Chapitre I. La constitution d’une collection technologique
p. 47-78
Texte intégral
1La première particularité du Conservatoire des arts et métiers est d’avoir reçu la charge, dès sa fondation, de constituer et d’enrichir une collection technologique. Celle-ci comprend des objets et documents de natures variées dont les usages vont se modifier au fur et à mesure des années. Destinées à l’observation ou support de l’enseignement, ces collections servent non seulement à expliquer et illustrer des principes techniques ou le fonctionnement d’un objet, d’un instrument, d’un outil ou d’un élément constitutif d’une machine ; elles révèlent également de nombreuses innovations et les inscrivent, au fur et à mesure, dans une perspective historique.
Les typologies
2Dans le rapport qu’il a présenté à la Convention nationale, Grégoire a envisagé le Conservatoire comme un dépôt où l’on trouverait des machines, des modèles, des outils, des dessins, des descriptions et des livres1. Il est entendu que Grégoire n’a pas déterminé ces catégories ex nihilo : l’existence de collections privées ou publiques, en premier lieu desquelles figure celle du mécanicien Jacques Vaucanson (1709-1782) dédiée principalement au textile, à l’hôtel de Mortagne, a constitué une référence à partir de laquelle le projet du Conservatoire a été élaboré. On peut supposer que Grégoire a bénéficié pour cela de l’expertise de Claude Pierre Molard, démonstrateur chez Vaucanson, membre de la Commission temporaire pour les arts puis démonstrateur (1796) et enfin administrateur (de 1800 à 1817) du Conservatoire2. On observe dès l’origine une distinction3 entre les « machines », les « modèles », les « outils » et enfin les descriptions, dessins et livres, que l’on peut classer du côté de la documentation bibliographique et iconographique. On retrouve en 1841, à l’occasion des travaux d’une commission réunie pour inspecter le Conservatoire et proposer des solutions pour en améliorer la gestion, la confirmation de cette division : « La commission propose que l’article 1er de ce chapitre [budgétaire : collections] soit intitulé, modèles, machines, outils, et Dessins de Constructions ; parce que d’une part il peut arriver que le conseil dans quelques circonstances juge convenable d’acheter plutôt des machines ou des outils de grandeur naturelle que des modèles, et parce que d’autre part les dessins qui servent à la construction doivent être compris dans les factures de modèles, car ils sont hors de service lorsqu’ils ont servi dans les ateliers et il n’est plus possible de les faire figurer comme objets de collections4. »
Les objets en « grandeur réelle »
3Les « machines » désignent les biens de production, appareils et instruments effectivement utilisés dans les ateliers, les fabriques ou encore les usines. On parle très volontiers des machines de « grandeur naturelle », par opposition aux « modèles » sur lesquels nous reviendrons plus loin. Ce type de représentation offre comme principal avantage de mettre sous les yeux du public fréquentant les galeries de l’établissement des pièces authentiques, réellement employées dans les ateliers ou les fabriques ou « incarnant » par elles-mêmes l’innovation. Le métier à tisser les étoffes façonnées de Vaucanson (inv. 00017)5, le fardier à vapeur de Joseph Cugnot (inv. 00106), le tour à tailler les vis de François Senot (inv. 00162) sont ainsi des exemples de pièces en grandeur réelle issus de la collection primitive du Conservatoire. Deux autres catégories d’objets peuvent entrer dans cet ensemble : d’abord les outils effectivement utilisés par les mécaniciens et les ouvriers en général, qui répondent encore à ce souci d’authenticité ; ensuite les spécimens, comprenant des échantillons d’équipements, ou des produits finis ou semi-finis offrant l’occasion de comprendre un processus de production ou de s’intéresser à un type de production particulier.
4Ces catégories et sous-ensembles demeurent toutefois assez théoriques et connaissent de profondes variantes d’un corpus thématique à l’autre. Intéressons-nous ici à cette typologie du point de vue des chemins de fer. Avec trente pièces acquises au cours du xixe siècle, les objets de grandeur réelle ne représentent que 18,4 % des objets du corpus ferroviaire, et seulement 6,8 % toutes typologies confondues. Cette très faible part s’explique en premier lieu pour une raison pratique, liée à l’encombrement des collections. Locomotives, wagons, grues d’alimentation ou plaques tournantes sont des pièces de grandes dimensions qu’il n’est pas possible de présenter dans les locaux exigus du Conservatoire. En janvier 1853, Théodore Olivier, alors directeur de l’institution, souligne ainsi :
« Je sais qu’il y a parmi nous certains professeurs qui ne veulent que des modèles, les uns comprennent que l’Echelle doit être réduite, les autres ne veulent que des modèles de grandeur naturelle ; c’est ainsi que la galerie d’agriculture possède un grand nombre de charrues de grandeur naturelle et dont plusieurs ne diffèrent entre elles que par des détails que des dessins auraient parfaitement fait comprendre.
Si le système des modèles et surtout des machines de grandeur naturelle prévalait sur ce que je propose, la superficie de Paris ne suffirait pas dans quelques années pour loger tous ces modèles nouveaux que rêvent certains de mes collègues6. »
5C’est très certainement pour cela que les collections n’ont jamais compté de locomotives, même s’il semble que des réflexions aient été menées pour ménager cette possibilité. Dans sa séance du 24 juin 1840, le Comité historique des arts et monuments s’intéressait en effet aux projets relatifs à l’aménagement de l’ancienne église prieurale du Conservatoire et indiquait : « Lorsqu’on aura mutilé la nef de l’église du Conservatoire pour l’affecter à des classes de dessin, il n’y aura plus de place dans tout l’établissement pour déposer les grandes machines, par exemple une locomotive. Or, il faut absolument une salle de dépôt pour des machines de ce genre, sous peine de tenir le Conservatoire en arrière de tous les progrès de l’industrie ; on sentira donc tôt ou tard la nécessité de construire une salle de dépôt7. » Remarque significative quant à la perception des objets de grandeur réelle pour les collections, finalement rattrapée par le principe de réalité. Pas de locomotives, donc, dans les collections, mais des pièces révélatrices de quelques sujets particuliers touchant la construction et l’exploitation des chemins de fer, qu’il nous faut regrouper en trois sous-ensembles à rapprocher des typologies observées à l’échelle de la collection.
6D’abord, les éléments liés à la construction des locomotives et des wagons. On trouvera ici des éléments constitutifs du matériel relatifs au fonctionnement des locomotives à vapeur comme chaudières : c’est le cas des échantillons de tubes à fumée (inv. 05718 et 05719, fig. 3), des viroles pour tubes (inv. 07406), des sections de pistons (inv. 08020 à 08023) ou encore d’un élément de foyer (inv. 08024). D’autres objets de grandeur réelle illustrent davantage des dispositifs mécaniques appliqués aux chemins de fer, comme un coussinet en métal antifriction (inv. 05015), les boîtes à graisse pour essieux (inv. 06952 et 10511), ou encore ce qui touche au freinage (cylindre de frein Wenger, inv. 11458 et frein de la Compagnie du frein à vide, inv. 12164). Notons la présence d’objets dont l’entrée dans les collections ne visait pas à l’enrichissement particulier de la section ferroviaire, comme un réflecteur en verre pour chemin de fer (inv. 04781) ou des échantillons de roues de wagonnets en fonte (inv. 09250).
7Toujours du point de vue des objets de grandeur réelle, les collections comportent quelques spécimens évoquant les infrastructures et notamment l’armement des voies. L’ensemble le plus remarquable entre dans les collections en 1884 et se présente sous la forme de panoplies sur lesquelles ont été réunies des sections de rails, coussinets, éclisses, tire-fonds et moyens de contrôle et de vérification (inv. 10490 et 11780). Il est intéressant de constater qu’on se trouve ici à la « frontière » entre les objets de grandeur réelle et les échantillons, le tout bénéficiant d’un artifice muséographique pour rendre la présentation plus parlante et plus spectaculaire aux yeux du public (fig. 4).
Figure 3. – Assemblage de tubes à fumée pour locomotives, vers 1840-1850. Musée des Arts et Métiers, inv. 05719.

© Lionel Dufaux.
Figure 4. – Rail type double champignon de la Compagnie de l’Ouest : profil et gabarit de vérification, vers 1884. Musée des Arts et Métiers, inv. 10490-0018-002. Ces gabarits font partie d’un vaste ensemble offert en 1884 par le Service central du matériel fixe du ministère des Travaux publics. Ils illustrent la variété des éléments d’infrastructure alors en usage sur les grands réseaux français.

© Musée des Arts et Métiers-Cnam/photo Denis Pruvrel.
8Enfin, parmi les objets de grandeur réelle touchant au ferroviaire, nous pouvons mentionner les divers instruments relatifs au contrôle des circulations et à l’exploitation. De ce point de vue, le ferroviaire se confond avec les collections télégraphiques ou d’horlogerie, puisqu’on trouve ici l’indicateur du temps de la marche des convois de Paul Garnier (inv. 03093), des appareils télégraphiques de la maison Breguet (inv. 06260, 10074, 10075, 10083, 12340) ou d’autres constructeurs, souvent adaptés pour répondre aux exigences de l’exploitation des lignes (fig. 5).
Figure 5. – Petit disque électrique pour télégraphe, construit par Louis Clément Breguet, vers 1850-1860. Musée des Arts et Métiers, inv. 12340.

© Musée des Arts et Métiers-Cnam/ photo Christophe Le Toquin.
9S’ils peuvent parfois nous sembler quelque peu abscons, ces objets avaient sans doute du sens pour les visiteurs des galeries ou auditeurs des cours, qui devaient y être plus régulièrement confrontés dans le cadre de leurs activités professionnelles.
Les modèles
10Il nous faut apporter en préambule une précision terminologique : le terme de « modèle » revient très souvent dans les documents conservés dans les archives du Conservatoire, et peut recouvrir trois réalités bien distinctes. Il peut désigner un objet de référence, qui va servir de modèle à la production ; le modèle peut aussi revêtir une dimension légale, quand il s’agit d’un prototype déposé au titre de la propriété industrielle ; enfin, le modèle peut être une reproduction éventuellement à échelle réduite, une maquette. C’est ce dernier sens que nous allons privilégier ici.
