA pendant la période de clandestinité. Entre 1940 et 1941, elle travailla activement à reconstruire le PCA, aux côtés de Thomas Ibáñez, Lisette Vincent, Ramón Via, Maurice Laban et George Raffini. Elle participa à la déclaration que fit le parti en faveur de l’indépendance, en 1940. De même, elle effectua des missions de liaison et des travaux de dactylographie pour le journal Lutte Sociale jusqu’à son arrestation en 1941. Un an plus tard, elle fut condamnée aux travaux forcés à perpétuité59. La visibilité de sa participation à la résistance pendant la Seconde Guerre mondiale est due, en grande partie, au rôle qu’elle joua des années plus tard, dans la lutte pour l’indépendance de l’Algérie. En 1956, le PCA, de nouveau dans la clandestinité, avait créé un réseau de groupes paramilitaires pour organiser la résistance. Gaby Gimenez était la responsable politique de ces groupes et elle fut arrêtée. Après avoir été torturée, elle fut emprisonnée pendant sept ans, jusqu’à ce que, en avril 1962, elle soit expulsée d’Algérie, quelques mois seulement avant la proclamation de l’indépendance60.
29Par-delà le cas exceptionnel de Gaby Gimenez, la dynamique générale est celle d’une totale invisibilité des femmes espagnoles ou d’origine espagnole dans la résistance en Algérie, alors que leur rôle fut crucial pour le mouvement. Le cas de Remedios Martínez, fille d’immigrés espagnols, va me permettre de le montrer clairement. Dans toute la bibliographie sur la résistance communiste en Algérie, il n’a été écrit qu’une seule ligne sur elle (littéralement, une seule ligne) dans la monographie publiée en 1981 par trois anciens réfugiés espagnols. On pourrait penser que Remedios Martínez n’avait peut-être pas joué de rôle important dans la résistance en Algérie, ce qui expliquerait son manque de visibilité, mais l’information que nous livre cette ligne paraît suggérer le contraire : « À Alger, Remedios Martínez, condamnée à mort par contumace le 19 septembre 194261. » Les peines de mort étaient réservées aux membres les plus significatifs de la résistance. Par conséquent, qui fut la mystérieuse Remedios Martínez dont on ne connaît que ce qu’en dit cette phrase inquiétante ?
30Les dates de naissance et de mort de Remedios Martínez sont inconnues. De fait, la seule information que nous ayons sur elle a trait à sa participation à la résistance à travers la documentation du Parti communiste d’Espagne (PCE). Toutefois, il ne s’agit pas d’une documentation spécifique sur Remedios Martínez, mais sur Ramón Via, son camarade dans la clandestinité et son compagnon entre 1940 et 1946. Notre connaissance de Remedios Martínez est donc médiatisée par sa relation avec Ramón Via et c’est à travers son histoire à lui, en réalité, que nous la découvrons. Son histoire commence avec lui, quand ils se rencontrent en 1940 et elle s’arrête presque avec lui, quand il meurt en 1946. La vie de Remedios Martínez, avant et après Ramón Via, est un grand vide, comme une métaphore de l’invisibilité des femmes dans l’histoire.
31Les informations que j’ai pu obtenir sur Remedios Martínez sont maigres, mais suffisantes pour montrer le rôle important qu’elle a joué dans la résistance en Algérie. Elle travaillait dans une usine d’espadrilles et militait au PCA, ainsi qu’au Secours populaire algérien. En janvier 1940, le PCA la chargea d’aider un réfugié évadé d’un camp de concentration : Ramón Via. À partir de cet instant, selon les rapports du PCE, elle « l’aidait dans de nombreux travaux et lui servait d’interprète62 ». Pendant dix-sept mois, elle fut la courroie de transmission entre Ramón Via et le PCA dans différentes régions. Quand ils imprimaient Lutte sociale ou des textes de propagande, Ramón Via dictait en espagnol et elle transcrivait le texte en français63. Elle se rendait à la prison de Barberousse pour contacter les dirigeants communistes espagnols, algériens et français, auxquels elle passait clandestinement des messages et des publications. Elle était également chargée de trouver des logements chez la population d’origine espagnole où les membres du parti puissent se réfugier ou pour y installer les imprimeries clandestines. Après l’évasion de plusieurs camarades de prison, c’est elle que l’on chargea de leur faire quitter Alger pour qu’ils ne soient pas de nouveau arrêtés64.
