Introduction générale
p. 17-34
Texte intégral
1Dans leur conquête des Indes, Castillans et Portugais s’entourèrent systématiquement de Noirs et de mulâtres armés, libres ou esclaves. Parmi les nombreux Noirs et mulâtres qui participèrent à la conquête, ceux qui furent récompensés par un affranchissement, l’exemption du tribut, l’octroi de terres ou d’encomiendas, sont bien connus des historiens1.
2Une fois la conquête « achevée », les monarchies espagnoles et portugaises semblèrent pourtant réticentes à armer les plèbes dans des villes dont les élites étaient conscientes de leur faiblesse démographique et de la précarité de leur domination. La Couronne espagnole interdit dès 1551 le port des armes pour les gens de couleur, tant libres qu’esclaves, et ce modèle fut progressivement étendu à toutes les colonies européennes des Amériques2. Malgré cet arsenal législatif, un Noir libre de Veracruz racontait au milieu du xviie siècle qu’il était d’usage dans les villes de l’Amérique espagnole de tolérer le port d’armes des gens de couleur3. En effet, les Empires américains permirent très tôt et parfois favorisèrent le recours militaire aux gens de couleur, y compris aux esclaves, souvent issus de sociétés guerrières et exercés aux arts du combat. Il faut comprendre que dans ces mondes coloniaux américains, tous les hommes libres en âge de porter les armes étaient théoriquement réputés miliciens et donc mobilisables en cas de danger. Même les communautés d’esclaves fugitifs (Marrons) pouvaient être mobilisées en échange de la reconnaissance d’une relative autonomie.
3Lorsqu’une menace était imminente, le gouverneur d’une province réunissait tous les hommes libres de plus de 14 ans sur la place d’armes pour les passer en revue et former des compagnies lorsqu’elles n’existaient pas. Après le sac de Campeche par des pirates anglais en 1663, le gouverneur du Yucatán fit ainsi publier le ban suivant dans la ville voisine de Mérida :
« J’ordonne à tous les habitants de cette ville, quelles que soient leur qualité et leur condition, qu’ils soient espagnols, métis, noirs ou mulâtres libres de 14 ans et plus sans aucune exception, qu’ils aient préparé pour le 9 septembre prochain leurs armes à feu, poudre, balles, corde et tout ce qui est nécessaire à leur obligation et qu’ils se présentent avec elles dans les galeries du palais pour les passer en revue à six heures du matin comme le veut la coutume4. »
4Avec la fondation des villes, les soldats devinrent des citadins et les milices succédèrent aux garnisons5. Réputés miliciens, Noirs et mulâtres libres servaient avec les Blancs en tant que citadins libres. En 1555, par exemple, deux cent vingt libres de couleur défendirent La Havane contre une attaque française6. Par conséquent, les compagnies de Noirs libres et de mulâtres – que nous appelons les compagnies de couleur – n’apparurent pas immédiatement, ni dans toutes les villes, et ce n’est qu’en 1582 que fut créée à La Havane la première compagnie américaine exclusivement composée de libres de couleur. Des compagnies de ce type se multiplièrent au xviie et au xviiie siècles, dans l’Empire espagnol d’abord, principalement le long du littoral pacifique et dans le bassin caraïbe, puis dans l’Empire portugais, en particulier au Pernambouc et à Bahia, et plus tard dans les Empires français, danois, hollandais et finalement britannique.
5Ce travail s’intéresse précisément à ces miliciens de couleur des villes caribéennes. Il se situe au cœur d’une histoire sociale et urbaine des empires modernes qui cherche à restituer les appartenances déployées par les individus. Il vise à définir leur espace des possibles, structurés par la position sociale qu’ils occupent dans la ville et l’empire, mais aussi par l’appropriation de représentations collectives construites in situ à partir de catégories pratiques qui circulaient par-delà les océans et les frontières impériales. Par conséquent, il s’agit de rendre compte des vécus individuels et collectifs en tant qu’expériences situées dans des territoires appartenant simultanément à trois sphères intégrées : l’espace urbain, l’espace de la souveraineté impériale et l’espace régional façonné par les circulations. Chacun de ces espaces correspond à un niveau d’analyse historique ; chacun de ces niveaux offre une lecture complémentaire de l’objet.
6Un tel exercice de décloisonnement et de décentrage, par un éclairage qui se veut à la fois local, impérial et transimpérial, a pour objectif une meilleure compréhension du monde social et de ses représentations, du lien entre contexte et pratiques sociales dans la fabrique du quotidien et du territoire, ainsi que des divers mécanismes de l’interaction et de la domination sociale. Il est particulièrement adapté à l’étude des expériences coloniales7.
Pour une histoire sociale des institutions urbaines coloniales
7En 2015, Maarten Prak déplorait le manque de travaux dédiés aux milices bourgeoises des villes européennes8. La milice a été éclipsée à partir des années 1970 par la diffusion des travaux sur la formation des États européens à l’époque moderne et la « révolution militaire », avec la constitution d’armées permanentes et d’institutions fiscales sophistiquées9. En parallèle, l’historiographie militaire a mis en avant le déclin progressif des milices bourgeoises à partir du xviie siècle10. La figure du citoyen-soldat aurait prospéré jusqu’aux guerres de religion, puis dépéri lentement avec quelques sursauts à l’occasion de révoltes urbaines, avant de renaître brutalement à partir des levées en masse de la Révolution française. Contre cette chronologie, Maarten Prak soutient que l’image et la pratique du citoyen-soldat sont restés, encore au xviiie siècle, un ingrédient essentiel des structures urbaines. La révolution fiscale-militaire n’a pas supprimé le rôle social et politique des milices mais elle transformé, selon des modalités et une chronologie propres à chaque milieu urbain. Le constat de M. Prak sur l’absence d’une histoire sociale des milices est observable pour les bibliographies en langues anglaise et espagnole11. Il se vérifie moins dans le cas des travaux publiés en français. Dès 1969, André Corvisier a montré que le déclin des milices au xviiie siècle a concerné surtout leur fonction militaire et dissimule d’importantes variations locales. La milice continuait d’assumer des fonctions sociopolitiques comme l’apparat dans les cérémonies publiques, la police des quartiers et la diffusion d’un patriotisme urbain12.
8L’étude sociale des milices urbaines a connu un nouvel essor en France dans les années 1980. La nouvelle histoire sociale, la microhistoire mais également l’histoire culturelle s’étaient alors emparées du tournant cognitif dans les sciences sociales et avaient investi à nouveaux frais l’histoire institutionnelle. En histoire moderne, cela s’est traduit par un regain d’intérêt pour l’étude des corps et des communautés d’Ancien Régime, en particulier dans les contextes urbains. Sceptiques vis-à-vis des données macros sur les institutions, mais refusant les théories de l’acteur rationnel, ces travaux se sont intéressés aux pratiques sociales des agents et à leur façon d’intérioriser les systèmes de classification, mais aussi à leur façon de jouer avec eux et de les aménager13.
9Un certain nombre de travaux issus de ce nouveau « courant » historiographique ont fait des milices un véritable objet de l’histoire sociale et de l’histoire urbaine. Les articles de Robert Descimon sur les milices de Paris aux xvie et xviie siècles et ceux de M. Prak sur les milices de Bois-le-Duc et d’Amsterdam constituent sans doute le fer de lance de cette nouvelle histoire sociale des milices urbaines14. En 1983, R. Descimon écrit que la milice prend vie « à travers la triple dialectique du quartier et du corps de métier, de la défense et de la police, du privilège et de la charge15 ». Ces dialectiques témoignent des directions prises par l’historiographie sur les milices à l’époque moderne et informent les quatre principaux axes de recherche que nous avons identifiés.
