Chapitre VII. Vers la fin du gaullisme (1967-1969)
p. 193-208
Texte intégral
1La mise en ballotage du général de Gaulle en 1965 avait montré une certaine usure du pouvoir en place. Cette usure est confirmée par les élections législatives de 1967 qui ont vu Georges Pompidou s’affirmer en chef de la majorité. Avant l’élection, le chef de l’État avait souhaité remplacer le Premier ministre par Maurice Couve de Murville, le ministre des Affaires étrangères, mais ce dernier, non parlementaire, est battu à Paris. De Gaulle garde donc Pompidou qui va restructurer l’UNR. Un an plus tard, la crise imprévisible de Mai 1968 secoue le pouvoir gaulliste et affaiblit le général de Gaulle tout en montrant l’efficacité de Georges Pompidou. En 1968-1969, le chef de l’État engage des réformes pour répondre aux exigences des soixante-huitards, notamment dans les universités (loi Edgar Faure), et au printemps de 1969 il tente de se relégitimer par un référendum perdu qui conduit à son départ du pouvoir. Les années 1967-1969 traduisent un déclin du gaullisme. Qu’en est-il en Bretagne ?
Les élections législatives de mars 1967 : le retour à la normale ?
2Cinq ans après les élections législatives de crise de 1962, celles de mars 1967 en pleine période d’expansion économique se déroulent dans un climat assez morose, et même d’inquiétude dans les campagnes (prix agricoles insuffisamment réévalués à Bruxelles). On sent l’usure du régime gaulliste et les impatiences contestataires d’une jeunesse lycéenne et étudiante qui a vu ses rangs grossir en quelques années du fait de la démocratisation de l’enseignement secondaire. La société corsetée par une discipline et des règles qui renvoient au pouvoir autoritaire du chef de l’État vieillissant est de plus en plus en décalage avec une jeunesse dont une partie écoute Salut les copains ! sur son transistor (radio portative) et remet en cause une autorité et des hiérarchies perçues comme trop pesantes. Avec l’achèvement du Concile Vatican II (8 décembre 1965), l’Église catholique est elle-même secouée par des remises en question qui débouchent rapidement sur une « crise catholique ». Les jeunes aumôniers et vicaires, attirés par le tiers-mondisme et pour certains par le marxisme, sont souvent les fers de lance de ces mouvements. Dans une région aussi catholique que la Bretagne où la pratique religieuse régulière est encore forte dans le monde rural, les répercussions de l’aggiornamento de l’Église vont être considérables en Mai 1968 et après. Pour l’heure, la crise des prix agricoles frappant les produits de l’élevage nourrit un malaise dans le monde rural, d’autant plus que de jeunes militants formés dans le creuset de la Jeunesse agricole catholique (JAC) prennent des responsabilités dans les CDJA, les Centres départementaux des jeunes agriculteurs liés aux FDSEA, et de plus en plus dans les FDSEA elles-mêmes ainsi que dans les organismes professionnels. C’est le cas de Bernard Lambert en Loire-Atlantique ou de Louis Chopier en Ille-et-Vilaine1. Ces militants qui évoluent vers la gauche bousculent leurs aînés conservateurs ou démocrates-chrétiens et engagent en 1966-1967 des rapprochements avec les syndicats ouvriers par le canal de la CFDT, le syndicalisme chrétien déconfessionnalisé en 1964. Ils sont attirés par les sirènes d’un socialisme rénové au PSU, voire à la FGDS, ce qui rejette vers la droite le Centre démocrate moins ouvertement soutenu par le quotidien régional Ouest-France. De même, dans les universités des militants de la Jeunesse étudiante chrétienne (JEC) prennent des responsabilités dans l’UNEF et ses AGE, du moins à Rennes et à Brest.
3Les élections législatives des 5 et 12 mars 1967 ne bouleversent pas vraiment les rapports de force mais la situation bouge à gauche. En mai 1966, Georges Pompidou, véritable chef de la majorité, a formé un Comité d’action pour la Ve République afin de dégager des candidatures uniques de la majorité. En novembre, deux ministres élus en Bretagne, Yvon Bourges (UNR) et Raymond Marcellin (RI), en font partie, ainsi que Marie-Madeleine Dienesch qui est en cours de ralliement au parti gaulliste. La gauche non communiste s’efforce aussi de se mettre d’accord pour éviter la multiplication des candidatures et peser à côté du PCF : la FGDS présente 25 candidats et le PSU neuf, mais l’accord ne s’est pas fait dans quatre circonscriptions.
4Le pouvoir central décide de « parachuter » dans les régions des ministres, des cadres de l’UNR ou des hauts fonctionnaires des cabinets ministériels, tous en mal d’implantation électorale, prélude à des fonctions ministérielles. Terre de droite apparemment ralliée au gaullisme présidentiel et référendaire, la Bretagne est particulièrement concernée, quitte à bousculer des élus et militants locaux engagés depuis 1947 et les années du RPF. Ainsi, Edmond Michelet atterrit-il à Quimper, le ministre Pierre Messmer à Lorient, Olivier Guichard à Guérande, Michel Cointat à Fougères et Pierre Lelong à Morlaix. Mais ces arrivées ne se passent pas toujours très bien. En mars 1967, la participation électorale est forte dans la région (82,3 %, 13 points de plus qu’en 1962) où 143 candidats se présentent (68 de gauche). Dix sortants sont réélus dès le 1er tour, dont quatre dans le Morbihan.
5Manquant de leader d’envergure dans le Finistère, l’UDR-UDT songe en 1966 à parachuter un ancien ministre à Quimper. On pense d’abord à Louis Joxe qui ira finalement à Lyon car la fédération départementale ne goûte guère ce gaulliste de gauche. Le général de Gaulle jette son dévolu sur Edmond Michelet, résistant de la première heure déporté à Dachau, démocrate-chrétien fondateur du MRP soutenant de Gaulle, ministre à la Libération, ancien sénateur RPF de la Seine sous la IVe République, fondateur de l’UNR et ancien ministre de 1958 à 1961, date de sa nomination au Conseil constitutionnel. Mais pour imposer Michelet, il faut écarter Roger Evrard, le député UNR sortant, jugé « incompétent » par la direction de son parti. Comme il refuse de s’effacer, il est exclu de l’UNR à la fin de 1966. Evrard (8,3 % des voix au 1er tour) se présente donc contre Michelet (30,3 %) tout comme Hervé Nader (8 %) qui avait porté les couleurs gaullistes de 1958 à 1962 (voir le tableau I, chap. 6, p. 167). Le 28 février 1967, André Malraux vient à Quimper soutenir Michelet. Les centristes ont leur candidat (13,7 % des voix au 1er tour). La gauche en présente trois : le nouveau candidat communiste Jean-François Hamon (21,6 %), le PSU Alain Le Dilosquer (8,1 %) et un FGDS (10 %). Au second tour, Edmond Michelet bat Jean-François Hamon avec 56,5 % des suffrages. Il est immédiatement nommé ministre d’État chargé de la Fonction publique dans le 4e gouvernement Pompidou, ce qui permet à Marc Bécam, responsable administratif de la FDSEA, de siéger à l’Assemblée. Comme Bécam n’avait pas été investi par le Centre démocrate, le préfet l’avait sollicité comme suppléant d’Edmond Michelet qui n’avait aucune attache en Cornouaille. Ailleurs, les gaullistes sortants Gabriel de Poulpiquet (79 %), Suzanne Ploux et Gabriel Miossec sont facilement réélus dans le Finistère, plus difficilement pour Antoine Caill contre un indépendant à Landivisiau. L’UD Ve conserve cinq députés sur huit mais Brest est perdue : Charles Le Goasguen n’ayant pas voulu se représenter, il a été remplacé par le contre-amiral en retraite Yves Drogou. Georges Lombard (45 %), qui s’est positionné comme centriste (PDM), emporte la triangulaire. Pourtant, les gaullistes ont failli prendre la circonscription de Morlaix. Malade et usé, Tanguy Prigent (PSU) a passé le relais à l’enseignant Roger Prat. Face à lui, l’UDR a envoyé Pierre Lelong, un jeune énarque de 37 ans, chargé de mission en 1962 au cabinet de Georges Pompidou. Il a comme suppléant le Dr Jean Le Duc, le maire et ancien député de Morlaix. Le sénateur André Colin (CD) tente lui aussi de revenir à l’Assemblée. Roger Prat ne l’emporte le 12 mars qu’avec 45 voix d’avance (50,05 %). Pierre Lelong a posé des jalons pour l’avenir.
