Une vague révolutionnaire cachée dans le monde atlantique ?
Circulations de combattants contre-révolutionnaires entre deux continents (1860-1875)
p. 119-132
Texte intégral
Introduction
1En décembre 1864, Karl Marx, au nom de l’Association internationale des travailleurs créée la même année, rédigeait une adresse à destination d’Abraham Lincoln, récemment réélu président des États-Unis. Alors que la guerre de Sécession durait depuis 1861, le philosophe socialiste donnait au conflit une signification politique transatlantique et y voyait une offensive contre-révolutionnaire globale :
« Lorsque l’oligarchie des trois cent mille esclavagistes osa, pour la première fois dans les annales du monde, inscrire le mot esclavage sur le drapeau de la rébellion armée ; lorsque à l’endroit même où, un siècle plus tôt, l’idée d’une grande république démocratique naquit en même temps que la première déclaration des droits de l’homme qui ensemble donnèrent la première impulsion à la révolution européenne du xviiie siècle – lorsque à cet endroit la contre-révolution se glorifia, avec une violence systématique, de renverser “les idées dominantes de l’époque de formation de la vieille Constitution” et présenta “l’esclavage comme une institution bénéfique, voire comme la seule solution au grand problème des rapports, entre travail et capital”, en proclamant cyniquement que le droit de propriété sur l’homme représentait la pierre angulaire de l’édifice nouveau – alors les classes ouvrières d’Europe comprirent aussitôt, et avant même que l’adhésion fanatique des classes supérieures à la cause des confédérés ne les en eût prévenues, que la rébellion des esclavagistes sonnait le tocsin pour une croisade générale de la propriété contre le travail et que, pour les hommes du travail, le combat de géant livré outre-Atlantique ne mettait pas seulement en jeu leurs espérances en l’avenir, mais encore leurs conquêtes passées1. »
2Cette contribution constitue une tentative pour repenser la période 1860-1875 selon trois perspectives. Le premier objectif est de proposer une lecture de ces quinze années depuis l’histoire politique et de discuter la possibilité d’y identifier, comme le fait Marx s’agissant de la guerre civile américaine, un « moment », un cycle cohérent2. Comme on le sait, l’historiographie a mis depuis longtemps en valeur quelques grandes scansions de l’histoire politique de l’Europe au xixe siècle, qui correspondent à des moments de propagation révolutionnaire ou à des moments de reprise en main contre-révolutionnaire. 1814-1815, 1820-1821, 1830-1831 et 1848-1851 en sont les principales occurrences3. Concernant la période 1860-1875, plusieurs problèmes se posent : d’abord, il ne s’agit pas d’une période s’étendant sur quelques mois ou quelques années, mais sur quinze ans ; ensuite, il faut identifier des traits caractéristiques qui justifient de faire de ce moment un moment à part, c’est-à-dire différent de ce qui précède et de ce qui suit ; enfin, il faut trouver une cohérence interne aux événements, c’est-à-dire un fil conducteur qui tiendrait ensemble des guerres civiles, des guerres nationales, des révolutions, des révoltes et des guerres coloniales. On peut sur tous ces points compter sur les approches récentes des cycles révolutionnaires qui les inscrivent dans des temporalités beaucoup plus longues de basculement progressif, à l’image de la périodisation des révolutions atlantiques de la fin du xviiie siècle, qui s’étend désormais de 1760 à 1840 environ4.
3Un deuxième angle d’approche réside dans la perspective géographique, qui prétend sortir d’un récit européo-centré pour adopter une approche atlantique des phénomènes politiques. Il n’y a là pas une grande nouveauté puisque c’est le mouvement des études sur le politique au xixe siècle depuis quelques années5. Les historiens ont mis en avant le fait que les transformations politiques et sociales ne se sont pas arrêtées à l’Europe : elles ont concerné le continent américain voire le monde, comme l’avait précocement montré pour le monde britannique en 1848 un article de Miles Taylor paru en 20006, dont les répercussions s’étendent jusqu’à 2018, qui a vu l’organisation d’un colloque autour des « mondes de 1848 », qui visait justement à explorer la dimension extra-européenne du Printemps des peuples7. Cette approche géographique pose un problème épistémologique, qui court lui aussi depuis quelques années et porte sur la dichotomie entre comparaison et connexion. Il s’agit de savoir si le constat que des phénomènes similaires se déroulent à peu près au même moment dans deux espaces différents constitue un élément suffisant pour dire que ces phénomènes sont liés. Le courant qui défend l’histoire connectée soutient que la comparaison n’est pas suffisante à fonder le rapprochement et que la connexion ne saurait se fonder que sur l’étude des circulations de tous types entre ces espaces, sur leur quantification et leur qualification8. C’est la perspective adoptée dans cette réflexion. De fait, les phénomènes ici étudiés, si l’on accepte le postulat qu’ils se produisent dans une chronologie resserrée, ne sont pas comparables à première vue. La guerre de Sécession, la première guerre d’indépendance cubaine, la conquête des États pontificaux, la Commune de Paris ou la seconde guerre carliste n’ont a priori pas de ressemblances quant à leurs formes, à leurs motivations et aux logiques qui les organisent. En conséquence, une focale comparatiste ne pourrait pas rapprocher ces phénomènes entre eux, ce qui est peut-être une raison pour expliquer qu’ils ne l’aient pas été jusqu’à présent, bien que l’on dispose d’un certain nombre de travaux examinant la résonance de ces événements par-delà les frontières, en particulier s’agissant de la guerre de Sécession9, bien étudiée depuis la France par Farid Ameur10.