10La première thématique concerne le rôle des milices dans l’encadrement des populations urbaines par les autorités municipales et royales. Ces travaux ont souligné la transformation progressive des milices d’une fonction militaire à une fonction de police urbaine (maintien de l’ordre, rondes nocturnes, collecte d’impôts, recensements)16. Le renforcement des structures de police dans les villes européennes et américaines du xviiie siècle n’est en effet rendu possible que parce qu’elles viennent s’appuyer sur des structures miliciennes qui assument déjà depuis longtemps une fonction de « bon voisinage » et de résolution des conflits17. R. Descimon définit ainsi les milices urbaines du xvie siècle comme « l’institutionnalisation du contrôle social informel exercé par le groupe de voisins18 ».
11La deuxième thématique de recherche concerne cette dialectique « du privilège et de la charge ». Les milices sont tantôt présentées comme un espace de sociabilité et de solidarité, à la fois intégrateur et allocateur de prestige, tantôt comme une corvée qui pèse sur les épaules des couches populaires de la société. En 1979, Fernand Ouellet étudiait la fonction des officiers de milice dans la structure sociale du Québec français puis britannique. Il mettait ainsi l’accent sur les privilèges et le prestige que procuraient les milices. Trois ans plus tard, Yvon Desloges publiait un autre article sur Québec dans lequel il analysait les stratégies d’exemption du service personnel et insistait sur la « corvée militaire » que pouvait représenter la milice, perçue comme un « impôt-travail »19. R. Descimon observait le même processus à Paris au xviie siècle, où « l’assimilation de la milice à l’impôt était constante » et les exemptions fréquentes20. François-Joseph Ruggiu précise pourtant qu’il ne faut pas confondre ces exemptions avec un privilège. Il existe de multiples raisons d’accorder l’exemption et rares sont celles qui se fondent sur une inégalité juridique. Au contraire, l’auteur met en avant le lien entre la participation aux milices et les privilèges de la ville. La milice bourgeoise confère du prestige aux officiers, souvent des maîtres-artisans, et joue un rôle central dans la construction d’une identité bourgeoise21. Dès lors, l’évolution de l’équilibre entre la perception de la milice comme source de privilèges ou comme corvée relève de chaque contexte urbain.
12La troisième thématique concerne les liens entre la milice, le corporatisme urbain et par extension la citoyenneté. Sans remettre en cause la conflictualité urbaine, plusieurs travaux ont défini les milices comme un creuset social producteur de solidarité et de cohésion ; un espace politique qui génère du lien social entre différentes couches de la société urbaine, tant à l’échelle des quartiers qu’à l’échelle de la ville22. À travers les milices, tous participaient plus ou moins modestement aux privilèges de la ville. En ce sens, le recrutement des milices bourgeoises des villes européennes dépassait la stricte bourgeoisie23. La cohésion des compagnies reposait sur un équilibre fragile entre l’élection des chefs par leurs subalternes – témoignage de leur prestige et gage de leur légitimité – et l’intrusion des autorités municipales/royales dans leur nomination et la confirmation de leurs titres. Des travaux plus récents ont prolongé ces questionnements en interrogeant le rôle de la milice dans la définition et l’affirmation d’une identité urbaine. Bien que les milices ne défendent plus la ville au xviiie siècle, du moins du point de vue strictement militaire, elles continuent de lutter pour la défense de leurs privilèges, en lien avec la sensation d’une perte progressive de leur autonomie vis-à-vis du pouvoir royal, ou même vis-à-vis des corps de ville quand ils font l’objet d’une appropriation de la part d’élites déconnectées de la communauté locale. La milice devient alors un espace de contestation qui produit en retour de la cohésion urbaine24.
13Le dernier axe, plus récent, s’inscrit dans une histoire sociale des structures politiques d’Ancien Régime et concerne l’articulation des pouvoirs politiques au sein des milices. Selon J. J. Ruiz Ibáñez, l’étude des milices permet de « saisir la réalité globale de l’Ancien Régime à partir d’une perspective micro du social, du culturel et du politique25 ». En effet, le milicien est simultanément citadin et sujet, ce qui implique qu’il défend la ville pour défendre l’empire et qu’il défend l’empire pour défendre la ville26. Le privilège d’autodéfense des villes émane de l’autorité royale en même temps que les monarchies s’appuient sur les élites locales pour la défense des territoires27. La milice devient alors un laboratoire qui permet d’analyser finement et en situation les rapports de force sociopolitiques entre pouvoirs centraux et pouvoirs locaux, de souligner la violence des processus politiques et d’interroger le rôle des acteurs locaux dans la formation et la pérennité des constructions impériales28.
14Ces thématiques ont été peu abordées dans le cadre des milices américaines. Celles-ci ont d’ailleurs rarement fait l’objet d’une histoire sociale des institutions urbaines. Toutefois, les milices américaines – et en particulier les milices de couleur – sont régulièrement évoquées par les américanistes qui s’intéressent à la stratification des sociétés coloniales, aux mécanismes de la mobilité sociale et à l’intégration des libres de couleur.
15La question des libres de couleur est largement dominée, depuis le début du xxe siècle, par les travaux de milieux académiques étatsuniens. Comparatifs et hémisphériques, ces travaux s’inséraient dès le départ au sein d’un vaste débat pluridisciplinaire qui mobilisait démographes, historiens, anthropologues et sociologues. En pleine ségrégation aux États-Unis, l’objectif était de comprendre pourquoi la « question raciale » y avait été et continuait d’y être plus importante qu’ailleurs, alors que l’esclavage avait été omniprésent aux Amériques. La comparaison des « systèmes esclavagistes » s’imposait alors comme la meilleure méthode pour y parvenir. Dans un premier temps, les États-Unis furent comparés au Brésil, dont l’idéologie de convivialité raciale portée par Gilberto Freyre contrastait avec la ségrégation. Ces travaux soulignaient la moindre cruauté de l’esclavage brésilien29. En 1947, Frank Tannenbaum proposait d’étendre la comparaison à une échelle hémisphérique et opposait les systèmes esclavagistes des sociétés coloniales anglosaxonnes et ibéro-américaines. Les barrières raciales auraient été plus rigides dans les premières et les gens de couleur mieux intégrés dans les secondes30.
16Les années 1960 connurent une explosion d’études comparatives sur la stratification des sociétés coloniales américaines. Une série de travaux vinrent s’opposer à ceux qui tentaient de réactualiser la thèse de Tannenbaum à partir d’arguments culturalistes. Les spécialistes de l’esclavage au Brésil, à Cuba et à Porto Rico affirmaient ainsi que l’esclavage et les relations de couleur n’y avaient pas été moins violents31. Ceux des Antilles britanniques montraient des sociétés plus métissées que dans les colonies continentales et une meilleure intégration des gens de couleur32. Des historiens marxistes écrivaient enfin que les systèmes esclavagistes dépendent moins d’éléments culturels que des systèmes de production. Derrière le préjugé de couleur se cache une domination de classe, exprimée de façon plus violente dans les sociétés de plantations que dans les colonies de peuplement33. La thèse de Tannenbaum avait ainsi ouvert la voie à un débat « classe versus race » qui trouva un prolongement au tournant des années 1980 chez les spécialistes de la Nouvelle-Espagne34.
17Malgré cet intérêt croissant pour la stratification des sociétés coloniales et les questions liées à la couleur, très peu de travaux s’étaient intéressés spécifiquement aux libres de couleur. Seule l’histoire du droit s’était emparée de la question de la condition juridique des libres35. Les grandes monographies d’histoire démographique, économique ou sociale s’étaient focalisées sur l’esclavage36. Les libres étaient presque toujours évoqués en rapport à l’esclavage, à partir de l’étude des affranchissements37. Dans la plupart des cas, esclaves et libres de couleur étaient perçus comme des alliés objectifs, soudés par le même stigmate du « racisme ». Quelques paragraphes avaient pu mentionner çà et là le service militaire des libres de couleur, décrit tantôt comme un privilège et l’expression d’une relative intégration, tantôt comme une corvée et le signe d’une infériorité indélébile. Mais aucun historien ne s’était penché spécifiquement sur la participation des gens de couleur à la police des colonies et à la défense des empires.