32La documentation du PCE apporte un autre détail intéressant : pendant tout le temps où elle demeura dans la clandestinité, Remedios Martínez fut « habillée en mauresque65 ». Ce petit détail nous permet d’analyser deux aspects importants. D’un côté, le terme « maure/mauresque » comporte généralement en espagnol une nuance raciste ou, du moins, méprisante par rapport à la population maghrébine et musulmane66, ce qui montre l’attitude des communistes espagnols vis-à-vis de la population algérienne. De l’autre, le fait qu’elle utilise cette stratégie pour passer inaperçue aux yeux des forces répressives nous parle non seulement d’une occultation physique par le vêtement, mais surtout de l’invisibilité culturelle des femmes algériennes dans la société coloniale française.
33Les rapports du PCE nous livrent des informations sur toutes ces activités réalisées par Remedios Martínez dans la résistance, mais leur description se fait toujours sur un ton condescendant. Ramón Via est représenté comme le grand héros de la résistance en Algérie, alors qu’elle apparaît comme une auxiliaire efficace, mais peureuse. Il ne fait aucun doute que le travail de Ramón Via au PCA pendant les années de clandestinité fut extraordinaire, mais aurait-il pu l’effectuer sans le travail de femmes comme Remedios Martínez ou Lisette Vincent ? Il ne faut pas oublier que Ramón Via ne parlait pas français et que, pendant des mois, il dut rester caché, de sorte qu’il revint à Remedios Martínez et à Lisette Vincent de maintenir les contacts au sein de la résistance communiste en Algérie. À la lumière de tout ceci, il n’est pas surprenant qu’un tribunal militaire de Vichy ait condamné à mort Remedios Martínez. Ce qui est étonnant c’est que son histoire soit restée dans l’ombre jusqu’à maintenant ou que des camarades comme Lisette Vincent, qui ne cessa de faire l’éloge de Ramón Via, ne l’ait jamais mentionnée67.
34La visibilité de Remedios Martínez dans la documentation du PCE est toujours liée à sa proximité avec Ramón Via. Après que celui-ci fut rentré en Espagne pour combattre la dictature de Franco, en 1944, les références à Remedios Martínez disparurent presque complètement. Elle réapparut en 1945, quand le PCE intercepta une lettre que Ramón Via lui avait envoyée depuis la prison de Malaga où il était incarcéré, pour lui demander de se mettre en contact avec Larbi Bouhali, dirigeant communiste algérien du PCA, afin qu’il essaie de l’aider68. Un an plus tard, Remedios Martínez apparaît pour la première fois dans la presse du PCE quand elle intervient dans une cérémonie publique, à Alger, en mémoire de « son camarade jusqu’à sa mort », Ramón Via, qui vient d’être assassiné par la dictature de Franco69.
35Après la mort de Ramón Via, la figure de Remedios Martínez s’estompe progressivement. Nous n’avons que trois très brèves nouvelles d’elle, liées à son activité au PCE en France et en Algérie, où l’on continue de souligner ses liens sentimentaux avec Ramón Via. La première nouvelle concerne son arrestation à Paris quand elle essayait de prendre l’avion pour rentrer en Algérie avec un autre membre du PCE auquel on confisqua plusieurs documents du parti70. Finalement, en mars 1947, « la camarade Remedios Martínez, compagne de notre inoubliable Ramón Via » ouvrit l’assemblée plénière du Comité régional du PCE à Alger et participa à la IIIe Assemblée Plénière du PCE à Paris71. Après cela, Remedios Martínez disparaît de la surface de la terre. À cette époque, elle devait avoir environ trente ans, mais avec la mort de Ramón Via sa vie fut renvoyée au terrain féminin bien connu du silence et de l’anonymat. Ce bref exercice d’exhumation de l’histoire de Remedios Martínez souligne clairement l’invisibilité qui continue d’être celle de dizaines de femmes de la résistance en Algérie, du fait de leur genre, leur ethnicité et leur classe.
Hommes et femmes algériens dans la résistance communiste
36Dans le cas des hommes et des femmes algériens, tous ces aspects revêtent un caractère beaucoup plus extrême que pour n’importe quel Français d’Algérie d’origine européenne, de sorte qu’à l’heure d’analyser leur rôle dans la résistance communiste en Algérie entre 1939 et 1942, nous nous heurtons surtout au problème de leur manque de participation. Les principales raisons de cette absence furent leur condition subalterne en tant que sujets colonisés et l’incapacité du PCA, majoritairement composé d’hommes d’origine européenne, à entrer en contact avec la population algérienne. Le PCA, dès ses débuts, eut les plus grandes difficultés à pénétrer dans la communauté algérienne, ce qui explique la rareté des réseaux d’aide algériens dans la résistance communiste en Algérie entre 1939 et 1942. Il est évident qu’il y eut quelques Algériens qui furent d’importants dirigeants du PCA pendant la clandestinité, comme Kaddour Belkaïm, Larbi Bouhali, Mohamed Tahar Kateb, Kaddour Khobzi et Ahmed Smaïli, notamment72. Néanmoins, comme le fit remarquer Ahmed Smaïli à plusieurs reprises, la culture et la présence européennes imprégnaient les espaces et les discours du parti.
