Le corps prêché ou les métamorphoses d’un objet homilétique au xviiie siècle
p. 551-562
Texte intégral
1Discours dont l’objectif premier est d’expliquer l’Écriture aux fidèles réunis au moment du culte, le sermon est un document qui, dès lors qu’il est lu au prisme du corps, renvoie de prime abord à l’idée du corps du Christ, de sa Résurrection ou de l’Église en tant que corps vivant de Dieu. Ce n’est pourtant pas selon ces acceptions théologiques premières que le corps dans les sermons du Désert huguenot va être analysé. Il se retrouve bien entendu sous ces formes mais c’est en tant que corps de l’homme, composante physique de son être qu’il sera étudié. Comment le corps humain est présenté aux fidèles dans les discours de chaire du xviiie siècle qui restent des paroles pédagogiques et religieuses ? Quel message est véhiculé à travers le motif du corps et connaît-il des adaptations à la faveur d’une prédication du Désert ?
2Le corpus de travail regroupe les sermons des pasteurs Rabaut, père et fils, Paul Rabaut (1718-1794), Rabaut Saint-Étienne (1743-1793) et Rabaut-Pomier (1744- 1820), ministres à Nîmes pour les deux premiers, Marseille, Montpellier puis Paris jusqu’en 1813 pour le plus jeune. Tous les discours de ces pasteurs ne sont pas conservés, mais ces ministres en ont laissé environ trois cent quarante sur une période allant de 1741 (Paul Rabaut) à 1813 (Rabaut-Pomier). Seuls ceux antérieurs à 1791, date qui marque le début d’un culte protestant légalisé, ont été retenus soit un corpus de près de trois cents sermons1. Cette dynastie pastorale présente une triple pertinence d’un point de vue de la représentativité de cette sélection homilétique. Les documents choisis émanent tout d’abord d’une lignée pastorale dont le rôle, dans la reconstitution des Églises protestantes du royaume est certain. Paul Rabaut reste, après Antoine Court, le restaurateur du protestantisme dans le Désert héroïque des années 1730-1760 puis dans le second Désert2, avec l’aide de son fils aîné dès 17653. Leur parole peut, dès lors, être perçue comme représentant la voie officielle du protestantisme du Désert. Ensuite, les Églises dans lesquelles prêchèrent ces pasteurs4 font partie du « croissant huguenot » et leurs paroles sont ainsi largement diffusées face à un auditoire conséquent, en particulier pour la communauté de Nîmes puisqu’il s’agit ici d’une des Églises les plus importantes du royaume avec quelque 12 000 fidèles. Enfin, ces trois pasteurs permettent de cerner sur un même espace, le protestantisme méridional, cinquante années de prédication de 1741 à 1791 et comprendre ainsi les matrices ou éventuelles évolutions de la question du corps dans l’homilétique du xviiie siècle.
Le corps en tant que composante secondaire de l’homme
3La présence du corps comme objet du discours pastoral est réelle dans l’ensemble des corpus sélectionné. Le mot « corps » se retrouve dans les péricopes choisies pour la prédication, dans des thématiques morales ou d’éducation. Le terme est particulièrement présent dans le développement des sermons. En introduction, le champ d’étude de ce propos a été circonscrit au corps entendu comme « corps humain ». Ce dernier est très clairement défini comme étant une partie seulement de ce qui constitue l’homme puisque les fidèles sont « composés d’un corps & d’une âme » et possèdent « toutes les facultés qui sont nécessaires pour la conservation & pour le plaisir de l’un & de l’autre5 ». Cette dualité humaine permet d’assimiler, de fait, le corps à un autre terme très présent dans les sermons, celui de « chair ». Le corps est chair, l’âme est Esprit et les uns comme les autres constituent l’homme dans sa globalité individuelle. La première qualité donnée à ce corps, à cette chair humaine est l’excellence de sa réalisation :
« Les parties de votre corps sont si bien arrangées qu’elles se secourent & s’entretiennent mutuellement. Vos sens vous procurent à chaque instant mille sensations délicieuses6. »
4Cette perfection de l’agencement du corps humain est le signe de son origine divine, le corps montre l’œuvre parfaite de Dieu qui non seulement a fait l’homme à son image mais son corps de manière sublime7. Cette valorisation de la création corporelle ne signifie pas cependant que le corps soit la part capitale de l’homme. C’est l’âme qui occupe cette place, en suivant le même sermon de Rabaut Saint-Étienne de 1766 :
« Vôtre âme, la partie la plus noble & la plus essentielle de vous-mêmes a aussi ses avantages & ses plaisirs, d’autant plus vifs sans doute qu’elle est plus excellente que le corps8. »
5Nous retrouvons ici le postulat chrétien habituel de la supériorité de l’Esprit sur la chair qui fait préférer le corps vivant du Christ au corps vivant d’Adam et c’est d’ailleurs de la côte du premier qu’est sortie l’Église dont chaque fidèle compose un membre9 : la métaphore corporelle est poussée à son terme. Toutefois, le corps en tant que tel, n’est pas déprécié mais présenté positivement à l’ensemble des fidèles. Il y a cependant supériorité de l’Esprit sur la chair et elle s’adosse sur la finitude du corps par rapport à l’âme qui, elle, est immortelle. La vie éphémère du corps est mise en avant pour mieux montrer la finalité de la vie ici-bas qui est le salut de l’âme et non la satisfaction du corps.
