Chapitre VI. L’histoire comme rhétorique républicaine
p. 187-215
Texte intégral
1Nous avons vu dans les manuels de prédication l’importance accordée aux sujets historiques pour captiver l’auditoire et même si, suivant les mots d’Alexandre Vinet, le prédicateur n’est pas un historien, l’usage et le recours à l’histoire, en particulier l’histoire commune, l’histoire partagée, est un des moyens pour créer ce qui est à la source de la res publica, le sentiment de communauté, d’appartenance à un même groupe. L’histoire offre des exemples, des modèles ou contre-modèles, elle est un motif rhétorique à part entière.
Le recours à une histoire diversifiée
2Le récit du passé et le rappel d’événements ou de faits plus ou moins lointains affleurent dans nombre de sermons sur la chose publique. Même si certains motifs historiques reviennent régulièrement, la diversité est de mise dans cette sollicitation des temps anciens.
Histoire sainte et prédication de la chose publique
3L’histoire que l’on s’attend le plus logiquement à trouver dans les sermons est celle relatée par la Bible et, en effet, aucun sermon n’y échappe puisque nous l’avons dit, les pasteurs ne se départissent que rarement de ce livre. Un exemplaire pouvait traverser le temps est celui de Simon Lombard. Il s’agit d’une Bible Martin, édition généralement utilisée par les pasteurs de la période, ouvrage à fermoir de cuivre acquis en 1756. Le pasteur écrit, quelques jours avant sa mort, sur la dernière page du volume :
« Cette Bible m’a suivi au Désert dans toutes mes retraites, jusqu’en mai 1763, où je partis pour Lausanne. Qu’elle soit conservée dans ma famille comme un monument de notre temps d’oppression et comme un Livre dont j’ai fait ma première et toujours ma principale étude1. »
4Tous les sermons sur la thématique étudiée ont au moins une référence biblique puisque ce discours est notamment une explication de l’Écriture2. Un contre-exemple est toutefois remarquable, il s’agit du discours de Pierre Devèze, pasteur de Sauve et Dufort dans les Cévennes, texte prononcé en 1807 lors de l’anniversaire de l’Empereur. Dans l’avant-propos à l’édition, le pasteur note : « Le décret impérial, qui ordonne la fête du Couronnement, nous dit, quel doit être le sujet de ce Discours. J’ai donc cru devoir me dispenser de chercher un texte dans nos saints Livres3. » Cette mention indique que le fait est assez peu habituel pour que le prédicateur ait trouvé bon de se justifier. Il cite toutefois à l’intérieur de son discours un passage de la Bible, extrait du psaume 137, « sur les bords du fleuve de Babylone, nous nous sommes assis, et nous avons pleuré, en nous ressouvenant de Sion4 ».
5Bien entendu, le texte biblique ne fait pas tout dans un discours de chaire comme le rappelle Alexandre Vinet : « Ce qui fait qu’un sermon est chrétien, ce n’est pas l’emploi d’un texte, mais l’esprit du prédicateur5 » et la Bible est parfois perçue comme une limitation des capacités créatives et artistiques puisque la prédication est aussi une « herméneutique de la personne du prédicateur et non du texte6 ». Mais, son usage est pratique car elle regorge de faits et d’archétypes et B.-S. Frossard explique
« [qu’]un prédicateur ne peut être persuasif & utile, qu’autant qu’il offre un tableau frappant des divers caractères moraux qu’offre la société. Il en résulte que des exemples fondés sur des faits historiques relatifs à la vie privée, tels que l’Ecriture sainte en fournit un grand nombre fixent toujours l’attention, s’ils sont bien choisis & bien appliqués7 ».
6Y a-t-il des péricopes plus utilisées que d’autres dans les sermons théologico-politiques ? Indéniablement, nous avons vu la multiplication de la Première épître à Timothée, de l’Épître aux Romains, du chapitre 22 verset 21 de l’Évangile de Matthieu ou de la Seconde épître de Pierre (chapitre 2) : tous ces passages relèvent de la soumission à rendre aux autorités. Mais l’on pourrait citer également, de l’Ancien Testament des extraits de la Genèse, de l’Exode, du Deutéronome, du Livre de Samuel, des Rois, du Livre des Chroniques, d’Esdras, du Livre d’Esther, de Job, des Psaumes de David, du Livre des Proverbes, du Cantique des Cantiques, du Livre d’Ésaïe, de Jérémie, Livre de Joël, de Daniel… Le nouveau testament est également mobilisé par les pasteurs : l’Évangile de Matthieu dans son ensemble, de Luc, de Jean, les Épitres aux Corinthiens, l’Épître aux Galates, celle aux Éphésiens, l’Épître aux Philippiens, celle aux Hébreux… Toute la Bible est in fine sollicitée dans la prédication sur la chose publique avec une importance marquée pour les Psaumes et le Livre d’Ésaïe. Ces deux occurrences fréquentes ne sont pas surprenantes. D’une part, les Psaumes font partie intégrante du culte protestant depuis l’origine de la Réformation. Grâce au Psautier, les fidèles les maîtrisent parfaitement. Le culte familial – indispensable au xviiie siècle – comporte aussi souvent la lecture d’un extrait du Livre des Psaumes. Les pasteurs n’ont donc aucune difficulté à les utiliser fréquemment pour leur prédication, tant l’identité protestante – et en particulier réformée – s’est construite autour d’un lien étroit avec ce livre biblique. D’autre part, la présence forte du Livre d’Ésaïe s’explique par la relation de l’exil du peuple juif à Babylone, de son retour, de la construction du Temple de Jérusalem. Il offre donc des motifs bibliques que les pasteurs peuvent facilement utiliser pour évoquer les souffrances des protestants dans les temps de proscription, la reconnaissance civile puis religieuse de leur foi, un souverain généreux comme Cyrus…
7L’usage de la citation biblique à l’intérieur du sermon est, lui, encore plus diversifié et la manière dont les pasteurs les utilisent très variable également. Parfois, il n’y a qu’une seule péricope, parfois, pour soutenir une idée, le pasteur les accumule8. De la même manière, il arrive qu’il n’y ait qu’une allusion ou, à l’inverse, le récit biblique peut être plus long (il est à ce titre toujours en première partie du discours). La citation apparaît, à des moments, soulignée (dans les sermons manuscrits) ou en italiques (pour ceux imprimés), elle est, à d’autres, implicite et sans claire différentiation avec le reste du discours. Enfin, beaucoup de pasteurs n’indiquent pas, en note de bas de page ou de marge, la référence biblique, cela suppose que l’auditoire devait être capable de reconnaître le passage, à moins qu’au moment de la diction le pasteur soit plus explicite en indiquant la référence. Ce qui est certain, c’est qu’il n’y a pas de règle établie et chaque pasteur demeure libre de solliciter, comme il le souhaite par rapport à l’effet recherché, le passé biblique.
Une présence polymorphe de l’histoire profane
8À côté de l’histoire sainte qui sert de socle premier pour les discours de chaire, l’histoire profane est également largement sollicitée pour parler de la chose publique. Une grande variété de champs historiques est abordée.
9La diversité repose tout d’abord sur la période historique sollicitée par les pasteurs dans leurs sermons. Ils ont recours à toutes les périodes du passé, histoire ancienne et médiévale, mais aussi histoire plus récente par rapport au moment de diction du texte. Concernant l’histoire la plus ancienne, les ministres la mentionnent pour faire référence à l’histoire des politiques répressives des différents empereurs romains face au peuple juif ou aux premiers chrétiens ; ou pour expliquer qu’« un Néron se [réjouit] en réduisant sa Capitale en cendres » ou « qu’un Alexandre [fait] consister sa gloire [en abreuvant] de sang la plus belle partie du monde9 ». Pierre de Joux, dans un texte de 1805, rappelle les coutumes politiques des Spartiates et des Romains10. Pierre Bourrit, dans un sermon de 1804, en s’appuyant sur les discours de Saint Jean Chrysostome au peuple d’Antioche, retrace rapidement la sédition de 387 durant laquelle les statues de Théodose sont brisées11. Rabaut-Pomier, dans son sermon sur l’édit de 1787, évoque la période médiévale et les persécutions de certains groupes religieux, disciples de John Wyclif (1326- 1384), Vaudès (v. 1140-v. 1206) ou Jan Hus (v. 1370-1415)12. L’histoire médiévale est moins prisée par les pasteurs, on la retrouve néanmoins sous la plume de Jean Dugas qui prononce à La Rochelle, le 1er janvier 1790, un sermon sur Les sentiments qui doivent animer un bon Français, discours adossé sur Romains, 13, 12 « La nuit est passée, le jour est venu ». Il commence son texte par une histoire de la monarchie française au temps des invasions barbares, expliquant « qu’un peuple, ou plutôt, un assemblage de plusieurs peuples, sorti de la Germanie, à la tête d’un chef, vient s’établir dans quelques-unes des provinces de ce royaume, & y jette les fondements de la monarchie Françoise13 ». Puis suit la période féodale jusqu’au temps présent du xviiie siècle. Certains orateurs, choisissent, au contraire, de se reporter exclusivement à l’histoire du temps présent, c’est-à-dire à l’histoire du xviiie siècle et le recours à l’histoire immédiate est particulièrement important dans les discours pastoraux prononcés pendant la Révolution française.
10L’histoire sollicitée est également diversifiée car les champs historiques foisonnent. Par exemple, dans un discours de chaire intitulé Sermon sur l’accord de la Religion et des lois, prononcé en 1776 dans l’Église de Nîmes, Rabaut Saint-Étienne explique à ses auditeurs la politique économique et fiscale de Louis XVI et Turgot14 alors qu’en septembre 1774, le ministre a rétabli la liberté du commerce des grains qui avait été abrogée en décembre 1770 :
« Dans des provinces, moins heureuses que celle où nous vivons, les habitants des campagnes gémissaient sous des entraves que leur ancienneté semblait avoir consacré ; de dures & pénibles corvées arrachaient le cultivateur à sa vendange & à sa moisson, les entraves ont été ôtées, les corvées ont été abolies. Un impôt récent établi sur les objets de consommation gênait & le vendeur & le consommateur il a été supprimé15. »
11L’orateur fait référence à la Guerre des farines qui a agité une partie du royaume d’avril à mai 1775, ainsi qu’à la politique fiscale de Turgot. Nous sommes ici dans une histoire politico-économique immédiate qui est insérée dans un discours homilétique16. Les sermons du sacre de Louis XVI y reviennent pour la plupart indiquant ici un argument rhétorique habituel, pourtant l’écart est important entre le genre du discours – religieux – et le thème développé – la politique fiscale du monarque17.
12Il arrive encore que les pasteurs sortent du cadre historique strictement français et qu’ils mobilisent l’histoire politique contemporaine dans une dimension européenne voire internationale. Ainsi, lors d’un sermon anonyme prononcé à l’occasion du couronnement de Louis XVI, le pasteur prend l’exemple du partage de la Pologne de 1772 pour montrer les dangers de l’anarchie et du non-respect de la politique du roi : « De nos jours même, n’avons nous pas vu une Nation puissante devenir la victime de ses injustes prétentions, & venger par ses propres malheurs les droits d’un Souverain, qu’elle avoit osé méconnoître18 ? » Le pasteur luthérien Jacques-François Armand, dans un Sermon sur la providence à l’occasion de la naissance du Dauphin, en 1781, pour montrer le danger pour un pouvoir fondé sur l’hérédité à ne pas avoir de successeur direct, s’appuie sur l’histoire européenne, rappelant la guerre de succession d’Espagne en ces termes : « Qui n’a pas vu dans les fastes de l’Histoire, des Provinces, des Royaumes & presque l’Hémisphère entier devenir tout-à-tour un théâtre d’horreurs, d’incendies & de carnages, parce qu’un Prince s’est trouvé sans successeur en ligne directe ? » Cette guerre, qui a mobilisé plusieurs puissances continentales, a en effet embrasé l’Europe au début du xviiie siècle après la mort de Charles II. « Vous en ferez entr’autres des monumens immortels, fleuves de sang ! qui inondâtes si longtemps notre Europe, à l’occasion de cette succession si mémorable d’Espagne19 » : c’est ce qui vient d’être épargné au royaume par la naissance du jeune Louis-Joseph de France.
13De la même manière, dans un discours de 1783, Rabaut-Pomier déclame à son auditoire, alors qu’il explique qu’il y a parfois des guerres justes à mener :
« C’est, mf [mes frères], dans ces circonstances douloureuses que notre patrie s’est trouvée au commencement de la guerre : elle avait à venger d’anciennes injures, à reprendre les droits injustement arrachés, à empêcher qu’un ennemi puissant & ambitieux ne voulut établir sa domination sur les mers20. »
14À l’issue du traité de Paris de 1763, la France avait perdu une partie importante de son premier empire colonial (Canada, colonies d’Amérique et des Indes…) et l’Angleterre se plaçait en maîtresse des mers : le pasteur fait ici un rappel de l’histoire diplomatique des années 1760-1770 devant son auditoire chrétien.
15Les sermons du premier xixe siècle poursuivent cette tendance à solliciter l’histoire dans le cours des textes en fonction de la thématique à mener : les sermons officiels du retour de la monarchie des Bourbons reviennent sur les vingt-cinq dernières années de l’histoire politique, présentent la Révolution française ou la période napoléonienne comme un moment de dérégulation totale, une inversion de l’ordre voulu par Dieu. La Révolution place alors la France sur le même plan que l’Angleterre pourtant souvent présentée comme l’ennemie suprême et barbare. Et, durant la Révolution, comme chez le voisin d’Outre-Manche, les Français ont tué leur roi, signe ultime de désordre voulu par Dieu21. Ces textes de la Restauration suivent en cela les discours qui, déjà, sous Napoléon, n’hésitaient pas à évoquer la Révolution française négativement22. Cette historiographie ne s’épuise pas et en 1814, elle s’étoffe particulièrement en rappelant la mort de Louis XVI, le 21 janvier 1793. De la sorte, dans la Lettre pastorale et consistoriale aux fidèles de l’église de Nismes, le président du consistoire, Jacques Olivier-Desmont explique les méfaits de la Révolution, sans jamais la nommer toutefois, période qui a vu à l’œuvre « une tyrannique liberté » et « une égalité homicide » – le pasteur fait référence ici à la Terreur – et particulièrement détruit l’édifice religieux23. Napoléon, est qualifié de « monarque d’un moment » et il se refuse de parler « des maux affreux […] qu’il a répandus sur la patrie » montrant ici une aversion pour ce régime24.