6L’Ille-et-Vilaine est un enjeu de taille pour l’UD Ve qui n’a que deux députés sortants dont le ministre Yvon Bourges, réélu dès le 1er tour (55,4 %) à Saint-Malo, tout comme Isidore Renouard (RI, 58,6 %) à Redon. L’UNR voudrait reprendre la circonscription de Fougères à Jean-François Le Lann (PDM). L’ancien député RPF-UNR Pierre Guillain de Bénouville souhaite s’y représenter mais, malgré sa tentative de passer en force, de Gaulle met son veto. Parachuté à Fougères avec l’appui d’Yvon Bourges, c’est donc Michel Cointat, agronome et directeur de cabinet d’Edgard Pisani, qui est élu de justesse (50,8 %). En revanche, le sortant UNR François Le Douarec est aisément réélu à Rennes-Sud (60,4 %) contre Michel Phlipponneau (FGDS), dont le suppléant est Charles Lecomte (SFIO) ; au 1er tour (18,9 %), il a devancé le communiste Serge Hubert (12,5 %) qui s’est désisté. Les deux députés sortants centristes (CD) sont accrochés, ne l’emportant qu’au second tour dans des triangulaires contre un gaulliste et un socialiste. Pour la première fois, Alexis Méhaignerie (43,9 % des voix), député depuis 1945, est en difficulté dans son fief de Vitré contre un UNR (41,8 %) et le candidat socialiste Gerbault (14,3 %). Il l’avait emporté dès le 1er tour en 1958 (52,4 %) et en 1962 (54,8 %). La circonscription de Rennes-Nord, celle du maire Henri Fréville, est toujours disputée. En 1967 comme en 1962, c’est Charles Foulon (29,9 % au second tour) qui défend les couleurs de la gauche non communiste. Henri Fréville est réélu avec 41,7 %, le gaulliste ayant 28,6 % des voix. La poussée des deux candidats PSU et FGDS au détriment du PCF et du CD est nette dans la région rennaise puisqu’ils sont passés de 12-13 % des voix en 1962 à 30 et 40 % en 1967.
7Partie prenante de la majorité, les républicains indépendants emmenés par Raymond Marcellin conservent leurs cinq députés dont trois dans le Morbihan, réélus dès le 1er tour dans leur fief, auxquels s’ajoute le non-inscrit Xavier Hunault à Châteaubriant. Seul changement, à Ancenis le viticulteur Henri Maujouan du Gasset prend le relais d’Olivier de Sesmaisons décédé (voir le tableau II, chap. 6, p. 169). Maire de Gorges et conseiller général depuis 1953, en succédant à son oncle, il perpétue jusqu’en 1993 la tradition aristocratique des élus conservateurs de Loire-Atlantique.
8En 1967, la question est de savoir si la Loire-Atlantique, apparent bastion gaulliste depuis 1962, va confirmer sa nouvelle orientation. Sauf à Nantes-2, les sortants n’ont rien à craindre car les indépendants, toujours majoritaires au conseil général et au Sénat, n’ont plus guère de personnalités à leur opposer. Le baron Olivier Guichard, qui a des attaches familiales dans la région par son père, choisit de se présenter à Guérande-La Baule en lieu et place du sortant Pierre Litoux2. À l’issue de négociations conduites par Henry Rey, Litoux accepte d’être le suppléant du probable futur ministre dans une terre conservatrice acquise d’avance car Guichard n’a guère le goût des campagnes de terrain. L’ancien chef de cabinet du général de Gaulle en 1958, maire de Néac en Gironde, haut fonctionnaire délégué à la DATAR depuis 1963, est à la recherche d’une légitimité électorale afin d’obtenir un poste ministériel que le chef de l’État lui a refusé à trois reprises de 1959 à 1962. En 1966, Georges Pompidou le charge de suivre les investitures de la majorité. Son arrivée est un peu difficile auprès des notables locaux mais il jouit d’appuis officiels. Crédité de 48 % des voix au soir du 1er tour, il n’est élu qu’avec seulement 53 % contre le centriste Bernard Legrand. Nommé ministre de l’Industrie, Olivier Guichard entreprend une longue carrière nationale et régionale. L’UNR conserve quatre sièges en Loire-Atlantique, dont ceux d’Henry Rey (52,7 %) et de Benoît Macquet (50,8 %) à Nantes 1 et 3, mais il perd celui d’Albert Dassié à Nantes-2 au profit de Christian Chauvel (FGDS) qui l’emporte avec 51,5 % des voix. Signe des évolutions en cours, les scores sont serrés dans les trois circonscriptions nantaises. Appartenant à la majorité municipale d’André Morice, les trois candidats FGDS-SFIO André Routier-Preuvost, Christian Chauvel plus Alexandre Plancher bénéficient de toutes les voix de gauche3. L’ancrage du gaullisme à Nantes n’est pas aussi solide qu’il y paraît, de Gaulle n’ayant recueilli que 53,7 % des voix au second tour des élections présidentielles. Chauvel apporte un second siège à la SFIO dans le département puisqu’à Saint-Nazaire François Blancho a passé la main à l’enseignant Georges Carpentier élu au 2e tour avec 55,7 % des suffrages contre le gaulliste Rochard.