4L’idée centrale de cette contribution est donc de se fonder sur les circulations de combattants contre-révolutionnaires sur les deux rives de l’Atlantique pour montrer que la période 1860-1875 constitue un cycle politique cohérent. Par contre-révolution, on désignera ici la culture politique héritée de l’anti-révolution et du royalisme de la fin du xviiie siècle11, qui s’oppose au libéralisme et à ses déclinaisons dans l’espace atlantique, en s’appuyant de plus en plus clairement sur un substrat social et religieux catholique12. À ce titre, il s’agit sans doute d’une définition qui pèche par son caractère européo-centré : si le continent américain connaît des phénomènes proches d’une telle définition de la contre-révolution13, l’adoption d’une focale atlantique devrait permettre de repenser cette catégorie à la lumière des problématiques spécifiques à cet espace, en particulier autour des indépendances et de l’esclavage. Si ce n’est pas l’objet de cette contribution, il est à souhaiter que de telles recherches soient entreprises dans les années à venir14. Les combattants constituent par ailleurs un type d’acteurs bien connu puisque le volontariat militaire est une catégorie politique très bien étudiée pour le xixe siècle, ce qui facilite l’analyse : toute une école historiographique a bien montré depuis quinze ans la place de ces combattants internationaux dans la structuration de phénomènes politiques transnationaux15. Le postulat qui sous-tend cette réflexion est qu’en étudiant les circulations de ces combattants, on peut montrer que les événements politiques des deux côtés de l’Atlantique entre 1860 et 1875 participent bien d’un même cycle politique, non seulement parce qu’on voit des contre-révolutionnaires traverser l’océan dans un sens et dans l’autre, mais aussi parce que, de leur point de vue, les différents théâtres de leur action participent bel et bien d’un même combat. En se fondant sur la perception des acteurs et sur le sens qu’ils donnent eux-mêmes à leur action16, il s’agit de repenser un moment de l’histoire atlantique, en s’appuyant en particulier sur les circulations entre France et Amérique du Nord.
5On reviendra d’abord sur les événements qui seront par la suite rapprochés entre eux en essayant de mettre en valeur les éléments qui les constituent en cycle, en particulier la perception des acteurs de l’époque ; ensuite, on montrera que les circulations de groupes de combattants contre-révolutionnaires entre ces différents théâtres permettent de parcourir ce cycle et lui donnent sa cohérence ; enfin, on s’attardera sur des parcours individuels pour passer à une analyse qualitative et idéologique de ces circulations.
Un monde atlantique bouleversé
Une succession rapide de guerres et de révolutions
6Les bouleversements s’accumulent, dès le début des années 1860, dans de nombreux pays de l’espace euro-américain. Ils procèdent pour partie d’un rejeu des tensions et des clivages qui avaient secoué cet espace au cours du Printemps des peuples : revendications libérales et démocratiques, défense de la souveraineté nationale pour les peuples qui n’en bénéficient pas sous la forme d’un État-nation, premiers mots d’ordre relatifs à la question sociale en lien avec la question démocratique17. Pour autant, les enjeux et les lignes de fracture se sont déplacés sous l’effet des transformations socio-économiques des années 1850 et 186018. En cela, on peut parler d’une nouvelle occurrence, qui prend la suite du Printemps des peuples, de la guerre civile européenne qui se déroule au cours du long xixe siècle. Cette guerre civile européenne a été théorisée, dans le sillage des travaux d’Eric J. Hobsbawm ou d’Enzo Traverso pour la première moitié du xxe siècle19, par Jordi Canal qui postulait que « les guerres civiles qui opposèrent, tout au long du xixe siècle, révolutionnaires et contre-révolutionnaires dans les États-nation en construction de l’Europe occidentale peuvent être considérées comme les pièces d’une grande guerre civile européenne20 ». Le moment 1860-1875 serait alors l’une de ces pièces.
7Les années 1860 débutent avec quatre événements qui conduisent à la renaissance de clivages forts dans les mondes européen et américain. La guerre de Sécession (1861-1865) aux États-Unis présente des potentialités révolutionnaires et des répercussions en Europe qui sont bien mises en avant par Marx notamment, qui ne manque pas de les rapprocher de la situation en Europe21. Cette guerre, dont on a longtemps oublié l’aspect international22, coïncide avec l’unification italienne et l’émergence de la question romaine, qui provoque des troubles majeurs dans la péninsule italienne et dans toute l’Europe23 ; avec l’arrivée au pouvoir en Prusse de Bismarck et la mise en place du processus d’unification de l’Allemagne, notamment contre l’Autriche et la France catholiques24 ; ainsi qu’avec la création de l’Association internationale des travailleurs (AIT) [1864], qui renforce la visibilité et l’influence d’un courant socialiste, révolutionnaire et ouvrier qui prend racine dans les débuts du siècle25. Ces bouleversements mettent en place les conditions d’une nouvelle fracture au sein des opinions des deux rives de l’Atlantique, d’autant que l’expédition mexicaine de 1861-1867, pièce majeure du dispositif diplomatique de Napoléon III pour contrer la montée en puissance des États-Unis, confirme la dimension transatlantique des transformations en cours26.
8La révolution espagnole de 1868 est un moment important de ce tournant révolutionnaire27. Elle constitue la première révolution de ces années et coïncide avec le début de la guerre des Dix Ans à Cuba (1868-1878), ce qui souligne une nouvelle fois la dimension transatlantique de ce tournant28. Au même moment, les relations que développent les révolutionnaires espagnols et leurs homologues italiens illustrent une solidarité libérale et républicaine transnationale29 tandis que celle des catholiques intransigeants, réunis dans les zouaves pontificaux, ne parvient pas à sauver la Rome papale qui tombe en septembre 1870, couronnant le Risorgimento30. Au cours de la même séquence, la guerre franco-allemande parachève l’unification prônée par Bismarck et ouvre un cycle révolutionnaire en France qui, après l’instauration de la République le 4 septembre 1870, voit la Commune de Paris triomphante le 18 mars et écrasée dans le sang le 28 mai 187131.
9Cette étape française relance les processus de mobilisation, tant du côté des contre-révolutionnaires que de celui des révolutionnaires. Les tentatives de restauration du comte de Chambord en France en 1871 et 187332 ont pour pendants ailleurs en Europe la seconde guerre carliste (1872-1876)33 et la mobilisation autour du Saint-Siège des catholiques intransigeants34. Quant à la Commune, elle trouve ses épigones dans le mouvement cantonaliste espagnol de 1873 et dans une Internationale revivifiée par l’exil communard, malgré les dissensions qui marquent les années 187035. La France reste ainsi, par certains aspects, un pivot des mobilisations révolutionnaires et contre-révolutionnaires qui structurent le monde atlantique des années 1870.
