Une crise alimentaire intense
Production, écoulement et consommation dans l’Autriche-Hongrie en guerre
p. 265-282
Texte intégral
1Durant la Première Guerre mondiale, tant pour les forces armées qu’à l’arrière, la nourriture devint une ressource peu abondante – et donc décisive – pour l’Empire habsbourgeois. Pour les contemporains, ce fut une surprise tant la double monarchie était autosuffisante dans le domaine alimentaire, quelques importations substantielles venant répondre aux besoins lors des années de mauvaises récoltes. Or, si l’historiographie classique a bel et bien mis la problématique alimentaire au cœur des enjeux du conflit pour l’Empire1, les implications environnementales ont été largement ignorées jusqu’à nos jours.
2Ce chapitre propose de démontrer que l’approche de la question alimentaire en Autriche-Hongrie se doit de dépasser les seuls cadres nutritifs des individus. L’alimentation est en effet l’un des maillons de plusieurs chaînes alimentaires dans lesquelles les plantes et les animaux jouent un rôle fondamental. Et la dégradation de leur condition pendant le conflit eut des effets décisifs dans la crise alimentaire que connut le régime durant cette période. Dès lors, la nutrition des plantes, des animaux et des hommes participe à la bonne marche du régime alimentaire de l’Empire pendant la guerre. De fait, ce régime alimentaire en général et la chaîne alimentaire en particulier doivent alors prendre en compte les rapports entre production et consommation, de même que le cadre général institutionnel2.
Une production alimentaire déséquilibrée
3Si l’on suit la statistique officielle, la production agricole en Autriche-Hongrie diminua drastiquement durant le conflit (tableau 1). La part de l’agriculture dans le PIB passa de 9 430 à 5 639 couronnes entre 1913 et 1917, soit une chute de 40 %, une contraction encore plus sévère en Autriche ( – 48 %) qu’en Hongrie (34 %). Du côté des cultures à proprement parler, tant la surface que le rendement diminuèrent (tableaux 2 et 3), mais avec d’importantes nuances régionales : tandis que les surfaces emblavées diminuaient de près d’une moitié en Autriche, elles restèrent plutôt stable en Hongrie ; du côté des rendements, les deux territoires enregistrèrent un déclin très net, encore plus marqué en Autriche qu’en Hongrie. Par exemple, les rendements des céréales panifiables connurent en Autriche une chute de 38 % entre 1913 et 1917 pour le froment et 44 % pour le seigle, contre 20 % et 19 % en Hongrie. Cette détérioration toucha également le bétail, plus particulièrement en Autriche ( – 20 % pour les bovins, – 61 % pour les cochons, – 15 % pour les moutons entre 1910 et 1917)3. Cette dégradation était encore plus sensible dans les régions où stationnaient des forces armées. Dans le Tyrol, à proximité de la ligne de front, les familles paysannes étaient particulièrement touchées par les réquisitions militaires touchant le foin et le bétail4.
4En conséquence, en dépit de différences régionales, l’agrosystème habsbourgeois perdit un grande part de ses potentialités durant la guerre.
5En considérant que l’agriculture est une forme de « colonisation » de la nature par les êtres humains8, la détérioration des conditions de production peut alors être envisagée comme la conséquence des impacts humains, mais également environnementaux, de la guerre. Un impact purement humain fut la dévastation par le conflit des terres agricoles dans le Nord-Est. En effet, dès les premiers moments de la guerre, l’occupation de la Galicie et de la Bucovine (qui représentaient environ un tiers de la production de céréales dans le pays) assécha en partie l’approvisionnement intérieur. Au gré des occupations par les forces armées (ennemies ou non), ces territoires agraires ne purent jamais retrouver leur plein rendement avant la fin de la guerre. Les impacts environnementaux se firent ressentir dès 1914 en lien avec les conditions météorologiques. Ainsi, la Hongrie touchée par de forts épisodes climatiques contraires (comme des pluies très abondantes en juillet) enregistra une chute de ses rendements pour l’année 1914, au contraire de l’Autriche9.
6Mais l’impact le plus considérable pour la production agricole fut la diminution de la nutrition des animaux et des plantes, tous deux résultant de facteurs sociaux et environnementaux. Comme partout en Europe, la mobilisation a ainsi entraîné un manque de main-d’œuvre conséquent, tandis que les réquisitions ciblaient animaux de trait et engrais naturels ou minéraux. Dans ce contexte, l’exploitation d’un grand nombre de prisonniers de guerre ne permit pas de remplacer les fermiers, métayers ou ouvriers agricoles partis sous les drapeaux : selon des estimations contemporaines, les performances des prisonniers soviétiques étaient estimées à 30-50 % de celles des travailleurs habituels10. De son côté, le bétail n’était pas seulement menacé par la réquisition, mais également par le manque de subsistance. Puisque les importations d’oléagineux s’amenuisaient et que les graines alimentaires comme les racines étaient désormais destinées à l’alimentation humaine, les animaux des fermes n’étaient plus nourris qu’avec des produits de qualité très inférieure : paille, sang séché et restes de cuisine venaient remplacer les tourteaux d’oléagineux, tandis que cannes de maïs et bruyère se substituaient aux fibres (foin naturel par exemple), conformément aux souhaits de nombreux scientifiques, bureaucrates ou autres entrepreneurs. Ainsi, nombre de ces produits étaient commercialisés sous des marques aux noms fantaisistes et trompeurs tels « Triomphe », « Idéaux » et « Lucratif ». En conséquence de rations alimentaires insuffisantes, la force de traction animale, les poids des carcasses ou les rendements laitiers diminuèrent tant en quantité qu’en qualité11.