6Ces sermons de la seconde moitié du xviiie siècle décrivent de manière assez précise le corps humain, en particulier lorsqu’il s’agit d’évoquer le corps vieillissant :
« Notre corps, comme presque toutes les parties de la matière est soumis à une loi générale par laquelle les corps germent, s’accroissent, diminuent & se décomposent. […] Les fibres devaient se durcir & contracter avec le temps une roideur qui les empêcherait d’obéir à la volonté. Les sens devaient s’émousser, ce foyer actif que nous appellons l’Estomach devait perdre peu à peu de sa chaleur ; le sang qui dans la jeunesse semble bouillonnant dans les veines coulera avec moins de rapidité, des humeurs étrangères viendront l’altérer ne se rendant que faiblement vers les extrémités, elles se ressentiront de sa lenteur ; la machine ébranlée par différens chocs, usée par les travaux, affaiblis par un jeu continuel & se décomposant par partie va bientôt se dissoudre, et toutes les particules dont elle est composée retourneront à leurs principes10. »
7Fibre musculaire, organes, humeurs… les connaissances médicales sont mises à profit pour expliquer le mécanisme du vieillissement qui touche tout être vivant : le corps étant d’ailleurs ici présenté comme une machine tel qu’avait pu le faire Descartes dans son ouvrage Les Passions de l’âme11. La même attention est donnée par Rabaut Saint-Étienne à décrire le moment de la mort, le corps mourant dont la circulation sanguine cesse et dont la vue s’obscurcit :
« Un homme vivait, jouissant de la santé, de ses forces, & du libre exercice de ses facultés : tout à coup, un mal imprévu l’attaque, les organes de son corps se dérangent, mille cris aigus qu’il pousse annoncent la grandeur de ses souffrances, il ne peut plus se soutenir, on l’étend sur un grabat. Bientôt ses forces diminuent encore davantage, le sang se fige dans les veines, la bouche prononce que des sons inarticulés, les idées se confondent, les yeux se troublent ; en vain s’empresse-t-on autour de lui pour ranimer une chaleur prête à s’éteindre, tous les secours sont inutiles, la lumière disparaît à ses yeux, les artères cessent de battre, il pousse encore un soupir et il meurt12. »
8Souci du détail et de la description dans une parole qui utilise la physique du corps pour montrer son infériorité à l’Esprit : l’âme est la partie la plus noble de l’homme car c’est à travers elle qu’il survit et gagne son immortalité comme l’indique Paul Rabaut dans un sermon de 1750 :
« Voilà à quoi se borne [sic] les pouvoirs des hommes : ils peuvent fracasser nos os, réduire notre corps en poudre, nous oter l’usage des choses sensibles, mais pour notre ame elle est hors de leurs atteintes13. »
9L’idée de la part secondaire que constitue le corps s’appuie également sur le fait qu’il est le siège des passions14 et que celles-ci déforment la chair qui n’est plus alors à l’image de la perfection divine. Les passions du corps éloignent l’homme de Dieu. À l’occasion d’un sermon sur la colère, qui a été prêché dans six Églises différentes par Rabaut Saint-Étienne – signe de l’intérêt pour cette thématique – on relève le passage suivant :
« Oh mon Dieu, je ne reconnais plus alors cet être que vous avez formé à votre image et qui devrait toujours porter sur son front le caractère auguste de son origine. Sa physionomie s’altère, ses traits changent son visage s’enflamme, ses yeux s’allument & lancent des regards effrayants, les mouvemens de son corps sont convulsifs & furieux, sa bouche précipite des sons désarticulés qui expriment toute la fureur de son âme ; une chaleur subite répandue sur son corps en un signe expressif du feu intérieur qui le dévore15. »
10Le corps est soumis à des sentiments, à des passions, signe de faiblesse contrairement à l’Esprit, fortifié par la foi16. Un dernier élément permet de poser le corps comme inférieur à l’âme : le corps est le subalterne de cette dernière, il n’est rien sans elle comme l’explique Rabaut Saint-Étienne à la fin des années 1770 : « C’est elle qui peut sentir le plaisir qu’il y a de raisonner juste, de faire de bonne action, de jouir de l’approbation de la conscience17 », alors que son père prêchait déjà au milieu du siècle :
« L’ame est la plus noble la plus considérable partie de nous même c’est la source de la vie, du plaisir & de la douleur, de la misère & de la félicité. Sans elle le corps n’est qu’une lourde marre sans aucun sentiment18. »
11Voici les fondements pour comprendre pourquoi le corps importe peu face au salut de l’âme. En effet, dans le corpus documentaire choisi, le fidèle doit savoir endurer les souffrances de la chair pour sauver son âme. Il faut ici replacer ces textes dans leur contexte de rédaction, en tout cas jusqu’aux années 1760, c’est-à-dire le Désert héroïque durant lequel les huguenots eurent à subir de nombreuses vexations morales et physiques de la part des autorités civiles et religieuses pour tenter de convertir au catholicisme les « nouveaux convertis » récalcitrants. N’oublions pas que nous sommes avec les deux premiers pasteurs Rabaut dans l’Église de Nîmes, une communauté nombreuse comme cela a été rappelé en introduction : cette Église eut à subir les campagnes de rebaptisation, l’envoi de soldats lors des assemblées du Désert, ainsi que d’autres afflictions qui ont scandé la vie de ces huguenots du Languedoc, comme du reste du royaume. Les sermons du temps valorisent alors le corps martyr, le corps souffrant jusqu’à l’extrême qui résiste et qui devient alors le signe de la fidélité à Dieu19 : parce qu’il est moins important que l’âme, il faut en faire fi et savoir sauver l’essentiel qu’est l’Esprit. Plus encore, le corps à qui on impose des violences pour contraindre les consciences ne doit pas devenir un corps violent – la violence n’est jamais la bonne réponse – mais doit être un corps patient et endurant, jusqu’à la mort qui est, comme nous l’avons vu, de peu d’importance puisque l’âme seule compte20. La figure du corps du Christ, souffrant sur la croix est donc logiquement érigée en modèle corporel à suivre.
12Bien sûr, en avançant dans le siècle, les persécutions diminuant, l’idéal de la souffrance du martyre pour tenir ferme sa foi protestante ne peut plus être invoqué. Il ne faut pas oublier que ces sermons reposent certes sur l’Écriture mais aussi s’adaptent au public, au contexte et doivent donc être des paroles de circonstances pour remplir pleinement leur rôle pédagogique. De la sorte, sans aller jusqu’à l’extrémité que représente la mort, les fidèles présents lors de ces prêches sont constamment invités à être eux-mêmes inflexibles envers leur propre corps car celui-ci doit être en permanence, comme l’indique Paul Rabaut, un corps « dompté21 » et comme le répète Rabaut-Pomier au milieu des années 1780 :
« L’obéissance que Dieu exige du Chrétien moderne renferme des devoirs plus faciles à pratiquer, [Dieu] vous demande, non de lui immoler votre vie, ni même les agréments de la vie, mais seulement les plaisirs injustes et funestes du péché, il exige que vous soyez saints, dans vos corps pour ne commettre aucune action déshonnête et qui déshonore en vous le temps de la divinité22. »
Le corps gouverné ou la domination du corps par l’Esprit
13Le corps doit être dominé et gouverné car, explique Paul Rabaut, « le vrai chrétien doit vivre non selon la chair mais selon l’Esprit23 ».
