Introduction
p. 9-16
Texte intégral
1Le 9 juillet 1628, deux de ses hommes informent Samuel de Champlain de l’arrivée à Tadoussac de six vaisseaux. Cette annonce surprend et inquiète le gouverneur de Québec. En effet, il n’est pas habituel qu’un tel nombre de navires se rassemble pour faire la traite. Il décide donc d’envoyer un des siens, accompagné de deux autochtones, en reconnaissance. Parallèlement, et bien qu’il ignore que la France et l’Angleterre soient en guerre depuis près d’un an, il prépare ses hommes et l’habitation qu’il commande à la venue d’ennemis. Les nouvelles ne se font pas attendre longtemps. Moins d’une heure après son départ, l’individu qu’il a envoyé vers Tadoussac revient, accompagné d’un nommé Foucher. Ce dernier raconte qu’il s’est sauvé des Anglais qui sont descendus au cap Tourmente, situé à environ 50 kilomètres à l’est de Québec, ont fait prisonnières les personnes qui s’y trouvaient, tué une partie du bétail qui y paissait et brûlé les maisons qui s’y dressaient. Manifestement, les tensions qui ne faisaient que monter entre les deux royaumes depuis l’année 1625 avaient eu raison de la paix qui régnait entre eux depuis 1563.
2Voyant ses craintes se confirmer, et ne doutant pas que les agresseurs se pointeront rapidement devant lui, Champlain mobilise l’ensemble de ses maigres forces afin de mettre sa place en état de se défendre. Dès le lendemain, les Français voient une barque s’approcher de leur établissement. Six personnes s’y trouvent, des Basques capturés plus tôt par les Anglais. David Kirke, le commandant de l’expédition ennemie, leur a donné mission de transmettre une lettre au gouverneur de l’habitation. Dans celle-ci, il l’informe avoir reçu commission de la part de son roi de s’emparer du Canada et de l’Acadie. Parti à la tête d’une flotte de dix-huit navires, Kirke avait déjà mis la main sur la maison de Miscou, située dans le golfe du Saint-Laurent, et arraisonné tous les vaisseaux rencontrés depuis son arrivée dans les eaux du fleuve, dont un qui, affirme-t-il, venait approvisionner les habitants de Québec. La prise de ce navire et le sac de la ferme du cap Tourmente privant les Français du ravitaillement nécessaire à l’hivernement à venir, Kirke leur propose de se rendre tout de suite afin d’éviter une confrontation sanglante et des souffrances inutiles.
3Champlain rejette cet ultimatum, car il espère l’arrivée prochaine d’une flotte chargée de le ravitailler. Il fait croire à son ennemi que ses hommes et lui sont bien pourvus en vivres et qu’ils sauront passer à travers l’hiver malgré les destructions opérées par les Anglais dans les environs. Il affirme qu’ils sont prêts à leur faire face les armes à la main, que les défenses érigées autour de l’habitation en font un endroit difficile à prendre, malgré ce que l’on ait pu donner à entendre à Kirke. Ce coup de bluff a raison des agresseurs qui décident de ne pas passer à l’attaque. Après avoir brûlé les vaisseaux qu’ils ont pris et qu’ils ne peuvent ramener avec eux, ils lèvent l’ancre et font voile vers l’Angleterre en promettant de revenir l’année suivante.
4Resté à Québec avec ses hommes, Champlain fait face à la rude réalité. Les secours attendus ne se concrétisent pas. Les vivres sont rares et l’hiver promet d’être très difficile. Si les Anglais devaient se représenter devant l’habitation, comme ils s’étaient engagés à le faire, avant que des navires français ne viennent au secours de la petite garnison, celle-ci n’aurait d’autres choix que de se rendre à l’ennemi. L’inévitable se produit en juillet 1629, alors que les Kirke remontent à nouveau le Saint-Laurent. Champlain ne peut que leur ouvrir les portes de sa place le 20 juillet, sans savoir que la France et l’Angleterre avaient signé la paix à Suse, petite ville située en Italie du nord, le 24 avril précédant1. Quelques jours plus tôt, des Écossais étaient débarqués au Port aux Baleines, sur l’île du Cap-Breton, alors que certains de leurs compagnons, menés par William Alexander junior, étaient descendus à Port-Royal, en Acadie. Vingt-cinq ans après les débuts de leur installation en Amérique du Nord, les Français en sont ainsi chassés.
