Le patrimoine artistique italien entre exigences municipales et nationales. Aspects du collectionnisme dans le royaume d’Italie à l’époque napoléonienne
p. 125-136
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1Les bouleversements politiques et sociaux provoqués par la Révolution française, bouleversements dont les entreprises impériales vinrent accroître les dimensions, ont suscité en Italie durant la période napoléonienne, une conjoncture particulièrement propice aux collectionneurs et à leurs activités. Mais cette conjoncture est faite d’éléments de diverse nature. D’une part, le déplacement d’immenses fortunes changeant brusquement de main, la suppression des ordres religieux et la dispersion de nombreuses collections privées, propriété d’une aristocratie sur le déclin, favorisent une large circulation des œuvres d’art. D’autre part, on assiste, durant ces mêmes années, à l’émergence de nouvelles conceptions en matière de patrimoine artistique et national1. Avec l’expansion française et la politique des confiscations qui s’y rattache, diverses conceptions du patrimoine culturel vont entrer en conflit. En Italie, la notion de patrimoine artistique demeurait jusqu’alors fortement tributaire des traditions municipales. La fondation de la République italienne, puis du Royaume d’Italie va donner lieu à l’élaboration d’un autre modèle, celui du musée d’État, dont la Brera à Milan, capitale du Royaume, devait être le siège2.
2Mais ce dernier modèle dépendait lui-même d’un autre exemple particulièrement prestigieux, celui du musée Napoléon de Paris, entreprise muséographique la plus imposante jamais tentée en Europe dans une perspective universaliste et qui n’eut cependant que l’éphémère durée de l’Empire3. Or ce dernier projet manifestait les valeurs de la nouvelle idéologie artistique dont Édouard Pommier a étudié la mise en place depuis l’époque de la Convention, et qui avait permis d’annexer au patrimoine national français les œuvres d’art des pays étrangers4. Au motif que « les fruits du génie sont le patrimoine de la liberté », l’entrée en campagne, en avril 1796, de l’armée d’Italie sous le commandement de Bonaparte, permit l’annexion des collections d’antiques de Rome et des chefs-d’œuvre de la Renaissance italienne, considérés désormais comme l’héritage légitime de la Révolution. Ce que l’on a pu définir comme une conception « idéologique » du patrimoine prônait le rapatriement des œuvres du génie européen dans le lieu de leur destination légitime, celle de l’État français. L’œuvre d’art étant par essence une création de la liberté, elle ne pouvait s’adresser qu’à des hommes libres.
3Édouard Pommier a étudié les polémiques auxquelles cette politique des confiscations a donné lieu et en particulier comment Quatremère de Quincy, dans ses Lettres à Miranda (publiées en 1796), osa opposer à cette conception idéologique du patrimoine qui entérinait le droit de conquête, une conception historique plaidant pour le respect du lien précieux qui unit l’art italien à son environnement historique et géographique. C’était envisager l’art dans son contexte et l’histoire de l’art comme une discipline qui devait nécessairement faire la part de ce contexte.
4En Italie, cette approche devait trouver une première résonance profonde dans l’œuvre de Luigi Lanzi qui, dans sa Storia pittorica dell’Italia dont l’édition définitive allait paraître en 1809, avait rapporté l’histoire picturale de la Nation à celle de ses diverses écoles régionales5. À ce point, on le voit, diverses conceptions du patrimoine se juxtaposent pour se composer ou s’opposer selon les cas : approche universaliste ou historique, définition idéologique dont profite le projet impérial, définition nationale et municipale qui intéresse une Italie dont l’unité politique tend à se dessiner à la même époque. Nous nous proposons d’aborder la confrontation de ces diverses approches qui concernent la valeur de l’œuvre d’art tant sur le plan politique que culturel, non seulement à travers le phénomène du collectionnisme, par l’étude du cas de Ferdinando Marescalchi, mais encore par le biais des contestations dont une œuvre du Dominiquin, maître de l’école de Bologne, fit l’objet en 1812. Ces vicissitudes sont représentatives du statut problématique du patrimoine artistique italien, pris à l’époque entre exigences municipales, nationales et impériales.