16Enfin, dans un sermon de 1842 sur la révolution de Juillet, Éliacin-Scipion Combet, pasteur à Saint-Hilaire de Lavit en Lozère, se propose « avant de tracer le tableau des trois immortelles journées, [de] remonter plus haut, voir quel était l’état de la France et ce qui les amena25 ». Il se livre alors à un récit des vingt dernières années de l’histoire de France. Dans le recours à l’histoire, cette période du xixe siècle met moins en avant l’antiquité, l’attention au temps présent s’avère plus forte. Cela s’explique sans doute par la culture pastorale, moins marquée par le goût de l’antique – prisé au siècle précédent – et à l’intérêt des pasteurs, attentifs aux bouleversements politiques et sociaux du moment. Mais dans les cas cités, cette histoire concerne au final l’ensemble des Français, et parfois, c’est plus spécifiquement l’histoire qui a touché les protestants qui se déploie dans le corps des sermons.
L’histoire de la communauté huguenote
17L’histoire protestante est également présente dans cette parole de chaire. La thématique y invite parfois, comme lorsqu’il est question de la guerre. Tel est le cas du discours de Rabaut-Pomier, pasteur de Montpellier qui prononce un texte au moment de la signature du traité de Paris et le traité de Versailles, après le conflit d’indépendance américaine. Dans ce sermon de décembre 1783, qui fustige les effets de la guerre en général, nous y reviendrons, il évoque alors les guerres de religion du xvie siècle, expliquant que la religion ne peut jamais être la véritable source de conflit :
« Je ne dois pas dissimuler ici que l’on objecte contre la Religion chrétienne les guerres qui sont nées dans son sein. Mais si on lui oppose pour la calomnier les victimes sans nombre qui ont été immolées & qui s’immolent tous les jours, nous imputerons ces horreurs, & tous les hommes instruits & vrais les imputeront avec nous, à la superstition, au fanatisme & à une politique anti-chrétienne : l’on verra ces guerres qu’un zèle apparent pour la religion semblait avoir fait naître conduites & inspirées par des hommes ambitieux & à qui le sang ne coûtait rien pourvu qu’il augmentant leur pouvoir26. »
18Mais, pour la plupart des pasteurs, ces temps du xvie siècle sont révolus : Jacques Olivier-Desmont explique alors à ses auditeurs en 1789 – dans un sermon sur l’édit de 1787 : « Elles ont disparu ces guerres civiles, dont la religion fut le prétexte, que l’ambition des grands excita, que le fanatisme rendit barbares, & qui plongèrent la France dans un abîme de calamités27. »
19Le plus souvent toutefois c’est l’histoire immédiate des persécutions post-révocatoires qui mobilise la plume historique des pasteurs de la seconde moitié du xviiie siècle. Il s’agit toujours de montrer comment la loi du roi a imposé une vie civile et religieuse impossible aux protestants du royaume. Les sermons qui usent le plus de ce motif sont ceux dont l’objectif est d’apporter consolation aux fidèles. Ils se multiplient dans la période du second Désert, à l’exemple de ce sermon de Paul Rabaut, prononcé le 16 février 1753, qui fait la narration des violences physiques subies par la communauté réformée :
« Il y a plus de soixante sept années28 que le Seigneur frappa sur nos Eglises le coup de plus terrible & le plus accablant. […] Ces chrétiens dont quelques uns vivent encore éprouvèrent la persécution la plus violente dont on ait jamais entendu parler. Des dragons, dignes missionnaires de Rome, les contraignirent les armes à la main et les blasphèmes dans la bouche à abjurer leur sainte religion. Ils se virent enlever leurs enfants, les plus chers objets de leur affection, on ne contentait pas de leur tourmenter pendant leur vie, ils l’étaient encore dans leur lit de mort, & s’ils demeuraient fidèles à leur Dieu jusqu’au dernier soupir, leurs cadavres étaient traînés sur la claie et jetés à la voirie29. »
20L’histoire des violences des lendemains de la révocation de l’édit de Nantes se réactive en ces temps de persécutions du milieu du siècle des Lumières (et en particulier avec la campagne de rebaptisation de l’année 1752). Et, parfois, rien n’est oublié dans la narration de ces vexations : l’exil au Refuge, les galères, les emprisonnements à la Tour de Constance, les enlèvements d’enfants30… La violence spirituelle est également abordée, en faisant référence à la contrainte des consciences que veut imposer la politique monarchique du xviiie siècle. La violence et son énonciation sont volontairement rappelées car elles entrent dans un discours de consolation et d’affermissement de la foi : il faut résister face à la violence et tenir ferme dans la foi du Christ. Elle est même le parcours qui prouve la légitimité de l’appartenance au christianisme – à entendre dans sa version protestante – elle en est sa preuve comme cela apparaît dans le sermon du 20 décembre 1750, dont le péricope sont les paroles de l’Épître de Saint-Paul aux Romains 8,17 : « Et si nous sommes enfants, nous sommes aussi héritiers, héritiers dis-je de Dieu & cohéritiers du Christ pourvu que nous souffrions avec lui afin d’être glorifiés avec lui31. » L’ironie de cette référence veut que dans la marge du sermon on puisse lire : « À l’issue de cette assemblée, on fit sept prisonniers. » Nous sommes dans le droit fil de « l’esprit du Désert », instauré par Antoine Court, qui anime encore très fortement les sermons des années 1740-1760 ; et, narrer les persécutions subies est une manière de renvoyer à la véritable Église, à l’histoire des premiers temps de l’Église, porteurs de vérités et modèles constants dans la critique protestante de l’Église catholique. Les vexations sont donc signes d’élection comme l’expliquait Antoine Court dans un discours fondateur de 1718 :
« Aprenés en second lieu, pour vôtre consolation, que si par les persécutions vous êtes réduits à peu de personnes & à vous assembler dans le désert ; aprenés, dis-je, que vous êtes rendus semblables aux premiers Chrétiens ; & par ce moyen vous verrez qu’on ne doit pas juger de l’Eglise par la multitude de ceux qui la composent ; ni par la splendeur extérieure de sa condition ; l’Eglise n’est qu’un petit troupeau, comme son Pasteur lui même l’apelle32. »
21Les discours prononcés dans les Églises françaises du Refuge utilisent également ce motif des persécutions mais pour valoriser l’accueil qui a été réservé aux huguenots après l’édit révocatoire et pour rappeler combien ils ont eu une vie calme dans leur nouvelle patrie. Tel est particulièrement le cas des discours prononcés à l’occasion du jubilé de l’édit de Potsdam de 1685 ou des discours de commémoration de l’arrivée massive des Réfugiés. Ainsi, le pasteur Pierre Stehelin explique à son auditoire de Saint-Gall, en Suisse :
« Pas un seul Dimanche, dans un siècle entier, où nous ayons été empêchés de nous rendre ici ; aucune calamité publique ni particulière, qui nous ait fermé les portes de notre temple. Des magistrats pieux et zélés, qui ont favorisé notre établissement et qui l’ont toujours soutenu par leur protection et par leur secours généreux. Des Directeurs et des Anciens, qui par leur zèle éclairé et par leur tendre affection ont procuré le bien de cette église, et par leurs soins assidus y ont maintenu l’ordre, l’harmonie et l’édification33. »
22Il n’y a plus de réfugiés, renseigne l’avant-propos de ce sermon imprimé en 1786, mais « il nous parut également juste et de nous ressouvenir du bien que Dieu fit à nos frères, auxquels notre église doit son origine, et d’offrir à Dieu nos actions de grâces de tout le bien qu’il nous a fait pendant ces cent ans ». En France, même dans les discours de la fin de la période des violences, les pasteurs n’hésitent pas à recourir à ce motif de la souffrance communautaire dans une perspective historique. Ainsi, un sermon anonyme de 1789, sur la promulgation de l’édit dit de tolérance, rappelle ce que la décision politique de Louis XIV a eu de conséquences pour la vie quotidienne des huguenots :
« Ils ne sont plus ces tems orageux, où la profession de notre doctrine nous exposoit à la perte de nos biens & de notre repos, où les enfans étoient arrachés d’entre les bras de leurs mères, où des soldats dogmatisoient les armes à la main, où les bons patriotes alloient chercher des asiles dans des pays éloignés : l’amertume remplissoit nos cœurs, l’époux pleuroit son épouse désolée, les pasteur fugitif s’affligeoit de la dispersion de ses brebis effrayées, l’innocence souffroit dans les chaînes ; des tours isolées, des prisons obscures retentissoient des gémissemens de nos frères, & plusieurs terminoient leurs vie sur le gibet34. »
23La fin de la proscription religieuse et civile des protestants ne signifie pas qu’il n’y ait pas de rappel du Désert. Ainsi, Georges Boissard, pasteur luthérien de Paris, dans un sermon sur l’anniversaire de l’inauguration du temple luthérien, mobilise toujours les temps d’affliction ou de difficulté de culte public. Pourtant, nous sommes alors en 182035. Au début de son texte, il loue le seigneur de pouvoir professer sa religion car l’épreuve de « la famine, non la famine du pain ni la soif de l’eau ; mais la famine d’ouïr les paroles de l’Eternel ! » (Amos 8, 11), a été enduré par « ceux qui, avant nous, ont professé dans cette capitale les principes de L’Evangile, l’ont plus ou moins subie36 ! ». Immédiatement, il justifie ce rappel historique : « Mais si nous vous rappelons ces jours de douleur où les chrétiens protestans étoient si loin de jouir en France des avantages dont ils jouissent aujourd’hui, c’est pour vous rappeler en même temps, M.F., l’ardeur avec laquelle ils les désiraient, le prix qu’ils y attachoient. » Le rappel d’affluence et de zèle religieuse vaut aussi pour le temps de l’édit de Nantes alors que le pasteur fait référence à l’éloignement du lieu de culte pour les Parisiens qui se rendait à Charenton pour pratiquer leur religion. Il s’agit ici de rappeler à l’auditoire, peut-être un peu tiède dans sa pratique que, dans un passé bien plus difficile, d’autres protestants étaient assidus : l’histoire est un moyen d’édification et de moralisation du croyant.
24On remarque dans ces différentes sollicitations historiques l’importance de l’histoire politique, c’est-à-dire les faits et événements qui concernent l’histoire des pouvoirs politiques, des autorités, des faits et événements touchant un pays ou un ensemble d’État et qui ne relèvent pas de l’histoire religieuse que l’on s’attend plus particulièrement à trouver dans des sermons. Cependant, les discours étudiés ayant une thématique théologico-politique, il est somme toute logique que cette histoire apparaisse aussi. On le voit, l’histoire entre dans la composition des sermons de toute la période étudiée, elle est une constante de l’écriture homilétique. Cela n’est pas une nouveauté de la prédication réformée et Danièle Fischer avait, au début des années 1980, consacré sa thèse sur la place de l’histoire dans la prédication de Calvin37. Comme chez le Réformateur, le passé, lointain ou plus proche, accompagne une plume pastorale qui se fonde toujours sur l’histoire sainte et la Bible et, à la faveur de circonstances particulières ou de thématiques spécifiques, l’histoire profane – politique, économique, diplomatique… – devient utile pour convaincre l’auditoire, pour argumenter sur une notion que le pasteur veut faire comprendre aux fidèles rassemblés devant lui. Voyons les modalités rhétoriques de l’usage de l’histoire dans ces discours de chaire.
Les ressorts rhétoriques et usages d’un discours sur l’histoire
25Si la plupart des pasteurs utilisent le passé dans leur sermon sur la chose publique, tous ne le font pas de la même manière ni dans le même but. Il importe ici de cerner les modalités rhétoriques d’utilisation de l’histoire ou, autrement formulé, de voir comment les pasteurs intègrent dans leur argumentation l’histoire dans toute sa diversité.
Narration et allusion historiques en chaire
26Comment l’histoire apparaît-elle dans les sermons ? De manière générale, trois voies sont utilisées par les pasteurs.
27Une première méthode sollicitée par les orateurs pour inclure l’histoire dans leur discours est de la raconter. Ils se font d’une certaine manière « historiens » en ce que le récit du passé prend une large place dans leur texte. Jean Dugas consacre toute la première partie de son sermon de 1790 à développer l’histoire de la monarchie française, depuis le début du Moyen Âge jusqu’à la réunion des États généraux, soit 8 pages des 35 que comporte ce sermon imprimé. Les développements les plus longs et les plus systématiques se présentent toutefois dans les sermons qui évoquent les campagnes militaires de Napoléon et les discours sur l’Empereur de manière générale. Ainsi, le sermon pour le sacre de Napoléon prononcé par Jacques Molines est un bon exemple de cette parole de chaire qui raconte l’histoire, reprenant la vie de Napoléon – et l’histoire de la France – depuis le Directoire. Bernard Plongeron a relevé combien la rupture est importante, dans les discours catholiques, sur la question de la narration historique miliaire : « Sous l’Ancien Régime, la narration de l’événement guerrier n’est pas indispensable au développement […]. À l’inverse, sous l’Empire, non seulement la narration militaire est obligatoire, puisque le canevas en est imposé par le gouvernement, mais elle vise à un historique amplificateur de l’événement qui se teinte alors d’extraordinaire, voire de merveilleux38. » Le cas est exactement le même pour la prédication protestante de la période et aucun discours n’échappe à la longue narration des faits militaires des armées napoléoniennes. Parmi ceux manuscrits, on peut donc relever les écrits du pasteur Molines à Orange dans les années 1800, ou dans la version imprimée, également celui de Pierre de Joux prononcé à Nantes le 11 octobre 181239. Ce dernier pasteur publie d’ailleurs, en 1808, un sermonnaire de ses textes, ensemble de récits des différentes campagnes napoléoniennes de 320 pages40. Le titre de l’ouvrage est éclairant pour la perspective providentielle de la narration historique proposée : La Providence et Napoléon et les discours, grandiloquents, montrent l’emphase du pasteur et le volet pro-napoléonien du moment. Chaque discours est l’occasion, en outre, de déployer une assez longue narration (au moins le tiers du texte) sur les actions militaires de la Grande Armée. D’autres sermons du pasteur, sur le même thème et dans un genre identique, sont encore édités par la suite, faisant de ce ministre un chroniqueur assidu des campagnes impériales. En 1809, après la victoire de Madrid, le propos sur la guerre se fait plus général avec un Discours sur la guerre considérée dans ses rapports généraux avec la civilisation et dans les relations qui existent entre la France et l’Espagne41. Un Second discours sur la guerre suit, la même année, et un Troisième discours sur la guerre est prononcé en 181242. Enfin, après la victoire de Lutzen, de Joux prend la parole en chaire, en 1813, avec Le triomphe de l’homme nécessaire, ou L’intervention de la Providence montrée à découvert43. Nous reviendrons sur la manière dont ce pasteur – et d’autres avec lui – présente la guerre à l’auditoire protestant mais ce qui caractérise alors ces textes est la place prise par la narration, fort longue, des faits.