11On les retrouve en bonne place dans de nombreux musées techniques tant on a eu recours à ce genre de représentation pour faire figurer l’innovation et expliquer le fonctionnement d’une machine ou un procédé. Explicitement mentionnés par Grégoire au moment de la fondation du Conservatoire, les modèles vont occuper un rôle essentiel dans les collections de son musée industriel. Les modèles issus de la collection Vaucanson, à l’hôtel de Mortagne, ou de la galerie des machines du duc d’Orléans, affectés très tôt au Conservatoire, sont en effet rejoints par d’autres séries, nouvellement commandées par l’établissement. L’utilisation de modèles pour servir l’instruction technique est alors très courante. Dans la tradition de l’apprentissage, la transmission des savoir-faire et leur compréhension nécessitent l’observation et l’imitation du geste, la manipulation des outils et des objets. Le principe de la démonstration, en vigueur au Conservatoire jusqu’à la Restauration, puis l’enseignement magistral ont recours aux modèles pour illustrer un point précis, expliquer un procédé ou le fonctionnement d’une machine. La plupart des grands établissements de ce type possèdent une collection, comme on peut le voir à l’École des ponts et chaussées, à l’École des mines8, à l’École centrale9, mais également dans les écoles techniques des chambres de commerce10. La plupart de ces collections ont été dispersées ou détruites, mais on retrouve de très beaux ensembles dans le fonds du Musée industriel de Lille11, au musée Crozatier du Puy-en-Velay12, à l’étranger au Science Museum de Londres ou au Deutsches Museum de Munich, et bien entendu au Conservatoire des arts et métiers. Cela dit, il reste difficile de savoir si les collections de modèles des établissements d’enseignement comprenaient beaucoup de pièces relatives aux chemins de fer, et si ces collections couvraient tous les aspects du système technique ferroviaire comme celles du Conservatoire des arts et métiers.
12Plusieurs habiles mécaniciens développent une activité de construction de modèles au cours du premier tiers du xixe siècle. Certains d’entre eux se démarquent par une production particulièrement soignée, répondant aux exigences des établissements et des industriels, et sont distingués lors des expositions des produits de l’industrie puis des expositions universelles. Parmi les grands fournisseurs du Conservatoire, on peut relever les noms de Pierre (1804-1870) et Alexandre (1831-1866) Clair13, Eugène Philippe (1803-ap. 1878)14 ou Jules Digeon (1844-1901)15, dont on retrouve de nombreux modèles dans les collections ferroviaires.
13Nous avons vu que certains professeurs avaient affirmé leur préférence pour des objets en grandeur réelle. Pourtant, les modèles réduits sont, en nombre, bien plus importants. Une assertion dans un guide touristique publié à la fin du Second Empire en résume les avantages et les inconvénients : « Nous terminerons, en citant des modèles de machines modernes qui garnissent principalement la galerie du premier étage. C’est le savant physicien M. Pouillet, directeur du Conservatoire de 1830 à 1849, qui en fit faire le plus grand nombre. Exécutés avec une grande perfection, à une échelle déterminée, disposés pour laisser voir facilement l’intérieur des mécanismes, ces modèles sont fort beaux. La locomotive, les machines à vapeur de bateaux, etc., ont été fort admirées ; malheureusement de petits modèles ne donnent pas toujours aux débutants une idée bien juste des machines imitées16. » Quelques années auparavant, une lettre du général Morin, alors directeur du Conservatoire, nous laisse entrevoir la manière dont on percevait l’usage de ces représentations, au sujet d’un modèle de machine à teiller (inv. 07129) repérée lors de l’Exposition universelle de 1855 : « Les modèles qui nous conviennent le mieux ne consistent pas dans la reproduction exacte de tous les organes d’une machine en même nombre que dans une machine industrielle : les répétitions nous sont inutiles17. »
14Les modèles relatifs aux chemins de fer, au nombre de cent trente-trois, totalisent 81,6 % des objets en trois dimensions, et un peu plus de 30 % du fonds, toutes typologies confondues. C’est un ensemble essentiel, qui mérite une attention particulière car il recoupe plusieurs types de représentations.
15On doit en effet distinguer dans un premier temps ce que nous appelons les modèles « complets », offrant une vue entière du matériel de traction ou du matériel roulant. Ces objets sont intéressants d’abord du point de vue de l’échelle : ils traduisent le choix d’un encombrement limité, mais rien n’empêche d’avoir un modèle à échelle réduite qui présente en plus des dispositions spéciales pour considérer le mécanisme intérieur ou le fonctionnement de la machine. Le modèle réduit de la locomotive Stephenson exécuté par Eugène Philippe en 1833 (inv. 04044) est le premier qui représente une telle machine dans les collections. On peut ici considérer la locomotive entière ; l’ouverture de la boîte à fumée, à l’avant, permet d’en observer l’intérieur. Le deuxième modèle de locomotive entré dans les collections représente une Long Boiler (inv. 04601). Exécuté en 1848 par Pierre Clair, il permettait d’actualiser la présentation du fonds ferroviaire et comportait un écorché sur son côté droit, laissant aux visiteurs la possibilité de découvrir la structure de la chaudière, du foyer jusqu’à la boîte à fumée. Chose intéressante, il faut attendre 1896 pour que le Conservatoire passe commande d’un modèle de locomotive partiellement en coupe, représentant une machine de type 030 « Bourbonnais » (inv. 12857), dont l’exécution de grande qualité offre une ressemblance remarquable avec le matériel réel. Entre-temps, plusieurs dons pertinents du point de vue scientifique permettaient l’acquisition de modèles dont les variations d’échelles, le choix des matériaux (comme le bois, pour un modèle de locomotive Engerth, inv. 06982) ou la facture sommaire (comme sur le modèle de locomotive expérimentale de Camille Polonceau, inv. 07267, la locomotive-tender d’Ernest Gouin, inv. 07363, ou la locomotive atypique de Georges Laudet, inv. 08818) ne visaient pas une représentation fidèle mais plus l’illustration ou la recherche de procédés innovants. Contrairement aux locomotives, les modèles « entiers » de wagons et voitures ne ménagent pas de coupe et sont bien plus ressemblants au matériel couramment utilisé : sans doute la provenance de ces pièces, entrées essentiellement par des dons, peut-elle l’expliquer, les constructeurs (à l’origine de la plupart de ces dons) veillant à faire exposer des modèles dont l’exécution soignée devait promouvoir leur production. Les modèles « complets » de locomotives et wagons ne forment qu’un ensemble restreint, avec treize modèles de locomotives et quinze wagons (fig. 6).
Figure 6. – Locomotive à vapeur type 040 Eight Wheel à huit roues couplées et avec dispositif pour la convergence à osselets, modèle au 1/10 de Camille Polonceau, vers 1855-1862. Musée des Arts et Métiers, inv. 07267.

© Lionel Dufaux.
16Comme pour les objets de grandeur réelle, on retrouve, parmi les modèles, des pièces illustrant des éléments constitutifs des locomotives ou des wagons. Ici, le modèle peut également être à échelle réduite pour des raisons de place ou de poids, et comporter des coupes et diverses dispositions pour en faciliter la compréhension. La série de modèles d’Eugène Philippe comportant un châssis (inv. 02549), un tuyau de liaison entre le tender et la locomotive (inv. 02550), un robinet (inv. 02551), une pompe (inv. 02552) et un sifflet (inv. 02553) offre des représentations très fidèles d’organes importants des locomotives, mais à échelles réduites (au 1/5). Même cas de figure pour les bielles et excentriques de locomotives par Pierre Clair (inv. 02896 et 02897). Pour les soupapes à vapeur ou les organes à air comprimé pour les freins en revanche, on n’hésite pas à transformer des objets de grandeur réelle en modèles que l’on a modifiés à l’aide de coupes ou de mise en évidence de certains composants : c’est particulièrement vrai pour une soupape de sûreté (inv. 05725) et une soupape à levier (inv. 05726), un modèle de l’injecteur Friedmann (inv. 08656) ou une triple valve pour frein Westinghouse (inv. 10540). Dans d’autres cas, comme pour ce qui touche à l’explication des freins à sabots ou de la détente variable, on privilégie des présentations didactiques qui ne cherchent pas à faire figurer le dispositif dans son environnement normal d’utilisation : les objets peuvent ainsi être disposés sur un socle en bois, incliné pour faciliter la lecture. Là aussi, l’échelle n’est pas forcément respectée, comme avec les modèles de frein par Pierre Clair (inv. 04514 et 04515) où l’espacement entre les roues n’a rien de réaliste mais où le principe de fonctionnement du frein est extrêmement simple à percevoir.
17Pour ce qui est des infrastructures, les modèles sont là aussi nombreux. Assez curieusement, nous n’avons pas recensé de représentations en coupe ou avec des écorchés, à l’exception de maquettes de ponts (pour des raisons d’encombrement) et pour des modèles de ponts à bascule. On joue en revanche davantage avec les matériaux employés : ainsi peut-on voir des rails en bois dont la peinture arbore un aspect métallique, proche du fer (inv. 05720) ; de même, les plateaux de plusieurs modèles de plaques tournantes sont en bois (inv. 04043 et 02469 par exemple), tandis que le modèle de grue Arnoux pour le transbordement des caisses de diligences (inv. 06735) est lui aussi en bois : là aussi, on ne vise pas une exacte reproduction mais bien la mise en avant d’un procédé et son explication.
Les tableaux pédagogiques
18Outre la présentation de machines « en grand » et de modèles, les galeries du Conservatoire ont très rapidement été ornées de tableaux à caractère documentaire et pédagogique. Une gravure publiée en 1843 dans Le Magasin pittoresque présente l’une des rares vues connues de l’intérieur du Conservatoire sous la monarchie de Juillet18. On peut y voir la grande galerie du premier étage avec des objets exposés sous vitrine et de nombreux tableaux accrochés entre les fenêtres. La même année, le Conseil de perfectionnement propose de créer un chapitre spécifique dans la partie du budget relative aux collections pour l’acquisition de « grands dessins » et « tableaux » : « Le Conseil propose d’introduire dans ce chapitre un nouvel article pour les tableaux coloriés destinés à représenter des machines, journaux, ateliers, appareils de fabrication, etc. ; tableaux analogues à ceux qui avaient été exécutés par Leblanc et qui sont exposés dans la grande Galerie. Ces tableaux ne sont pas seulement très instructifs pour le public qui visite les Galeries, ils sont de plus indispensables aux Professeurs pour les démonstrations des cours publics. Cette collection devant avoir son catalogue spécial, il paraît nécessaire de lui ouvrir un crédit particulier19. » Le crédit initialement prévu est fixé à 5000 francs ; il s’abaisse très vite à 4000 francs puis tombe à 1000 francs par an en 1849, chiffre qui se maintient jusqu’à la fin du Second Empire avec toutefois quelques légères et ponctuelles augmentations. Le Conseil de perfectionnement réfléchit en 1882 à rénover les tableaux des galeries, une occasion pour Henri Tresca, professeur de mécanique et sous-directeur de l’établissement, de rappeler la distinction entre les tableaux des galeries et les dessins du Portefeuille industriel20. Le crédit est alors augmenté pour passer à 2000 francs par an.