37En 1940, Maurice Laban reconnut dans un rapport interne que « Notre parti n’a à peu près aucune organisation dans les masses arabes, grave lacune qui nous inquiète sérieusement73 ». Il concluait en informant qu’il avait mis au point une nouvelle méthode de distribution de la propagande qui permettrait de résoudre cette situation, en ramenant le problème à une question de procédé technique. Il oubliait d’aborder l’élément crucial : le fait que les expériences des hommes et des femmes algériens dans le contexte colonial étaient radicalement différentes de celles des Européens.
38J’utiliserai l’exemple de l’expérience de plusieurs volontaires des Brigades internationales pour illustrer cette idée. Maurice Laban et George Raffini, jeunes gens de classe moyenne/supérieure de nationalité française, abandonnèrent leurs études de chimie et de droit, dans les universités de Paris et d’Alger respectivement, pour rejoindre les Brigades internationales car ils voulaient combattre le fascisme en Espagne74. L’expérience d’Ahmed Smaïli, algérien de la classe des travailleurs, fut très différente. Quand il se présenta dans les bureaux de recrutement et qu’on lui demanda sa nationalité, il répondit : « Sujet français (pas citoyen). » Quand on lui demanda s’il appartenait à un parti, il répondit : « J’ai milité illégalement ou semi-légalement parce qu’en tant que sujet français non citoyen, il m’était interdit d’appartenir au PC sous peine de déportation. » De fait, quand on lui demanda les raisons pour lesquelles il rejoignait les Brigades Internationales, en plus de son intérêt pour la lutte contre le fascisme, il donna une autre raison essentielle : il fuyait l’Algérie pour ne pas être emprisonné parce qu’en 1937, il avait été arrêté quatre fois pour avoir enfreint le Code de l’indigénat75. Ne pas prendre en compte cette condition subalterne des Algériens dans le système colonial français fut l’une des raisons clefs des tensions et du manque de connexion du PCA avec la population algérienne.
39Cette même situation se reproduisit avec les femmes algériennes, avec lesquelles le parti fut tout aussi incapable de communiquer. Déjà en 1936, lors du Congrès inaugural du PCA, Alice Sportisse, fille d’immigrés espagnols, avait attiré l’attention sur « la quasi-impossibilité de recruter des femmes “indigènes”76 ». En 1941, Yvonne Saillen signalait que les femmes préféraient travailler dans des organisations comme le Secours populaire algérien plutôt que dans un PCA très majoritairement masculin. De son point de vue, le Secours populaire pouvait être un bon instrument pour mobiliser les « éléments arabes » qui étaient si réticents à participer à la résistance77.
40Pourtant, la méconnaissance et le dédain du PCA pour les cadres culturels musulmans de mobilisation durant cette période les empêchèrent d’attirer les femmes algériennes. La constitution de cellules mixtes, par exemple, composées d’hommes et de femmes, conduisait, de fait, les femmes algériennes de l’époque à préférer rester à l’écart. Baya Allaouchiche, l’une des plus éminentes militantes du PCA et de l’Union des femmes d’Algérie (organisation très fortement liée au PCA et créée en 1944), reconnaît que lorsqu’elle commença à militer, elle était la seule femme algérienne dans les cellules mixtes78. Toutefois, même après la fin de la Seconde Guerre mondiale, la propagande du PCA continuait à ne pas reconnaître publiquement ce problème. Lise Oculi alla jusqu’à déclarer que 20000 femmes, européennes et algériennes, s’étaient unies fraternellement dans la lutte contre le fascisme en Algérie79. Le PCA commença à redresser la situation à la fin des années 1940, quand il se mit à organiser des groupes et comités exclusivement féminins, ce qui lui permit finalement de rompre – bien que partiellement – la barrière avec la communauté musulmane80.
Conclusion
41L’invisibilité des femmes dans l’histoire est un problème séculaire, corrigé uniquement de façon partielle depuis la seconde moitié du xxe siècle. Dans le cas de la mobilisation politique des femmes dans la résistance antifasciste, l’invisibilité se prolongea jusqu’à la fin du xxe siècle. Néanmoins, j’ai montré dans ce texte que l’invisibilité des femmes en Algérie a rencontré des obstacles plus importants parce qu’il s’agissait d’une colonie française. Le colonialisme, en tant que force institutionnelle, mais également comme culture et mentalité très puissantes, créa des formes de domination plus complexes que dans les métropoles européennes.