Collections et collectionneurs
5En Italie, la politique française des confiscations avait épargné les collections privées, hormis quelques exceptions à Rome et à Vérone, mais la décadence économique et politique des familles de l’aristocratie traditionnelle amorcée dès la fin du siècle précédent, entraîna la dispersion de nombreuses collections. Le modèle même de collectionnisme aristocratique, héréditaire, de prestige et de représentation, est ébranlé dans ses fondements. La grande disponibilité des œuvres d’art sur le marché et l’apparition de fortunes nouvelles favorisent la constitution de grandes collections privées au sein de la nouvelle classe dirigeante napoléonienne, qui, en même temps que le pouvoir politique, détenait d’importantes richesses. Il ne s’agissait pas seulement de dignitaires français ou des membres de la famille impériale installés en Italie (comme le cardinal Fesch, Lucien Bonaparte, le général Miollis, Eugène de Beauharnais…), mais aussi des représentants des nouvelles élites de la péninsule. Napoléon recruta en effet, dans les rangs de l’aristocratie progressiste et de la bourgeoisie montante, une classe dirigeante modérée, placée sous le contrôle direct de la France en la personne même de Napoléon, président de la République italienne, puis souverain du Royaume d’Italie. C’est justement parmi ces hommes nouveaux que se rencontrent de nombreux collectionneurs. Nous allons voir, en évoquant plus particulièrement le cas de l’un d’entre eux, Ferdinando Marescalchi, citoyen de Bologne, que leur collaboration avec la France, aussi dévouée fût-elle, n’était pas dépourvue d’une certaine ambiguïté. Elle se nourrit en tout cas de sentiments complexes qui tiennent à la singularité de la situation italienne à l’époque impériale, puisque la péninsule est engagée dans un mouvement d’unification. Mais cette première ébauche de sa constitution nationale se réalise sous la tutelle d’une autorité étrangère et en l’occurrence d’un Empire dont la domination s’étend peu à peu aux dimensions du Continent. Cette complexité a imprimé sa marque à la carrière, aux opinions, comme aux choix esthétiques des plus notables collectionneurs de la période. Un collectionneur tel que Francesco Melzi d’Eril (1753-1816)6, noble milanais, qui sera vice-président de la République italienne puis Grand Chancelier du royaume d’Italie et duc de Lodi, fut en même temps l’un des plus ardents partisans de l’indépendance italienne. La défense du passé lombard et le sens civique le guidèrent, tant dans son action politique que dans son activité de collectionneur et de mécène.
6À l’opposé, la conservation du patrimoine artistique de la Patrie ne paraît pas avoir préoccupé un Giovan Battista Sommariva (1760-1826)7, qui comptait parmi les plus notables collectionneurs de l’époque (fig. 1). C’est à son domicile parisien qu’il installa ses collections. Paris était pour lui « la grande capitale ou se trouve la réunion de tous les genres d’artistes et de connaisseurs » ainsi qu’il écrivait à Canova le 9 novembre 18068, un lieu tout indiqué pour mettre en valeur ses acquisitions. Il commissionna des œuvres et apporta sa protection aux meilleurs artistes de l’époque, sans privilégier les Italiens par rapport aux Français, achetant des œuvres tant à Canova et Appiani, qu’à Prud’hon, Guérin, Gérard, David et Girodet.
7Entre un représentant du sentiment « patriotique » tel que Melzi d’Eril et un collectionneur comme Sommariva qui avait choisi Paris comme patrie d’adoption, Ferdinando Marescalchi (1754-1816)9, occupe une situation médiane : c’est en effet à Paris, tandis qu’il parvint au sommet de son ascension sociale et politique, que se précisa sa figure de collectionneur et de protecteur des arts, mais, il ne renonça pas à travailler au rayonnement de la péninsule depuis la France. Le voyageur et écrivain Valéry disait de lui : « il resta entièrement italien au milieu de cette cour européenne10 ». (fig. 2)
8Personnage de premier plan dans la vie politique de son temps, il compte parmi les rares hommes d’État de l’Italie napoléonienne dont la notoriété s’étendait à toute l’Europe. Aristocrate et sénateur de la Bologne pontificale, son ralliement au pouvoir napoléonien fut facilité par la relative autonomie culturelle dont les élites municipales jouissaient à l’égard du pouvoir du Saint-Siège. Il adhère dès l’arrivée des Français aux idées nouvelles et devient l’un des principaux promoteurs du régime napoléonien. Après une brillante et rapide carrière au sein des institutions récentes, c’est en qualité de ministre des Relations extérieures de la république italienne, puis du royaume d’Italie qu’il réside à Paris de 1802 à 1814. Après la chute de l’Empire, successivement gouverneur du duché de Parme et Plaisance et ministre plénipotentiaire de l’empereur d’Autriche à Modène, il meurt en 1816. Son long séjour dans la capitale lui offre maintes occasions d’enrichir sa bibliothèque et surtout de rassembler une prestigieuse collection de tableaux, laquelle, à sa mort, compte 700 pièces, dont certaines de tout premier ordre.