28Parfois, l’insertion des événements plus ou moins lointains dans le discours de chaire est plus rapide, et il ne s’agit plus de narrer les faits mais d’évoquer les grandes figures politiques ou les acteurs des événements passés. Un nom suffit alors à faire surgir le passé dans le sermon. Le pasteur en recourant simplement à l’allusion, sans entrer dans aucun autre détail, nous permet de penser que son auditoire était bien plus familier que ce qu’on ne le pense de l’histoire politique ou de celle que nous appellerons « des grands hommes ». Nous avons vu comment, dans les discours sur Napoléon notamment, ces figures anciennes sont sollicitées pour qualifier l’empereur et de manière générale, sans parler spécifiquement de Bonaparte ces personnages du passé peuvent surgir. Ainsi, parlant de l’amour du bien public, le pasteur Rang explique, en 1803, que « c’est cet amour généreux et sublime qui animait Regulus, indigné qu’on voulût sauver ses jours au détriment de la chose publique ». Il demande encore à son auditoire rochelais de considérer « un Phocion qui en prenant le poison qui lui est présenté par de sanguinaires citoyens, exhorte encore son fils à les chérir, pensant qu’on doit préférer sa Patrie à son père44 ». Cette période impériale n’est pas la seule à user de l’allusion patronymique. Dans son sermon sur la paix de 1783, Rabaut-Pomier expliquait déjà sous l’Ancien Régime :
« Vous avez combattu avec autant d’humanité que de courage, ô Français, vous dont le nom est devenu celui de l’honneur, & vous ô Washington, le modèle des Héros, nouveau Fabius, & dans la triste nécessité de répandre le sang de l’homme, vous l’avez du moins épargné, autant qu’il vous a été possible45. »
29Georges Washington, chef d’état-major pendant la guerre d’indépendance américaine n’est pas encore le premier président des États-Unis. C’est donc le soldat que le pasteur loue ici en le rapprochant de la figure bien plus ancienne – il y a donc un télescopage des figures historiques – celle d’un Fabius, illustre famille de la Rome antique ayant donné des consuls et des militaires. Rapprochement avec une figure romaine que d’autres font mais avec celle de Cincinnatus, en particulier quand Washington décide de se retirer sur ses terres à Mount Vernon à la fin de la guerre d’indépendance en 1783 et alors que, la même année, des officiers de l’armée de la République américaine fondent la Société de Cincinnatus, présidé par Washington. Le pasteur n’a pourtant pas été inspiré par ces deux éléments en particulier car le discours de Washington a été prononcé seulement quatre jours avant celui de Rabaut-Pomier. Le rapprochement de Washington avec un personnage dévoué à Rome résulte sans nul doute plutôt de l’attirance pour l’Antiquité des hommes de ce siècle des Lumières que sont aussi ces pasteurs46. Il arrive que la figure du prince et celle du général se télescopent et, bien entendu, Napoléon Bonaparte illustre le mieux ce mélange, nous avons vu comment sous l’Empire il est paré de toutes les vertus.
30Une autre façon de faire surgir spécifiquement l’événement touchant la chose publique est d’inclure, dans le sermon, des documents de nature politique. Tel est en particulier le cas de discours ou des textes politiques. Nous avons vu l’exemple du sermon de Blachon qui reprend le discours prononcé par le roi en février 1790 et, dans un autre discours à l’occasion du serment patriotique demandé aux citoyens actifs lors des élections municipales de 1790, il reprend le serment et fait pratiquement une explication de texte. Il avait déjà inclus, dans son sermon sur l’édit de 1787, une partie du préambule du texte royal, le pasteur est donc familier de cette pratique47. Mais il n’est pas le seul. Pierre Mordant, lors de cette même occasion, choisit d’insérer dans son sermon un extrait du discours du roi lors de la séance du parlement de Paris, le 19 novembre 178748. Paul-Henri Marron, à Paris, agit de même et reproduit une courte partie du texte prononcé par Louis XVI (le 7 octobre 1791) dans sa prédication à l’occasion de l’achèvement de la Constitution49. Il y a donc incorporation d’un langage politique dans le corps même du texte de chaire. De la même manière, dans son Discours au sujet du Sénatus-Consulte organique, du 28 floréal an 12, prononcé le 17 thermidor, le pasteur parisien lit, en chaire, non seulement le texte du Sénatus-Consulte, mais aussi la lettre de l’Empereur qui demande une telle lecture afin que son auditoire connaisse « aussi les sentimens de religion et de zèle pour le bien public dont Sa Majesté y fait profession50 ».
Parallélisme, actualisation et approximation historiques
31Mais si l’histoire peut servir de substrat à l’écriture homilétique, le sermon n’est pas un écrit historique et l’objectif n’est pas d’exposer simplement les faits qui ont eu lieu il y a parfois fort longtemps. L’usage du motif historique répond à des buts que se fixe le pasteur. La narration ou la simple allusion historique sert à démontrer ou à expliquer que le passé à un sens pour le présent. Il y a donc mise en parallèle et actualisation de l’histoire.
32L’histoire biblique, très lointaine par définition, est, la plupart du temps, comparée avec le moment de diction du sermon. De la sorte, l’histoire des juifs ou des premiers chrétiens, les persécutions subies, par exemple sous Tibère, est un moyen pour renvoyer à l’image du roi tyran et de manière générale du mauvais souverain. L’Ancien Testament prend alors toute sa place dans les sermons du xviiie siècle, avec une judéophilie marquée car cette histoire de peuple souffrant peut facilement être un miroir de ce que subissent les protestants du temps du Désert51. Ils sont aussi ceux qui, par la bonne ou mauvaise pratique religieuse, peuvent être protégés ou honnis par Dieu. Ainsi, Rabaut-Pomier, alors qu’il évoque l’absence de reconnaissance de culte public avant l’édit de 1787, explique que Dieu a toujours été du côté des protestants, même s’ils pratiquaient leur culte au Désert : « Ne savons nous pas que Dieu regardait avec complaisance les sept mille Israélites qui, retirés peut être dans des cavernes ou dans des huttes, le servait avec amour, tandis qu’il était las des holocaustes et des fêtes pompeuses de la nation Juive entière52. » Sous l’Empire, si l’image de Tibère, mauvais souverain, se retrouve encore53, l’analogie avec le peuple juif n’est plus toujours celle des difficultés qu’il a connues mais aussi celle de bonheur de la liberté retrouvée. Le pasteur Martin ne dit-il pas à son auditoire bordelais, en 1805 : « M.F., comme les Israélites nous sommes délivrés de la servitude, et rendus à la liberté civile et religieuse54 ? »
33De manière complémentaire, l’histoire sainte est mise en parallèle avec le moment de diction des sermons pour insister sur l’importance et la solennité du moment vécu. Ainsi, Rabaut-Pomier dans son discours prononcé en décembre 1783 à l’occasion de la paix conclue entre la France et l’Angleterre, explique en se fondant sur le psaume 46, 9-12 :
« Louis, digne représentant par sa bienfaisance du Dieu qui l’a établi, roi sur la nation, sacrifie au bonheur des peuples les avantages que la guerre lui aurait procurés & par la paix qu’il a conclue avec l’Angleterre assure la prospérité de plusieurs peuples à la fois. Nous pouvons dire aujourd’hui avec la même vérité que David dans notre texte Venez contempler les faits de l’Eternel & voyez quels dégats il a fait en la terre, il a fait cesser les guerres jusques aux bouts de la terre, il rompt les arcs, il brise les halebardes, il brûle les chariots par feu. Cessez, a-t-il dit, et connaissez que je suis Dieu. »
34L’importance du temps vécu, la gravité du moment, la rupture qu’il procure entre un avant et un maintenant (ici autour du binôme de la guerre et de la paix) est renforcée par la parole biblique et l’histoire sainte. Son père, Paul Rabaut, en 1775, pour le sacre de Louis XVI, faisait le même usage rhétorique de l’histoire biblique :
« L’avénement de Louis XVI, au trône de France, que la cérémonie de son couronnement nous invite à rappeller aujourd’hui, nous procure des avantages, & nous impose des devoirs, que je développerai successivement. Et j’ai cru ne pouvoir trouver dans l’Ecriture des paroles qui convinssent mieux à la circonstance actuelle, que celles qui nous rapportent le Sacre du Roi Salomon, & la joye qu’en eut le Peuple Juif, image fidèle de notre amour & du bonheur que nous annonce le Règne de Louis XVI55. »
35Parfois, le parallèle avec l’histoire biblique présente des limites et le pasteur se doit de les montrer. Par exemple, un ministre, dans un sermon resté anonyme sur l’avènement de Louis XVI, a choisi d’adosser son texte sur 2 Rois 11, 12 et son but est de suivre « pas à pas » les paroles du texte et de « parcourir, d’une manière historique, quatre circonstances du Sacre de Joas » et de les appliquer « tour-à-tour, & par anticipation, à celui de Louis-Auguste56 ». Cependant, au même moment, il explique que le parallèle qu’il a fait « entre le couronnement du Roi de Juda, et celui de notre Monarque » présente des écarts importants qu’il faut préciser pour éviter les malentendus :
« L’un prit la place d’une usurpatrice, l’autre celle d’un légitime Souverain ; l’un ne parvint au Trône que par le vouer de quelques Sujets, l’autre par ceux de toute une Nation ; l’un n’obtint le Sceptre que par l’entremise de Jéhojadah, l’autre par le seul de droit de sa naissance… Ce contraste est trop frappant, pour insister plus longtemps à vous le faire sentir57. »
36Il y a toujours nécessité à faire œuvre pédagogique dans ces discours qui abordent la chose publique et l’histoire biblique ne peut donc toujours servir sans précisions complémentaires pour éviter les contresens éventuels qui, on le voit dans cet exemple, pourraient être préjudiciables à l’image donnée du monarque français. Les moments de forts bouleversements, comme la Révolution française, sont propices pour utiliser ce jeu d’aller-retour entre le passé et l’actualité. Cela permet d’ordonner les événements, de les relier à un passé alors que le présent est porteur de changements considérables qui peuvent ne sembler fonder que sur la nouveauté. L’histoire alors est un moyen de créer un lien rassurant.
37Les pasteurs sollicitent donc l’histoire en ce qu’elle a de plus variée dans le temps mais aussi dans la thématique. Ils ne s’intéressent pas qu’aux grands personnages, ils usent aussi beaucoup de la narration des événements. Ils restent toutefois dans ce que l’historiographie appelle « l’histoire-bataille » en particulier sous la période napoléonienne. Leur modalité rhétorique n’est pas moins diversifiée : ils racontent longuement ou de manière plus allusive, ils sollicitent la mémoire de leur auditoire et parfois de manière à révéler un outillage historique assez pointue chez ces derniers. La question qui se pose in fine de ces différentes modalités rhétoriques du passé est celle de la fidélité à « la » réalité historique – si tant est qu’elle existe. Les pasteurs travestissent-ils l’histoire dans un jeu rhétorique de chaire ? Ils se fondent bien entendu sur des lectures ou des sources que l’on peut parfois identifier comme l’ouvrage d’Élie Benoist L’Histoire de l’édit de Nantes qui a certainement nourri leur connaissance des persécutions huguenotes ou bien des productions plus anciennes (comme Plutarque par exemple). Mais il ne faut jamais perdre de vue qu’ils sélectionnent, dans leur discours, des épisodes de l’histoire politique, plus ou moins récente, nationale ou plus spécifiquement protestante… Car ces sermons ont un but ou plutôt plusieurs : prononcés au moment du culte, ils ont un rôle pédagogique, explicatif ; ils ont aussi pour tâche de former le bon chrétien en lui expliquant l’Écriture, en l’actualisant. C’est un discours qui n’est pas neutre, qui ne peut l’être, et l’usage de l’histoire répond, de fait, à une logique argumentative qui poursuit plusieurs finalités. Dans ces conditions, le passé peut être travesti pour en retirer ce qui est utile au but poursuivi.
38Cela est particulièrement évident dans les discours d’apparat, ou éloges panégyriques dont la première finalité est de rappeler les hauts faits d’une personne. Dans le cas présent, le recours à l’histoire personnelle des souverains, et donc à l’histoire politique pour nourrir le discours, est non seulement indispensable mais orienté. La sélection opérée, la présentation biographique et souvent hagiographique répondant à la volonté de louer, glorifier le personnage qui est l’objet du discours, produit une histoire qui est un outil d’alliance avec le pouvoir que l’on valorise, un instrument de soumission aux autorités, obéissance présente dès l’Ancien Régime nous l’avons dit.
39Et, le corolaire à cette soumission aux autorités est de montrer le bonheur qu’il y a à vivre sous le règne actuel. Par exemple, l’histoire fisco-politique est utilisée dans un but précis : montrer l’évolution de la prise de décision politique et, en définitive, le bonheur pour les sujets d’être sous le règne d’un roi, Louis XVI, si soucieux du bien-être de la population de son royaume. Cette histoire politique immédiate entre dans la rhétorique de soumission aux autorités par la valorisation du roi régnant et de sa politique sans pour autant que l’on puisse parler de sermon d’apparat. Au xixe siècle, la logique est la même quand il s’agit de valoriser le temps dans lequel vivent les protestants. Sous Napoléon, Pierre de Joux, en 1805, n’hésite pas à être un peu rapide en créant une analogie – inexacte – entre l’édit de Nantes et la nouvelle législation des lois organiques. L’idée est d’expliquer l’importance de la reconnaissance officielle acquise et le pasteur joue avec l’image positive d’Henri IV dans la mémoire protestante pour la rapprocher de l’action politique de Napoléon58. Le pasteur Castelviel, à Milhaud, en 1806, rappelle les difficultés de la période révolutionnaire pour expliquer que vivre sous Napoléon et son « gouvernement paternel » est un vrai « bonheur59 ». Ici, le rappel historique des persécutions, alors qu’il était un motif de patience et de fermeté dans la foi au xviiie siècle, devient un argument pour porter un point de vue positif sur le gouvernement impérial à l’exemple encore de Rabaut-Pomier qui, en 1806, revient sur les proscriptions du Désert – qu’il a lui-même connues – pour évoquer les bienfaits apportés par la loi de germinal an X, et donc par Napoléon60. Le rappel historique joue le même rôle avec le retour au régime monarchique alors que le pasteur luthérien Boissard, dans son sermon de 1820, explique à ses auditeurs le bonheur qu’ils ont à vivre sous le gouvernement actuel en rappelant les temps de proscription passé, puisque ce n’est pas « une tolérance dédaigneuse, plus ou moins précaire ; c’est une parfaite égalité des droits » qu’ils connaissent, une « égale protection » avec les catholiques61.