42Dans ce texte, j’ai montré, grâce à des sources inédites des archives françaises, espagnoles et soviétiques, que les processus de subalternité imprégnèrent la résistance transnationale antifasciste en Algérie à travers le genre, mais aussi par le biais de la classe sociale et de « l’ethnicité ». Les femmes françaises d’Algérie d’origine française souffrirent parce qu’elles étaient des femmes, mais elles réussirent à assumer de plus grandes responsabilités dans la résistance et elles eurent plus de visibilité que les femmes françaises d’Algérie d’origine étrangère ou les femmes réfugiées ou immigrées, appartenant à la classe ouvrière et à une « ethnicité » étrangère. Toutefois, ce sont les femmes algériennes, plongées dans la plus grande misère et considérées comme appartenant à une « ethnie inférieure », qui furent totalement condamnées à l’ostracisme. D’un côté, de par leur condition de femmes non « citoyennes », selon les lois coloniales, il leur était très difficile de devenir des sujets politiques actifs dans la résistance. Mais, par-delà les obstacles juridiques, le colonialisme culturel, assumé inconsciemment par les forces de la résistance antifasciste, favorisa leur faible participation. La résistance communiste en Algérie était internationaliste, fière d’être ouvrière et elle défendait l’égalité des femmes et des hommes. Malgré cela, elle fut incapable, sur le terrain, de transcender les pratiques de domination et de stigmatisation d’une société coloniale, capitaliste et patriarcale.
Notes de bas de page
1 Sur d’autres réseaux de résistance, non communistes, en Algérie : Christine Levisse-Touzé, L’Afrique du Nord dans la Guerre, 1939-1945, Paris, Éditions Albin Michel, 1998, p. 208-230 ; Jean-Jacques Jordi et Guy Pervillé (dir.), Alger 1940-1962 : Une ville en guerres, Paris, Éditions Autrement, 1999, p. 70-75 ; Robert Gildea, Fighters in the Shadows : A New History of the French Resistance, Londres, Faber & Faber, 2015, p. 242-261.
2 Olivier Wieviorka, Histoire de la Résistance, 1940-1945, Paris, Perrin, 2013, p. 193-203 ; Arthur L. Funk, « Giraud and De Gaulle : A Backward Glance », Current History, n° 135, 1952/23, p. 316-325 ; Julian Jackson, France : The Dark Years, 1940-1944, Oxford, Oxford University Press, 2001, p. 447-474.
3 Guy Pervillé, De l’Empire français à la décolonisation, Paris, Hachette Supérieur, 1991, p. 111.
4 Emmanuel Sivan, Communisme et nationalisme en Algérie, 1920-1962, Paris, Presses de la Fondation nationale des sciences politiques, 1976, p. 106-116 ; Allison Drew, We are no longer in France : Communist in colonial Algeria, Manchester, Manchester University Press, 2014, p. 110-144.
5 Frantz Fanon, Les damnés de la terre, Paris, La Découverte/Poche, 2002, p. 221.
6 André Moine, Déportation et Résistance en Afrique du Nord (1939-1944), Paris, Éditions sociales, 1972. Sur André Moine : René Gallissot (dir.), Algérie : Engagements sociaux et question nationale. De la colonisation à l’indépendance de 1830 à 1962. Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier, Maghreb, Paris, Éditions de l’Atelier/Éditions ouvrières, 2006, p. 484-487.
7 Lucio Santiago, Rafael Barrera et Gerónimo Lloris, Internamiento y resistencia de los republicanos españoles en África del Norte durante la Segunda Guerra Mundial, San Cugat del Vallés, Imprenta El Pot, 1981.
8 Emmanuel Sivan, Communisme et nationalisme en Algérie, op. cit., p. 117-139 ; Jacques Jurquet, La Révolution nationale algérienne et le Parti communiste français, t. 2, Paris, Éditions du Centenaire, 1979 ; J. Làszlo Nagy, « Les activités communistes en Algérie sous le régime de Vichy », Cahiers d’Histoire de l’institut de Recherches Marxistes, 11, 1982, p. 87-100 ; Charles-Robert Ageron, « Le Parti Communiste Algérien de 1939 à 1943 », Vingtième Siècle. Revue d’histoire, 12 (1986), p. 39-50 ; Allison Drew, We are no longer in France, op. cit., p. 110-144.
9 Jean-Luc Einaudi, Un Algérien, Maurice Laban, Paris, Le Cherche-Midi, 1999 ; Jean-Luc Einaudi, Un rêve algérien : Histoire de Lisette Vincent, une femme d’Algérie, Paris, Presses universitaires de France, 2001. Sur Jean-Luc Einaudi : Catherine Simon, « Jean-Luc Einaudi, pionnier de la mémoire de la guerre d’Algérie, est mort », Le Monde, 23-03-2014 [http://www.lemonde.fr/disparitions/article/2014/03/23/jean-luc-einaudi-pionnier-de-la-memoire-de-la-guerre-d-algerieest-mort_4387989_3382.html#6w3ZlAAbq8mMi22K.99], consulté le 19 octobre 2016.