14Un premier élément dans l’explication de cet impératif est que le corps demeure le siège des passions et simultanément « le temple de l’Esprit24 » selon la Première Épître de Saint Paul aux Corinthiens (6,19) : « Ne savez vous pas que votre corps est le temple de l’esprit », péricope d’ailleurs utilisée par Rabaut-Pomier pour construire son sermon de Pentecôte 1779. Dans ce discours, il explique l’importance de ne pas céder aux vices car Saint Paul « dit que le corps étant le temple du Saint Esprit, [les Corinthiens] doivent bien se garder de le souiller & le consacrer plutôt au Dieu qui y habite25 ». Siège de l’Esprit, le corps de l’homme appartient en outre au Christ et cette union avec Dieu implique des devoirs :
« Que dirons-nous donc des chrétiens qui vivent dans l’impureté ? Certes il est clair qu’ils se retranchent de la communion du Seigneur Jésus, ils otent à JC ses membres pour en faire les membres d’une prostituée26. »
15Ce passage pose la question de la nature des passions qui rongent le corps. Le dernier mot laisse deviner que parmi les tourments se retrouve celui de la volupté de la chair. Tentons un inventaire de ce qui peut « faire chuter » le corps dans les sermons analysés. Un premier ensemble s’appuie sur des éléments de discours traditionnels d’un point de vue chrétien : les passions néfastes sont « les jeux, les danses, les spectacles, & tous les divertissements mondains… elles sont des acheminements au péché » explique Paul Rabaut en 174927. Ces moments de promiscuité corporelle, d’exposition des corps sont le lieu de tous les dangers car ils « sont propres à émouvoir les passions28 », telles les pièces de théâtre montrées du doigt par le pasteur car
« [les pièces de théatres] fournissent de nouveaux alimens à cette passion, les scènes amoureuses qu’on y déclame, l’air passionné, les gestes, la manière de se mettre des actrices, tous continue [sic] à alumer un feu qui avoit besoin qu’on y jettoit de l’eau & non de l’huile, ceux qui désirent de conserver leur corps dans la chasteté & dans l’honnêteté sentiront sans doute la force de cette considération29».
16Avec cet exemple, nous comprenons que la chute du corps n’est pas simplement dans le geste qui se commet mais elle est aussi dans l’idée qui le prémédite. Ici, regarder des scènes amoureuses peut provoquer l’envie… tout aussi néfaste pour le corps que le passage à l’acte lui-même. Le cas de l’adultère permet aux pasteurs d’insister sur le fait que la vraie pureté du corps réside non pas simplement dans le fait de s’abstenir mais dans celui de ne pas avoir de pensées impures :
« Celui, dit JC, qui regarde une femme avec des yeux de convoitise a déjà commis adultère avec elle dans son cœur, c’est-à-dire que si on prend plaisir à entretenir dans l’ame des pensées impures & qu’on ne s’abstienne de commettre adultère que pour des considérations humaines on est aussi coupable aux yeux de Dieu, qui sont les cœurs et les reins, que si l’adultère étoit réellement commis30. »
17Les péchés proprement corporels sont relevés par Paul Rabaut en se fondant sur l’Épître aux Galates :
« Les œuvres de la chair [dit Saint Paul] sont manifestes, c’est l’adultère, la fornication, l’impureté, la dissolution, l’idolâtrie, l’empoisonnement, les inimitiés, les querelles, les jalousies, les animosités, les disputes, les sectes, les envies, les meurtres, l’ivrognerie, les débauches & choses semblables31… »
18Adultère, fornication transforment le corps en « charogne puante, créature maudite, esclave du démon et des plaisirs grossiers32 » et permettent d’expliquer à l’auditoire l’importance d’une pureté corporelle extérieure et intérieure pour le rendre digne d’abriter l’Esprit. Le corps est également mis en danger par des préoccupations plus particulières au xviiie siècle. Le « luxe », les « mondanités », les « distractions du siècle » sont mis en avant comme facteur de dérégulation des corps plus préoccupé alors par les choses visibles qui sont pourtant moins importantes que celles invisibles33. L’apparence et le faste sont dénoncés car ils provoquent souvent envie, jalousie et donc des sentiments préjudiciables à la pureté du corps, du cœur et de l’âme. Plus encore ancré dans le siècle des Lumières, le libertinage est de la même manière à bannir sous ses deux formes, libertinage de mœurs et d’esprit, à l’instar de ce sermon de Paul Rabaut :
« Evitez soigneusement la lecture de ces livres détestables ou l’on enseigne l’impiété & le libertinage, lisez au contraire fréquemment la parole de Dieu qui vous guidera sûrement dans toutes vos démarches & vous excitera toujours à bien faire34. »
19Sont, de fait, mis en avant les principes d’une morale chrétienne qui, en ce xviiie siècle, est particulièrement présente dans le catéchisme réformé. En effet, lorsque les Églises du Désert se reconstituent dans les années 1720, le catéchisme en vigueur est celui de Charles Drelincourt (1595-1669) qui date de 164235. Lors du synode national de 1744, les Églises réformées de France décident de lui préférer « l’Abrégé du catéchisme de M. Ostervald comme étant le plus clair & le plus méthodique » selon les termes mêmes du synode national36. Jean-Frédéric Ostervald (1666-1747), pasteur de Neuchâtel, avait publié son Catéchisme en 1702, et cet ouvrage était particulièrement destiné aux adultes, avec pour but d’apprendre différemment la religion de Calvin aux fidèles, c’est-à-dire de manière simplifiée et sous forme de questions/réponses37. En 1734, sort une édition condensée, intitulée Abrégé de l’histoire sainte et du Catéchisme38. L’importance de la morale et de la bonne conduite courent sur l’ensemble de ces livres et les remparts à un mésusage du corps sont notamment posés. Concernant par exemple les vêtements qui recouvrent le corps, il est écrit :
« D. L’Ecriture nous donne-t-elle des règles pour ces sortes de choses [il est ici question du « luxe » et du « faste »], & en particulier pour les habits ?