9Si, à partir de 1812, Marescalchi commence à envoyer régulièrement des pièces de sa collection à Bologne, bien avant d’y retourner lui-même, cela est dû à un sentiment patriotique jamais démenti malgré le soutien qu’il apportait au nouveau gouvernement. La collection alla rejoindre, au palais Marescalchi, une vaste bibliothèque et une collection de coquillages, qui correspondaient au goût encyclopédique du siècle précédent. Les tableaux, et tout particulièrement leur richesse et leur caractère cosmopolite, attirèrent l’attention et les éloges admiratifs des étrangers de passage, tels que Byron, Shelley ou Stendhal qui souligna son exemplarité.
10La particularité de sa position tient en ceci que bien que pro-français, Marescalchi n’accepte qu’à moitié l’emprise de l’impérialisme napoléonien sur la culture italienne, ce qui explique son désir de préserver par ses collections les valeurs de cette culture. Mais cet attachement à l’idée nationale est tempéré à son tour par sa fidélité à une tradition locale. Homme d’État il conçoit fort bien les avantages que peut représenter, au point de vue politique, une organisation unitaire et toute sa carrière apparaît liée à cette idée. Cependant, dans ses lettres privées, la notion de « petite patrie », de tradition municipale, n’est jamais absente. La composition de la collection qu’il a pu réunir manifeste cette double exigence. Nous verrons que l’école émilienne (au sens strict les Bolonais) est la mieux représentée, mais qu’il reste ouvert à la tradition émilienne entendue en un sens plus large, ainsi qu’aux autres écoles d’Italie, avec une prédilection pour celle de Venise. À cette double préoccupation locale et italienne viennent s’ajouter les marques d’un goût cosmopolite européen qui doit beaucoup à l’influence parisienne. Nous devons garder à l’esprit cette superposition d’intérêts lorsque nous étudions sa collection.
11À la mort du ministre, elle comptait donc 700 pièces, mais la Galerie proprement dite, celle qui était destinée à l’exposition à l’étage noble de son palais bolonais, se réduisait à 408 tableaux. Bien rares étaient les œuvres qui provenaient du palais familial. La plupart furent acquises par Marescalchi lui-même en l’espace d’une décennie. Il s’agit donc d’une collection de constitution récente et rapide, ce qui la rend très représentative du collectionnisme de son temps, contrairement à celle d’un Francesco Melzi d’Eril, par exemple, qui reprenait en l’enrichissant son patrimoine familial selon un modèle plus traditionnel et qui, en ce sens, appartient à une époque révolue. Sa dispersion, tout aussi rapide (elle intervint dès la mort de Marescalchi), est elle aussi caractéristique des collections de l’époque.
12Au sein de l’école émilienne, la tradition locale, celle de Bologne, est la mieux représentée. Marescalchi y attache un intérêt de spécialiste qui s’étend jusqu’aux maîtres « mineurs ». Mais il privilégie les grands maîtres du xvie et xviie siècles : Carracci, Albani, Dominiquin, Guido Reni, Guercino. Dominiquin, dont nous allons reparler, était si recherché par les amateurs que Tambroni, consul du royaume d’Italie à Rome, le surnomme la « pierre philosophale » des collectionneurs. Marescalchi possédait deux œuvres de l’artiste : une Sainte Cécile jouant de l’orgue que nous connaissons à travers une gravure (fig. 3) et le Portrait du Cardinal Ludovisi (dont nous ignorons la localisation actuelle). Mais sa collection s’ouvrait également à l’école émilienne entendue au sens large, puisqu’elle accueillait des représentants des écoles de Ferrare, de Modène et de Parme. Cette dernière était représentée en particulier par deux œuvres du Corrège, les Quatre Saints aujourd’hui à la National Gallery de Washington (fig. 4) et le Christ en gloire de la Pinacothèque vaticane (fig. 5), que l’acheteur rangeait parmi les joyaux de sa collection.
13Rappelons que selon les règles du goût établies au cours du xviiie siècle, Corrège, le « peintre de la grâce », composait avec Raphaël et Titien une triade de la perfection picturale. Aussi Marescalchi voulut-il adjoindre une œuvre de Raphaël à sa collection. Mais ses tentatives restèrent vaines, aucune toile originale du plus grand représentant du classicisme romain n’étant accessible à sa bourse sur un marché où la concurrence que se livraient les nouvelles fortunes faisaient monter les prix. En revanche, il put acquérir quelques œuvres du Titien, en particulier un Portrait d’homme (aujourd’hui dans la collection Bankes à Kingston Lacy) (fig. 6), acquis par l’entremise de Leopoldo Cicognara, noble ferrarais alors président de l’Académie de Venise, avec lequel Marescalchi entretint une longue et importante correspondance11. L’amitié qui le liait à Cicognara et les rapports familiers qu’il entretenait avec la Cité des Doges expliquent en partie son intérêt pour l’école vénitienne, celle qui, parmi les italiennes, était la mieux représentée dans sa collection, après les peintres émiliens.