10 Victoriano Barroso, En Nombre de la Libertad. Páginas de mi Diario de Guerra y Exilio, 1936-1945, Madrid, Silex, 2014, p. 115.
11 Élisabeth Terrenoire, Combattantes sans uniforme : les femmes dans la Résistance, Paris, Bloud & Gay, 1946.
12 Sur la distinction complexe entre résistance civile et armée : Jacques Semelin, Unarmed Against Hitler : Civilian Resistance in Europe, 1939-1943, Westport, Praeger, 1983, p. 23-31.
13 Danièle Djamila Amrane-Minne, Des femmes dans la guerre d’Algérie. Entretiens, Paris, Éditions Karthala, 1994 ; Andrée Dore-Audibert, Des Françaises d’Algérie dans la guerre de libération, Paris, Éditions Karthala, 1995 ; Monique Gadant, Le nationalisme algérien et les femmes, Paris, L’Harmattan, 1995 ; Baya Jurquet-Bouhoune et Jacques Jurquet, Femmes algériennes. De la Kahina au Code de la Famille, Pantin, Le Temps des Cerises, 2007 ; dossier « Les femmes dans la guerre », Mémoria. Supplément El Djazaïr, 22, 2014 ; Natalya Vince, Our Fighting Sisters : Nation, Memory and Gender in Algeria, 1954-2012, Manchester, Manchester University Press, 2015, etc.
14 Invisibilité en France, Italie et Espagne : Margaret Collins Weitz, Sisters in the Resistance : How Women Fought to Free France, 1940-1945, New York, John Wiley & Sons, 1995, p. 7 ; Anna Bravo, « Résistance civile, résistance des femmes en Italie 1943-1945 », in Jean-Marie Guillon et Robert Mencherini (dir.), La Résistance et les Européens du Sud, Paris, L’Harmattan, 1999, p. 44-45 ; Mercedes Yusta Rodrigo, « Rebeldía individual, compromiso familiar, acción colectiva. Las mujeres en la resistencia al franquismo durante los años cuarenta », Historia del Presente, n° 4, 2004, p. 73.
15 Ingrid Strobl, Partisanas : Women in the Armed Resistance to Fascism and German Occupation (1936- 1945), Édimbourg, AK Press, 2008, p. 1-16.
16 Kimberle Crenshaw, « Mapping the Margins : Intersectionality, Identity Politics, and Violence against Women of Color », Stanford Law Review, n° 43, 1991/6 ; Bonnie Thornton Dill et Ruth Enid Zambrana (éd.), Emerging Intersections : Race, Class, and Gender in Theory, Policy, and Practice, New Brunswick, Rutgers University Press, 2009.
17 Sur les rapports complexes entre marxisme et féminisme : Lydia Sargent (éd.), Women and Revolution : a discussion of the unhappy marriage of Marxism and Feminism, Montréal, Black Rose Books, 1981. Dans le contexte algérien : Pierre-Jean Le Foll-Luciani, « “J’aurais aimé être une bombe pour exploser”. Les militantes communistes algériennes entre assignations sexuées et subversions des rôles de genre (1944-1962) », Le Mouvement social, n° 255, 2016, p. 36-40.
18 Jan Herman Reestman, « Citizenship and Nationality : The Case of (Post-) Colonial France and Europe », The Irish Review, n° 24, 1999, p. 18-20 ; Laure Blévis, « Les avatars de la citoyenneté en Algérie coloniale ou les paradoxes d’une catégorisation », Droit et société, n° 48, 2001, p. 557-580.
19 Emmanuel Sivan, Communisme et nationalisme en Algérie, op. cit., p. 57-59 ; Allison Drew, We are no longer in France, op. cit., p. 3, 9, 96-97 ; Allison Drew, « Bolshevizing Communist Parties : The Algerian and South African Experiences », International Review of Social History, 48, 2003, p. 170 ; Pierre-Jean Le Foll-Luciani, « “J’aurais aimé être une bombe pour exploser”. Les militantes communistes algériennes », op. cit., p. 40.
20 Voir, par exemple René Gallissot (dir.), Algérie : Engagements sociaux et question nationale, op. cit., p. 307-309, 403, 426, 495, 545-546 ; Alison Drew, We are no longer in France, op. cit., p. 113, 118, 121, 129 ; Baya Jurquet-Bouhoune et Jacques Jurquet, Femmes algériennes, op. cit., p. 95.