R. Elle nous recommande la simplicité. Et à l’égard des habits, elle ordonne d’y observer la Pudeur & la Modestie. St Paul donne cet avertissement aux Femmes Chrétiennes. ITim II v. 9,10. Que les femmes se parent d’un Vêtement honnête, avec Pudeur & Modestie, non point avec des frisures de cheveux, ni avec de l’or, ni avec des perles ; mais qu’elles se parent de bonnes œuvres, comme il est séant à des femmes qui font profession de servir Dieu.
D. Comment pêche-t-on contre la pudeur dans les habits ?
R. Quand on s’habille d’une manière libre & indécente, & qu’on ne couvre pas son corps comme la pureté & la chasteté le demande39. »
20La morale devient ainsi un thème privilégié de la prédication de Rabaut Saint-Étienne : 52 % des discours y renvoient alors que son père, qui a pourtant prêché dans la même Église, antérieurement et simultanément, ne s’y réfère que dans 16 % des sermons40.
21Un public est particulièrement visé dans les sermons de morale : les « jeunes gens », la « jeunesse », et les catéchumènes. Cet auditoire est spécifiquement désigné à plusieurs reprises par les différents pasteurs car, expliquent-ils, la jeunesse est l’« âge des passions », Rabaut Saint-Étienne ajoutant que « c’est dans cette époque dangereuse qu’elles établissent leur empire, & l’honneur ainsi que la félicité de toute une vie dépend [sic] de la manière dont on l’a commencé [sic]41 ». Pour cette jeunesse, il est encore temps de prendre de bonnes habitudes quant à ce qui regarde leur corps. Il faut donc le contraindre afin d’éviter la chute : la chasteté, la tempérance, la pudeur, la frugalité sont brandies dès que possible dans ces discours de moralisation des mœurs. Le corps policé est un corps dompté par ce qu’imposent l’Écriture, l’Esprit et la foi. Dans cette perspective cependant des éléments de prédications propres au siècle des Lumières sont délivrés aux fidèles concernant ce que l’on peut nommer une « économie du corps » fondée sur la santé et l’agrément de la vie ici-bas.
Une économie du corps : la santé et l’agrément
22Le corps doit être dompté, nous venons de l’expliquer, et les arguments exposés aux fidèles se fondent sur une apologétique traditionnellement protestante : importance du corps martyr, supériorité de l’âme sur le corps, chute de l’homme impur… Les propositions pour éviter les péchés proprement corporels sont aussi classiques. Comme le souligne Jacques Gélis dans le court paragraphe qu’il consacre aux protestants dans l’Histoire du corps, il n’y a pas de contrainte abusive du corps42. Il n’est nulle part question de s’imposer des flagellations ou des humiliations mais, pour les pasteurs, l’accent est mis sur la nécessité de s’imposer soi-même des contraintes physiques présentées comme des mortifications : « Mortifiés votre corps & accoutumés [sic] vous à un genre de vie pénible & laborieux » invective Paul Rabaut en 174943. Discours qu’il martèle encore dix en plus tard en expliquant que « le jeune, la prière, le travail en mortifiant le corps aident beaucoup à réprimer la fouge des passions44 ».
23L’exemplarité du corps du Christ, les principes de la morale chrétienne (le « légitime mariage » par exemple présenté comme un rempart à « l’incontinence ») parcourent l’ensemble de la parole pastorale. Toutefois cela n’est pas la seule manière d’aborder le nécessaire gouvernement du corps car la raison, l’attention donnée à la santé, à l’agrément, au bonheur entrent en jeu également pour l’expliquer. Nous sommes ici dans des éléments sans doute plus spécifiques à la seconde moitié du siècle. En effet, toutes les règles de conduite corporelle présentées par les pasteurs poursuivent un but qui n’est pas simplement spirituel mais aussi sanitaire. « Rien ne contribue plus à la santé du corps & à la bonne constitution du corps que l’observation des règles de modération & de tempérance que la religion prescrit », explique Paul Rabaut45. La religion c’est donc la santé assurée et c’est dès le plus jeune âge qu’il faut prendre de bonnes habitudes pour la préserver46 : la tempérance permet d’éviter les « maladies honteuses », préserve la transformation du corps de l’homme en corps purement animal47. Bien plus, dit Rabaut Saint-Étienne dans un discours de 1768, contenir ses passions c’est éviter la mort :
« Il est si vrai que l’intérieur du corps est réellement le théâtre des passions, qu’elles y produisent les révolutions les plus frappantes. […] On voit souvent des gens mourir de douleur : on en a vu mourir de joye, de colère, de dépit, de jalousie, d’orgueil. D’autres sont devenus malades, mélancholiques, paralytiques à la suite de quelques accès violent de passion ; on en a vû qui ont perdu la raison, d’autres qui ont perdu la mémoire48. »
24Remarquons qu’ici le pasteur a adopté l’idée, qui s’imposera peu à peu dans la seconde moitié du xviiie siècle, de la maladie du corps comme dysfonctionnement de la machine corporelle (fibres et humeurs) mais surtout comme provenant d’une perturbation dans l’irritabilité et la sensibilité du corps, vue provenant des travaux d’Albrecht von Haller dans les années 175049. Le sermon intègre les savoirs du temps concernant le corps et son fonctionnement.