14Cicognara est à l’origine de l’achat de quatre chefs-d’œuvre vénitiens : le Portrait d’homme du Titien, déjà cité, Le Jugement de Salomon, alors attribué à Giorgione et aujourd’hui à Sebastiano del Piombo (actuellement conservé à Kingston Lacy comme le précédent) (fig. 7), le Saint Marc avec les magistrats vénitiens du Tintoret (fig. 8) et la Vierge à l’Enfant avec les saints Pierre, Romuald, Benoît et Paul de Giovan Battista Cima da Conegliano (fig. 9). Les deux derniers tableaux se trouvent aujourd’hui au musée de Berlin.
15L’amitié entre les deux hommes se doublait d’une communauté de convictions politiques et d’une concordance de leurs points de vue esthétiques et culturels. Dans son Histoire de la sculpture (1813-1818)12, Cicognara, quoiqu’il se situât dans une perspective européenne, affirmait la primauté des maîtres italiens, dont Antonio Canova venait selon lui de porter la tradition au sommet. Ce « patriotisme culturel » se trouvait accordé aux préoccupations de Marescalchi. Aux efforts de Cicognara, tentant de jalonner de points de repères esthétiques l’histoire de l’art italien, correspond chez Marescalchi, la volonté de reconstituer et de préserver un ensemble de valeurs artistiques dont il craint la perte. Cependant, une telle fidélité au génie de la nation n’est pas exclusive d’un intérêt ouvert plus largement à la peinture européenne, favorisé par l’installation du ministre dans la capitale. Paris comptait alors parmi les principaux centres du marché de l’art européen. À l’égard des peintres de l’école française, Marescalchi ne manifeste qu’un intérêt restreint, et limite son choix à une vingtaine d’œuvres. L’influence des goûts et des modes de la capitale se manifeste davantage dans l’acquisition de nombreuses peintures des écoles hollandaises et flamandes du xviie siècle alors très prisées sur le marché parisien. La place ainsi accordée aux écoles du Nord (qui représentent un tiers de l’ensemble) distingua en son temps la collection Marescalchi des autres collections bolonaises dont les perspectives étaient d’ordinaire plus restreintes. Quoiqu’il critiquât à l’occasion le goût trop exclusif que la mode parisienne réservait à la peinture du Nord au détriment des maîtres italiens, cette réaction patriotique ne l’empêcha pas de les apprécier, de les accueillir, et de les envoyer à Bologne, de sorte que les jeunes artistes et le public cultivé de sa ville natale puissent bénéficier de cet apport nouveau. Marescalchi, en effet, entendait non seulement préserver un patrimoine, mais aussi contribuer à son renouvellement. La décision de transférer sa collection à Bologne, dès 1812, avant même qu’il eût quitté Paris, répondait à la volonté de restituer aux « lares de la Patrie » des œuvres qui, réunies par ses soins, ne devaient pas demeurer en terre étrangère, ainsi qu’au désir de compenser la perte de quelques riches collections nobiliaires (celle notamment de la Galleria Sampieri) dont la vente, qui avait fait grand bruit l’année précédente, venait d’appauvrir Bologne au profit de la Pinacothèque de Brera et des collections privées du vice-roi Eugène.
16Malgré les soins qui furent apportés à son aménagement, la collection bolonaise ne survécut pas longtemps à son fondateur : elle fut bientôt dispersée par son héritier direct. L’intention ébauchée de transformer une collection privée en œuvre d’utilité civique (in un utile stabilimento) ne fut pas suivie d’effet. Ce qui était possible en France, où certaines collections privées constituées à la même époque allaient connaître un destin public (comme celles de Fesch, Cacault, Fabre ou Wicar), ne l’était pas dans un pays tel que l’Italie où les traditions institutionnelles d’État à la française faisaient alors défaut. Certes, on avait pu assister, dans la seconde moitié du xviiie siècle à l’ouverture progressive de certaines collections à la sphère publique. L’esprit des Lumières avait favorisé ce qui commençait d’être envisagé comme un devoir pour les propriétaires eux-mêmes. À Vérone, à Florence, à Rome, apparaissent alors les premiers musées publics. Mais de ce point de vue, l’Italie manquait encore de maturité politique. De cette carence institutionnelle et de cette absence d’une organisation centralisée, nous voudrions maintenant signaler certains effets significatifs, à travers l’exemple des contestations administratives dont une œuvre du Dominiquin fit l’objet à la même époque.