5Dès qu’elles prennent connaissance de la prise ces événements, les autorités françaises réclament la restitution des territoires qu’elles considèrent leur. En effet, l’article 8 du traité de Suse prévoit que :
« d’autant qu’il y a beaucoup de Vaisseaux en Mer avec Lettres de marque, & pouvoir de combattre les ennemis, qui ne pourront pas si tôt entendre cette Paix, ni recevoir ordre de s’abstenir de toute hostilité ; Il sera accordé par cet Article, que tout ce qui se passera l’espace de deux mois prochains après cet Accord fait, ne dérogera ni empêchera cette Paix, ni la bonne volonté de ces deux Couronnes ; à la charge toutefois, que ce qui sera pris dans l’espace des deux mois depuis la signature du Traité, sera restitué de part & d’autre2 ».
6Les événements qui se produisent en Amérique surviennent après l’échéance du délai de grâce de deux mois prévu par le traité. La prise de Québec et la descente des Écossais en Acadie semblent donc illégales et leur retour à la France ne devrait pas poser de difficultés. Malgré tout, dix-huit mois de négociations sont nécessaires aux deux royaumes pour en arriver à une entente sur la question, et trois ans s’écoulent avant que des Français puissent fouler à nouveau ces terres. La prise de Québec, le seul succès notable remporté par les Anglais lors de la guerre de 1627-1629, outre l’arraisonnement en Hollande d’un vaisseau appartenant au gouverneur de l’île de Ré, et la descente des Écossais en Acadie sont des événements mal connus de part et d’autre de l’Atlantique. Les raisons expliquant le délai de trois ans entre le départ des Français des rives du Saint-Laurent et de la baie de Fundy et leur retour sont aussi largement ignorées. Pourtant, ce qui se produit alors est riche d’enseignement sur les situations que vivent les royaumes de France et d’Angleterre et sur la dynamique des relations internationales à cette époque. Surtout, ces événements mettent la table à la lutte qui opposera la France et l’Angleterre en Amérique du Nord pour les 130 années à venir, et qui se terminera en 1763 par la cession de la Nouvelle-France à la Grande-Bretagne.
7Les actes perpétrés par les frères Kirke à Québec et William Alexander en Acadie s’inscrivent dans une guerre qui éclate entre la France et l’Angleterre en juillet 1627. Les hostilités commencent lorsqu’une flotte anglaise se présente devant la ville de La Rochelle afin, officiellement, d’offrir l’aide de Charles Ier aux huguenots français qui, depuis le début des années 1620, luttent contre le gouvernement de Louis XIII. Ce dernier cherche à affaiblir la structure politique héritée par ses sujets réformés au terme de la période des troubles de religion qui avait secoué le royaume durant la seconde moitié du xvie siècle. Cette structure repose sur des villes de sûreté – La Rochelle est l’une d’entre elles – et sur la tenue d’assemblées politiques qui donnent l’occasion aux réformés français de discuter des aléas de leur existence, de s’entendre sur des doléances à présenter au roi et, dans un contexte tendu tant sur la scène nationale qu’internationale, de s’organiser politiquement et militairement. La tenue de ces assemblées est d’autant plus sensible que des troubles politiques qui ont éclaté en 1618 en Allemagne gagnent progressivement l’ensemble du continent. Dans ce contexte, le roi d’Angleterre Charles Ier et son principal ministre et favori, le duc de Buckingham, décident d’offrir leur aide à leurs coreligionnaires rochelais, d’où l’expédition de juillet 1627 qui est également motivée par d’autres facteurs relevant du contexte international de l’époque, des entraves au commerce provoquées par les conflits du temps et de la culture politique du xviie siècle, notamment l’importance pour les monarques de l’époque de préserver leur honneur.