7De même, la diminution du fumier eut un impact négatif sur la nutrition des plantes. Les quantités d’engrais azotés (salpêtre du Chili et sulfate d’ammonium) accumulées avant la guerre s’affaiblirent rapidement en raison du blocus maritime et des priorités militaires. En 1916, les autorités décidèrent de construire des usines pour la production de cyanamide calcique selon le procédé Frank-Caro dans divers endroits (Bohême, Styrie ou Transylvanie), mais sans effets réels sur la production agricole. Par ailleurs, les réserves d’engrais phosphatés (guano ou superphosphate par exemple) devenaient précaires également. L’exploitation de grande ampleur de dépôts osseux dans des grottes datant de l’âge de la pierre pour en extraire engrais riche en phosphates ne démarra pas avant la fin de la guerre12. Le remplacement par des engrais produits en Autriche-Hongrie (comme le cyanamide calcique) ou des ersatz (les os réduits en poudre) des produits importés avant la guerre depuis l’étranger s’avéra inefficace, au même titre que le souhait de maximiser l’action des nutriments des sols en utilisant un surplus de chaux. Dans la région agraire du Tyrol par exemple, l’utilisation d’engrais minéraux passa de 3 800 à 1 700 tonnes entre 1913 et 1918, un déclin qui coïncide avec la diminution de l’utilisation de nitrogène et de phosphore, remplacés par la potasse dont l’utilisation fit plus que quadrupler13. En outre, la sous-utilisation d’engrais naturels en raison de la diminution du bétail eut des conséquences néfastes sur les sols et leur composition, réduisant leur fertilité14. Sans surprise, en 1919, le journal agricole Wiener Landwirtschaftliche Zeitung mit en exergue l’épuisement massif des champs pendant la guerre15.
8De surcroît, le rétrécissement des flux énergétiques et matériels dans les régions agro-pastorales fut aggravé par les attitudes du monde paysan face aux réquisitions et aux injonctions administrativo-politiques. Ainsi, les tentatives des autorités étatiques pour imposer un prix maximum sur les productions alimentaires eurent un effet négatif immédiat sur les agriculteurs et ne les incitèrent pas à améliorer voire à stabiliser leur production, notamment dans le domaine céréalier. Les effets de la guerre sur la demande – et notamment l’accroissement des prix dans certains secteurs – poussèrent alors les plus gros propriétaires à changer de stratégies productives : ils s’orientèrent vers l’alimentation animale, transformèrent des terres arables en champs et pâturages, et utilisèrent même certaines cultures à destination des hommes pour les animaux. Toutefois, ces revirements provoqués par la rentabilité de certaines productions – elle-même due à l’action de l’État – impliquèrent peu les petits et moyens paysans. Ces derniers se contentèrent souvent d’ajuster leurs efforts aux besoins de la consommation familiale, loin des considérations spéculatives du marché.
L’approvisionnement alimentaire en question
9Bien que la double monarchie fût globalement autosuffisante dans le domaine alimentaire avant-guerre, dans les deux parties de l’Empire – séparé par la rivière Leitha, et ainsi appelé Cisleithanie et Transleithanie – les niveaux d’autosuffisance étaient particulièrement disparates. Alors que l’Autriche était autosuffisante en produits laitiers, seulement les deux-tiers des céréales panifiables et 40 % du maïs étaient produits dans le pays ; le reste était importé de Hongrie. De plus, les ressources en viande étaient encore plus maigres : la moitié seulement des porcs et 30 % des bovins provenaient d’élevages nationaux ; le reste ici provenait aussi de Hongrie16. Ces chiffres révélaient la division du travail agricole – et ses déséquilibres – mise en œuvre dans l’Empire au moins depuis la moitié du xviiie siècle. L’Autriche concentrait la force industrielle en Styrie, Bohême, Moravie, Silésie, produisant du textile et des équipements technologiques. Autour de ces régions se trouvait une périphérie agricole où les communautés paysannes exploitaient des propriétés éparpillées. La Hongrie concentrait, elle, la production agricole, dominée par de vastes propriétés cultivées par des ouvriers agricoles en nombre et proposant une large gamme de produits végétaux et animaux. Cette division interrégionale fut renforcée par l’union douanière austro-hongroise de 1850, ouvrant le marché alimentaire de Vienne (soit plus de deux millions de consommateurs) aux produits et marchands magyars. De facto, la filière agro-alimentaire hongroise formait le plus secteur le plus dynamique de l’économie hongroise, tandis que l’Autriche développait une économie industrielle tournée vers l’exportation17.
10Nourrir les deux millions d’habitants de la capitale impériale fut l’un des enjeux majeurs pour le régime dans les années précédant la guerre, notamment en raison de la distance séparant les régions de production. C’était d’autant plus le cas qu’en dépit de régions de plaine ou collinaires fertiles en Autriche, la production locale de céréales panifiables était trop limitée pour répondre aux besoins urbains. Ainsi sur les 144,6 kg par habitant de farine consommés chaque année, plus de la moitié devait être importée pour les zones alpines et la capitale, principalement depuis la Hongrie. Pour résumer, plus de la moitié du pain viennois était fabriqué à partir de farine hongroise. La situation était la même en ce qui concerne la viande. En 1914, plus de la moitié des animaux destinés aux abattoirs (bovins, porcs et moutons principalement) vendus sur le marché central de Saint-Marx provenaient d’au-delà de la rivière Leitha tandis qu’un tiers seulement provenait des régions alpines toutes proches. Finalement, seuls les approvisionnements en lait étaient locaux : en 1908, 71 % du lait consommé provenait de Basse-Autriche, 17 % de Moravie et 12 % était importé de Hongrie18.