Contestations autour d’un tableau du Dominiquin à l’époque de l’Empire
17L’œuvre dont nous proposons de récapituler les vicissitudes compte parmi les plus notables du Dominiquin. Le maître de l’école de Bologne l’a peinte dans les années 1620. Il s’agit d’une Vierge à l’Enfant, entre saint Jean l’Évangéliste et saint Pétrone13 (fig. 10). Ce tableau nous intéresse à divers titres, quoiqu’il n’ait jamais fait partie d’aucune collection privée. Suscité par une commande publique, il acheva son parcours en 1812 dans un musée d’État. Mais la nature de ce transfert – qui n’a d’ailleurs rien de bien exceptionnel pour l’époque – nous importe moins ici, que ses modalités, que les procédures dont ce tableau à fait l’objet, et que les vives polémiques auxquelles ces procédures ont donné lieu. En effet, elles vont mêler dans le contexte de la domination impériale, des considérations de goût, des exigences politiques et diplomatiques dont le rappel intéresse notre propos. Les conflits de compétence qui se manifestèrent à cette occasion, à tous les degrés de décision – locaux, nationaux et impériaux – nous apparaissent comme autant des révélateurs des problèmes, demeurés en suspens, auxquels se trouvait alors confrontée la nouvelle entité politique italienne et qui concernaient l’unité de la nation autant que la question de son indépendance. L’étude de cette affaire exemplaire nous est facilitée par la récente publication de la Correspondance de Vivant Denon, qui fut l’un des principaux protagonistes de ce transfert en sa qualité de directeur du musée Napoléon14. À quoi viennent s’ajouter la correspondance privée de Marescalchi, que nous retrouvons mêlé à l’événement15, ainsi qu’un important dossier inédit conservé aux Archives nationales de France16.
18Rappelons d’abord la faveur dont jouit le Dominiquin à l’époque néoclassique. Un peintre tel que David, un écrivain comme Stendhal, ou un historien aussi déterminant que Lanzi s’accordent à le proposer pour modèle. Les peintres néo-classiques italiens, ceux de l’Académie d’Italie à Rome, le considéraient comme tel. Le Bolonais a réalisé cette œuvre pour le maître-autel de l’église des saints Jean l’Évangéliste et Pétrone, l’église de la Confrérie des Bolonais à Rome17. Le retable ne devait quitter le maître-autel qu’à la fin du xviiie siècle. En 1799, à la faveur de la confusion que suscite l’occupation française, le tableau est recueilli par un particulier, dans l’attente, semble-t-il, d’un éventuel acquéreur. Les représentants de la ville de Bologne entreprennent alors quelques démarches pour le récupérer eu égard à la place éminente qui revenait à ce peintre dans la tradition artistique locale, place qui expliquait que son nom fût associé à l’église saint-Pétrone : le siège de la confrérie des Bolonais figurait déjà dans les anciennes pièces d’archives comme le symbole même de la « nation » Bolonaise à Rome. L’acception de ce mot de « nation » appliqué à la communauté bolonaise, mérite d’être souligné. Elle fonde un titre de propriété de caractère traditionnel et qui, comme nous allons le voir, va bientôt entrer en conflit avec d’autres légitimités, beaucoup plus modernes.
19Pour l’heure, les démarches de Carlo Fea, commissaire aux antiquités de Rome pour le compte du Saint-Siège, et celles du sculpteur Canova, que son admiration pour l’œuvre du Dominiquin incite à intervenir, ont pour effet le retour du retable dans son lieu d’origine. Cette décision suffit à satisfaire le patriotisme bolonais. Le tableau ne quittera plus l’église jusqu’en 1812. Il sera alors transféré au musée de Brera, à Milan, capitale du royaume d’Italie. C’est ce dernier transfert qui fit naître toutes les polémiques en cristallisant l’opposition des diverses conceptions du dépôt patrimonial alors en présence. Se juxtaposèrent les revendications de la cité romaine, la volonté que manifestait Milan d’exercer ses prérogatives de nouvelle capitale du royaume unifié à l’égard de Bologne, ainsi que l’autorité impériale, représentée en l’occurrence par Vivant Denon. À quoi vinrent s’ajouter les nombreux conflits de compétence qui ne pouvaient manquer d’apparaître au sein d’une administration nouvelle et encore mal réglée dans ses modes de fonctionnement.