19La fragilité de ces œuvres, généralement exposées dans des espaces très lumineux, n’a pas permis de conserver cet ensemble dans sa globalité. Peu de ces tableaux nous sont parvenus, et les rares que nous ayons encore en notre possession sont dans un état très dégradé.
20Au xixe siècle, jusqu’à trente-huit tableaux ferroviaires étaient présents dans les galeries du musée. Le premier d’entre eux a été commandé en 1832 et représente une locomotive à vapeur de Stephenson (inv. TG44). Vient ensuite une importante commande au dessinateur Amable Tronquoy21 (dix-huit pièces), en 1849. On note ensuite une quinzaine de tableaux entrés dans la seconde moitié du siècle, notamment lors de l’Exposition universelle de 1855, quatre d’entre eux étant dus à Adolphe Leblanc22.
21Parmi les thèmes représentés, on trouve :
Les locomotives à vapeur (six tableaux).
Le freinage (cinq tableaux).
Les chemins de fer atmosphériques (quatre tableaux).
Les éléments relatifs aux foyers (quatre tableaux).
Le chemin de fer articulé de Sceaux (trois tableaux).
Les changements de voie (cinq tableaux).
22Seuls quatre tableaux sont aujourd’hui en notre possession. Le travail d’étude et d’analyse passe donc par l’interprétation des sources de gestion, en particulier des registres d’inventaire. Mais il est toutefois possible de proposer un rapprochement avec certains modèles, dans la mesure où ces tableaux ne visent pas à reproduire un sujet le plus fidèlement possible mais bien à en faciliter la lecture, en jouant par exemple sur les couleurs ou sur certaines vues intérieures partielles.
Les photographies
23Les collections photographiques du Conservatoire des arts et métiers connaissent un très fort accroissement à partir du début des années 1880. L’apparition du procédé au gélatino-bromure d’argent permet en effet la naissance d’une industrie photographique et répond aux besoins des premiers photographes. Les collections vont recevoir de très nombreux spécimens : certains d’entre eux se réfèrent aux techniques photographiques à proprement parler ; d’autres ont davantage un caractère documentaire et viennent illustrer certains procédés ou innovations23.
24Dans le domaine ferroviaire, les collections photographiques se constituent à partir de 1884 et comprennent onze fonds distincts. Huit d’entre eux (soit cent vingt-cinq épreuves) sont entièrement dédiés aux ouvrages d’art, principalement ponts et viaducs ferroviaires, situés en France et à l’étranger. Leur acquisition doit être rapprochée du déploiement des collections relatives aux constructions civiles, qui sont installées dès la fin des années 1880 dans une nouvelle galerie, puis en 1898 au rez-de-chaussée de la nouvelle aile Vaucanson. Certains fonds demeurent plus directement liés aux techniques ferroviaires avec l’illustration de matériel de traction employé là aussi en France et dans d’autres pays. La collection ne vise toutefois pas l’exhaustivité, mais présente des locomotives innovantes, intéressantes du point de vue de la disposition ou de l’usage. Trois fonds (soit quatre-vingt-dix images) sont à rapprocher de conférences publiques prononcées par l’ingénieur David Bandérali (1836-1890) sur lesquelles nous reviendrons plus loin ; ils mettent en avant du matériel et des ouvrages innovants, proposant des solutions techniques remarquées pour leur qualité.
25Dans tous les cas, les photographies apparaissent bien comme un nouveau type de représentation de l’objet technique. Elles n’ont pas nécessairement la valeur didactique d’un modèle en coupe ou d’un dessin coté, mais elles offrent des illustrations pertinentes de certaines applications et permettent d’actualiser certains pans de la collection en limitant les frais d’achat.
Les thématiques présentées
26Entrevues au travers des typologies constituant les collections, les thématiques couvertes s’étendent à l’ensemble du système technique ferroviaire. Nous parlons ici de « système technique » à dessein : de par sa nature, le chemin de fer a en effet reposé sur la mobilisation de toutes les technologies disponibles à l’époque de sa construction24. En considérant que les techniques utilisées dans la construction et l’exploitation des chemins de fer sont dépendantes les unes des autres, et qu’elles exigent une certaine cohérence, on peut affirmer que le chemin de fer constitue un système technique tel que défini par Bertrand Gille25. La création de la première salle des chemins de fer à la fin des années 1830, sur laquelle nous reviendrons plus loin, met d’ailleurs en lumière plusieurs aspects du système ferroviaire, qu’il s’agisse des infrastructures, de la traction, du matériel ou de l’exploitation.
Infrastructures et exploitation
27Les collections comprennent de nombreux spécimens, modèles et représentations d’éléments liés aux infrastructures et aux installations fixes. Il s’agit là de la première particularité du chemin de fer que de disposer d’une infrastructure qui lui soit entièrement dédiée. Le principe en est figé très tôt, et les visiteurs des galeries peuvent en apprécier la disposition. La voie est constituée de deux files de rails, généralement en métal : les « surmoulés » en bois offerts en 1824 par la Compagnie de la Loire, puis les modèles également en bois (inv. 05720) et surtout les échantillons montés sur panoplies par les services de l’institution en 1884 (inv. 10490 et 11780) offrent un intéressant témoignage qui rappelle l’évolution du matériau (la fonte, le fer puis l’acier) et les principes de fixation sur les traverses. Cette structure est disposée sur un lit de gravier appelé ballast, que l’on peut considérer sur certains modèles comme le plan-relief de la bifurcation de La Plaine, exposé après 1867 (inv. 07941 et 07942), ou sur les modèles de chemin de fer agricole d’Arsène Suc (inv. 08961 et 08962). Le tout est installé sur une plate-forme dont le tracé a été soigneusement étudié pour offrir des courbes de faible rayon et des déclivités limitées. Les tourments du relief sont franchis à l’aide d’ouvrages d’art (tranchées, ponts, tunnels) pour ne pas gêner le tracé de la ligne : si quelques modèles permettent d’en visualiser la construction dès les années 1850, comme le pont Britannia, la création d’une galerie des constructions civiles à la fin du siècle permet de rassembler des modèles de très belle facture illustrant cette question. Les liaisons sont jalonnées de gares, véritables portes d’entrée et de sortie sur le réseau, ouvertes au trafic marchandises et voyageurs26. La circulation des trains est progressivement contrôlée et régulée à l’aide de dispositifs mécaniques ou électriques. Ceux-ci garantissent l’écoulement fluide et sécurisé des convois, le tout étant bien entendu subordonné à une réglementation précise.
La traction
28C’est sans doute l’aspect le plus complet des collections ferroviaires, représentatif de l’importance de la locomotive à vapeur. Bien que les toutes premières lignes françaises aient été exploitées à l’aide de chevaux ou de la simple force de la gravité, c’est bien la locomotive à vapeur qui a permis le très fort développement des chemins de fer dès les années 1840. Combinant d’importantes connaissances relatives à la production de la vapeur et à la maîtrise de sa force d’expansion à de nombreux savoir-faire en termes de construction mécanique, la locomotive a fait l’objet de multiples perfectionnements pour l’adapter à des usages variés et offrir des performances optimales du point de vue de la vitesse, de la puissance ou de l’économie d’exploitation27.
Figure 7. – Pompe alimentaire pour chaudière de locomotive, modèle au 1/5 d’Eugène Philippe, 1838-1839. Musée des Arts et Métiers, inv. 02552.

© Lionel Dufaux.
29Les collections du Conservatoire sont particulièrement riches de modèles, objets et documents détaillant la construction des locomotives et de leurs éléments constitutifs. Nous avons vu qu’il existait des représentations de machines complètes mais qu’elles demeuraient en définitive très minoritaires. Si l’on aborde la machine locomotive du point de vue de ses différents composants, les collections révèlent toute leur étendue : elles couvrent en effet ce qui tient à la machine à vapeur appliquée à la locomotive, depuis l’alimentation en eau (pompe alimentaire, inv. 02552, fig. 7, ou injecteur, inv. 08656), le passage par le foyer (coupe d’un foyer offerte par la Compagnie PLM, inv. 08024), la circulation de la vapeur dans les tubes à fumée (spécimens de tubes de chaudières de locomotives, inv. 05718- 05719), la prise de vapeur (modèle de robinet, inv. 02551), la distribution (inv. 03080, 05724, 08685), le châssis et le mécanisme (modèle de châssis de la Victorieuse, inv. 02549, modèle de bielle de locomotive, inv. 02897). Notons dès à présent que ces différents éléments ont progressivement permis d’aborder la locomotive dans son ensemble, mais que leur constitution s’est faite au fur et à mesure du progrès qui marquait chacun de ces divers composants. Par ailleurs, les tractions « alternatives », reposant par exemple sur l’usage de l’air comprimé (modèles de locomotives à air comprimé Fortin-Hermann, inv. 08835 à 08837) ou du pétrole (foyer Sainte-Claire Deville pour huile minérale, inv. 08822) sont également représentées, illustrant davantage une dimension expérimentale.
Le matériel roulant
30Troisième volet du système ferroviaire, le matériel roulant concerne les wagons et voitures destinés respectivement au transport de marchandises et de passagers. Inspirée à l’origine par le roulage, la construction de ce matériel connaît d’importants progrès visant à répondre à une diversification des usages (notamment pour les wagons, où l’on voit rapidement des structures adaptées au transport des bestiaux, du charbon ou des liquides). Les voitures bénéficient d’améliorations en termes de sécurité (renforcement des parois et des châssis avec l’emploi du métal) et de confort (éclairage, chauffage, circulation intérieure, commodités)28.
31Cet aspect est moins présent quantitativement dans les collections, mais on peut toutefois découvrir des pièces intéressantes relatives à la construction du matériel et à son évolution dans le temps : on peut voir par exemple un fonds important dédié à la thématique du freinage ferroviaire dont les modèles réduits didactiques et certains spécimens permettent d’apprécier la remarquable évolution, des objets traitant du graissage des essieux, si important pour garantir la sécurité (comme des boîtes à graisse, inv. 06952 et 10511), ou des outils et machines-outils employés dans les ateliers de construction et d’entretien du matériel (avec par exemple un modèle de tour pour les roues de wagons, inv. 06221).