9Une bataille électorale autrement plus importante, vue comme un enjeu national pour la majorité, se déroule dans un autre port breton, à Lorient. Sans attaches locales, le ministre des Armées Pierre Messmer se présente dans une circonscription où la gauche est forte quand elle est unie. Le député UNR sortant Maurice Bardet a accepté d’être son suppléant pensant continuer à siéger à la place du ministre qui avait fait campagne sur la promesse d’un important plan de charge pour l’arsenal alors que les Forges d’Hennebont venaient de fermer. Comme à Quimper, les résultats de Lorient sont très observés au niveau national. Le second tour y est très serré : Yves Allainmat, le maire FGDS-SFIO de Lorient, regagne avec 52,3 % des voix ce siège. Nouveauté notable, ce succès résulte du retrait volontaire du maire communiste de Lanester Jean Maurice, pourtant arrivé en tête à gauche au 1er tour (509 voix de plus qu’Allainmat), et de l’appel du candidat du PDM à voter pour la gauche. Symbolique, cette victoire est le signe des rapprochements en cours à gauche alors que la droite et le centre totalisaient 53,9 % des voix au premier tour.
10Saint-Brieuc est un autre enjeu important pour la gauche (voir le tableau III, chap. 6, p. 171). Le maire PSU Yves Le Foll ne réussit à battre le député sortant UNR-UDT Robert Richet que de 35 voix mais le résultat sera invalidé. Les candidats socialiste et communiste ont réuni 45,7 % des voix au 1er tour, l’électorat centriste faisant la différence. René Pleven (54,4 %) est plus difficilement réélu au 1er tour à Dinan car, cette fois, il a eu contre lui un UNR, le Dr Playoust. Désormais soutenue par l’UNR, l’ex-MRP Marie-Madeleine Dienesch est plus facilement réélue à Loudéac (56,9 %). Ce n’est pas le cas de son collègue de Guingamp Alain Le Guen qui a suivi la même trajectoire politique : il est largement distancé au 1er tour par le maire de la ville Édouard Ollivro (PDM, indépendant), proche du mouvement breton, qui s’est beaucoup investi dans la défense économique de son territoire et qui l’emporte de justesse au 2e tour (50,7 %) contre le communiste François Leizour.
11Au total, en 1967 l’UD Ve conserve quatorze députés en Bretagne grâce à l’apparentement de Marie-Madeleine Dienesch. Le parti gaulliste a limité ses pertes à deux sièges, alors qu’en France (200 députés) il en perdait 33 et que les RI montaient à 44, Valéry Giscard d’Estaing ayant pris quelque distance avec de Gaulle. Les candidats gaullistes ont pourtant progressé en voix de plus de 5 % en Bretagne (33,7 % au 1er tour), dépassant leur moyenne nationale et le score des centristes et des libéraux. Huit élus bretons (six sortants) s’inscrivent au nouveau groupe centriste (38 députés) Progrès et démocratie moderne (PDM) présidé par Jacques Duhamel. Le Centre démocrate est réduit à quatre réélus (deux pertes dans les Côtes-du-Nord), mais outre les deux plévénistes, le groupe compte deux indépendants dont Georges Lombard. Du coup, leurs résultats en Bretagne baissent de 5,2 % par rapport à 1962 : avec les indépendants de droite, ils pèsent un tiers des voix.
12Passant de deux à cinq députés (3 FGDS, 2 PSU) grâce aux suffrages communistes et à une partie des voix centristes dans les points chauds de Lorient, Nantes-2 et Saint-Brieuc, les gauches socialistes rééquilibrent quelque peu la représentation parlementaire bretonne. La participation en hausse se traduit par une progression de 38 % en voix pour la gauche. Poursuivant sa récupération de 1962, le PCF progresse de 14,2 à 15,6 % des suffrages exprimés en Bretagne, obtenant même 25,4 % dans les Côtes-du-Nord et 33,4 % à Guingamp. Mais pour ses neuf candidats restés en lice au second tour, le report des voix de gauche n’est pas toujours bon. Toutefois, comme les socialistes sont divisés en deux formations, on ne perçoit pas que leurs candidats ont progressé de 2,7 % et dépassé de fait pour la première fois depuis 1946 ceux du PCF. La campagne de François Mitterrand de 1965 a profité à tous les candidats de gauche. L’ancienne SFIO-FGDS a désormais trois députés (deux gains). Le combat électoral a été très difficile pour les deux PSU, parti qui obtient quatre députés dans le pays, dont Pierre Mendès France élu à Grenoble. Invalidé, en septembre 1967 Yves Le Foll est nettement réélu contre Robert Richet à Saint-Brieuc.
13Dans le pays, les élections législatives de mars 1967 ont été un vrai coup de semonce car la majorité ne l’a emporté avec 247 sièges sur 487 que grâce à l’Outre-mer. Ayant élu vingt députés sur 33, les Bretons ont contribué à cette courte victoire. La région dispose désormais de quatre membres dans le 4e gouvernement Pompidou (7 avril) : Edmond Michelet et Olivier Guichard, Raymond Marcellin passé au Plan et à l’Aménagement du territoire et Yvon Bourges secrétaire d’État à la Coopération. Tous sont venus y faire ou poursuivre une carrière politique.
14Au niveau local, les élections cantonales des 24 septembre et 1er octobre 1967 n’ont guère modifié les rapports de force politiques existants. La gauche est toujours ultra-minoritaire, les socialistes (FGDS-SFIO et PSU), qui ne gagnent que trois sièges dans la région (de 22 à 25), sont stables dans les Côtes-du-Nord (douze) mais passent de quatre à sept dans le Finistère4. Dans les Côtes-du-Nord, René Pleven conforte sa majorité au conseil général du fait du ralliement de trois conseillers de l’Action travailliste qui passent au centre droit et s’intègrent au CD. Les plévénistes ont huit élus, la droite 17. Mais le dirigeant du PCF Édouard Quemper prend le canton de Saint-Brieuc-Nord détenu par Victor Rault (CD) depuis 1955. En Ille-et-Vilaine où la gauche n’a toujours aucun élu, Henri Fréville (CD) est réélu à la présidence du conseil général – il avait succédé l’année précédente à l’indépendant Toulouse-Lautrec –, tout comme André Colin (CD) dans le Finistère, Raymond Marcellin (RI) dans le Morbihan et le doyen Abel Durand (RI) en Loire-Atlantique.
15La majorité paraît donc solide en Bretagne. Et pourtant, une certaine agitation sociale qui s’exprimait déjà dans les mondes paysan, industriel et étudiant ne va pas tarder à s’amplifier. En Bretagne comme ailleurs, la crise de Mai 1968 révèle les impatiences et les frustrations d’une société qui s’est fortement rajeunie mais paraît bloquée. Comme dans tout le pays, le slogan « Dix ans, ça suffit ! » va résonner dans les villes le 13 mai. En effet, loin de l’agitation étudiante de Nanterre et du Quartier latin à Paris, une large partie de la population bretonne a exprimé ses craintes et ses frustrations dès le 8 mai 1968.