Une interprétation apocalyptique de l’histoire
10Les contre-révolutionnaires font preuve d’une conscience aiguë des bouleversements à l’œuvre dès les années 1860. La place qu’occupe, dans leur univers mental, la question de la souveraineté temporelle du Saint-Siège les conduit à se mobiliser dès le début des années 1860 contre la menace qu’ils voient se lever36. Les différents événements décrits réactualisent en permanence cette peur de la révolution et la renforcent en consacrant l’idée d’une révolution qui dévore tout sur son passage et conduit le monde vers l’abîme. Une telle vision est l’héritière de la pensée développée pendant la Révolution française par le philosophe Joseph de Maistre, qui voyait dans la Révolution un châtiment imposé par Dieu à des sociétés qui s’étaient détournées de la religion37. Une réinterprétation décisive de cette lecture du monde se produit dans le sillage des bouleversements du Printemps des peuples, réinterprétation aux accents beaucoup plus catastrophistes qui oppose à la Providence divine la Révolution satanique et prédit à terme l’Apocalypse38. Le philosophe espagnol Juan Donoso Cortés est particulièrement représentatif de ce tournant, qui abandonne son libéralisme modéré pour un catholicisme contre-révolutionnaire à la faveur des mouvements de 184839.
11C’est donc une lecture apocalyptique et millénariste de l’actualité que font les penseurs contre-révolutionnaires tout au long de ces quinze années, une lecture qui postule la cohérence du moment historique auquel ils sont confrontés. Par-delà la question de savoir si les clivages politiques et les mots d’ordre ont réellement changé depuis 1848, il est certain que la perception qu’en ont les acteurs s’inscrit à la fois dans la continuité et en rupture avec le Printemps des peuples. Si la panique qui saisit monarchistes et catholiques est indéniablement l’héritière de celle qui avait frappé les conservateurs quelques années plus tôt, au point que leur discours se réclame des renouvellements idéologiques provoqués par le Printemps des peuples, elle est tout aussi clairement la conséquence des bouleversements qui traversent le monde atlantique dans les années 1860 et 1870 et qui sont perçus par les acteurs comme bien distincts de ceux de 1848-1849, notamment du fait de la naissance de la Première Internationale, qui personnifie dès sa création l’ennemi diabolique qu’il s’agit de combattre.
12En bien des occasions, cette analyse reste cantonnée au continent européen, ce qui s’explique par la centralité absolue de la question romaine pour ce champ politique, mais aussi parce que la séquence 1868-1871, qui voit des bouleversements se produire très rapidement en Espagne, en Italie et en France, suscite une littérature très abondante40. Pour autant, l’affrontement mondial de la révolution et du catholicisme déborde les frontières de l’Europe. Le journaliste catholique Antonio Aparisi y Guijarro interpelle ainsi les lecteurs du journal néocatholique La Regeneración le 2 janvier 1872 :
« et vous n’entendez pas les coups par lesquels, de temps à autre, l’Internationale fait trembler les portes de la ville ? Comment se fait-il que nous ne courions pas aux murailles pour les défendre ? Pourquoi la ligue catholique ne répond-elle pas encore par des manifestations resplendissantes à la ligue maçonnique ? Contre l’Internationale impie, pourquoi une Internationale chrétienne n’est-elle pas encore organisée ? […] Le Pape prisonnier, l’Église persécutée, la révolution déchaînée, l’Internationale aux portes : et tous les catholiques, nous ne sommes pas encore unis en un seul camp41 ? ».
13Face à cette menace révolutionnaire, la certitude d’une contre-révolution, devant inévitablement suivre la révolution dans la pensée de Maistre, se teinte sous la plume de ces auteurs d’un profond mysticisme qui correspond bien aux évolutions du catholicisme dans cette seconde moitié du xixe siècle. Il ne s’agit ici que d’une première approche, effectuée à partir d’un corpus principalement franco-espagnol, et portant principalement sur la situation européenne. Des recherches plus amples dans la production contre-révolutionnaire des années 1860 et 1870 mettraient mieux en valeur la perception des différents événements évoqués plus haut, en particulier sur le continent américain, et éclaireraient la façon dont ils sont insérés ou non dans un schéma d’explication générale.
14Ce premier temps de la réflexion aspirait à souligner trois éléments. D’abord, la période 1860-1875 voit se succéder des bouleversements nombreux et rapides sur les deux rives de l’Atlantique qui laissent penser à un cycle révolutionnaire, c’est-à-dire à une période assez brève de transformations profondes. Ensuite, ce cycle révolutionnaire est pour partie le produit d’un rejeu des revendications et des politisations de 1848, mais réagencées en fonction de nouvelles coordonnées ; en particulier, l’émergence d’un mouvement ouvrier international structuré avec l’apparition de l’AIT semble d’une grande importance42. D’ailleurs, et enfin, c’est cet acteur qui est érigé en repoussoir par les penseurs contre-révolutionnaires confrontés à ces événements ; et c’est à partir de l’épouvantail de l’AIT qu’ils incarnent et construisent la cohérence de cette séquence, comme étant celle d’une offensive révolutionnaire diabolique qui vise à renverser le christianisme. Par-delà les rapprochements entre tel et tel mouvement, tel et tel épisode, la perception qu’ont les acteurs de leur matrice commune justifierait qu’on les étudie ensemble, un travail qui est encore en bonne partie à faire, en particulier pour la rive américaine de l’espace atlantique.
Contre-révolutionnaires entre deux continents
L’Italie du Risorgimento et les États-Unis de la guerre civile : deux terrains d’engagement
15Plutôt que sur les textes et sur l’histoire des circulations idéologiques, cette contribution se propose de prouver la cohérence entre ces différents champs de bataille et ces différents combats à partir de la pérégrination des volontaires internationaux contre-révolutionnaires entre les différents terrains43. L’hypothèse défendue est que le fait que l’on retrouve des volontaires étrangers qui se réclament d’une idéologie contre-révolutionnaire sur les différents théâtres de conflits de l’époque prouve que, dans leur appréhension du réel, il y a bel et bien une unité entre tous ces événements. Simon Sarlin a par ailleurs bien montré la généralisation de cette forme d’engagement à toutes les familles politiques de l’époque, généralisation qu’il attribue à la prégnance du romantisme politique dans les décennies centrales du xixe siècle et qui explique en partie la structuration de véritables « carrières » de volontaire international44. Une étude générale du volontariat contre-révolutionnaire atlantique est encore à mener, et les pages qui suivent ne prétendent qu’à une première approche de la question, fondée en partie sur une bibliographie secondaire très inégale.