La constitution des collections
32Remarquables par leur variété, les collections se constituent progressivement, au fur et à mesure des besoins et des exigences des professeurs et du directeur. L’établissement dispose de moyens budgétaires limités pour procéder à l’enrichissement de ses collections, et il développe tout un réseau pour faire des acquisitions à moindres frais. Cet accroissement se fait néanmoins de manière très raisonnée et réfléchie : au sein du Conseil de perfectionnement, les professeurs mettent en place une ligne générale et quelques critères de sélection. En janvier 1819, Gérard Joseph Christian (1778-1832), directeur sous la Restauration, soumet ainsi une liste d’échantillons à acquérir en termes de comparaison avec l’industrie étrangère29. Dix ans plus tard, c’est une liste de machines dont il serait utile de présenter des modèles que le Conseil examine30. En 1840, il formalise un axe d’acquisition encore en vigueur aujourd’hui, celui de la constitution de séries :
« Le conseil après avoir examiné l’emploi le plus utile qui pourrait être fait des fonds affectés à la construction des modèles, admet en principe qu’il sera bon de procéder par séries comme on l’a fait jusqu’à présent, et il propose d’affecter les sommes suivantes sur le budget de cette année, soit pour continuer des séries commencées, soit pour commencer des séries nouvelles de modèles :
1o. Série de modèles d’engrenages […].
2o. Série de modèles de transformation de mouvements […].
3o Modèles d’outillage pour la construction des locomotives, des Wagons, etc.31. »
33Quelques années plus tard, Théodore Olivier, devenu administrateur du Conservatoire, nous livre sa perception de l’organisation des collections :
« Les modèles en relief des machines doivent être des jalons espacés entre eux et dont les intervalles doivent être remplis par des dessins déposés dans la galerie du portefeuille du Conservatoire. […]
Il me semble que les galeries du Conservatoire doivent former un musée et non un bazar, et encore moins une pharmacie. […]
Restreindre la Confection des modèles en relief, à ce qui est indispensable comme Jalons industriels, marquant la route & les progrès, est chose bonne, utile, & indispensable, vu l’espace que l’on peut consacrer au Musée32. »
34Poser les grands jalons qui soulignent l’innovation et les ruptures techniques, former des séries, inscrire de facto cet ensemble dans une perspective historique : voilà comment on pourrait résumer les grands principes de formation des collections. La constitution de séries cohérentes et chronologiques offre un moyen efficace d’illustrer et d’expliquer l’évolution du progrès technique avec une mise en perspective pertinente33. C’est particulièrement vrai pour ce qui touche les chemins de fer : il n’est pas question de montrer toute l’étendue de la production de locomotives, de wagons et voitures ou de rails par exemple, d’autant plus que la multiplication des constructeurs en France, en Belgique ou en Angleterre, concomitante au développement des réseaux ferrés, rend ce recensement de plus en plus complexe. Il faut en revanche constituer un fonds avec lequel on puisse expliquer ce qu’est une locomotive à vapeur et comment elle fonctionne, quels sont les procédés mécaniques et thermodynamiques qui s’y trouvent appliqués et quels progrès ils connaissent au fil du temps : de ce point de vue, la présentation de quelques modèles « complets » répond à celle d’éléments constitutifs. Le modèle de la locomotive Stephenson par Eugène Philippe (inv. 04044) sert en définitive pendant longtemps d’illustration très générale sur ce qu’est une locomotive ; à ses côtés, les modèles de pompe alimentaire ou de robinet d’admission permettent de s’attarder sur des points essentiels ; plus tard, les injecteurs viennent montrer un dispositif que l’on substitue progressivement aux pompes pour alimenter la chaudière en eau.
35Plusieurs modalités coexistent pour enrichir les galeries, que l’on peut illustrer là aussi avec les fonds ferroviaires (graphique 1).
Graphique 1. – Achats et dons d’objets ferroviaires au xixe siècle. En noir : dons d’objets ; en gris : achats d’objets.

Les commandes
36Un premier type de modalité d’acquisition est l’achat. Instance consultative composée un temps exclusivement du corps enseignant de l’institution, le Conseil de perfectionnement est appelé à se prononcer sur le projet de budget envoyé chaque année aux autorités de tutelle34. On peut alors découvrir, année après année, les fonds consacrés aux achats. Le premier chapitre des « dépenses variables » pour le budget de 1841 est intitulé « Acquisition de nouveaux modèles ». Son montant est alors fixé à 33000 francs35. À partir de 1843, le chapitre couvre l’achat de modèles, de grands tableaux pour les galeries, de dessins et calques pour le Portefeuille et l’entretien des collections. L’ensemble se chiffre à 37000 francs, sur un budget global de 150000 francs, soit un peu moins de 25 %. Cette part ne va cesser de diminuer : en 1848, le budget relatif aux collections se monte à 23080 francs (soit 15,4 % du budget global) ; en 1850, on atteint le chiffre de 18400 francs, soit 12,3 %. La situation s’améliore sous le Second Empire, en particulier après l’Exposition universelle de 1855 : en 1857, le budget consacré aux collections se chiffre à 25800 francs (soit 10,8 % d’un budget global en forte augmentation). Cela dit, le montant repart à la baisse, passant en 1866 à 18500 francs (soit 6,4 % du budget global). Cette proportion se maintient au début de la Troisième République jusqu’au milieu des années 1880, où elle remonte à 20 % d’un budget également en forte croissance, répondant à une nouvelle refonte des galeries ; elle s’érode ensuite et descend petit à petit jusqu’à 12 % en 189836.
37L’étude des exercices budgétaires présentés au Conseil de perfectionnement révèle que le chapitre Collections forme une part variable dans un budget général progressivement grevé par l’ouverture de nouveaux cours et l’augmentation des charges fixes. Une fois les dépenses incompressibles honorées, le reliquat est affecté aux collections. La gestion hasardeuse du budget contraint même le Conservatoire à suspendre ses achats en 1849. Difficile, dans ces conditions, d’actualiser régulièrement les collections.
38Malgré ces aléas, le Conservatoire procède, quasiment chaque année, à l’enrichissement de ses collections ferroviaires par des achats, principalement de modèles et de tableaux. Entre 1832 et 1850, les collections reçoivent chaque année entre un et sept items, hormis en 1847 ; entre 1856 et 1877, les achats sont moins nombreux et moins réguliers ; pour le dernier quart du siècle, on note une reprise plus régulière entre 1879 et 1887, avant une dernière phase plus basse.
Le cas particulier des expositions universelles
39Si le Conservatoire a pu bénéficier, en 1833, d’un crédit spécial de 50000 francs pour procéder à de nouvelles acquisitions37, il a réellement pu conduire une politique dynamique d’enrichissement de ses collections lors des expositions universelles. L’étude des acquisitions révèle en effet plusieurs pics, dont le plus significatif date de 1851 (Great Exhibition of the Works of Industry of all Nations, à Londres), suivi d’un second en 1855 (Exposition universelle de Paris)38. Pour chacune de ces expositions, le Conservatoire, par ailleurs impliqué dans les différents jurys, a bénéficié d’un crédit spécifique afin de procéder à des achats39. En 1851, le Conseil de perfectionnement milite pour un crédit de 150000 francs, considérable au regard du budget global de l’établissement :
« M. Raymond Wolowski, comme Membre de la Commission de l’assemblée législative chargée d’examiner la demande de crédit pour l’Exposition de Londres, informe le Conseil que M. le Ministre du Commerce ayant retranché de cette demande celle de la somme de cent cinquante mille francs formulée par la Commission ministérielle présidée par M.Ch. Dupin pour acheter des modèles de tous genres à déposer au Conservatoire des Arts et Métiers, il a pensé, ainsi que quelques-uns de ses collègues, qu’il était nécessaire de reproduire cette demande.
« Si l’Exposition de Londres ne devait avoir pour résultats que de rapporter en France des Souvenirs plus ou moins fugitifs, et non des modèles des différents produits que nos industriels auraient intérêt à connaître, ses résultats seraient à-peu-près nuls pour nous.
« Il importe donc que ce crédit de cent cinquante mille francs soit rétabli, et il a pensé qu’il serait utile que le Conseil déléguât quelques-uns de ses Membres pour appuyer cette opinion auprès de la Commission législative. « Cette proposition est acceptée par le Conseil de Perfectionnement, qui désigne son Président, M. Moll, l’Administrateur, et M. Pouillet, pour le représenter auprès de cette Commission40. »
40C’est finalement un crédit de 100000 francs qui est alloué au Conservatoire41. Trente-quatre objets et documents relatifs aux chemins de fer sont alors achetés par l’établissement pour enrichir ses collections. Parmi les entrées les plus notables, le modèle de locomotive Long Boiler par Clair, acquise à Londres (inv. 04601).
41La même somme est à nouveau octroyée en 1855 pour la première grande exposition universelle parisienne : « Toutes les dispositions ont été prises pour faire le levé d’un grand nombre de machines et d’appareils de l’Exposition : le portefeuille industriel du Conservatoire pourra s’enrichir d’environ cinq cents planches, dont quelques-unes, déjà terminées, sont mises sous les yeux du Conseil.
42« La répartition du crédit de 100000,00 francs est en conséquence faite ainsi qu’il suit :
43« Dessins 25000,00 F
44« Modèles et produits 65 000
45« Installation 10 000
46« Ensemble 100 000 francs42. »
47Dix-neuf items rejoignent les collections ferroviaires à cette occasion. Les acquisitions portent notamment sur des appareils télégraphiques adaptés pour indiquer le passage des trains, de la maison Breguet (inv. 06260 et 06261), ou des modèles de ponts à bascule pour le pesage des locomotives (inv. 06274, 06275, 06459 et 06460). Lors de l’exposition parisienne, l’Anglais John Ramsbottom offrait un exemplaire d’un piston muni d’une garniture spécialement étudiée pour limiter les frottements et les pertes de vapeur (inv. 06435). Les mêmes libéralités sont offertes à l’établissement en 1862 et 186743, 187844, 1889 et 1900. En 1867 à Paris, quelques objets spectaculaires rejoignent les collections, comme un modèle de voiture-lits canadienne (inv. 07659) qui devait attiser la curiosité des visiteurs de par son caractère inédit, ou bien le plan-relief de la bifurcation de La Plaine (inv. 07941). En 1878, le constructeur Arsène Suc offrait d’intéressants et précis modèles réduits de ses wagons destinés aux chantiers de construction et exploitations agricoles (inv. 08959 à 08961).
48Les expositions universelles permettent de suivre de près les innovations et de faire l’acquisition de pièces récentes, issues des recherches scientifiques et industrielles conduites non seulement en France mais à l’étranger. Il s’agit donc de « moments » stratégiques pour accroître les collections tant quantitativement que qualitativement.