40Bien entendu, il faut le rappeler, la parole de chaire n’est pas toujours en adéquation avec cet idéal d’alliance avec les autorités et, avant 1787, elle est même utilisée pour demander un changement de situation pour les protestants. Montrer les difficultés, les impossibilités de vie pour les réformés, faire référence donc à ce que l’on appelle la période du Désert héroïque – c’est-à-dire les années post-révocatoires jusqu’à 1760 – est une manière de montrer le décalage entre l’avancée des idées des Lumières et la réalité. De la sorte, le passé relativement récent est utilisé par les pasteurs pour montrer l’inadéquation du présent en matière législative et entre dans la rhétorique de chaire en vue d’un changement de la législation concernant les huguenots. L’argumentation qui se fonde sur l’histoire politique via les choix politiques opérés par Louis XIV a pour visée de faire changer la loi sous Louis XV et Louis XVI mais elles montrent aussi les retards de ces rois à prendre une telle décision. Dans ce cas précis, l’usage de l’histoire protestante est relativement plus « objectif » même s’il est traité sous le registre d’un pathos évident. Dans le cas des discours d’Ancien Régime, ce sont des pasteurs protestants qui s’adressent à des fidèles subissant eux-mêmes les vexations : la neutralité par rapport à l’histoire personnellement vécue est difficile, on le comprend. De la même manière, sur les périodes postérieures, cela renvoie à la mémoire d’un groupe et l’on sait, là encore, ce qu’il peut y avoir de reconstruction héroïsante62.
41Paroles de soumission ou de revendication, il reste délicat pour les pasteurs de ne pas relater une histoire subjective qui répond à un dessein spécifique. Parmi les buts poursuivis, il en est qui renvoient plus spécifiquement à une écriture de l’histoire marquée par le providentialisme ou le messianisme.
Providentialisme et prophéties bibliques
42Le recours à l’histoire et la manière de décrire celle-ci sont fortement marqués par un providentialisme pastoral : les événements sont présentés à maintes reprises comme l’œuvre de Dieu. Aborder ainsi l’histoire chrétienne, celle relatée par la Bible est normal, évident, logique. En revanche, le faire pour les événements en train de se dérouler et qui relèvent du profane, et plus particulièrement de la chose publique, révèle parfois une véritable théologie de l’histoire.
43Cette providence en action s’exprime par l’intermédiaire des autorités qui sont les instruments de Dieu, comme le résume ce sermon anonyme de 1789 : « Comme les calamités sont des coups de la Providence, de même les délivrances sont des actes de sa bonté ; la main invisible agit par le moyen des causes secondes dépendantes de son pouvoir. Dieu se sert des hommes, & surtout des potentats, pour opérer notre bien63. » La lecture providentielle des événements est omniprésente et l’auditoire l’entend régulièrement. De la sorte, la Révolution française est annoncée par certains pasteurs comme la marque de la Providence. Par exemple, Adrien Vincent, dans son Discours patriotique et chrétien expose le « nouvel ordre des choses [qui] se présente devant nos yeux64 ». Et toute la première partie de son texte, prononcé le 1er janvier 1790, vise à montrer que l’année écoulée, 1789, est une œuvre de Dieu, conformément à la péricope choisie pour asseoir le discours, le psaume 90, 16 : « Que ton œuvre paroisse sur tes serviteurs & ta gloire sur leurs enfants. » Pour lui, il n’y a aucun doute,
« affranchir un Peuple, réformer une Nation, changer la face d’un Empire ; le régénérer dans ses lumières, dans ses mœurs, dans sa constitution, dans ses lois ; le rendre tout-à-coup un Peuple nouveau, et le proposer pour modèle à tous les peuples de l’univers, oh ! C’est-là une œuvre extraordinaire, et cette œuvre, sans doute, est celle de Dieu ».
44Le passé immédiat ne se peut saisir que dans une perspective divine tant il est porteur de changements et de nouveautés :
« Tels sont, M.F., les grands événemens qui ont illustré l’année que nous finissons, et qui vont encore illustrer celle qui commence. Ils sont étonnans, extraordinaires, pris dans tous les rapports, et considérés sous toutes les faces. […] Eh ! qui ne verroit, en effet, le doigt de Dieu, marqué dans cette merveilleuse révolution65 ? »
45Le providentialisme exalté du pasteur irrigue ainsi tout son discours. Nous avons vu également combien Bonaparte devient l’homme providentiel dans la bouche des pasteurs, il est inutile d’y revenir, mais il est important de noter que ce moment fort de providentialisme politique en chaire est l’occasion parfois de développer un discours messianique voire prophétique. Tel est le cas d’un sermon de 1810, déjà évoqué, de Rabaut-Pomier. Le pasteur commémore alors l’anniversaire de l’empereur et, dans les aspects nouveaux de ce sermon, déjà en partie écrit en 1806, il ajoute une sorte d’épilogue, dans la version imprimée, intitulée : « Détails succincts sur les prophéties qui ont annoncé le règne de Napoléon66. » Dans le corps du texte déjà, une conception de l’histoire anticipatrice se déployait alors que Dieu « annonce au peuple juif toutes les délivrances qu’il lui prépare, les mémorables exploits de Cyrus, d’Alexandre, l’établissement et la chute des grands empires » ; et tous ces événements « se présentent à l’œil étonné comme leur histoire anticipée ». De fait, pour le pasteur « douterions-nous que le même Dieu […] n’ait fait intervenir son pouvoir dans la délivrance éclatante dont nous sommes les témoins & les objets67 ? » Le parallélisme temporel est classique mais il introduit ici une notion d’anticipation de l’histoire vécue et, il ajoute des éléments en ce sens autour de « l’accomplissement des prophéties qui annoncent le règne de Napoléon ». Il se « borne aujourd’hui à indiquer […] les principales prophéties qui jusques ici ont été considérées comme devant l’annoncer, et à en montrer brièvement, et seulement quant à l’époque, l’application aux événemens actuels ». Il explique d’ailleurs que son père Paul Rabaut les avait prévus.
46Il semble, en effet, que le pasteur le plus célèbre du second xviiie siècle ait été intéressé par les études apocalyptiques écrivant dans sa correspondance : « Cette étude fait mes délices, il s’y trouve de grands motifs d’encouragement et de consolation68 » et il rencontre, en 1741, Théodore de Bionnens, à Nyon, pour discuter avec lui de ses travaux69. Théodore Crinsoz de Bionnens (1690-1766), théologien du canton de Vaud, a publié, anonymement, en 1729 et à Genève, un Essai sur l’Apocalypse avec des éclaircissements sur les Prophéties de Daniel qui regardent les derniers temps70. Dans l’ouvrage, il entend démontrer le triomphe du protestantisme sur la papauté pour l’année 1745. Il n’est pas le premier à tenter une approche prédictive de la fin des difficultés pour les huguenots. Pour ne citer que les plus proches de siècle, Pierre Jurieu avait déjà publié, en 1686, L’accomplissement des Prophéties, où il prévoyait qu’indubitablement, la délivrance arriverait en avril 168971. Emmanuel Le Roy-Ladurie a montré la diffusion importante de cet ouvrage dans le Languedoc, on peut cependant s’étonner qu’après la révolte des Camisards et l’importance d’une forme de prophétisme contre lequel Paul Rabaut lui-même a lutté pour reconstruire la discipline réformée, il demeure passionné par cette question. Sans doute faut-il voir ici l’héritage de la diffusion des ouvrages du xviie siècle dans la région ainsi que l’attente constante d’une délivrance des Églises sous la croix qui pousse à chercher des jalons temporels rassurant sur l’avenir. Et d’ailleurs, il n’est pas le seul à s’y intéresser. En effet, il se retrouve être assez représentatif de cet intérêt pour le prophétisme, en ces temps de difficultés et de proscription protestante et le synode du Bas-Languedoc adopte même la décision, le 15 avril 1751, qu’« on prierait Mr. De Cheseaux de vouloir bien travailler incessamment à l’ouvrage qu’il avait promis de faire72 » (il s’agit des Dissertations critiques sur la partie prophétique de l’Écriture). Ce second nom indique que d’autres personnes gravitent autour de Bionnens et suscitent l’intérêt de Rabaut : le propre frère de Bionnens, de Cottens, ainsi que la fratrie Loys de Cheseaux (Philippe et Charles-Louis)73. D’ailleurs, l’échéance de 1745 passée, Paul Rabaut demande à son ami Court à Lausanne, dans une lettre de mars 1749 : « Est-il vrai, au reste, que l’illustre mr de Ch (eseaux) a adopté le système de mr de Cottens, et qu’après avoir redressé les erreurs de chronologues, il a fixé au mois d’octobre prochain quelqu’un des grands événemens que nous attendons74 ? » Charles-Louis de Cheseaux (1730-1789) se fonde sur « le verset 13 du viiie et 11 du xiie chap. [de Daniel] » lui confirme Court75. Malgré l’échec de la prédiction, Paul Rabaut réclame toujours, en 1753, à son ami une copie du Prince Geme de Cottens et de l’ouvrage de Cheseaux76. Son intérêt demeure intact et ce qu’en dit son fils Rabaut-Pomier, en 1810, laisse penser qu’il a continué à faire des calculs sur l’avenir et notamment sur l’avenir politique de la France77. Et son fils avec lui.
47En ce début de 1810, « cette magnifique illusion, ou espérance, qui fait prévoir, selon le système millénaire, le règne de Dieu visiblement établi dans le monde78 », par le biais des prophéties bibliques reste donc intact chez certains pasteurs encore. D’ailleurs, la postérité de Bionnens demeure à la fin du xviiie siècle et Jean-Pierre Astier, pasteur de l’Ardèche qui passe pour un millénariste, publie en 1798, à Valence, L’Esprit de Bionens sur l’Apocalypse et les prophéties de Daniel pour ce qui regarde les derniers temps. Dans la version imprimée de son sermon, Rabaut-Pomier renvoie donc au calcul de son père sur l’avènement de Napoléon mais, en les relatant et en cherchant à les expliquer, il poursuit ce qui aurait pu sembler une « tradition familiale prophétique » si l’on n’avait pas senti que les Rabaut ne sont ici que les plus diserts sur cette question. Le fils rapporte donc les paroles du père :
« [Mon père] me dit […] : “Que le libérateur annoncé par les Prophètes comme devant rendre la liberté à la religion chrétienne persécutée, paraîtrait au commencement de ce siècle ; qu’il la rétablirait à cette époque ; qu’il serait l’Empereur des Français.” […] Je me bornais à lui dire que fixer pour ce prochain grand événement le commencement du siècle prochain, était vague, et que je désirais qu’il pût indiquer une époque plus précise ; il me dit alors qu’il ne croyait pas se tromper en fixant l’an 1802. »
48La date tombe sur celle de la promulgation du Concordat mais aussi sur celle du consulat à vie, de la loi de germinal, autant de signes d’élection divine pour Bonaparte. Le pasteur pense avoir découvert les fondements des calculs et se propose de les exposer en détail dans un ouvrage à venir (qu’il ne semble pas avoir écrit). Dans la version imprimée de son sermon, il se
« borne aux principales prophéties qui présentent ces calculs. Daniel, chap. 7, prédit les quatre grandes monarchies qui devaient régner successivement sur la terre : la quatrième était l’Empire Romain, pendant lequel devait s’élever avec dix rois, un roi qui aspirerait à une autorité différente, mais qui devait ne conserver son pouvoir que pendant un temps, des temps, et la moitié d’un temps ; ce qui, au sens de tous les commentateurs, exprime trois ans et demi. Ils ne sont en différend que sur la durée des années que ces temps expriment, les uns l’expliquant d’années ordinaires, d’autres d’années prophétiques, qui désignent 1260 ans ».
49Puis, après avoir rapidement expliqué que la Révolution a été un temps de persécution pour la religion, il continue son savant calcul :
« En admettant les années prophétiques, en appliquant cet espace de temps à l’autorité du Pape, et en le calculant sur celui que St-Paul et St.-Jean assignent à cette autorité, je la fais commencer à l’an 541, époque à laquelle le consulat fut aboli, et qui, se joignant à 1260 ans voulus par les prophéties, présentent l’année 1802 comme celle ou devait commencer la chuter de cette autorité ; ce que mon père avait prévu vraisemblablement en faisant les mêmes calculs. C’est en 1802 qu’a été passée la convention entre le Pape et le Gouvernement, sous le Consulat de Napoléon, événement très remarquable et pour la politique et pour la Religion chrétienne, et qui est un des caractères qui, dans les prophéties, devait nécessairement appartenir au règne actuel. »
50On sent, dans ce passage du sermon, comment les prophéties bibliques conservent toute leur valeur apologétique alors que Rabaut-Pomier conclut : « Notre Auguste Empereur a été annoncé par les prophètes. »
51L’histoire, dans toute sa diversité, est donc un support rhétorique puissant pour les pasteurs qui parlent en chaire de la chose publique. L’histoire en train de se faire est aussi l’occasion de montrer les moments heureux qui jalonnent la vie politique et sociale de la communauté protestante.