25Un domaine permet particulièrement de faire le lien entre le corps dompté et la santé, et est nommé par les pasteurs « le boire et le manger ». Les ministres expliquent bien sûr à quelles occasions il faut pratiquer le jeûne : pour préserver la prospérité de sa patrie, pour l’avancement de la religion réformée et pour la « réformation » de la conduite des fidèles50. Le jeûne est d’ailleurs expliqué dans le Catéchisme d’Ostervald « comme un effet de la douleur ou de la dévotion dont le cœur est pénétré, & comme un moyen très propre pour se mortifier, pour dompter la chair & pour se disposer à l’humiliation & au service de Dieu51 ». Les pasteurs mettent également en valeur non pas la privation de nourriture, mais la frugalité, pour des raisons de modération du corps et de bonne santé de ce dernier comme le montre l’extrait d’un sermon de Rabaut Saint- Étienne sur le repas donné par Abraham dans le dix-huitième chapitre de la Genèse :
« La frugalité est une autre vertu dont Abraham nous donne l’exemple. C’est elle qui nous apprend à nous contenter de peu dans le marger et dans le boire. […] Par elle notre corps entretient & accroit la vigueur, notre fortune se conserve, notre raison s’affermit, toutes nos facultés se fortifient & s’accroissent, et l’on pourrait dire qu’elle est à l’homme, ce que sont à la terre ces pluyes modérées & fécondes, qui sans inonder le terrain, la rafraichissent, l’humectent & le fertilisent. »
26L’image du patriarche est doublée, dans un souci pédagogique concret, par celle du climat dans cette région méditerranéenne du Languedoc où les pluies torrentielles pouvaient faire des ravages. Le pasteur continue sur une tonalité plus médicale :
« L’intempérance dans le manger et dans le boire nuit à la santé. L’expérience nous démontre qu’un grand nombre des maladies qui nous assiègent viennent de notre intempérance, & de cette passion méprisable qui nous porte à prendre des alimens, au delà de ce que la raison & la nature nous demandent. Nous le savons cependant ; on nous l’a dit mille fois, la nature se contente de peu. Que faut-il pour appaiser la faim du laboureur le plus vigoureux & le plus robuste ? Un morceau de pain, et quelques légumes. Que faut-il pour appaiser sa soif ? De l’eau ; et tout au plus un peu de cette liqueur qu’il a pressé lui-même. »
27Le pasteur ouvre alors son propos pour le rendre universel, apostrophant le bourgeois et l’homme de toute condition :
« Habitants des villes riches qui savez ce que c’est que la bonne chaire, hommes de tous les états qui avez eû le malheur de connaître l’intempérance, dites-vous si jamais votre santé a été plus forte que lorsque vous avez été sobres, si votre corps n’était pas plus léger, votre humeur plus douce, votre cœur plus content, vos sens plus purs, les objets qui vous entouraient plus agréables ; dites-nous si jamais vous avez mieux jouï de la vie que lorsque vous avez songé le moins à l’entretenir52 ! »
28Dans cet extrait, est mise en avant une notion essentielle, celle de la modération. Pour cela, le pasteur part dans sa démonstration d’un personnage biblique Abraham mais tout son raisonnement en appelle à la « raison », à l’« expérience » pour en tirer les leçons d’une bonne conduite à avoir pour conserver un corps sain53. Et bien plus qu’un simple souci de conservation c’est le « jouir de la vie » qui l’importe au final. Le bonheur et le plaisir sont donc la finalité aussi de ce comportement modéré du corps qui s’alimente et s’abreuve. Cette frugalité porte le nom de « sobriété » dans le Catéchisme d’Ostervald qui mentionne encore que les « excès [de Gourmandise et d’Yvrognerie] nuisent à la Santé, abbrègent & consumment le bien & le tems54 ».
29La frugalité ou sobriété exemplaire ne signifie pas « se priver des besoins » que Dieu a donné à l’homme et, Rabaut Saint-Étienne l’explique en affirmant que les passions montrées du doigt par les « prédicateurs » sont « ces mouvements déréglés qui nous portent à rechercher ardemment des choses pernicieuses, honteuses, ou défendues55 ». Il ajoute qu’en ce sens les philosophes, prompts à critiquer la morale chrétienne, seront obligés d’être d’accord avec les hommes d’Églises : les passions dont le corps est le théâtre sont donc « innocentes dans leur principe » mais « criminelles par leur excès56 ». Nous sommes en 1768 quand le pasteur prononce ces paroles et, dans ce sermon, l’influence semble forte de l’orthodoxie raisonnée de Jean-Alphonse Turretini, interprétation théologique qui a été au fondement de son enseignement à Lausanne. Le pasteur avance des arguments non plus simplement édifiés sur la Révélation mais aussi sur la Raison pour expliquer une économie du corps à ses fidèles, arguments mâtinés du sensualisme de Condillac parfois alors qu’il explique aussi, mais de manière marginale, que la connaissance, les idées qui animent l’âme viennent des sensations que lui procure le corps.
30Cette économie du corps se prolonge dans l’attention que les pasteurs accordent à soulager les souffrances du corps lorsqu’elles ne sont pas dictées par des impératifs religieux et moraux, car elles sont alors à combattre. Tel est notamment l’idée développée dans les actions que les fidèles doivent mener en faveur des plus démunis, présents dans de nombreux sermons, et dont le corps souffre du froid, de la faim ou de la maladie. C’est spécialement en hiver ou à l’occasion d’un moment de grandes difficultés que les pasteurs mobilisent leur auditoire sur cette souffrance corporelle. Ainsi, le sermon de Rabaut Saint-Étienne sur l’Aumône pour un besoin extraordinaire à la suite de l’hiver de 1765 et 1766, explique longuement, et sur le mode pathétique commun de la parole de chaire, les multiples principes qui rendent le don aux pauvres plus que nécessaire en ce mois de janvier 1766. L’évocation du corps des enfants permet de susciter la pitié et donc de favoriser le geste du don attendu :
« On a vu de malheureux enfants privés de la nourriture la plus commune, privés du pain le plus grossier & le plus dur, réduits à brouter cette herbe vile que vous foulez aux pieds, & qui semblait ne devoir être réservée qu’aux brutes. Tableaux affreux de l’humanité gémissante, image terrible de la pauvreté méconnue et abandonnées, qu’êtes-vous à côté d’un pareil spectacle ? […] Le pauvre glacé par un froid presque inconnu dans nos provinces n’avait pas assez de forces pour s’occuper au travail de sa vocation. »
31La faim et le froid font souffrir le corps et les choses ne peuvent rester en l’état. De plus continue le pasteur :
« Les impressions de l’air qui ont produit tant de maladies étaient d’autant plus dangereuses pour lui qu’il ne pouvait s’en garantir ; et la terre elle-même avait fermé son sein à ceux qui ont accoutumé d’en tirer leur subsistance. […] Et combien de gens qui n’avaient jamais connu la misère ont été obligés cet hiver de recourir au trésor de vos charités57 ? »
32La parole de chaire déploie, dans une mise en contexte fortement dramatisée mais descriptive, les fameuses crises de subsistances d’Ancien Régime dont un des facteurs est le climat58. À côté de ces difficultés conjoncturelles et climatiques, les guerres sont aussi des moments qui provoquent une prise de parole protestante pour ne pas laisser le corps dans la souffrance qui est alors inutile et contraire à l’esprit d’entraide qui doit animer tout vrai chrétien.