16À la différence de la première45, la deuxième guerre d’indépendance italienne n’a pas été traitée sous l’angle du volontariat international. Ses suites immédiates, en particulier l’expédition des Mille dans le royaume des Deux-Siciles et la réduction des États Pontificaux au seul Latium après la bataille de Castelfidardo, sont en revanche des moments cruciaux pour la mobilisation armée des contre-révolutionnaires, dans la mesure où ces épisodes placent au cœur du débat la question romaine, vecteur essentiel de politisation pour les catholiques au milieu du siècle. On retrouve donc des volontaires internationaux sur deux terrains italiens au début des années 1860. D’une part, les troupes pontificales qu’affrontent les Piémontais à Castelfidardo sont en grande partie composée d’étrangers, notamment de Français et de Belges venus défendre les États pontificaux : le général légitimiste Georges de Pimodan y trouve ainsi la mort46. D’autre part, dans le sud de l’Italie, la disparition du royaume des Deux-Siciles conduit à l’émergence d’un brigandage qui reçoit le soutien des contre-révolutionnaires étrangers, en particulier des carlistes espagnols, qui partent se battre dans le sud de l’Italie ; le général carliste José Borges y trouve la mort47.
17Au même moment, sur l’autre rive de l’Atlantique, la guerre de Sécession déchire les États-Unis sur des questions apparemment bien différentes, et qui ne se rabattent pas sur les clivages politiques classiques du continent européen. Et pourtant, cette guerre attire des volontaires internationaux dans les deux camps : du côté unioniste, les recrues sont plutôt libérales ou républicaines48 ; du côté confédéré, les contre-révolutionnaires accourent pour sauver une société qu’ils assimilent à une société d’Ancien Régime. Si ce volontariat n’a pas fait l’objet d’une étude systématique qui aille au-delà du constat de la présence d’étrangers, on dispose quand même de quelques informations. C’est particulièrement le cas concernant les carlistes, puisque le volontariat carliste dans la guerre de Sécession a fait l’objet d’une étude de Raúl Cancio Fernández49. Bien qu’il s’agisse d’un travail très décevant, les annexes donnent des informations factuelles sur les combattants et donnent un ordre de grandeur, à défaut de mieux. On peut ainsi établir que plusieurs dizaines d’Espagnols, de métropole mais aussi de Cuba, rejoignent les armées confédérées pendant le conflit, et combattent notamment aux côtés d’Italiens et de Français. Cancio Fernández a aussi mis au jour des textes de soutien à la cause confédérée de la part des carlistes, mais le soutien contre-révolutionnaire européen à la Confédération mériterait une étude beaucoup plus sérieuse et approfondie, à l’image de celui proposé par Farid Ameur sur l’engagement du comte de Paris dans l’armée de l’Union50.
Circulations transatlantiques autour de 1870
18Dans la péninsule italienne, le processus d’unification qui aboutit à la proclamation du royaume d’Italie en mars 1861 menace de plus en plus clairement, au cours des années 1860, l’État pontifical réduit à la ville de Rome et au Latium. Particulièrement intense dans la deuxième moitié de la décennie, l’engagement dans le corps des zouaves pontificaux, bataillon international chargé de défendre la papauté, est sans doute le plus important de tout le xixe siècle, et ce dans tous les camps politiques, puisque le corps des zouaves accueille plus de dix mille hommes au cours des dix années que dure son existence. Ce volontariat massif, pour lequel on dispose d’informations solides grâce à la matricule51 et qui fait actuellement l’objet de travaux comme ceux d’Arthur Hérisson, permet une observation plus globale des phénomènes à l’œuvre.
19Il convient d’abord de rappeler une évidence : même pour le volontariat international, les distances jouent un rôle important. Par conséquent, les Français, les Hollandais et les Belges sont les plus présents dans ce corps et les ressortissants du continent américain ont une présence quasi anecdotique. Néanmoins, on compte quelques dizaines d’engagés américains dans les zouaves52, et on observe même des cas d’engagement groupé, en particulier celui de 116 Canadiens qui partent le 30 août 1870 pour Rome. Bloqués par la guerre franco-allemande lorsqu’ils arrivent à Brest, ils ne parviennent pas à rejoindre Rome avant sa chute le 20 septembre, mais ils sont quand même reconnus comme zouaves par le général Athanase de Charette, qui commande le corps53. Une dizaine d’années plus tard, en 1882, alors qu’il prépare un soulèvement en faveur du comte de Chambord en France pour restaurer la monarchie, soulèvement qui s’appuierait sur l’architecture militaire des zouaves pontificaux, Charette se rend d’ailleurs au Canada pour s’assurer de la disponibilité de ces hommes venus défendre Rome à la fin des années 186054. Le projet d’insurrection ne se concrétise jamais, mais nombreux sont les volontaires au sein de ce groupe à participer à la répression de la révolte du Nord-Ouest au Canada en 1884, révolte menée par Louis Riel, en délicatesse avec Rome en raison de son mysticisme et de sa certitude d’être un prophète55.
20Dans l’Europe d’après la chute de l’État pontifical, deux terrains de guerre suscitent à nouveau des engagements contre-révolutionnaires. Il s’agit tout d’abord de la France de 1870-1871, confrontée à l’invasion de son territoire par l’Allemagne en formation. Après la chute du Second Empire, la Défense nationale fondée sur les corps francs suscite des engagements politisés et internationaux. Côté contre-révolutionnaire, les forces s’organisent autour des Volontaires de l’Ouest de Charette, qui sont les héritiers des zouaves pontificaux, et des Volontaires vendéens dirigés par Henri de Cathelineau, sorte de Garibaldi de la contre-révolution. Là encore, la proximité géographique joue, avec des engagés étrangers principalement belges et italiens, mais on continue de compter quelques Américains de différents pays du continent56. La situation est semblable sur l’autre terrain qui suscite un volontariat armé contre-révolutionnaire dans les années 1870 : l’Espagne, où les carlistes, c’est-à-dire les royalistes espagnols mènent une guerre civile contre le gouvernement de Madrid entre 1872 et 187657.