8Ces rapides éléments de contexte permettent de comprendre pourquoi les événements qui se produisent en 1629 en Amérique du Nord sont bien souvent laissés dans l’oubli par les historiens. Les chercheurs qui s’intéressent à l’histoire de la France se questionnent davantage sur la construction de l’État sous Louis XIII que sur le développement de ses colonies à la même époque. Ils inscrivent ce qui se déroule à La Rochelle dans la continuité des troubles de religion qui ont éclaté en 1562. L’échec de l’expédition anglaise, menée par Buckingham lui-même, permet d’ailleurs au gouvernement de Louis XIII de venir finalement à bout de la résistance huguenote. L’édit d’Alès du 28 juin 1629, qui met fin aux révoltes protestantes, supprime le privilège de leurs assemblées politiques et leur enlève leurs places de sûreté. L’épisode de La Rochelle fournit donc à Louis XIII et à son principal ministre, le cardinal de Richelieu, une occasion d’affirmer l’autorité de la monarchie sur l’ensemble des Français, et une opportunité d’amener le royaume plus loin sur la voie de la modernité. Ce qui se déroule alors en Amérique du Nord cadre mal avec ce schème narratif, même si le développement de la marine française, du commerce et des colonies qui y est associé joue un rôle central dans la stratégie globale de Richelieu3. Le cardinal, d’ailleurs, préside en 1627 à la fondation de la Compagnie des Cent-Associés qui reçoit le mandat de développer la présence française dans la vallée du Saint-Laurent. À cet égard, certains chercheurs mentionnent, sans s’y attarder, la prise de Québec en 1629, mais en omettant ce qui se déroule en Acadie, alors que c’est le sort de cette région qui retarde la conclusion d’un accord définitif entre les deux royaumes4.
9Pour leur part, les historiens qui s’intéressent à cette période dans le cadre britannique ont longtemps été mobilisés par le débat entourant les origines de la guerre civile qui éclate dans ce royaume en 1642 et qui mènera, sept ans plus tard, au procès et à l’exécution de Charles I5. Dans le concert de livres qui se penchent sur les causes proches et lointaines de la guerre civile anglaise, il est virtuellement impossible de trouver une trace des expéditions des Kirke et d’Alexander vers le Saint-Laurent et l’Acadie. Les événements qui se déroulent sur le continent, notamment la guerre de Trente Ans, et les relations tendues entretenues par l’Angleterre avec ses deux grandes rivales, l’Espagne et la France, sont analysés en fonction de leur impact sur la vie politique nationale6. Les événements qui se déroulent en Amérique du Nord en 1629 n’ont aucune influence sur celle-ci, et ne sont donc pas présentés par ces chercheurs.
10Le même constat s’applique aux travaux portant sur l’histoire des relations internationales de l’époque7. Ceux-ci sont évidemment dominés par la guerre de Trente Ans dans laquelle l’Angleterre s’implique dès ses origines, le gendre de Jacques Ier, l’électeur palatin Frédéric, se trouvant au cœur du conflit. La France, pour sa part, qui se préoccupe du maintien de l’équilibre entre les grandes puissances européennes, garde l’œil sur les actions des Habsbourg, notamment en Italie du nord. La décennie 1620 est ponctuée d’affrontements sanglants et de tentatives de négociations complexes, impliquant de nombreux États, afin d’essayer de trouver une fin pacifique à ce conflit qui, commencé en Bohême, finit par embraser l’ensemble de l’Europe. L’importance de cette guerre pour la destinée de nombreux pays européens – elle se termine entre autres par la reconnaissance de l’indépendance des Pays-Bas, par la reconnaissance du calvinisme dans l’Empire et par l’émergence de la Prusse dans le concert des nations – explique que ses historiens passent sous silence ces événements peu connus qui prennent place sur l’autre rive de l’Atlantique.
11Le lecteur peut difficilement en vouloir à ces différents spécialistes d’histoire européenne de ne pas parler de ce qui se produit en Amérique du Nord lorsqu’il constate que des chercheurs qui consacrent leurs travaux à l’histoire du Canada omettent eux-mêmes de mentionner l’épisode acadien de 16298. D’autres traitent de l’ensemble des événements, mais sans faire de distinction entre la prise de Québec par les Anglais et la descente des Écossais à Port-Royal, une différence qui, nous le verrons, est fondamentale9. D’autres, toutefois, peu nombreux, signalent bien la dissemblance entre les actions anglaise et écossaise10.