11Dans les faits, deux espaces venaient approvisionner la capitale : une couronne agricole comprenant la Haute et la Basse-Autriche, la Moravie du Sud, la Hongrie occidentale principalement pour les productions laitières ; un couloir reliant la capitale à la Hongrie pour les céréales. Cette spécialisation était en partie due aux coûts de transport et aux prix de vente. Autour de Vienne, un réseau de proximité – donc peu cher – avait permis le développement de l’industrie laitière. Au contraire, le long du couloir reliant la capitale à la Hongrie s’étendait un long réseau productif de terres céréalières et d’élevage, dont les coûts de production étaient rendus faibles par le transport par vapeur sur le fleuve Danube et un réseau ferré émergent (avec des liaisons via Timisoara et Debrecen vers le sud et l’est de la Hongrie, des régions au potentiel agricole marqué). En conséquence, l’hinterland viennois avant-guerre était à la fois régional et transnational19.
12Avec la guerre, ce système se détériora rapidement. L’approvisionnement par le biais du couloir depuis la Hongrie devient en particulier de plus en plus limité. En 1917, les importations depuis la Hongrie étaient retombées à 2 % pour les céréales, 3 % pour la farine, 29 % pour les bovins, 19 % pour les cochons et 17 % pour le lait (fig. 1)20. Les livraisons au marché alimentaire de Saint-Marx chutèrent de 70 % (fig. 2). Dans le même temps, la répartition des sources d’approvisionnement changea, comme l’indique le déclin des ressources provenant de Hongrie ( – 76 %) et des terres alpines. De fait, l’aire d’approvisionnement se réduisit à un espace limité à la Basse-Autriche, excepté pour les produits laitiers dont l’approvisionnement s’était complètement tari en 1918.
13La réduction de l’approvisionnement alimentaire à Vienne reflétait à la fois le déclin des disponibilités en Autriche-Hongrie, mais également le déséquilibre de leur origine, notamment entre Cisleithanie et Transleithanie, un problème évoqué par la presse viennoise en 1917 (fig. 3)21. Cette caricature met en lumière les contrastes entre la partie autrichienne (« Cis ») où se tiennent le maire de Vienne Richard Weiskirchner et le ministre fédéral à l’Alimentation Anton Höfer, tous deux suppliant pour des provisions, et au-delà de la rivière Leitha, la partie hongroise (« Trans ») avec un propriétaire au cœur-de-pierre, retenant son innombrable troupeau. Le message reflétait ici l’état d’esprit des Viennois à l’encontre des Hongrois qui violaient les valeurs d’économie morale, au profit du capitalisme et du nationalisme.
14Toutefois, outre le déficit productif de l’Autriche, le conflit démontra également que la Hongrie n’était pas une terre d’abondance (tableau 4). On peut voir en effet ici que le fossé entre la demande et l’offre en matière de céréales panifiables grandit pendant la guerre en Autriche. Mais en Hongrie également, la situation se détériorait notablement : contrairement à la période d’avant-guerre, la production de céréales panifiables dans le pays n’était plus excédentaire et il restait très peu de quantité exportable – excepté en 1915, principalement vers l’Allemagne. En raison du blocus allié, il n’était plus possible de s’approvisionner en céréales panifiables à l’étranger, on se tourna alors vers les territoires occupés par les Habsbourg, la Roumanie et l’Ukraine.
15Par ailleurs, si le manque de matériel accéléra les problèmes dans les deux parties de l’Empire, les sentiments xénophobes ressurgirent en lien avec ce déséquilibre alimentaire : en Autriche, de nombreuses récriminations envers les populations magyares s’élevèrent parmi les communautés allemandes et slaves23. En outre, ces tensions alimentaires étaient nourries par les discordes permanentes entre les deux administrations nationales impériales jusqu’à la fin du conflit, essentiellement en raison du manque de coordination entre elles. Ainsi, si depuis les accords de 1850 la Hongrie était autorisée à exporter ses surplus vers l’Autriche, rien ne l’y obligeait et tout engagement de sa part à ce faire était la conclusion de négociations entre les deux Premiers ministres24. Surtout, avant-guerre, n’avait pas été envisagée la situation où forces militaires et population entreraient en concurrence dans le cadre de l’approvisionnement alimentaire. Selon un accord de 1915, les besoins de l’armée impériale devaient être satisfaits par les deux pays, selon leurs propres possibilités productives. Toutefois cette déclaration – qui ne fut jamais pleinement respectée – ne prenait pas en compte les besoins d’importation de l’Autriche et sa dépendance vis-à-vis de la Hongrie. Et face à la détérioration de la situation en Autriche, la Hongrie fut forcée de répondre seule aux demandes de l’armée en céréales en 191625. Mais au-delà du fardeau de l’approvisionnement militaire, la Hongrie disposait d’autres arguments pour refuser de répondre aux sollicitations autrichiennes. Dans le pays, plusieurs disettes firent planer le risque d’émeutes urbaines, remettant en cause la domination magyar dans un pays majoritairement peuplé par des communautés ethniques différentes (Slaves, Roumains, Allemands, etc.). De plus, cette situation fut instrumentalisée par Budapest qui protesta contre la mobilisation massive et disproportionnée de paysans dans l’armée, ce qui mettait en danger la production agricole nationale26. Finalement, les Habsbourg ne réussirent jamais à mettre en place une administration supranationale capable de gérer cette question alimentaire. Même le Comité unifié pour l’alimentation (Gemeinsamer Ernährungsausschuss), formé en 1917 après la mort de l’empereur François-Joseph par son successeur Charles, était une institution sans pouvoir ni rayon d’action, manquant de poids sur les administrations nationales des deux parties de l’Empire27.