La crise de Mai 1968 en Bretagne
16Les difficultés agricoles débouchent peu après les élections législatives de 1967 sur une série de manifestations paysannes à l’appel de la FNSEA et de responsables des FDSEA comme Bernard Lambert, par ailleurs responsable de la FRSEAO, la Fédération des éleveurs de l’Ouest. Le MODEF, un syndicat de petits exploitants agricoles proche du PCF créé en 1959, mais qui compte aussi des militants socialistes et de gauche dans le Centre-Bretagne, est partie prenante. Deux grandes manifestations qui rassemblent des milliers de paysans soutenus par les syndicats et les partis de gauche, à Redon le 26 juin 1967, puis à Quimper le 2 octobre, donnent lieu à de violents affrontements avec les forces de l’ordre5. À Quimper (12 000 à 15 000 personnes selon les autorités, 279 blessés), les agriculteurs venus pour en découdre incendient la préfecture. Le saccage de la permanence du député UDR Marc Bécam, le suppléant d’Edmond Michelet, est un message fort envoyé au gouvernement. Cette agitation sociale débouche sur la formation le 6 novembre 1967 d’un front régional ouvrier et paysan (CGT, CFDT, FDSEA, CDJA) et l’élaboration d’un « programme d’action » appuyé par les enseignants (FEN), les étudiants (UNEF) et FO dans certains départements. Ce front syndical est à l’origine de la journée de grève et de manifestations dans seize villes de Bretagne et des Pays de la Loire du 8 mai 1968 sur le mot d’ordre « L’Ouest veut vivre ! » qui paralyse toute la région. Pour l’emploi et le développement régional, entre 70 000 et 120 000 personnes, selon les sources, battent le pavé, de 50 à plus de 80 000 en Bretagne. C’est un vaste mouvement interclassiste qui traduit une véritable angoisse sociale et le sentiment d’avoir été sacrifié par l’État central qui fait suite à la journée « ville morte » de Fougères (26 janvier 1968) où l’industrie de la chaussure est sinistrée et aux grèves ouvrières de Redon (mars 1968). De nombreux élus locaux et les parlementaires de gauche et du centre sont dans la rue ce 8 mai au côté des citoyens.
17La journée du 8 mai 1968 en Bretagne vient télescoper les événements parisiens déclenchés par les étudiants. En mai et juin, la mobilisation sociale est très forte dans les villes, mais une minorité d’agriculteurs participent aussi aux grandes manifestations des salariés, des étudiants et des lycéens, dont celles du 24 mai, de manière spectaculaire à Nantes et dans le Centre-Bretagne. Nantes est l’un des grands pôles de la mobilisation en France avec deux soirées de barricades le 13 et le 24 mai. Au lendemain de la journée de grève générale du 13 mai dans tout le pays pour protester contre la répression policière au Quartier latin à Paris, c’est à Sud-Aviation, au sud de Nantes, que démarre le mouvement social (grève illimitée, occupation, séquestration des cadres) qui va paralyser le pays. Pendant au moins quinze jours la grève est générale dans les usines sauf chez Citroën à Rennes ; les arsenaux, les administrations, les PTT, l’enseignement et bon nombre d’entreprises sont occupés, parfois plus d’un mois, obligeant Georges Pompidou à négocier avec les syndicats les accords de Grenelle.
18Alors que la France est paralysée, la crise étudiante puis sociale est devenue politique. Dès le 8 mai, l’opposition de gauche a déposé à l’Assemblée nationale une motion de censure contre le gouvernement Pompidou. Le débat s’est déroulé les 21 et 22 mai dans un climat tendu. Le 22, le gouvernement l’emporte car la censure n’a recueilli que 233 voix, onze de moins que nécessaire pour le renverser. Douze députés bretons sur 33 l’ont votée : les cinq socialistes et sept centristes du PDM sur huit. Seul René Pleven a soutenu Georges Pompidou pour « lui donner une dernière chance », alors qu’il avait voté la motion de censure du 25 avril 1968 sur « le manque d’objectivité de l’information à l’ORTF ». Le député de Dinan est pourtant critique à l’égard du pouvoir gaulliste. Dans son éditorial du Petit Bleu des Côtes-du-Nord du 18 mai, « Dix ans après », il considérait que « le gouvernement et sans doute le régime lui-même sont gravement ébranlés », que l’inquiétude est « justifiée », qu’il faut des « réformes sérieuses », mais il condamnait l’agitation étudiante. Justifiant son vote le 1er juin, il assure craindre que « les minorités agissantes » ne conduisent directement au fascisme. Impressionné par la solidité de Georges Pompidou dans la tourmente, Pleven engage en réalité un rapprochement politique avec celui-ci.
19Le 24 mai, pour tenter de reprendre la situation en main, le général de Gaulle intervient à la télévision : il annonce un référendum donnant au chef de l’État le pouvoir « de faire changer partout où il le faut des structures étroites et périmées ». Son allocution tombe à plat et il reconnaîtra d’ailleurs avoir « mis à côté de la plaque ». Loin d’enrayer le mouvement, cette intervention le renforce car elle ne répond nullement aux attentes des quelque sept millions de grévistes « véritables », chiffre avancé par les historiens, ceux qui font la grève et ne la subissent pas. C’est le Premier ministre Georges Pompidou qui s’efforce, grâce à une grande négociation sociale, d’ébaucher une sortie de crise (25-27 mai).
Juin 1968 : raz de marée conservateur aux élections législatives
20Après les accords de Grenelle qui lâchent beaucoup aux salariés (hausse du SMIG de 35 %, sections syndicales d’entreprise) et « le coup de Baden-Baden », le général de Gaulle reprend la situation en main le 30 mai : le chef de l’État dissout l’Assemblée nationale et demande à Georges Pompidou de rester. Son gouvernement est peu remanié le 31 mai mais des élus de la région y occupent des postes de choix. Henry Rey est nommé le 4 juin ministre d’État chargé du Tourisme au côté d’Edmond Michelet (sans portefeuille). Olivier Guichard passe au Plan et à l’Aménagement du territoire, et surtout Raymond Marcellin est nommé au poste clé de l’Intérieur. Yvon Bourges, qui reste secrétaire d’État à la Coopération, est rejoint par Marie-Madeleine Dienesch, secrétaire d’État à l’Éducation nationale : c’est la seule femme du gouvernement. Après les élections, elle occupera le secrétariat d’État aux Affaires sociales dans le nouveau gouvernement de Maurice Couve de Murville nommé le 12 juillet 1968. Henry Rey et Edmond Michelet n’en font plus partie. De Gaulle ayant fixé le cap, le parti gaulliste, qui se dénomme désormais l’Union pour la défense de la République (UDR), peut mobiliser ses troupes et tous les tenants de l’ordre, y compris l’extrême droite antigaulliste, contre les « gauchistes » et autres « anarchistes », dénoncer le « complot communiste », actionner les Comités de défense de la République (CDR) et occuper la rue à son tour à Paris, à Nantes, à Brest et ailleurs.