12Si les événements entourant la prise de Québec et de l’Acadie et leur restitution à la France sont généralement passés sous silence par les historiens, cela ne veut pas dire que leur étude ne puisse pas nous apporter des éclairages nouveaux sur un certain nombre d’éléments de cette époque11. L’événement, selon Bernard Guenée, « met à nu, de façon exemplaire, les structures et ressorts du monde qui l’ont permis et sécrété12 ». Le sort des territoires français d’Amérique s’inscrit dans un large contexte qu’il faut saisir et analyser pour bien le comprendre. Les relations qu’entretiennent la France et l’Angleterre dans les années 1620 sont ainsi riches d’enseignement sur la culture politique qui animent alors les gouvernements et sur les forces qui agissent sur les relations internationales du temps. Elles témoignent de la persistance de comportements et d’attitudes sociales et politiques, comme l’importance attachée à leur réputation et à leur honneur par les monarques, et leur propension à intervenir dans les affaires de leurs voisins. Elles illustrent l’apparition de préoccupations nouvelles pour les États, notamment relativement à l’implantation et au développement de leurs colonies d’Amérique qui, pour la première fois, s’invitent dans la sphère diplomatique. Elles questionnent, un siècle après le début de la réforme protestante, la place occupée par la religion dans les rapports entre les États. Elles montrent également que certains éléments qui alimenteront la guerre qui fera rage de 1756 à 1763 trouvent leur origine dans les débuts de l’aventure coloniale.
13L’histoire de l’Europe au xviie siècle a été généralement écrite sous un angle national. Ceci est une conséquence de la montée de l’État-nation qui a vu dans l’histoire un outil utile, voire indispensable, à sa construction. Notre travail est, pour sa part, basé sur la prémisse que les différentes histoires nationales sont connectées entre elles, un constat qui s’applique également aux histoires coloniales et métropolitaines. Il fait donc sienne la constatation faite par Leopold von Ranke en 1875 qui mettait l’emphase sur « l’interdépendance des dissensions européennes en matière de politique et de religion » au cours du xviie siècle13. Bien sûr, les chercheurs qui s’intéressent à l’angle international des événements sont particulièrement sensibles à cette approche. John H. Élit a ainsi soutenu que l’histoire britannique ne devait pas être insulaire : « Notre histoire nationale », a-t-il écrit, « a été intimement connectée au fil des siècles avec l’histoire de l’Europe14. » Nous chercherons donc à voir quelles forces globales ont pu jouer un rôle dans les événements survenus en Amérique du Nord en 1629. À ce titre, nous ouvrons le champ de l’histoire atlantique, une nouvelle approche de l’histoire coloniale qui se veut davantage sensible aux interactions qui se manifestent entre les différentes parties qui constituent le monde Atlantique, à la sphère diplomatique15.
14Le premier chapitre de ce livre présente les différents éléments qui amènent la France et l’Angleterre sur le chemin de la discorde. Unis dans leur opposition aux Habsbourg, les deux royaumes n’arrivent pas à s’entendre sur une politique commune, malgré les espoirs mis dans le mariage de Charles Ier et d’Henriette-Marie de France qui est célébré en 1625. Les Anglais considèrent l’empereur comme leur principal ennemi, et l’Allemagne comme le champ de bataille primordial, alors que les Français ont davantage l’œil fixé sur le roi d’Espagne et le nord de la péninsule italienne. Sur la scène nationale, Louis XIII est aux prises avec les révoltes des huguenots, auxquels Jacques Ier ne veut pas donner son appui, entre autres parce qu’il réprouve la prise d’armes de sujets contre leur prince légitime. Mais il ne peut abandonner tout à plein ses coreligionnaires, malgré qu’il cherche à la même époque à signer une alliance avec l’Espagne dans l’espoir de venir en aide à son gendre, l’électeur palatin, principale victime des premières années de la guerre de Trente Ans. Ces tentatives de rapprochement avec Madrid sont en porte-à-faux avec les intérêts français et ne sont pas bien accueillis par de nombreux Anglais qui voient dans les événements qui se produisent en Allemagne et en France les signes d’une offensive généralisée des forces catholiques continentales contre le protestantisme, des appréhensions qui ne font pas disparaître les noces de Charles et d’Henriette. Alors que leurs rapports en Europe semblent se compliquer de jour en jour, la France et l’Angleterre s’affrontent également dans leurs initiatives coloniales nord-américaines, des entreprises tardives si l’on considère ce que l’Espagne et le Portugal ont déjà réalisé, qui les placent dans des trajectoires appelées, immanquablement, à se croiser.