16Mais au-delà de ce conflit entre nations, la question alimentaire était aussi prégnante au niveau provincial, régional et local28. En réponse à la diminution des intrants et au contrôle des prix, les producteurs mentirent sur leurs productions, la sous-estimant afin de conserver une partie de celle-ci à des fins spéculatives sur le marché noir, contournant aisément ainsi les canaux de distribution officiels. L’émergence d’une « économie grise » accentua les inégalités alimentaires dans l’Empire entre les régions déficitaires et excédentaires, entre les villes et les campagnes, entre pauvres et riches29. En outre, la mise en œuvre d’institutions mixtes (publiques-privées) chargées de gérer l’approvisionnement (la première étant le Bureau de distribution de céréales en temps de guerre – Kriegs-Getreide-Verkehrsanstalt – en 1915) s’avéra inefficace, manquant à leur mission de rétablissement de l’équité dans ce domaine. Spécialisés dans un ou plusieurs produits et bénéficiant du double statut d’agence publique et de marchand privé, leur tâche était d’acheter les surplus (de pommes de terre, sucre, café, légumes, fruits, etc.) au prix officiel, de gérer les stocks et d’assurer leur distribution aux intermédiaires de commerce, selon les prévisions de consommation établies par l’administration. Mais l’incompétence, la surcharge de travail et la corruption empêchèrent ces centrales d’achat (Zentralen) de résoudre le problème du déséquilibre frumentaire. Au contraire, une compétition chaotique vit le jour entre provinces, districts, municipalités, entreprises et militaires pour tout stock de nourriture disponibles30. Enfin, il en fut de même concernant l’effort de l’État pour contrôler ces forces centrifuges : la fondation d’agences centrales en Autriche (Amt für Volksernährung) et en Hongrie (Landes-Volksernährungsamt) en 1916, déployées dans les provinces, districts et municipalités en sous-agences, eut des effets très limités, en grande partie en raison du manque de rayonnement de l’exécutif31.
Les enjeux de la consommation
17La détérioration des capacités productives ajoutée au déséquilibre de la répartition alimentaire eurent comme conséquence logique la restriction de la consommation. La consommation moyenne annuelle de céréales panifiées par habitant déclina dans l’Empire de manière continuelle après 1914 :
1909-1913 : 184 kg | 1916 : 118 kg |
1914 : 134 kg | 1917 : 132 kg |
1915 : 136 kg | 1918 : 101 kg |
18Toutefois, ici encore des différences notables émergeaient entre les deux nations et en leur sein. En 1917 par exemple, la consommation générale des civils autrichiens était inférieure de 30 % à celle de leurs voisins hongrois, le tout étant particulièrement perturbé par les demandes croissantes (et elles aussi déséquilibrées) du front32. Afin de contenir l’agitation populaire, les autorités tentèrent de lutter contre la pénurie et les déséquilibres socio-régionaux par la mise en place d’un système de réquisition des produits alimentaires de base, notamment les céréales panifiables (à partir de 1915), le sucre, le lait, le café et les graisses (1916), les pommes de terre et la confiture (1917) et la viande (1918). La population fut alors divisée entre « autonomes », capables d’avoir accès par eux-mêmes aux produits alimentaires basiques, et « non-autonomes », forcés d’acheter ces mêmes produits.
19À Vienne, le déclin des apports caloriques mit en lumière la dégradation de la situation alimentaire dans l’Empire, notamment dans l’espace autrichien (tableau 5).
20À la fin du conflit, les rations alimentaires quotidiennes des ouvriers viennois n’atteignaient plus que 831 kcal pour les « non-autonomes » et 1 293 kcal pour les « travailleurs de force », loin des 2845 kcal d’avant-guerre ( – 71 % et 55 % respectivement). De plus, les quantités que les cartes de rationnement permettaient d’obtenir étaient rarement disponibles dans les magasins ou sur les étals. En réalité, les rations caloriques quotidiennes étaient bien loin de celles théoriques instituées par les autorités33.
Tableau 5. – Valeur calorique de la ration alimentaire quotidienne des « non-autonomes » à Vienne (en kcal)34.