18L’intérêt des américanistes pour les libres de couleur des sociétés coloniales modernes s’est considérablement développé à partir du tournant des années 1970, principalement autour des questions de mobilité sociale et de luttes politiques pour l’égalité juridique avec les Blancs. Ce nouvel intérêt fut particulièrement visible chez les spécialistes des Antilles françaises et britanniques38. Pour l’Empire espagnol, ces questions furent d’abord introduites par les disciples de l’historien Lyle McAlister à travers l’étude des milices disciplinées de la fin du xviiie siècle, avant d’être quelque peu oubliées39. Dans les années 1990, elles trouvèrent un terrain privilégié à Saint-Domingue, en Louisiane et en Floride, et depuis les années 2000, le concept d’agency a favorisé un regain d’intérêt pour l’action politique des libres de couleur40. La question des milices fut ainsi étudiée pour montrer le lien entre service militaire et affranchissement41.
19À partir des années 1990, l’étude des libres de couleur fut aussi un moyen de revisiter la question du métissage en évitant les écueils des travaux anciens sur les hiérarchies sociales. À terme, les débats sur la stratification des sociétés coloniales avaient mis en garde les historiens sur les limites de la méthode statistique, des modèles à une seule variable (classe ou race) et des catégories analytiques prédéfinies pour traduire les identités sociales. Par ailleurs, de nombreux sociologues préconisaient désormais l’analyse comparative des processus de formation des groupes sociaux42. Par conséquent, l’étude des libres de couleur s’est imposée comme un moyen privilégié de conjuguer, voire de dépasser ces deux visions de la classe et de la race, désormais jugées trop réductrices par nombre d’historiens des sociétés coloniales. Elle permet également de s’émanciper d’une analyse des sociétés coloniales en noir et blanc, déterminée par la « fiction légale de la goutte de sang » et exportée à l’international depuis les États-Unis43. L’étude des libres de couleur offre en effet la possibilité d’étudier le métissage et ses multiples catégories pratiques comme des processus complexes, labiles et situationnels. Des travaux préconisent de ne pas plaquer sur les sociétés coloniales les définitions contemporaines de la race et du racisme, et montrent que l’analyse des processus de catégorisation doivent prendre en considération les pratiques de classement des individus et mettre l’accent sur les expériences vécues44.
20Dans ce déferlement bibliographique sur les libres de couleur, les milices n’ont pas été totalement oubliées. Au cours des années 1970, Santiago-Gerardo Suárez a mené d’importantes recherches sur les milices coloniales et livré de nouvelles données sur les milices de couleur de l’Empire espagnol. Mais le principal apport sur les milices de couleur aux Amériques vient de l’ouvrage de Peter M. Voelz publié en 1993 sous le titre Slave and Soldier: the Military Impact of Blacks in the Colonial Americas. L’ouvrage constitue une impressionnante compilation de données bibliographiques. Il décrit toutes les formes de service militaire des gens de couleur, y compris leur rôle fondamental dans la police des esclaves et la lutte contre le marronage45.
21Dès lors, cette recherche souhaite conjuguer les questionnements d’une histoire sociale des institutions urbaines européennes avec les apports récents d’une histoire coloniale plus attentive aux pratiques de classement et aux mécanismes pluriels de socialisation des acteurs. L’étude des miliciens de couleur se révèle en effet un formidable point d’entrée pour articuler ensemble des historiographies sur les milices, les sociétés urbaines et les hiérarchies sociales.
Appartenances sociales et constructions impériales
22Dans un bel article sur les corps de métiers parisiens au xviiie siècle, Mathieu Marraud critiquait le corporatisme en tant que catégorie d’analyse systémique qui essentialiserait les sociétés d’Ancien Régime. En effet, les nombreux conflits observés au sein des corporations de métier traduisaient autant la « quête d’un ordre » qu’une incapacité à « dominer le foisonnement économique des villes46 ». Il en va de même pour les sociétés urbaines coloniales, à la différence qu’on y observe une « colorisation » plus ou moins partagée des manières de dire les hiérarchies sociales. Comme les corporations de métier, la milice constitue un reflet plus ou moins déformé des sociétés urbaines, de leurs rêves de hiérarchie et de leur relative fluidité.
23Le débat historiographique classe contre race illustre cette tension permanente entre des représentations collectives d’un ordre social idéalisé et le dynamisme (voire les recompositions) des structures urbaines – sociales, politiques, économiques et démographiques. Pendant que les analyses des discours institutionnels soulignaient l’ampleur du « régime des castes », celles des pratiques individuelles décrivaient des phénomènes de métissage, de mobilité socioéconomique et de « blanchiment ». Les unes et les autres plaquent sur les sociétés anciennes des catégories d’analyse contemporaines et rigides qui ne rendent pas compte de la spécificité des contextes locaux. Toutefois, un certain nombre d’historiens ont montré qu’une « autre histoire sociale » est possible, plus pragmatique, une histoire située des pratiques sociales qui n’ignore pas la socialisation des acteurs mais souligne leur aptitude à manipuler les normes, les images et les classifications sociales47.
24Le concept d’appartenance permet d’échapper aux représentations figées et réductrices des sociétés urbaines coloniales longtemps proposées par les études sur la stratification sociale. Il implique de représenter la ville à partir des positions dynamiques occupées par les individus, et que ces derniers appelaient la « qualité sociale ». Ces positions sont négociées au croisement de processus institutionnels de catégorisation et de pratiques individuelles de classement. Les uns et les autres s’influencent mutuellement au moyen d’une socialisation plurielle et d’intenses luttes pour imposer localement de nouvelles catégories ou pour en modifier les définitions. Le concept d’appartenance a d’abord été proposé pour l’étude des communautés rurales présentant des formes d’unanimisme et d’homogénéité culturelle, et une appartenance communautaire qui « neutralise les différences de classes48 ». Flexible, il permet en effet de décrire les processus de formation et de perpétuation des structures sociales, et les spécificités locales dans la manière de dire la différenciation, l’intégration, la domination ou l’exclusion sociale. Nous considérons qu’il est particulièrement adapté à l’étude des sociétés urbaines de l’époque moderne49.
25L’appartenance relève de la participation des individus à la chose collective (république) et témoigne de l’incorporation ou de l’appropriation des représentations collectives. Les acteurs se déplacent et agissent dans une pluralité de scènes d’appartenance sociale réunies en un même lieu : la ville, sa juridiction ou sa zone d’influence économique. Ces scènes sont encadrées par les autorités locales et par les dépositaires de l’autorité centrale. La milice est l’une de ces scènes en même temps qu’elle en recoupe et en institutionnalise d’autres. Les acteurs se voient reconnaître les « qualités » créditées aux scènes d’appartenance auxquelles ils adhèrent : une compagnie de milice, un corps de métier, une paroisse, un réseau de parentèle ou de clientèle, etc. Ces identités multiples de référence, ces registres d’appartenance, constituent autant de ressources tactiques ou de cartes dans la main des acteurs. Plus l’éclatement spatial de ces scènes d’appartenance est faible, plus il est possible pour les acteurs de réinvestir dans les autres scènes le capital social acquis dans l’une d’elle, mais plus le contrôle collectif est fort et les allégeances contradictoires sont nombreuses50. Territorialisé, le concept d’appartenance permet également de jouer sur les échelles : l’acteur pourra appartenir à un voisinage, une communauté urbaine, un empire, une religion ou des réseaux sociaux et économiques qui peuvent être spatialement éclatés, au-delà de la juridiction de la ville et même au-delà des frontières impériales51.