Les dons et le développement d’un réseau
49L’étude des modalités d’acquisitions révèle, après 1850, une augmentation significative de la part des dons. Certains de ces dons sont spontanés, et le Conservatoire peut saisir ces opportunités pour enrichir ses collections. D’une manière générale, les dons traduisent le développement d’un réseau de sociabilités entre le directeur et les professeurs du Conservatoire avec le monde industriel et savant. La présence d’Eugène Schneider (1805-1875) au Conseil de perfectionnement à partir de 1853 est l’occasion de solliciter le don d’un album des locomotives produites au Creusot45. L’expertise proposée par le Conservatoire à l’industrie à travers ses laboratoires, et notamment son laboratoire expérimental de mécanique, conçu par Arthur Morin et Henri Tresca46, permet au corps professoral de nouer des liens avec les entreprises. Ainsi Morin entre-t-il en contact avec la Compagnie des chemins de fer de l’Ouest quand celle-ci sollicite le Conservatoire pour réaliser des expériences avec un dynamomètre de l’établissement47. Le passage par l’École polytechnique et la solidarité entre anciens élèves facilite les relations, et les formules d’appel des lettres échangées, comportant la mention « Mon cher camarade », peuvent en attester. Morin entretient ainsi une correspondance suivie avec plusieurs ingénieurs de la Compagnie du Nord, et la confiance réciproque lui permet d’ailleurs de recommander un ancien employé du Conservatoire à l’ingénieur Charles Couche (1814-1879)48. La Compagnie du Nord sollicite par ailleurs l’emploi de dynamomètres49, et le Conservatoire reçoit par la suite plusieurs objets offerts par cette compagnie. Lors des expositions universelles, les bonnes relations entre l’administration du Conservatoire et les compagnies ferroviaires permettent de provoquer les dons de plusieurs objets, comme des modèles de wagons offerts par la Compagnie du Nord (inv. 07465 à 07467) et des pièces détachées de locomotives du Paris-Lyon-Méditerranée (inv. 08020 à 08023)50. Morin reçoit de François Clément Sauvage (1814- 1872), directeur de la Compagnie des chemins de fer de l’Est, un modèle de foyer à huile minérale d’après Henri Sainte-Claire Deville (inv. 08222)51. En 1862, il rappelait que les achats réalisés par le Conservatoire à l’Exposition universelle de 1855 avaient entraîné de nombreux dons complémentaires : « La plupart de ces dons n’auraient pas été faits s’ils n’avaient dû trouver dans les galeries du Conservatoire, leur place à côté des objets dont le crédit spécial de 100000 fr. nous avait permis de faire l’acquisition52. » C’est ainsi une politique volontaire de sollicitations que la direction du Conservatoire met en place, non seulement avec les compagnies ferroviaires, mais également avec le ministère de tutelle. En 1859, Arthur Morin demandait ainsi que soit remis un exemplaire d’un cours de chemin de fer à la bibliothèque : « M. Bazaine vient de faire paraître son Cours autographe de Chemins de fer professé à l’École des Ponts et Chaussées. Un exemplaire de cette publication serait bien utilement placé à la bibliothèque du Conservatoire Impérial des Arts & Métiers, et j’ai l’honneur de prier Votre Excellence de vouloir bien me le faire accorder pour cette destination53. » Jouant sur l’implication de la direction et du corps professoral dans les sociétés savantes, les jurys des expositions, le monde politique et industriel, l’établissement peut enrichir à moindres frais ses collections et contourner les contraintes d’un budget souvent limité.
La pertinence des acquisitions
50Dans les nombreux courriers de remerciements pour des dons, le directeur du Conservatoire insiste sur l’intérêt et l’utilité des collections, que ce soit pour les visiteurs des galeries ou pour l’enseignement. Citons par exemple cette lettre de remerciement pour le don de modèles de charpentes, parmi lesquelles figurent celles des gares d’Orléans (Austerlitz) et du Nord : « Je tiens à vous remercier de l’envoi que vous avez bien voulu faire au Conservatoire de votre modèle de la Charpente du Chemin de fer d’Orléans. […] Le Conservatoire possédera, grâce à vous, une collection d’un réel intérêt pour le public qui le fréquente, et pour les cours spéciaux qui y sont faits54. »
51L’administration du Conservatoire se réserve aussi le droit de refuser les pièces qui ne présenteraient pas d’intérêt pour les collections. En témoigne cet exemple concernant les collections ferroviaires : « Un Sieur Maudet, Mécanicien, qui en 1863 demeurait à Marseille rue du Grand chemin de Rome no 78, avait envoyé à la Société d’encouragement un modèle de locomotive de chemin de fer, qui a été ensuite remis au Conservatoire. Ce modèle n’offrant pas d’intérêt pour les collections de cet établissement, j’ai fait écrire au Sieur Maudet pour le prévenir de l’intention où j’étais de le lui renvoyer55. »
52De la même manière, certains objets ou documents devenus inutiles car dégradés, trop anciens, insuffisamment détaillés ou considérés comme peu significatifs du point de vue historique, peuvent sortir des collections. La série ancienne de rails en bois et en fonte datant de 1824 est ainsi radiée des collections en 185056, peut-être jugée obsolète ; en 1853, Théodore Olivier justifie la cession d’objets conservés dans les collections :
« J’ai l’honneur de vous adresser ci-joint la liste des divers objets qui ne font qu’encombrer nos galeries, et qui nous sont complètement inutiles : ce sont des objets sans intérêt pour ceux qui visitent les collections du Conservatoire Impal des Arts et Métiers dans des vues d’étude ; la plupart sont incomplets, et plusieurs sont dans un tel état de détérioration qu’il serait impossible de les réparer. Nous sommes très-gênés dans les locaux destinés aux divers appareils nouveaux qui nous arrivent chaque jour, de sorte qu’en remettant au Domaine tous les objets dont il s’agit, nous pourrons disposer nos galeries dans un meilleur ordre, et les objets seront moins entassés les uns sur les autres57. »
Les usages des collections
53La consultation des registres d’inventaire met en évidence la distinction entre les collections de « modèles » (c’est-à-dire d’objets), de tableaux, le matériel de laboratoire, le mobilier, le Portefeuille industriel et la bibliothèque. Cet ensemble assez vaste couvre en réalité les « actifs » du Conservatoire en matière de comptabilité et est sous la responsabilité de l’agent comptable, fonction instaurée en 1841 à la suite de l’inspection du Conservatoire : « L’agent comptable dépositaire des catalogues et inventaires assurera la conservation des matières et objets mobiliers de toute espèce appartenant au conservatoire au moyen de reconnaissances périodiques et d’un récolement annuel dont les résultats reconnus et certifiés par le professeur administrateur constateront les augmentations ou réduction du matériel survenu dans l’année58. » Le mouvement des œuvres et leur surveillance (ce que nous appellerions aujourd’hui la régie des collections et la conservation préventive) sont confiés à partir de 1833 à une personne spécifique qui reçoit à l’origine le titre d’Inspecteur des galeries. C’est César Louis Nicolas Leblanc, professeur de dessin, qui est nommé le premier à cette fonction59 ; à son décès, il est remplacé par Charles Schlumberger, jusqu’en 1848, pour lequel le poste prend l’intitulé de « conservateur des collections » ; viennent ensuite Jean Thiébaut Silbermann (1806-1865) de 184860 à sa mort, Antoine Victorien Campion (1830-1893) de 186561 à sa mort et Gustave Tresca (1846-1918).
54En 1852, Théodore Olivier exposait clairement le caractère dual de l’établissement et de ses collections, laissant entrevoir différents usages :
« Le Conservatoire est un établissement qui se compose de deux parties distinctes comme établissement d’Instruction. Il est une Ecole, comme le Collège de France, par ses cours publics ; il est un Musée, comme le Jardin des Plantes, par ses collections.
Or, nos galeries doivent rester au complet, il faut que les visiteurs y trouvent tout ce qui peut leur être utile à étudier suivant leurs professions diverses. Or, il faut que nos professeurs aient dans leurs laboratoires les instruments et appareils qui leur sont indispensables pour exécuter les expériences nécessaires à leurs cours et préparer leurs leçons62. »
55Galeries et enseignements semblent être les principaux usages auxquels sont destinées les collections.
L’exposition dans les galeries
56De la Restauration jusqu’à la toute fin du siècle, les galeries du Conservatoire sont ouvertes au public le jeudi et le dimanche, de 10 heures à 16 heures. Les étrangers, sur présentation de leur passeport, pouvaient être admis le mardi, le mercredi et le samedi, de 11 heures à 15 heures63. En 1900, le Conseil de perfectionnement réfléchit à une évolution des horaires (l’hiver, le dimanche de 10 à 16 heures, du mardi au samedi de 12 à 15 heures ; l’été, le dimanche de 10 à 17 heures et du mardi au samedi de 12 à 17 heures)64. Les visiteurs peuvent y découvrir la plupart des objets et tableaux acquis par l’établissement et présentés à leur intention pour l’étude. Ces collections sont organisées thématiquement dans des galeries spécifiques.
Figure 8. – J. Desmarets, Conservatoire royal des arts et métiers, à Paris. Vue d’une partie de la grande galerie, au premier étage, gravure publiée dans Le Magasin pittoresque, 1843, p. 190. Collection particulière.

© Lionel Dufaux.
57Les premiers objets ferroviaires de la collection, une série d’échantillons de roues et rails en bois et en fonte, sont acquis en 1824. Entrés postérieurement à la publication du catalogue des collections de 1818, ils ne sont pas recensés dans le catalogue de 1851. Ils ne figurent pas non plus sur l’inventaire partiel réalisé en 183765, mais on en retrouve trace lors de la campagne de récolement de 1841 : « Modèles de rails et de roue pour un chemin de fer. Ces modèles se composent de 9 pièces en bois et de 3 pièces fondues. » La commission chargée de réaliser ce récolement donne à l’ensemble le numéro d’ordre 142 et indique que les pièces se trouvent dans la « Grande Église66 ». Ces objets sont radiés des collections en 185067, peut-être au moment où l’on décide de réaménager l’église en amphithéâtre68.
58Nous savons que le Conservatoire a procédé en 1833 à l’acquisition de modèles réduits d’une locomotive et de wagons. La commande a été passée à Eugène Philippe et réglée à l’aide d’un crédit exceptionnel de 50000 francs69. Nous ignorons la localisation d’origine de ces pièces, mais nous les retrouvons en 1837 dans la « Grande Galerie », sur l’un des « Socles du milieu » :
« 15. Modèle de chemin de fer, représenté au cinquième de grandeur d’exécution :
1o l’établissement des rails [inv. 04041 ou 04042]
2o le changement des voies [inv. 04041 ou 04042]
3o l’embarcadère [?]