Produits alimentaires | Au moment de l’instauration des cartes alimentaires | À la fin de la guerre |
Farine | 300 | 107 |
Pain | 350 | 450 |
Graisse | 154 | 51 |
Viande | 29 | 18 |
Lait | 83 | – |
Patates | 171 | 57 |
Sucre | 166 | 100 |
Confiture | 48 | 48 |
Total | 1300 | 831 |
21Outre la baisse des quantités, la nourriture classique était remplacée par des produits de substitution (naturels ou synthétiques), dégradant de facto la qualité moyenne de l’alimentation. Dans ce contexte, plus la pénurie s’installait, plus les scientifiques prenaient une place prépondérante dans le débat public, proposant des alternatives nombreuses, souvent appuyées sur des considérations morales. Parmi ceux-là, le chimiste Julius Stoklasa, faisant de nécessité vertu, critiqua l’obsession des classes moyennes pour le pain blanc, dont la farine était présentée comme malsaine. Il proposa à la place une farine brune, faite à partir de son de blé, nouvelle base de confection du pain35. Il faut dire que dès le début du conflit, les autorités imposèrent la réduction des taux de céréales dans la fabrication du pain. Désormais, le taux de blé et de seigle dans le « pain de guerre » était limité à 50 %, le reste étant composé de farine d’orge, d’avoine et de maïs, mais également de pomme de terre ou de rutabaga, réduisant d’autant les apports nutritifs animaliers. Parmi le bétail, les porcins étaient les plus touchés par la situation : consommateurs de maïs et de pommes de terre, ils étaient perçus comme des concurrents alimentaires et, donc, furent massivement abattus36. Les propositions et expérimentations pour permettre de fabriquer du pain (et d’autres produits) avec de nouvelles techniques (« Streckung », allongement) furent sans limite ou presque : même la sciure de bois fut utilisée dans le « pain de guerre » et bien que sans aucune qualité nutritive elle permettait d’atteindre une certaine satiété37. En plus de ces ersatz naturels, de nombreux produits à base synthétique virent le jour et furent vendus38. Une exposition de substituts alimentaires à Vienne en 1918 proposa ainsi à un large public des ersatz de thé, de jus, d’œuf, de cacao, de goulasch, etc. Il est toutefois difficile de savoir dans quelle mesure ces produits douteux furent vraiment consommés. Néanmoins, cette situation de stress alimentaire stimula une industrie agroalimentaire qui expérimenta une nette mutation qualitative et technique après-guerre39.
22Dans ce cadre, mesurer la quantité et la qualité des produits qui étaient vraiment consommés dans les villes et les campagnes est très délicat. Selon certaines sources, les familles ouvrières durent faire face à des changements importants dans leurs modes alimentaires. Deux cas permettent de mettre en lumière cette tendance40 : la famille plutôt aisée A (homme : né en 1874, assistant-plombier, service militaire en 1914-1915 ; femme : aucune information ; une fille née en 1900) doit s’accommoder d’une baisse conséquente de ses revenus par tête pendant le conflit ; la famille moins aisée B (Famille B : homme : né en 1865, assistant ; femme : née en 1876, femme de chambre ; un fils né en 1902), tout en perdant du pouvoir d’achat à la fin du conflit, arrive à stabiliser ses revenus durant les premières années. Les conséquences sur la consommation alimentaire (fig. 4) sont très nettes41. Alors que pour la famille A la valeur calorique globale ne cesse de diminuer (19 % au total), la famille B voit dans un premier temps son alimentation s’améliorer (probablement grâce à l’accès à un jardin potager) avant de connaître, elle aussi, une dégradation de son alimentation à partir de 1917 ( – 26 %). Dans les deux familles, la part des protéines et des graisses diminua au profit des produits riches en glucides (pain, pommes de terre, légumes ; + 76 % pour la famille A, + 84 % pour la famille B). Cette détérioration touchait principalement les enfants et les adolescents, et selon une étude portant sur les enfants viennois peu de temps après la guerre, 23 % étaient en sous-nutrition sévère, 56 % sous-nourris et 21 % normalement nourris (avec de grandes différences selon les classes sociales bien évidemment). Le cas des enfants dans les villes industrielles de Basse-Autriche était encore pire. Toutefois, la situation n’était pas forcément meilleure dans les campagnes. Si les régions agricoles autour de Vienne connaissaient des conditions alimentaires plutôt bonnes, dans les zones de prairies montagneuses, la situation était presque aussi mauvaise que dans la plupart des villes. Ce déséquilibre en Basse-Autriche provenait en réalité en grande partie de l’inégal accès des populations rurales aux coupons alimentaires42.
23La gestion – matérielle et morale – de la nourriture devint à Vienne un souci majeur pendant la guerre, matérialisé dans la mémoire collective par le « pain de guerre » : peu consistant, il se brisait en milliers de petits morceaux en raison de la présence d’ingrédients de substitution dans sa composition. Peu à peu, un clivage s’opéra entre ceux qui, propriétaires terriens, pouvaient produire pour leur propre consommation et ceux qui n’avaient aucun accès à la terre. En outre, alors que les classes sociales les plus pauvres devaient se contenter des rations officielles, au prix défini par l’État, les plus riches assuraient à leur famille un avenir moins sombre grâce à un approvisionnement supplémentaire en provenance du marché noir (à des prix, évidemment, élevés). Dans tous les cas, s’approvisionner en nourriture devint l’obsession de toute une population, principalement des femmes et des enfants, qui faisaient la queue pendant des demi-journées entières, parfois de nuit, devant les magasins. Et, malgré la surveillance de la police, fort logiquement, ces rassemblements étaient propices à la rumeur, à la protestation, voire aux émeutes, impliquant des activistes non seulement issus du prolétariat, mais également de la bourgeoisie austro-hongroise. De leurs côtés, nombre de familles prolétaires ou de la classe moyenne s’en sortaient sans avoir accès au marché – qu’il soit légal ou non. Une des stratégies était en effet de cultiver un potager ou d’élever quelques animaux, légalement grâce à un soutien communal ou coopératif (entre 1914 et 1919 le nombre de jardins potagers collectifs alloués par les autorités passa de 39 à 978 ha), soit illégalement, en s’appropriant des parcelles non cultivées. Les civils, et plus particulièrement les enfants sous la direction de leurs instituteurs, étaient appelés – de manière autoritaire – à cultiver chaque parcelle disponible : « Bauet überall Gemüse ! » (« Faites pousser des légumes partout ! ») répétait à l’envi la propagande43. Une autre stratégie d’évitement du marché était de se rendre dans les zones rurales périurbaines afin de glaner épis de maïs ou pommes de terre oubliés après la récolte ou de troquer divers objets pour de la nourriture. Par ailleurs, loin des prescriptions des livres de cuisine en temps de guerre qui s’adressaient de manière patriotique aux cuisinières, véritables combattantes du « front cuisinier », nombreuses étaient les familles qui devaient se résoudre, fautes d’aliments, à se rendre aux cantines d’usines ou d’œuvres caritatives44.