Du bonheur de la Providence : la rencontre du légal et du légitime
52Les pasteurs proclament régulièrement et invariablement la soumission aux autorités, telle est la parole légale à délivrer en chaire, soit de manière spontanée sous l’Ancien Régime, soit dans le cadre d’une demande du pouvoir à partir de l’Empire. Cela n’empêche pas les ministres de profiter de cette prise de parole publique – clandestine ou non – pour déployer une parole sur la chose publique qui valorise des vertus civiques ou revendiquent des droits. Ils le font, dans un cas comme dans l’autre, en déroulant une rhétorique qui survalorise le récit, du passé lointain ou du temps présent et qui fait la part belle à la Providence. Il est donc possible de déceler, dans les discours de chaire de l’ensemble de la période, des séquences temporelles durant lesquelles la parole pastorale laisse transparaître un moment serein, prospère et tranquille dans la rencontre du légal et du légitime, un instant où les attentes ont rencontré l’histoire en marche.
La joie de la légitimation monarchique de 1787
53Le premier temps où la parole pastorale sur la chose publique laisse entrevoir un bonheur lié aux circonstances qui permettent de mettre en lien le réel et les principes politiques sur lesquels les orateurs insistent en chaire, est celui de la promulgation de l’édit dit « de tolérance79 ». Si certains espoirs ont été déçus dans ce texte, notamment celui de voir le culte public être reconnu par la monarchie, « désormais », comme le dit le pasteur Jean Jay à Sainte-Foi, « on peut être français sans être catholique80 ». Ce moment est véritablement présenté comme un instant de joie et de libération dans les différents discours qui traitent plus spécifiquement de cette question81.
54Le moment est exceptionnel, c’est la première idée qui ressort de la lecture de ces textes. Il marque véritablement une rupture qui libère les pasteurs des habitudes. Ainsi, Rabaut-Pomier ne veut pas faire un discours avec les divisions usuelles ; il souhaite, explique-t-il, s’affranchir des « règles trop souvent pédantesques de la logique et de la rhétorique » car « le cœur est ému » et quand il l’est, « il ne peut aller que par saillies, et il ne va que par sauts et par bons82 ». Après avoir expliqué que les persécutions de plus d’un siècle avaient présenté quelque utilité – celle de faire sentir l’importance de la faim de Dieu, celle d’avoir permis la diaspora protestante « dans toutes les parties du monde » – il en vient à un discours binaire qui balance autour d’une double anaphore autrefois/aujourd’hui qui renforce l’effet de rupture avec le passé et souligne le bonheur du moment présent :
« Autrefois nous étions méconnus par les loix du royaume, aujourd’hui nous sommes sous la protection de ces mêmes loix ; autrefois nous tremblions pour la liberté de nos femmes et de nos enfans, ces objets chéris de nos cœurs, aujourd’hui nous n’avons à craindre ni pour eux, ni pour nous-mêmes, que le poison du péché ; autrefois nous étions forcés de dissimuler notre foi, si nous voulions conserver nos biens, et même nos vies, aujourd’hui nous pouvons la manifester sans crainte, et la professer en toute confiance ; autrefois, si nous voulions répondre aux vœux de la nature et imprimer sur nos fronts le sceau de la loi, nous étions soumis à des actes qui répugnaient à nos consciences, et que nous ne pouvions faire sans nous rendre coupables devant Dieu, aujourd’hui on ne nous prescrit rien que notre religion ne nous permette, et que nous ne devions observer ; autrefois on nous refusait jusqu’à des tombeaux, aujourd’hui on nous en donne. »
55Mais ce moment exceptionnel se doit d’être compris par tous, d’où la grande pédagogie de certains de ces sermons. Par exemple, le Discours sur l’Edit de bienfaisance, à l’usage des protestants de la campagne regorge d’explications pour permettre à l’auditoire et au lecteur – il est imprimé – de comprendre les enjeux de l’édit du roi en énumérant ce que procure l’édit pour les huguenots83. Le pasteur – resté anonyme – insiste particulièrement sur l’idée que la loi permet de sortir d’une situation précaire où, certes l’intolérance n’était plus active véritablement, mais où elle est désormais proscrite84.
56D’où la grande reconnaissance que les protestants peuvent avoir à l’égard de leur « bon roi » Louis XVI : « Que les obligations que nous avons au cœur bienfaisant de notre auguste Souverain, sont donc grandes ! Oh ! quel amour ne doivent-elles pas nous inspirer pour lui85 ! » C’est le moment où le parallèle entre Louis XVI et Henri IV s’opère le plus naturellement sous la plume des pasteurs, indiquant l’attachement, non feint, au souverain régnant86 : « Henri, dont vos maux passés, vous ont toujours fait chérir la mémoire, Henri fut longtemps votre ydole : qu’il cède la place à Louis87. » Il y est aussi Cyrus qui a libéré les juifs de leur captivité à Babylone88. Louis XVI a donc su s’entourer de « sages de la Nation », tenir compte de ce que le public avait pu lire grâce à des « ouvrages pleins de lumières & de candeur », en un mot être un roi éclairé89. D’où des discours qui deviennent propices à développer un argumentaire sur la soumission au roi qui n’est alors pas nécessaire mais évidente, tant les bienfaits qu’il a apportés à la communauté protestante sont grands. La reconnaissance l’accompagne, parfois présentée avec des accents pathétiques (« jetons sur sa personne auguste nos yeux baignés de larmes de reconnaissance90 »), même s’ils sont plutôt rares.
57Cet événement de l’édit de 1787 est un instant de bonheur car, même si les protestants n’ont pas acquis la liberté de culte, « la pierre fondamentale » de l’édifice est posée, ils ont un état civil qui les éloigne de cette mort civile qui les accablait. Tous les droits ne sont pas pleins, la liberté ne l’est qu’à demi, tout comme l’égalité mais « le reste se fera » et « le bonheur est en nos mains » clame le pasteur Rabaut-Pomier. Cet argument, ainsi que l’appel à la patience91, est récurent, comme si les pasteurs croyaient en une marche continue dans les progrès des droits qui commencent à leur être acquis : « Si nous n’avons pas tout ce que nous aurions pu désirer, tâchons de nous l’attirer par une conduite régulière. Dans un siècle éclairé, où l’esprit de tolérance s’est glissé dans presque toute l’Europe, notre sort peu devenir meilleur92. » Cela permet d’ailleurs à Jacques Olivier-Desmond d’expliquer que si le culte n’est pas autorisé par la loi, « les pasteurs ne sont plus proscrits » et que « la faculté de le célébrer » reste intacte et d’autant plus importance en ce moment,
« parce que ce serait vous défendre de mériter la qualité de citoyens [que le roi] vous a rendue, que de vous interdire les vertus pieuses qu’elle suppose. Voilà l’esprit de cette Loi bienfaisante qu’il vous a accordée, & c’est en le remplissant que vous obtiendrez dans la suite beaucoup plus qu’il ne vous a donné93 ».
58On retrouve ici la croyance en un avenir radieux mais encore l’articulation souvent présentée entre la pratique du culte, la religion et les vertus citoyennes. Ce moment est donc particulièrement propice à cet égard pour les pasteurs. Certains d’entre eux, en expliquant justement que tout n’est pas acquis, en profite pour louer la prudence du monarque qui finalement, en agissant progressivement, utilise la voie la plus sage pour parvenir à faire tomber les préjugés qui sont parfois encore importants94. L’occasion est donc saisie pour rappeler qu’un bon prince sait aussi être un homme de conciliation.
59Tous les pasteurs en revanche célèbrent le retour de la paix, de la tranquillité tant attendue :
« Ah, maintenant tranquilles à l’ombre de nos figuiers, nous pouvons servir le Dieu de nos pères dans l’intégrité de notre cœur ! nous pouvons vivre & mourir paisiblement au sein de nos familles, cultiver nos héritages, transmettre notre nom à nos enfans, les élever dans notre communion, les consacrer à des professions utiles et honorables, sans craindre qu’ils seront un jour les victimes de la cupidité, de l’intolérance & du fanatisme95. »
60Cette quiétude apportée par l’édit impose d’oublier les maux passés, pour mieux profiter des bienfaits de la loi96. Ce qui paraît somme toute paradoxal car tous les textes font référence aux persécutions et vexations pour montrer les changements que l’édit du roi opère97. La rhétorique se passe ici de logique et, in fine, cette loi est bonne pour tout le monde et pas seulement pour les protestants. On retrouve ici l’argument qui avait pu servir aux pasteurs à expliquer que les protestants devaient être réintégrés au royaume de France pour le bien économique du pays98. Olivier-Desmont, en se fondant sur Ésaïe99, en profite pour appeler le retour des exilés pour la foi, ainsi que de tous les protestants qui souhaiteraient s’installer en France100. Le bien public, l’intérêt de la nation sont ainsi intégrés dans ces discours qui auraient pu ne tourner qu’autour de la communauté huguenote.
61L’édit est surtout l’occasion pour les pasteurs de rappeler l’importance de la religion : « N’oublions jamais que notre liberté actuelle est la suite et la récompense de notre attachement inviolable à nos principes religieux101. » Il devient donc impensable de ne pas manifester une ardeur dans le zèle religieux alors que les dangers de l’incrédulité sont grands : il faut « se défendre de la tiédeur et de l’indifférence qui sont le poison de l’ame » ajoute Blachon dans son discours du 15 février 1789102. D’où l’importance de la formation religieuse, de l’instruction du croyant – bienfait suprême – que permet cette loi :
« Prenons de concert toutes les mesures possibles pour y répandre l’instruction, y propager la piété et la vertu, y faire renaître la simplicité, la pureté de mœurs qui ont si fort honoré nos pères. Transmettons à ceux qui viendront après nous le précieux dépôt de notre foi, et avec lui les sentimens qui leur rendront inviolable, un attachement éclairé et solide à la liberté évangélique dont nous faisons profession103. »
62Ces sermons, parce qu’ils s’inscrivent dans un temps particulier de l’histoire protestante, sont autant d’indices d’une rencontre entre une parole légale sans cesse martelée – soumission aux autorités, respect… – et un discours conforme à ce qui aux yeux des protestants est important, légitime – la liberté, la piété… C’est un moment particulièrement heureux que les ministres du culte ont à porter en chaire. Mais s’il concerne plus spécifiquement l’histoire communautaire, il est un autre moment de l’histoire nationale cette fois-ci, assez proche chronologiquement, qui semble un temps porteur d’espoir et de contentement dans la bouche des prédicateurs protestants.
La construction d’une Révolution positive : 1789-1792
63La Révolution française, le moment 1789-1792 plus particulièrement, paraît être aussi un moment de rencontre entre le légal et le légitime qui a emporté l’adhésion de la plupart des pasteurs ayant pris la parole en chaire. L’extrait suivant, tiré du sermon d’Adrien Vincent devant un auditoire nîmois, rend compte du palier franchi, notamment avec la reconnaissance du culte protestant :
« Reçois-les, ces vœux, Nation française, notre Patrie, et notre mère commune. Nous les formons plus comme des malheureux proscrits que tu rejetois de ton sein, désavoués par la loi, réduits à traîner une existence douloureuse sur une terre ingrate, qu’à peine osions-nous cultiver. Nous les formons aujourd’hui comme des citoyens que tu reconnois, comme des enfants que tu déclares t’appartenir… Il nous est donc permis de nous dire Français. Le culte raisonnable que nous rendons à Dieu ne nous privera plus des biens qui appartiennent à l’homme, et les droits de la nature ne seront plus sacrifiés aux préjugés de la Religion… O ma patrie ! je te salue, et je bénis le moment où je puis te donner ce titre sacré104. »
64Nous sommes alors en 1790 et les protestants, grâce à l’article X de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, voient la pleine reconnaissance de la liberté de conscience. Les événements de l’été 1789 sont parfois expliqués, en particulier pour les modifications socio-politiques apportées. Le pasteur Pierre Dugas est particulièrement pédagogue et explique, très en détails, les changements opérés. L’orateur commence par reprendre tout simplement quelques articles de la Déclaration des Droits de l’homme, en les intégrant à son texte :
« Les droits de l’homme & du citoyen sont reconnus par l’Assemblée nationale ; tous sont déclarés libres & taux en droits. Le principe de toute souveraineté est déclaré résider essentiellement dans la Nation, & on reconnait que la liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas aux autres. La loi est définie [par] l’expression de la volonté générale, & on avoue le droit que chaque citoyen a de concourir à sa formation. Nul ne peut être inquiété pour ses opinions, même religieuses, & peut le manifester, pourvu que l’ordre public n’en soit pas troublé. »
65Puis il se fonde sur les articles constitutionnels de 1789 rappelant que « l’Assemblée nationale sera permanente, & pourra seule exercer le pouvoir législatif. Le Roi reconnu chef du pouvoir exécutif, ne pourra exiger l’obéissance, qu’en vertu des loix, & ne régnera que par elles ». Il mêle ensuite différents acquis législatifs, en incorporant, sans les citer, lois et décrets pris durant l’année 1789, en insistant particulièrement sur les changements apportés durant la nuit du 4 août :
« La distinction des ordres est abolie, les talens peuvent se montrer & parvenir. L’entrée de toutes les charges est ouverte indifféremment à tous les citoyens, mais elles ne sont promises qu’au mérite. Tous les privilèges sont anéantis : le régime féodal [se] voit extirper jusqu’à ses dernières racines : les justices seigneuriales & la plupart des droits seigneuriaux sont abolis, les autres sont déclarés rachetables. La Nation rentre en possession des biens qui lui avoient été enlevés dans les temps d’ignorance & de fanatisme ; les dimes de toute espèce, & généralement tous les biens ecclésiastiques, sont remis à la disposition de la Nation, qui se charge de pourvoir d’une manière convenable, au frais de culte & à l’entretien de ses ministres. »
66Il évoque ensuite la fin de la vénalité des offices (art. 7 du décret du 4 août), la limitation des pensions (art. 14). Il explique les prises de décision politique dans le sens d’une limitation des dépenses (« des charges onéreuses & inutiles sont supprimées »). La nouvelle organisation administrative est encore présentée à l’auditoire : « des municipalités seront établies dans toutes les paroisses, & des conseils dans tous les districts & départemens ». Les principes qui animent les institutions sont rappelés (« les membres de ces différents tribunaux, choisis par le peuple, seront renouvellés souvent, & pourront juger uniquement d’après la justice & l’équité, sans être gênés par des formalités onéreuses & inutiles ») et il insiste particulièrement sur la fin de l’oppression en terminant sur les changements fiscaux du nouveau pouvoir en place105. Il offre donc à son auditoire chrétien, un condensé des six derniers mois politiques, retenant les avancées et gommant les altercations, le désordre public qui ont accompagné les bouleversements de cette période.