20Considérons tout d’abord le pouvoir impérial. En 1811, dans le cadre de ses fonctions de directeur du musée Napoléon, Vivant Denon entreprend une mission dans la péninsule en vue de compléter les collections du musée18. Il s’agit du dernier épisode d’une série de saisies officielles accomplies au bénéfice de l’État français. Profitant des récents décrets de suppressions des ordres religieux, Denon allait faire son choix dans les départements dépendants de la France. Mais de passage à Milan (bien que le royaume ne relevât pas du cadre de sa mission), il remarque au musée de Brera cinq tableaux importants, dignes d’être transférés à Paris19. Parmi eux une œuvre du milanais Boltraffio (fig. 11), la seule que possédât le musée d’un maître pourtant aussi représentatif de la tradition picturale milanaise que pouvait l’être un Dominiquin pour la tradition bolonaise20. L’importance du tableau est la principale cause du refus que Denon se vit opposer par les membres de l’Académie de Brera. L’échange que Denon propose alors avec cinq œuvres de maîtres flamands et hollandais provenant des collections du Louvre, ne suffit pas à leur faire changer d’avis. Entre les deux logiques qui partageaient alors les responsables du musée de Milan, l’une locale et l’autre plus soucieuse d’une variété dont le musée impérial donnait le modèle, c’est la première qui l’emporte.
21Denon s’étonne de ce refus dans une lettre à l’intendant des Biens de la Couronne : « Mais de quoi s’agit-il, enfin ! L’Empereur prend dans son musée de Brera cinq tableaux pour son musée de Paris : dans ce dernier il cherche à compléter la collection la plus étonnante qui n’ait jamais été faite et due presque en totalité à ses victoires21 ». Notons qu’à l’inverse de ses prédécesseurs de la Convention et du Directoire, Denon ne s’embarrasse pas de justifications idéologiques et invoque crûment le droit de conquête. Cependant, il croit mettre fin à ces oppositions par des voies plus diplomatiques. C’est ici que le tableau du Dominiquin entre de nouveau en jeu. Ayant appris que le vice-roi Eugène convoitait cette œuvre pour la Pinacothèque de Brera à Milan, Denon imagine de l’utiliser en monnaie d’échange. À cette fin, il charge Marescalchi d’entreprendre toutes les démarches auprès de son subalterne Tambroni, consul du royaume d’Italie à Rome22.
22Une seconde instance entre donc en jeu : l’administration du royaume d’Italie. Ces deux fonctionnaires (Marescalchi et Tambroni), sur l’habile suggestion d’un responsable impérial (Denon), en activent les ressorts pour le compte du vice-roi Eugène. L’œuvre ressortissait à la couronne d’Italie dont Bologne faisait partie, ce qui devait faciliter en principe le transfert à Milan. Mais les choses se révèlent plus compliquées, puisqu’à ce point interviennent pour contester la propriété des biens de cette église, non seulement la municipalité de Rome qui va faire valoir ses propres prérogatives locales, mais aussi l’intendant des biens de la Couronne de France pour les nouveaux départements du Tibre et du Trasimène, qui entend les réserver aux palais impériaux comme tous les biens de l’Église depuis l’occupation des États pontificaux. L’autorité centrale française tranchera le débat : la Brera céda au Louvre les cinq toiles remarquées par Denon en échange des Flamands, et le tableau du Dominiquin rejoignit en compensation les collections de Brera le 21 décembre 1812.
23De nouvelles réclamations concernant ce même tableau se manifesteront dans le contexte des restitutions de 181523. On sait qu’à cette date, l’Empire vaincu dut satisfaire aux demandes des anciens territoires conquis. Mais on oublie d’ordinaire un autre aspect de la question. Celui-ci intéresse les controverses qui se développèrent en même temps au niveau local et qui opposèrent cette fois non plus l’Empire à ses anciennes dépendances, mais les divers États italiens entre eux. En effet, l’État pontifical saisit l’occasion de la querelle des restitutions pour réclamer à l’ancien royaume certains tableaux dont il avait été dépouillé au profit de Milan : il obtint satisfaction pour certaines œuvres et, bien que le tableau du Dominiquin n’ait pas quitté Milan en cette circonstance, la démarche des autorités romaines n’en demeure pas moins significative.
24L’appropriation du patrimoine artistique italien demeurait en effet sujette, on le voit, à bien des contestations. À la valeur esthétique des œuvres venait s’ajouter – et cela est sensible tant dans la constitution des collections privées que dans les conflits que suscite la propriété des œuvres – des considérations d’ordre symbolique qui intéressent une certaine forme d’identité collective, politique et culturelle des parties en présence. Dans le cas du Dominiquin, il est d’ailleurs frappant d’assister à l’utilisation d’une œuvre comme valeur d’échange et enjeu d’un conflit de pouvoirs. Tant il est vrai que les tentatives d’arrachement des œuvres à leur contexte ne pouvaient, comme le prévoyait avec lucidité Quatremère de Quincy, que les exposer à deux dangers solidaires : se voir assigner le statut de « relique » ou celui de marchandise. Comme l’a remarqué Édouard Pommier, c’était prévoir une évolution qui aboutirait à la sacralisation et à la commercialisation des œuvres d’art.