4o la machine locomotive [inv. 04044]
5o un wagon pour le transport des marchandises [inv. 04045]
6o id. id. de la houille [inv. 04046]
7o id. id. du fer [inv. 04047]70. »
59Dans un plan du premier étage du Conservatoire dressé le 29 mars 1800 par François Jacques Delannoy (1755-1835)71, architecte chargé de l’installation de l’établissement dans l’ancien prieuré de Saint-Martin-des-Champs72, la « Grande galerie des modèles » est un vaste espace aménagé au premier étage dans l’aile parallèle à la rue Saint-Martin. On retrouve la même dénomination dans le catalogue des collections de 1818. La Grande Galerie a été représentée en 1843 dans le numéro du Magasin pittoresque en partie consacré au Conservatoire73.
60Le récolement de 1841 montre l’accroissement de la collection de chemin de fer. On trouve en effet, sous le numéro d’ordre 1679, un « Modèle de chemin de fer, représentant l’établissement des rails [inv. 04041 ou 04042], le changement de voie [inv. 04041 ou 04042], le tourne rails [inv. 04043], une machine locomotive à 4 roues avec son tender [inv. 04044], un vagon [sic] pour les marchandises [inv. 04045], un pour la houille [inv. 04046] & un pour les fers [inv. 04047] ; une machine locomotive à 6 roues, dont le dessus est supprimé pour laisser voir le mécanisme [inv. 02549]74 ». Le document comporte une ambiguïté : la colonne dans laquelle est portée la mention de la localisation est ici vide ; la dernière localisation mentionnée est celle de la salle des tours, dont on sait qu’elle se trouvait à l’extrémité de la Grande Galerie75.
61La visite du Conservatoire des arts et métiers par le Magasin pittoresque, en 1843, nous délivre une information importante sur l’emplacement d’une salle dite « du chemin de fer » : « Au milieu de la grande galerie se trouve la salle du chemin de fer, où l’on peut étudier l’établissement des rails et deux systèmes différents de locomotives, qui, quoique exécutés au cinquième de la grandeur réelle, se démontrent dans toutes leurs parties de manière à laisser voir le mode de construction dans les moindres détails, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur76. » C’est là un emplacement de choix, au centre de la grande galerie77.
62Dans la présentation de la distribution des salles, consignée dans la « Notice historique » placée en ouverture des différentes éditions du catalogue des collections entre 1851 et 1882, Paul Huguet indique que la « galerie dite des chemins de fer » se trouve au centre de l’aile principale, mais côté jardin. Cela signifie que les objets ont été placés dans un espace plus réduit, mais sans doute assez lumineux, ouvrant par trois grandes baies vitrées sur le jardin du Conservatoire78. La transformation de l’ancienne église en laboratoire de mécanique a sans doute nécessité de redéployer les collections, d’où une réorganisation des espaces. En 1851, on trouve dix-neuf objets dans la salle79. Figurent en bonne place les modèles « complets », parmi lesquels la locomotive Stephenson par Philippe (inv. 04044), le châssis de la Victorieuse par le même (inv. 02549), le tender du chemin de fer de Lyon par Clair (inv. 03439), les wagons du chemin de fer de la Loire (inv. 04045 à 04048), puis plusieurs modèles illustrant la détente variable, l’alimentation des locomotives, la bielle et l’excentrique appliqués à la locomotive, des rails, plaques tournantes et appareils de contrôle de la circulation. Cette situation a sans doute perduré pendant tout le Second Empire, car elle est attestée dans les éditions de 1855 (vingt-sept pièces), 1859 (vingt-sept pièces) et 1864 (trente pièces) du catalogue des collections. Les principaux apports concernent le modèle de locomotive partiellement en coupe par Clair (inv. 04601) mais surtout divers perfectionnements apportés aux freins et à la distribution de la vapeur : c’est bien sur ces organes que se focalise alors l’attention des constructeurs et des ingénieurs ferroviaires.
63À partir de 1870, il semble que ce qui fut la « première » salle du chemin de fer ait été réunie à la « deuxième », formant un plus vaste espace occupant toute la largeur du premier étage. La position de la collection, qui compte quarante-huit objets, est des plus centrales. Cette distribution reste inchangée pendant au moins vingt ans, comme l’attestent le catalogue de 1876, qui recense cinquante-cinq objets, et celui de 1882 (soixante-dix-sept pièces). La consultation de plans de l’établissement, publiés par l’éditeur de cartes allemand Wagner & Debes, de Liepzig, nous a permis de confirmer l’existence d’un vaste espace dédié aux chemins de fer entre 1881 et les années 1890, mais où l’ancienne cloison divisant la salle en deux zones reste en place80. L’absence de photographies ou de gravures de cet espace rend difficile sa perception, mais on peut imaginer un ensemble important, enrichi depuis les années 1860 par les acquisitions opérées notamment à l’occasion des expositions universelles : les modèles réduits de wagons offerts par la Compagnie du Nord (inv. 07465 à 07467) ou le modèle de voiture-lits du Great Weastern (inv. 07659), les plans-reliefs de la bifurcation de La Plaine (inv. 07941 et 07942) ou du chemin de fer agricole d’Arsène Suc (inv. 08961 et 08962), les panoplies constituées en 1884 sans doute au Conservatoire (comme la plupart de ces dispositifs de présentation) portant les échantillons de rails, éclisses et autres coussinets devaient former un ensemble spectaculaire. Il faut imaginer en outre que les murs étaient ornés d’une trentaine de tableaux. Le tout était bien sûr complété par d’autres objets relatifs à la production, distribution et utilisation de la vapeur (détente variable, foyers, pistons) ou au freinage des trains.
64Récemment nommé directeur de l’établissement, Aimé Laussedat (1819-1907) poursuit la politique de création de nouvelles galeries et de réaménagement des espaces existants. D’importants travaux sont ainsi conduits dès 1882-188381, et en 1890, le directeur rappelait au ministre la nécessité d’achever la galerie sur la rue Vaucanson, de construire une halle aux machines et de restaurer la principale galerie des collections. Il insistait sur la détérioration des bâtiments et des travaux « indispensables pour la Conservation et l’utilisation de nos précieuses collections82. » Le chantier a semble-t-il vraiment commencé en 189283, et en 1897, Joseph Hirsch (1836-1901), professeur de mécanique, proposait les noms à faire figurer dans la frise intérieure de la nouvelle grande galerie de mécanique84.
65Un plan de l’établissement, daté de 1898, nous donne une bonne idée du nouvel espace : désormais, la grande galerie occupe la totalité des surfaces du premier étage, éclairée par des fenêtres ouvrant sur l’ancien cloître, la cour d’honneur, la cour de l’administration et sur le jardin. Au centre, l’ancienne salle du chemin de fer est devenue la « salle d’honneur », communiquant avec les deux parties de la galerie par trois grandes arches. Les chemins de fer sont placés à l’extrémité sud de la galerie85. Une photographie, publiée dans le premier fascicule du catalogue des collections édité en 1905, montre la perspective de cette nouvelle galerie, parcourue par les rails du chemin de fer Decauville. Les modèles sont installés dans des vitrines en bois, et les tableaux destinés à l’enseignement sont accrochés sur les murs86. Il semble que la présentation allie traitement chronologique (le modèle de locomotive de Marc Seguin et celui de la machine Stephenson ouvrent la perspective de part et d’autre de la voie Decauville installée dans l’ensemble des galeries) et thématique (matériel de traction et matériel roulant semblent en effet dissociés des infrastructures).
L’enseignement technique
66Nous nous sommes interrogés sur la place des collections dans l’enseignement prodigué par les professeurs, et celle-ci apparaît comme ambiguë87. Les séances du Conseil de perfectionnement laissent clairement apparaître que les professeurs ont participé à la constitution des collections. Dès les années 1830-1840, ils font part des objets qui leur semblent indispensables pour compléter les collections, et cela se poursuit tout au long de la période. En 1830, Jean-Baptiste Say, titulaire de la chaire d’économie industrielle, milite pour l’acquisition d’objets relatifs aux transports88 ; Claude Pouillet est à l’origine de l’achat d’un modèle de tender en 1848-184989 ; en 1896, Joseph Hirsch justifie la commande d’un modèle de locomotive et nous livre une information intéressante quant au positionnement des collections : « Je ne suis assurément pas embarrassé de répondre au ministre mais je serais bien aise que, dans une lettre que vous m’adresseriez en réponse à cette communication, vous fissiez ressortir l’intérêt de l’enseignement par les modèles à l’amphithéâtre et dans les galeries où nous n’avons que des antiquités pour représenter le matériel des chemins de fer90. » L’installation d’une voie ferrée Decauville à l’intérieur des galeries et d’un monte-charge était d’ailleurs utile pour la manutention des collections91. Faut-il pour autant en déduire que tous les objets présentés dans les galeries ont tous été systématiquement utilisés par les enseignants ? Nous n’avons, sur ce point, que peu de réponses précises dans les archives du Conservatoire, mais il nous semble intéressant de distinguer deux catégories d’objets : d’une part, les pièces animées, nécessitant une mise en mouvement pour en expliquer le fonctionnement et qui pourraient se prêter à une explication en amphithéâtre ; d’autre part, les objets inertes, plutôt destinés à la contemplation et à l’étude dans les galeries (ce que Paul Huguet appelle « l’enseignement de visu92 » par opposition à l’enseignement oral), bien que potentiellement utiles aux leçons des professeurs. Un courrier relatif à un modèle de métier à tisser est, de ce point de vue, éclairant : « Ce modèle est conçu dans un bon esprit : Il sera facilement lisible pour les visiteurs des galeries. Il sera facilement transportable dans les amphithéâtres destinés à l’enseignement oral donné par les professeurs aux nombreux auditeurs qui se rendent à leurs cours93. » Ajoutons à cela que certains objets anciens avaient peut-être vocation à demeurer dans les galeries pour offrir une mise en perspective historique, encore qu’à la fin du xixe siècle, certaines leçons à caractère rétrospectif auraient pu les mobiliser. De ce point de vue, il faut signaler que l’acquisition et la conservation d’objets pour certains obsolètes répondent certainement à l’intégration de pratiques et de savoirs antérieurs par des techniques nouvelles, et préservent les savoirs accumulés et la mémoire technique94.
Conclusion
67Les collections d’objets, de tableaux puis de photographies relatives aux chemins de fer se constituent dès l’origine du Conservatoire des arts et métiers, et s’étoffent réellement à partir de 1824. Qu’elles soient acquises sur les ressources budgétaires de l’établissement ou offertes par des particuliers ou des entreprises, ces collections ne sont pas constituées au hasard : elles répondent en effet aux missions de l’établissement à travers notamment les besoins des professeurs. Ce sont en effet les enseignants (mais également le directeur quand il n’est pas lui-même en charge d’une chaire) qui déterminent les priorités d’acquisitions, identifient les représentations dont ils pourraient avoir besoin dans leurs leçons ou qui pourraient figurer utilement dans les galeries.