24La sous-nutrition de la population viennoise était déjà sensible avant-guerre, notamment dans les milieux ouvriers. La crise alimentaire due à la guerre renforça le sous-approvisionnement chronique des Viennois, l’espérance de vie diminua dans tous les groupes d’âge de quatre à six ans et le taux de mortalité s’éleva considérablement, augmentant le nombre de décès de plus de 40000 personnes entre 1915 et 1919 (militaires exclus). Si les famines étaient rares, nombre de ces morts étaient dus à des facteurs liés à l’alimentation. La tuberculose, connue sous le nom de « maladie de Vienne » à l’époque, était la maladie dont le lien avec la sous-nutrition était le plus évident et le plus connu, suivie par les néphrites, les entérites, les anémies, les crises cardiaques et les œdèmes. Les femmes étaient les plus touchées par ces problèmes liés à l’alimentation (30 % de plus que les hommes à la fin du conflit) et les populations y ayant survécu connurent des soucis de santé longtemps après la fin des combats. Le plus évident était le retard de croissance des enfants, affection que met dramatiquement en images le documentaire Das Kinderelend in Wien (« La misère des enfants de Vienne ») en 1919. Selon certains témoignages, les enfants de 12 à 14 ans ressemblaient à des enfants de 8 à 10 ans tandis que la taille moyenne des enfants dans le Vienne d’après-guerre était semblable à celle de la fin du xviiie siècle. Étant donné cette situation sanitaire et morale catastrophique, plusieurs contemporains évoquaient « une génération perdue45 ».
25Cette situation récurrente de pénurie alimentaire et d’approvisionnement inégal à Vienne renforça chez les habitants le sentiment d’être les victimes des agissements égoïstes, de l’incompétence et de la corruption, principalement des paysans, des bureaucrates autrichiens et des « Hongrois ». Ce ressenti populaire, partagé par le plus grand nombre, délégitimait la propagande officielle articulée autour du sacrifice nécessaire de l’ensemble des civils sur le « front domestique » pour soutenir celui des soldats au front. Au contraire, les populations civiles eurent le sentiment de subir un sacrifice bien plus important, sans rien en retour. À l’été 1918, cette économie morale fortement politisée donna lieu à une « guerre de la patate », culminant dans de violentes confrontations entre des dizaines de milliers de citadins affamés – majoritairement des femmes, des enfants et des permissionnaires – et les paysans des zones périurbaines. En quelque sorte, la guerre accéléra la fragmentation sociale à Vienne, activée par les dénonciations, les différends, la violence au sein et entre les communautés, qu’elles soient sociales, ethniques ou religieuses (avec la résurgence d’un fort antisémitisme). En outre, elle accentua les tensions entre les villes et les campagnes, les producteurs et les consommateurs, la classe ouvrière et les paysans, avec des effets à très long terme dans la société autrichienne et hongroise d’après-guerre46.
*
26Durant la guerre, la crise alimentaire dans l’Empire Habsbourg eut comme conséquence de nombreux dysfonctionnements de la chaine de production, de distribution ou de consommation. Tout d’abord, la crise fut matérielle avec la pénurie de matières premières agricoles, notamment dans l’espace autrichien. Par ailleurs, elle fut morale en raison des soucis d’approvisionnement et de distribution dans toute la double monarchie. Enfin, elle fut symbolique avec la délégitimation de l’ordre public dans l’esprit de consommateurs se sentant abandonnés.
27En considérant le lien entre l’alimentation humaine et la nutrition animale et/ou végétale par le biais de la chaîne alimentaire, l’érosion de la base nutritive devint critique pour le régime. La priorité des ressources pour les êtres humains, au détriment des plantes et des animaux, eut des conséquences néfastes qui, très rapidement, menèrent à une crise alimentaire. En outre, la rencontre entre des problèmes d’ordre environnementaux et sociaux fut dramatique pour l’ensemble de cette chaine alimentaire : dans le domaine productif, le sous-approvisionnement des plantations et du bétail en nutriments pour satisfaire les besoins de la population et de l’armée ; dans celui de la distribution, le démantèlement des réseaux d’approvisionnement supra-régionaux en raison des conflits d’intérêts entre fournitures animales, végétales et humaines ; dans celui de la consommation, l’infection massive d’une partie de la population par la tuberculose en raison de la sous-nutrition furent les exemples les plus éloquents.
28Au total, en ce qui concerne la politique alimentaire du régime impérial, la monarchie austro-hongroise s’était très largement dissoute bien avant sa dissolution politique en 1918.
Notes de bas de page
1 Zdeněk Jindra, « Der wirtschaftliche Zerfall Österreich-Ungarns », dans Alice Teichowa et Herbert Matis (éd.), Österreich und die Tschechoslowakei 1918-1938, Vienne, Böhlau, 1996, p. 17-50.