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33Le corps de l’homme, dans ces sermons protestants de la seconde moitié du xviiie siècle, est un objet homilétique polymorphe qui revêt plusieurs réalités parfois contradictoires. En retour, le sermon par l’usage de la thématique corporelle – religieuse, médicale, philosophique, conjoncturelle – montre ses capacités plastiques importantes, indispensables à ces discours pédagogiques.
34Le corps est présenté comme secondaire car l’essentiel est l’âme, il n’est rien sans elle, une simple machine qui peu à peu dépérit jusqu’à une mort inéluctable. Mais il demeure signe de la création divine et, à ce titre, doit être endurant pour préserver la fidélité à Dieu dans une religion protestante qui est justement mise à mal par les lois du royaume tout catholique. Le corps est enfin objet d’attention et doit être préservé des passions et des vices non simplement parce que la morale chrétienne l’impose mais parce que l’être raisonnable qu’est aussi le fidèle protestant du siècle des Lumières doit comprendre que l’agrément dans sa vie terrestre en dépend.
35Le corps n’est donc pas dévalorisé, ce n’est que parce que le désordre des passions et les excès de ces dernières s’emparent des sens qu’il est dangereux pour l’homme. Le corps devient même, sous la plume de ces pasteurs de la seconde moitié du xviiie siècle, vecteur d’un bonheur que l’homme doit savoir, par sa raison, apprivoiser. Miroir de l’âme, il devient dans ce dernier siècle d’Ancien Régime, miroir de l’homme raisonnable.
Notes de bas de page
1 217 pour le père, 57 pour Rabaut Saint-Étienne et 26 pour Rabaut-Pomier.
2 Sur le pasteur Paul Rabaut voir Borrel A., Biographie de Paul Rabaut, suivie de celle de Claude Brousson, pasteur de Nîmes (1683-1698), Nîmes, Librairie protestante, 1859 ; Puaux F., Paul Rabaut, l’apôtre du Désert, Paris, Fischbacher, 1918.
3 Dupont A., Rabaut Saint-Étienne, 1743-1793 : un protestant défenseur de la liberté religieuse, 2e éd. complétée, Genève, Labor et Fides, 1989.
4 Sur la prédication des Rabaut on peut se référer aux études anciennes de Diény G., Essai sur la prédication de Rabaut Saint- Étienne d’après la collection de ses sermons manuscrits, Cahors, A. Coueslant, 1907 ; Monod A., Les sermons de Paul Rabaut : pasteur du désert (1738-1785) : étude sur les manuscrits inédits de Paul Rabaut, suivie du texte de trois sermons annotés, Thèse complémentaire de doctorat ès-lettres présentée à la faculté des lettres de l’université de Paris, Mazamet, G. Carayol, 1917. Sur la prédication de Rabaut Saint-Étienne voir encore Borello C., Du Désert au Royaume : parole publique et écriture protestante (1762-1788). Edition critique du Vieux Cévenol et de sermons de Rabaut Saint-Étienne, Paris, Honoré Champion, 2013.
5 Bibliothèque de la Société de l’histoire du protestantisme français [BPF], Paris, ms. 717-1/9, Sermon sur l’amour divin : « Prenez garde soigneusement sur vos ames, que vous aimiez l’Eternel votre Dieu » (Josué XXIII-11), Rabaut Saint-Étienne, 1766, fol. 9. Ailleurs le pasteur explique : « l’homme est composé de deux substances, il y a une société formée entre le corps & l’ame », BPF, Paris, ms. 717-1/19, Discours sur l’Immortalité de l’Ame : « La poudre retourne à la terre d’où elle a été tirée, et l’esprit retourne à Dieu qui l’a donné (Eccl XII-9) », Rabaut Saint-Étienne, 1767, fol. 9.
6 BPF, ms. 717-1/9, fol. 9.
7 BPF, ms. 716-5/27, « Le bon sens dicte […] que notre corps composé de tant de différentes parties si merveilleusement agencées qui ont chacun une destination particulière & que toutes ensemble concourent à un même but, savoir que l’homme vive & qu’il vive avec agrément, à plus forte raison dis je le bon sens dicte il que cet un être supérieur qui a beaucoup de puissance de sagesse & de bonté qui a présidé à la fabrication de notre corps », Catéchisme général avec un commentaire pour la réception des catéchumènes à la communion, Paul Rabaut, 1765, fol. 7.
8 BPF, ms. 717-1/9, fol. 9.
9 BPF, Paris, ms. 716-4/14, « Nous sommes dit St Paul les membres de son corps tirés de la chair & de ses os, comme Eve fut tirée du côté d’Adam, l’Église a été tirée du côté percée de JC d’où il sortit du sang & de l’eau », « Ne savés vous pas que vos corps sont les membres de J. C. ? Oterai je donc à J. C. ses membres pour en faire les membres d’une prostituée ? […] Car vous avés été rachetés à un grand prix : glorifiés donc Dieu dans votre corps & dans votre esprit qui apartiennent à Dieu (1 Co 6,15-20) », Paul Rabaut, 1758, fol. 3.