21Pour finir ce panorama du volontariat contre-révolutionnaire atlantique des années 1860-1870, il convient de mentionner un dernier terrain, encore très peu étudié mais qui semble particulièrement prometteur : celui des guerres coloniales et postcoloniales dans l’Amérique hispanique. Plus précisément, l’expédition du Mexique de 1861-1867 et la première guerre d’indépendance cubaine de 1868-1878 marquent l’Amérique postcoloniale de l’époque58. Hors quelques cas individuels, il n’existe pas à ce jour de chiffres ou de données concernant un possible volontariat contre-révolutionnaire dans ces guerres, mais il serait intéressant d’envisager ces épisodes dans une perspective politique et transnationale, notamment au prisme de la recomposition des identités nationales dans l’espace postimpérial hispanique, dont de récents travaux montrent qu’elle n’est pas si tranchée qu’on pourrait le croire59. Ce bref parcours géographique et chronologique laisse voir un véritable phénomène de pérégrination de combattants contre-révolutionnaires qui partent défendre leurs idées dans d’autres pays et y compris sur d’autres continents entre 1860 et 1875, ce qui laisse penser que cette séquence possède, pour eux, une réelle cohérence. Dans un dernier moment, on peut se livrer à la description de quelques parcours individuels et passer d’une approche quantitative à une approche qualitative, qui implique de mobiliser des arguments d’un autre ordre.
Itinéraires individuels
22Certes, identifier des groupes de volontaires appartenant à une même culture politique transnationale sur différents théâtres de guerre constitue une première preuve que les contre-révolutionnaires ont pu percevoir le moment 1860-1875 comme cohérent politiquement, et comme un cycle révolutionnaire auquel il fallait opposer la mobilisation catholique et légitimiste. Pour autant, la focalisation sur des parcours individuels permet de pousser plus loin encore l’analyse en montrant que des combattants individuels ont bel et bien navigué entre différentes expériences de volontariat. Cela constitue un signe du lien qu’ils établissent entre ces causes, par-delà les autres motivations possibles dans la poursuite de ce volontariat, et cela signifie que l’analyse collective proposée plus haut s’applique aussi à un certain nombre de parcours individuels.
23Le cas le plus emblématique de ce type de parcours, même s’il n’est qu’européen, commence en amont de ce cycle des années 1860-1870 et concerne le Garibaldi de la contre-révolution : Henri de Cathelineau, descendant du chef vendéen des années 1790. Après avoir participé à l’expédition de la duchesse de Berry en 1832 en Vendée, qui visait à favoriser une restauration légitimiste après la révolution de Juillet et la perte du pouvoir par la branche aînée des Bourbons, Cathelineau combat avec les miguélistes portugais, qui affrontent aux côtés du prétendant absolutiste dom Miguel les libéraux partisans de la reine Marie II (1828-1834), avant de s’engager en faveur du prétendant don Carlos, qui revendique le trône en Espagne après la mort de son frère Ferdinand VII et la transmission de la couronne à sa fille Isabelle (1833-1840). Sa carrière de volontaire reprend dans les années 1860, lorsqu’il s’engage dans le combat contre le Risorgimento, successivement aux côtés de François II, le roi des Deux-Siciles, et du pape Pie IX. En 1870, alors que la France affronte les armées prussiennes et leurs alliées, il crée les Volontaires vendéens pour lutter contre l’avancée des Allemands, dans le cadre de la Défense nationale promue par Léon Gambetta. À près de soixante ans, la seconde guerre carliste lui permet, en 1872 de reprendre du service, même s’il ne combat plus et se contente de prodiguer des conseils à l’état-major carliste60.
24Si ce parcours est exclusivement européen, on dispose d’exemples qui montrent que les circulations atlantiques ne sont pas en reste. Un cas emblématique est celui de Jean Blunt, un Américain né à Washington en 1848, qui s’engage à Rome comme Zouave Pontifical puis dans le corps des Volontaires de l’Ouest en France en 187161. Il entre par la suite dans l’armée carliste et joue pendant la guerre le rôle d’intermédiaire de don Carlos sur les deux rives de la Bidassoa62. Ce volontaire est passé à la postérité sous la plume de Joseph Conrad, puisqu’il aurait été l’adversaire de l’écrivain britannique, alors encore jeune marin polonais, lors du duel qui les vit s’affronter pour les beaux yeux de la carliste Rita de Lastaola ; si la véracité de l’épisode est plus que douteuse, c’est en tout cas l’argument de La Flèche d’Or (1919)63. Ce cas invite à multiplier les études sur des parcours individuels qui connecteraient différents théâtres d’opération pour les volontaires contre-révolutionnaires.
25Évoquons pour terminer un cas exceptionnel mais suggestif d’engagement familial sur des théâtres de guerre des deux côtés de l’Atlantique. Il s’agit de quatre frères d’une famille de la petite noblesse pyrénéenne, les Barraute, qui sont rattachés par leur mère au carlisme, puisqu’elle est la sœur du général carliste Joaquín Elio. Tous quatre se retrouvent sur le front de la guerre carliste entre 1872 et 1876 et jouent un rôle éminent dans l’aide internationale au carlisme, au point qu’ils sont menacés, pour deux d’entre eux, d’être déchus de leur nationalité par les autorités françaises, sans que les procédures aboutissent64. Ce qui retient l’attention, c’est la diversité de leurs parcours de volontaires avant cet épisode. Si l’on excepte le plus jeune, Tristan, les frères Barraute n’en sont pas à leur premier engagement. Louis et Charles, deuxième et troisième de la fratrie dans le rang de naissance, ont combattu en France pendant la guerre de 1870. Louis avait auparavant servi à Rome dans les Zouaves Pontificaux, où il avait fait la connaissance d’Alfonso de Borbón, le frère de don Carlos, avec lequel il s’était lié d’amitié. Il s’engage d’ailleurs en Espagne en 1872 pour répondre à l’appel de son ancien compagnon d’armes. Quant à Xavier, l’aîné, après avoir pris part à l’expédition du Mexique, il s’engage dans les troupes espagnoles qui combattent l’insurrection indépendantiste à Cuba avant de rejoindre l’armée carliste. Les quatre frères Barraute reçoivent un poste de commandement plus ou moins élevé dans l’armée carliste et deviennent les porte-étendards du volontariat pro-carliste international65.