67Une autre étape est franchie, nous l’avons dit, par la Constitution de septembre 1791 qui attribue la liberté de culte. On comprend donc, par rapport à leurs revendications constantes, que l’œuvre accomplie par la Révolution jusqu’alors avait de quoi combler les attentes protestantes. De fait, elle est présentée comme plus que positive en chaire. Elle est même jugée encore plus positivement que la révolution anglaise car elle s’est faite sans violence. Tout au moins c’est ce qu’expliquent les pasteurs durant les années 1789-1792.
68Mais elle est également œuvre de la Providence, comme nous l’avons vu, non seulement car elle permet aux protestants d’acquérir la plénitude de leurs droits mais également car elle concerne tous les Français. Elle les rend libres et l’analogie avec le peuple hébreu qui était jusqu’alors réservée à l’esclavage religieux (les temps de proscription protestante) est utilisée pour l’ensemble des Français qui connaissent grâce à elle une libération générale. Elle peut être toutefois pour certains pasteurs également l’œuvre de la raison (elle-même fruit de la Providence qui a permis le « progrès des lumières »), l’expression de l’intérêt national, ce qui « a rendu libre » les hommes106.
69La Révolution rend les hommes égaux et frères, égalité et fraternité qui sont avec la liberté, on l’a dit, des thématiques centrales de l’homilétique réformée y compris sous l’Ancien Régime. En tant que telle, elle apporte la lumière et Pierre Dugas choisit d’ailleurs pour péricope d’accroche à son sermon de 1790 « la nuit est passée, le jour est venu » (Rom 13, 12). Cette image de la lumière, du jour qui vient enfin, fait penser à la devise de Genève, Post tenebras lux, et renforce l’idée d’une course vers le bonheur et d’un jour sans fin.
70C’est d’ailleurs parce que les bienfaits sont considérables et qu’ils peuvent rester incompris par les Français que Rabaut Saint-Étienne, dans une lettre au pasteur Bruguier du 11 novembre 1790, évoque l’idée de prêcher la Constitution de 1791 en chaire :
« Je crois que nos confrères ne pourraient rien faire de mieux que de prêcher, de temps en temps, la Constitution, en l’expliquant ; car la Constitution est la morale de l’État, et il n’y a qu’une morale. […] Ce serait bien mériter de la patrie, et un moyen infaillible d’estime et de considération que de donner aux peuples de justes et saines idées du droit naturel, du droit politique de la France et de la Constitution. Les décrets en fourniraient le texte, et l’Évangile en fournirait aussi abondamment. Vos ouailles, ramenées à vous par ce double lien, sentiraient l’utilité de la classe d’hommes qui les formeraient à la vertu politique et à la vertu religieuse, qui sont la même107. »
71Nous retrouvons ici l’importance de la morale, des vertus et les liens entre ce qui relève du politique et du religieux. Ce souhait semble effectivement avoir été réalisé si l’on considère certains sermons de la période comme celui de Jean-Pierre Astier sur la constitution et la religion ou bien ceux prononcés par Jeanbon Saint-André, à Montauban ou Marron à Paris108. Parfois même, le prédicateur anticipe sur les bienfaits de la Constitution : « Elle va mettre fin [aux] maux [de tout bon Français] », elle « réunit les vœux de tous les vrais citoyens, & […] est sanctionnée par le meilleur des Rois, parce qu’elle fait le bonheur de son peuple109. » Certains pasteurs, encore sous Bonaparte, n’hésitent donc pas à rappeler dans leur prédication ce souvenir heureux des premières années révolutionnaires : « La révolution française est toute marquée du sceau de la Providence » explique encore le pasteur Jean Jay à son auditoire de Montcaret en 1805110. Mais de manière générale, la rupture avec l’œuvre de la Révolution se fait clairement avec l’usage de la violence et avec la période de la Terreur111.
Les moments heureux du XIXe siècle : un girouettisme de vertu
72Nous avons évoqué combien les pasteurs protestants, au même titre que les prédicateurs des autres religions, entraient dans une logique de valorisation de Bonaparte. Dans son article sur la prédication catholique, Bernard Plongeron a relevé la rupture qui se fait à partir de 1807 dans l’alliance entre l’Église catholique et l’Empire, Jacques-Olivier Boudon situe en 1809 la fin de la lune de miel112. Qu’en est-il du côté protestant ?
73Dans les sermons étudiés, la rupture est moins évidente, même si l’enthousiasme se tarit. Il semble acquis que les années 1802-1806 sont des moments de bonheur retrouvé pour les pasteurs en chaire. Et certains pasteurs n’hésitent pas à le reconnaître, à l’exemple de Blachon qui déclare « que [l’Empereur] a enfin exaucé nos prières et fortifié notre foi en mettant notre sainte religion sous la sauvegarde des lois de l’Empire ; liberté précieuse pour laquelle nos pères ont tant souffert113 ». Les garanties qu’offre la politique de Napoléon à cet égard sont totales :
« Son équité connue, la manière dont il fait déjà exécuter la loi du 18 germinal à ce sujet, le sage Ministre qu’il a choisi pour cela, ses lettres à vos Pasteurs pour faire intervenir le ministère Evangélique dans les grandes circonstances de l’Etat, l’honneur fait à ceux-ci et aux églises, en la personne des Présidens des Consistoires, d’être appelées avec les principaux personnages de la nation comme témoins du serment à prêter par l’Empereur le jour de son couronnement, ainsi que le porte l’art. 52 du Sénatus-Consulte, tout nous garantit que la protection Impériale aura son plein et entier effet à notre égard, comme envers toutes les classes de citoyens sans distinction114. »
74Ces pasteurs se retrouvent dans une situation qui leur semble à peu près similaire à celle de 1787. C’est ce qui explique sans doute pourquoi certains d’entre eux réutilisent sans grands scrupules leur texte de l’édit de 1787 durant ces années-là. Nous avons cité l’exemple de Jacques Olivier-Desmont, et Pierre Mordant fait de même puisque dans son sermon sur l’édit « dit de Tolérance », sont intégrés des feuillets, d’une plume différente et clairement identifiable sur le sacre de l’Empereur.
75Il est évident que le retour de la paix religieuse, la fin de l’instabilité politique sont des éléments qui ont rassuré les protestants. L’importance accordée dans le traitement égalitaire des individus fait que certains pasteurs insistent sur ce qui, dans l’organisation de l’État, va dans le sens de l’égalité tant revendiquée. Ainsi, dans son sermon sur la naissance de Napoléon, le pasteur de Valence, Paul-Louis Armand-Delille relève l’importance du Code Napoléon présenté comme « des lois uniformes & justes » qui doivent « servir d’appui aux préceptes de l’Evangile » et, avec ce Code, « tous les souhaits des âmes vertueuses sont comblés115 ». Les pasteurs se font ainsi les porte-paroles de leurs fidèles et certaines lettres attestent de ce sentiment de bonheur et de calme retrouvés parmi la population huguenote, à l’exemple de cette missive des protestants du canton de Vernoux, adressée au préfet en 1804 :
« De quels sentiments d’amour ne doivent-ils pas être pénétrés envers un gouvernement qui […] vient de consacrer l’exercice de leur culte […]. Leurs cœurs pressés à la fois par les sentiments de reconnaissance, d’affection et de respect pour leur auteur, ne sauraient les exprimer […]. Assurez le Gouvernement de notre entier dévouement et de notre inviolable fidélité116. »
76Ou bien du consistoire de Toulouse, avec la lettre du président Chabrand qui date du début de la guerre d’Espagne : « Illustre dans la guerre, bienfaisant dans la religion, vous nous avez comblés de biens politiques, civils et religieux ; et par là vous avez conquis nos cœurs aussi victorieusement que vous avez conquis l’Europe par la gloire de vos armes117… » À Bordeaux, c’est le pasteur François Martin qui manifeste la reconnaissance des réformés du consistoire :
« Imitateur de Marc-Aurèle, vous avez accompli ses vœux et surpassé nos espérances. Entendez, sire, ce touchant concert de louanges et de bénédictions. Parmi tant de voix qui célèbrent à l’envi les miracles de votre règne, daignez, sire, écouter favorablement celle des Protestants français que vous avez rendus à la vie, à la patrie, à la liberté, au bonheur… Ils vous chérissent comme un père118. »
77Le dernier des fils de Paul Rabaut, Pierre-Antoine Rabaut (1746-1808), dit Rabaut-Dupuis ou encore Rabaut le Jeune, exprime parfaitement cette reconnaissance protestante, alors qu’il est président de la clôture de la session extraordinaire de l’an X : « Il était digne de celui qui a donné la paix au monde, de donner la paix à l’Eglise, de faire cesser les divisions qui la déshonoraient, de ramener le peuple français aux principes de la morale chrétienne… » Il rappelle alors la mémoire de son frère ainé, Rabaut Saint-Étienne, guillotiné le 5 décembre 1793 : « Un baume salutaire vient d’être versé sur des plaies encore saignantes, et les principes triomphent. Généreux martyrs de la liberté, que ton ombre pieuse soit consolée ! » L’histoire familiale croise l’histoire nationale : « Les principes que, le premier, tu proclamas à la tribune nationale, ont germé dans une terre féconde, quoique éprouvée par le feu de la persécution119. » Il reprend alors une phrase du discours prononcé par son frère, le 23 août 1789 : « Ce n’est plus la tolérance qu’on accorde aux protestants, c’est la liberté, c’est l’égalité120. » De fait, explique-t-il « presque tous [les protestants] ou par principe, ou par reconnaissance, ont embrassé avec ardeur la cause de la Révolution. Aujourd’hui que la loi organise tous les cultes d’une manière parallèle, ils seront les plus fermes appuis d’un gouvernement protecteur121 ».
78Ainsi, peut également s’expliquer la position des pasteurs qui, en chaire, ont été prompts à louer les différents régimes politiques. Ce qui pouvait sembler un girouettisme d’opportunité, de carrière ou d’absence d’idéologie semble être plus spécifiquement un girouettisme de vertu, c’est-à-dire une adhésion au régime qui semble respecter une ligne de conduite vertueuse, celle fondée par la morale chrétienne, celle valorisant des principes d’égalité, de liberté ou de fraternité. Ce qui explique également les mots louangeurs à l’égard des monarques du xixe siècle, particulièrement de Louis-Philippe et de la Charte constitutionnelle, ce qui éclaire l’élan avec lequel l’homme d’ordre que représente le pasteur Charles-Athanase Coquerel loue également les révolutions, celle de 1789 et de 1848, affirmant qu’elles sont « formidables », et ajoutant « je ne sais où se trouve dans ce qui est terrestre une puissance aussi irrésistible que la leur122 ».
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79Les fondements de la parole de chaire protestante sur la chose publique, s’ils sont rappelés avec constance par les orateurs, ne doivent cependant pas rester simples paroles car, comme le rappelle un sermon anonyme de 1770, « est ce assés que d’assister à un Sermon, à un Catechisme, sans reflechir sur ce que l’on a entendu, sans s’appliquer à en profiter, à le mettre en pratique123 ? ». La réponse est rhétoriquement contenue dans la question : il demeure essentiel de les mettre en pratique, pour les fidèles mais aussi pour les pasteurs.
Notes de bas de page
1 C. Dardier, La Vie des étudiants au Désert, op. cit., p. 109. Une photo de cette bible est présente dans J. Barral, Du « Désert » au « Réveil ». Simon Lombard, pasteur du Désert (1739-1818), op. cit., p. 67.
2 « Nourrissez-vous de la Bible, vivez dans la Bible, unissez-vous à elle ; qu’elle abonde dans votre mémoire et dans votre cœur », A. Vinet, Homilétique, op. cit., p. 506.
3 P. Devèze, Discours pour la fête de l’anniversaire du Couronnement de Sa Majesté Impériale et Royale, sur la goire des armées Françaises et sur l’étendue du devoir imposé à chaque citoyen, de consacrer sa vie à son Prince et à sa Patrie, Nimes, Texier, p. iv.
4 Ibid., p. 2.
5 A. Vinet, Théorie de la prédication, op. cit., p. 102.
6 E. Genre, « L’homilétique de Vinet, une relecture critique », op. cit., p. 140.
7 B. S. Frossard, Sermons de M. Hugh Blair, op. cit., p. 21.
8 Comme Paul Rabaut dans Son sermon sur le couronnement de Louis xvi : « « L’Ecriture nous dit que Dieu fait régner les Rois (Prov. VIII, 15), qu’il les ôte ou les établit à son gré (Dan. II, 21). Dans le chapitre xiii de l’Epître de St Paul aux Romains, en motivant la soumission que nous devons aux Puissances Supérieures, cet Apôtre rappelle qu’elles ont été établies de Dieu, en sorte que celui qui s’oppose aux Puissances, s’oppose à un ordre que Dieu a établi. Il appuye même cette soumission sur les avantages civiles que la Législation nous procure, lorsqu’il nous dit, que le Prince ne porte pas l’épée sans cause, & que les Rois nous assûrent une vie paisible & honnête (I. Tim. II, 2) : à quoi il ajoûte qu’il faut nécessairement être soumis au Prince, non seulement par un motif de crainte, mais encore par un motif de conscience, ce qui renferme les deux fondements de l’Autorité civile », f° 17.
9 C.-F. Baër, Sermon prononcé dans la chapelle royale de l’ambassade de Suède à Paris pour la naissance de monseigneur le Dauphin, op. cit., f° 21.
10 P. de Joux, Sermon pour le service extraordinaire de prières et de supplications célébré à l’ouverture de la campagne actuelle, op. cit., p. 18.
11 P. Bourrit, Discours prononcé dans l’Eglise réformée de Lyon, le 24 thermidor an 12, op. cit., p. 9-11. Voir L. Brottier, « L’image d’Antioche dans les homélies Sur les statues de Jean Chrysostome », Revue des Études Grecques (106), 1993, p. 619-635.
12 « S’il [Dieu] permet que les bons, les fidèles chrétiens, du onzième, du douzième et quinzième siècle, connus, les uns sous le nom de Viclefcites, les autres pus le nom de Vaudois, les autres sous le nom d’Hussites, fussent persécutés à toute outrance, ce fut afin que dans leurs souffrances, ils rendissent témoignage à la vérité que tant d’autres méconnaissaient », Rabaut-Pomier, Discours à propos…, p. 597.
13 J. Dugas, Discours sur les sentiments qui doivent animer un bon français, op. cit., p. 6.
14 Rabaut Saint-Étienne, Sermon sur l’accord de la religion et des loix, op. cit., f° 27, voir texte intégral dans C. Borello, Du Désert au Royaume, op. cit., p. 313.