26Le premier objectif de ce travail est ainsi de rendre compte de l’enchevêtrement local des appartenances sociales. Nous partons du principe que la catégorie de « libres de couleur » ne doit pas être comprise comme une définition essentialiste qui ne tiendrait pas compte de la complexité et de la contextualité de ces mécanismes52. Les libres de couleur, loin de se référer à un groupe social homogène ou conscient, ne désigne pas tant les affranchis et leurs descendants (difficilement indentifiables dans la pratique) que l’ensemble des individus libres auxquels une communauté ou un individu reconnaît au moins un ancêtre esclave à un moment donné. Cette réputation est le résultat d’une négociation : elle est une construction sociale. Cette trace plus ou moins visible d’une souche africaine – décrite par une combinaison locale et pas nécessairement cohérente de terminologies nobiliaires, généalogiques ou phénotypiques – constitue parfois l’ultime recours des « élites traditionnelles » pour affirmer leur différence sociale et culturelle dans des mondes coloniaux qui ne connaissent pas, comme en Europe, la roture.
27Nous postulons pourtant que la ségrégation par la « couleur » n’est jamais automatique ou évidente. Suppose-t-elle une reconnaissance politique des élites de couleur ? Une inégale répartition des privilèges et des obligations rattachés au statut de milicien ? Un processus de naturalisation des différences sociales fondée sur la généalogie et le phénotype ? Nous estimons que seule la comparaison de différents contextes urbains peut rendre compte des conditions locales et impériales de l’institutionnalisation des compagnies de couleur. Périodiser et cartographier ces processus permet d’interroger la diffusion des pratiques de ségrégation par la couleur dans les milices américaines.
28La milice est un espace de cohésion urbaine qui institutionnalise des réseaux informels de sociabilité, de solidarité et de clientèle. C’est pourquoi nous estimons qu’il faut en étudier les contours, le périmètre d’action et de recrutement, et ainsi restituer les dynamiques à l’œuvre dans les processus locaux de formation et d’institutionnalisation des groupes sociaux. Dès lors, la couleur est-elle le seul principe de division des compagnies de couleur ? Tous les miliciens d’une compagnie de couleur sont-ils nécessairement réputés comme des « gens de couleur » ? Dans quelle mesure l’appartenance à une compagnie de couleur détermine-t-elle la position des acteurs ? Et jusqu’à quel point les hiérarchies miliciennes reflètent-elles celles d’autres scènes urbaines d’appartenance, comme les corps de métier ou les confréries ? Par conséquent, cette recherche croise l’analyse des carrières miliciennes à l’étude des mobilités sociales, collectives ou individuelles. Elle s’intéresse en particulier aux officiers de couleur, considérés comme des élites « secondes » à l’échelle de la ville. Nous nous interrogeons par exemple sur les structures des marchés locaux des commissions de milice, sur leur vénalité, sur leurs modes d’acquisition et sur les spécificités des commissions des compagnies de couleur.
29Ce travail vise donc à mesurer l’interdépendance entre les positions sociales occupées par les acteurs et une « colorisation » plus ou moins grande des manières locales de dire les hiérarchies sociales. Il s’agit par conséquent de restituer le jeu complexe des multi-appartenances que dissimule cette ressource discursive qu’est la couleur aux Amériques. Il est nécessaire pour cela d’accorder une attention particulière aux cas singuliers et aux situations en apparence paradoxales, comme le travail d’un artisan blanc dans l’atelier d’un capitaine mulâtre, le service d’un milicien mulâtre sous les ordres d’un Noir libre, le rapport de domination d’un capitaine mulâtre protestant vis-à-vis d’un catholique blanc, ou encore la désignation d’un exécuteur testamentaire mulâtre par un membre distingué des élites blanches d’une ville.
30Le second objectif de cet ouvrage est d’interroger les expériences et les processus locaux de construction politique et institutionnelle des souverainetés impériales, et de perpétuation de la domination coloniale53. Intégrés à la ville coloniale, ceux qui sont désignés dans les sources comme des « libres de couleur » partagent avec les « Blancs » une même catégorie juridique (habitants libres de la ville et sujets du monarque) et une même appartenance linguistique et culturelle (l’hispanité, la francité, l’anglicité). Par conséquent, n’apparaissent-ils pas comme des alliés nécessaires à des élites locales conscientes de leur faiblesse démographique ? Ne sont-ils pas perçus comme des intermédiaires essentiels dans les relations parfois conflictuelles entre ces élites locales et les pouvoirs centraux ? Cette recherche interroge en effet le rôle politique, social, économique et militaire des libres de couleur dans la perpétuation de l’ordre social, à l’échelle des villes et des empires. La milice constitue en ce sens un excellent laboratoire : en tant qu’institution politique, elle joue un rôle clé dans la ville, dans l’empire ainsi que dans les interactions complexes qu’entretiennent l’une et l’autre.
31En définitive, ce travail cherche à articuler, par une approche multi-située des espaces urbains, une analyse des interactions en milieu colonial et une histoire sociale des constructions impériales centrée sur l’expérience des acteurs locaux54. Nous pensons en effet qu’une histoire située des interactions urbaines constitue un excellent moyen de rendre compte de mécanismes supra-locaux (régionaux, impériaux, continentaux) sans homogénéiser les formes et le sens des expériences sociales55.
Pourquoi et comment comparer ?
32La comparaison en sciences sociales peut opérer à deux niveaux de la recherche : celui de l’élaboration du questionnaire et celui de la définition des justes échelles d’analyse de l’objet. La comparaison au premier niveau se fonde sur un décloisonnement bibliographique qui vise à multiplier les questionnements, se méfier des catégories d’analyse prédéfinies et transformer le terrain et l’objet de la recherche en un « cas d’étude ». La recherche de différences avec d’autres terrains, aussi éloignés soient-ils, met en évidence « les absences et les silences » des sources, les règles informelles, les « codifications coutumières56 ». Toutes les questions sont légitimes tant que la recherche ne les a pas scrupuleusement confrontées à l’objet/au terrain et écartées le cas échéant. Comme la périodisation, la définition des frontières spatiales de l’analyse ne doit donc pas déterminer la recherche mais au contraire en découler. Marc Bloch écrivait que « le difficile est de dresser le questionnaire57 ». L’opération requiert en effet de s’affranchir de sous-champs académiques plus ou moins autonomes, circonscrits par des aires linguistiques ou culturelles, des traditions nationales, des objets ou des terrains de recherche. Malgré cet obstacle, la capacité des sciences sociales à « généraliser » continue de reposer principalement sur la comparaison, qu’elle soit assumée ou non.
33La profusion des ressources bibliographiques et leur grande facilité d’accès constituent un second obstacle, et il devient aujourd’hui nécessaire de restreindre l’espace de l’analyse de manière qu’il soit permis de contextualiser les enjeux bibliographiques sans estomper les vertus heuristiques de la comparaison. Marc Bloch offre une solution pratique, qui consiste à « étudier parallèlement des sociétés à la fois voisines et contemporaines, sans cesse influencées les unes par les autres, soumises dans leur développement, en raison précisément de leur proximité et de leur synchronisme, à l’action des mêmes grandes causes, et remontant, partiellement du moins, à une origine commune58 ». Par conséquent, il nous a paru indispensable d’intégrer les questionnements des travaux sur les milices métropolitaines, dans la mesure où la distinction entre sociétés coloniales et sociétés européennes constitue encore, malgré leur interdépendance, la principale fracture historiographique sur nos objets. Par ailleurs, la comparaison des Europes et des Amériques demeure le seul moyen d’interroger pertinemment le sens des catégories du « colonial » à l’époque moderne, ou encore d’échapper aux écueils des travaux sur une Caraïbe révolutionnaire trop souvent érigée en « isolat historiographique », à l’instar d’autres bassins de circulations59. Enfin, s’il est vrai que les historiographies sur la Caraïbe moderne ont depuis longtemps dépassé les anciennes fractures impériales/nationales, ce décloisonnement concerne principalement les travaux publiés en anglais. Par conséquent, cette recherche tentera de mieux prendre en compte les hypothèses soulevées par les caribéanistes qui publient en français, en espagnol, et dans la limite du possible, en danois et en néerlandais.