2 Philipp Mcmichael, Food Regimes and Agrarian Questions, Halifax/Winnipeg, Fernwood Press, 2013.
3 Hans Löwenfeld-Russ, Die Regelung der Volksernährung im Kriege, Vienne, Hölder-Pichler-Tempsky, 1926, p. 198.
4 Matthias Rettenwander, Stilles Heldentum ? Wirtschafts- und Sozialgeschichte Tirols im Ersten Weltkrieg, Innsbruck, Universitätsverlag Wagner, 1997, p. 80-92.
5 Max Stephan Schulze, « Austria-Hungary’s Economy in World War I », dans Stephen Broadberry et Mark Harrison (éd.), The Economics of World War I, Cambridge, CUP, 2005, p. 85.
6 Ibid., p. 92.
7 Ibid., p. 93.
8 Marina Fischer-Kowalski et Helmut Haberl, « Metabolism and Colonization. Modes of Production and the Physical Exchange between Societies and Nature », Innovation : The European Journal of Social Science Research, n° 6, 1993, p. 415-442.
9 M.-S. Schulze, « Austria-Hungary’s Economy… », op. cit., p. 92-94.
10 Wiener Landwirtschaftliche Zeitung, n° 66, 1916, p. 1-3.
11 Hubert Weitensfelder, « Nähr-Stoffe : Nahrungsmittel, Tierfutter und Dünger in der Kriegswirtschaft », dans Elisabeth Loinig (éd.), Fern der Front – mitten im Krieg 1914-1918. Alltagsleben im Hinterland, St. Pölten, NÖ Institut für Landeskunde, 2017, p. 183-198.
12 Ibid., p. 194-198.
13 M. Rettenwander, Stilles Heldentum ?…, op. cit., p. 77.
14 Frank Uekötter, Die Wahrheit ist auf dem Feld. Eine Wissensgeschichte der deutschen Landwirtschaft, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2010, p. 183-190.
15 Wiener Landwirtschaftliche Zeitung, n° 69, 1919, p. 572.
16 H. Löwenfeld-Russ, Die Regelung…, op. cit., p. 31.
17 John Komlos, Die Habsburgermonarchie als Zollunion. Die Wirtschaftsentwicklung Österreich-Ungarns im 19. Jahrhundert, Vienne, Böhlau, 1986, p. 89-99 et 137-141.
18 Ernst Langthaler, « Food and Nutrition (Austria-Hungary) », 1914-1918-online. International Encyclopedia of the First World War [http://0-dx-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.15463/ie1418.10796] (consulté le 1er septembre 2017) ; E. Langthaler, « Die Großstadt und ihr Hinterland », dans Alfred Pfoser et Andreas Weigl (éd.), Im Epizentrum des Zusammenbruchs. Wien im Ersten Weltkrieg, Vienne, Metroverlag, 2013, p. 232-239 ; E. Langthaler, « Vom transnationalen zum regionalen Hinterland – und retour. Wiens Nahrungsmittelversorgung vor, im und nach dem Ersten Weltkrieg », dans Stefan Karner et Philipp Lesiak (éd.), Erster Weltkrieg. Globaler Konflikt – lokale Folgen. Neue Perspektiven, Innsbruck/Vienne/Bolzano, Studienverlag, 2014, p. 307-318 ; Martin Bauer, « Alles für die Hauptstadt ? Agrarproduktion im Land um Wien während des Ersten Weltkrieges », dans E. Loinig (éd.), Fern der Front…, op. cit., p. 45-67.
19 E. Langthaler, « Die Großstadt… », art. cité, p. 232-239.
20 H. Löwenfeld-Russ, Die Regelung…, op. cit., p. 61.
21 Österreichische Volkszeitung, 21 oct. 1917, p. 9.
22 M.-S. Schulze, « Austria-Hungary’s Economy… », op. cit., p. 94 ; Richard Gratz et Richard Schüller, Der wirtschaftliche Zusammenbruch Österreich-Ungarns. Die Tragödie der Erschöpfung, Vienne, Hölder/Pichler/Tempsky, 1930, p. 40-46.
23 R. Gratz et R. Schüller, Der wirtschaftliche…, op. cit., p. 37-91.
24 Ibid., p. 225-307.
25 M.-S. Schulze, « Austria-Hungary’s Economy… », op. cit., p. 95 et suiv.
26 Holger H. Herwig, The First World War. Germany and Austria-Hungary 1914-1918, Londres, Bloomsbury Academic, 1997, p. 277.
27 Ottokar Landwehr, Hunger. Die Erschöpfung der Mittelmächte 1917/18, Zurich/Leipzig/Vienne, Amalthea, 1931.
28 Matthias König, « Ernährungslage und Hunger », dans Hermann J. W. Kuprian et Oswald Überegger (éd.), Katastrophenjahre. Der Erste Weltkrieg und Tirol, Innsbruck, Studienverlag, 2014, p. 135-153 ; Martin Moll, Die Steiermark im Ersten Weltkrieg. Der Kampf des Hinterlandes ums Überleben 1914-1918, Vienne, Styria, 2014 ; Thomas Hellmuth, « „ Acker und Wiesen wissen nichts von Patriotismus“. Kriegswirtschaft im Ersten Weltkrieg », dans Oskar Dohle et Thomas Mitterecker (éd.), Salzburg im Ersten Weltkrieg. Fernab der Front – dennoch im Krieg, Vienne/ Cologne/Weimar, Böhlau, 2014, p. 47-60 ; Rudolf Kučera, Život na příděl : Válečná každodennost a politiky dělnické třídy v českých zemích 1914-1918 (La vie rationnée : guerre, quotidien et vie syndicale dans les provinces de Bohême, 1914-1918), Prague, Nakladatelství Lidové noviny, 2013.