15 Ibid.
16 Pour son discours sur le couronnement de Louis XVI, son père Paul Rabaut revient sur les premières mesures prises par le roi pour montrer sa sagesse et le bonheur à vivre sous son règne : « Vous offrirai-je les premiers droits que lui donne son avènement au Trône, cédés à ses sujets ; le choix éclairé de ses Ministres ; la Magistrature rendue à ses premières fonctions ; les vertus domestiques dont il donne l’exemple ; la libre circulation des grains assurée ; les corvées abolies ; les encouragemens donnés à l’industrie ; les dédomagemens accordés aux Agriculteurs ; & tous ces projets utiles que sa prudence, la première vertu des Rois, laisse mûrir en secret, & qui doivent faire le bonheur de la Nation ? Il n’est aucun des bienfaits de notre bon Roi qui ne soit présent à votre mémoire, & l’on ne peut louer dignement tout ce qu’il a fait de grand & d’utile. Ses actions parleront mieux que mes discours, elles serviront d’ornement à elles-mêmes », P. Rabaut, Discours prononcé au Désert à l’occasion du couronnement de Louis xvi, op. cit., f° 14.
17 En 1776, un autre sermon anonyme montre les bienfaits déjà apportés par Louis XVI, en évoquant « l’édit de la Muette de 1774 » comme un « acte de beneficence », en expliquant que le roi « répand l’allégresse dans tout le royaume, en rétablissant des Magistrats que la disgrâce même n’avoit pu corrompre ». Le pasteur fait également référence au cas de la Gascogne « une de ses provinces affligée d’une mortalité funeste qui enleve au pénible Cultivateur son pain & ses espérances. Le jeune Prince ne se borne pas à mettre des barrières à la contagion ; il répand ses libéralités sur ceux qui en avoient déjà éprouvé les ravages ». Il rappelle également les « ordonnances de Milice & des Régimens provinciaux », les « édits & ordonnances concernant les grains » et la création des « ateliers publics, érigés en Maison de force », Anonyme, Le sujet soumis. Discours moraux prononcés à l’occasion de l’avènement de Louis xvi au Trône, op. cit., f° 51-52.
18 Anonyme, Le sujet soumis. Discours moraux prononcés à l’occasion de l’avènement de Louis xvi au Trône, op. cit., p. 49.
19 J.-F. Armand, Sermon sur la providence, prononcé après le chant du « Te Deum », dans la chapelle de LL HH PP à Paris, à l’occasion de la naissance de monseigneur le Dauphin, f° 23-24.
20 Rabaut-Pomier, Discours prononcé à l’occasion de la paix entre la France et l’Angleterre, op. cit., p. 19.
21 « La place de Louis xvi était déjà marquée dans le ciel, près de Charles Ier. Ici, mon cœur se refuse à retracer ce spectacle d’horreurs et d’indignités, dont ses persécuteurs voulurent l’abreuver et avilir sa personne sacrée dans ses derniers momens », F. Cheyssière, Discours funèbre prononcé dans le temple des protestans de Bordeaux, le 21 janvier 1815, jour anniversaire de la mort de Louis xvi, Bordeaux, J. Pinard, p. 8-9.
22 Pierre de Joux évoque par exemple les « révoltans tableaux qui tourmentèrent [le pays] pendant plus de dix années », P. de Joux, Discours de bénédiction, de reconnaissance et d’actions de grâces pour l’anniversaire de la naissance de l’empereur Napoléon-le-Grand, Nantes, Busseuil, p. 6.
23 « Le Dieu de l’Univers fut blasphémé, ses temples avilis, ses autels brisés et ses ministres immolés sous le glaive de l’irreligion triomphante », J. Olivier-Desmont, Lettre pastorale et consistoriale aux fidèles de l’église de Nismes, op. cit., f° 5.
24 Ibid., f° 6.
25 É.-S. Combet, Sermon sur la révolution de Juillet, Alais, J. Martin, 1842, f° 4.
26 Rabaut-Pomier, Discours prononcé à l’occasion de la paix entre la France et l’Angleterre, op. cit., p. 12.
27 J. Olivier-Desmont, Discours prononcé à l’occasion de l’Edit du roi en faveur des protestants, op. cit., p. 22.
28 Paul Rabaut fait ici référence à la révocation de l’édit de Nantes, en 1685.
29 P. Rabaut, Sermon sur Es 22,12-14, « Et le Seigneur l’Eternel des armées vous a apellés ce jour là aux pleurs, au deuil, à vous arracher les cheveux & à ceindre le sac… », BPF Ms 716/3-17, f° 12-13.
30 « Ici je vois des troupes de fugitifs qui ne trouvant aucun repos dans leur patrie vont chercher des asiles dans les climats étrangers, là je vois d’autres réduits à se cacher dans les antres et les cavernes de la terre, & qui trouvent plus de compassion chez les bêtes féroces que chez les hommes. Ici, je vois des maris qu’on sépare de leurs femmes, des femmes qu’on éloigne de leurs maris ; là, des enfants qu’on arrache d’entre les bras de ceux qui leur ont donné le jour, pour leur faire sucer le venin de l’erreur & de l’idolâtrie. N’avons-nous vu ces objets qu’en éloignement mes chers frères ? Hélas, nous les avons encore devant nos yeux ! […] Tant de nos frères et de nos sœurs qui gémissent les uns sous la pesanteur d’une rame, les autres dans l’obscurité d’une prison. Nos Pasteurs poursuivis et mis à mort, nos assemblées religieuses proscrites, la table du Seigneur renversée, nos vierges enfermées dans des couvents, la famine que le Seigneur a envoyée sur le pays, non la famine du pain, ni la soif de l’eau mais la famine d’ouïr les paroles de l’Eternel », P. Rabaut, Sermon sur la priere de Daniel Dn 9,1-19, prêché le 7 mars 1755, BPF, Ms 716/3-28 f° 6-7.
31 P. Rabaut, Sermon sur Rm 8,17 « Et si nous sommes enfans, nous sommes aussi heritiers, heritiers dis je de Dieu, & coheritiers de J. C. pourvû que nous souffrions avec lui afin d’etre glorifiés avec lui », BPF Ms 716/2-19.
32 A. Court, Sermon dans lequel on fait voir la nécessité de l’Exercice public de la Religion. Sur ces paroles de l’Apôtre Saint Paul aux Hébreux. Chap. X. Verset 35. Ne quittons point nos mutuelles assemblées, comme quelques uns ont de coutume, prononcé par Antoine Court au désert, Imprimé, Chez D. L. 1718, f° 34-35. Pièce aimablement communiquée par Hubert Bost que je remercie vivement. Il est à noter que l’histoire des juifs persécutés sert également de référence dans nombre de paroles protestantes du temps. P. Cabanel, Juifs et protestants en France, les affinités électives, xvie-xxie siècle, Paris, Fayard, 2004 ; M. Yardeni, Huguenots et juifs, Paris, Champion, 2008.
33 P. Stehelin, Sermon prononcé dans l’Eglise Française de Saint Gall (16 juillet 1786), Éditeur Saint Gal, s. n., 1786.
34 Anonyme, Discours sur l’Edit de bienfaisance, à l’usage des protestants de la campagne, sur Ps LXVI, 8, p. 7.
35 G. D. F. Boissard, Sermon prononcé dans le temple des chrétiens de la confession d’Augsbourg à Paris, à l’occasion de la onzième fête anniversaire de son inauguration, op. cit.
36 Ibid., p. 8.
37 D. Fischer, Jean Calvin historien de l’Église. Source et aspect de la pensée historique du Réformateur, thèse de doctorat de l’université de Strasbourg ; idem, « L’élément historique dans la prédication de Calvin. Un aspect original de l’homilétique du Réformateur », Revue d’histoire et de philosophie religieuses (64), 1984/4, p. 365-386.
38 B. Plongeron., « Cyrus ou les lectures d’une figure biblique », op. cit., p. 35.
39 P. de Joux, Troisième discours sur la guerre considérée sous des rapports de légitimité et relativement aux triomphes récens de la grande armée, surtout à l’éclatante victoire de la Moskwa. Prononcé le 11 octobre 1812, d’après l’invitation du gouvernement, dans l’église réformée consistoriale de Nantes, et suivi d’un hymne religieux sur la délivrance de la Pologne, Nantes, impr. de Brun, 1812.
40 P. de Joux, La Providence et Napoléon, op. cit.
41 P. de Joux, Discours sur la guerre considérée dans ses rapports généraux avec la civilisation et dans les relations qui existent entre la France et l’Espagne, prononcé après le chant du « Te Deum » ordonné par S. M. I. et R. pour les victoires remportées par ses troupes en Espagne, ainsi que leur entrée dans la ville de Madrid, Nantes, impr. de Brun fils, 1809.
42 P. de Joux, Second discours sur la guerre, ou « Te Deum » d’Enzersdorf et de Wagram, prononcé le 30 de juillet, dans le temple de l’Église réformée consistoriale de Nantes, Nantes, impr. de Brun, 1809 ; Troisième discours sur la guerre considérée sous des rapports de légitimité et relativement aux triomphes récens de la grande armée, surtout à l’éclatante victoire de la Moskwa ; prononcé le 11 octobre 1812, d’après l’invitation du gouvernement, dans l’église réformée consistoriale de Nantes, et suivi d’un hymne religieux sur la délivrance de la Pologne, Nantes, impr. de Brun, 1812.
43 P. de Joux, Le triomphe de l’homme nécessaire, ou L’intervention de la Providence montrée à découvert : discours prononcé le 23 de mai, après le chant du « Te Deum » ordonné par S. M. l’Impératrice-reine et régente en actions de grâces pour la victoire éclatante de Lutzen, Nantes, impr. de Forest, 1813. Le faux titre porte : « Le Te Deum de Lutzen ».
44 J.-A. Rang, Discours et prières qui ont été prononcés dans le temple des protestans de La Rochelle, le 21 messidor an xi, op. cit., p. 19-20.
45 Rabaut-Pomier, Discours prononcé à l’occasion de la paix entre la France et l’Angleterre, op. cit., p. 5.
46 J. D. Woodbridge, L’influence des philosophes français sur les pasteurs réformés du Languedoc, op. cit.
47 J.-A. Blachon, Edit de novembre 1787, sur l’Etat civil des non-catholiques, op. cit., p. 14.
48 P. Mordant, Sermon à l’occasion de l’édit de Novembre, op. cit., f° 13.
49 « J’aime à en emprunter encore ces précieuse paroles : “C’est au grand intérêt de l’ordre que tient la stabilité de la constitution, la sûreté de l’empire, le retour de tous les genres de prospérité. Que la puissance publique se déploie sans obstacle ! que l’administration ne soit plus tourmentée par de vaines terreurs ! que les propriétés et la croyance de chacun soient également protégées, et il ne restera plus à personne de prétexte pour vivre éloigné d’un pays où les lois seront en vigueur, et où l’on respectera tous les droits !” », P.-H. Marron, Discours prononcé au service extraordinaire, célébré par les Protestans de Paris à l’occasion de l’achèvement de la Constitution, op. cit., p. 18.
50 J. A. Blachon, Discours au sujet du Sénatus-Consulte organique, du 28 floréal an 12, op. cit. p. 115. Un autre exemple se retrouve sous l’Empire avec Molines qui, à Orange, lors du sermon fait pour le sacre de Napoléon, inclut le sermon du sacre : J. Molines, Sermon prononcé à l’occasion du sacre & couronnement de SMI, op. cit., p. 20.
51 « Les circonstances ou nous nous trouvons sont les mêmes que celles où se trouvoit Daniel. L’état ou sont depuis longtemps nos Eglises n’est pas moins triste que celui ou se trouvoit alors l’Eglise judaïque », P. Rabaut, Sermon sur la priere de Daniel Dn 9,1-19, prêché le 7 mars 1755, BPF, Ms 716/3-28 f° 6.
52 Rabaut-Pomier, Discours à propos…, op. cit., p. 600.
53 Rappelant la nécessité d’être soumis aux puissances, le pasteur poursuit son texte : « Et à qui les auteurs de nos saints libres recommandaient-ils ces devoirs ? à des juifs courbés sous le sceptre de fer des Romains, qui devaient obéir, honorer et payer le tribut à un Prince résidant à plus de six cents lieues de leurs frontières, et encore à quel prince ? à un Tibère qui régnait sur eux en tyran, par la force et le droit de conquête », J.-A. Rang (attribué à), Exhortation pour la fête du vendredi 15 août, op. cit., p. 12.
54 F. Martin, Discours prononcé le 10 frimaire an xiv, op. cit., p. 28. Le pasteur Rang ajoute d’ailleurs, à la suite de son rappel de la soumission du peuple juif (voir note précédente) : « A plus forte raison devons nous remplir ces devoirs, nous soumis à des lois sages, à un Gouvernement paternel, éclairé, dont la force est tempérée par la bonté, dirigée par le génie, protégée si visiblement par la Providence », J.-A. Rang (attribué à), Exhortation pour la fête du vendredi 15 août, op. cit., p. 12.
55 P. Rabaut, Discours prononcé au désert, dans le Bas-Languedoc, Le 23 juillet 1775, à l’occasion du couronnement du Louis xvi. Roi de France et de Navarre, f° 5.
56 Anonyme, Le Sacre de Joas, op. cit., f° 8.
57 Ibid., f° 8.
58 « Ah ! désormais, nous devancerons la voix des générations future, et nous préviendrons le suffrage de la Postérité ! Désormais, en jouissant des heureuses prérogatives de l’Edit de Nantes que fit révoquer au détriment des Français, une politique injuste, pernicieuse, exécrable, – nous gérions le Prince libéral qui nous a rendu ce droit sacré, ce gage certain des prospérités nationales ; – et nous ajouterons au nom illustre de Napoléon le surnom de Grand, dont l’histoire accompagne encore celui d’Henri IV, immortel auteur de ce bienfaisant Edit ! », P. de Joux, Sermon pour le service extraordinaire de prières et de supplications célébré à l’ouverture de la campagne actuelle, op. cit., p. 25-26.