34La comparaison au second niveau n’est pas moins importante. Fondée sur une approche multi-située dans l’espace et le temps, elle aide à définir les échelles d’analyse les plus adaptées à l’objet historique en question60. Elle confère ainsi une sensibilité accrue à la territorialité et aux temporalités de l’objet. Ce type de comparaison requiert un éclatement préalable du terrain de la recherche, qui sera progressivement circonscrit à une poignée de sites sélectionnés pour leur contraste et leur richesse documentaire. Lara Putnam explique ainsi que la mobilisation de données macrohistoriques (quantitatives et qualitatives) est nécessaire pour l’élaboration d’axes de comparaison féconds. En retour, la comparaison de données microhistoriques justifient une analyse macro-historique61. J’ai donc d’abord dressé une cartographie exhaustive et dynamique des compagnies de couleur aux Amériques afin de délimiter le périmètre de la recherche. Il en ressort que le bassin caraïbe constituait aux xviie et xviiie siècles la plus forte concentration de milices de couleur des Amériques. Par exemple, le bassin caraïbe comptait vers 1780 plus de cinq cents compagnies de couleur représentant plus de 35 000 miliciens, dont plus de 25 000 dans le seul Empire espagnol. Cet espace régional intégré offre en outre l’avantage de réunir des souverainetés discontinues et précaires. Il s’agit donc d’un terrain fertile pour l’histoire transimpériale et pour la prise en compte de connexions régionales incroyablement denses62.
35Le choix des terrains à comparer fut ensuite déterminé par trois facteurs : leur contraste (degré d’intégration aux constructions impériales et à l’économie-monde caribéenne, structures démographiques et économiques) ; l’existence de listes nominatives concernant les milices de couleur ; et l’accès en ligne à des fonds d’archives numérisés permettant de réunir des données prosopographiques sur les officiers et/ou les miliciens des compagnies de couleur (archives paroissiales, notariées, judiciaires, recensements nominatifs, etc.) Parmi une dizaine de terrains retenus selon ces critères, trois catégories se dégagent :
Des terrains « systématiques ». La richesse et la continuité des sources disponibles permettent une analyse systématique et prosopographique des milices de couleur sur au moins trois générations. C’est le cas de Carthagène des Indes, de Maracaibo, de Santiago de Guatemala ou de l’île de Sainte-Lucie.
Des « fragments de terrain ». Ces terrains font l’objet d’une analyse fragmentaire à partir d’un questionnaire réduit. C’est le cas de Panama et Portobelo pour le xviie siècle, de Caracas, Campeche, diverses paroisses de Saint-Domingue et de la Jamaïque, et des îles Dominique et Grenade au xviiie siècle.
Des terrains « à suivre63 », qui correspondent à l’espace de mobilité d’un individu ou d’un groupe d’individus dont il s’agit de suivre la trace. C’est par exemple le cas de plusieurs officiers de couleur du xviie siècle, ou d’une poignée de familles d’origine martiniquaises ballotées d’une île à l’autre des petites Antilles au xviiie siècle.
⁂
36La comparaison de ces multiples terrains est « asymétrique » au sens où elle reflète l’antériorité et l’hégémonie de l’Empire espagnol dans le bassin caraïbe à l’époque moderne64. Elle est en même temps « réciproque » au sens où chaque questionnement suscité par l’un des terrains est systématiquement appliqué aux autres65. C’est précisément cette « réciprocité » qui permet de neutraliser l’hétérogénéité (voire l’asymétrie) des sources, tout en soulignant « les phénomènes de circulation et d’emprunt réciproque66 ». Elle permet enfin de repérer le sens et l’importance des circulations, mais également ce qui ne circule pas, ou encore les circulations qui génèrent des malentendus, des refus voire des tensions dans leur contexte de réception67.
37Le recours à une prosopographie comparée des terrains systématiques permet de situer l’analyse à un niveau méso qui cherche à associer les vertus de la microanalyse sociale et de l’histoire atlantique. D’un côté elle enrichit les trajectoires biographiques en informant sur les contextes de socialisation et les espaces des possibles. Elle donne ainsi le cadre d’analyse qui détermine la mise au point des plans rapprochés, au ras du sol, au plus près des interactions sociales. D’un autre côté elle permet de décentrer le regard en révélant les différences entre les terrains, et par conséquent de définir le juste niveau d’analyse des mécanismes de l’interaction. En somme, la prosopographie comparée des compagnies de couleur doit aider à comprendre comment s’articulent in situ des logiques locales, régionales, impériales ou transimpériales. L’analyse spatiale et la cartographie, de l’échelle urbaine à l’échelle continentale, constitue un autre moyen pour démêler ces appartenances. Elles sont fréquemment mobilisées au cours de la recherche et viennent enrichir la méthode comparative, afin de mettre l’accent à la fois sur les mécanismes supra-locaux dans la fabrique du local et sur la place des expériences locales dans la construction des structures impériales.
De l’archive matérialisée à l’approche multisituée
38Le formidable élan de numérisation et de mise en ligne des fonds d’archives microfilmés encouragent plus que jamais l’histoire sociale à mettre en œuvre des approches multi-situées et multiscalaires des sociétés urbaines de l’époque moderne. Il ne s’agit en aucun cas de substituer aux voyages de terrain la consultation d’archives en ligne, par ailleurs facilitée par les nouvelles pratiques et méthodes d’indexation. Rien ne saurait remplacer la matérialité du document, qui renseigne parfois autant sur le contexte de sa production que le texte déchiffré à l’écran, parfois avec peine quand l’image provient d’un mauvais microfilm.
39Cette recherche n’aurait toutefois pas été envisageable sans ces fonds numérisés et mis en ligne. Nous pensons bien sûr au portail exemplaire des Archives nationales colombiennes et aux riches fonds numérisés des Archives nationales mexicaines. Nous pensons aussi aux reales despachos (ordres royaux envoyés aux gouverneurs des provinces américaines et aux autorités locales jusqu’au début du xviiie siècle), numérisés récemment et parfois indexés par l’Archivo General de Indias. Mais nous pensons surtout au fascinant portail de généalogie de la Société généalogique d’Utah, FamilySearch. Créée en 1894 à Salt Lake City, cette société occupe une place centrale au sein de l’église mormone. En lien avec les théories mormones sur la survivance des liens familiaux après la mort, la société a pour objectif de reconstituer l’arbre généalogique de l’humanité. Dans cette quête démesurée, elle s’intéresse à tous les documents susceptibles de contenir des informations d’ordre généalogique. Depuis 1999, la société a mis en œuvre une campagne de numérisation systématique de leurs microfilms, afin de les mettre en ligne sur leur nouveau portail numérique.
40La prosopographie comparée repose en grande partie sur ces ressources. Pour la seule ville de Santiago de Guatemala, FamilySearch donne en effet accès à l’intégralité des registres paroissiaux et notariés, très bien conservés, avec les index et paginations d’époque. Autant que possible nous avons cité ces documents en respectant les systèmes de classement et de cotation de leur centre d’archives d’origine. Sans ce portail, nous n’aurions jamais accédé aux sources conservées à la Dominique ou à la Grenade, au Venezuela ou au Guatemala, à Port-au-Prince ou à Kingston.