26Que retirer de l’exemple assez particulier de cette fratrie d’engagés ? Le cas de Louis, et de sa rencontre avec Alfonso, volontaire dans le corps des zouaves pontificaux, montre l’importance de reconstruire des parcours d’engagés. Voici un jeune homme parti défendre les États pontificaux à la fin des années 1860, qui rentre en France et s’engage contre la Prusse avant d’aller défendre le prétendant carliste de l’autre côté des Pyrénées. Son cas n’est pas isolé et souligne la permanence d’un volontariat contre-révolutionnaire au tournant des années 1870. Le cas de Xavier, quant à lui, révèle comment l’espace atlantique est présent dans les solidarités transnationales des catholiques et des légitimistes. On ne connaît pas les raisons de son engagement au Mexique et à Cuba, même s’il ne s’agit pas d’un phénomène isolé. La position des responsables carlistes sur Cuba permet toutefois d’éclairer a posteriori ce deuxième engagement, et souligne l’articulation complexe des différentes causes chez les volontaires. En novembre 1875, face aux menaces de guerre entre l’Espagne et les États-Unis au sujet de l’insurrection cubaine qui se poursuit depuis 1868, don Carlos propose en effet à son cousin Alphonse XII une trêve au nom de l’union nationale66. Il n’oublie pas toutefois d’attribuer la responsabilité de l’insurrection au libéralisme et à la révolution, et présente son opposition à toute indépendance de l’Île Très Fidèle comme la conséquence logique de sa propre vision royaliste et catholique du monde. Cette lettre rappelle que le carlisme entretient à l’endroit de Cuba un rapport complexe qui mériterait d’être davantage exploré : que les premières décisions de don Carlos lorsqu’il devient prétendant au trône d’Espagne en 1868 soient consacrées à la perle des Antilles en est une indication révélatrice67.
27L’ensemble de ces parcours se voulait une première approche pour une étude des circulations politiques transnationales dans le monde atlantique de la deuxième moitié du xixe siècle, en particulier au cours du cycle révolutionnaire des années 1860-1875 que cette contribution aspirait à isoler. S’il ne s’agit en aucun cas d’une recherche aboutie, souhaitons que ce travail puisse constituer un point de départ.
Notes de bas de page
1 Engels Friedrich et Marx Karl, La Guerre civile aux États-Unis : 1861-1865, Paris, Union générale d’éditions, 1970, p. 240.
2 Sur le concept de « cycle révolutionnaire », Middell Matthias, « Cycle révolutionnaire et histoire globale », Socio, 2|2013, mis en ligne le 15 avril 2014, [http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/socio/416 ; DOI : 10.4000/socio.416], consulté le 2 avril 2018 ; Aprile Sylvie, Hassner Pierre et Laurens Henry, « 1848, 1989, 2011. Il était une fois la révolution », Le Monde, 19 février 2011.
3 Pour une approche critique de 1814-1815 comme tournant : Chopelin Paul, Crépin Annie, De Francesco Antonino, Hême de Lacotte Rémy, McPhee Peter, Moullier Igor et Schönpflug Daniel, « 1815 : début de l’histoire “contemporaine” ? », Annales historiques de la Révolution française, 378|2014, p. 119-149. Pour le cycle de 1820-1821 : Carantoña Álvarez Francisco, « 1820, una revolución mediterránea. El impacto en España de los acontecimientos de Portugal, Italia y Grecia », Spagna Contemporanea, 2014, 46, p. 21-40. Pour 1830 : Aprile Sylvie, Caron Jean-Claude et Fureix Emmanuel (dir.), La liberté guidant les peuples : les révolutions de 1830 en Europe, Seyssel, Champ Vallon, 2013. Pour 1848 : Körner Axel, 1848 – a European revolution?: international ideas and national memories of 1848, Londres, MacMillan, 2000.
4 Armitage David et Subrahmanyam Sanjay (dir.), The Age of Revolutions in Global Context, c. 1760-1840, New York, Palgrave Macmillan, 2010.
5 Quelques références : Linebaugh Peter et Rediker Marcus, L’hydre aux mille têtes : l’histoire cachée de l’Atlantique révolutionnaire, Paris, Éd. Amsterdam, 2008 ; Diaz Delphine et al. (dir.), Exils entre les deux mondes. Migrations et espaces politiques atlantiques au xixe siècle, Mordelles, Les Perséides, 2015 ; Thibaud Clément, Entin Gabriel, Gomez Alejandro et Morelli Federica (dir.), L’Atlantique révolutionnaire. Une perspective ibéro-américaine, Bécherel, Les Perséides, 2013.
6 Taylor Miles, « The 1848 Revolutions and the British Empire », Past and Present, 166/1, 2000, p. 146-180.
7 Société d’histoire de la Révolution de 1848 et des révolutions du xixe siècle, « Les mondes de 1848 », colloque international, Paris, 12, 13 et 14 décembre 2018.
8 Zuñiga Jean-Paul, « L’Histoire impériale à l’heure de l’“histoire globale”. Une perspective atlantique », Revue d’histoire moderne et contemporaine, no 54-4bis, 2007|5, p. 54-68.
9 Doyle Don H., The Cause of all Nations. An International History of the American Civil War, New York, Basic Books, 2015.
10 Ameur Farid, Les Français dans la guerre de Sécession, 1861-1865, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2016.
11 Godechot Jacques, La Contre-Révolution. Doctrine et action 1789-1804, Paris, Presses universitaires de France, 1984.
12 Martin Jean-Clément (dir.), La contre-Révolution en Europe. xviiie-xixe siècles. Réalités politiques et sociales, résonances culturelles et idéologiques, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2001 ; Dumons Bruno et Multon Hilaire (dir.), Blancs et contre-révolutionnaires en Europe : espaces, réseaux, cultures et mémoires, fin xviiie-début xxe siècles : France, Italie, Espagne, Portugal, Rome, Éditions de l’École française de Rome, 2011.
13 Echeverri Marcela, « Popular Royalists, Empire, and Politics in Southwestern New Granada, 1809-1819 », Hispanic American Historical Review, 91/2, 2011, p. 238-269.
14 Voir les recherches de Romy Sánchez : Sánchez Romy, Quitter Cuba. Exilés et bannis au temps du séparatisme, 1834-1879, Rennes, Presses universitaires de Rennes, à paraître.
15 Pécout Gilles, « The international armed volunteers: pilgrims of a Transnational Risorgimento », Journal of Modern Italian Studies, 14/4, 2009, p. 413-426. Concernant la contre-révolution, voir Sarlin Simon, Le légitimisme en armes : histoire d’une mobilisation internationale contre l’unité italienne, Rome, Éditions de l’École française de Rome, 2013.
16 Cerutti Simona, « Who is below? E. P. Thompson, historien des sociétés modernes : une relecture », Annales. Histoire, Sciences Sociales, 70e année, 2015|4, p. 931-956.