15Les quatre chapitres suivants examinent la situation européenne du temps, et particulièrement l’attitude adoptée par les rois de France et d’Angleterre face aux tensions qui secouent l’Allemagne. Le projet de mariage anglo-espagnol, dont la concrétisation, selon ses partisans, devait paver la voie à la fin du conflit allemand, forme le cœur du deuxième chapitre de ce livre. L’échec de ces négociations, comme nous le verrons dans le troisième chapitre, ouvre la porte à un rapprochement entre la France et l’Angleterre qui se traduit par l’ouverture de pourparlers visant à unir le prince de Galles et la princesse Henriette-Marie. Ce rapprochement ne se traduit pas uniquement par une union dynastique, le quatrième chapitre explore également la collaboration politique et militaire qui se développe entre les deux royaumes. Toutefois, comme le montre le cinquième chapitre, leur accord ne leur permet pas de venir à bout des Habsbourg qui règnent à Vienne et à Madrid, et notamment de ceux d’Espagne. En effet, la France et l’Angleterre ne sont pas en mesure de coordonner efficacement leurs efforts, ce qui attisent les tensions entre les deux rives de la Manche.
16Le livre se conclut par quatre chapitres qui se consacrent à la guerre anglo-française et aux négociations qui mènent aux signatures des traités de Suse et de Saint-Germain-en-Laye. Les différends qui s’accumulent entre les deux royaumes sont examinés dans le sixième chapitre. L’impossibilité de les régler ouvre la porte à l’expédition lancée en juillet 1627 par Charles Ier et Buckingham vers les côtes françaises, qui fait l’objet du septième chapitre. Son échec donne la possibilité aux diplomates vénitiens de négocier la paix entre Londres et Paris, alors que Louis XIII vient à bout de ses sujets huguenots. Mais la paix signée à Suse est loin de régler l’ensemble des différends qui nuisent aux relations entre les deux royaumes. Le huitième chapitre se consacre au travail des ambassadeurs extraordinaires désignés par Louis XIII et Charles Ier afin de trouver une solution aux différents irritants qui subsistent malgré la fin des hostilités. Leur travail se complexifie lorsqu’ils apprennent la nouvelle des descentes anglaise et écossaise à Québec et à Port-Royal. Le livre se termine par la présentation des événements survenus en Amérique du Nord et des efforts déployés par le marquis de Châteauneuf, représentant du roi de France dans ces dernières négociations, afin que ces territoires soient restitués à la France, ce qui se fera sans que l’Angleterre ne reconnaisse la souveraineté française sur ces terres d’Amérique.
17La situation des deux royaumes étudiés offre d’indéniables similitudes. L’Angleterre voit une nouvelle dynastie s’efforcer de s’imposer dans un jeu politique complexifié par l’importance des enjeux religieux liés à l’héritage de la réforme anglicane et des enjeux diplomatiques devenus centraux après les débuts de la guerre de Trente Ans. En proie à la résistance nobiliaire à l’autorité royale et au réveil de la question huguenote, la France de Louis XIII offre un tableau assez proche de celui de sa voisine d’outre-Manche. Lorsque la guerre éclate en 1627, Louis XIII n’est pas un roi au faîte de sa puissance. Malgré ces crises internes qui les affaiblissent, la France et l’Angleterre ne sont pas dénuées d’ambition, particulièrement sur la scène coloniale. Ces tensions se retrouvent au cœur de l’ouvrage que nous proposons.