41FamilySearch pose toutefois à l’historien une longue série de difficultés : faible respect des systèmes de cotation d’origine, modes de recherche et d’indexation guidés uniquement par les intérêts des généalogistes, ressources mal inventoriées et microfilms de piètre qualité. C’est pourquoi nous considérons qu’un rapprochement entre archivistes, historiens et généalogistes seraient l’occasion d’adapter les outils développés par la généalogie aux besoins plus rigoureux de l’historien et de tirer avantage des rendements de l’indexation collaborative tout en orientant les questionnaires qui la soutiennent. Le traitement numérique massif de données nominatives sur les sociétés modernes pourrait permettre à l’historien d’associer durablement les méthodes qualitatives et quantitatives, de multiplier les points d’observation sur un même objet, de suivre les individus dans leur mobilité, et peut-être de donner un second souffle aux méthodes de la biographie collective en histoire sociale.
Notes de bas de page
1 Restall Matthew, « Blacks Conquistadors: Armed Africans in Early Spanish America », The Americas, vol. 57, no 2, 2000, p. 171-205.
2 Voelz Peter Michael, Slave and Soldier: the Military Impact of Blacks in the Colonial Americas, New York, Garland, 1993, p. 354-361.
3 AGI, Mexico, 1098, L.31, Provision royale du 24 avril 1657, f. 217.
4 AGI, Mexico, 39, N.9, Ban de Juan Francisco de Esquivel, 22 août 1663, feuillets non numérotés (ci-après fnn).
5 En français, en espagnol comme en anglais, le terme milice est indistinctement utilisé au singulier ou au pluriel dans les sources coloniales. La milice ou les milices font référence à l’ensemble des compagnies de milice d’une ville ou d’un territoire.
6 Voelz Peter Michael, Slave and Soldier…, op. cit., p. 24.
7 Zúñiga Jean-Paul, « L’Histoire impériale à l’heure de l’histoire globale. Une perspective atlantique », Revue d’histoire moderne et contemporaine, vol. 54, no 4bis, 2007, p. 54-68.
8 Prak Maarten, « Citizens, Soldiers and Civic Militias in Late Medieval and Early Modern Europe », Past & Present, vol. 228, no 1, 2015, p. 93-123.
9 Roberts Michael, « The Military Revolution, 1560-1660 », Essays in Swedish history, Londres, Weidenfeld and Nicolson, 1967 (1956), p. 195-225 ; Tilly Charles, The Formation of national states in Western Europe, Princeton, NJ, Princeton University Press, 1975.
10 Western John R., The English Militia in the Eighteenth Century: the Story of a Political Issue, 1660-1802, Londres, Routledge/Kegan Paul, 1965 ; Corvisier André, Armées et sociétés en Europe de 1494 à 1789, Paris, Presses universitaires de France, 1976.
11 McCormack Matthew, Embodying the Militia in Georgian England, Oxford, Oxford University Press, 2015, p. 2-9 ; Ruiz Ibáñez José Javier (dir.), Las milicias del rey de España: sociedad, política e identidad en las monarquías ibéricas, Madrid/Mexico, Fondo de Cultura Económica, 2009, p. 9-40.
12 Corvisier André, Armées et sociétés, op. cit., p. 123 ; « Quelques aspects sociaux des milices bourgeoises au xviiie siècle », Actes du Colloque international d’histoire des villes, annales de la faculté des lettres et sciences humaines de Nice, 1969, p. 241-277.
13 Descimon Robert, Qui étaient les Seize ? Mythes et réalités de la Ligue parisienne (1585-1594), Paris, Fédération des sociétés historiques et archéologiques de Paris, 1983 ; Garrioch David, Neighbourhood and Community in Paris, 1740-1790, Cambridge, Cambridge University Press, 1986 ; Cerutti Simona, La ville et les métiers : naissance d’un langage corporatif (Turin, 17e-18e siècle), Paris, Éditions de EHESS, 1990, p. 84.
14 Descimon Robert, « Solidarité communautaire et sociabilité armée : les compagnies de la milice bourgeoise à Paris (xvie-xviie siècles) », in Françoise Thélamon (dir.), Sociabilité, pouvoirs et société, Rouen, Presses universitaires de Rouen, 1985, p. 599-609 ; « Milice bourgeoise et identité citadine à Paris au temps de la Ligue », Annales. Économies, Sociétés, Civilisations, vol. 48, no 4, 1993, p. 885-906 ; « Les capitaines de la milice bourgeoise à Paris (1589-1651) : pour une prosopographie de l’espace social parisien », in Jean-Pierre Genet et Gunther Lottes (dir.), L’État moderne et les élites : xiiie-xviiie siècle, Paris, Publications de la Sorbonne, 1996, p. 189-211 ; Prak Maarten, « Identité urbaine, identités sociales. Les bourgeois de Bois-le-Duc au xviiie siècle », Annales. Économies, Sociétés, Civilisations, vol. 48, no 4, 1993, p. 907-933.
15 Descimon Robert, « Solidarité… », art. cité, p. 601.
16 Denys Catherine, « The Development of Police Forces in Urban Europe in the Eighteenth Century », Journal of Urban History, vol. 36, no 3, 2010, p. 332-344.
17 Saupin Guy, « La milice bourgeoise, relais politique fondamental dans la ville française d’Ancien Régime. Réflexions à partir de l’exemple de Nantes », in Bruno Dumons et Olivier Zeller (dir.), Gouverner la ville en Europe du Moyen Âge au xxe siècle, Paris, L’Harmattan, 2006, p. 73-89.
18 Descimon Robert, « Solidarité… », art. cité, p. 600.
19 Ouellet Fernand, « Officiers de milice et structure sociale au Québec, 1660-1815 », Histoire sociale/Social history, vol. 12, no 23, 1979, p. 37-65 ; Desloges Yvon, « La corvée militaire à Québec au xviiie siècle », Histoire sociale/Social history, vol. 15, no 30, 1982, p. 333-356.
20 Descimon Robert, « Solidarité… », art. cité, p. 602.
21 Ruggiu François-Joseph, « L’identité bourgeoise en milieu urbain à travers les demandes d’exemptions de la garde à Amiens au xviiie siècle », in Jean-Pierre Poussou et Isabelle Robin-Romero (dir.), Histoire des familles, de la démographie et des comportements, Paris, Sorbonne université Presses, 2007, p. 985-1010.
22 Descimon Robert, « Solidarité… », art. cité ; Coste Laurent, « Les milices bourgeoises en France », in Jean-Pierre Poussou (dir.), Les sociétés urbaines au xviie siècle, Paris, Sorbonne université Presses, 2007, p. 175-188.
23 Descimon Robert, « Milice bourgeoise… », art. cité, p. 893 ; Carpi Olivia, « La milice bourgeoise comme instrument de reconstruction identitaire de la communauté citadine d’Amiens, dans le premier tiers du xviie siècle », in Serge Brunet et José Javier Ruiz Ibáñez, Les milices dans la première modernité, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2015, p. 21-34.
24 Withington Phil, « Citizens, Soldiers and Urban Culture in Restoration England », The English Historical Review, vol. 123, no 502, 2008, p. 587-610 ; Prak Maarten, « Milicia cívica y política urbana en Holanda: Leiden, Siglos XVII y XVIII », in José Javier Ruiz Ibáñez (dir.), Las milicias del rey, op. cit., p. 330-348 ; Arnade Peter, « The City Defeated and Defended. Civism as Political Identity in the Habsburg-Burgundian Netherlands », in Robert Stein et Judith Pollmann (éd.), Networks, Regions and Nations. Shaping Identities in the Low Countries 1300-1650, Leyde/Boston, Brill, 2010, p. 195-216.