21 Pierre Boutan, « Les débuts de l’Éducation nouvelle en Algérie d’après le Bulletin de la Fédération algérienne du Syndicat National des Instituteurs », Recherches & éducations, 4, 2011, p. 65-78.
22 André Moine, Déportation et Résistance en Afrique du Nord, op. cit., p. 301.
23 Lucio Santiago, Rafael Barrera et Gerónimo Lloris, Internamiento y resistencia de los republicanos españoles en África del Norte, op. cit., p. 113.
24 Jean-Luc Einaudi, Un rêve algérien : Histoire de Lisette Vincent, une femme d’Algérie, op. cit. ; Lisette Vincent, une femme algérienne (1997), réalisé par Jean-Pierre Lledo.
25 Sur ces premières années : Jean-Luc Einaudi, Un rêve algérien : Histoire de Lisette Vincent, op. cit., p. 15-118.
26 Anne Dulphy, « L’Algérie entre la France et l’Espagne de 1936 à 1939 : les répercussions de la Guerre Civile », Matériaux pour l’histoire de notre temps, 3, 2010, p. 51-59 ; Salvador Bofarull, « Brigadistas árabes en la Guerra de España », Nación Árabe, 52, 2004, p. 121-134.
27 Archives personnelles de la volontaire des Brigades internationales Lisette Vincent. RGASPI. F. 545. Op. 6. D. 1437 (Archives étatiques russes).
28 Jean-Luc Einaudi, Un rêve algérien : Histoire de Lisette Vincent, op. cit., p. 121-164, 166.
29 Les chiffres de réfugiés espagnols en Afrique du Nord varient selon les auteurs : entre 10 000 et 12000 chez Anne Grynberg et Anne Charaudeau, « Les camps d´internement », in Milza, Pierre et Peschanski, Denis (dir.), Exils et Migration : Italiens et Espagnols en France, 1938-1946, Paris, L’Harmattan, 1994, p. 144. Un chiffre de 12000 selon Juan Bautista Vilar, « El exilio español de 1939 en el Norte de África », Historia del Presente, n° 12, 2008, p. 19, 21. Dans le cas de l’Algérie, le chiffre de 8000 est dans Lucio Santiago, Rafael Barrera et Gerónimo Lloris, Internamiento y resistencia, op. cit., p. 17.
30 Sur la question des réfugiés espagnols et des combattants des Brigades internationales : Confidencial. Internacional Comunista. 16 de junio de 1939. Caja 97/2.1 (Archives historiques du Comité central du Parti Communiste d’Espagne, AHCCPCE.)
31 Jean-Luc Einaudi, Un rêve algérien : Histoire de Lisette Vincent, op. cit., p. 121-164 et 166.
32 André Moine, Déportation et Résistance en Afrique du Nord, op. cit., p. 262 ; Political Prisoners and Internees. House of Commons, 3rd March, 1943. Vol. 0387 c521 [http://liparm.llgc.org.uk/data/ S5CV0387P0/S5CV0387P0-02044-02061.html], consulté le 21 octobre 2016.
33 Emmanuel Sivan, Communisme et nationalisme en Algérie, op. cit., p. 117-119.
34 Témoignage de Lisette Vincent dans Andrée Dore-Audibert, Des Françaises d’Algérie dans la guerre de Libération, op. cit., p. 186.
35 Allison Drew, We are no longer in France, op. cit., p. 114.
36 Jorge Marco, Guerrilleros and Neighbours in Arms : Identities and Cultures of Anti-Fascist Resistance in Spain, Brighton, Sussex Academic Press, 2016, p. 49-57.
37 Témoignage de Lucio Santiago et Lisette Vincent dans J. Làszlo Nagy, « Les activités communistes en Algérie sous le régime de Vichy », op. cit., p. 99 ; Lucio Santiago, Rafael Barrera et Gerónimo Lloris, Internamiento y resistencia de los republicanos españoles en África del Norte, op. cit., p. 113.
38 Considéré comme Espagnol par Emmanuel Sivan, Communisme et nationalisme en Algérie, op. cit., p. 118 et Charles-Robert Ageron, « Le Parti Communiste Algérien de 1939 à 1943 », op. cit., p. 43. Considéré comme Français d’origine espagnole dans Allison Drew, We are no longer in France, op. cit., p. 117 ; René Gallissot (dir.), Algérie : Engagements sociaux et question nationale, op. cit., p. 347-349.
39 Charles-Robert Ageron, « Le Parti Communiste Algérien de 1939 à 1943 », op. cit., p. 43 ; Allison Drew, We are no longer in France, op. cit., p. 117. L’auto-qualification des « trois mousquetaires » est dans Jean-Luc Einaudi, Un rêve algérien : Histoire de Lisette Vincent, op. cit., p. 248.