Notes de bas de page
1 Les Œuvres complètes de Champlain, éd. Éric Thierry, Québec, Septentrion, 2019, t. 2, p. 988-995, 1033-1044.
2 « Traité de Paix et Confédération entre Louis XIII. Roi de France & Charles I. Roi d’Angleterre, fait à Suse le 24 avril 1629 », Corps universel diplomatique du droit des gens ; contenant un recueil des traitez d’alliance, de paix… de toutes les conventions… & autres contrats, qui ont été faits en Europe, depuis le regne de l’empereur Charlemagne jusques à présent, éd. J. Dumont, Amsterdam, 1726-1731, vol. 5, 2e partie, p. 580.
3 Parmi les historiens de la France qui ne parlent pas des événements qui surviennent au Canada et en Acadie à cette époque, mentionnons : Chevallier Pierre, Louis XIII, Paris, Fayard, 1979 ; Bercé Yves-Marie, La naissance dramatique de l’absolutisme 1598-1661, Paris, Éditions du Seuil, 1992 ; Blanchard Jean-Vincent, Richelieu. La pourpre et le pouvoir, Paris, Belin, 2012.
4 Tapié Victor Lucien, La France de Louis XIII et de Richelieu, Paris, Flammarion, 1967, p. 241 ; Treasure Geoffrey Russell Richards, Cardinal Richelieu and the Development of Absolutism, Londres, Adam & Charles Black, 1972, p. 208-209 ; Carmona Michel, La France de Richelieu, Paris, Fayard, 1984, p. 187 ; Castagnos Pierre, Richelieu face à la mer, Rennes, Éditions Ouest-France, 1989, p. 74-75 ; Mousnier Roland, L’homme rouge ou la vie du cardinal de Richelieu (1585-1642), Paris, Robert Laffont, 1992 p. 336 ; Hildesheimer Françoise, Richelieu, Paris, Flammarion, 2004, p. 182 ; Petitfils Jean-Christian, Louis XIII, Paris, Perrin, 2008, p. 630 ; Bély Lucien, La France au xviie siècle. Puissance de l’État, contrôle de la société, Paris, PUF, 2009, p. 191.
5 Elton Geoffrey R., « A High Road to Civil War ? », in C. H. Carter (éd.), From the Renaissance to the Counter-Reformation. Essays in Honour of Garrett Mattingly, New York, Random House, 1965, p. 325-347 ; Russell Conrad, Parliaments and English Politics, 1621-1629, Oxford, Clarendon Press, 1979 ; Russell Conrad, The Causes of the English Civil War, Oxford, Oxford University Press, 1990 ; Burgess Glenn, Absolute Monarchy and the Stuart Constitution, New Haven, Yale University Press, 1996 ; Sharpe Kevin, The Personal Rule of Charles I, New Haven, Yale University Press, 1992 ; Morrill John, The Nature of the English Revolution, Londres, Longman, 1993 ; Cogswell Thomas, The Blessed Revolution. English Politics and the Coming of the War, 1621-1624, Cambridge, Cambridge University Press, 1989 ; Cust Richard, The Forced Loan and English Politics, 1626-1628, Oxford, Clarendon Press, 1987 ; Hugues Ann, The Causes of the English Civil War, Houndsmills, Palgrave Macmillan, 1998 (1991).
6 Aucun des livres cités plus haut n’en parle. À cette liste peuvent se rajouter : Gregg Pauline, Charles Ier, Paris, Fayard, 1984 ; Hirst Derek, Authority and Conflict. England, 1603-1658, Cambridge, Harvard University Press, 1986 ; Reeve L. John, Charles I and the Road to Personal Rule, Cambridge, Cambridge University Press, 1989 ; Smith David L., A History of the Modern British Isles 1603-1707, Oxford, Blackwell, 1998 ; Braddick Michael J., State Formation in Early Modern England c. 1550-1700, Cambridge, Cambridge University Press, 2000 ; Scott Jonathan, England’s Troubles. Seventeenth Century English Political Instability in European Context, Cambridge, Cambridge University Press, 2000.