10 BPF, ms. 717-1/19, fol. 4-5.
11 Cf. Descartes R., Les passions de l’âme, Paris, Henry le Gras, 1649, et BPF, ms. 717-1/19, « Tous les êtres sont soumis à la même loi », fol. 6.
12 Ibid., fol. 1.
13 BPF, ms. 716-1/19, Sermon contre la crainte des hommes. « Ne craignés point ceux qui otent la vie du corps. Mais craignés plutot celui qui peut faire perir dans la gehenne, & l’ame & le corps » (Mt 10,28), Paul Rabaut, 1750, fol. 12.
14 BPF, Paris, ms. 717-1/23, « C’est dans la physique de nos corps qu’il faut chercher la cause de toutes nos passions (colère, haine, envie, tristesse, douleur), mais c’est dans la raison qu’il faut en chercher le remède », Sermon sur la nécessité de corriger les tempéraments par la raison : « que personne lorsqu’il est tenté, ne dise, c’est Dieu qui me tente » (Jaq I 13), Rabaut Saint-Étienne, 1768, fol. 1.
15 BPF, ms. 717-1/11, Sermon sur la colère : « celui qui dompte sa colère vaut mieux que l’homme fort » (Prov XVI-32), Rabaut Saint-Étienne, 1766, fol. 9.
16 BPF, ms. 716-2/17, « l’esprit est plein de courage mais la chair est faible », « Jérusalem, reçoi instruction, de peur que mon afection ne se retire de toi & que je ne fasse de toi une désolation & une terre inhabitable » (II/17-Jr 6,8), Paul Rabaut, 1750, fol. 9.
17 Ibid.
18 BPF, ms. 716-1/19, « A celui qui nous a aimés, qui nous a lavés de nos pechés par son sang & qui nous a faits rois & sacrificateurs de Dieu son père ; à lui soit la gloire & la puissance aux siècles des siècles. Amen » (Ap 1,6), Paul Rabaut, 1747, fol. 12.
19 « Quiconque n’est pas disposé à souffrir comme lui [saint Étienne] la même mort plutôt que de trahir sa conscience, doit s’effacer du catalogue de Jésus-Christ », BPF ms. 716-7/18, Le martyre de saint Étienne (Ac 7,54-60), Paul Rabaut, 1745, fol. 15.
20 Borello C., « Texte et contexte : la violence dans les sermons protestants du xviiie siècle », Faggion L. et Regina C. (dir.), La violence. Regards croisés sur une réalité multiple, Paris, CNRS Éditions, 2010, p. 471-494.
21 BPF, ms. 716-2/6, La vigilance chrétienne. « Soyés vigilans » (1 Co 16,13), Paul Rabaut, 1749, fol. 12.
22 BPF, ms. 718-1/19, « Je vous exhorte donc mes Frères, par les compassions de Dieu, que vous offriez vos corps en sacrifice, vivant, saint, agréable à Dieu, ce qui est votre raisonnable service » (Rom 12,1), Rabaut-Pomier, 1784.
23 BPF, ms. 716/2-15, « Et parce que la porte de la vie est étroite & que le chemin qui y mene est aussi êtroit, il y a peu de gens qui le trouvent » (Mt 7,14), Paul Rabaut, 1750, fol. 11.
24 BPF, ms. 716-4/14, « Ne savés vous pas que vos corps sont les membres de J. C. ? Oterai je donc à J. C. ses membres pour en faire les membres d’une prostituée ? […] Car vous avés été rachetés à un grand prix : glorifiés donc Dieu dans votre corps & dans votre esprit qui apartiennent à Dieu » (1 Co 6,15-20), Paul Rabaut, 1758, fol. 17.
25 BPF, ms. 718-1/4, Discours pour le jour de Pentecôte sur les paroles de Saint Paul aux Corinthiens 1re ep. (6 : 9) « Ne savez vous pas que votre corps est le temple de l’esprit », Rabaut-Pomier, 1779, fol. 3.
26 BPF, ms. 716-4/14, fol. 3.
27 BPF, ms. 716-2/6, fol. 10. Il le répète l’année suivante, voir BPF ms 716-2/18 « Comment un jeune homme peut il rendre pure sa conduite ? C’est en se tenant sur ses gardes conformement à ta parole » (Ps 119,9), Paul Rabaut, 1750.
28 BPF, ms. 716-2/6, fol. 10.
29 BPF, ms. 716-5/24, « Le peuple de Dieu censuré » : « Crie à plein gosier, ne t’épargne point, élève ta voix comme un cor & déclare à mon peuple leurs forfaits & à la maison de Jacob leurs péchés » (Es 58,1), Paul Rabaut, 1765, fol. 21-22.
30 BPF, ms. 716-2/18, fol. 5.
31 BPF, ms. 716/5-1, « Les fruits de l’Esprit, c’est la charité, la joie, la paix, la patience, la douceur, la bonté, la fidelité, la benignité, la temperance » (Ga 5,22), Paul Rabaut, 1762, fol. 8.
32 BPF, Paris, ms. 716-4/14, fol. 4.
33 BPF, ms. 717/2-49, Sermon sur le monde invisible : « Les choses visibles ne sont que pour un tems mais les invisibles sont éternelles » (2 Co 4,18), Rabaut Saint-Étienne, 1781. Les dangers du siècle sont également évoqués dans d’autres de ses sermons à l’instar de BPF, ms. 717/1-2, Première proposition rendue sous mr le professeur Rosset : « Ne vous conformez point au siècle présent » (Rom XII-2), 1764 ou BPF, ms. 717/2-31, Sermon sur les dangers des mauvaises compagnies pour les mœurs : « Ne vous trompez pas ; les mauvaises compagnies corrompent les bonnes mœurs », 1773.
34 BPF, ms. 716 5/27, fol. 33.
35 Drelincourt C., Catéchisme, ou instruction familière sur les principaux points de la religion chrétienne, Paris, sans éditeur, 1642 ; sur la question des catéchismes dans les Églises réformées voir Bost H., « Les catéchismes réformés du xviie siècle », Bost H., Ces messieurs de la RPR. Histoires et écritures de huguenots xviie -XVIIIe siècles, Paris, Champion, 2001, p. 83-98.