25 Ruiz Ibáñez José Javier, Las milicias del rey…, op. cit., p. 20.
26 Ruiz Ibáñez José Javier, « Imperial Administration and Local Defense in the Hispanic Monarchy », in Juan Carlos Garavaglia, Michael J. Braddick et Christian Lamouroux (éd.), Serve the Power(s), Serve the State, Newcastle upon Tyne, Cambridge Scholars Publishing, 2016, p. 41-67.
27 Ruiz Ibáñez José Javier, Las dos caras de Jano. Monarquía, ciudad e individuo. Murcia, 1588-1648, Murcie, Universidad de Murcia, 1995, p. 261.
28 Ruiz Ibáñez José Javier, « Les acteurs de l’hégémonie hispanique, du monde à la péninsule Ibérique », Annales. Histoire, Sciences sociales, vol. 69, no 4, 2014, p. 927-954.
29 L’un des premiers fut Oliveira Lima Manoel de, The Evolution of Brazil Compared With That of Spanish and Anglo-Saxon America, Redwood City, Calif, Standford University Press, 1914.
30 Tannenbaum Frank, Slave and Citizen, Boston, Mass., Beacon Press, 1992 (1947).
31 Diggs Irene, « Color in Colonial Spanish America », Journal of Negro History, vol. 38, 1953, p. 403-427 ; Wagley Charles (éd.), Race and class in rural Brazil, New York, Unesco, 1963 ; Mintz Sidney, « Labor and Sugar in Puerto Rico and in Jamaica, 1800-1850 », Comparative Studies in Society and History, vol. 1, no 3, 1959, p. 273-81 ; Boxer Charles, Race relations in the Portuguese Colonial Empire, 1415-1825, Oxford, Clarendon Press, 1963.
32 Jordan Winthrop, « American Chiaroscuro: The Status and Definition of Mulattoes in the British Colonies », The William and Mary Quarterly, vol. 19, no 2, 1962, p. 183-200 ; Goveia Elsa V., Slave Society in the British Leeward Islands at the End of the Eighteen Century, New Haven/Londres, Yale University Press, 1969 (1965) ; Sio Arnold A., « Interpretations of Slavery: The Slave Status in the Americas », Comparative Studies in Society and History, vol. 7, no 3, 1965, p. 289-308.
33 Bagú Sergio, Estructura social de la colonia, Ensayo de historia comparada de América latina, Buenos Aires, El Ateneo, 1952 ; Genovese Eugene D., The World the Slaveholders Made, New York, Random House, 1969.
34 Chance John K. et Taylor William B., « Estate and Class in a Colonial City: Oaxaca in 1792 », Comparative Studies in Society and History, 1977, vol. 19, no 4, p. 454-487 ; McCaa Robert, Schwartz Stuart B. et Grubessich Arturo, « Race and Class in Colonial Latin America: A Critique », Comparative Studies in Society and History, 1979, vol. 21, no 3, p. 421-433 ; Seed Patricia, « Social Dimensions of Race: Mexico City, 1753 », Hispanic American Historical Review, vol. 62, no 4, 1982, p. 569-606.
35 Lebeau Auguste, De la condition des gens de couleur libres sous l’Ancien Régime, Poitiers, Imprimerie de A. Masson, 1903 ; Hurwitz Samuel J. et Edith F., « A Token of Freedom: Private Bill Legislation for Free Negroes in Eighteenth-Century Jamaica », William and Mary Quaterly, vol. 24, no 3, 1967, p. 423-431 ; Debbasch Yvan, Couleur et Liberté. Le jeu du critère ethnique dans un ordre juridique esclavagiste, t. I : L’affranchi dans les possessions françaises de la Caraïbe (1635-1833), Paris, Dalloz, 1967 ; Duval Cristiane, La condition juridique des hommes de couleur libres à la Martinique au temps de l’esclavage, thèse de doctorat en droit, Paris 2, 1975.
36 Aguirre Beltrán Gonzalo, La Población negra de Mexico, 1519-1810, Mexico, Ediciones Frente cultural, 1946 ; Mellafe Rolando, La esclavitud en Hispanoamérica, Buenos Aires, Editorial Universitaria de Buenos Aires, 1964 ; Goveia Elsa V., Slave Society…, op. cit. ; Bowser Frederick P., The African slave in colonial Peru 1524-1650, Redwood City, Calif., Standford University Press, 1974 ; Acosta Saignes Miguel, Vida de los esclavos negros en Venezuela, La Havane, Casa de las Américas, 1978 ; Patterson Orlando, Slavery and Social Death: a Comparative Study, Cambridge, Mass., Harvard University Press, 1982.
37 Cortés Alonso Vicenta, « La liberación del esclavo », Anuario de estudios americanos, no 22, 1965, p. 533-568 ; Debien Gabriel, « Les affranchissements aux Antilles françaises aux xviie et xviiie siècles », Anuario de estudios americanos, no 23, 1966, p. 1177-1203 ; Schwartz Stuart B., « The Manumission of Slaves in Colonial Brazil, Bahia, 1684-174 », Hispanic American Historical Review, 1974, vol. 54, no 4, p. 603-635 ; Johnson Lyman L., « Manumission in Colonial Buenos Aires, 1776-1810 », Hispanic American Historical Review, vol. 59, no 2, 1979, p. 258-279 ; Tardieu Jean-Pierre, « L’affranchissement des esclaves aux Amériques espagnoles, xvie-xviiie siècle », Revue historique, vol. 268, fasc. 2, 1982, p. 341-364 ; Handler Jerome S. et Pohlmann John T., « Slave Manumissions and Freedmen in Seventeeth-Century Barbados », William and Mary Quarterly, vol. 41, no 3, 1984, p. 390-408.
38 Foner Laura, « The Free People of Color in Louisiana and St. Domingue: A Comparative Portrait of Two Three-Caste Slave Societies », Journal of Social History, 1970, p. 406-430 ; Hayot Émile, Les gens de couleur libres du Fort-Royal (1679-1823), Paris, Société française d’histoire d’Outre-Mer, 1971 ; Cohen David W. et Green Jack P. (dir.), Neither slave nor free. The Freedmen of African Descent in the Slave Societies of the New World, Baltimore, John Hopkins University, 1972 ; Handler Jerome S., The Unappropriated People: Freedmen in the Slave Society of Barbados, Baltimore, Johns Hopkins University Press, 1974 ; Sio Arnold A., « Race, Colour and Miscegenation: The Free Coloured of Jamaica and Barbados », Caribbean Studies, vol. 16, no 1, 1976, p. 5-21 ; Gaspar David Barry, « A Mockery of Freedom: The Status of Freedmen in Antigua Slave Society before 1760 », New West Indian Guide, vol. 59, no 3, 1985, p. 135-148.
39 Sur les milices disciplinées de l’Empire espagnol, voir le bilan proposé au chapitre 7.
40 Garrigus John D., Between Servitude and Citizenship: Free Coloreds in Pre-Revolutionary Saint-Domingue, thèse de doctorat en histoire, Johns Hopkins University, 1988 ; King Stewart R., The Haitian Middle Class Before 1791: Planters, Merchants and Soldiers, thèse de doctorat en histoire, Johns Hopkins University, 1997 ; Hanger Kimberly, Bounded Lives, Bounded Places: Free Black Society in Colonial New Orleans, 1769-1803, Durham, N.C., Duke University Press, 1997 ; Rogers Dominique, Les libres de couleur dans les capitales de Saint-Domingue.Fortune, mentalités et intégration à la fin de l’Ancien Régime (1776-1789), thèse de doctorat en histoire, dir. Paul Butel, université Michel de Montaigne-Bordeaux 3, 1999 ; Landers Jane, Black society in Spanish Florida, Urbana, University of Illinois Press, 1999 ; Thibaud Clément, « Race et citoyenneté dans les Amériques (1770-1910) », Le Mouvement social, vol. 252, no 3, 2015, p. 5-19.