21À l’instigation des parlementaires et de responsables de l’UNR-UDR, toutes les droites se retrouvent dans les CDR, « une officine parallèle » initiée dès le 11 mai 1968 depuis l’Élysée par Jacques Foccard, conseiller du président, et Pierre Lefranc pour rassembler la « majorité silencieuse6 ». Le 29 mai, 500 CDR existent dans 57 départements mais aussi dans des administrations, des universités et certaines entreprises comme Sud-Aviation à Nantes. Des policiers y adhèrent. En juin, les CDR ont 10 000 adhérents dans le pays, 7 000 en région. Selon les sources internes des CDR, des militants d’extrême droite y adhèrent, anciens poujadistes, mais aussi des dizaines d’officiers condamnés pour avoir été proches de l’OAS, des militants d’Occident qui entrent aussi au SAC et des mercenaires rentrant du Congo. On le voit bien dans la manifestation appelée par le CDR à Nantes le 1er juin : un drapeau de l’Action française flotte et une pancarte « Libérez Salan ! » est écartée. D’ailleurs, le 18 juin, en prévision des élections, Salan et les militaires putschistes de 1961 sont libérés, y compris des hommes liés à l’attentat du Petit-Clamart, et l’amnistie est promulguée le 31 juillet. Il s’agit bien, au nom de l’union nationale, de combattre les partisans de Mai sur leur terrain en agitant la peur de la révolution et du communisme.
22En Bretagne, ces CDR et comités (Brest) ou cercles (Nantes) d’action civique réclamant dans la presse la liberté du travail se sont constitués vers la mi-mai ou lors de la généralisation de la grève les 20-21 mai (Saint-Brieuc, Dinan, Paimpol, Loudéac…)7. Des rassemblements limités ont lieu au soir du 30 mai à la préfecture de Saint-Brieuc et à Rennes où apparaît un Comité d’action pour la sauvegarde des libertés républicaines (300 personnes). Le lendemain, ils sont un millier à Loudéac, le fief de Marie-Madeleine Dienesch qui a adhéré aux CDR. Le samedi 1er juin, répondant aux très nombreuses manifestations syndicales et politiques des grévistes depuis le 13 mai, drapeaux tricolores au vent, maires ceints de leur écharpe emmenés par les députés gaullistes et les organisateurs des CDR, au moins 75 000 personnes défilent dans tout l’Ouest, dont la moitié en Bretagne (au moins 38 400), avec l’appui des préfets. La géographie de ces manifestations reflète bien l’implantation électorale et militante de l’UDR : 3 000 à 6 000 manifestants à Brest, selon les RG, conduits par le futur député Michel Cotton de Bennetot, 1 500 à Crozon, d’importants défilés dans le Léon à Lesneven (2 500) et à Saint-Pol-de-Léon (2 000). C’est le cas aussi de petites villes du Centre-Bretagne, à Loudéac (1 500), à Pontivy (1 200) ou encore à Saint-Malo (2 000) et à Vitré (200). Avec 20 000 personnes (25 000 à 30 000 selon Ouest-France), la palme revient à Nantes car à Saint-Nazaire les partisans du mouvement de Mai sont plus nombreux que les opposants. À Nantes, les CDR ont fait le forcing. Les députés gaullistes et Maurice Coudert, le leader de l’UDR, emmènent le cortège. Même si les soixante-huitards s’efforcent de réagir (des contre-manifestations à Nantes, à Saint-Nazaire, à Brest…), la dynamique politique change de camp.
23Toutes les grèves ne sont pas encore terminées en France lors du premier tour des élections législatives le 23 juin 1968 à l’issue d’une campagne électorale très brève dans un climat tendu. En Loire-Atlantique, les accrochages entre colleurs d’affiches sont fréquents et violents, car la droite et les CDR ont eu recours à des militants d’extrême droite (Action française). À Nantes, la FGDS dénonce ces « nervis fascistes ». Outre l’Union des jeunes pour le progrès (UJP), l’UDR a en effet fait appel à des gros bras du SAC venus de Bordeaux, une organisation paramilitaire avec armes à feu, talkies-walkies, chiens policiers et gyrophares, voire à des hommes du « milieu » nantais et toulousain. Jouant sur la peur d’une partie de la population, « la majorité silencieuse », UDR et RI font campagne sur le retour à l’ordre. Pourtant, lors des grèves et à Grenelle, le PCF a montré qu’il n’était nullement révolutionnaire, mais le succès des vieilles recettes électorales de l’affrontement binaire est garanti.
24Les députés sortants se représentent partout, de même que leurs adversaires de 1967, ceux de la majorité étant en position de force. L’offre de candidats s’est accrue depuis 1967 : 142 pour 33 sièges, dont 82 pour une gauche émiettée qui en présente trois au 1er tour dans 19 circonscriptions (quatre même à Saint-Brieuc contre un seul de droite). Le PCF est présent partout. Porté par les événements dans lesquels il s’est beaucoup investi et suivant les directives nationales, le PSU aligne pour la première fois 23 candidats. La droite présente dix candidatures uniques, l’UDR (21 plus deux apparentés) soutenant sept RI. Le PDM centriste en a 22. Paradoxalement, malgré l’enjeu, le taux de participation de 81,8 % est un peu inférieur à celui de l’année précédente (−0,5 %). En Bretagne, le résultat est sans appel dès le premier tour puisque l’UDR enlève neuf sièges plus Marie-Madeleine Dienesch (53 %) toujours considérée comme apparentée, ainsi que quatre RI et Xavier Hunault, un non-inscrit soutenu par la majorité (voir les tableaux I, II et III, chap. 6, p. 167, 169 et 171). René Pleven est le seul centriste d’opposition réélu au 1er tour à Dinan avec 69,9 % des voix ; mais comme il n’a pas censuré le gouvernement Pompidou, il n’avait plus d’adversaire gaulliste contre lui. La palme nationale revient à Gabriel de Poulpiquet réélu avec 88,3 % des suffrages à Landerneau contre un communiste. La Haute-Bretagne a soutenu massivement la majorité avec cinq députés en Ille-et-Vilaine (quatre UDR et le RI Isidore Renouard, 77,2 % à Redon) et quatre sur six dans le Morbihan (81,5 % pour Raymond Marcellin à Vannes, 72,1 % pour l’abbé Laudrin à Pontivy). Au second tour, le 30 juin, la majorité triomphe en emportant 28 sièges : vingt gaullistes (17 UDR, deux apparentés, le non-inscrit Arthur Charles à Saint-Brieuc qui se représentera en 1973 sous les couleurs de ce parti), sept giscardiens (RI) dont quatre dans le Morbihan où tous les candidats présentés sont élus et Xavier Hunault proche d’eux. Le bastion gaulliste du Finistère est renforcé (44,9 % des voix au 1er tour) puisque l’UDR enlève sept sièges sur huit, celui de Quimperlé étant gagné par Jean-Claude Petit (RI soutenu par l’UDR), un homme peu connu qui bat avec 60,6 % des suffrages le centriste Louis Orvoën, député MRP depuis juin 1946. De même, à Brest, Michel de Bennetot (UDR), 43,3 %, qui a organisé la grande contre-manifestation du 1er juin l’emporte dans une triangulaire contre Georges Lombard, le député-maire sortant, et un communiste, tout comme Suzanne Ploux réélue avec 45,9 % dans la même configuration à Châteaulin. Le nouveau député UNR brestois est un ancien officier de Marine devenu chef d’entreprise, suppléant de l’amiral Drogou en 1967.