36 Hugues E., Les synodes du Désert. Actes et règlements des synodes nationaux et provinciaux tenus au Désert de France de l’an 1715 à l’an 1793, Paris, Fischbacher, 1885, t. 1, p. 190, article XI. L’article XII ajoute « Les églises achèteront le livre des Réflexions de M Ostervald, & s’en serviront dans leur exercice de dévolution », ibid. L’introduction de ce catéchisme semble avoir posé quelques problèmes en Bas-Languedoc comme le relève H. Bost dans l’article précédent, « Les catéchismes réformés du xviie siècle », op. cit., p. 97, note 36.
37 Ostervald J.-F, Catéchisme ou Instruction dans la Religion Chrétienne, Bâle, Jean Pistorius, 1720, p. 185.
38 Ostervald J.-F., Abrégé de l’histoire sainte et du Catéchisme, Genève, Bousquet et Cie, 1734.
39 Ostervald J.-F, Catéchisme…, op. cit., p. 185.
40 Monod A., op. cit., p. 71.
41 BPF, ms. 717/2-54, Sermon sur les passions de la jeunesse « Fuyez les passions de la jeunesse » (2 Tim II-22), Rabaut Saint-Étienne, c. 1780 fol. 1.
42 Vigarello G., Courtine J.-J., Corbin A. (dir.), Histoire du corps, De la Renaissance aux Lumières, Paris, Éditions du Seuil, 2005, t. I, p. 103.
43 « C’est ce que faisoit St Paul, je traite dit-il durement mon corps & je tiens assujetti de peur qu’après avoir prêché aux autres je ne sois moi même rejetté. L’Ecriture sainte nous fait envisager la chair comme source empoisonnée d’une infinité de péchés. Elle apelle la plupart des vices les œuvres de la chair, elle dit que les passions charnelles font la guerre à l’âme ainsi rien n’est plus utile, rien plus nécessaire pour éviter un grand nombre de tentations & pour s’élever à quelque degré de vérité que de dompter le corps & de s’en rendre entièrement le maître. Or c’est ce que l’on fait par la sobriété, en observant de ne manger ni boire avec excès mais seulement pour vivre, & en ne recherchant point les viandes trop délicates, & trop nourrissantes. C’est ce qu’on fait en se privant de temps en temps, mêmes des plaisirs les plus innocens, c’est ce que l’on fait par le jeûne si recommandé dans l’Ecriture & si peu pratiqué parmi les chrétiens. C’est ce que l’on fait en fuyant l’oisiveté qui engendre une infinité de vices & en s’occupant d’un travail honnête », BPF, ms. 716-2/6, fol. 12.
44 BPF, ms. 716-4/14, fol. 18.
45 BPF, ms. 716-5/27, fol. 3.
46 « Les passions dérangent la santé, & altèrent la constitution dans un âge où le tempérament n’est pas encore formé. Il semble d’abord à la plupart des jeunes gens que ces appréhensions sont chimériques. Grace à la constitution dont ils jouissent & aux forces toutes neuves que la nature leur a données ils s’imaginent que cet heureux état doit durer toujours malgré les excès auxquels ils se livrent. […] La dissipation qui entraine de plaisir en plaisir, le jeu qui échauffe le sang, la bonne chère en plaisir, le jeu qui échauffe le sang, la bonne chère qui occasionne tant de maladies, la débauche qui détruit la santé, cette foule de plaisir qui se succèdent rapidement les uns aux autres, toutes les passions de la jeunesse tourmentent le jeune homme qui y est exposé comme un vaisseau livré à l’inconstance des mers », BPF, ms. 717-2/ 54, fol. 5.
47 BPF, ms. 717-1/1, « C’est un siècle où la Tempérance n’est guères connus [sic] que de nom, où l’on voit les hommes s’avilir & se mettre au rang des animaux… Quel tems, bon Dieu ! que ceux où le libertinage n’est regardé que comme une faiblesse pardonnable, où les repas que la nature n’exige que pour satisfaire à ses besoins les plus pressans sont des occasions de luxe & de débauche ; où tout ce qui nous environne émeut & excite nos passions », Parabole du samaritain ou sermon sur Luc 10,30-37, Rabaut Saint-Étienne, 1762, fol. 7.
48 BPF, ms. 717-1/23, Sermon sur la nécessité de corriger les tempéraments par la raison : « Que personne lorsqu’il est tenté, ne dise, c’est Dieu qui me tente » (Jc 1,13), Rabaut Saint-Étienne, 1768, fol. 8.
49 Vigarello G., Courtine J.-J., Corbin A. (dir.), op. cit., t. I, p. 357.
50 BPF, ms. 718-1/10, fol. 1, Discours pour le Dimanche après le jeune sur ces paroles de Zacharie (7 : 5) Parle à tous le peuple du pays & aux sacrificateurs & leur dis quand vous avez jeuné & pleuré au cinquième mois & au septieme il y a déjà soixante dix ans avez-vous célébré ce jeune pour l’amour de moi, Rabaut-Pomier, 1780.
51 Ostervald J.-F., Catéchisme…, op. cit., p. 116-117.
52 BPF, ms. 717-1/24, L’hospitalité et la frugalité d’Abraham – Homélie sur le repas qu’Abraham donna aux Anges (Gn 18,2-8), Rabaut Saint-Étienne, 1770, fol. 12-13.
53 Pour l’appel à la raison salvatrice, cf. supra, note 14.
54 Ostervald J.-F., Catéchisme…, op. cit., p. 171.
55 BPF, ms. 717-1/23, fol. 9.
56 Ibid.
57 BPF, ms. 717/1-8, Sermon sur l’Aumône pour un besoin extraordinaire à la suite de l’hiver de 1765 et 1766 : « N’oubliez point d’exercer la charité & de faire part de vos biens aux autres ; car Dieu prend plaisir à de semblables sacrifices » (He 13,16), Rabaut Saint-Étienne, 1765, fol. 15-16.
58 L’hiver 1765-1766 est une des trois périodes les plus froides du xviiie siècle, Le Roy Ladurie E., Histoire du climat depuis l’an mil, Paris, Flammarion, 1983, p. 73.
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