29 R. Gratz et R. Schüller, Der wirtschaftliche…, op. cit., p. 51-54.
30 H. Löwenfeld-Russ, Die Regelung…, op. cit., p. 125-130.
31 Ibid., p. 290 et suiv.
32 M.-S. Schulze, « Austria-Hungary’s Economy… », op. cit., p. 94-96.
33 Ibid., p. 327-360.
34 H. Löwenfeld-Russ, Die Regelung…, op. cit., p. 335.
35 Julius Stoklasa, Das Brot der Zukunft, Jena Gustav Fischer, 1917.
36 H. Löwenfeld-Russ, Die Regelung…, op. cit., p. 117-125.
37 Martin Franc, « Bread from Wood : Natural Food Substitutes in the Czech Lands during the First World War », dans Ina Zweiniger-Bargielowska et Rachel Duffet (éd.), Food and War in Twentieth Century Europe, Farnham, Ashgate Publishing, 2011, p. 73-83 ; H. Weitensfelder, « Nähr-Stoffe… », art. cité, p. 183-187.
38 Voir supra les articles de Nina Régis, p. 89, et Mary Elizabeth Cox, p. 179.
39 Franz Vojir, « Ersatzlebensmittel im Ersten Weltkrieg in Österreich », dans Herbert Matis, Juliane Mikoletzky et Wolfgang Reiter (éd.), Wirtschaft, Technik und das Militär, 1914-1918. Österreich-Ungarn im Ersten Weltkrieg, Vienne/Münster, LIT-Verlag, 2014, p. 253-283.
40 Arbeitsstatistisches Amt im Handelsministerium (éd.), Wirtschaftsrechnungen und Lebensverhältnisse von Wiener Arbeiterfamilien in den Jahren 1912 bis 1914, Vienne, Hölder, 1916, p. 162-166 ; Helmut Rumpler et Anatol Schmied-Kowarzik (éd.), Weltkriegsstatistik Österreich-Ungarn, 1914-1918 (Die Habsburgermonarchie 1848-1918, vol. XI/2), Vienna Austrian Academy of Science Press, 2014, p. 260-269.
41 H. Rumpler et A. Schmied-Kowarzik, Weltkriegsstatistik…, op. cit., p. 260-269.
42 Clemens Pirquet, « Schülerspeisung als Teil der allgemeinen Ernährungsfürsorge », dans C. Pirquet (éd.), Volksgesundheit im Krieg, vol. 1, Vienne, Hölder-Pichler-Tempsky, 1926, p. 273-362.
43 Wiener Bilder. Illustriertes Familienblatt, 20 mai 1917, p. 1.
44 E. Langthaler, « Mangel und Moral – Ernährungsalltag in Stadt und Land », dans E. Loinig (éd.), Fern der Front…, op. cit., p. 170-182 ; Reinhard Sieder, « Behind the Lines : Working-Class Family Life in Wartime Vienna », dans Richard Wall et Jay Winter (éd.), The Upheaval of War. Family, Work and Welfare in Europe, 1914-1918, Cambridge, CUP, 1988, p. 109-138 ; Hans Hautmann, « Hunger ist ein schlechter Koch. Die Ernährungslage der österreichischen Arbeiter im Ersten Weltkrieg », dans Gerhard Botz et alii. (éd.), Bewegung und Klasse. Studien zur österreichischen Arbeitergeschichte, Vienne/Munich/Zurich, Europa-Verlag, 1978, p. 661-681 ; Christian Mertens, « Die Auswirkungen des Ersten Weltkriegs auf die Ernährung Wiens », dans A. Pfoser et A. Weigl (éd.), Im Epizentrum…, op. cit., p. 161-171 ; Andrea Brenner, « Das Maisgespenst im Stacheldraht. Improvisation und Ersatz in der Wiener Lebensmittelversorgung des Ersten Weltkrieges », dans A. Pfoser et A. Weigl (éd.), Im Epizentrum…, op. cit., p. 140-149.
45 Andreas Weigl, « Eine Stadt stirbt nicht so schnell. Demographische Fieberkurven am Rande des Abgrunds », dans A. Pfoser et A. Weigl (éd.), Im Epizentrum…, op. cit., p. 62-71 ; Maureen Healy, Vienna and the Fall of the Habsburg Empire. Total War and Everyday Life in World War I, Cambridge, CUP, 2004, p. 255-257.
46 M. Healy, Vienna…, op. cit., p. 31-86.
Auteurs
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Un constructeur de la France du xxe siècle
La Société Auxiliaire d'Entreprises (SAE) et la naissance de la grande entreprise française de bâtiment (1924-1974)
Pierre Jambard
2008
Ouvriers bretons
Conflits d'usines, conflits identitaires en Bretagne dans les années 1968
Vincent Porhel
2008
L'intrusion balnéaire
Les populations littorales bretonnes et vendéennes face au tourisme (1800-1945)
Johan Vincent
2008
L'individu dans la famille à Rome au ive siècle
D'après l'œuvre d'Ambroise de Milan
Dominique Lhuillier-Martinetti
2008
L'éveil politique de la Savoie
Conflits ordinaires et rivalités nouvelles (1848-1853)
Sylvain Milbach
2008
L'évangélisation des Indiens du Mexique
Impact et réalité de la conquête spirituelle (xvie siècle)
Éric Roulet
2008
Les miroirs du silence
L'éducation des jeunes sourds dans l'Ouest, 1800-1934
Patrick Bourgalais
2008