7 Parmi les historiens qui ne parlent pas des opérations en Amérique, mentionnons entre autres : Parker Geoffrey, The Thirty Years War, Londres, Routledge & Kegan Paul, 1984 ; Gantet Claire, Guerre, paix et construction des États 1618-1714. Nouvelle histoire des relations internationales, vol. 2, Paris, Éditions du Seuil, 2003 ; Bély Lucien, Les relations internationales en Europe xviie-xviiie siècles, Paris, PUF, 2007 ; Hélie Jérôme, Les relations internationales dans l’Europe moderne 1453-1789, Paris, Armand Colin, 2007. La prise de Québec, mais pas les événements qui se déroulent en Acadie, est mentionnée par Zeller Gaston, Histoire des relations internationales. Les temps modernes de Christophe Colomb à Cromwell, Paris, Hachette, 1953, p. 217.
8 Naylor R. Thomas, Canada in the European Age 1453-1919, Vancouver, New Star Books, 1987, p. 67-68 ; Nelles Henry Vivian, A Little History of Canada, Don Mills, Oxford University Press, 2004, p. 28 ; Bothwell Robert, The Penguin History of Canada, Londres, Penguin Books, 2008 p. 29-30 et 53-54.
9 Vaugeois Denis et Lacoursière Jacques, Histoire 1534-1968, Montréal, Les éditions du renouveau pédagogique, 1968, p. 64-66 ; Harris Cole, The Reluctant Land. Society, Space, and Environment in Canada before Confederation, Vancouver, UBC Press, 2008, p. 43-44 et 53.
10 Francis R. Douglas, Jones Richard et Smith Donald B., Origins. Canadian History to Confederation, Toronto, Holt, Rinehart and Winston of Canada, 1988, p. 50 et 127 ; Eccles William John, France in America, Markham, Fitzhenry & Whiteside, 1990, p. 29 ; Conrad Margaret et Finkel Alvin, Canada. A National History, Toronto, Longman, 2003, p. 32 ; Havard Gilles et Vidal Cécile, Histoire de l’Amérique française, Paris, Flammarion, 2003, p. 52 et 58.
11 Certains travaux se sont déjà intéressés, quoiqu’imparfaitement à notre avis, à cette question spécifique : Le Blant Robert, « La Compagnie de la Nouvelle-France et la restitution de l’Acadie (1627-1636) », Revue d’histoire des colonies, 1955/146, p. 69-93 ; Reid John G., « The Scots Crown and the Restitution of Port Royal, I629-I632 », Acadiensis, 1977/2, p. 39-63 ; Allaire Bernard, « L’occupation de Québec par les frères Kirke », in Raymonde l’Italien et Denis Vaugeois (dir.), Champlain : la naissance de l’Amérique française, Québec, Septentrion, 2004, p. 245-257 ; Nicholls Andrew D., A Fleeting Empire. Early Stuart Britain and the Merchant Adventurers to Canada, Montréal et Kingston, McGill-Queens University Press, 2010.
12 Guenée Bernard, Un meurtre, une société : l’assassinat du duc d’Orléans 23 novembre 1407, Paris, Gallimard, 1992.
13 Il s’agit du titre du chapitre iv du livre premier de son History of England, Principally in the Seventeenth Century, Oxford, Clarendon Press, 1875, p. 280-299.
14 Elliott John Huxtable, National and Comparative History, Oxford, Clarendon Press, 1991, p. 15.
15 Games Allison, « Atlantic History: Definitions, Challenges and Opportunities », American Historical Review, vol. 11, no 3, 2006, p. 741-757 ; Armitage David, « Three Concepts of Atlantic History », The British Atlantic World, 1500-1800, New York, Palgrave, 2002, p. 11-27 ; Benjamin Thomas, The Atlantic World. Europeans, Africans, Indians and their Shared History, 1400-1900, Cambridge, Cambridge University Press, 2009 ; Bridging the Early Modern Atlantic World. People, Products, and Practices on the Move, éd. Caroline A. Williams, Farham, Ashgate, 2009 ; Dubois Laurent, « The French Atlantic », in Jack P. Greene et Philip D. Morgan (éd.), Atlantic History. A Critical Appraisal, Oxford, Oxford University Press, 2008, p. 138-162 ; Vidal Cécile, « La nouvelle histoire atlantique en France: Ignorance, réticence et reconnaissance tardive », Nuevo Mundo Mundos Nuevos, Coloquios, 2008, Puesto en línea el 24 septembre 2008 [http://nuevomundo.revues.org/42513].
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