40 Jean-Luc Einaudi, Un rêve algérien : Histoire de Lisette Vincent, op. cit., p. 188 ; Témoignage de Lisette Vincent dans Andrée Dore-Audibert, Des Françaises d’Algérie dans la guerre de Libération, op. cit., p. 185-186.
41 Allison Drew, We are no longer in France, op. cit., p. 118.
42 Jean-Luc Einaudi, Un rêve algérien : Histoire de Lisette Vincent, op. cit., p. 206-208.
43 Allison Drew, We are no longer in France, op. cit., p. 117.
44 Témoignage de Lucio Santiago et Lisette Vincent dans J. Làszlo Nagy, « Les activités communistes en Algérie sous le régime de Vichy », op. cit., p. 99-100 ; Allison Drew, We are no longer in France, op. cit., p. 120.
45 Jean-Luc Einaudi, Un rêve algérien : Histoire de Lisette Vincent, op. cit., p. 190-193.
46 Lise Oculi, « La Participation des femmes d’Algérie à la lutte contre le fascisme », in Congrès International des Femmes. Compte rendu des travaux du Congrès qui s’est tenu à Paris du 26 novembre au 1er décembre 1945, édité par la Fédération démocratique internationale des femmes, Paris, 37 rue Jouvenet, Paris, 1946, p. 70-72. Je remercie Mercedes Yusta de m’avoir communiqué ce texte.
47 Ibid., p. 236-241.
48 Andrée Dore-Audibert, Des Françaises d’Algérie dans la guerre de libération, op. cit., p. 188-191 ; Jean-Luc Einaudi, Un rêve algérien : Histoire de Lisette Vincent, op. cit., p. 242-251.
49 Jean-Luc Einaudi, Un rêve algérien : Histoire de Lisette Vincent, op. cit., p. 274.
50 Page web de l’association [http://jo-association.info/v2/38600/20000031-FEMMES-SOLIDAIRES-DE-FONTAINE-COMITE-LISETTE-VINCENT.php], consultée le 15 octobre 2016.
51 Laure Blévis, « Les avatars de la citoyenneté en Algérie coloniale », op. cit., p. 563-568.
52 Charles-Robert Ageron, Histoire de l’Algérie contemporaine, t. II : 1871-1954, Paris, Presses universitaires de France, 1979, p. 118.
53 Larbi Talha, « De l’immigration coloniale à l’émigration des coloniaux : colonisation, migrations internationales et mobilisation primitive des forces de travail », Annuaire de l’Afrique du Nord, n° 20, 1982, p. 20 ; Charles-Robert Ageron, Histoire de l’Algérie contemporaine, t. II, op. cit., p. 121-124.
54 Les expressions « racaille » et « pègre internationale » sont dans « Resumen de la situación vivida por la inmigración española en África del Norte », s/f. Caja 103 (ACCPCE). Sur les campagnes et le climat xénophobes en Algérie : Samuel Kalman, French Colonial Fascism : The Extreme Right in Algeria, 1919-1939, New York, Palgrave Macmillan, 2013, p. 100-130.
55 Marie-Claude Rafaneau-Boj, Los campos de concentración de los refugiados españoles en Francia, 1939-1945, Barcelone, Omega, 1995, p. 145-168 ; Kamel Kateb, « Les immigrés espagnols dans les Camps en Algérie, 1939-1941 », Annales de démographie historique, n° 113, 2007/1.
56 André Moine, Déportation et Résistance en Afrique du Nord, op. cit. ; Lucio Santiago, Rafael Barrera et Gerónimo Lloris, Internamiento y resistencia de los republicanos españoles en África del Norte, op. cit. D’autres travaux pionniers : Robert Mencherini, Midi rouge, ombres et lumières : une histoire politique et sociale de Marseille et des Bouches-du-Rhône de 1930 à 1950, t. 3 : Résistance et Occupation (1940-1944), Paris, Éditions Syllepse, 2011 ; Robert Gildea, Fighters in the Shadows : A New History of the French Resistance, op. cit.
57 Andrée Dore-Audibert, Des Françaises d’Algérie dans la guerre de libération, op. cit., p. 87-88.
58 René Gallissot (dir.), Algérie : Engagements sociaux et question nationale, op. cit., p. 307.
59 Andrée Dore-Audibert, Des Françaises d’Algérie dans la guerre de libération, op. cit., p. 88-90 ; René Gallissot (dir.), Algérie : Engagements sociaux et question nationale, op. cit., p. 308 ; Allison Drew, We are no longer in France, op. cit., p. 117-118, 121.