59 M.-A. Castelviel, Discours prononcé le 15 aout 1806, op. cit., p. 6.
60 « Ce bienfait si précieux à tous les chrétiens combien ne doit-il pas l’être plus particulièrement à nous qui n’en avons jamais eu la plénitude & qui si souvent avons été persécutés pour avoir rendu à l’Etre suprême le culte que nos consciences nous prescrivaient : oui, mf, c’est à nous qui avons été éprouvés par de longues & violentes persécutions à sentir le prix de cette liberté promise par l’Ecriture, conquise par le sang des martirs & par la persévérante fidélité des Pasteurs & des fidèles, qui en célébrant au milieu des déserts & au péril de leur vie le culte qui leur est prescrit par l’Evangile, ont conservé au milieu de nous le précieux dépôt de la foi », Rabaut-Pomier, Sermon à Saint Marie le 15 aoust 1806, op. cit., f° 19.
61 G. D. F. Boissard, Sermon prononcé dans le temple des chrétiens de la confession d’Augsbourg à Paris, op. cit., p. 9.
62 Voir sur la question de la mémoire protestante l’ouvrage de P. Benedict, H. Daussy, P.-O. Léchot (dir.), L’Identité huguenote. Faire mémoire et écrire l’histoire (xvie-xxie siècle), Genève, Droz, 2014.
63 Anonyme, Discours sur l’Edit de bienfaisance, à l’usage des Protestants de la Campagne, op. cit., p. 11.
64 A. Vincent, Discours patriotique et chrétien, op. cit., p. 4.
65 Ibid., p. 6-7.
66 Rabaut-Pomier, Napoléon Libérateur. Discours religieux prononcé dans le temple de Saint-Louis, rue saint Thomas du Louvre, le 15 août 1810, jour de l’anniversaire de la Naissance de Sa Majesté l’Empereur et Roi, Paris, Bretin, 1810, p. 19-22.
67 Ibid., p. 10-11.
68 A. Picheral-Dardier, C. Dardier, Paul Rabaut, ses lettres à Antoine Court (1739-1755), op. cit., t. 1, p. l. Sur le prophétisme la bibliographie est abondante et il est possible de renvoyer à Misson M., Le Théâtre sacré des Cévennes ou Récits des diverses merveilles nouvellement opérées dans cette partie de la province du Languedoc, Londres, R. Roger, 1707 ; P. Joutard (éd.), Journaux Camisards (1700-1715), Paris, Union générale d’éditions, 1965 ; du même auteur : Mémoires sur la guerre des Camisards, Abraham Mazel, Élie Marion, Jacques Bonbonnoux, Montpellier, Presses du Languedoc, 1983 ; D. Vidal, Le malheur et son prophète. Inspirés et sectaires en Languedoc calviniste, 1685-1725, Paris, Payot, 1983 ; H. Bosc, La Guerre des Cévennes, 1702-1710, t. 1, Montpellier, Presses du Languedoc, 1985.
69 Lettre à A. Court du 10 février 1741, ibid., p. 31.
70 Sur T. de Bionnens voir H. Vuilleumier, « Théodore Crinsoz de Bionnens et son interprétation prophétique de l’écriture : contribution à l’histoire du protestantisme français au xviiie siècle. À propos des lettres de Paul Rabaut », Revue de théologie et de philosophie et compte rendu des principales publications scientifiques, t. 20, 1887, p. 113-135. L’auteur qualifie de « regrettable aberration » cette œuvre (p. 129).
71 P. Jurieu, L’accomplissement des prophéties ou la délivrance prochaine de l’Eglise, Rotterdam, A. Acher, 1686.
72 A. Picheral-Dardier, C. Dardier, Paul Rabaut, ses lettres à Antoine Court, op. cit., t. 1, p. l. Charles Dardier affirme : « Presque tous les pasteurs du Désert se laissaient aller à ces candides illusions », t. 2, p. 31.
73 Les frères Bionnens et Cottens avaient publié anonymement, en 1746, Pensées libres sur les Prophéties de l’Ecriture Sainte. On y a ajouté la Révélation du prophète Habacuc, nouvellement traduite sur l’original hébreu sans points, avec quelques remarques.
74 A. Picheral-Dardier, C. Dardier, Paul Rabaut, ses lettres à Antoine Court, op. cit., t. 2, p. 10.
75 Ibid., p. 11.
76 Lettre de P. Rabaut à A. Court du 10 janvier 1753, ibid., t. 2, p. 242.
77 Charles-Louis continua de publier sur les prophéties et, en 1774, est paru à Lausanne l’ouvrage intitulé Harmonie des prophéties avec quelques événements du temps passé, qui nous découvrent ceux qui ne sont pas loin d’arriver.
78 A. Coquerel, Histoire des Eglises du Désert, vol. 2, p. 495.
79 Sur ce moment de 1787 voir notamment A. Encrevé, C. Lauriol (dir.), Actes des journées d’Etudes sur l’Edit de 1787, BSHPF, t. 134, 1988.
80 Mémoire sur la meilleure manière d’entendre et d’exécuter l’Edit de 1787 cité par L. Mazoyer, « L’application de l’édit de 1787 dans le midi de la France », BSHPF, t. 74, 1925, p. 151.
81 Sept textes sont exclusivement destinés à ce moment.
82 Rabaut-Pomier, Discours fait à l’occasion de l’édit du roi qui regarde les protestants, op. cit., p. 596.
83 Pierre Mordant est également très pédagogue pour expliquer ce qu’apporte l’édit : P. Mordant, Sermon à l’occasion de l’édit de Novembre, op. cit., f° 14 et suivants.
84 « Il est vrai, depuis quelque temps nous jouissions sans trouble des facultés naturelles. La sage jurisprudence, adoptée dans le Royaume, mettoit un frain à l’avidité des collatéraux ; ils n’osoient presque plus porter leurs réclamations scandaleuses dans le sanctuaire de la justice : mais notre état étoit précaire, incertain ; à présent il est fondé sur un Edit. Comme une belle aurore présage un jour serein, ainsi cette tranquillité dont nous avions déjà joui sous un gouvernement doux, étoit l’augure d’une liberté qui a une base solide », Anomyme, Discours sur l’Edit de bienfaisance, op. cit., p. 6.
85 Rabaut-Pomier, Discours fait à l’occasion de l’édit du roi qui regarde les protestants, op. cit., p. 599. Plus loin il cite le psaume 102 qui renvoie justement au changement de la « plainte » en « chant de triomphe ».
86 « Nos ancêtres célébrèrent, avec des transports de dévouement, Henri IV qui leur accorda de si beaux privilèges dont nous n’avons pas joui. Il étoit réservé à Louis XVI de faire revivre l’esprit d’un de ses prédécesseurs, si cher à la nation ; de calmer les inquiétudes d’une nombreuse portion de ses sujets. Qu’il mérite d’être aimé, lui qui, sensible à nos misères, nous a mis sous la protection des lois ! », Anomyme, Discours sur l’Edit de bienfaisance, op. cit., p. 15.
87 Anonyme, Sermon d’actions de grâce pour l’édit concernant ceux qui ne professent pas la religion catholique, op. cit., f° 5.
88 P. Mordant, Sermon à l’occasion de l’édit de Novembre, op. cit., f° 2-3 pour la mise en place de l’analogie et toute la première partie du discours renvoie à la captivité des juifs à Babylone (p. 4-13). De manière plus rapide, Olivier-Desmont, donne à Louis XVI l’image de Cyrus comme nous l’avons vu.
89 Ces mots sont présents dans le sermon d’Olivier-Desmont qui renvoie ici sans doute à toute la littérature de la défense réformée qui se multiplie à partir de la seconde moitié du siècle. Voir à ce sujet J. Poujol, « Aux sources de l’Edit de 1787 : une étude bibliographique », op. cit.
90 Anomyme, Sermon d’actions de grâce pour l’édit concernant ceux qui ne professent pas la religion catholique, op. cit., p. 1.
91 « Pleins de confiance en la bonté paternelle de notre Monarque, & rassurés par sa parole royale, nous devons attendre avec soumission l’abrogation de ces Lois rigoureuses qui nous menacent encore », J. Olivier-Desmont, Discours prononcé à l’occasion de l’Edit du roi, op. cit., p. 18.
92 Anomyme, Discours sur l’Edit de bienfaisance, op. cit., p. 18.
93 J. Olivier-Desmont, Discours prononcé à l’occasion de l’Edit du roi, op. cit., p. 13.
94 Ibid., p. 19.
95 J. Olivier-Desmont, Discours prononcé à l’occasion de l’Edit du roi, op. cit., p. 14-15. Il revient encore plus tard dans son sermon sur la paix retrouvée (p. 22-23) montrant bien ici la place que celle-ci occupe dans les bienfaits de la loi.
96 « Quant au passé, oublions, oublions, s’il le peut, l’oppression sous laquelle nous avons gémi : du moins ne nous en souvenons pas pour nous élever par orgueil au-dessus de ceux qui ont le malheur de se considérer aujourd’hui comme vaincus », J.-A. Blachon, Edit de novembre 1787, op. cit., p. 17.
97 À cet égard le discours anonyme, Sermon d’actions de grâce pour l’édit concernant ceux qui ne professent pas la religion catholique, est le plus chargé de pathos en multipliant les larmes, les sangs versés, la tristesse là où d’autres se contentent plus volontiers d’exposer purement les entraves de la vie protestante après la révocation de l’édit de Nantes.
98 « Ainsi il résultera de la loi dont je parle, un avantage pour le Royaume : la population y gagnera ; la France ne verra plus ses habitans s’expatrier ; des étrangers viendront de toutes parts porter dans son sein leur industrie & leur fortune ; cette loi sage réparera bientôt les pertes qu’occasionnèrent les émigrations lors de la révocation de l’Edit de Nantes », Anomyme, Discours sur l’Edit de bienfaisance, op. cit., p. 10.
99 Il mêle les chapitres 45 (v. 20) et 49 (v. 12) : « Assemblez-vous & venez, approchez-vous tous ensemble, vous, les rechappés d’entre les nations ; car ceux-ci viendront de loin, & ceux-là viendront de l’Aquilon & de la mer, & les autres du pays des Siniens », J. Olivier-Desmont, Discours prononcé à l’occasion de l’Edit du roi, op. cit., p. 17.
100 « Venez donc, malheureux exilés, venez dans votre patrie, amenez avec vous ces étrangers bienfaisans qui ont accueilli si généreusement vos pères infortunés, lorsque forcés de fuir le doux climat qui les avait vu naître, ils trouvèrent chez eux des consolateurs & des secours. […] Nous aurons le double avantage de recouvrer nos frères, & d’en acquérir de nouveaux », J. Olivier-Desmont, Discours prononcé à l’occasion de l’Edit du roi, op. cit., p. 17-18.
101 J.-A. Blachon, Edit de novembre 1787, op. cit., p. 18.
102 Ibid., p. 20.
103 Ibid., p. 21.
104 A. Vincent, Discours patriotique et chrétien, op. cit., p. 21.
105 A. Dugas, Discours sur les sentimens qui doivent animer un bon françois, op. cit., p. 11-13.
106 « Ce qui caractérise la révolution française, ce qui la distingue de presque toutes celles qui l’ont précédée, (et je ne suis pas le premier à l’observer) c’est qu’elle est toute entière l’ouvrage de la raison. Ce n’est pas l’intérêt individuel qui l’a provoquée, soutenue, conduite à sa fin ; c’est l’intérêt national ; la révolution ne nous a point fait changer de maître, elle nous a rendus libres », P.-H. Marron, Discours prononcé au service extraordinaire célébré par les protestants de Paris à l’occasion de l’achèvement de la constitution et de son acceptation par le Roi, op. cit., p. 12.
107 F. Rouvière, « Quatre lettres inédites de Rabaut Saint-Étienne », BSHPF, t. 34, 1885, p. 224.
108 Jeanbon Saint-André, Sermon sur la vocation à la Liberté et sur les obligations qu’elle impose sur Gal v, 13, op. cit. et P.-H. Marron, Discours prononcé au service extraordinaire célébré par les protestants de Paris à l’occasion de l’achèvement de la constitution et de son acceptation par le Roi, op. cit.
109 Anonyme, Discours prononcé le premier de l’an 1791, op. cit., 1791, p. 7.
110 J. Jay, Sermon prononcé à l’occasion des préliminaires de la paix dans l’église réformée de Moncaret (près Castillon), s. l. n. d., p. 11.
111 « Alors paroît cette époque de sinistre mémoire, époque de terreur et d’abomination, époque que nous voudrions pouvoir effacer de nos annales et qui sera un moment éternel élevé à la honte de l’humanité », G. Pâche, Discours sur la mort de SM Louis xviii, op. cit., p. 16.
112 « Désormais, l’enthousiasme devient notoirement critique pour tâcher de sanctifier la guerre », B. Plongeron, « Cyrus ou les lectures d’une figure biblique », p. 55 ; « Jusqu’en 1809, c’est-à-dire jusqu’à la crise entre l’empereur et le pape, l’Église catholique apporte son concours plein et entier à la glorification du souverain et se transforme en principal propagateur du culte impérial », J.-O. Boudon, Napoléon et les cultes, op. cit., p. 136.
113 J.-A. Blachon, Discours au sujet du Senatus-Consulte organique, Recueil de Discours ou fragments de Discours, op. cit., p. 112.
114 Ibid., p. 113.
115 P.-L. Armand-Delille, Discours sur le rétablissement de la religion prononcé le 15 août 1806, op. cit., p. 12.
116 Cité par P. Birnbaum, L’Aigle et la Synagogue, op. cit., p. 201.
117 F. Kuhn, « L’accueil fait à la loi de Germinal », op. cit., p. 325.
118 Idem, p. 325. Il donne également les exemples d’une adresse à Napoléon de P. de Joux (p. 375-376), du président du consistoire d’Oppenheim (p. 376). Il évoque alors cette « fastidieuse littérature » en lui adjoignant les sermons.
119 Plus loin il ajoute : « Législateurs, vous excuserez ma prolixité sur cette matière, en faveur de celui qui, plus qu’aucun autre, doit sentir le prix de cette loi bienfaisante, et qui, par l’honneur que vous lui avez fait de vous présider est une preuve vivante des principes libéraux que vous professez. »
120 F. Kuhn, « L’accueil fait à la loi de Germinal », op. cit., p. 321.
121 Ibid., p. 321.
122 C.-A. Coquerel, Liberté, égalité, fraternité, op. cit., p. 18.
123 Anonyme, Sermon sur Job 12,38 « Qui a cru à notre parole » : sur les effets de la prédication, BPF Ms 783/E-1, f° 3.
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