25L’Ille-et-Vilaine devient aussi un bastion UDR avec cinq sièges sur six en éliminant les deux centristes à Rennes et à Vitré. À Rennes-Nord, Jacques Cressard, un jeune professeur d’histoire-géographie, l’emporte avec 53,9 contre Henri Fréville8. À Vitré, où Alexis Méhaignerie, député MRP depuis 1945, ne se représentait pas, son fils Pierre qui travaillait à Bordeaux et n’a pas eu le temps de faire campagne a été battu dès le 1er tour par l’UDR Henri Lassourd (53,5 %). À Rennes-Sud, François Le Douarec est réélu au 1er tour (55,4 %), les candidats socialistes reculant nettement par rapport à 1967 : 14,7 % pour Michel Phlipponneau (FGDS) et 5 % pour Pierre-Yves Heurtin (PSU). Michel Cointat est plus aisément réélu au 2e tour à Fougères contre Le Lann (52,9 %)9.
26L’UDR conserve ses quatre députés sortants en Loire-Atlantique. En outre, Albert Dassié (52,2 %), affichant l’étiquette gaulliste car il a eu des démêlés avec l’UDR, reprend Nantes-2 à Alain Chauvel (FGDS). La Bretagne apporte donc sa forte contribution à la majorité du général de Gaulle qui compte 354 députés sur 487, 293 UDR et 61 RI. Les centristes du PDM ont présenté 21 de leurs 22 candidats contre ceux de la majorité. La plupart de ces centristes sont sanctionnés pour avoir voté la censure : gardant 33 députés, ils perdent huit sièges en France dont quatre en Bretagne, la moitié de leurs sortants. Ils ne résistent que dans les Côtes-du-Nord où Édouard Ollivro (54 %) et Pierre Bourdellès (63 %) sont réélus au 2e tour avec l’appui de René Pleven. Paul Ihuel conserve son fief d’Hennebont (65,4 %). La présence au second tour de candidats communistes a souvent facilité leur réélection. En sièges, la déroute de la gauche est plus nette encore puisqu’elle ne garde qu’un seul député retombant quasiment à sa situation de 1958 (aucun élu). Seul Georges Carpentier (FGDS) sauve son siège à Saint-Nazaire (52,8 %) contre Étienne Garnier, le nouveau candidat de l’UDR. La FGDS n’a plus que 57 députés et le PCF 34. À Lorient, Yves Allainmat a été battu de peu par le RI Roger de Vitton (50,3 %). Ce n’est pas le cas de Roger Prat (PSU), nettement distancé à Morlaix par Pierre Lelong (UDR, 53,2 %) ; Prat ne l’avait, il est vrai, emporté que de quelques voix en 1967. De même, à Saint-Brieuc Yves Le Foll (PSU) est battu par Arthur Charles (54,6 %), un aviculteur, ancien de la JAC, président de la chambre d’agriculture depuis 1961. Il avait été au MRP, mais a un suppléant UDR.
27L’exemple des Côtes-du-Nord, que l’on peut généraliser à la région, illustre les réactions et les explications du vote. Selon le préfet : « Inscrite dans un contexte normal », « l’audience électorale » d’Arthur Charles « serait limitée ». Mais, comme partout, la peur du désordre a fait la différence car l’électorat modéré, en se mobilisant davantage, a voulu « faire barrage à l’aventure politique ». Analysant les résultats, le sous-préfet de Guingamp où Édouard Ollivro a été facilement réélu contre le communiste François Leizour insiste sur le basculement provoqué par l’allocution du général de Gaulle le 30 mai. Il en énonce les raisons : « Le réel soulagement de la grande majorité », « le refus quasi général dans l’opinion du désordre et de l’Anarchie », « l’animosité à l’égard du corps des enseignants dans le monde rural », « l’incompréhension et le désaveu des actions menées et des méthodes utilisées par les dirigeants syndicaux et de la gauche pendant les grèves » et, enfin, le souhait de réformes10. Ainsi, selon lui, des électeurs de gauche auraient voté pour la majorité. Le fossé entre les acteurs de Mai 1968 et la masse de la population ne peut être plus nettement souligné.
28Mais, si on examine de près les résultats électoraux, l’UDR (34,6 % au 1er tour) n’a progressé en Bretagne que de 0,9 % depuis mars 1967, faisant moins bien qu’au niveau national (38 %). La poussée gaulliste n’est forte qu’en Ille-et-Vilaine (44,5 %, +6,8 %), alors que ce parti a reculé dans les Côtes-du-Nord mais surtout dans le Morbihan (−7,6 %) du fait que deux UDR seulement se sont présentés contre quatre en 1967. À gauche, les résultats sont contrastés : avec 14 % (moins 1,6 % depuis un an), le PCF a perdu 11 % des suffrages engrangés en 1967. Son recul est surtout marqué dans les Côtes-du-Nord où il est passé de 25,4 % à 22,4 %, ce qui le ramène à son niveau de 1962. Ce recul s’explique par plusieurs raisons : la présence de nouveaux candidats à gauche comme René Régnault (CIR-FGDS) à Dinan, mais surtout par un transfert de voix dès le 1er tour en faveur des députés de gauche sortants. C’est très net pour les PSU à Saint-Brieuc et à Morlaix, mais aussi pour ceux de la SFIO-FGDS à Lorient et à Saint-Nazaire. Si le PCF a progressé dans six circonscriptions, au second tour les communistes n’ont pas fait le plein de toutes les voix de gauche. Au contraire, les candidats de la gauche non communiste ont gagné 1,05 % en Bretagne, dépassant le PCF en récoltant 16,8 % des voix. Mais ce rééquilibrage n’est guère visible du fait de la division des socialistes en deux formations.
29Incarnant mieux que le PCF les idées de Mai, le PSU, qui présentait 316 candidats, trois fois plus qu’en 1967, progresse légèrement dans le pays (3,94 % des voix, plus 1,61 %). En Bretagne, toujours une de ses zones de force, le PSU, qui a aligné 23 candidats, est le principal gagnant à gauche puisqu’il passe de 4,1 % des voix en 1967 à 6,6 % en 1968 : un gain brut de près de 60 % dont la moitié est récoltée par ses huit candidats de Loire-Atlantique (6,4 %). Serge Mallet, journaliste et sociologue parisien obtient de bons résultats à Nantes-2-Rezé. Le PSU progresse surtout à Châteaubriant (11,5 %) grâce à l’influence de Bernard Lambert, non-candidat mais qui a été l’un des principaux leaders syndicalistes de la « Commune de Nantes », devançant le PCF et une SFIO en net recul dans tout le département. Dans les Côtes-du-Nord, même s’il perd le siège d’Yves Le Foll arraché de haute lutte en 1967, le PSU a progressé de 11,3 % à 15,3 % des suffrages exprimés (4 candidats). Une partie des acteurs de Mai a manifestement voté pour le PSU ne suivant pas le slogan « Élections, piège à cons ! » avancé par une fraction de l’extrême gauche étudiante. Quant à elle, la FGDS (24 candidats) a reculé de 1,5 point, de 11,4 % à 9,9 %, mais moins qu’au niveau national. L’absence de candidat socialiste à Fougères et à Saint-Malo a permis la réélection des UDR Michel Cointat et Yvon Bourges (53,5 %) dès le premier tour. Mais la FGDS a progressé dans des villes très mobilisées (Brest, Lorient, Nantes, Saint-Nazaire). À l’issue de cette consultation exceptionnelle qui sort le pays de la crise de Mai 1968, les droites sont hégémoniques en Bretagne, le centre affaibli même si avec René Pleven des réalignements semblent s’amorcer, alors que les gauches plafonnent à 30,8 % des voix. Contrairement à une idée reçue, il n’y a pas en 1968 en Bretagne un effondrement du vote de gauche (un recul de 0,6 % sur 1967), mais une redistribution en faveur du PSU et au détriment du PCF et de la FGDS. Il n’en reste pas moins qu’avec sept suffrages exprimés sur dix, l’image d’une région acquise à la droite et au centre est confortée.