68Malgré un budget très souvent limité, le Conservatoire tire avantageusement profit des expositions industrielles et universelles, puis d’un réseau de sociabilités dynamique pour accroître en volume les collections ferroviaires. Celles-ci semblent ne compter qu’une dizaine d’éléments au milieu des années 1830 ; au début du xxe siècle, le fascicule « Mécanique » du catalogue des collections, paru en 1905, recense cent trente-neuf items relatifs aux chemins de fer (parmi lesquels trois fonds photographiques et vingt-sept tableaux)95. Nous n’incluons pas dans ce décompte les objets, tableaux et photographies relatifs aux ouvrages d’art. L’augmentation reste malgré tout spectaculaire, la collection s’étant accrue de cent vingt items entre le début du Second Empire et la Belle Époque, passant de dix-neuf à cent trente-neuf objets (grandeur réelle et modèles) et tableaux, soit une hausse de 631 %.
69Couvrant des aspects relatifs à la traction, au matériel roulant, à l’exploitation et aux installations fixes, les collections illustrent les principaux aspects des techniques ferroviaires et mettent en lumière quelques progrès significatifs, notamment du point de vue de la fiabilité et de la sécurité. Il est en effet possible de considérer les différents composants du système technique ferroviaire, sans pour autant bénéficier d’une vision exhaustive qui recenserait absolument tous les types de locomotives, de wagons, d’appareils de voie ou de signaux utilisés. La constitution raisonnée de la collection, sa nature non-exhaustive, la variété des usages qui pouvaient en être faits doivent nous interroger sur le positionnement du Conservatoire vis-à-vis de l’industrie ferroviaire. Le recensement des fonds documentaires et iconographiques et surtout des leçons du « haut enseignement » nous permettra de qualifier le rôle de l’établissement et de comprendre la place occupée par ses collections.
Notes de bas de page
1 Henri Grégoire, Convention nationale. Instruction publique. Rapport sur l’établissement d’un conservatoire des arts et métiers, op. cit.
2 À ce sujet, nous renvoyons vers Claudine Fontanon, « Les origines du Conservatoire des arts et métiers et son fonctionnement à l’époque révolutionnaire », Les Cahiers d’histoire du Cnam, 1992, no 1, p. 17-44 ; Dominique de Place, « Le sort des ateliers Vaucanson, 1783-1791, d’après un document nouveau », History and Technology, 1983, vol. 1, p. 79-100 ; id., L’Incitation au progrès technique et industriel en France de 1783 à 1819 d’après les archives du Conservatoire national des arts et métiers, op. cit. ; René Tresse, « J. A. Chaptal et l’enseignement technique de 1800 à 1819 », Revue d’histoire des sciences et de leurs applications, 1957, vol. 10, no 2, p. 167-174.
3 Marie-Sophie Corcy, « La politique d’enrichissement des galeries du Conservatoire des arts et métiers (1849-1880) », op. cit.
4 Conseil de perfectionnement, séance du 18 novembre 1841. Archives du Cnam, 2AA/1. Voir les travaux de Marie-Sophie Corcy, « Méthodologie et sources pour une histoire de la constitution du Conservatoire des arts et métiers », séminaire Penser/classer les collections techniques (EHESS/ université Paris Diderot), 2014.
5 Comme indiqué dans l’introduction, nous mentionnons le numéro d’inventaire à la suite de chaque objet ou document cité. Ce numéro est à prendre comme une cote ou une référence permettant le repérage des objets et documents dans la base de données des collections. Ces numéros sont à considérer avec prudence et ne doivent pas faire l’objet d’une « surinterprétation ».
6 Lettre de Théodore Olivier à Victor de Persigny, ministre de l’Intérieur, de l’Agriculture et du Commerce, 28 janvier 1853. Archives du Cnam, 5AA/1.
7 Comité historique des arts et monuments, « Treizième séance. Conservation des monuments », Bulletin archéologique, 1843, vol. 1, p. 254-284.
8 Dictionnaire de la conversation et de la lecture, t. XXIII, Paris, Belin-Mandar, 1835, p. 128.
9 Prospectus de présentation de l’École centrale, 1831.
10 Daisy Bonnard et Liliane Hilaire-Pérez, art. cit.
11 Dominique Vandecasteele, « Musées et développement industriel à Lille », Musée des Arts et Métiers, la revue, février 2010, no 51/52, p. 68-77.
12 Gérard Emptoz, « La collection Alexandre Clair du musée Crozatier : un patrimoine pour l’histoire des techniques », Bulletin de la Société industrielle de Mulhouse, 1992, no 825, p. 73-78.
13 Gérard Emptoz, « Pierre et Alexandre Clair : constructeurs de modèles », op. cit.
14 Louis André, « Les modèles d’Eugène Philippe dans les collections du Conservatoire », op. cit.
15 Louis André, « Jules Digeon, l’âge d’or du modèle réduit », op. cit.
16 Paris Guide. Première partie : La science – l’art, 2e éd., Paris, Librairie internationale, 1867.
17 Lettre d’Arthur Morin au mécanicien C. Mertens, 28 juin 1856. Archives du Cnam, 5AA/4.
18 « Le Conservatoire royal des arts et métiers », Le Magasin pittoresque, 1843, 11e année, no 24, p. 188-191.
19 Conseil de perfectionnement, séance du 3 février 1843. Archives du Cnam, 2AA/1.
20 Conseil de perfectionnement, séance du 14 janvier 1882. Archives du Cnam, 2AA/5.
21 Louis André, « César Nicolas Leblanc et le dessin de machines », Les Cahiers d’histoire du Cnam, 1994, vol. 4, p. 71.
22 Ibid.
23 Marie-Sophie Corcy, « Le journal La Nature et la constitution de la collection de photographie scientifique du Conservatoire des arts et métiers », op. cit.
24 François Caron, « Le Chemin de fer, un système technique », in Girolamo Ramunni (dir.), Toujours plus vite ! Les défis du rail, Paris, musée des Arts et Métiers/La Vie du Rail, 2009, p. 14-27.
25 Bertrand Gille, « La notion de système technique. Essai d’épistémologie technique », Technique et culture, 1979, no 1, p. 8-18 ; id., Histoire des techniques, Paris, Gallimard, coll. « Encyclopédie de la Pléiade », 1978.
26 Karen Bowie (dir.), Les Grandes Gares parisiennes du xixe siècle, Paris, Action artistique de la Ville de Paris, 1994 ; Christiane Scelles, Les Gares, ateliers du voyage. 1837-1937, Paris, Rampart/Desclée de Brouwer, 1993.
27 Sur cette question, l’un des ouvrages de référence pour la première moitié du siècle est : Jacques Payen, La Machine locomotive en France. Des origines au milieu du xixe siècle, Lyon, Presses universitaires de Lyon/Éditions du CNRS, 1988.
28 Bruno Carrière, « Les lents progrès du confort », Rail Passion. Hors série : la légende du PLM. De l’Artère impériale au TGV Méd., août 2011, p. 40-45.
29 Conseil de perfectionnement, séance du 23 janvier 1819. Archives du Cnam, 2AA/1.
30 Conseil de perfectionnement, séance du 19 juin 1829. Archives du Cnam, 2AA/1.
31 Conseil de perfectionnement, séance du 26 avril 1840. Archives du Cnam, 2AA/1.
32 Lettre de Théodore Olivier à Victor de Persigny, ministre de l’Intérieur, de l’Agriculture et du Commerce, 28 janvier 1853. Archives du Cnam, 5AA/1.
33 Marie-Sophie Corcy, « La politique d’enrichissement des galeries du Conservatoire des arts et métiers (1849-1880) », op. cit.
34 Ordonnance du 24 février 1840.
35 Conseil de perfectionnement, séance du 24 janvier 1841. Archives du Cnam, 2AA/1.
36 Chiffres tirés des différentes séances du Conseil de perfectionnement entre 1843 et 1900. Archives du Cnam, 5AA/1 à /7.
37 Lettre de Claude Pouillet à Adolphe Thiers, ministre de l’Agriculture et du Commerce, 10 juin 1833. Archives du Cnam, 5AA/35 ; Inventaire des machines, modèles des Dessins, déposés au Conservatoire, décembre 1841. État des Machines achetées sur le fonds de 50000 francs. Décision du 1er août 1833. Archives nationales, F12/4866.
38 Sur les expositions universelles en général, voir : Christiane Demeulenaere-Douyère et Liliane Hilaire-Pérez (dir.), Les Expositions universelles. Les identités au défi de la modernité, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. « Carnot », 2014 ; Anne-Laure Carré, Liliane Hilaire-Pérez, Marie-Sophie Corcy et Christiane Demeulenaere-Douyère (dir.), Les Expositions universelles en France au xixe siècle. Techniques, publics, patrimoines, Paris, CNRS Éditions, coll. « Alpha », 2012 ; Ana Cardoso de Matos, Irina Gouzévitch, Marta C. Lourenço et Claudine Fontanon (dir.), Expositions universelles. Musées techniques et société industrielle, Paris, Colibri, 2010.
39 Marie-Sophie Corcy, « Exposer l’invention », op. cit.
40 Conseil de perfectionnement, séance du 17 janvier 1851. Archives du Cnam, 2AA/2.
41 Lettre de Théodore Olivier à Eugène Schneider, ministre de l’Agriculture et du Commerce, 8 mars 1851. Archives du Cnam, 5AA/1.
42 Conseil de perfectionnement, séance du 30 octobre 1855. Archives du Cnam, 2AA/3.
43 Lettres d’Arthur Morin à Louis Henri Armand Béhic, ministre de l’Agriculture et du Commerce, 18 octobre 1866 et 19 janvier 1867 ; lettre d’Arthur Morin à Alphonse Forcade Laroquette, ministre de l’Agriculture et du Commerce, 29 janvier 1867. Archives du Cnam, 5AA/7.
44 Lettre d’Arthur Morin à Pierre-Edmond Teisserenc de Bort, ministre du Commerce, 27 janvier 1879. Archives du Cnam, 5AA/10.
45 Lettre d’Arthur Morin à Pierre Magne, ministre de l’Agriculture, du Commerce et des Travaux publics, 14 décembre 1853. Archives du Cnam, 5AA/3 ; lettre d’Arthur Morin à Eugène Schneider, 1er décembre 1865. Archives du Cnam, 5AA/7.