17 Caron Jean-Claude, « “Printemps des peuples” : pour une autre lecture des révolutions de 1848 », Revue d’histoire du xixe siècle, 52/1, 2016, p. 31-45 ; Bensimon Fabrice, « L’Internationale des travailleurs », Romantisme, no 163, 2014|1, p. 53-62.
18 Verley Patrick, L’Échelle du monde. Essai sur l’industrialisation de l’Occident, Paris, Gallimard, 1997.
19 Hobsbawm Éric J., Franc-tireur : autobiographie, Paris, Hachette littératures, 2007 ; Traverso Enzo, À feu et à sang. De la guerre civile européenne, 1914-1945, Paris, Stock, 2007.
20 Canal Jordi, « Guerres civiles en Europe au xixe siècle, guerre civile européenne et Internationale blanche », in Jean-Paul Zúñiga (dir.), Pratiques du transnational. Terrains, preuves, limites, Paris, Centre de recherches historiques, 2011, p. 77.
21 Marx Karl et Lincoln Abraham, Une révolution inachevée. Sécession, guerre civile, esclavage et émancipation aux États-Unis, Paris/Montréal, Syllepse/M éditeur, 2012.
22 Doyle Don H. (dir.), American Civil Wars. The United States, Latin America, Europe and the Crisis of the 1860s, Chapel Hill, University of North Carolina Press, 2017.
23 Pécout Gilles, « Pour une lecture méditerranéenne et transnationale du Risorgimento », Revue d’histoire du xixe siècle, no 44, 2012|1, p. 29-47.
24 Burgaud Stéphanie, La politique russe de Bismarck et l’unification allemande. Mythe fondateur et réalités politiques, Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg, 2010 ; Bruley Yves, La diplomatie du Sphinx : Napoléon III et sa politique internationale, Paris, CLD Éditions, 2013.
25 Léonard Mathieu, L’émancipation des travailleurs, Une histoire de la Première Internationale, Paris, La Fabrique, 2011 ; Bensimon Fabrice, Deluermoz Quentin et Moisand Jeanne (dir.), « Arise Ye Wretched of the Earth ». The First International in a Global Perspective, Leyde/Boston, Brill, 2018 ; Delalande Nicolas, La lutte et l’entraide. L’âge des solidarités ouvrières, Paris, Le Seuil, 2019.
26 Pour une histoire de l’expédition mexicaine depuis l’impérialisme et le capitalisme financier : Topik Steven C., « When Mexico Had the Blues: A Transatlantic Tale of Bonds, Bankers, and Nationalists, 1862-1910 », The American Historical Review, 105/3, 2000, p. 714-738. Cette expédition est encore un point aveugle de l’historiographie du xixe siècle. Voir Avenel Jean, La campagne du Mexique, 1862-1867 : la fin de l’hégémonie européenne en Amérique du Nord, Paris, Économica, 1996.
27 Serrano García Rafael (dir.), España (1868-1874). Nuevos enfoques sobre el Sexenio Democrático, Valladolid, Consejería de Educación y Cultura de la Junta de Castilla y León, 2002 ; Higueras Castañera Eduardo et Belaustegui Unai, « Presentación Dossier. Entre la ruptura y la continuidad: la democratización y sus límites en el Sexenio (1868-1874) », Investigaciones Históricas. Época Moderna y Contemporánea, 37, 2017, p. 1-7. Le dossier met bien en avant les aspects transnationaux de ce moment révolutionnaire.
28 Ferrer Ada, Insurgent Cuba: Race, Nation, and Revolution, 1868-1898, Chapel Hill, University of North Carolina Press, 1999 ; Moisand Jeanne, « Migrant-e-s entre deux empires. Journaliers agricoles espagnols à Cuba et en Algérie dans les années 1880-1890 », Revue d’histoire du xixe siècle, no 51, 2015|2, p. 89-106.
29 Pascual Sastre Isabel María, La Italia del Risorgimento y la España del Sexenio Democrático, Madrid, Marcial Pons, 2002.
30 Guénel Jean, La dernière guerre du Pape. Les zouaves pontificaux au secours du Saint-Siège 1860-1870, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 1998.
31 Audoin Rouzeau Stéphane, 1870 : la France dans la guerre, Paris, Armand Colin, 1989 ; Tombs Robert, Paris, bivouac des révolutions. La Commune de 1871, Paris, Libertalia, 2014 (1999). Sur les dimensions internationales du conflit, voir Wetzel David, A Duel of Nations. Germany, France and the Diplomacy of the War of 1870-1871, Madison, University of Wisconsin Press, 2012.
32 Brown Marvin Luther Jr., The Comte de Chambord, the Third Republic’s uncompromising king, Durham, Duke university press, 1967.
33 Dupont Alexandre, Une internationale blanche. Histoire d’une mobilisation royaliste entre France et Espagne dans les années 1870, Paris, Éditions de la Sorbonne, 2020.
34 Lamberts Emiel (dir.), The Black International. L’internationale noire (1870-1878), Bruxelles, Presses universitaires de Louvain, 2002.
35 Moisand Jeanne, « Les exilés de la “République universelle”. Français et Espagnols en révolution (1868-1878) », in Delphine Diaz et al. (dir.), Exils entre les deux mondes. Migrations et espaces politiques atlantiques au xixe siècle, Mordelles, Les Perséides, 2015, p. 161-187 ; Moisand Jeanne, Les Fédérés du Numancia. Une Commune espagnole et ses mondes (1873), mémoire d’habilitation à diriger des recherches, université Panthéon-Sorbonne, 2020.
36 Pour le cas français, voir Hérisson Arthur, Les catholiques français face à l’unification italienne (1856-1871), thèse en histoire contemporaine, université Paris 1, 2018.
37 Maistre Joseph de, Écrits sur la Révolution, Paris, Presses universitaires de France, 1989. Pour une analyse renouvelée de la pensée et du corpus maistrien, voir Armenteros Carolina, The French Idea of History. Joseph de Maistre and his Heirs, 1794-1854, Ithaca/Londres, Cornell University Press, 2011 ; Armenteros Carolina et Lebrun Richard (dir.), Joseph de Maistre and his European Readers from Friedrich von Gentz to Isaiah Berlin, Leyde/Boston, Brill, 2011.
38 Multon Hilaire, Les temps sont proches : prophétisme politique et culture apocalyptique dans le catholicisme français et italien (1859-1878), thèse, université Paris 12, 2002.