30Juin 1968 : c’est donc une majorité introuvable, absolue pour l’UDR (293 sièges), alors que les centristes, l’opposition et la gauche sont très affaiblis. Pourtant, le général de Gaulle remercie Georges Pompidou, le grand vainqueur de ces élections législatives, en nommant le 12 juillet 1968 Maurice Couve de Murville, un fidèle exécutant, à la tête du nouveau gouvernement. Le décalage avec une société contestataire qui s’est affirmée en mai 1968 est flagrant et il ne va cesser de s’amplifier.
La réforme régionale : voyage en Bretagne du général de Gaulle (31 janvier-2 février 1969) et dernier grand discours à Quimper
31Afin de refonder sa légitimité personnelle dans les urnes par un référendum, le général de Gaulle s’empare de la réforme régionale en la couplant à une réforme constitutionnelle, à savoir celle du Sénat. Jean-Marcel Jeanneney, ministre d’État sans portefeuille, élabore les propositions : création d’un conseil régional placé sous la tutelle du préfet de région chargé de suivre l’application du plan d’équipement. Les 3/5e de ses membres doivent être désignés par les élus de la région, le reste nommé par les organisations professionnelles. Ce qui va davantage poser problème est le remplacement du Sénat et du Conseil économique et social par un Sénat consultatif désigné de la même manière. De Gaulle veut supprimer la fonction législative de la seconde Chambre qui s’est opposée à lui depuis 1958. Comme en 1962, sénateurs, élus locaux, opposition rejettent cette réforme. Les dirigeants du CELIB se divisent : si Joseph Martray appelle à voter oui, René Pleven oppose, après celui de 1962, un deuxième non au général de Gaulle11. En effet, si le député de Dinan s’est rapproché de Georges Pompidou pendant les événements de Mai, il poursuit son jeu de bascule parlementaire à l’automne de 1968 en votant certaines réformes importantes (loi Edgar Faure sur l’enseignement supérieur, loi sur l’exercice du droit syndical dans l’entreprise), en en rejetant d’autres (ordonnances sur la Sécurité sociale) ou en s’abstenant (projet de loi de finances). Mais, dès octobre 1968, devant le congrès de la Fédération régionaliste française puis devant son conseil général, tout en défendant la décentralisation, il s’est élevé contre le recours au référendum plaidant pour la voie parlementaire. Une grande partie des élus centristes et ceux de l’opposition de gauche partagent son point de vue. Mais de Gaulle persiste et signe.
32Comme en 1960, le chef de l’État choisit la Bretagne, une région fidèle électoralement et à forte identité régionale, pour venir annoncer son référendum au cours d’un voyage de trois jours12. Rien n’a été laissé au hasard dans ce déplacement de portée nationale : le chef de l’État est accompagné de six ministres et de 200 journalistes. La presse annonce un discours à Quimper aussi important que celui de Bayeux du 16 juin 1946. Afin d’essayer de convaincre la fraction des élites bretonnes réticente, Charles de Gaulle débute sa visite le 31 janvier 1969 à Rennes en participant à une réunion de la CODER de Bretagne. Il rend un hommage appuyé à l’action du président Pleven et au CELIB, un modèle à suivre dans tout le pays selon lui, évoquant son amitié pour son ancien bras droit de Londres du temps de la France libre, oubliant leurs affrontements de l’époque du RPF et l’opposition du député de Dinan à sa politique extérieure depuis 1962. Dans le Finistère, le 1er février il rencontre les députés UDR Gabriel de Poulpiquet et Pierre Lelong à Brest, puis Edmond Michelet à Bénodet.
33Ce voyage est sous haute surveillance policière. Il a d’abord été préparé par un coup de filet policier qui démantèle le 1er FLB. L’organisation clandestine avait organisé des attentats à l’explosifs le 1er septembre 1968 dans sept villes différentes puis deux autres le 7 septembre qui ont fait d’importants dégâts dans les perceptions de Pont-Aven et de Rosporden (Finistère Sud). Le 15 septembre, le FLB annonce la suspension, contestée par certains de ses membres, des « opérations militaires » jusqu’au voyage présidentiel. Le Monde du 5 novembre y voit une « scission » entre une tendance « molle », celle de Yann Goulet un ancien du PNB installé en Irlande, et une tendance « dure » installée à Paris qui voudrait créer une Armée révolutionnaire bretonne (ARB). Mais la trêve annoncée n’est pas respectée puisqu’en octobre et novembre quatre attentats contre des bâtiments publics sont perpétrés à Nantes, puis trois autres en région parisienne. Avant la venue du général de Gaulle en Bretagne, Raymond Marcellin a décidé de neutraliser ce FLB dont les effectifs sont évalués à une soixantaine de membres actifs appuyés par une quarantaine de personnes et une centaine de sympathisants. La police procède à une soixantaine d’arrestations dans la région et à Paris ; 52 militants sont emprisonnés à la prison de la Santé à Paris. Le très actif noyau nantais, peu discipliné et divisé, tombe à la fin du mois de décembre 1968 (18 interpellations), suivi au début du mois de janvier 1969 par la 4e kevrenn des Côtes-du-Nord comptant trois prêtres. C’est une opération très médiatisée qui permet d’élucider 28 attentats sur 31 et de récupérer de grosses quantités d’explosifs et des détonateurs dérobés dans les mois précédents. L’opération est désapprouvée par de nombreuses personnalités bretonnes, dont René Pleven, qui expliquent que le FLB est le produit du retard de développement de la région. Il est vrai que le FLB jouit d’une certaine sympathie dans différents milieux, y compris chez des élus. Par l’entremise de l’association Skoazell Vreizh, la solidarité matérielle s’organise en faveur des « prisonniers politiques bretons » qui sont progressivement libérés dans les semaines suivantes dans l’attente de leur procès.
34En outre, lors du voyage présidentiel, 150 personnes sont surveillées : des militants du mouvement breton (45 %), des militants anarchistes, d’extrême gauche et d’extrême droite. Dans le Finistère, la gauche non communiste, les organisations bretonnes (UDB, JEB, Ar Falz) et les syndicats ouvriers en profitent pour débattre de la régionalisation et, selon eux, du retard économique qui serait dû à la « situation coloniale » de la Bretagne. Mais, afin d’éviter toute provocation, ces organisations appellent à ne pas aller manifester à Quimper. D’ailleurs, la police filtre les entrées de la ville et refoule des jeunes gens aux cheveux un peu trop longs. Les RG attendaient de 15 000 à 20 000 personnes à Quimper le 2 février ; la presse évalue l’assistance à 8 000. Raymond Marcellin a fait quadriller la place de la Résistance par des policiers en civil et des hommes du SAC qui interpellent immédiatement « les rares agitateurs » (28) qui osent sortir des pancartes, des drapeaux rouges ou bretons, ou scander des slogans hostiles13. Dans la foulée de Mai 1968, les revendications bretonnes économiques, culturelles et linguistiques s’imposent dans le débat public.