46 Claudine Fontanon, « Le laboratoire expérimental de mécanique », in Michel Le Moël (dir.), op. cit., p. 171-176.
47 Lettre d’Arthur Morin à Ch. Rhoiré, sous-directeur de la construction (service du matériel) à la Compagnie des chemins de fer de l’Ouest, 8 février 1856. Archives du Cnam, 5AA/4.
48 Lettre d’Arthur Morin à Charles Couche, 16 mai 1857. Archives du Cnam, 5AA/4.
49 Lettre d’Arthur Morin à Charles Bricogne, inspecteur principal du matériel de la Compagnie des chemins de fer du Nord, 24 juin 1858. Archives du Cnam, 5AA/5.
50 Lettre d’Arthur Morin au Président du Conseil d’administration de la Compagnie des chemins de fer du Nord, 30 avril 1867. Archives du Cnam, 5AA/7 ; lettre d’Arthur Morin à Leconte, ingénieur en chef du matériel et de la traction au PLM, 9 octobre 1867. Archives du Cnam, 5AA/7.
51 Lettre d’Arthur Morin à François Clément Sauvage, 28 avril 1870. Archives du Cnam, 5AA/8.
52 Lettre d’Arthur Morin à Eugène Rouher, ministre de l’Agriculture, du Commerce et des Travaux publics, 25 avril 1862. Archives du Cnam, 5AA/6.
53 Lettre d’Arthur Morin à Eugène Rouher, ministre de l’Agriculture, du Commerce et des Travaux publics, 30 décembre 1859. Archives du Cnam, 5AA/5.
54 Lettre d’Arthur Morin à Augustin Soye, 18 juin 1866. Archives du Cnam, 5AA/7.
55 Lettre d’Arthur Morin à Antoine-Théodore Bernex, maire de Marseille, 11 février 1867. Archives du Cnam, 5AA/7.
56 État des objets réformés au Conservatoire des arts et métiers à livrer au Domaine au profit de l’État, 1850. Archives du musée des Arts et Métiers, 10°567.
57 Lettre de Théodore Olivier à Victor de Persigny, ministre de l’Intérieur, de l’Agriculture et du Commerce, 9 juin 1853. Archives du Cnam, 5AA/3.
58 Conseil de perfectionnement, séance du 17 février 1842. Archives du Cnam, 2AA/1. Voir supra sur les travaux de la Commission réunie en 1841 pour l’inspection du Conservatoire.
59 Louis André, « César Nicolas Leblanc et le dessin de machines », op. cit.
60 Conseil de perfectionnement, séance du 7 octobre 1848. Archives du Cnam, 5AA/2.
61 « Relevé des services de Mr Campion (Antoine Victorien), ancien Élève de l’École d’Arts et Métiers d’Angers. » Archives nationales, LH/415/55.
62 Lettre de Théodore Olivier à Victor de Persigny, ministre de l’Intérieur, de l’Agriculture et du Commerce, 29 décembre 1852. Archives du Cnam, 5AA/3.
63 Pierre Augustin Eusèbe Girault de Saint-Fargeau, Dictionnaire de la géographie physique et politique de la France, Paris, Renard, 1826 ; Arthur Morin (dir.), Conservatoire des arts et métiers. Catalogue des collections, publié par ordre de M. le ministre de l’Agriculture et du Commerce, 1re éd., Paris, Guiraudet et Jouaust, 1851 ; id. (dir.), Catalogue des collections, publié par ordre de M. le ministre de l’Agriculture et du Commerce et des Travaux publics, 2e éd., Paris, Guiraudet et Jouaust, 1855 ; id. (dir.), Conservatoire impérial des arts et métiers. Catalogue des collections publié par ordre de M. le Ministre de l’Agriculture, du Commerce et des Travaux Publics, 3e éd., Paris, Typographie de Guiraudet, 1859 ; id. (dir.), Conservatoire impérial des arts et métiers. Catalogue des collections publié par ordre de M. le Ministre de l’Agriculture, du Commerce et des Travaux Publics, 4e éd., Paris, P.-A. Bourdier et Cie, 1864 ; id. (dir.), Conservatoire impérial des arts et métiers. Catalogue des collections publié par ordre de M. le Ministre de l’Agriculture et du Commerce, 5e éd., Paris, Viéville et Capiomont, 1870 ; id. (dir.), Conservatoire national des arts et métiers. Catalogue des collections publié par ordre de M. le Ministre de l’Agriculture et du Commerce, 6e éd., Paris, Viéville et Capiomont, 1876 ; Almanach national. Annuaire officiel de la République française, Paris, Berger-Levrault, 1873.
64 Conseil de perfectionnement, séance du 7 novembre 1900. Archives du Cnam, 2AA/7.
65 Catalogue des Modèles exposés dans les Galeries du Conservatoire qui sont présentement ouvertes au Public, [5 mai] 1837, Archives nationales, F12/4866.
66 Séance du 18 novembre 1841. Copie de l’Inventaire Général des objets existant au Conservatoire Royal des Arts & Métiers, fait par la Commission nommée à cet effet Par Mr Le Ministre du Commerce, 1842. Archives nationales, F12/4866.
67 État des objets réformés au Conservatoire des arts et métiers à livrer au Domaine au profit de l’État, 1850. Archives du musée des Arts et Métiers, 10°567.
68 Lettre d’Arthur Morin à Jean-Baptiste Dumas, ministre de l’Agriculture et du Commerce, 12 décembre 1849. Archives du Cnam, 5AA/2.
69 Inventaire des machines, modèles des Dessins, déposés au Conservatoire, décembre 1841. État des Machines achetées sur le fonds de 50 000 francs. Décision du 1er août 1833. Archives nationales, F12/4866, archive citée.
70 Catalogue des Modèles exposés dans les galeries qui sont actuellement ouvertes au Public, 1837.
Archives nationales, F12/4866. Nous avons ajouté les numéros d’inventaire portés ultérieurement.
71 François Jacques Delannoy, Plan du Premier Etage du Conservatoire des Arts et Métiers, tracé d’encre et rehauts de lavis sur papier, avec inscription manuscrite : « Remis dans les Bureaux du Ministre/ Le 8 Germinal an 8e/Delannoy/architecte du conservatoire des arts et métiers », inv. 45341-0028.
72 Alain Mercier, La Deuxième Fille de Cluny, op. cit.
73 « Le Conservatoire royal des arts et métiers », op. cit.
74 Ministère de l’Agriculture et du Commerce. Conservatoire Royal des Arts et Métiers. Matériel. Inventaire des Machines et Dessins déposés au Conservatoire. Décembre 1841. Archives nationales, F12/4866.
75 « Le Conservatoire royal des arts et métiers », op. cit., p. 190.
76 Ibid.
77 Léon Vaudoyer, Plan de l’état actuel du Conservatoire, gravure rehaussée de lavis, 1er octobre 1839. Inv. 45341-0014.
78 Paul Huguet, « Notice historique sur l’ancien prieuré Saint-Martin-des-Champs et sur le Conservatoire des arts et métiers », in Arthur Morin (dir.), Conservatoire des arts et métiers. Catalogue des collections, publié par ordre de M. le ministre de l’Agriculture et du Commerce, 1re éd., Paris, Guiraudet et Jouaust, 1851.
79 Arthur Morin (dir.), Conservatoire des arts et métiers. Catalogue des collections, publié par ordre de M. le ministre de l’Agriculture et du Commerce, op. cit.
80 « Conservatoire des arts et métiers. Échelle de 1 : 1000 », carte, Wagner & Debes, 1881 ; « Conservatoire des arts et métiers. Échelle 1 : 1000 », carte, Wagner & Debes, 1888.
81 Conseil de perfectionnement, séance du 20 avril 1883. Archives du Cnam, 2AA/5.
82 Lettre d’Aimé Laussedat à Jules Roche, ministre du Commerce, 10 octobre 1890. Archives du Cnam, 5AA/19.
83 Lettre du directeur des bâtiments civils et palais nationaux à Aimé Laussedat, 15 décembre 1891, présentée au Conseil de perfectionnement le 5 janvier 1892. Archives du Cnam, 2AA/6.
84 Conseil de perfectionnement, séance du 7 juillet 1897. Archives du Cnam, 2AA/7.
85 « Conservatoire des arts et métiers. Echelle de 1 : 1000 », carte, Wagner & Debes, 1898.
86 Conservatoire national des arts et métiers, Catalogue des collections du Conservatoire national des arts et métiers. Premier fascicule : Mécanique, 8e éd., Paris, E. Bernard et Compagnie, 1905, p. 47.
87 Lionel Dufaux, « Approche historique des collections ferroviaires du Conservatoire des arts et métiers, support de l’enseignement technique », op. cit.
88 Conseil de perfectionnement, séance du 19 novembre 1830. Archives du Cnam, 2AA/1.
89 Conseil de perfectionnement, séance du 24 avril 1849. Archives du Cnam, 2AA/2.
90 Lettre de Joseph Hirsch à Aimé Laussedat, 22 avril 1896. Archives du Cnam, 5AA/21.
91 Conseil de perfectionnement, séance du 8 janvier 1896. Archives du Cnam, 5AA/19.
92 Paul Huguet, « Notice historique sur l’ancien prieuré Saint-Martin-des-Champs et sur le Conservatoire des arts et métiers », op. cit., p. xxxi.
93 Lettre de Théodore Olivier à M. Muller, constructeur de machines à Thann, 25 mai 1853. Archives du Cnam, 5AA/1.
94 François Caron, « Introduction », Histoire, économie et société, 1987, 6e année, no 2, p. 149-154.
95 Conservatoire national des arts et métiers, Catalogue des collections du Conservatoire national des arts et métiers. Premier fascicule : Mécanique, op. cit.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Un constructeur de la France du xxe siècle
La Société Auxiliaire d'Entreprises (SAE) et la naissance de la grande entreprise française de bâtiment (1924-1974)
Pierre Jambard
2008
Ouvriers bretons
Conflits d'usines, conflits identitaires en Bretagne dans les années 1968
Vincent Porhel
2008
L'intrusion balnéaire
Les populations littorales bretonnes et vendéennes face au tourisme (1800-1945)
Johan Vincent
2008
L'individu dans la famille à Rome au ive siècle
D'après l'œuvre d'Ambroise de Milan
Dominique Lhuillier-Martinetti
2008
L'éveil politique de la Savoie
Conflits ordinaires et rivalités nouvelles (1848-1853)
Sylvain Milbach
2008
L'évangélisation des Indiens du Mexique
Impact et réalité de la conquête spirituelle (xvie siècle)
Éric Roulet
2008
Les miroirs du silence
L'éducation des jeunes sourds dans l'Ouest, 1800-1934
Patrick Bourgalais
2008