Notes de bas de page
1 Sur la conception de « patrimoine » en Italie, voir Andrea Emiliani, Leggi, bandi e provvedimenti per la tutela dei beni artitici e culturali negli stati italiani, 1570-1860, Bologne, 1978 ; Francis Haskell, La dispersione e la conservazione del patrimonio artistico, dans Storia dell’Arte italiana, 3e partie, III, Turin, Einaudi, 1981, p. 5-35 (traduction française dans Francis Haskell, L’Amateur d’art, Librairie Générale Française, 1997, p. 90-146) ; Ideologie e patrimonio storico-culturale nell’Italia rivoluzionaria e napoleonica. A proposito del Trattato di Tolentino, actes du colloque international, Tolentino, 18-21 septembre 1997, Rome, Ministero per i beni e le attività culturali, 2000. Pour la France, voir Patrimoine, temps, espaces. Patrimoine en place, Patrimoine déplacé. Actes des entretiens du patrimoine (1995), sous la présidence de François Furet, Paris, Fayard, 1997 ; Patrimoine et passions identitaires. Actes des entretiens du patrimoine (1997), sous la présidence de Jacques le Goff, Paris, Fayard, 1998 et les contributions de Dominique Poulot : Musée, nation, patrimoine 1789- 1815, Paris, Gallimard, 1997 ; Patrimoine et modernité, Paris-Montréal, L’Harmattan, 1998 ; Patrimoine et musée. L’institution de la culture, Paris, Hachette, 2001.
2 La pinacothèque de Brera à Milan est le seul exemple en Italie de musée « révolutionnaire » sur le modèle de celui du Louvre. Pour l’histoire de sa formation, voir Aurora Scotti, Brera 1776-1815. Nascita e sviluppo di una istituzione culturale milanese, Florence, Centro Di, 1979 ; Sandra Sicoli, « La politica della tutela in Lombardia nel periodo napoleonico. La formazione della Pinacoteca di Brera : il ruolo di Andrea Appiani e Giuseppe Bossi », dans Ricerche di Storia dell’Arte, 38, 1989, p. 71-90 ; idem, « La Regia Pinacoteca di Brera dal 1809 al 1815. Criteri di formazione e problemi di gestione. La tutela mancata », dans Ricerche di Storia dell’Arte, 46, 1992, p. 61-81.
3 Sur le musée Napoléon, outre le classique Cecil Gould, Trophy of Conquest. The Musée Napoléon and the Creation of the Louvre, Londres, Faber and Faber, 1965, on peut maintenant consulter le catalogue de l’exposition Dominique-Vivant Denon : l’œil de Napoléon, sous la direction de Pierre Rosenberg et Marie-Anne Dupuy, Paris, musée du Louvre, 20 octobre 1999-17 janvier 2000 Paris, RMN, 1999, notamment la section intitulée « Le plus beau musée de l’univers » (p.130-267), ainsi que les actes du colloque Les vies de Dominique-Vivant Denon, sous la direction scientifique de Daniela Gallo, 2 vol., Paris, La Documentation Française, 2001, en particulier les articles de D. Poulot, De la légitimité du musée Napoléon, de Daniela Gallo, Le musée Napoléon et l’histoire de l’art antique et de Thomas W. Gaethgens, Les visisteurs allemands du musée Napoléon.
4 Édouard Pommier, La Révolution et le destin des œuvres d’art, introduction à son édition de Quatremère de Quincy, Lettres à Miranda sur le déplacement des monuments de l’art de l’Italie (1796), Paris, Macula, 1989, p. 7-83 et, du même auteur, L’Art de la liberté. Doctrines et débats de la Révolution française, Paris, Gallimard, 1991.
5 Luigi Lanzi, Storia Pittorica della Italia. Dal Risorgimento delle Belle Arti fin presso al fine del xviii secolo (1809), 3 vol., Florence, Sansoni editore, 1968-1974.
6 Sur la figure de Melzi d’Eril collectionneur et mecène, voir : L. Grassi, « Villa Melzi », dans Arte Figurativa, VII (1959), n. 5, p. 30-37 ; Giulio Melzi D'eril, La Galleria Melzi e il collezionismo milanese nel tardo Settecento, Milan, Virgilio, 1973 et, du même auteur, Palazzo Melzi d’Eril alla Cavalchina, Milan, Leasindustria, 1987. Voir aussi le catalogue de l’exposition Civiltà neoclassica a Villa Melzi, sous la direction de Stefano Della Torre, Bellagio, 10-31 ottobre 1979.