35Conscient de la montée d’un régionalisme protestataire, dans son discours de Quimper de Gaulle rend longuement hommage à la fidélité des Bretons à la patrie lors des deux guerres mondiales, affirmant que « l’Armorique fait depuis toujours partie intégrante de la France », prononçant même quatre vers en breton écrits par Charles de Gaulle, son oncle poète. C’est sans doute sa manière de rendre hommage à la langue bretonne, mais c’est fort mal perçu par les associations culturelles bretonnantes qui crient à la provocation. Il fait aussi l’éloge des engagements de modernisation arrachés à Georges Pompidou par une délégation du CELIB le 31 mai 1968 (port pétrolier à Brest, réseau routier…), défendant la loi de régionalisation et très brièvement la réforme du Sénat. Annonce nationale : le référendum promis le 24 mai 1968 se tiendra « au printemps » 1969. Les dés de son second septennat sont jetés.
Le référendum du 27 avril 1969 : de Gaulle toujours majoritaire en Bretagne
36La tension sociale est quelque peu retombée. En avril 1969, la campagne référendaire prend une tournure très claire pour bon nombre de citoyens : ce sera un vote pour ou contre de Gaulle. Nullement convaincu par le discours de Quimper, René Pleven appelle à deux reprises à répondre non dans les éditoriaux du Petit Bleu des Côtes-du-Nord. Le 19 avril, « Motif d’un non ! » avance des arguments techniques et financiers pour refuser une décentralisation trop partielle mais aussi des raisons politiques : la non-élection des conseillers régionaux au suffrage universel et la réduction des pouvoirs du Sénat qui, selon lui, renforcerait trop le pouvoir exécutif et ferait glisser le pays vers un régime présidentiel. Il reprend son argumentaire de mai 1946 contre l’Assemblée unique. Le 24 avril, soutenu par son microparti l’Union démocratique des Côtes-du-Nord, le député de Dinan récuse une pratique institutionnelle de type plébiscitaire car de Gaulle a mis son départ dans la balance ; il conclut son éditorial : « Il faut savoir dire “non”, même à quelqu’un qu’on aime. » Selon le politologue François Goguel, le Général aurait été plus affecté par cette prise de position de Pleven que par celle de Valéry Giscard d’Estaing qui votera non, contrairement à Raymond Marcellin, mais laisse la liberté de vote aux RI. Le choix de Pleven a certainement compté en Bretagne, même si le oui l’emporte très largement, y compris dans sa circonscription de Dinan (52,2 %).
37Seuls l’UDR et ses députés font campagne pour le oui sur le terrain. Le 27 avril 1969, ayant voté à 81,3 %, la région reste fidèle à l’homme du 18-juin en répondant oui aux deux questions à 55,8 %, sauf dans les Côtes-du-Nord : 50,7 % de non. Mais dans le pays, le non, qui totalise 53,18 % des suffrages exprimés, l’a emporté dans 71 départements sur 95. En Bretagne, le oui oscille entre 52,6 % en Loire-Atlantique et 61,2 % dans le Morbihan. Dans les bastions des RI Morbihannais, la déperdition des voix de droite par rapport à 1967-1968 est forte. La baisse du vote gaulliste est sensible partout dans l’Ouest mais, nouveauté, le non l’a emporté dans l’Ouest bretonnant des Côtes-du-Nord, dans la circonscription de Saint-Nazaire (57,6 %), mais aussi à Nantes (54,7 %) et à Rennes (52,5 %).
⁂
38À l’issue de deux années de turbulences et de montée de la contestation sociale, la géopolitique régionale ne sort pas modifiée du référendum d’avril 1969. Les Bretons font toujours majoritairement confiance au général de Gaulle. Néanmoins, la « grande peur » de 1968 écartée, les notables et une fraction des centristes ont pris leur revanche sur le référendum de 1962 et sur le gaullisme autoritaire. Quant à l’électorat de gauche, il obtient un départ espéré en mai 1968. Ouest-France du 28 avril citant de Gaulle titre sobrement : « Je cesse mes fonctions à midi. » Ce référendum paraît conforter une Bretagne toujours ancrée à droite. Il n’en reste pas moins que l’essor des luttes sociales, urbaines et paysannes de 1967 et 1968 a introduit des facteurs de changement, même s’ils sont encore peu visibles électoralement. Ce référendum perdu clôt les onze années de la République gaullienne.
Notes de bas de page
1 Il a été approché pour être le candidat de la FGDS à Saint-Malo en 1967.
2 Rio Anthony, « Olivier Guichard et le premier acte de son implantation locale en Loire-Atlantique », in Laurent Jalabert (dir.), Gaullistes dans l’Ouest atlantique dans les élections législatives de 1958 à 1981, op. cit., p. 151-163.
3 Le dirigeant national du PSU Serge Mallet a tenté de se présenter à Nantes-3-Rezé mais y a renoncé.
4 Prigent François, Les réseaux socialistes en Bretagne des années 1930 aux années 1980, op. cit., t. 1, p. 238-239.
5 Pour une analyse détaillée des mouvements sociaux en 1967-1968, voir Bougeard Christian, Les années 68 en Bretagne, op. cit., chap. 3 et 4.
6 Pozzi Jérôme, Les Mouvements gaullistes, op. cit., p. 233-241. À Paris, le CDR national financé par l’UDR occupe les mêmes locaux que le service d’action civique (SAC) et l’Association nationale pour le soutien à l’action du général de Gaulle. Ces mouvements fournissent des cadres aux CDR.
7 Bougeard Christian, Les années 68 en Bretagne, op. cit., p. 144-147.
8 Dans la ville étudiante très mobilisée en mai et juin, cinq candidats se présentent contre le député sortant au 1er tour : Cressard (UDR), Lecomte (FGDS, 7,6 %), Foulon (PSU, 9,2 %), Brault (PCF), Bothorel (Front breton). Il y a aussi cinq candidats à Rennes-Sud.
9 Collinot, le candidat de la SFIO de 1967, ne s’est pas représenté car ce parti n’a à Fougères « qu’un noyau faible et mou », selon un rapport de son secrétaire fédéral du 22 juin 1968. Le PSU Rolland (7,7 %) est un « parachuté », secrétaire général de la mairie de Rennes.
10 ADCA. 1192W 49. Élections législatives 1968.
11 Marzin Fabrice, « Le CELIB face aux années 1968 », in Christian Bougeard et al. (dir.), L’Ouest dans les années 68, op. cit., p. 161-173.
12 Gourlay Patrick, « Les voyages du président de Gaulle en Bretagne », ibid., p. 145-159.
13 Le Télégramme, 3 février 1969.
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