39 Donoso Cortés Juan, Obras completas, Madrid, Ed. Católica, vol. 2, 1970, p. 187-204.
40 Vildósola Antonio Juan de, A la luz del incendio. Ultimas barricadas en París y primeras restauraciones en Europa, Madrid, 1871 ; Le grand pape et le grand Roi, ou traditions historiques, et dernier mot des prophéties, Toulouse, impr. de Hebrai, Durand et Cie, 1872 ; Joyeux Marcel, À M. Gabriel de Belcastel, député de la Haute-Garonne à l’Assemblée nationale – Rêves d’or, Saint-Dié, impr. de L. Humbert, 1873.
41 Aparisi Guijarro Antonio, Obras completas, Madrid, L. Dubrull, t. 3, 1873, p. 303. C’est moi qui traduis.
42 Sur l’importance de l’AIT dans le renforcement de circulations politiques transatlantiques, voir Cordillot Michel, Utopistes et exilés du nouveau monde aux États-Unis de 1848 à la Commune, Paris, Vendémiaire, 2013.
43 La bibliographie est pléthorique sur le volontariat militaire comme catégorie historique. On se contentera de rappeler ici la place centrale que lui accordait George Mosse il y a déjà quelques décennies dans la structuration du « mythe de guerre » et dans ses manifestations entre le milieu du xixe et le milieu du xxe siècle : Mosse George L., De la Grande Guerre au totalitarisme. La brutalisation des sociétés occidentales, Paris, Hachette Littératures, 1999 (1990).
44 Sarlin Simon, Le légitimisme en armes, op. cit.
45 Ignace Anne-Claire, « French volunteers in Italy, 1848-49: a collective incarnation of the fraternity of the peoples and of the tradition of French military engagement in Italy and Europe », Journal of Modern Italian Studies, 14/4, 2009, p. 445-460.
46 Guénel Jean, La dernière guerre du Pape, op. cit.
47 En plus des travaux de Simon Sarlin, voir Albònico Aldo, La mobilitazione legittimista contro il Regno d’Italia: la Spagna e il brigantaggio meridionale postunitario, Milano, A. Giuffrè, 1979.
48 Pour le cas français, Ameur Farid, Les Français dans la guerre de Sécession, op. cit. Pour une approche plus globale : Mahin Dean B., The Blessed Place of Freedom: Europeans in Civil War America, Dulles (Virginia), Brassey’s Inc., 2003.
49 Cancio Fernández Raúl C., España y la Guerra Civil americana o la globalización del contrarrevolucionismo, Alcalá de Henares, Instituto Franklin-Universidad de Alcalá de Henares, 2015.
50 Ameur Farid, Philippe d’Orléans, comte de Paris. Voyage en Amérique, 1861-1862. Un prince français dans la guerre de Sécession, Paris, Perrin, 2011.
51 Matricule des zouaves pontificaux, Lille, H. Morel, 1910-1920. Cette matricule, incomplète et parfois inexacte, doit être croisée avec celle conservée aux Archives secrètes du Vatican.
52 Sur l’implantation du catholicisme en Amérique du Nord au xixe siècle, voir Villerbu Tangi, Les missions du Minnesota. Catholicisme et colonisation dans l’Ouest américain, 1830-1860, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2014.
53 Matricules 10921 à 11036, auxquels il faut ajouter plus de trois cents cinquante autres engagements collectifs de Canadiens, le catholicisme québécois étant sans doute décisif ici.
54 Archives de la préfecture de police de Paris BA 404 – Menées légitimistes 1882-1883.
55 Miller James R., « From Riel to the Metis », Canadian Historical Review, 69/1, 1988, p. 1-20.
56 Dupont Alexandre, « “Ils y croyaient vraiment […] à ce millénaire rétrospectif tant attendu”. Légitimistes et catholiques à l’assaut du pouvoir (1870-1871) », in Caron Jean-Claude et Ponsard Nathalie (dir.), La France en guerre : cinq années « terribles », Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2018, p. 167-178. Sur Cathelineau : Sarlin Simon, « Henri de Cathelineau et l’expérience du volontariat armé contre-révolutionnaire dans l’Europe du xixe siècle », in Bruno Dumont et Hilaire Multon (dir.), Les Blancs et les contre-révolutionnaires en Europe, Rome, Éditions de l’École française de Rome, 2011, p. 365-377.
57 Dupont Alexandre, Une internationale blanche, op. cit., chapitre 10.
58 Pour une présentation générale des circulations dans l’Atlantique d’après les indépendances, Moisand Jeanne, « Introduction », Revue d’histoire du xixe siècle, 51, 2015|2, p. 7-13.
59 Simal Juan Luis, « Exils et circulations des idées politiques entre Amérique hispanique et Espagne après les indépendances (1820-1836) », Revue d’histoire du xixe siècle, 51, 2015|2, p. 35-51.
60 Outre les références déjà citées sur la Seconde guerre carliste et sur Cathelineau, on peut se référer à Cathelineau Victoire de Kermel, comtesse de, Le général comte de Cathelineau : chevalier de la Légion d’honneur, commandeur de l’ordre de Pie IX, chevalier de la Tour et l’Épée et de Don Miguel de Portugal : sa vie et ses mémoires, Paris, Desclée de Brouwer, 1909.
61 Archives départementales de la Vendée – 1 J 2232-1-2 : Nouaille-Degorce Patrick, « Matricule de la légion des Volontaires de l’Ouest (Zouaves Pontificaux) », ouvrage réalisé d’après l’exemplaire dactylographié du musée de Loigny, t. 2, 2002, p. 25.
62 Furley John, Among the carlists, Londres, S. Tinsley, 1876, chapitre 13.
63 Conrad Joseph, La Flèche d’or, un récit entre deux notes, Paris, Gallimard, 1928.
64 Pour une présentation plus détaillée de cette famille, Dupont Alexandre, « L’impossible déchéance de nationalité. L’État français face au volontariat militaire pro-carliste (1872-1876) », Le Mouvement Social, 2017|2, p. 99-110.
65 Joantho Louis de, Don Carlos et les Carlistes, notes, esquisses, portraits à la plume, Paris, Lachaud et Burdin, 1874, p. 88-92.
66 Borbón Carlos de, Escritos politicos de Carlos VII, Madrid, Ed. Nacional, 1957, p. 96-97.
67 Ibid., p. 32-37.
Auteur
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