7 On doit à Haskell les premières études sur Sommariva collectionneur et mécène : F. Haskell, An Italian Patron of French Neoclassical Art, the Zaharoff Lecture, Oxford, Clarendon Press, 1972 ; idem « More about Sommariva », dans The Burlington Magazine, CXIV, 1972, p. 691-695. Voir aussi les contributions plus récentes de Fernando Mazzocca, G. B. Sommariva o il borghese mecenate : il « cabinet » neoclassico di Parigi, la galleria romantica di Tramezzo, Itinerari. Contributi alla storia dell’arte in onore di Maria Luisa Ferrari, Florence, SPES, 1981 et Villa Carlotta, Milan, Electa, 1983.
8 Lettre publiée par Mazzocca, cit., 1981, p. 235.
9 Sur ce collectionneur je me permets de renvoyer à ma thèse Ferdinando Marescalchi (1754-1816) : un collezionista italiano nella Parigi napoleonica, 3 vol., Institut Universitaire Européen de Florence, 2001.
10 Antoine-Claude Pasquin, dit Valéry, Voyages historiques et littéraires en Italie pendant les années 1826, 1827 et 1828, ou l’Indicateur italien, Paris, 1831-1833, 1838, II, p. 43.
11 L’étude de la correspondance entre Marescalchi et Cicognara fait l’objet d’un chapitre de ma thèse de doctorat, citée note 9.
12 Leopoldo Cicognara Storia della Scultura dal suo Risorgimento in Italia sino al secolo di Napoleone (le second volume intitulé :… fino al secolo di Canova ; le troisième :… sino al secolo xix), per servire di continuazione alle opere di Winckelmann e di D’Agincourt, 3 vol., Venise, tipografia Picotti, 1813-1816.
13 Pour ce tableau, voir Richard E. Spear, Domenichino, 2 vol., New Haven et Londres, Yale University Press, 1982, I, p. 269-270, n. 99.
14 Vivant Denon, Directeur des Musées sous le Consulat et l’Empire. Correspondance (1802-1815), édition établie par M.-A. Dupuy, Isabelle le Masne de Chermont et Elaine Williamson, 2 vol., Paris, RMN, 1999. Sur cette affaire voir notamment les lettres nos 2259, 2267, 2276, 2356, 2388, 2443, 24842, 2489, 2497, 2601, 2612, 2639 et AN 93.
15 Voir note 22.
16 Paris, Archives nationales, O2 845. D’autres documents concernant le transfert du tableau du Dominiquin à la Pinacothèque de Brera, se trouvent aux Archives nationales F17 1279 et aux Archives des Musées Nationaux à Paris, Z 4.
17 Pour l’historique de cette œuvre, voir Rossella Vodret, La pala della chiesa dei Santi Giovanni Evangelista e Petronio, dans Domenichino 1581-1641, catalogue d’exposition, Rome, Palazzo Venezia, 10 ottobre 1996-14 gennaio 1997, Milan, Electra, 1996, p. 298-310.
18 Marie-Louise Blumer, « La mission de Denon en Italie (1811) », dans Revue des études napoléoniennes, XXIII, 1934, p. 237-257.
19 Sur cet épisode, voir Monica Preti Hamard, dans Dominique-Vivant Denon : l’œil de Napoléon, catalogue de l’exposition, sous la direction de P. Rosenberg, Paris, musée du Louvre, 20 octobre 1999-17 janvier 2000, Paris, RMN, 1999, p. 239, 248-249, n. 247.
20 Voir Giovanni Ballarin, Giovan Antonio Boltraffio prima della Pala Casio e riflessioni sull’esperienza milanese dello pseudo-bramantino, Padoue, 2000.
21 Lettre au duc de Cadore, datée du 9 mars 1812, dans Vivant Denon, directeur des musées sous le Consulat et l’Empire. Correspondance (1802-1815), 2 vol., Paris, RMN, 1999, n° 2356.
22 Giuseppe Tambroni (Bologne, 1773 - Rome, 1824), paléographe, écrivain et diplomate, est l’auteur de nombreux écrits d’histoire diplomatique et d’histoire de l’art, parmi lesquels Compendio delle storie di Polonia, 2 vol., Milan, 1807 ; Di Cennino Cennini, Trattato di pittura messo in luce la prima volta con prefazione ed annotazioni, Rome, 1822 ; Intorno alla vita di Canova, commentario, Venise, 1823. L’ample correspondance inédite entre Giuseppe Tambroni et Ferdinando Marescalchi, de 1799 à 1814, est conservée dans les Archives privées Marescalchi à Casalecchio di Reno, près de Bologne.
23 L’essentiel des documents d’archives se rapportant à ce sujet sont publiés dans Michelangelo L. Giumanini, Beni culturali : reciproche restituzioni tra Lombardo Veneto e Stato Pontificio (1816-1818), Bologne, Clueb, 1999, p. 11, 15, 18, 21-22, 54-55.
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