60 Allison Drew, We are no longer in France, op. cit., p. 219-220 ; Andrée Dore-Audibert, Des Françaises d’Algérie dans la guerre de libération, op. cit., p. 92-96.
61 « En Argel, Remedios Martínez, condenada a muerte en rebelión el 19 de septiembre de 1942. » Lucio Santiago, Rafael Barrera et Gerónimo Lloris, Internamiento y resistencia, op. cit., p. 114.
62 « Le ayudaba en muchos de sus trabajos y le servía de intérprete. »« Datos sobre Ramón Via », Caja 44 Carpeta 19.2 (ACCPCE).
63 « Ramón Via (Síntesis biográfica) », Caja 44 Carpeta 19.2 (ACCPCE).
64 « Datos sobre Ramón Via », Caja 44 Carpeta 19.2 (ACCPCE).
65 « Vestida de mora ». « Ramón Via (Síntesis biográfica) », Caja 44 Carpeta 19.2 (ACCPCE).
66 Prudencio García Isasti, « El moro como paradigma del otro en el Nacionalismo español », in Antonio Duplá Ansuategui, Piedad Frías Nogales et Iban Zaldúa (éd.), Occidente y el otro : Una historia de miedo y rechazo, Vitoria, Ayuntamiento de Vitoria Gasteiz, 1996, p. 165-184.
67 Témoignage de Lisette Vincent dans Andrée Dore-Audibert, Des Françaises d’Algérie dans la guerre de Libération, op. cit., p. 186.
68 Lettre du Parti communiste d’Espagne en Algérie à Francisco Antón, l’informant d’une lettre envoyée par Ramón Via depuis l’Espagne à Remedios Martínez en Algérie. 14 décembre 1945. Jacq. 752 (ACCPCE).
69 « Su compañero hasta su muerte. » « ¡Ramón Via ha sido asesinado ! », Ahora, 18 de julio de 1946 (ACCPCE).
70 « Informe de [Pepe] Ruiz », s. d. [probablement 1946] Jacq. 685 (ACCPCE).
71 « La camarada Remedios Martínez, compañera de nuestro inolvidable Ramón Via. » Mundo Obrero, 20 mars 1947, Mundo Obrero, 3 avril 1947 et España Popular, 11 avril 1947. (ACCPCE).
72 René Gallissot (dir.), Algérie : Engagements sociaux et question nationale, op. cit., p. 100, 156-161, 380, 392-394, 555-556.
73 Jean-Luc Einaudi, Un rêve algérien : Histoire de Lisette Vincent, op. cit., p. 272.
74 Archives personnelles du volontaire des Brigades internationales Maurice Laban et de Georges Raffini. RGASPI. F. 545. Op. 6. D. 1252 et RGASPI. F. 545. Op. 6. D. 1363 respectivement (Archives étatiques russes).
75 Archives personnelles du volontaire des Brigades internationales Ahmed Smaïli. RGASPI. F. 545. Op. 6. D. 1405 (Archives étatiques russes).
76 Pierre-Jean Le Foll-Luciani, « “J’aurais aimé être une bombe pour exploser”. Les militantes communistes algériennes », op. cit., p. 40.
77 Jean-Luc Einaudi, Un rêve algérien : Histoire de Lisette Vincent, op. cit., p. 188-189.
78 Andrée Dore-Audibert, Des Françaises d’Algérie dans la guerre de Libération, op. cit., p. 28.
79 Lise Oculi, « La Participation des femmes d’Algérie à la lutte contre le fascisme », op. cit., p. 72.
80 Pierre-Jean Le Foll-Luciani, « “J’aurais aimé être une bombe pour exploser”. Les militantes communistes algériennes », op. cit., p. 41.
Auteurs
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Un constructeur de la France du xxe siècle
La Société Auxiliaire d'Entreprises (SAE) et la naissance de la grande entreprise française de bâtiment (1924-1974)
Pierre Jambard
2008
Ouvriers bretons
Conflits d'usines, conflits identitaires en Bretagne dans les années 1968
Vincent Porhel
2008
L'intrusion balnéaire
Les populations littorales bretonnes et vendéennes face au tourisme (1800-1945)
Johan Vincent
2008
L'individu dans la famille à Rome au ive siècle
D'après l'œuvre d'Ambroise de Milan
Dominique Lhuillier-Martinetti
2008
L'éveil politique de la Savoie
Conflits ordinaires et rivalités nouvelles (1848-1853)
Sylvain Milbach
2008
L'évangélisation des Indiens du Mexique
Impact et réalité de la conquête spirituelle (xvie siècle)
Éric Roulet
2008
Les miroirs du silence
L'éducation des jeunes sourds dans l'Ouest, 1800-1934
Patrick Bourgalais
2008