41 Bernand Carmen et Stella Alessandro (dir.), D’esclaves à Soldats. Miliciens et soldats d’origine servile xiiie-xxe siècles, Paris, L’Harmattan, 2006 ; Brown Christopher Leslie et Morgan Philip D. (dir.), Arming Slaves: From Classical Times to the Modern Age, New Haven, Yale University Press, 2008.
42 Loveman Mara, « Is “Race” Essential? », American Sociological Review, vol. 64, no 6, 1999, p. 891-898 ; Brubaker Rogers et Cooper Frederick, « Beyond “Identity” », Theory and Society, vol. 29, no 1, 2000, p. 1-47.
43 Bourdieu Pierre et Wacquant Loïc, « Sur les ruses de la raison impérialiste », Actes de la recherche en sciences sociales, vol. 121-122, 1998, p. 109-118.
44 Cope Douglas, The Limits of Racial Domination: Plebeian Society in Colonial Mexico City, 1660-1720, Madison, University of Wisconsin Press, 1994 ; Boyer Richard, « Negotiating Calidad: The Everyday Struggle for Status in Mexico », Historical Archaeology, vol. 31, no 1, 1997, p. 64-73 ; Zúñiga Jean-Paul, « La voix du sang. Du métis à l´idée de métissage en Amérique espagnole », Annales, 1999, vol. 54, no 2, p. 425-452 ; Burns Kathryn, « Unfixing Race », in Margaret R. Greer, Walter D. Mignolo et Maureen Quilligan, Rereading the Black Legend: The Discourses of Religious and Racial Difference in the Renaissance Empires, Chicago, University of Chicago Press, 2008, p. 188-202 ; Ariel de Vidas Anath et Hoffmann Odile, « Beyond Reified Categories: Multidimensional Identifications Among “Black” and “Indian” Groups in Columbia and Mexico », Ethnic and Racial Studies, vol. 35, no 9, 2012, p. 1596-1614 ; Rappaport Joanne, The Disappearing Mestizo. Configuring Difference in the Colonial New Kingdom of Granada, Durham, N.C., Duke University Press, 2014.
45 Suárez Santiago-Gerardo, Las milicias. Instituciones militares hispanoamericanas, Caracas, Academia Nacional de la Historia, 1984 ; Voelz Peter Michael, Slave and Soldier…, op. cit.
46 Marraud Matthieu, « Corporatisme, métiers et économie d’exclusion à Paris xviie-xviiie siècle », Revue historique, no 690, 2019, p. 283-313.
47 Thompson E. P., « The Moral Economy of the English Crowd in the Eighteenth Century », Past & Present, no 50, 1971, p. 76-136 ; Certeau Michel de, L’invention du quotidien, t. I : Arts de faire, Paris, Union générale d’éditions, 1980 ; Lepetit Bernard, « La société comme un tout : sur trois formes d’analyse de la totalité sociale », Les Cahiers du Centre de recherches historiques, no 22, 1999 ; Lepetit Bernard (éd.), Les formes de l’expérience. Une autre histoire sociale, Paris, Albin Michel, 2013 ; Morieux Renaud, « Indigenous Comparisons », in John H. Arnold, Matthew Hilton et Jan Rüger, History after Hobsbawm: Writing the Past for the Twenty-First Century, Oxford, Oxford University Press, 2018, p. 50-75.
48 Maget Marcel, « Remarques sur le village comme cadre de recherches anthropologiques », Bulletin de psychologie, vol. 8, nos 7-8, 1955, p. 375-382 ; Chamboredon Jean-Claude et al., « L’appartenance territoriale comme principe de classement et d’identification », Sociologie du Sud-Est, nos 41-44, 1984-1985, p. 61-88 ; Avanza Martina et Laferte Gilles, « Dépasser la construction des identités ? Identification, image sociale, appartenance », Genèses, vol. 61, no 4, 2005, p. 134-152.
49 Zúñiga Jean-Paul, « Frontière et frontières dans le Cautiverio feliz de Francisco Núñez de Pineda y Bascuñán (Chili austral, xviie siècle) », in Michel Bertrand et Natividad Planas, Les sociétés de frontière. De la Méditerranée à l’Atlantique (xvie-xviiie siècle), Madrid, Casa de Velázquez, 2011, p. 43-57.
50 Chamboredon Jean-Claude et al., « L’appartenance territoriale… », art. cité, p. 79-80 ; Morieux Renaud, « Diplomacy From Below and Belonging: Fishermen and Cross-Channel Relations in the Eighteenth Century », Past and Present, vol. 202, no 1, 2009, p. 83-125 ; Morieux Renaud, The Society of Prisoners: Anglo-French Wars and Incarceration in the Eighteenth Century, Oxford, Oxford University Press, 2019.
51 Zúñiga Jean-Paul, « Frontière et frontières… », art. cité.
52 Zúñiga Jean-Paul, « “Muchos negros, mulatos y otros colores”. Culture visuelle et savoirs coloniaux au xviiie siècle », Annales. Histoire, Sciences sociales, no 68/1, 2013, p. 45-76.
53 Barriera Darío G., « Gouverner les campagnes. Analyse micro-sociale et construction institutionnelle (Río de la Plata, fin du xviiie siècle) », Annales. Histoire, Sciences sociales, vol. 73, no 1, 2018, p. 57-82.
54 Ruiz Ibáñez José Javier, « Les acteurs de l’hégémonie ibérique… », art. cité.
55 Zúñiga Jean-Paul, « L’Histoire impériale… », art. cité.
56 Dittmar Pierre-Olivier, « Deux comparatismes pour une anthropologie historique », L’Atelier du Centre de recherches historiques, no 6, 2010 ; Descimon Robert, « Le corps de ville et les élections échevinales à Paris aux xvie et xviie siècles. Codification coutumière et pratiques sociales », Histoire, économie et société, vol. 13, no 3, 1994, p. 507-530.
57 Bloch Marc, « Pour une histoire comparée des sociétés européennes », Revue de synthèse historique, no 46, 1928, p. 20.
58 Ibid., p. 19.
59 Schaub Jean-Frédéric, « La catégorie “études coloniales” est-elle indispensable ? », Annales. Histoire, Sciences sociales, vol. 63, no 3, 2008, p. 623-646 ; Bertrand Romain et Calafat Guillaume, « La micro-histoire globale : affaire(s) à suivre », Annales. Histoire, Sciences sociales, vol. 73, no 1, 2018, p. 16-17.
60 Marcus Georges E., « Ethnography in/of the World System: The Emergence of Multi-Sited Ethnography », Annual Review of Anthropology, vol. 24, no 1, 1995, p. 95-117 ; Zúñiga Jean-Paul (dir.), Pratiques du transnational. Terrains, preuves, limites, Paris, Centre de recherches historiques, 2012, p. 9-19.
61 Putnam Lara, « To Study the Fragments/Whole: Microhistory and the Atlantic World », Journal of Social History, vol. 39, no 3, 2006, p. 615-630.
62 Zúñiga Jean-Paul, « Muchos negros… », art. cité.
63 Bertrand Romain et Calafat Guillaume, « La micro-histoire globale… », art. cité.
64 Gould Eliga H., « Entangled Histories, Entangled Worlds: The English-Speaking Atlantic as a Spanish Periphery », The American Historical Review, vol. 112, no 3, 2007, p. 764-786.
65 Stanziani Alessandro, « Comparaison réciproque et histoire. Quelques propositions à partir du cas russe », in Jean-Paul Zúñiga (dir.), Pratiques du transnational, op. cit., p. 209-248.
66 Ibid., p. 210. Voir également Austin Gareth, « Reciprocal Comparison and African History: Tackling Conceptual Eurocentrism in the Study of Africa’s Economic Past », African Studies Review, vol. 50, no 3, 2007, p. 1-28.
67 Zúñiga Jean-Paul, « L’Histoire impériale… », art. cité.
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